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Commission des affaires européennes

mercredi 17 décembre 2014

16 h 15

Compte rendu n° 179

Présidence de Mme Danielle Auroi Présidente

I. Examen du rapport d’information de MM. Christophe Caresche et Michel Herbillon sur l’examen annuel de croissance pour 2015 et l’avis de la Commission européenne sur les projets de budgets nationaux pour 2015 

II. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 17 décembre 2014

Présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 16 h 15

I. Examen du rapport d’information de MM. Christophe Caresche et Michel Herbillon sur l’examen annuel de croissance pour 2015 et l’avis de la Commission européenne sur les projets de budgets nationaux pour 2015 

M. Christophe Caresche, co-rapporteur. Nous abordons aujourd’hui deux communications faites par la Commission européenne le 28 novembre dernier : son examen annuel de croissance, qui lance le semestre européen 2015 et dans lequel elle dresse un bilan de la situation économique et sociale et formule ses propositions d’orientation économique pour l’année à venir ; son avis sur les projets de budgets nationaux des États de la zone euro.

Dans son examen annuel de croissance pour 2015, la Commission européenne estime que, si l’Union a surmonté le pic de la crise et que les déséquilibres macroéconomiques y diminuent, la reprise demeure faible et marquée par une inflation très basse, notamment au sein de la zone euro.

Elle propose, en conséquence, de retenir trois axes de politique économique pour 2015 : accroître les investissements, poursuivre les réformes structurelles et mener des politiques budgétaires « responsables et propices à la croissance ».

La Commission européenne présidée par Jean-Claude Juncker semble ainsi vouloir se démarquer de la précédente, en mettant davantage l’accent sur le soutien à la croissance. Cette question est aujourd’hui centrale dans les réflexions de la Commission, comme en témoignent la hiérarchie des priorités retenues, qui met l’accent sur l’investissement avec une implication forte du niveau européen au travers du programme d’investissement, mais également l’insistance de la Commission à appeler les États enregistrant des excédents courants à stimuler leur demande intérieure et son soutien plus appuyé à un ralentissement de la consolidation budgétaire.

Toutefois, une lecture attentive de l’examen annuel de croissance conduit à s’interroger sur la volonté réelle de « changement » de la Commission européenne. Ainsi, on retrouve dans l’examen annuel de croissance pour 2015 les mêmes items que ceux de la précédente Commission européenne.

Il revient donc à la Commission de confirmer sa volonté de donner, comme elle l’affirme, « un nouvel élan » à l’Union et non pas une simple inflexion.

Afin de soutenir l’investissement, la Commission européenne propose de lancer un plan spécifique de 315 milliards d’euros et demande aux États qui disposent d’une marge budgétaire d’investir davantage et à l’ensemble des États de privilégier dans leur budget les dépenses consacrées à la croissance. Ce qui va dans le sens des préconisations de notre commission.

Si on ne peut que se féliciter du lancement d’un plan d’investissement européen, il y a encore, s’agissant de ses modalités de mise en œuvre, beaucoup de questions qui se posent et plusieurs écueils à éviter, comme cela a été évoqué lors de notre audition de ce matin. Se pose tout d’abord la question du montant et du financement du plan, notamment la faiblesse des moyens publics, l’absence de mobilisation financière nouvelle et l’ampleur des effets de levier annoncés. Il est également nécessaire de préciser les conditions de participation des États membres à ce programme. Le schéma retenu serait le suivant, mais demande confirmation : les co-financements ne devraient pas bénéficier de traitement particulier, mais les contributions au capital du Fonds pourraient faire l’objet d’un traitement spécifique dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance : elles seraient comptabilisées dans la dette et le solde publics, mais pourraient être prises en compte au titre des facteurs pertinents (comme pour le Mécanisme européen de stabilité). La gouvernance du Fonds doit enfin être clarifiée. Il convient en particulier de préciser la place des États, en particulier lorsqu’ils participent au capital du Fonds. Certains États plaident pour une logique de juste retour, mais nous pensons qu’il faut garantir une certaine autonomie de décision par rapport aux projets retenus.

La Commission européenne s’est par ailleurs penchée, pour la deuxième fois, sur les projets de budgets des États de la zone euro, en application du two-pack.

Sur les seize États examinés, cinq voient leurs projets de budget jugés conformes au pacte de stabilité et de croissance (Allemagne, Irlande, Luxembourg, Pays-Bas, Slovaquie) et quatre sont considérés comme « globalement conformes » (Estonie, Finlande, Lettonie et Slovénie), tandis que sept présentent un risque de non-conformité : France, Autriche, Belgique, Espagne, Italie, Malte et Portugal.

Pour trois États (la France s’agissant de son déficit public et l’Italie et la Belgique pour leur endettement public) présentant un risque élevé de ne pas respecter les règles posées par le pacte dès 2014, ce qui implique de prendre des mesures dans le cadre de la procédure pour déficit excessif, la Commission européenne a annoncé qu’elle procéderait à un nouvel examen en mars 2015, afin de pouvoir tenir compte des budgets adoptés et des progrès accomplis dans la mise en œuvre de réformes structurelles. C’est une décision plutôt sage, mais qui a fait débat au sein du collège des commissaires.

S’agissant plus particulièrement de la France, la Commission estime que les déficits nominaux et l’ajustement du solde structurel ne sont pas satisfaisants. Ainsi, en tenant compte des mesures supplémentaires présentées le 27 octobre, l’ajustement du solde structurel pour 2015 devrait s’élever, selon la Commission, à 0,3 % du PIB, alors que le Conseil a demandé un ajustement de 0,8 point et que le règlement sur la procédure de déficit excessif prévoit que l’ajustement minimal est de 0,5 point. Le Gouvernement s’est, pour sa part, fermement engagé sur un objectif d’ajustement structurel de 0,5 point. Un amendement a d’ailleurs été déposé par le Gouvernement hier lors de la nouvelle lecture du projet de loi de programmation des finances publiques, précisant que, si l’on neutralise le changement de comptabilisation des crédits d’impôt introduit par le règlement européen du 21 mai 2013, l’ajustement structurel prévu en 2015 s’établit à 0,5 % du produit intérieur brut potentiel. Ce point sera l’objet des discussions avec la Commission européenne jusqu’au mois de mars.

L’Eurogroupe, qui s’est réuni le 8 décembre, a confirmé cette analyse et a jugé, non sans ambiguïté, que « des mesures supplémentaires étaient nécessaires ». Il pourrait y avoir une différence d’appréciation entre l’Eurogroupe et la France, qui considère que ces mesures supplémentaires sont celles annoncées le 27 octobre dernier.

Il apparaît qu’à ce stade, la France voit son analyse de la situation économique en Europe et la nécessité de tout mettre en œuvre pour lutter contre le risque de déflation partagée par les grandes institutions qui ont une vision d’ensemble de l’économie (comme le FMI, l’OCDE, la BCE et la Commission européenne) – on l’a constaté lors de notre déplacement à Bruxelles. Mais, elle souffre, à l’égard de ses partenaires européens, d’un problème de crédibilité qui résulte du fait qu’elle n’a pas respecté le pacte dans le passé, alors qu’elle pouvait le faire. Beaucoup de pays considèrent ainsi que nous sommes des « récidivistes ».

Par conséquent, la France dispose, à ce stade, de peu d’appuis au Conseil. L’Allemagne, les États baltes et du Nord de l’Europe sont traditionnellement partisans de l’orthodoxie budgétaire et les pays du Sud de l’Europe, comme l’Espagne, qui ont été ou sont encore soumis à des programmes d’ajustement, ne comprendraient pas qu’il y ait « deux poids, deux mesures ».

Bref, la position qui sera adoptée en mars est loin d’être stabilisée, comme nos échanges à Bruxelles l’ont montré.

L’approche de la Commission est marquée du sceau du bon sens. Il aurait en effet été risqué de se prononcer dès à présent, sans disposer de tous les éléments nécessaires à l’analyse de la situation française, en particulier le contenu du collectif de fin d’année et de la loi de finances pour 2015, les premières données sur l’exécution 2014 et les mesures pour dynamiser la croissance et l’activité.

J’estime enfin que le contexte très inquiétant de risque de déflation auquel la France doit faire face ainsi que les mesures budgétaires supplémentaires inscrites dans les PLF pour 2014 et 2015 et les réformes engagées par le Gouvernement plaident en faveur d’une adaptation du rythme d’ajustement budgétaire, dans le respect des flexibilités prévues dans le pacte de croissance et de solidarité. Cela pourrait amener la Commission à proposer de reporter les échéances fixées à la France.

M. Michel Herbillon, co-rapporteur. Si nous nous retrouvons avec mon collègue Christophe Caresche sur l’analyse de l’examen annuel de croissance et des orientations de politique économique pour 2015 proposées par la Commission européenne, nous avons en revanche, et c’est bien normal, des points de désaccord qui portent à titre principal sur la stratégie budgétaire et économique du Gouvernement.

Dans notre rapport d’information de juin dernier, j’avais relevé que non seulement la trajectoire présentée par le Gouvernement n’était pas conforme aux exigences du pacte de stabilité et de croissance, mais qu’en outre, il apparaissait clairement que le Gouvernement ne serait pas en mesure de respecter cette trajectoire. Et bien, nous y sommes !

Alors que la France a fait l’objet en mars dernier d’une recommandation de la Commission européenne, qui lui demande de prendre des mesures de correction rapides, afin de respecter les objectifs fixés par le Conseil en matière de déficit public, force est de constater que rien n’a été fait et que le dérapage est manifeste.

La Commission européenne ne s’y trompe pas, puisqu’elle estime dans son avis sur le projet de budget pour 2015 qu’il existe un risque qu’aucune action suivie d’effets ne soit prise en 2014 (puisqu’elle examine 2014 aussi à cette occasion) et que les exigences posées dans le cadre de la procédure pour déficit excessif ne seront pas respectées en l’absence de mesures nouvelles.

La dégradation du déficit nominal de la France entre 2013 et 2014 et les prévisions relatives aux déficits nominaux et structurels pour 2014 et 2015 d’une part et la faiblesse de la croissance et le risque croissant de déflation en France d’autre part montrent l’inefficacité de la politique menée par le Gouvernement. Celle-ci vient d’ailleurs de se voir à nouveau sanctionnée par l’agence de notation Fitch, qui a abaissé la note de la France de « AA+ » à « AA ».

L’avis de la Commission européenne me conforte dans les analyses que j’avais développées dans nos précédents rapports. Ainsi, la Commission européenne estime que – je cite – « peu d’efforts ont été faits » pour assurer la viabilité des finances publiques à long terme. La Commission déplore en particulier que, dans le domaine des retraites, aucune mesure n’est envisagée par le Gouvernement au-delà de la réforme de 2013, qui, souligne-t-elle, « a peu modifié le régime de retraite de la fonction publique ainsi que les autres régimes spéciaux, et ne permettra de combler que la moitié du déficit du système d’ici à 2020 », confirmant ainsi la nécessité, que j’évoquais déjà dans le précédent rapport, d’une véritable réforme des retraites qui devrait notamment reposer sur une mise en cohérence de l’âge de départ en retraite avec l’allongement de la durée de vie, comme cela s’est déjà fait dans tous les pays européens.

Je relève par ailleurs que les 3,6 milliards d’euros d’effort supplémentaire annoncés par le Premier ministre le 27 octobre 2014 ne résultent, à mes yeux, absolument pas d’économies structurelles, mais de révisions de prévisions de recettes, dont on peut douter de la fiabilité, et de nouvelles augmentations d’impôts. Il apparaît en outre que le Gouvernement présente la révision à la baisse du prélèvement sur recettes au profit du budget de l’Union comme une mesure contribuant à l’amélioration du solde structurel, alors qu’il figure expressément dans le document de travail de la Commission européenne analysant le projet de budget de la France que tel ne sera pas le cas.

Les réformes annoncées par le Gouvernement ne sont, enfin, pas à la hauteur des défis que la France doit relever. Ainsi, il existe de sérieux doutes sur l’efficacité et les conséquences en termes d’économies de certaines réformes engagées. Je pense, par exemple, à la réforme territoriale, dont il ne me semble pas qu’elle soit facteur de simplification, de lisibilité et d’économie. Nous, élus franciliens, savons qu’il est ainsi nécessaire d’avoir une balise argos pour nous y retrouver. De même, j’ai quelques doutes sur le fameux le projet de loi pour la croissance et l’activité, qui ne me semble pas devoir répondre aux exigences de compétitivité et d’amélioration du fonctionnement du marché du travail.

Au total, la stratégie du Gouvernement ne me semble pas adaptée aux défis auxquels la France est aujourd’hui confrontée.

Je voterai donc contre la proposition de conclusions présentée à la commission des Affaires européennes.

M. Jacques Myard. Regardons la réalité en face, car cet exercice est totalement illusoire. Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il faut faire des réformes de structure et baisser la dépense publique, mais, comme l’a souligné notre collègue Caresche, nous sommes en voie de récession, les experts du FMI le disent. Il faut adapter la politique à la réalité et cesser de couper dans les dépenses publiques à cette vitesse-là. Je rappelle ainsi que le multiplicateur budgétaire est de 1,6 en France.

Que constate-t-on ? Une baisse drastique des investissements dans toute l’Europe, notamment en France depuis 2000. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas d’investissement « ponctuel », la BPI en fait, le plan de 35 milliards d’euros allait dans le bon sens. Mais, c’est grandement insuffisant. Et le plan Juncker ne va pas régler la question : il ne sera pas mobilisable avant juillet 2015 et il aura un effet homéopathique, puisqu’il représente à peine 1 point du PIB des États de l’Union européenne. Sur ce sujet, nous ne devons pas nous voiler la face : nous sommes dans une impasse et la droite serait au pouvoir, elle serait dans les mêmes contraintes.

Dès lors, comment faire ? Il n’y a pas trente-six solutions. La solution réside dans la monétisation de la dette pour des investissements immédiats. Il faut que les banques centrales fassent des avances aux économies nationales pour créer de la monnaie pour l’investissement. Attention : ce n’est pas de l’inflation, car le système productif est en sous-capacité. C’est ce que font la Réserve fédérale américaine et la Banque d’Angleterre avec leur politique d’assouplissement quantitatif, mais ce que refuse l’Allemagne

Il faudrait dire à l’Allemagne qu’à partir du moment où on est dans une union monétaire avec des économies divergentes, il faut une union de transferts. Ce que refuse l’Allemagne, qui refuse de payer et préfère purger. Elle mène une politique à la Laval. Cette politique est suicidaire au niveau européen et français. Si nous ne procédons pas à une monétisation de la dette, c’est toute la zone euro qui va éclater.

M. Jérôme Lambert. Je tiens à souligner que le point de vue de Jacques Myard est tout à fait digne d’intérêt.

Nous abordons une fois de plus au sein de notre commission un débat portant sur une question essentielle : que pouvons-nous faire au niveau nationale et dans le cadre européen pour sortir d’une spirale déflationniste, qui nous conduit à moins de croissance  ? Nous voyons bien aujourd’hui tous les obstacles qui se dressent devant nous.

J’ai lu avec attention l’avis de la Commission européenne sur le projet de budget français qui nous a été distribué. Je voudrais savoir ce que signifie exactement son dernier paragraphe qui précise que « la Commission réexaminera au début du mois de mars 2015, à la lumière de la version définitive de la loi de finances et du programme détaillé des réformes structurelles annoncé par les autorités, sa position sur les obligations qui incombent à la France au titre du pacte de stabilité et de croissance ». Qu’y a-t-il derrière le « programme détaillé des réformes structurelles annoncé » ? J’ai l’impression que la Commission européenne attend quelque chose de nouveau. Si tel est le cas, quelles nouvelles réformes attend-elle ? Je crains qu’on nous annonce, dans quelques semaines voire dans quelques mois, de nouvelles réformes. S’agit-il d’une nouvelle réforme des retraites, dont parlent certains ministres ?

M. Bernard Deflesselles. Je tiens tout d’abord à féliciter les rapporteurs pour leur excellent travail. J’ai deux questions à leur poser.

S’agissant du plan d’investissement, il y a trois piliers. Tout d’abord, des réformes structurelles – c’est déjà un pilier bancal dans le cas de la France, sans vouloir faire injure à la majorité. Ensuite, une politique budgétaire neutre. Enfin, le troisième pilier, celui qui m’intéresse, c’est le plan d’investissement. Sur les 315 milliards d’euros annoncés, on a une amorce de 5 milliards d’euros seulement en réalité de la part de la Banque européenne d’investissement et une contribution qui n’est pas très claire du budget de l’Union, de l’ordre de 10 milliards d’euros. On nous explique doctement qu’il y aura un effet de levier de 15. Mais de qui se moque-t-on ! Comment va-t-on atteindre 315milliards d’euros au total ?

On dit maintenant que les États doivent participer au Fonds. Très bien. On comprend que, juridiquement, c’est compliqué. Personne n’a tranché le sujet pour l’instant, mais, peut-on avoir des lumières sur l’indulgence de la Commission européenne pourrait avoir en la matière ?

Mme Danielle Auroi, présidente. Quand on demande à l’Europe d’avoir un budget plus que contraint, comment gérer cette quadrature du cercle à laquelle nous sommes confrontés, si ce n’est en lançant un grand emprunt, dont il nous faut trouver la forme ?

M. Christophe Caresche, co-rapporteur. Je suis assez d’accord avec Jaques Myard sur l’analyse de la situation. On a une situation complexe, imprévisible, avec des risques évidents. Donc, il faut être prudent.

Celui qui a donné la base d’une stratégie possible pour l’Europe, c’est Mario Draghi dans son discours prononcé aux États-Unis.

Il faut tout d’abord une politique monétaire offensive. Cela devrait se faire en janvier, même si l’Allemagne y est très hostile. On verra jusqu’où pourra aller la BCE. Son président a déjà mis en place plusieurs outils, malgré l’opposition de l’Allemagne.

Il faut ensuite une impulsion budgétaire reposant sur de l’investissement public. C’est le plan Juncker et la possibilité d’une politique budgétaire neutre en 2015. Nous voyons toujours la Commission européenne comme la prisonnière d’une orthodoxie, mais nous devons reconnaître que si elle a fait des erreurs, elle a aussi progressivement changé de point de vue.

Il faut enfin mener des réformes économiques. C’est un volet important au niveau européen, avec l’approfondissement du marché unique. On peut obtenir des points de croissance supplémentaires en achevant le marché unique. Le projet de loi sur la croissance et l’activité s’inscrit pleinement dans cette logique. C’est aussi un volet important pour les États. De son côté, la France a mis sur la table un certain nombre de réformes avec les lois sur l’organisation territoriale, le projet de loi pour l’activité et la croissance, le projet de loi relatif à la santé et, bientôt, à la fin du premier semestre 2015, des propositions sur la question des seuils sociaux. C’est bien de tout cela dont parle la Commission européenne dans son avis. La question qui va se poser va être celle de l’évaluation de ces réformes. Il y a aujourd’hui une discussion entre la France et la Commission européenne sur le budget, avec des appréciations différentes sur les méthodes de calcul, une discussion sur les réformes et une discussion sur l’investissement.

M. Michel Herbillon, co-rapporteur. Pour répondre à Jérôme Lambert, qui se demande de manière faussement naïve ce que le signataire de l’avis de la Commission européenne, Pierre Moscovici, dont je crois me souvenir qu’il était récemment ministre de l’économie et des finances de notre pays, a voulu dire, je crois que c’est assez clair : il veut dire qu’il faut continuer les réformes structurelles dans notre pays. Point. Ce n’est pas, à mes yeux, la réforme territoriale, telle qu’annoncée, qui entraînera des économies. Loin s’en faut. Elle entraînera, à mes yeux, plus de dépenses et moins de lisibilité. Ce que vise également la Commission européenne, c’est la réforme des retraites, la réforme du marché du travail, etc. Je ne suis pas certain que le projet de loi pour la croissance et l’activité réponde à ces nécessités.

Sur le plan Juncker, les trois piliers sont importants. On n’en sait pas plus sur le plan Juncker que ce qui a été annoncé. L’investissement est essentiel, alors qu’on doit faire face à un risque de déflation.

M. Christophe Caresche, co-rapporteur. La France fait les réformes qu’elle veut. La France ne fait pas des réformes parce que la Commission européenne le lui demande, mais parce que le Gouvernement l’estime nécessaire. Ensuite, sur la méthode, il y a deux possibilités. Soit on mène des réformes de manière très volontariste, voire brusque, au risque de blocages. Soit les réformes sont menées sur plusieurs années, en plusieurs fois. Les réformes ne doivent pas nécessairement faire mal. Ne dégoutons pas non plus les Français des réformes.

S’agissant du plan Juncker, il faut rappeler l’analyse sur laquelle il est fondé et qui me semble juste : il y a beaucoup de liquidités en Europe, le problème est de les drainer vers l’investissement en offrant une rentabilité suffisante. L’argent public mobilisé a pour objectif de réduire le risque et ainsi d’attirer de l’argent privé qui cherche à s’investir. Il est en outre difficile de mobiliser beaucoup d’argent public quand on est en situation d’endettement élevé.

La Commission a ensuite adopté, à l’unanimité moins trois voix, la proposition de conclusions ainsi rédigée :

« La Commission des affaires européennes,

Vu l’article 88-4 de la Constitution,

Vu le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire,

Vu le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, en particulier le titre VIII relatif à la politique économique et monétaire de sa troisième partie,

Vu le règlement (CE) no 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques, modifié par le règlement (CE) no 1056/2005 du Conseil du 27 juin 2005 et par le règlement (UE) no 1175/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011,

Vu le règlement (UE) no 1176/2011 du Parlement européen et du Conseil du 16 novembre 2011 sur la prévention et la correction des déséquilibres macroéconomiques,

Vu le règlement (UE) no 473/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 établissant des dispositions communes pour le suivi et l’évaluation des projets de plans budgétaires et pour la correction des déficits excessifs dans les États membres de la zone euro,

Vu la communication de la Commission européenne, du 28 novembre 2014, au Parlement européen, au Conseil, à la Banque centrale européenne, au Comité économique et social européen, au Comité des régions et à la Banque européenne d’investissement, intitulée « Examen annuel de la croissance 2015 » (COM (2014) 902),

Vu le rapport de la Commission, du 28 novembre 2014, au Parlement européen, au Conseil, à la Banque centrale européenne et au Comité économique et social européen, intitulé « rapport 2015 sur le mécanisme d’alerte » (COM (2014) 904),

Vu la communication de la Commission européenne, du 28 novembre 2014, intitulée « Évaluation globale des projets de plans budgétaires 2015 » (COM (2014) 907),

Vu l’avis de la Commission, du 28 novembre 2014, relatif au projet de plan budgétaire de la France (COM (2014) 8805),

Vu la déclaration finale de l’Eurogroupe du 8 décembre 2014,

1. Prend acte des orientations de politique économique proposées par la Commission européenne pour 2015 : accroître les investissements, poursuivre les réformes structurelles et mener des politiques budgétaires responsables et favorables à la croissance ;

2. Insiste sur la nécessité de relancer l’investissement au sein de l’Union européenne ; salue à cet égard l’initiative prise par la Commission européenne de lancer un plan d’investissement sur trois ans ciblé sur des secteurs stratégiques comme la transition énergétique et les PME ; soutient le principe selon lequel, pour garantir la qualité des projets soutenus, la sélection doit être effectuée de manière indépendante ; souhaite qu’une plus grande ampleur puisse être conférée à ce plan, en particulier en matière d’apports publics européens et nationaux ; considère que les contributions nationales à ce Fonds et les co-financements publics mobilisés au titre de ce plan ne doivent pas être pris en compte dans l’appréciation des soldes publics menée dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance ; estime que la création du Fonds européen d’investissement stratégique doit s’accompagner de la mise en place de mécanismes de contrôle de l’utilisation des fonds ainsi mobilisés ; demande à la Commission européenne d’apporter rapidement des précisions sur les conditions de participation des entités publiques à ce Fonds ainsi que sur sa gouvernance ;

3. Considère que la poursuite des réformes structurelles nécessaire au renforcement de la compétitivité de l’économie européenne doit permettre une croissance durable, reposant sur la préservation des ressources, l’équité sociale et un haut niveau de protection sociale ;

4. Insiste sur la nécessité, dans un contexte économique dégradé, d’adapter le rythme de consolidation budgétaire en fonction des situations nationales et de conduire des politiques budgétaires axées sur le soutien à la croissance ;

5. Considère que le risque de déflation auquel la France doit aujourd’hui faire face constitue une circonstance exceptionnelle telle que définie dans le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire et le règlement no 1466/97 révisé ; rappelle que la France mène une action résolue de modernisation de son économie ; estime en conséquence justifié de procéder à une nouvelle appréciation du rythme d’ajustement des finances publiques françaises. »

II. Examen de textes soumis à l’Assemblée nationale en application de l’article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

Textes « actés »

Aucune observation n’ayant été formulée, la Commission a pris acte des textes suivants :

Ø Commerce extérieur

- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE) no 1387/2013 portant suspension des droits autonomes du tarif douanier commun sur certains produits agricoles et industriels (COM(2014) 705 final – E 9869) ;

- Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (UE) no 1388/2013 portant ouverture et mode de gestion de contingents tarifaires autonomes de l'Union pour certains produits agricoles et industriels (COM(2014) 693 final – E 9894).

Ø Fiscalité

- Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2011/16/UE en ce qui concerne l’échange automatique et obligatoire d’informations dans le domaine fiscal (COM(2013) 348 final – E 8403) ;

- Recommandation de décision du Conseil concernant l’adhésion de la Croatie à la convention du 23 juillet 1990 relative à l’élimination des doubles impositions en cas de correction des bénéfices d’entreprises associées (COM(2013) 586 final – E 8629) ;

- Recommandation de décision du Conseil autorisant la Commission à ouvrir des négociations en vue d’un accord entre l’Union européenne et la Norvège en matière de coopération administrative, de lutte contre la fraude et de recouvrement des créances dans le domaine de la TVA (COM(2014) 53 final RESTREINT UE – E 9085) ;

- Recommandation de décision du Conseil autorisant la Commission à ouvrir des négociations en vue d’un accord entre l’Union européenne et la Fédération de Russie en matière de coopération administrative, de lutte contre la fraude et de recouvrement des créances dans le domaine de la TVA (COM(2014) 59 final RESTREINT UE – E 9087) ;

- Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle (refonte) (COM(2014) 167 final – E 9301).

Ø Politique sociale - Travail

- Recommandation de décision du Conseil autorisant l’ouverture de négociations et établissant des directives de négociation en vue de la 103e session de la conférence internationale du travail concernant un protocole visant à compléter la convention (no 29) sur le travail forcé, 1930, de l’Organisation internationale du travail (COM(2014) 238 final RESTREINT UE – E 9356).

Ø Sécurité alimentaire

- Règlement de la Commission modifiant la directive 2002/46/CE du Parlement européen et du Conseil, pour ce qui concerne l'acide (6S)-5-méthyltétrahydrofolique sous forme de sel de glucosamine, utilisé pour la fabrication de compléments alimentaires (D036044/02 – E 9871) ;

- Règlement (UE) de la Commssion modifiant les annexes II et III du règlement (CE) nº 396/2005 du Parlement européen et du Conseil en ce qui concerne les limites maximales applicables aux résidus d'acétamipride, de chromafénozide, de cyazofamide, de dicamba, de difénoconazole, de fenpyrazamine, de fluazinam, de formétanate, de nicotine, de penconazole, de pymétrozine, de pyraclostrobine, de tau-fluvalinate et de tébuconazole présents dans ou sur certains produits (D033848/03 – E 9895).

Ø Transports

- Proposition de décision du Conseil relative à la signature d'un protocole modifiant l'accord relatif aux transports maritimes entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et le gouvernement de la République populaire de Chine, d'autre part, pour tenir compte de l'adhésion de la République de Croatie à l'Union européenne (COM(2014) 691 final – E 9863) ;

- Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion d'un protocole modifiant l'accord relatif aux transports maritimes entre la Communauté européenne et ses États membres, d'une part, et le gouvernement de la République populaire de Chine, d'autre part, pour tenir compte de l'adhésion de la République de Croatie à l'Union européenne (COM(2014) 692 final – E 9864) ;

- Règlement (UE) de la Commission concernant des spécifications de navigabilité supplémentaires pour un type donné d'exploitation et modifiant le règlement (UE) no 965/2012 (D034508/02 – E 9870) ;

- Règlement (UE) de la Commission modifiant le règlement (UE) no 1178/2011 en ce qui concerne les exigences techniques et les procédures administratives applicables au personnel navigant de l'aviation civile (D035899/03 – E 9906) ;

- Directive UE de la Commission modifiant la directive 96/98/CE du Conseil relative aux équipements marins (D036466/01 – E 9908).

Point B

La Commission a examiné les textes suivants :

Ø Énergie

- Recommandation de décision du Conseil adressant des directives à la Commission pour la négociation d’un accord de coopération dans le domaine des utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire entre la Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom) et le gouvernement de la République de Corée (COM(2014) 533 final RESTREINT UE – E 9649) ;

- Proposition de décision du Conseil adressant à la Commission des directives en vue de la négociation des modifications de la convention sur la sûreté nucléaire (CSN) dans le cadre d’une conférence diplomatique (COM(2014) 566 final RESTREINT UE – E 9657).

« M. Jean-Louis Roumegas. Je souhaiterais m’exprimer sur la liste des textes inscrits en point B qui nous est soumise. Deux d’entre eux concernent le domaine nucléaire. Celui qui nous pose problème est la recommandation de décision du Conseil adressant des directives à la Commission pour la négociation d’un accord de coopération dans le domaine des utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire entre la Communauté européenne de l’énergie atomique et le gouvernement de la République de Corée. Il s’agit en effet de développer l’énergie nucléaire. En cohérence avec la loi relative à la transition énergétique, en tant que représentant du groupe écologiste, je ne peux donc approuver ce texte. »

La Commission a ensuite approuvé ces deux textes.

Procédure d’examen en urgence

Par ailleurs, la Commission a pris acte de la levée de la réserve parlementaire, selon la procédure d’examen en urgence, des textes suivants :

Ø Budget de l’Union européenne

- Projet de budget rectificatif nº 8 au budget général 2014 : état des recettes par section - état des dépenses par section : Section III – Commission (COM(2014) 722 final – E 8487 ANNEXE 8) ;

- Projet de budget général de l'Union européenne pour l'exercice 2015 (COM(2014) 723 final – E 9905) ;

- Lettre rectificative au projet de budget rectificatif nº 6/2014 État général des recettes état des dépenses par section. Section III – Commission Section VIII – Médiateur européen (COM(2014) 730 final – E 9919).

Ø Commerce extérieur

- Proposition de décision du Conseil et de la Commission relative à la position à adopter au nom de l'Union et de la Communauté européenne de l'énergie atomique au sein du Conseil d'association institué par l'accord d'association entre l'Union européenne et la Communauté européenne de l'énergie atomique et leurs États membres, d'une part, et l'Ukraine, d'autre part, en ce qui concerne l'adoption des règlements intérieurs du Conseil d'association et du comité d'association, la création de deux sous-comités et la délégation de certains pouvoirs par le Conseil d'association au comité d'association dans sa configuration "Commerce" (COM(2014) 698 final – E 9868).

Accords tacites de la Commission

En application de la procédure adoptée par la Commission les 23 septembre 2008 (textes antidumping), 29 octobre 2008 (virements de crédits), 28 janvier 2009 (certains projets de décisions de nominations et actes relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) concernant la prolongation, sans changement, de missions de gestion de crise, ou de sanctions diverses, et certaines autres nominations), et 16 octobre 2012 (certaines décisions de mobilisation du fonds européen d’ajustement à la mondialisation), celle-ci a approuvé tacitement les documents suivants :

- Comité consultatif pour la sécurité et la santé sur le lieu du travail - Nomination de Mme Lieve PONNET, membre belge, en remplacement de M. Christian DENEVE, démissionnaire (16284/14 – E 9913) ;

- Conseil de direction du Centre européen pour le développement de la formation professionnelle (CEDEFOP) : Nomination de : - Mme Inta ŠUSTA (LV), membre dans la catégorie des représentants des gouvernements (16232/14 – E 9914) ;

- Décision du Conseil portant nomination d'un membre titulaire, pour l'Allemagne, du conseil de direction de l'Agence européenne pour la sécurité et la santé au travail (15582/14 – E 9923) ;

- Virements de crédits no DEC 40/2014 Section III - Commission - Budget général - Exercice 2014 (DEC 40/2014 – E 9930) ;

- Virement de crédits no DEC 55/2014 à l'intérieur de la section III - Commission - du budget général pour l'exercice 2014 (DEC 55/2014 – E 9931).

Accords tacites de la Commission liés au calendrier d’adoption par le Conseil

La Commission a également pris acte de la levée tacite de la réserve parlementaire, du fait du calendrier des travaux du Conseil, pour les textes suivants :

Ø Pêche

- Proposition de règlement du Conseil établissant, pour 2015, les possibilités de pêche applicables en mer Noire pour certains stocks halieutiques et groupes de stocks halieutiques (COM(2014) 719 final – E 9911).

Ø PESC

- Décision du Conseil concernant des mesures restrictives en raison de la situation au Yémen (15889/14 – E 9920) ;

- Décision du Conseil modifiant la décision 2013/726/PESC à l'appui de la résolution 2118 (2013) du Conseil de sécurité des Nations unies et la décision EC-M-33/Dec 1 du Conseil exécutif de l'OIAC, dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie de l'UE contre la prolifération des armes de destruction massive (16089/14 – E 9921) ;

- Règlement du Conseil concernant des mesures restrictives eu égard à la situation au Yémen (16305/14 – E 9922).

La séance est levée à 17 h 10

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mercredi 17 décembre 2014 à 16 h 20

Présents. - Mme Danielle Auroi, M. Christophe Caresche, M. Bernard Deflesselles, Mme Sandrine Doucet, M. William Dumas, M. Michel Herbillon, M. Jérôme Lambert, M. Jacques Myard, M. Jean-Louis Roumegas

Excusés. - M. Jean-Luc Bleunven, Mme Marietta Karamanli, M. Michel Piron