SOMMAIRE
Présidence de M. Christophe Sirugue
1. Projet de loi de finances pour 2013 seconde partie (suite)
Médias, livre et industries culturelles
Suspension et reprise de la séance
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication
Mme Aurélie Filippetti, ministre
Mme Aurélie Filippetti, ministre
Mme Aurélie Filippetti, ministre
Mme Aurélie Filippetti, ministre
Mme Aurélie Filippetti, ministre
Mission « Médias, livres et industries culturelles »
Compte de concours financiers « avances à l’audiovisuel public »
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à dix heures.)
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie de la loi de finances pour 2013 (n°s 235, 251).
M. le président. Nous abordons l’examen des crédits relatifs aux médias, au livre et aux industries culturelles (n°s 251, annexe 33, 252 tomes V à VII, 254, tome VIII).
La parole est à M. Jean-Marie Beffara, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Jean-Marie Beffara, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Monsieur le président, madame la ministre, mesdames et messieurs les rapporteurs, chers collègues, c’est pour moi un très grand honneur et un immense plaisir de rapporter devant vous, pour la première fois, le budget de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».
Permettez-moi de concentrer mon propos sur quelques éléments importants de cette mission, notamment les crédits liés à l’audiovisuel public et ceux consacrés à la presse. L’ensemble des autres éléments est par ailleurs traité dans mon rapport. Vous le savez, la pédagogie est affaire de répétition. Il me semble donc important de rappeler une fois encore, au moment d’examiner cette mission budgétaire, que la nouvelle majorité doit assumer un lourd héritage, du fait des conséquences de la réforme voulue par l’ancien Président de la République et mise en œuvre par la loi du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision.
Cette loi a en effet illustré de manière probante la méthode de gouvernance brutale de l’ancienne majorité. Celle-ci peut se résumer en trois mots : improvisation, inconséquence et imprudence.
Improvisation tout d’abord, car l’annonce de la suppression de la publicité le 8 janvier 2008 par le Président de la République ressemblait plus à un coup politique qu’à l’expression d’une nouvelle et véritable vision de l’avenir de l’audiovisuel public français. D’ailleurs, rien de très concret ne fut alors proposé par le Président, concernant les moyens destinés au financement de cette suppression.
Inconséquence aussi, parce que la suppression de la publicité après vingt heures sur les chaînes de France Télévisions sonnait le glas du modèle économique de l’audiovisuel public, fondé sur l’articulation entre ressources propres et produit de la redevance audiovisuelle. Cette décision a conduit au bricolage budgétaire qu’était la compensation de la perte de 450 millions d’euros de recettes publicitaires par des crédits du budget de la nation, alors même que la crise s’installait en France et que le déficit se creusait.
Pire encore, ces nouvelles dotations budgétaires de l’État devaient être partiellement compensées par une recette incertaine, la taxe sur le chiffre d’affaires des opérateurs de télécoms, qui n’a d’ailleurs rapporté que 250 millions d’euros contre 450 millions d’euros perdus par la suppression de la publicité après vingt heures. De plus, cette taxe fait aujourd’hui l’objet d’un recours devant la Cour de justice de l’Union européenne et risque de coûter 1,3 milliard d’euros à l’État.
Inconséquence encore au regard des conditions dans lesquelles le précédent gouvernement a autorisé l’arrivée de six nouvelles chaînes sur la Télévision numérique terrestre. Comment est-il possible de ne pas avoir anticipé la dilution des recettes publicitaires, déjà en recul, ou encore l’augmentation du prix des programmes du fait de cette nouvelle concurrence ? De telles décisions ne peuvent qu’entraîner le secteur de l’audiovisuel public dans de grandes difficultés économiques.
Improvisation et inconséquence donc, mais aussi imprudence.
Imprudence, parce que la loi sur l’audiovisuel public a profondément fragilisé le financement de France Télévisions. En pleine crise économique, décider de solliciter le budget général pour financer la suppression de la publicité n’était pas une conduite responsable. En outre, il est incompréhensible d’avoir signé dans ce contexte un nouveau contrat d’objectifs et de moyens comportant une hausse du budget et un augmentation régulière des dotations de l’État. Cela revient en fait à financer à crédit France Télévisions. Cette décision est déconcertante au regard de la situation dégradée du budget de l’État. Après tout, les 600 milliards d’euros de dettes supplémentaires accumulées par le précédent gouvernement sont bien dus à quelque chose ! La réforme du financement de l’audiovisuel ne fait pas exception à la règle. Le Gouvernement et la nouvelle majorité héritent donc bien d’une situation financière dégradée.
Dans ce contexte, je ne peux que saluer le projet de loi de finances pour 2013. Ce budget est courageux, sérieux et responsable. La mission « Médias, livre et industries culturelles » participe pleinement au redressement de nos comptes publics et prend toute sa part de l’effort nécessaire à la maîtrise des dépenses. D’un montant de 1,211 milliard d’euros en autorisations d’engagement et de 1,218 milliard d’euros en crédits de paiement, les enveloppes budgétaires sont respectivement en baisse de 2,9 % et de 3,8 % par rapport à 2012.
Au sein de cette mission, l’action « France Télévisions » du programme 313 « Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique » supporte l’essentiel de cet effort, avec une baisse de 167,5 millions d’euros en crédits de paiement. Cette baisse des dotations budgétaires est partiellement compensée par une hausse du produit de la contribution à l’audiovisuel public, anciennement appelée redevance audiovisuelle.
Le budget de France Télévisions, qui est le plus important du secteur de l’audiovisuel public, dispose sans doute du meilleur potentiel pour mutualiser des moyens et effectuer des économies sans que les objectifs stratégiques de l’entreprise publique soient totalement remis en cause. Comme je viens de l’évoquer, en contrepartie de cette baisse de dotations budgétaires, France Télévisions perçoit une dotation en hausse de 5,2 %, soit 105,1 millions d’euros hors taxe, en provenance du programme 841 du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ». Cette progression de la dotation est bien évidemment possible grâce à l’inscription en première partie de cette loi de finances de l’augmentation de deux euros de la contribution à l’audiovisuel public en plus de l’augmentation de deux euros due à l’indexation de cette contribution sur l’inflation. Néanmoins, l’effort demandé à France Télévisions correspond à une baisse de ses ressources publiques de 85 millions d’euros, soit une diminution de 3,4 % par rapport à 2012.
Ces choix budgétaires, conjugués à la baisse prévisionnelle des recettes publicitaires, conduisent France Télévisions à engager l’exercice budgétaire 2013 avec une prévision de recettes en baisse d’un peu plus de 150 millions d’euros. Cette situation ne sera pas soutenable très longtemps. Il nous faut aujourd’hui rapidement réparer ce qui a été déstructuré et fragilisé par la majorité précédente. Des pistes ont été évoquées, comme l’extension de l’assiette de la contribution à l’audiovisuel public aux résidences secondaires. Je rappelle que cette contribution a été supprimée en 2005. Cette suppression avait alors privé l’audiovisuel public de près de 300 millions d’euros de recettes.
Une autre solution serait d’augmenter encore la contribution à l’audiovisuel public de deux euros. Cette augmentation supplémentaire permettrait de rattraper, même très partiellement, les conséquences de la décision des gouvernements précédents de ne pas revaloriser le montant de la redevance entre 2002 et 2009. J’y suis pour ma part plutôt favorable. Cette ressource supplémentaire permettrait à France Télévisions de prendre sa part à l’effort demandé, en engageant les économies nécessaires, sans pour autant se trouver confronté à des objectifs budgétaires inatteignables.
Le financement de l’audiovisuel public doit faire l’objet d’une réforme profonde. La dépendance aux crédits budgétaires de l’État, introduite par la réforme de 2009 doit s’estomper au profit d’un équilibre retrouvé entre produit de la redevance et ressources propres. C’est la raison pour laquelle je pense que la question de la publicité après vingt heures ne doit pas être hors du périmètre du débat. Les chaînes publiques, sans doute, ne doivent pas être traitées uniformément : j’appelle de mes vœux un débat sans tabou sur cette question. De même, je suis extrêmement étonné que l’entreprise France Télévisions, qui contribue à la production ou la coproduction de nombreux programmes, ne tire aucune ressource de ces productions en terme de droits. Il y a là, sans doute, une piste intéressante pour dégager de nouvelles ressources.
La loi sur l’audiovisuel qui sera présentée au printemps prochain sera l’occasion d’une réflexion et de propositions pour assurer un financement robuste et moderne de l’audiovisuel public. Ce financement devra garantir la pérennité du nouveau modèle économique de l’audiovisuel public, ainsi que la qualité de ses missions et son indépendance. Il nous faudra être sérieux et inventifs pour mener à bien cette tâche.
Enfin, compte tenu des choix budgétaires effectués, et comme madame la ministre l’a annoncé, un avenant au contrat d’objectifs et de moyens permettra d’adapter les projets prévus pour 2013 à ces nouvelles contraintes financières. Dans cette période de transition, le Gouvernement a fait le choix – que je partage – de limiter à 0,3 % en moyenne la baisse des dotations des autres organismes du secteur public de l’audiovisuel : l’Institut national de l’audiovisuel, Arte, Radio France et Audiovisuel extérieur de la France. Cette décision permet notamment de reconnaître les efforts importants engagés par Arte en matière de diversification des publics et des horaires. Arte fait également évoluer son modèle économique en se tournant vers la diffusion par Internet.
Le gouvernement précédent a attaqué l’audiovisuel extérieur de la France avec une grande brutalité. Sous couvert de réformes, l’AEF a été profondément déstabilisé. Je me félicite donc du maintien de sa dotation budgétaire et de la décision du Gouvernement d’abandonner la fusion des rédactions de France 24 et de RFI, permettant ainsi à chacune de ces rédactions de conserver ses spécificités.
J’en viens maintenant à un autre secteur important de cette mission budgétaire : les aides accordées à la presse. Le secteur de la presse se trouve en situation constante de fragilité économique. Dans ce contexte, le programme 180 vise à garantir son indépendance, son pluralisme et sa diffusion sur tout le territoire. Pour cela, une enveloppe de 516,1 millions d’euros en autorisation d’engagement et en crédits de paiement est consacrée à la presse pour 2013.
Néanmoins, la reconduction de cette aide à la presse d’année en année pose question. En dépit d’un niveau élevé d’aides publiques, le secteur de la presse reste chroniquement en difficulté. Il est clair que les aides accordées ne permettent pas aux différents acteurs d’adapter leur modèle économique à la transition numérique et aux transformations des pratiques. Les états généraux de la presse ont été salutaires financièrement pour l’ensemble des acteurs, mais cette aide n’a pas pour autant réglé le problème de fond : celui de structurer un modèle économique viable et efficace sur le long terme. Il est, à mon sens, nécessaire de procéder à une remise à plat du système très hétérogène des aides publiques, de les réorienter de manière efficace vers les dispositifs les plus innovants, les plus porteurs et les plus aptes à faire émerger la presse de demain et d’accorder clairement une priorité en direction de la presse d’information politique et générale. Concernant la distribution, il paraît opportun de réfléchir également à un rééquilibrage des crédits entre transport postal et aide au portage. Nous savons, aujourd’hui, que le portage est un vecteur de diffusion de la presse rapide, efficace et adapté aux attentes des éditeurs de la presse quotidienne nationale et régionale et de ses lecteurs. Il me paraîtrait donc naturel de favoriser son développement. Je partage également les interrogations de certains de mes collègues sur la fiscalité préférentielle attribuée à l’ensemble des titres de presse. Il y a là, me semble-t-il, un chantier qu’il nous faudra ouvrir au cours de l’année 2013. Il est, à mon sens, urgent d’engager une réflexion sur la fiscalité à laquelle est assujettie la presse numérique payante, qui possède un modèle économique encore extrêmement fragile.
Concernant l’actualité récente, je salue l’action entreprise pour sauver le groupe Presstalis qui était en situation de faillite. Nous pouvons, d’ailleurs, légitimement regretter l’inaction du précédent gouvernement qui s’est contenté d’observer, sans doute au nom de la libre concurrence, la guerre économique à laquelle se livraient les deux acteurs de la distribution de presse. Il est anormal que le groupe Presstalis ait dû assumer la distribution des titres quotidiens les moins rentables, pendant que des éditeurs de titres hebdomadaires faisaient jouer la concurrence au profit des Messageries lyonnaises de presse. Il n’est pas normal que le contribuable ait à payer…
Mme Marie-George Buffet. Et les salariés !
M. Jean-Marie Beffara, rapporteur spécial. …la facture des dégâts de cette concurrence contraire à l’esprit coopératif.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour la presse. Très bien !
M. Jean-Marie Beffara, rapporteur spécial. L’État doit être vigilant sur ce point.
Un dernier mot pour évoquer les industries culturelles L’année 2013 sera pour elles une année capitale avec le lancement de « l’acte II de l’exception culturelle ». Les innovations numériques ont renouvelé les contenus culturels et les rapports entre créateurs, industries créatives et usagers. Ces évolutions appellent une adaptation des différents instruments mis en place afin de protéger notre exception culturelle. Cette révolution numérique représente un véritable défi à relever : celui de construire un modèle économique qui puisse à la fois financer durablement la création et permettre sa large diffusion. Pour cela, il me semble important de rompre avec l’approche principalement punitive développée par la précédente majorité. Le rapport de Pierre Lescure sera, en ce sens, une étape importante pour imaginer et façonner un modèle économique adapté aux habitudes, aux technologies et à l’environnement du XXIe siècle.
J’ai débuté mon propos en évoquant l’héritage, permettez-moi de l’achever en évoquant d’un mot l’avenir.
Nous le voyons bien, pour la plupart des secteurs d’activités concernés par cette mission budgétaire, nous sommes à la croisée des chemins. L’irruption du numérique, la multiplication des acteurs, l’évolution des usages nous amènent à penser de nouveaux modèles économiques. Je tiens à saluer, madame la ministre, votre volonté d’engager cette réflexion avec courage, lucidité et détermination. C’est le cas en matière d’audiovisuel public où ce premier budget de la mandature marque votre volonté d’asseoir durablement son financement et de réaffirmer ses missions de service public. C’est le cas également en matière d’aide à la presse où, au-delà de ce budget, il nous faut, aujourd’hui, trouver des réponses structurelles à un univers en profonde mutation. Dans ce cadre la volonté de mettre à contribution les moteurs de recherche pour le financement de la presse en ligne doit être soutenue. C’est, enfin, le cas pour les industries culturelles où votre engagement madame la ministre en faveur de l’acte II de l’exception culturelle doit permettre d’apporter des réponses novatrices et justes pour l’ensemble de l’économie créative. J’appelle, à cette occasion, l’attention sur les attentes fortes exprimées par le secteur de musiques actuelles.
Ce premier budget n’apporte donc pas toutes les réponses, mais il ouvre les perspectives, trace un chemin, qui verra, au cours de l’année 2013, se concrétiser de nombreux engagements.
C’est la raison pour laquelle je suis, avec la commission des finances, favorable à l’adoption des crédits cette mission. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Thierry Braillard. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, pour l’audiovisuel et les avances à l’audiovisuel public.
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, pour l’audiovisuel et les avances à l’audiovisuel public. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, si j’ai abordé plusieurs sujets dans mon rapport, je concentrerai, aujourd’hui, mon propos sur deux thèmes : France Télévisions et le CSA.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire, et mon collègue Beffara l’a rappelé, le bilan de la loi du 5 mars 2009 est désastreux. Il l’est, tout d’abord, pour les finances de l’État, puisque la suppression de la publicité a déjà coûté plus de 600 millions d’euros et devrait allègrement dépasser le milliard et demi d’euros, dans l’hypothèse où l’État se verrait obligé de supprimer et de rembourser la taxe télécoms. La suppression de la publicité a également fragilisé France Télévisions en rendant son financement aléatoire et illisible.
M. Franck Riester. C’est faux !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Le principe d’un financement par des crédits du budget de l’État a, en effet, exposé le groupe à des ajustements systématiques en loi de finances. L’entreprise unique, décidée par la loi de 2009, est un chantier lourd et chronophage, qui est loin d’être achevé et qui impose, à ce stade, des surcoûts à l’entreprise. Le malaise des personnels, sommés de s’adapter à une réorganisation incessante, ne doit pas être sous-estimé. Quant à l’État, il ne sait pas toujours bien ce qu’il attend du groupe. Il multiplie ses missions tout en lui demandant des économies. Il l’appelle à se défaire de la contrainte de l’audience tout en fédérant le public le plus large. Bref, le groupe se trouve, aujourd’hui, dans une situation d’instabilité stratégique et financière incompatible avec la gestion sereine d’une entreprise. Enfin, si, dans un tel contexte, le pilotage de l’entreprise ne saurait être une tâche aisée, je regrette de constater que la direction du groupe n’a pas rempli certains des objectifs de gestion auxquels elle s’est engagée.
M. Benoist Apparu. Quelle attaque en règle !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Pour sortir de cette situation qui n’est satisfaisante ni pour l’État ni pour le groupe, il faut, me semble-t-il, stabiliser tant les missions que le modèle économique du service public. Je pense qu’une réflexion ambitieuse sur le rôle et le périmètre du service public doit précéder la définition des moyens.
M. Franck Riester. On est d’accord !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Près de trente ans après la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le service public vit une véritable crise d’identité. Les chaînes se sont ajoutées les unes aux autres sans réflexion préalable. Les programmes jeunesse sont ainsi éparpillés sur quatre chaînes. Deux chaînes, France 4 et France Ô, s’adressent aux jeunes adultes et les lignes éditoriales de France 2 et France 3 n’apparaissent pas suffisamment distinctes. Plus globalement, on peut s’interroger sur le rôle du service public dans la révolution médiatique que nous vivons actuellement. N’y a-t-il pas des thématiques qu’il devrait traiter de manière plus systématique, comme le développement durable, l’économie, l’Europe ? L’information étant l’une des missions pour lesquelles le service public a une légitimité plus forte que jamais, faut-il définitivement abandonner l’idée d’une chaîne spécifiquement dédiée à l’information ? Et quelle doit être la place des programmes de proximité dans cet ensemble, alors que tous les autres médias locaux sont actuellement en crise ?
Une fois les missions redéfinies et les besoins estimés, se pose la question fondamentale de la nature des ressources : redevance, budget de l’État, ou ressources propres. À mon sens, la priorité est de faire disparaître la dotation budgétaire qui s’avère la ressource la moins fiable qui soit. La redevance est évidemment le mode naturel de financement du service public et son augmentation se fera d’autant plus facilement que les missions dudit service auront été clairement définies.
Je suis également favorable à ce qu’une réflexion soit ouverte sur la relation entre les producteurs et le diffuseur qu’est France Télévisions. J’estime, en effet, que la contribution du groupe au financement de la création doit être proportionnée à ses moyens. Vous n’êtes, de plus, pas sans savoir que le groupe ne dispose d’aucun droit de propriété sur les œuvres qu’il finance. Il doit donc racheter les droits des programmes qu’il a déjà financés pour pouvoir les reprogrammer. Le feuilleton Plus belle la vie a ainsi été racheté deux fois et le contribuable a donc payé deux fois ! La redevance britannique est, certes, plus élevée que la nôtre, mais elle finance la production de programmes qui permettent, ensuite, de dégager d’importantes ressources commerciales, lesquelles représentent plus de 20 % des ressources de la BBC, alors que France Télévisions Distribution est encore en déficit cette année.
Par ailleurs, j’estime qu’il serait dommage de considérer que la question de la place de la publicité sur le service public est définitivement close, comme l’a précisé notre collègue Beffara. La situation actuelle, qui résulte des choix du précédent gouvernement…
M. Benoist Apparu. Ah, ça faisait longtemps !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. …n’est pas dépourvue d’ambiguïté, voire d’hypocrisie. C’est une logique absurde du tout ou rien. Ce qui est acceptable avant vingt heures précises, ne le serait plus du tout après.
M. Benoist Apparu. Changez-le alors !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Et, après vingt heures, vaut-il mieux un volume de publicité contingenté ou un tunnel de programmes courts parrainés sans aucun intérêt pour le téléspectateur ?
M. Franck Riester. C’est vous qui le dites !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Monsieur Riester, je vous remercie pour l’écho ou le chœur tragique, je ne sais ! Le groupe estime, donc, à juste titre que le démarrage des programmes vers vingt heures trente-cinq pose un certain nombre de problèmes. Enfin, est-il logique qu’il n’y ait pas de publicité avant et après certains programmes de divertissement extrêmement commerciaux après vingt heures et de la publicité dans d’autres programmes, tels que ceux destinés aux enfants ? Toutes ces questions méritent d’être soulevées. Je n’y apporte pas de réponse…
M. Rudy Salles. Si, apportez les réponses !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Nous attendons les vôtres, mon cher collègue !
Il est donc essentiel de poser ces questions avant la grande loi sur l’audiovisuel qui nous est annoncée.
En ce qui concerne le CSA, j’avais été troublée, comme de nombreux observateurs et acteurs du secteur, par la précipitation qui a présidé au lancement de six nouvelles chaînes gratuites en haute définition sur la TNT.
M. Benoist Apparu et M. Franck Riester. Mais non !
M. Christian Eckert. Ah, ça vous fait mal !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. J’ai également été assez choquée, de la décision concomitante de «dénumérotation » des chaînes locales. C’est pourquoi, dans le cadre de la réflexion sur l’avenir du CSA, je me suis intéressée à sa politique en matière d’élaboration du paysage audiovisuel hertzien. Le président du CSA, M. Boyon, dans son rapport d’août 2011 sur la TNT, regrettait que la dimension économique du secteur audiovisuel ait trop longtemps été ignorée. C’est, en effet, le principal reproche qui est fait au CSA par les nombreux acteurs que j’ai auditionnés. Mais, au-delà, les nombreuses auditions que j’ai conduites ont mis en évidence un certain nombre de zones d’ombre dans l’action du CSA. La décision de lancer six nouvelles chaînes est dénoncée à la quasi-unanimité, y compris par certains des candidats retenus. Il me semble que cette décision est aussi contestable sur le fond que sur la forme. Je relèverai que les meilleurs arguments contre ce lancement se trouvent dans le rapport de Michel Boyon de 2011, rapport dans lequel il soulignait l’absence d’élasticité du marché publicitaire et la nécessité d’agir avec méthode, sans précipitation, sur la base de priorités clairement définies, elles-mêmes issues d’une analyse du contexte juridique, économique, technologique et culturel actuel. Force est de constater que le CSA n’a pas respecté ces consignes.
M. Christian Eckert. Eh non !
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Dans sa précipitation, il n’a même pas lancé la consultation préalable qu’il devait lancer en application de la loi. Comme l’écrasante majorité des acteurs auditionnés, j’estime qu’on ne peut que redouter les conséquences d’un élargissement de la TNT sur la fragmentation des audiences, le marché publicitaire et le financement de la création. Cette décision n’est pas pertinente du point de vue économique. On aurait pu penser que le CSA s’était appuyé sur l’intérêt du public, mais un sondage publié en 2011 a très clairement montré que les Français appréciaient la TNT, mais n’en demandaient pas davantage.
Je souhaite également insister sur les contradictions de la politique du CSA à l’égard des télévisions locales. Quarante-trois chaînes sont, à ce jour, autorisées par le CSA qui dit mener une action très volontariste, tout en reconnaissant que leur viabilité économique, comme nous le savons tous, est loin d’être garantie. Parallèlement, les mesures en direction de ces chaînes ont été quasi inexistantes ces dernières années. Elles se limitent à la commande d’une étude sur leurs perspectives de développement, suivie d’une consultation publique. Alors que cette consultation a souligné le caractère stratégique de la numérotation, la seule mesure qui est intervenue depuis est la « dénumérotation » des chaînes, décidée sans concertation préalable par le CSA.
Le contrôle du CSA sur les télévisions locales apparaît, par ailleurs, très insuffisant. Aucun bilan annuel n’est publié. C’est d’autant plus regrettable que ces télévisions locales sont très demandeuses d’une clarification et d’une sécurisation de leur financement le plus souvent en provenance des collectivités locales. Deux projets d’avenir sont aujourd’hui en échec. Il s’agit, tout d’abord, de la TNT payante. Là encore, on peut regretter l’absence d’étude d’impact préalable. La dernière relance a été tentée en 2011 : le CSA a sélectionné CFoot, qui a cessé sa diffusion moins d’un an après et un projet de vidéo à la demande qui n’a toujours pas démarré. Comme le reconnaît M. Boyon, la question de l’avenir de la TNT payante et des fréquences qu’elle occupe est donc posée. Quant à la télévision mobile personnelle, c’est un projet mort-né, faute de modèle économique. Le CSA, qui a très peu communiqué sur le sujet, a même repris les fréquences attribuées en 2008. Il en va de même pour la Radio numérique terrestre. Plus grave, me semble-t-il, s’agissant du paysage radiophonique, plusieurs acteurs estiment que les plafonds de concentration fixés par la loi de 1986 ont été dépassés par certains groupes. J’ai donc demandé au CSA les chiffres permettant de vérifier le respect de la loi. Le Conseil a refusé de les transmettre, estimant qu’il n’en avait pas l’obligation. Il juge tout de même souhaitable que le législateur réfléchisse à la pertinence du plafond, ce qui est tout de même assez paradoxal.
Le législateur a besoin de chiffres. La direction générale des medias et des industries culturelles estime elle aussi ne pas être en mesure d’évaluer la pertinence du plafond.
M. le président. Il faudrait aller vers votre conclusion.
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Le CSA a négocié avec les nouvelles chaînes une interdiction de revente limitée à deux ans et demi. Ce système ne résout pas le problème, et, si l’on ne peut plus traiter le cas Bolloré, il est à peu près certain que d’autres cas du même type se présenteront à l’avenir.
On peut également s’interroger sur l’opportunité de maintenir une obligation d’attribution des fréquences disponibles.
En ce qui concerne le rapprochement avec l’ARCEP, la régulation du secteur audiovisuel doit être certes améliorée, mais maintenue dans ses principes. Cela demande en tout cas réflexion.
Dans l’avenir, il me semble que le Parlement doit exercer un pouvoir de contrôle beaucoup plus fort sur le CSA et que la majorité précédente a largement manqué à ses devoirs.
M. Franck Riester. Quelle fixation sur le CSA !
M. Benoist Apparu. La conclusion est intéressante ! Il faut contrôler le CSA, autorité indépendante !
M. le président. Je vous prie de conclure, madame Martinel.
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Ces glapissements sont gênants !
Dans un avenir immédiat, se pose la question de la nomination du président et de deux de ses conseillers puisque leur mandat est terminé. Certains ont proposé qu’il soit prolongé d’un an. Ce serait contraire à la loi et il me semble préférable de nommer trois nouveaux membres par intérim. On peut en discuter mais il est bien de respecter la durée des mandats. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)
Je vous remercie, monsieur Riester, monsieur Apparu, de votre appui constant et de vos réflexions pertinentes qui vont, je n’en doute pas, éclairer le débat. (Sourires.)
M. Franck Riester. Merci !
M. le président. La parole est à M. Michel Françaix, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour la presse.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour la presse. La presse se porte mal, vous le savez, madame la ministre, et les aides de près de 1,2 milliard qui lui sont accordées n’atteignent pas leurs objectifs.
Je comprends que vos efforts se soient concentrés cette année sur l’opération de sauvetage in extremis du système de distribution. Ce sauvetage était indispensable mais, vous le savez mieux que quiconque, c’est sans doute encore insuffisant pour préparer l’avenir.
M. Franck Riester. C’est sûr !
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Pour les années qui viennent, une action volontariste pour réformer le système d’aide me semble nécessaire et je crois en votre capacité de nous proposer des mesures ambitieuses.
Les défauts de la politique de soutien public à la presse, un effort annuel d’environ 1,2 milliard d’euros, demeurent en effet. Le défaut le plus criant du système est son absence de ciblage sur les titres d’information politique générale et les investissements d’avenir.
Laissons parler les chiffres : le ciblage sur les titres d’IPG concerne moins d’un tiers de l’effort financier de l’État, le magazine Télé 7 jours est à lui seul aidé à hauteur d’environ 7,3 millions d’euros quand l’ensemble des diffuseurs de presse ne bénéficient que d’une dotation de 4 millions pour leur modernisation, 46 % de l’avantage tarifaire postal total demeurent attribués à des titres hors IPG, mais surtout, le taux super-réduit de TVA à 2,1 %, qui représente un avantage d’environ 265 millions d’euros, bénéficie à tous les titres, en proportion de leur chiffre d’affaires.
Je propose par conséquent un véritable recentrage de l’effort sur les titres de presse citoyenne.
M. Pascal Deguilhem. Très bien !
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Cette mesure permettrait de financer l’application indispensable d’un taux super-réduit de TVA de 2,10 % sur la presse citoyenne en ligne. Ce recentrage devrait sans doute s’accompagner de contreparties des éditeurs de presse citoyenne, en matière de déontologie, de qualité de l’information, de recours à des journalistes, d’indépendance rédactionnelle, mais aussi de transparence et de contractualisation accrues des aides.
Quant aux aides à l’investissement, réunies dans le nouveau fonds stratégique pour le développement de la presse, lequel ne représente que 33,5 millions d’euros sur un total de 1,2 milliard, ce rapport met en évidence qu’elles sont trop souvent, en réalité, des aides au fonctionnement et que leur ciblage est hautement discutable.
À titre d’exemple, le champ de l’aide au développement de la presse en ligne est particulièrement large, comme le montre la liste des bénéficiaires d’une subvention en 2011, qui comprend entre autres Moto journal, Hôtel & Lodge, Surf Session, et j’en passe.
Enfin, une remise à plat et une rationalisation des aides à la distribution, qui représentent au total plus de 330 millions d’euros, soit plus de 83 % des aides à la presse du programme « Presse », me semblent absolument nécessaires.
Peut-on continuer à consacrer de tels montants pour aider simultanément le transport postal, le portage et la vente au numéro, trois modes de distribution qui se concurrencent, pour constater in fine que la diffusion de la presse dans son ensemble ne cesse de reculer ?
En outre, on ne peut affirmer que le portage est l’avenir de la presse et lui consacrer 37,6 millions d’euros contre 249 millions d’euros pour le postage.
Une réflexion s’impose donc sur ce que peut être la bonne combinaison entre portage, postage et vente au numéro, en fonction du type de presse mais aussi de la zone géographique concernés, et sur la manière la plus intelligente de répartir l’aide publique en fonction de ce qui en ressort.
La situation est en effet plus alarmante que jamais. La crise de la presse s’accélère, avec 30 % de journalistes en moins en trente ans. La chute de la diffusion dément même les hypothèses les plus pessimistes. Elle touche désormais la presse magazine et certains observateurs annoncent une crise majeure de la presse quotidienne régionale, qui avait plutôt mieux résisté que ses consœurs jusqu’à présent.
Que cela nous plaise ou non, il faut en être conscient, le contexte économique, technologique et social de demain sera radicalement différent, et le syndicat de la presse indépendante d’information en ligne a raison de souligner que la presse en ligne va remettre en cause les outils de productions et de distribution, déstabiliser les modèles économiques et ébranler les choix éditoriaux. L’hypothèse actuellement retenue de diminution de la vente au numéro pour les quatre prochaines années est de l’ordre de 20 %.
Pourtant, force est de constater que la presse n’a pas encore trouvé son modèle économique dans l’univers numérique : de gros intermédiaires comme Google et Apple imposent leur loi et le cadre juridique et économique de son développement n’est pas encore mûr, pour ne pas dire inexistant. Comment accepter que la presse d’information citoyenne en ligne demeure pénalisée par un taux de TVA de 19,6 % ?
M. Marcel Rogemont. Excellent !
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. La crise que vit la presse illustre donc parfaitement les propos d’Antonio Gramsci : l’ancien monde ne parvient pas à mourir tandis que le nouveau n’arrive pas à naître.
Dans le contexte de révolution industrielle que vit la presse, il convient de repenser de toute urgence les modalités de l’intervention de l’État. Le rôle des pouvoirs publics doit être non pas d’empêcher mais d’accompagner les mutations irréversibles. Or, depuis vingt ans, l’écosystème continue à orienter l’essentiel de ses ressources vers le maintien de modèles anciens, indépendamment de toute réflexion sur leur finalité, leur pertinence et leur viabilité, avec parfois la complicité de certains éditeurs, dont l’attitude face au changement rappelle étonnamment la formule d’Edgar Faure : l’immobilisme est en marche, et rien ne l’arrêtera !
Combien le contribuable aura-t-il dû débourser pour retarder la mort de France Soir, aidé à hauteur de 50 centimes d’euros par exemplaire vendu pour un prix de vente de 50 centimes ? Combien aura-t-il versé au groupe Hersant Média, aujourd’hui au bord du gouffre ?
Les pouvoirs publics ont également la responsabilité d’accompagner la transition en évitant la rupture. À cet égard, tant que le relais numérique n’est pas assuré, la vente en kiosque demeure incontournable et la chute de Presstalis aurait évidemment constitué une rupture fatale. L’État ne pouvait pas ne pas intervenir, mais, là encore, comment ne pas s’indigner du désastre ? Cela fait bien dix ans que les problèmes sont visibles et la situation dans laquelle nous nous trouvons prévisible. Il faut maintenant en payer le prix, un prix d’autant plus élevé que l’on a trop longtemps mis la poussière sous le tapis et que l’on est aujourd’hui obligé de demander à un État et à des éditeurs plus impécunieux que jamais un effort financier sans précédent.
Non, le secteur de la distribution de la presse ne se prête pas à une concurrence saine et équitable entre deux opérateurs. Oui, Presstalis doit conduire un effort de restructuration majeur, dans un marché dont l’effondrement est inéluctable. Oui, la concurrence entre les deux messageries a fait artificiellement baisser les prix, et les éditeurs doivent aujourd’hui payer un prix plus proche de la réalité des coûts de la distribution car, non, l’État ne pourra pas payer seul.
Quel dommage qu’il ait fallu attendre que Presstalis soit au bord du dépôt de bilan pour feindre de découvrir la situation et tenter d’en tirer les conséquences qui s’imposent. À quoi ont donc servi les états généraux voulus par le Président Nicolas Sarkozy ?
Dès 2009, en effet, le président de l’Autorité de la concurrence, M. Bruno Lasserre, avait rappelé que les conditions d’une concurrence juste n’avaient jamais été remplies sur le marché de la distribution et qu’elles ne le seraient jamais tant que Presstalis aurait à supporter seule les surcoûts spécifiques de la distribution des quotidiens.
Que s’est-il passé depuis ? Les Messageries lyonnaises de presse ont continué, dans les mêmes conditions de concurrence et de pratiques tarifaires, à affaiblir Presstalis, en profitant du transfert de titres de presse magazine et à battre en brèche le principe de solidarité, celui-là même qui justifie que les titres de la presse récréative bénéficient de grandes largesses du contribuable. Aujourd’hui, alors que l’avenir de Presstalis est menacé, les MLP rechignent à contribuer à un effort de péréquation, dont le montant a été établi plutôt a minima.
En outre, alors que l’on est occupé à tenter d’éteindre l’incendie à Presstalis, il ne faut pas perdre de vue que tout cela n’a de sens que s’il reste des diffuseurs au bout de la chaîne. Or ces derniers présentent la particularité d’être à la fois la raison d’être et les grands oubliés de la chaîne de distribution. Leur situation, dont l’amélioration était l’un des objectifs principaux des états généraux de la presse écrite, n’a jamais été aussi mauvaise.
Si l’on peut se féliciter qu’un plan de financement de Presstalis ait pu être proposé in extremis, la question de l’avenir de la distribution de la presse, et de Presstalis en particulier, reste entière. Il faut se rendre à l’évidence, nous ne sommes pas parvenus à faire coexister de manière satisfaisante concurrence, solidarité et régulation dans le secteur de la distribution.
C’est pourquoi deux options s’ouvrent à nous.
La première, idéale, serait de maintenir ou, plutôt, de restaurer le système coopératif et le principe de solidarité. Si tel est le cas, il faudra aller bien au-delà de la péréquation mise en place à l’occasion du plan de sauvetage de Presstalis pour envisager un rapprochement entre les deux messageries.
M. Marcel Rogemont. C’est la solution !
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Si cette solution est retenue, nous ne pourrons plus à terme nous payer le luxe de tester des solutions de compromis et des demi-mesures telles que la création d’une société commune de moyens ou un partage géographique de la distribution entre les deux messageries, solutions qui peuvent être complexes, insuffisantes et parfois incompatibles avec le droit de la concurrence. Il faudra sans doute à terme assumer une fusion, et cette dernière ne pourra pas trop attendre. Elle devra s’accompagner d’une régulation efficace, que la loi du 20 juillet 2011 n’a pas su mettre en place, les éditeurs de presse ayant à l’époque refusé le principe d’une régulation de la distribution par une autorité extérieure. Aujourd’hui, ils seraient prêts à l’accepter.
La seconde option consiste à prendre acte de la mort du principe de solidarité et du divorce entre les quotidiens et les magazines. Je regretterai d’être obligé d’aller au bout de la logique d’éclatement du système coopératif. Rien ne justifierait plus alors le maintien des aides à la presse récréative, en particulier le taux super-réduit de TVA. Son relèvement permettrait alors à l’État de prendre ses responsabilités dans la distribution de la presse d’information politique et générale, celle qui participe de manière directe au débat démocratique et au principe désormais inscrit dans la Constitution du pluralisme.
Ce sont deux priorités que vous partagez, je le sais, madame la ministre : le sauvetage de la presse citoyenne, qui est particulièrement en danger, et notre croyance dans l’avenir de la presse en ligne. C’est la refondation d’un écosystème. Il ne faut pas oublier, mais vous le savez mieux que quiconque, que la justice exige parfois des aides inégalitaires. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)
M. le président. La parole est à Mme Sonia Lagarde, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour le livre et les industries culturelles.
Mme Sonia Lagarde, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation pour le livre et les industries culturelles. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le programme 334 « Livre et industries culturelles » comprend deux actions.
La première, « Livre et lecture » a pour objectif de favoriser le développement de la création littéraire, d’encourager la pratique de la lecture et de soutenir la chaîne du livre. Cette action voit ses crédits de paiements diminuer de 3 %. Le Centre national du livre, qui intervient en soutien de la filière, a obtenu pour 2012 39,6 millions d’euros. Ces fonds proviennent du produit de deux taxes, l’une sur l’édition et l’autre sur les appareils de reprographie. Au produit de ces deux taxes, s’ajoute une subvention de l’État de 2,8 millions au titre des transferts de compétence de soutien à certains organismes professionnels comme l’ADELC, l’association pour le développement de la librairie de création. Pour 2013, ces crédits sont réduits puisque les deux taxes ont été plafonnées à 33,3 millions d’euros. Quant à la subvention, elle ne sera pas reconduite.
En ce qui concerne la Bibliothèque nationale de France, on enregistre une baisse des crédits de 1,1 6 %. Pour la Bibliothèque publique d’information, ils sont stables à 7 millions d’euros.
La seconde action, « Industries culturelles », finance les politiques transversales en faveur du développement du cinéma, du jeu vidéo ou encore de la musique enregistrée, et lutte contre le piratage des œuvres culturelles en ligne par l’intermédiaire d’une autorité publique indépendante, la HADOPI. Les crédits de paiement augmentent globalement de 6,8 % sur cette action : 1,8 million d’euros pour la création musicale et 2,6 millions pour la numérisation des salles, notamment en province, ainsi que le soutien aux manifestations du cinéma d’auteur.
La HADOPI, dont la mission est de protéger les œuvres culturelles d’atteintes aux droits d’auteurs, voit sa subvention diminuer de 27,3 %, et passe de 10,3 millions à 8 millions d’euros.
M. Marcel Rogemont. C’est 3 millions de plus pour la création !
Mme Sonia Lagarde, rapporteure pour avis. Sur ces deux actions, l’État s’est engagé dans une démarche qui consiste à privilégier les actions décentralisées et les crédits déconcentrés.
Je confirme que la commission des affaires culturelles et de l’éducation a adopté les crédits de cette mission.
En tant que rapporteure pour avis, j’ai choisi de consacrer la majeure partie de mon rapport à la situation de la librairie, qui est en première ligne du défi numérique, et à la vente d’ouvrages en ligne. J’ai également voulu consacrer une page de mon rapport à la filière du livre en Nouvelle-Calédonie, d’où je viens, tout en plaidant pour une politique plus dynamique, plus volontariste en vue de favoriser l’accès à la lecture et de soutenir cette filière ainsi que la création littéraire.
L’arrivée du numérique bouleverse l’économie du secteur et remet en cause les normes juridiques de la propriété littéraire et artistique. Une mission a été confiée à Pierre Lescure pour nous permettre de faire face à ces évolutions, l’enjeu étant de s’adapter à cette nouvelle réalité tout en sauvegardant le modèle culturel français.
Exercer le métier de libraire devient difficile si, au livre numérique et à la vente en ligne, on ajoute d’autres facteurs plus structurels puisque liés à l’augmentation des charges. La marge des libraires diminue, ce qui place beaucoup d’entre eux dans une position d’extrême fragilité.
M. Pascal Deguilhem. C’est vrai !
Mme Sonia Lagarde, rapporteure pour avis. Mais tout n’est pas perdu pour autant. En effet, l’expertise, l’accueil du libraire, son professionnalisme, sa passion, la proximité physique sont des atouts que la vente en ligne ne peut offrir. Grâce à leur présence, les libraires participent à l’animation culturelle des régions, particulièrement dans les zones rurales, et les collectivités territoriales ne s’y sont pas trompées en les soutenant. Les librairies sont un maillon indispensable d’une vie culturelle à la française.
Cependant, si la France veut garder son réseau de librairies, exceptionnel par sa densité et sa qualité, la profession doit s’adapter et les pouvoirs publics la soutenir dans cette période de transition. Voici quelques pistes de réflexion.
Il convient, en premier lieu, de rationaliser le dispositif de soutien pour accroître son efficacité. Les aides au secteur ne manquent pas, mais elles sont dispersées, voire redondantes. J’ai été frappée, au cours de mes auditions, par le nombre d’acteurs, de dispositifs et par le manque de lisibilité que cela provoque. Ces acteurs sont multiples : le CNL, les DRAC, l’IFCIC, l’ADELC, les collectivités territoriales. Les dispositifs foisonnent, et paradoxalement, malgré cette multitude d’aides, il est difficile pour un libraire d’obtenir une aide de trésorerie.
M. Marcel Rogemont. Qu’avez-vous fait pendant dix ans ? Il fallait agir !
Mme Sonia Lagarde, rapporteure pour avis. Dans son rapport, Bruno Parent développe l’idée de prélever quelques centimes supplémentaires sur toute commande d’ouvrage passée par Dilicom afin d’abonder un fonds de soutien aux librairies indépendantes. Cette proposition, intéressante à plus d’un titre, permettrait de mettre Amazon dans la boucle de paiement : cette société offre des remises dans lesquelles sont inclus les frais de port, alors que les libraires ont de plus en plus de difficultés à offrir la moindre remise.
M. Pascal Deguilhem. C’est vrai !
Mme Sonia Lagarde, rapporteure. On peut dire qu’il s’agit de concurrence déloyale vis-à-vis de la profession.
M. Pascal Deguilhem. Tout à fait !
Mme Sonia Lagarde, rapporteure pour avis. Les libraires sont favorables à cette proposition, les éditeurs beaucoup moins ; il y a donc un terrain d’entente à trouver sur cette proposition pertinente.
Concernant les soutiens au secteur, et face à la multiplicité d’intervenants et de dispositifs, une coordination est devenue nécessaire. Sans méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales, une meilleure articulation entre l’action de l’État et celle des collectivités permettrait d’apporter plus de cohérence sur tout le territoire et surtout de dresser une cartographie des points de vente. Il serait judicieux d’instituer un chef de file, voire un interlocuteur unique, au travers d’une structure existante afin de mieux répartir les rôles, pour, là encore, plus d’efficacité. Ce qui est certain, c’est que ces différents soutiens doivent faire l’objet d’un suivi.
Quant à la librairie, elle doit devenir un commerce rentable et, en conséquence, s’organiser pour s’adapter à sa zone de chalandise et s’orienter vers une stratégie de l’offre. Il est essentiel que les libraires se regroupent, se fédèrent afin de réaliser leurs achats groupés auprès des distributeurs pour obtenir de meilleures conditions de remise.
D’autre part, une vraie réflexion doit être menée sur la loi du prix du livre, détournée par des opérateurs de vente en ligne qui incluent les frais de livraison dans la remise de 5 %. Cette loi doit mériter son titre : le « prix unique » !
N’oublions pas que 13 % des ventes s’effectuent en ligne aujourd’hui. L’échec du portail « 1001libraires.com » doit être surmonté et une alternative trouvée, afin d’éviter qu’une part de marché croissante ne soit détenue par un opérateur unique, en situation monopolistique.
Enfin, le libraire se doit de répondre à la demande du livre numérique pour élargir son offre et offrir un service supplémentaire, complémentaire au livre physique. Il s’agit bien là de complémentarité.
Savez-vous, mes chers collègues, que 500 millions de livres sont édités chaque année, dont 400 millions sont vendus et 100 millions partent au pilon ? L’essayiste et romancier Pierre Jourde a écrit : « Le vingt-et-unième siècle a sacralisé l’individu et le livre, et c’est lui qui, en même temps, a inventé les méthodes industrielles de leur destruction. »
Saviez-vous que la boîte qui contient les précieuses chaussures qui vous ont fait un clin d’œil totalement irrésistible dans la vitrine d’une boutique, mesdames, ou encore la boîte qui tient au chaud la pizza commandée un soir parce qu’il n’y a plus rien dans le frigo, sont remplies de mots, de poésie, de tranches de vie, d’histoires que tant d’écrivains ont rêvé de partager ? Ce sont des livres tout simplement ! Ils racontent leur histoire dans l’histoire, celle de leur triste fin de vie au fond d’une décharge. Ils vous racontent comment ils ont été broyés, compactés, empilés en balles d’une tonne, vendus au poids, avant d’être mis en boîte, triste jeu de mots !
À défaut de faire parler ces boîtes – je suis tout de même sûre que vous les regarderez différemment –, ces chiffres interpellent. La situation qu’ils décrivent constitue une opportunité pour qui souhaite développer une politique aussi ambitieuse que volontariste de valorisation de la lecture comme vecteur de réussite sociale, d’épanouissement personnel. Pourquoi ne pas s’inspirer de la Nouvelle-Zélande, qui distribue des ouvrages personnalisés, avec le nom du destinataire ? Car ça marche !
Alors, on se prend à rêver : et si seulement deux petits pour cents de ces ouvrages français voués au pilon pouvaient faire le bonheur de celles et ceux qui ne peuvent pas s’offrir de livres ! Quelle belle preuve d’incitation à la lecture nous donnerions ! Il s’agit d’une autre piste de réflexion ; je souhaite que l’on s’y intéresse et que nous tentions, tous ensemble, de la mettre en œuvre. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI et sur de nombreux bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, pour l’action audiovisuelle extérieure.
M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, pour l’action audiovisuelle extérieure. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le nombre de fées qui se sont penchées sur le berceau de l’AEF suffit à montrer à la fois combien nous plaçons d’espoir dans l’audiovisuel extérieur français mais également combien sont grandes les difficultés de sa gestion.
Quatre ans après la création de l’AEF, d’abord sous la forme d’une holding rassemblant l’intégralité des participations de l’État dans RFI et dans France 24 ainsi que 49 % du capital de TV5 Monde, puis en tant que société nationale de programmes, on ne peut que regretter que le résultat ne soit pas à la hauteur de nos attentes. L’histoire de l’AEF a été marquée, on le sait, par une guerre des chefs, doublée d’une rocambolesque affaire d’espionnage, par un climat social détestable et par un projet de fusion des rédactions critiqué mais mené tambour battant par la précédente direction. À cela s’ajoute l’absence de tout contrat d’objectifs et de moyens, malgré l’obligation établie par la loi.
En dépit de ces dysfonctionnements, la société a connu des résultats plutôt remarquables, en tout cas très encourageants, selon les zones géographiques. RFI est très présente en Afrique francophone, où elle est de loin la première radio, toutes chaînes confondues, y compris les chaînes locales. France 24 est aujourd’hui regardée au Maghreb, en Afrique francophone, mais aussi au Proche-Orient. On remarque dans ces régions une progression constante de l’audience ; en dépit d’une certaine imperfection des instruments de mesure, en particulier au Proche-Orient, la comparaison avec les chaînes concurrentes est incontestablement en faveur de France 24, qui a largement bénéficié des événements du Printemps arabe.
Il faut saluer ces résultats, et les personnels de ces sociétés, en espérant que les nouvelles orientations décidées au mois de juillet, à la suite du rapport que vous avez demandé, madame la ministre, avec votre collègue des affaires étrangères, à M. Jean-Paul Cluzel, ancien président de RFI et de Radio France, permettront à l’audiovisuel extérieur français de continuer à se développer sur des bases enfin stabilisées et apaisées.
Deux décisions ont été prises s’agissant de RFI et de France 24 : tout d’abord, l’arrêt de la fusion des rédactions, très critiquée, comme je l’ai dit, et rendue impossible de facto par l’opposition qu’elle suscitait – il faut bien reconnaître qu’elle n’était guère justifiée, compte tenu de la différence entre les métiers de la radio et de la télévision ; ensuite, la poursuite du déménagement de RFI et de Monte Carlo Doualiya à Issy-les-Moulineaux, certes à une plus grande distance de Radio France, mais dans un bâtiment jouxtant celui de France 24, déménagement en partie justifié par la fusion des supports, qui reste, elle, d’actualité.
L’arrêt de la fusion des rédactions repose sur deux arguments principaux. Tout d’abord, malgré la convergence des médias à l’ère du numérique, les métiers de la radio et ceux de la télévision restent, comme je l’ai souligné, distincts. Ensuite, l’identité et les spécificités de RFI et de France 24 constituent un capital précieux, un capital de marque, pourrait-on dire, qu’il faut cultiver dans le paysage audiovisuel mondial.
Quant au déménagement de RFI et de Monte Carlo Doualiya, la poursuite des opérations s’explique notamment par l’investissement de l’État, aujourd’hui supérieur à 24 millions d’euros. Si des problèmes techniques subsistent, je suis persuadé qu’ils pourront être résolus, et la future loi sur l’audiovisuel annoncée par le Gouvernement pourrait être l’occasion de consacrer l’existence de RFI au plan législatif, afin de surmonter une crise d’identité aujourd’hui réelle au sein de cette entité.
J’espère aussi que la nomination consensuelle de Marie-Christine Saragosse, votée à la quasi-unanimité par la commission des affaires culturelles de notre assemblée et à l’unanimité par celle du Sénat, permettra d’apaiser le climat social et d’engager l’entreprise dans une nouvelle dynamique, plus consensuelle et reposant sur des projets mieux compris et mieux acceptés par les équipes. Le professionnalisme de Mme Saragosse est reconnu par tous.
C’est dans ce cadre que sont demandées les dotations pour 2013. Sur ce point, j’avoue être assez réservé, tant les incertitudes restent nombreuses. Il manque toujours un contrat d’objectifs et de moyens : on peut l’espérer pour 2013 mais, en l’état, nous sommes privés de toute visibilité sur la stratégie de l’entreprise et sa trajectoire financière au-delà de l’année prochaine. Le coût du déménagement n’est pas non plus définitif : d’autres travaux pourraient être engagés afin de remédier aux derniers problèmes de nature technique ; je pense en particulier aux studios d’enregistrement. En outre, la société va continuer à payer double loyer tant que le déménagement ne sera pas terminé. Enfin, un important chantier d’harmonisation sociale entre RFI et France 24 s’impose certainement, selon un calendrier et pour un coût encore inconnus.
La stabilisation des dotations pour 2013 n’est donc pas très révélatrice. On peut penser qu’il s’agit, avant tout, d’une sorte de cadeau de bienvenue, un golden hello pour Mme Saragosse, qui le mérite d’ailleurs, mais ici non plus, nous n’avons pas d’indications précises puisqu’elle n’a pas dévoilé de projets.
Je me limiterai donc à quelques rappels : d’une part, les efforts de rationalisation et d’optimisation ne doivent pas remettre en cause la diffusion de RFI et de MCD en ondes courtes et moyennes car il ne faut pas les priver d’une audience importante pour une économie de quelques millions d’euros, et, d’autre part, il faut souligner l’importance de la diffusion de France 24 en arabe vingt-quatre heures sur vingt-quatre, un choix payant avec le Printemps arabe.
M. le président. Il faut conclure.
M. Jean-Jacques Guillet, rapporteur pour avis. Monsieur le président, il faut préserver le développement de France 24 et de RFI. Ces chaînes, soulignons-le, ne sont pas la voix de la France, mais elles assurent une présence de la France et son rayonnement tel que nous le souhaitons. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI et sur certains bancs du groupe SRC.)
M. Franck Riester. Très bien !
M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour l’action audiovisuelle extérieure.
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour l’action audiovisuelle extérieure. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je vais évoquer la situation de TV5 Monde, qui est concernée, elle aussi, par la nouvelle réforme de l’audiovisuel extérieur. Suivant les recommandations formulées par Jean-Paul Cluzel dans son rapport de juin dernier, le Gouvernement a annoncé qu’il souhaitait un changement de portage capitalistique : il s’agit de remplacer la société en charge de l’AEF par France Télévisions comme actionnaire principal. L’insertion de l’AEF dans TV5 Monde avait pourtant un sens en 2008. En effet, la chaîne participe à la mission de promotion de notre patrimoine et de notre langue, domaine qui revient aussi à l’AEF. On pouvait également espérer des coopérations plus intenses entre les chaînes, voire des synergies permettant non seulement de réaliser des économies mais aussi d’apporter une valeur ajoutée.
Quatre ans plus tard, il faut admettre que cette configuration a surtout produit des dysfonctionnements. Tout d’abord, TV5 Monde est devenue une société de second rang, privée de relations directes avec la tutelle française et qui n’a pas été associée à l’élaboration du projet de contrat d’objectifs et de moyens alors qu’elle est directement concernée puisque la dotation française à son budget est incluse dans les crédits prévus pour l’AEF dans son ensemble. On observe aussi que la subvention pour TV5 Monde a tendance à être sanctuarisée au sein du budget de l’AEF, qui ne se sent donc pas responsable du bon usage de ces crédits.
Afin de remédier à ces dysfonctionnements, le rapport de Jean-Paul Cluzel propose de rétablir France Télévisions dans son rôle d’actionnaire de référence. Le Gouvernement a déclaré qu’il faisait sienne cette recommandation, le 12 juillet dernier, sans apporter de précision sur la participation de France Télévisions. Deux hypothèses sont pourtant envisageables : soit rétablir France Télévisions comme actionnaire minoritaire, détenant 49 % des parts comme aujourd’hui l’AEF, soit en faire l’actionnaire majoritaire. Cette dernière solution ferait de TV5 Monde une filiale de France Télévisions. Cela permettrait à la contribution française d’être discutée dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions, dont elle constituerait un volet spécifique. On peut cependant redouter une marginalisation de TV5 Monde au sein du groupe, pour lequel la dimension internationale n’est pas prioritaire. De plus, les autres partenaires francophones pourraient s’opposer à la remise en cause de la clause qui interdit à toute société et à ses filiales de détenir plus de 49 % du capital, afin de sauvegarder l’autonomie et le caractère multilatéral de la chaîne.
S’agissant des crédits pour 2013, la stabilisation prévue comporte un risque majeur pour TV5 Monde : sa direction redoute une impasse financière comprise entre 5 et 6 millions d’euros.
Tout d’abord, TV5 Monde aurait besoin d’une augmentation de crédits de 2 millions d’euros pour maintenir son activité, madame la ministre, en raison de l’accroissement mécanique d’une partie des dépenses.
Il faudrait également reconstituer le budget d’achat des programmes français, amputé de 2 millions d’euros depuis 2007.
À cela s’ajoute le défi de la bascule technologique : TV5 Monde est dans l’obligation de renouveler son dispositif technique de production, post-production et diffusion, pour un surcoût transitoire d’au moins 3 millions d’euros.
Enfin, le minimum garanti sur les ressources publicitaires va prendre fin. Considérant son chiffre d’affaires réel et les faibles perspectives de croissance du marché publicitaire, la direction de la chaîne table sur une perte d’au moins un million d’euros.
TV5 Monde estime qu’elle pourrait absorber environ 2 millions d’euros de surcoûts non reconductibles en 2013, mais il lui manquera donc entre 5 et 6 millions d’euros au total. On pourrait certes envisager de solliciter les autres partenaires francophones, mais ils ont déjà augmenté leurs contributions de plus de 60 % depuis 2008.
Sans effort supplémentaire de la France, il faudra donc soit que la chaîne sorte de certains pays, soit réduire le sous-titrage, soit abandonner une partie des productions propres ou bien amputer les investissements en matière de marketing et de communication. Or cela reviendrait à mettre en péril son développement, voire sa survie. Ce serait d’autant plus dommage que TV5 Monde a obtenu de très beaux résultats depuis sa création, il y a vingt-huit ans. Nous devons lui donner les moyens de continuer à se développer pour le plus grand bien de la France et de la francophonie dans le monde. J’espère, madame la ministre, que vous pourrez nous rassurer sur l’avenir de cette chaîne.
Je ne voudrais pas conclure sans à mon tour, comme l’a fait mon collègue et ami Jean-Jacques Guillet, évoquer Mme Marie-Christine Saragosse, qui a effectué au sein de TV5 Monde un travail absolument remarquable, et je lui souhaite la même réussite dans ses nouvelles fonctions de responsable de l’AEF, couvrant donc RFI et France 24. Elle saura, je n’en doute pas, rétablir un climat de confiance, malheureusement détérioré depuis déjà quelque temps, ce qui est désastreux pour la chaîne. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI et sur certains bancs du groupe SRC.)
M. Marcel Rogemont. À qui la faute ?
M. le président. Nous en venons aux orateurs inscrits.
La parole est à M. Rudy Salles.
M. Rudy Salles. Madame la ministre, j’ai souvenir de l’espoir imprudent que vous aviez émis il y a quelques mois, en commission des affaires culturelles et de l’éducation : l’espoir de sanctuarisation du budget de la culture. Qu’en résulte-t-il dans ce projet de loi de finances ? Un reflux de 2,37 % des crédits affectés à la culture.
M. Marcel Rogemont. La culture, c’est dans une dizaine de jours ! Ici, on traite des médias !
M. Franck Riester. Tout est lié, mon cher collègue !
M. Rudy Salles. Pour ce qui concerne spécifiquement la mission « Médias, livre et industries culturelles », vous avez réduit de 3 % les crédits affectés à la presse, au livre et aux industries culturelles et soustrait 168 millions d’euros de l’enveloppe destinée à l’audiovisuel public. Le choc est donc très rude, la réalité comptable d’autant plus abrupte que le projet politique qui devrait l’accompagner n’apparaît pas. Autrement dit, vous ne pouvez pas vous contenter de nous dire combien. Il faut nous dire pourquoi, comment et qui.
C’est l’objet de mon intervention, sur trois sujets spécifiques :
Tout d’abord, France Télévisions : elle perd 2,3 % par rapport à la loi de finances pour 2012, alors que l’entreprise s’oriente, pour l’an prochain, vers un déficit programmé de 80 millions à 100 millions d’euros. Dans le courant de l’été dernier, vous évoquiez déjà un plan social avec suppression de 500 postes dès 2013, en ne tenant aucun compte de la trajectoire fixée par le contrat d’objectifs et de moyens. Quelles économies sur les coûts de fonctionnement ? Y aura-t-il un plan social ? Poursuivez-vous le projet de mutualiser certains services entre France 2 et France 3 ? Pourquoi n’avoir pas supprimé certaines chaînes de la TNT, qui ne rencontrent pas leur public, pour préserver aux grandes chaînes du service public les moyens de leurs missions de diffusion, de programmation mais aussi de production ? Allez-vous revenir sur la méga-fusion du secteur audiovisuel public ? Quels nouveaux types de synergies envisagez-vous ? Pensez-vous recentrer les missions de service public des chaînes du bouquet public ?
Ma seconde interrogation concerne l’audiovisuel extérieur français. Il reçoit une dotation exactement identique à celle de 2012, avec 314,2 millions d’euros attribués à AEF et à TV5 Monde. Vous nous aviez annoncé une réforme de ce secteur. Mais depuis la démission d’Alain de Pouzilhac, PDG de l’AEF jusqu’au 12 juillet dernier, nous ne savons plus rien. Dans le document qui nous est présenté, il n’est même pas question de projet, mais d’une consolidation « des succès et des acquis, tant sur le plan des audiences que sur le plan financier ». Ces succès sont ceux de vos prédécesseurs. Ma question est simple : quelle est donc votre valeur ajoutée dans ce domaine ? Si nous ne progressons pas sur ce secteur, nous régressons, dans un monde où le rayonnement français est concurrencé par de grandes puissances audio-visuelles et économiques grâce à la multiplication et à la modernisation constante de canaux. Or le rayonnement de la France par la culture est le meilleur vecteur de son développement dans le monde, et il est aussi un service à rendre à bien des peuples, qui sont des peuples frères, en Afrique, mais aussi en Asie ou dans le Pacifique. La France a besoin d’un vrai projet de développement de la francophonie – je rappelle qu’en 2013, nous accueillerons les Jeux mondiaux de la francophonie, à Nice précisément. Aujourd’hui, cette politique n’existe pas. Elle est écartelée, paralysée entre votre ministère et celui des affaires étrangères. Il faudrait donc, sans coût supplémentaire, que votre ministère, qui en a la vocation, s’empare pleinement d’un tel projet.
M. Franck Riester. Eh oui !
M. Rudy Salles. Vous qui êtes une femme de lettres, une amoureuse de la culture française et, j’en suis certain, une passionnée du projet francophone, quelle direction souhaitez-vous lui donner ?
Ma troisième interrogation concerne le dispositif de soutien à la presse. Sur le programme 180, rien de nouveau, si ce n’est la baisse globale des crédits et la baisse des aides attribuées aux opérateurs de transport et de distribution, la SNCF et La Poste. La presse écrite se porte mal, ce n’est pas nouveau. Vous ne faites pas de choix visible qui permettrait de privilégier les uns par rapport aux autres, dans un but d’intérêt général et de maîtrise de la dépense publique. Je parle par exemple des magazines télévisés, nombreux, dont le coût de distribution représente plus que le total des aides à la modernisation sociale de la presse.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Il a tout de même lu mon rapport, c’est bien !
M. Rudy Salles. De même, il n’est pas normal que la presse magazine récréative bénéficie du tiers de l’effort public, alors que la presse quotidienne nationale d’information politique générale, qui se porte mal, ne bénéficie que de 15 % du total de la contribution publique.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Très juste !
M. Rudy Salles. Que comptez-vous entreprendre pour mieux cibler les aides, pour favoriser la modernisation de la presse, notamment par le développement de services de presse en ligne ?
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Ça dure depuis dix ans ! Nous, on va s’en occuper !
M. Rudy Salles. Madame la ministre, devant autant d’incertitudes et d’incohérences, le groupe UDI votera contre ce budget.
M. Franck Riester. Très bien ! Vous avez raison !
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard.
Mme Isabelle Attard. Madame la ministre, monsieur le président, mes chers collègues, dans le cadre imposé d’économies budgétaires, le budget de la mission « Médias, livre et industries culturelles » préserve les éléments essentiels de soutien à l’audiovisuel de proximité, à la presse et à la lecture pour tous.
L’audiovisuel public français, en particulier France Télévisions, a subi ces dernières années les injonctions contradictoires du gouvernement précédent. Ne cédons pas aujourd’hui à la tentation du retour ou de l’accroissement de la publicité sur les chaînes publiques ! Réjouissons-nous et soutenons fermement la volonté politique affichée de libérer la télévision publique de la pression des annonceurs sur sa ligne éditoriale. Aujourd’hui, la réduction importante du budget de France Télévisions a des conséquences considérables sur l’organisation interne de l’entreprise, en particulier sur les rédactions décentralisées. La légère augmentation de la redevance va dans le bon sens… Mais allons plus loin ! Augmentons-la de façon suffisante,…
M. Franck Riester. Vous augmentez les impôts en permanence ! Allons-y, c’est les Français qui payent !
Mme Isabelle Attard. …à l’instar de nos voisins anglais. Le budget de la BBC est en effet deux fois plus important que celui de France Télévisions, la redevance y est d’environ 180 euros et la publicité totalement absente. Je rappelle que la BBC, elle, est financée à 96 % par les contribuables britanniques, qui sont fiers de leur audiovisuel national. Il s’agit donc de faire clairement le choix politique d’avoir un service public de qualité, totalement indépendant des financeurs privés. Voilà le modèle que nous proposons de suivre, en l’adaptant à France Télévisions : un service de proximité digne de la réputation culturelle de la France.
Pour le soutien à la presse, l’ambition de qualité est la même. Le rôle de l’État est en effet essentiel pour maintenir la pluralité. Lorsque la contribution de l’État s’élève à 11 % du chiffre d’affaires annuel de la presse française, soit un milliard d’euros, il est indispensable que ce milliard soutienne la presse de qualité, d’information citoyenne, et ce, quelle que soit sa forme. À ce jour, seule la presse de loisirs est économiquement viable. Lorsqu’il s’agit d’informer, d’enrichir intellectuellement et humainement nos concitoyens, bien sûr que nous sommes favorables à l’impôt. Les conclusions du rapport de Michel Françaix vont dans le bon sens et nous demandons que les aides à la presse, qu’il s’agisse du taux de TVA réduit ou du financement direct, prennent le virage de la modernité.
Les pure players, journaux en ligne qui ne font pas l’objet d’une diffusion papier, ne bénéficient pas aujourd’hui du taux de TVA réduit à 2,1 %. Pourtant, le législateur se doit d’accompagner les évolutions rapides de ce secteur. Envisageons dès maintenant une baisse de la TVA pour l’ensemble de cette presse, afin d’encourager le sens critique d’un nombre encore plus grand de nos citoyens.
Concernant le soutien aux industries culturelles, vous avez, madame la ministre, décidé de réduire le budget de la HADOPI. Cette inflexion va dans le bon sens mais il ne s’agit en l’occurrence que d’une demi-mesure car la structure est maintenue en l’état.
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Ça nous fait sourire !
Mme Martine Faure. Elle a raison !
Mme Isabelle Attard. Nous, les écologistes, proposons de réformer profondément cette haute autorité. Il s’agit, d’une part, de légaliser le partage entre internautes et, d’autre part, d’instaurer une contribution à la création, afin d’établir un nouveau contrat social qui allie droits et devoirs.
Madame la ministre, vous avez, et nous vous en remercions, préservé les éléments essentiels du soutien à la lecture pour tous. Cette politique publique est la garante de la santé du livre et de ses métiers car lire donne envie d’acheter des livres. Ne nous trompons pas d’adversaire : les actions en justice contre le commerce en ligne ayant toutes échoué, trouvons d’autres options comme l’ouverture du marché des bibliothèques aux libraires indépendants, ainsi que le propose notre collègue Brigitte Bourguignon.
Ensemble, actons une bonne fois pour toutes que le livre électronique n’est pas l’ennemi du livre, il n’en est que l’avatar.
Madame la ministre, malgré les inévitables contraintes économiques, cette mission « Média, livres et industries culturelles » que vous nous proposez est fidèle aux valeurs que nous défendons, aussi, nous voterons ce budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Merci.
M. le président. La parole est à M. Thierry Braillard.
M. Thierry Braillard. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, la France ne pouvait plus continuer ainsi, avec une dégradation quotidienne de ses dépenses publiques, un déficit abyssal, un endettement bien trop important. Il est des mesures salutaires comme celle que le Gouvernement a prise de réduire les dépenses publiques de 10 milliards d’euros. Cela demande des efforts à tous et cette mission « Médias, livre et industries culturelles » participe à la maîtrise de la dépense publique.
Aussi, certains opérateurs de la mission voient leur financement diminuer. Les quatre opérateurs que sont la Bibliothèque nationale de France, la Bibliothèque publique d’information, le Centre national du livre et la Cinémathèque appliqueront de légères diminutions d’effectifs.
Il a fallu aussi que certains projets soient redimensionnés car ils avaient été annoncés avec de grands effets de manche par le précédent gouvernement sans en assurer le financement.
En ce qui concerne le programme 180 « Presse », notre groupe souhaite qu’en 2013, la réforme des aides à la presse soit approfondie. L’arrivée en force du numérique et de la presse en ligne, les difficultés récurrentes de la presse quotidienne régionale et de certains titres nationaux montrent bien la nécessité de maintenir le fonds stratégique pour le développement de la presse, ce qui est le cas dans le projet de loi de finances que vous nous présentez.
C’est un effort important puisque la presse française est la plus aidée en Europe et les soutiens doivent être plus opportuns et plus maîtrisés, le cas de France Soir étant l’illustration de ce qu’il ne faut plus faire. Nous soutenons donc votre volonté affichée d’améliorer la gouvernance du fonds et de mieux cibler les aides, le rapport de notre collègue Michel Françaix constituant une excellente base de travail.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Merci !
M. Thierry Braillard. Enfin, nous réaffirmons nos inquiétudes quant à Presstalis, dont la situation n’a cessé de s’aggraver au fil des ans, et dont le quasi dépôt de bilan a été caché, reporté. Il a fallu que vous preniez à bras-le-corps ce délicat dossier.
Si le programme 334 « Livre et les industries culturelles » n’appelle de notre part aucune remarque particulière mais un questionnement sur la concurrence des ventes en ligne, il n’en va pas de même pour le programme 313 « Contribution à l’audiovisuel et à la diversité radiophonique ».
Il faut avoir un peu de mémoire et se souvenir du tour de passe-passe financier opéré par le gouvernement de M. Fillon…
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Cela aurait manqué au rapport !
M. Thierry Braillard. …en matière d’audiovisuel public et privé qui a totalement modifié les règles publicitaires.
Monsieur Rochebloine, je vais vous décrire avec précision ce tour de passe-passe. Eh oui chers collègues, il faut se souvenir de cette décision applicable à compter du 1er janvier 2009 qui a accordé trois minutes de publicité supplémentaires par heure aux chaînes de télévision hertziennes privées…
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Ah vous n’aimez le privé, c’est sûr !
M. Thierry Braillard. …soit 216 minutes par jour de plus alors que dans le même temps la loi du 5 mars 2009 et les textes d’application supprimaient la publicité sur le service public après 20 heures faisant perdre à France Télévision 628 millions d’euros nets en quatre ans, soit 25,12 euros par foyer équipé d’un téléviseur.
M. Christian Kert. Parlez-nous du marché publicitaire !
M. Thierry Braillard. Ce qu’on a pris à l’audiovisuel public, vous l’avez donné à vos amis de l’audiovisuel privé. Voilà la réalité ! C’est un héritage laissé par l’UMP qui s’autorise à nous faire la leçon sur ce thème alors qu’il ferait mieux de balayer devant sa porte.
Le déficit programmé de France Télévisions implique la discussion autour d’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens. C’est la situation dont vous avez hérité, madame la ministre, et c’est la raison pour laquelle nous sommes à vos côtés malgré tout ce qu’on entend sur certains bancs.
Si nous craignons que la création – un très bon savoir-faire du service public – en pâtisse, nous pensons qu’il est temps pour l’audiovisuel public de rendre à France 3 sa vocation régionale, et de s’interroger sur celle de France 4 qui n’est pas satisfaisante.
M. Marcel Rogemont. Pas encore satisfaisante !
M. Thierry Braillard. Enfin, nous pensons qu’il faut également mener une réflexion sur le soutien aux télévisions locales qui doit être amélioré en s’inspirant de ce qui est fait pour les radios associatives.
La méthode employée par le CSA pour l’attribution des nouvelles chaînes en haute définition de la télévision numérique terrestre et le fait d’imposer aux télévisions locales de changer de canal sont deux exemples un peu scandaleux qui illustrent cette nécessité d’amélioration. Le CSA serait-il capable d’imposer à TF1 de prendre le canal 8 ? Je ne le pense pas.
Enfin, le programme 115 « Action audiovisuelle extérieure » est stable par rapport à 2012 et il permettra de financer la réforme de l’AEF avec deux rédactions distinctes pour France 24 et RFI, comme nous l’a confirmé Mme Marie-Christine Saragosse.
Le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste vous apporte donc un entier soutien dans une période où nous devons répondre à l’urgence et au présent tout en préparant l’avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Merci.
M. le président. Je vous propose une suspension de séance de dix minutes.
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures vingt, est reprise à onze heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
La parole est à M. Marcel Rogemont.
M. Marcel Rogemont. Madame la ministre, mes chers collègues, nous voilà réunis pour une nouvelle année budgétaire, avec une nouvelle majorité et une nouvelle ministre, pour un nouveau projet... L’histoire pourrait se bien poursuivre si, parlant de l’audiovisuel public – et pas seulement d’ailleurs – nous n’étions sur un chemin semé d’embûches.
Car c’est l’héritage que nous laisse la précédente majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Pourquoi ? Parce que l’audiovisuel est le mal aimé des dix dernières années.
Comment ne pas rappeler que Mme Albanel était, le 8 janvier 2008, en train de négocier avec M. de Carolis une deuxième coupure publicitaire lorsque, suspension de séance, on lui apprend que M. Sarkozy a décidé la suppression de la publicité après vingt heures ? Il s’agissait alors de faire plaisir à un ami du Fouquet’s, propriétaire de TF1, dont l’action se portait mal.
Comment ne pas rappeler que, supprimant la publicité après vingt heures, la majorité de l’époque a créé une taxe dite télécoms qui rapportait 250 millions, alors que la perte de recettes publicitaires était de 450 millions ?
Nous avions, notamment avec Patrick Bloche, combattu la loi de 2009 sur l’audiovisuel pas à pas, pendant un mois, pour en montrer les fragilités.
M. Franck Riester. Vous nous avez même appris à cuisiner le homard ! (Sourires.)
M. Marcel Rogemont. Une de ces fragilités tenait à cette taxe télécoms, qui finançait non pas la création, comme devraient le faire les opérateurs de télécoms, mais un opérateur public.
Comment ne pas rappeler que la redevance entre 2002 et 2009 – sept années ! – n’a pas été augmentée, ce qui privait le secteur public des moyens de son développement ? Plus encore, en 2005, la suppression de la redevance sur les résidences secondaires privait encore l’audiovisuel public de 300 millions d’euros.
M. Patrick Bloche. Quelle imprudence !
M. Marcel Rogemont. Comment encore ne pas rappeler que, dans un climat difficile pour les dépenses publicitaires, la précédente majorité a invité le CSA à lancer six chaînes supplémentaires sur la TNT ?
Comment ne pas rappeler les nominations de M. de Pouzilhac et de Mme Ockent par M. Sarkozy faisant de l’audiovisuel extérieur de la France une hydre à deux têtes, deux têtes qui n’ont cessé de se chamailler, au mépris de leurs missions ?
Dois-je continuer la litanie de ces décisions prises souvent sur un coin de table élyséen, sans contact avec le ministre concerné ?
Plusieurs députés du groupe SRC. Oui !
M. Marcel Rogemont. Madame la ministre, vous avez fort à faire dans ce contexte.
Catherine Trautmann, alors assise à votre place, il y a quelque temps il est vrai, disait : « Il revient à l’État et au Parlement d’être les garants de la pérennité et de la capacité de développement du service public audiovisuel ».
M. Franck Riester. On en est loin !
M. Marcel Rogemont. Cela n’a pas été le cas ces dernières années, c’est vrai ! Alors nous comptons sur vous, madame la ministre, pour assurer concrètement, par vos décisions et votre action, ce développement que nous attendons – que les Français attendent ! Et notamment les habitants de Febvin-Palfart ! (Sourires.)
L’audiovisuel public gagnerait probablement, surtout en ces périodes difficiles budgétairement, à être financé par une ressource pérenne qui s’ajouterait aux recettes publicitaires.
Bien sûr, la redevance pourrait être cette ressource unique, pérenne, dès lors que son assiette et son taux seraient revus. Nous avons été quelques-uns à proposer que les résidences secondaires, autrefois assujetties à 100 %, le redeviennent, à 50 %. D’autres ont pu penser qu’un élargissement d’assiette pourrait toucher l’ensemble des dispositifs de diffusion des images, prenant en compte la convergence des médias en cours.
Vous avez choisi pour cette année d’ajouter 2 euros à l’augmentation liée à l’inflation, elle-même de 2 euros… Ou pourrait-ce être plus, si vous confirmez la conclusion du débat tenu au Sénat ? Pouvez-vous nous dire la position du Gouvernement : 129, ou 131 euros ? Et pourquoi ne pas nous donner aussi votre avis sur la perspective d’une ressource pérenne et stable pour le financement de l’audiovisuel public, évitant la dépense budgétaire, qui elle est incertaine ?
J’en viens à France Télévisions, qui supporte à elle seule l’essentiel de l’effort demandé à l’audiovisuel public.
M. Franck Riester. Quel scandale !
M. Marcel Rogemont. Probablement est-ce dû au fait que les dépenses de personnel représentent moins de 30 % de ses dépenses, lorsque pour Radio France ce taux est de plus de 70 %. Le résultat est nécessairement une réduction de l’effort budgétaire allant vers la création.
M. Franck Riester. Eh oui !
M. Marcel Rogemont. En 2011, 420 millions ont été consacrés à la production audiovisuelle. Ce plancher devait croître jusqu’à 450 millions en 2013. Qu’en sera-t-il ? Probablement le montant sera-t-il plus proche de 350 millions. Dès lors, c’est autant de petites et moyennes entreprises de production audiovisuelle qui vont connaître des difficultés pour survivre.
Qu’en sera-t-il par ailleurs du financement des films, pour lesquels France Télévisions dépense 60 millions ? Il existe une industrie audiovisuelle et cinématographique en France que nos décisions, gauche et droite confondues, ont réussi à faire naître et prospérer. Il y a là un secteur industriel dont nous avons la responsabilité.
Nul doute que vous en êtes consciente, madame la ministre. N’avez-vous pas obtenu le maintien dans le budget de cette année des avantages fiscaux pour les SOFICA ? Nouveauté, celles-ci ne font plus partie du plafonnement des niches fiscales, désormais établi à 10 000 euros.
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Merci de l’avoir noté !
M. Marcel Rogemont. Je le salue. Cependant nous serons attentifs, lors du prochain budget, afin que la situation de France Télévisions – qui doit faire des économies, c’est certain – soit plus conforme aux responsabilités que nous lui confions. Nécessairement nous devrons élaborer soit un nouveau contrat, soit un avenant.
Pour ce qui est de l’AEF, des propos ont été tenus, des décisions ont été prises : bien sûr quant à sa présidence, mais aussi à la place de TV5 Monde dans l’AEF. Doit-on conclure du fait que France Télévisions prenne la place de l’AEF dans le capital de TV5 Monde que la mise à disposition des programmes de France Télévisions à cette chaîne, reçue, elle, largement à l’international, sera améliorée ?
Un mot sur le CSA. Des murmures se font entendre sur une éventuelle prorogation des mandats de trois de ses neuf membres. Il s’agirait d’attendre la future loi sur l’audiovisuel qui, entre autres, pourrait s’intéresser au rapprochement CSA-ARCEP.
Il serait pour le moins curieux que la première loi votée par cette majorité sur un tel sujet puisse être de conforter le CSA, que nous souhaitons profondément changer et renforcer.
M. Thierry Braillard. Très bien !
M. Marcel Rogemont. Je pense naturellement à la nomination des présidents de l’audiovisuel public et, plus important encore, à leur révocation, par un président de la République qui n’a en l’occurrence aucun compte à rendre de sa décision.
Parallèlement, l’idée circule d’un rapprochement entre le CSA et l’ARCEP, et pourquoi pas d’autres instances de régulation. Tout cela est en chantier. Pouvez-vous nous dire où en est le Gouvernement, si un projet de loi est prévu et quand il pourrait être déposé à l’Assemblée nationale ?
Permettez aussi que j’aborde la question du plafonnement des taxes affectées, qui concerne l’ensemble de votre périmètre ministériel. Ainsi, le Gouvernement a troqué le plafonnement du CNC à 57 millions contre une ponction sur ses réserves de 150 millions.
M. Franck Riester. Quel scandale !
M. Marcel Rogemont. Sommes-nous pour autant assurés qu’il n’y aura pas de plafonnement l’an prochain ? Rien n’est moins sûr. Il est utile de rappeler que le plafonnement détourne le fondement même de l’existence d’une telle taxe. Celle-ci n’a en aucun cas été créée pour financer le budget général. Le faire fragilise nécessairement l’acceptation de notre système de régulation par la Commission européenne.
Par ailleurs, le CNC perçoit depuis le 1er janvier 2010 une taxe sur les services de télévision due par les éditeurs et distributeurs de services de télévision, dont les FAI qui proposent une offre de télévision. Or, en l’état actuel des choses, cette taxe est contournée par Free ou par SFR, qui ont isolé les services de télévision au sein de leurs forfaits triple play, réduisant ainsi fortement la base taxée – on arrive à 1,99 euro pour Free, 3 euros pour SFR !
Pouvons-nous savoir la proposition que la France fait à l’Europe ? Quelle position défendons-nous qui puisse garantir à la fois un rendement suffisant et une équité entre les opérateurs ? Rappelons que le premier projet déposé par le gouvernement précédent a été retoqué par Bruxelles, qui l’estimait contraire aux règles de la concurrence. Dernièrement, le nouveau gouvernement a jeté l’éponge et devrait proposer un nouveau projet. Pourriez-vous nous en dire quelques mots ? Il en va de l’exception culturelle, qui n’est pas toujours très prisée par la Commission.
J’en viens à ma conclusion. Beaucoup d’interrogations demeurent. Beaucoup de décisions souvent courageuses ont été prises. Reste que le budget que vous défendez avec force et vigueur subit une contrainte venue du passé. Je ne peux pas ne pas rappeler qu’en novembre 2007, le Premier ministre de la France avait déclaré être dans un pays au bord de la faillite. Et qu’a-t-il fait ? Rien.
C’est à nous de faire le boulot. Alors bien sûr, ce budget n’est pas celui que nous espérions. Mais nous sommes conscients que le rétablissement des comptes de la France est urgent.
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Ce n’est pas ce que vous disiez les années précédentes !
M. Marcel Rogemont. C’est pourquoi dans ce contexte les députés socialistes seront avec vous, à la fois pour assumer la responsabilité financière et pour ouvrir un nouvel espoir pour l’audiovisuel public. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Franck Riester.
M. Franck Riester. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen en séance publique des crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles » est l’occasion de rappeler à notre assemblée les engagements pris, il y a quelques mois seulement, par François Hollande, au sujet d’une politique qui ne concerne pas seulement les milieux culturels, car la culture et les industries culturelles et de médias, qui représentent presque 4 % de l’emploi et du PIB de notre pays, sont l’investissement d’avenir par excellence à l’heure de l’économie de l’immatériel.
Le 19 janvier dernier, à Nantes, François Hollande le déclarait haut et fort en présence de son futur Premier ministre et de vous-même madame la ministre : « Le budget de la Culture sera sanctuarisé pour tout le quinquennat ». Aujourd’hui, cet engagement de campagne, comme de nombreuses autres promesses, vole en éclat dès le premier budget préparé par votre majorité. En effet, madame la ministre, dès 2013, le budget nominal de votre ministère diminuera de plus de 2 % par rapport à 2012, réduction de crédits qu’aggravera l’érosion monétaire. Ainsi, non seulement la culture n’est pas, contrairement à ce qui avait été annoncé, une priorité de la nouvelle majorité, mais elle fait partie des secteurs les plus durement touchés par la baisse des crédits d’intervention.
Alors, vous ne cessez de renvoyer l’opposition à son bilan. Eh bien, justement, qu’en est-il ? En cinq ans, Nicolas Sarkozy a fait progresser de plus de 20 % le budget du ministère de la culture et de la communication, le montant total de ses missions passant de 6,9 à 8,3 milliards d’euros.
M. Patrick Bloche. C’est faux ! C’est complètement faux !
M. Franck Riester. Ce volontarisme était donc possible, alors même que la crise bancaire et financière mondiale de 2008 avait plongé la France dans la récession dès 2009, mais ce volontarisme supposait des choix.
M. Marcel Rogemont. Vous avez fait le choix de la dette ! Vous avez financé cela par de la dette.
M. Franck Riester. Le choix fait fut de compenser de nouvelles dépenses qui préparent l’avenir – c’est le cas des investissements culturels – par la diminution de dépenses courantes de l’État, au premier chef la masse salariale de la fonction publique.
Les chiffres sont têtus, madame la ministre. Le coup d’arrêt est aujourd’hui spectaculaire si l’on se concentre sur le budget de la mission médias : une baisse de 13 % dès 2013, et, tenez-vous bien, une décrue de plus de 30 % d’ici 2015, soit près du tiers des crédits de la mission ! C’est gravissime.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Vous n’y croyez même pas, à ce que vous dites, cela se voit !
M. Franck Riester. Comment vous, madame la ministre, qui êtes une amoureuse de la culture, comme l’a justement rappelé mon collègue Salles, pouvez-vous accepter une pareille coupe budgétaire ?
M. Marcel Rogemont. Vous êtes devenu socialiste, monsieur Riester ?
M. Franck Riester. Las, il y a encore plus inquiétant. Cette baisse des budgets de votre ministère, car j’y inclus également les budgets de la mission « Culture », en baisse de 4,3 %, est mise en œuvre avant toute réflexion de fond. En ce domaine comme dans tant d’autres, faute d’une stratégie claire, la critique et l’abandon des actions engagées par Nicolas Sarkozy tient lieu de seule politique. Eh oui, madame la ministre, François Hollande n’a pas de politique culturelle. Et ce n’est malheureusement pas votre slogan marketing, « l’acte II de l’exception culturelle », qui masquera cette réalité.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. C’est vrai que Sarko et la culture, ça marchait !
M. Franck Riester. L’abandon du Centre national de la musique, entièrement financé par les acteurs de l’internet, n’est pas une politique culturelle. L’abandon du Centre des réserves des musées de France, financé par les ressources du Louvre Abou Dabi, n’est pas une politique culturelle. L’abandon de la Maison de l’histoire de France, attendue par le grand public, n’est pas une politique culturelle.
Madame la ministre, chaque euro dépensé par les pouvoirs publics dans le Louvre rapporte sept euros à l’économie mondiale. Avec cette rage de détruire ce qui a été fait précédemment, c’est le rôle même de la culture comme investissement d’avenir que vous niez.
M. Patrick Bloche. Rien n’était financé !
M. Franck Riester. Pour la première fois dans l’histoire de la Ve République, je tiens à le souligner, la continuité républicaine en matière de projets culturels est interrompue, cette continuité républicaine qui a conduit chaque président de la République à achever les projets lancés par son prédécesseur, parce que jusqu’à François Hollande, tous les présidents de la République partageaient la conviction que l’investissement dans la culture prépare les emplois, les idées et, d’une certaine façon, la civilisation de demain.
Dans cette saignée budgétaire, c’est particulièrement France Télévisions, M. Rogemont l’a rappelé, qui apparaît comme la variable d’ajustement.
Avant de vouloir pénaliser cette entreprise, regardez en toute objectivité les effets de la réforme de 2009.
La suppression de la publicité en soirée a globalement permis d’améliorer la qualité des programmes et du visionnage en les affranchissant des contraintes de l’audimat.
M. Marcel Rogemont. C’est ridicule !
M. Franck Riester. France Télévisions a par ailleurs renforcé son investissement dans la création.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Un garçon si intelligent, dire des choses pareilles !
M. Franck Riester. En outre, les moyens de France Télévisions ont été, sur la période 2009-2012, confortés à un niveau historiquement élevé. Et dire que la gauche nous accusait, que vous nous accusiez à l’époque, chers collègues, d’être les fossoyeurs de la télévision publique !
M. Patrick Bloche et M. Marcel Rogemont. C’est vrai ! Vous êtes les fossoyeurs de la télévision publique !
M. Franck Riester. Dire que la gauche affirmait sans ambages, que vous affirmiez sans ambages que le compte n’y était pas !
La vérité, c’est que, comme nous nous y étions engagés, nous avons compensé la suppression de la publicité et que cette dotation de l’État a permis de sécuriser les ressources de France Télévisions dans un marché publicitaire de plus en plus dégradé.
M. Marcel Rogemont. Il s’agissait juste de faire plaisir à vos copains !
M. Franck Riester. Maintenant que vous êtes aux responsabilités, vous sabrez de 196 millions d’euros la subvention de l’État à France Télévisions en 2013, alors même que les prévisions de recettes publicitaires sont mauvaises. Pour France Télévisions c’est la double peine !
Pour compenser votre désengagement, vous avez choisi, comme d’habitude, au terme d’une de ces formidables zizanies dont votre gouvernement a le secret, de faire payer la note aux Français : en plus des deux euros d’indexation prévus par la loi, ce ne seront pas moins de quatre euros supplémentaires que nos compatriotes devront payer au titre de la contribution à l’audiovisuel public, sauf si le Premier ministre désavoue une nouvelle fois l’un de ses ministres.
Cette inacceptable hausse de la pression fiscale n’empêchera pourtant pas le groupe de perdre 150 millions d’euros de ressources pour 2013, sans compter que vous ne nous avez pas précisé si l’intégralité de cette hausse de la redevance est destinée uniquement à France Télévisions. Je vous invite d’ailleurs à le faire devant la représentation nationale.
Cette baisse historique des moyens financiers du groupe se fait, et c’est très grave, d’une façon brutale et sans aucune redéfinition, au préalable, des missions de France Télévisions. Les conséquences en seront donc nécessairement dramatiques, M. Rogemont l’a rappelé, à la fois pour l’investissement dans la création et pour l’emploi, car ce sont les deux seules variables d’ajustement possibles à court terme.
J’ajoute que, contrairement à ce qu’affirme Mme Martinel, des efforts considérables ont été fournis par la direction de France Télévisions et par l’entreprise ; je veux les saluer. Je pense notamment à la fusion juridique des différentes entités du groupe, au développement d’une véritable stratégie numérique, à la mutualisation des achats ou encore, plus récemment, au rapprochement des rédactions avec le projet « Info 2015 ».
France Télévisions doit également poursuivre la réorganisation de ses grilles de programmes dans ce cadre financier restreint. Je propose à titre personnel de circonscrire la diffusion des questions d’actualité au Gouvernement à la chaîne parlementaire LCP-Assemblée nationale…
M. Patrick Bloche. C’est honteux !
M. Franck Riester. …qui, je le rappelle, est désormais, tout comme France 3, accessible gratuitement par tous et partout en France. Cela aurait un double avantage : d’une part, renforcer la spécificité parlementaire de LCP et, d’autre part, réorganiser la grille de France 3 pour compléter les programmes de mission de service public et optimiser les ressources publicitaires.
M. Patrick Bloche. Ce serait une régression !
M. Franck Riester. L’absence de politique de votre gouvernement s’illustre également en matière d’industries culturelles. Alors que la transition numérique met au défi ces secteurs et impose le volontarisme politique, vous naviguez, là encore, à vue.
D’une part, la baisse du budget de la HADOPI envoie un très mauvais signal dans la lutte contre le téléchargement illégal, même si je salue votre volonté de dialogue avec ladite Haute autorité pour atteindre le seuil-plancher de neuf millions d’euros sans lequel la riposte graduée serait vidée de son sens.
Ce mécanisme, copié par de nombreux pays,…
M. Patrick Bloche. Par personne !
M. Franck Riester. …fonctionne : le téléchargement illégal a chuté plus rapidement en France qu’ailleurs et nos compatriotes se réorientent progressivement vers des contenus culturels en ligne licites. Oui, les comportements changent, mesdames et messieurs de la majorité,…
M. Patrick Bloche. La HADOPI n’y est pour rien !
M. Franck Riester. …et ce sans nul encombrement des tribunaux ni sanctions judiciaires lourdes, contrairement aux pronostics de certains oiseaux de mauvais augure que je vois ici, dans l’hémicycle.
Continuer d’opposer le développement des offres légales et l’action de la HADOPI est une hérésie, car c’est d’abord en protégeant l’écosystème des offres légales de cette concurrence déloyale qu’est le piratage que nous assurerons le financement de la création. Toute autre décision, tout retour en arrière serait ravageur pour ces filières et tous ceux qui y travaillent.
D’autre part, vous laissez le Centre national du cinéma et de l’image animée, M. Rogemont a eu raison de le rappeler, se faire ponctionner 150 millions d’euros sur sa trésorerie. Il faut donc renoncer à la numérisation des films du patrimoine cinématographique, tandis que la filière musicale est sacrifiée. Ainsi, l’abandon du projet du Centre national de la musique, au motif d’arguments infondés, trahit vos engagements ainsi que ceux de François Hollande.
Quant au crédit d’impôt phonographique, outil si essentiel pour toutes les petites entreprises de production, sa prorogation dans le projet de loi de finances avait tout simplement été oubliée par le Gouvernement.
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Non, pas du tout !
M. Franck Riester. Il a fallu qu’avec mon collègue Patrice Martin-Lalande nous déposions un amendement pour qu’un amendement gouvernemental de dernière minute corrige cette faute politique.
Enfin, dans un contexte de mutation numérique, vous faites le choix de réduire de manière sensible le montant des aides à la presse, qui passera de 421 millions d’euros en 2012 à 396 millions d’euros en 2013, soit une diminution de 6 %. De ce fait, vous cassez la dynamique des États généraux de la presse écrite.
La mise en place d’un taux de TVA réduit sur la presse en ligne est également un combat majeur à mener. Si vous vous y êtes déclarée favorable, madame la ministre, je regrette que l’amendement que j’ai déposé en ce sens avec un certain nombre de mes collègues n’ait, lui, pas reçu un avis favorable du Gouvernement.
En définitive, ce premier budget du quinquennat socialiste aura le mérite de faire tomber les masques : nulle sanctuarisation de la culture comme promis mais, au contraire, des coupes budgétaires n’obéissant à aucune stratégie…
M. Marcel Rogemont. Votre stratégie, c’est la dette !
M. Franck Riester. …et dont 2013 n’est que la première étape.
Nous ne souscrivons pas à cette politique dangereuse. C’est pourquoi le groupe UMP votera contre les crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis. Quelle surprise !
M. le président. La parole est à M. Michel Pouzol.
M. Michel Pouzol. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si aujourd’hui nous vivons, c’est une banalité de le dire, dans une société de l’information permanente, où l’instantanéité et l’anecdote prennent le pas sur la mise en perspective et l’analyse, la presse écrite tient toujours un rôle important dans notre pays et représente aussi une part importante des aides de l’État.
Albert Camus disait qu’un journal est la conscience d’une nation. Voilà bien longtemps que nous avons fait le choix collectif de ne pas laisser ce sujet en jachère. Aujourd’hui moins qu’hier, ajouterai-je à la lumière de ce projet de budget.
Pourtant, face à l’évolution des techniques d’information, de la vitesse de diffusion de l’information brute aidée par de nouveaux supports, force est de constater que ni les modes d’aide à la presse écrite, ni ses nécessaires adaptations n’ont été réellement engagées ces dix dernières années.
La presse est en pleine mutation : une mutation technologique avec la démocratisation des nouveaux outils de lecture électroniques, une mutation sociétale avec l’explosion de la presse loisir et le recul, jour après jour, de la presse d’opinion et d’information, une mutation financière, enfin, avec l’effondrement de modèles économiques obsolètes. Ces mutations ne se sont cependant pas accompagnées d’une mutation de même ampleur des aides accordées à ce secteur. Ce que nous avons le devoir de mettre en place aujourd’hui, c’est une politique de refondation qui assurerait la viabilité d’un modèle économique, diversifié, tant dans ses modes de production que dans ses moyens de diffusion.
À bien y regarder, le soutien à la presse écrite, c’est, pour le lecteur, la condition de la liberté de choix, quels que soient son territoire et ses opinions, c’est donc un gage de cohésion républicaine.
Dans ce contexte très particulier, les propositions budgétaires qui nous sont présentées cette année sont autant des mesures de sauvetage que des mesures d’urgence. La situation reste particulièrement préoccupante et, dans ce domaine comme dans bien d’autres, nous devons faire face à un héritage calamiteux.
Si les États généraux de la presse convoqués par l’ancienne majorité avaient posé un bon diagnostic, force est de constater qu’ils n’ont pas permis d’apporter des réponses à la hauteur de la crise du secteur. Que ce soit sur les aides directes ou indirectes, sur le soutien de la presse en ligne ou sur le portage, la montagne a accouché, une nouvelle fois, d’une souris, laissant la presse écrite dépérir lentement.
M. Marcel Rogemont. Eh oui ! Écoutez, monsieur Riester !
M. Franck Riester. Parlons de votre budget, monsieur Rogemont !
M. Michel Pouzol. À nous donc de répondre, encore une fois, à cette situation de crise, tout en posant les jalons d’une politique ambitieuse, imaginative et refondatrice. En cette matière aussi, cela changera un peu.
Beaumarchais, en homme de lettres, mais aussi en journaliste de son temps, disait que « la difficulté de réussir ne fait qu’ajouter à la nécessité d’entreprendre » Vous l’aurez compris, c’est ce que, dans cette assemblée, nous avons décidé de faire depuis plusieurs mois. Je parle en tout cas de la nouvelle majorité.
Entreprendre pour quoi ? Entreprendre pour repenser les aides à la presse écrite dans leur ensemble dans une logique de meilleure répartition des moyens.
Il est en effet paradoxal que notre presse, aujourd’hui parmi les plus aidées au monde, traverse une crise récurrente sans précédent. Si l’on rapporte les aides au nombre de numéros vendus, elles n’ont même jamais été aussi importantes que cette année ; les aides de l’État sont à l’origine de 11 % du chiffre d’affaires du secteur et, pourtant, la presse quotidienne est à l’agonie.
Dans ce contexte, il nous faudra bien faire ce qui n’a pas été fait jusqu’à présent, c’est-à-dire cibler les aides et les affecter de manière plus pertinente.
La presse d’information politique et générale absorbe moins d’un tiers du 1,2 milliard d’euros d’aides annuelles. Pire, lorsque l’on regarde la liste des trente publications les plus aidées, on retrouve cinq hebdomadaires de programmes de télévision ! Si la presse télévisée a bien une utilité ludique, en quoi participe-t-elle à l’éducation citoyenne ? Et si la presse de loisir et la presse people connaissent une forte progression et peuvent répondre à une attente de nos concitoyens, permettez-moi de douter que le rôle de l’État soit de les aider financièrement.
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis, et M. Patrick Bloche. Très bien !
M. Michel Pouzol. Cet exemple démontre par l’absurde la manière dont ces aides, construites à une autre époque, ont été en partie détournées de leurs objectifs et ont perdu leurs fondements premiers. Au nom de l’égalité et à force de conservatismes corporatistes, l’équilibre entre presse d’information et presse récréative s’est rompu, mettant en danger ceux-là mêmes que ces politiques d’aide devaient protéger. « Gouverner, c’est choisir », disait Pierre Mendès-France. Arrêter une ligne politique en matière d’aide à la presse passe sans nul doute par un ciblage des priorités et des aides : selon moi, il est clair que ces aides doivent aller de façon prioritaire à la presse d’information générale et locale.
Il faut entreprendre, pour repenser le rôle de Presstalis et l’accompagner dans sa nécessaire modernisation. Beaucoup a déjà été fait pour éviter une énième catastrophe et la mise en liquidation de l’entreprise, et je vous en remercie, madame la ministre. Mais sauver Presstalis suppose non seulement que soit repensée sans tabou la question d’un réel rapprochement avec son concurrent, mais aussi que l’on réfléchisse à l’articulation entre les différents modes de distribution – portage, postage et distribution – pour l’ensemble de la presse.
Il faut entreprendre, aussi, pour anticiper les changements capitaux induits par le développement massif d’Internet. La presse en ligne est actuellement un acteur dynamique du secteur et la presse de demain sera en grande partie numérique. Sans doute est-il temps de se poser aussi la question du taux de TVA appliquée à cette presse citoyenne, largement pénalisée par rapport à d’autres types de publication qui bénéficient de taux de TVA beaucoup plus avantageux.
Enfin, je veux rappeler qu’une politique d’aide à la diffusion de la presse peut également devenir, dans certains contextes, un élément important de l’aménagement du territoire, notamment dans les campagnes. Pour bien connaître le lien particulier qu’entretiennent nos concitoyens avec leur presse quotidienne dans les territoires ruraux, j’estime qu’il faudra veiller à ce que les aides de l’État prennent mieux en compte le dernier kilomètre de distribution.
Mes chers collègues, sur ce sujet comme sur d’autres, nous avons une mission au long cours, et je vous remercie une nouvelle fois, madame la ministre, de vous en être saisie. Si, aujourd’hui le budget qui nous est présenté répond à cette véritable urgence qu’est le sauvetage nécessaire de la presse quotidienne, il va également dans le bon sens sur le long terme, celui d’une véritable refonte du secteur. Je ne doute pas qu’avec un peu de volonté et beaucoup de concertation, loin des polémiques, nous tracerons ensemble, sur ces bases, le sillon de la refondation de la presse écrite. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Christian Kert.
M. Franck Riester. Ça va rééquilibrer !
M. Christian Kert. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, au soir du mardi 25 novembre 2008, une jeune et élégante députée de gauche – c’est compatible (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe SRC) – se lève de son siège et interpelle la ministre de la culture et de la communication, lui déclarant sur un ton enflammé : « Actuellement, l’audiovisuel public fait l’objet d’attaques inouïes de la part du Président de la République, du Gouvernement, et de ses séides jusque sur ces bancs. On ampute le financement pour faire coucher le service public dans un lit de Procuste ! »
M. Marcel Rogemont. C’était vrai !
M. Christian Kert. La jeune et élégante députée de gauche se rassoit ; il est 22 h 50.
M. Rudy Salles. Quelle mémoire !
M. Christian Kert. Elle s’appelle Aurélie Filipetti (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.). Hasard, heureux pour elle, de l’histoire, elle est aujourd’hui ministre de la culture et de la communication.
M. Matthias Fekl. Ce n’est pas un hasard !
M. Christian Kert. Abandonnant très probablement ses rêves les plus fous d’un audiovisuel public opulent, oubliant les mots et les espoirs de la députée, vous nous présentez, madame la ministre, le budget « Médias » le plus sinistre que l’on ait vu depuis bien des années. Il enregistre en effet une baisse brutale de 5,2 % alors que vous aviez trouvé dans nos cartons, Franck Riester l’a rappelé, une augmentation moyenne de la ressource publique de 2,2 % sur la période 2011-2015.
Ce n’est pas rien, ce que vous envisagez. Vous réduisez en effet la ressource publique globale de France Télévisions de plus de 85 millions d’euros à la faveur d’un tour de passe-passe qui consiste à accroître le produit de la contribution à l’audiovisuel public de 109 millions – grâce à une augmentation de la redevance de deux fois deux euros –, mais en réduisant de 196 millions la subvention destinée à compenser la suppression de la publicité en soirée.
M. Pascal Deguilhem. Ce n’est pas un tour de passe-passe !
M. Christian Kert. À l’excellent collègue qui évoquait les cadeaux en termes de recettes publicitaires faits aux chaînes privées, je rappelle que, depuis 2009, ces recettes publicitaires n’ont cessé de diminuer en volume et se sont réparties sur l’ensemble des chaînes de la TNT.
M. Marcel Rogemont. Et alors ? Ça ne change rien !
M. Christian Kert. Je dois dire, madame la ministre, que nous sommes un peu perdus dans les chiffres. Il semblerait que le Sénat envisage d’augmenter de deux euros supplémentaires le montant de la redevance audiovisuelle. C’est tout à fait logique, mais pouvez-vous nous confirmer que cette recette supplémentaire sera bien affectée à France Télévisions, qui en a terriblement besoin ?
Vous mettez cette entreprise en péril. Je crois que vous en avez conscience, mais cela soulève un certain nombre d’interrogations. S’agit-il de réduire l’engagement en faveur de la création de France Télévisions, dont nous connaissons tous le poids dans la commande publique ? S’agit-il de réduire la dimension régionale de France 3, sujet que mon collègue de Toulouse Jean-Luc Moudenc évoquera tout à l’heure ? S’agit-il d’abandonner certaines missions visant à rendre accessibles les programmes aux téléspectateurs en situation de handicap, par exemple l’audio-description, alors que le COM avait placé l’accessibilité au cœur de ses priorités ? S’agit-il d’imposer à France Télévisions de ne plus acquérir certains droits sportifs particulièrement coûteux, tels que ceux des Jeux olympiques, suivis par 75 % des Français ? S’agit-il de freiner la transformation numérique de France Télévisions ? S’agit-il d’imposer à France Télévisions un coûteux plan social ?
Vous nous direz tout à l’heure ce que sont devenus les rêves que vous caressiez à haute voix dans l’intimité de la nuit parlementaire.
En conclusion, je veux dire un mot du rapport de notre excellent collègue Michel Françaix. Il semble en effet y avoir un malentendu entre la presse quotidienne régionale et notre rapporteur au sujet de son analyse des aides au portage, qui laisse penser que le nombre d’exemplaires portés a diminué. Loin de constituer une simple aubaine, monsieur le rapporteur, l’aide de l’État permet à la presse quotidienne régionale d’investir avec audace, disons-le, dans le seul canal de distribution susceptible de garantir à ses abonnés un portage sept jours sur sept, jours fériés compris, avant sept heures trente. Le service très pointu et de qualité qu’il offre aux particuliers rend ce mode de distribution, dont les contraintes horaires sont bien plus complexes que pour la poste, très coûteux. Il revient beaucoup plus cher de déposer les journaux chez les particuliers que de livrer des paquets de 100 à 200 exemplaires dans des hôtels ou des aéroports. C’est pourquoi les aides au portage doivent être maintenues et confortées,…
M. Marcel Rogemont. Renforcées ! M. Françaix demande précisément un redéploiement des crédits vers le portage.
M. Christian Kert. …en veillant bien au respect des critères d’attribution. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. Michel Françaix, rapporteur pour avis. Nous sommes presque d’accord !
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon.
Mme Brigitte Bourguignon. Monsieur le président, madame la ministre – talentueuse avant d’être élégante (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC) –, mes chers collègues, le budget qui nous est présenté prend toute sa part de l’effort national, tout en préservant l’essentiel. J’évoquerai ici le programme 334, qui comprend deux actions : « Livre et lecture » et « Industries culturelles ».
Dans ce contexte budgétaire fortement contraint, les moyens consacrés à la politique en faveur du livre et de la lecture sont globalement préservés en 2013. Si la contribution à l’effort porte principalement sur les grands établissements publics parisiens, je note surtout que les actions déconcentrées sont épargnées. Ainsi la politique de soutien à la lecture engagée par votre ministère via les « contrats territoires lectures », les crédits d’intervention mobilisés à l’appui de cette politique au niveau des territoires et la dotation de la Bibliothèque publique d’information sont intégralement préservés et maintenus.
S’agissant de l’action n° 2 relative aux industries culturelles, les crédits progresseront d’environ 7 % ; l’enjeu principal porte sur la numérisation de la production et de la diffusion des œuvres et la numérisation des salles de cinéma.
En ce qui concerne la situation particulière de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet – HADOPI –, dont les crédits baissent certes, il me semble nécessaire de considérer, au-delà des moyens, l’efficience du dispositif. Or, pour l’instant, les conclusions en la matière manquent cruellement, ce qui me conduit à émettre des réserves.
M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles. Très bien. Il fallait que ce soit dit !
Mme Brigitte Bourguignon. Nous attendrons donc que les conclusions de la mission que vous avez confiée à Pierre Lescure nous parviennent.
S’agissant du secteur de la librairie, dès votre prise de fonctions, consciente de la fragilité du secteur, vous avez souhaité rencontrer l’ensemble des représentants de la filière et les collectivités locales pour entamer une phase de concertation qui devrait aboutir à la mise en œuvre de plusieurs mesures importantes pour l’avenir de la librairie. Je relève également avec satisfaction la forte volonté de votre ministère, traduite dans ce budget, de soutenir le réseau dense des librairies indépendantes de qualité, notamment à travers l’action de son principal opérateur, le Centre national du livre.
Celui-ci effectue un travail qualitatif considérable de soutien des différents acteurs de la chaîne du livre, qu’il s’agisse des auteurs, des éditeurs, des libraires ou des organisateurs de manifestations, par le biais de subventions et de prêts qui représentent 84 % de leur budget. J’attire donc votre attention sur la nécessité de réfléchir à la pérennisation des ressources du Centre. En effet, le financement particulier du CNL repose principalement sur la perception du produit de deux taxes fiscales qui lui sont affectées et sont plafonnées, dont la plus importante porte sur les appareils de reprographie, de reproduction et d’impression. Or, face au développement d’Internet et de l’immatériel et en raison de la conjoncture économique de cette branche industrielle, il semble que le rendement de cette taxe soit en baisse constante depuis 2007. Du reste, votre ministère réfléchit déjà, semble-t-il, à un élargissement de l’assiette de la taxe, qui inclurait les consommables. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce point ?
L’ensemble du réseau de la librairie est indéniablement en crise depuis ces dernières années, pour différentes raisons qui ont été évoquées par Sonia Lagarde dans son rapport. Le rétablissement de la TVA à 5,5 % en juillet dernier a été un appel d’air financier pour la librairie indépendante.
Je souhaite, à cette occasion, rendre hommage aux libraires. Être libraire, c’est une passion et une vocation ; l’enrichissement personnel n’est pas, et de loin, la principale motivation, car, face aux problèmes de rentabilité, c’est la rémunération des dirigeants qui fait bien souvent figure de variable d’ajustement pour équilibrer les comptes.
Le premier gouvernement de gauche de la Ve République a mis en place le prix unique du livre,…
M. Marcel Rogemont. Jack Lang !
Mme Brigitte Bourguignon. …formidable outil juridique et économique qui a permis la diversité de la création et l’existence d’un réseau dense de diffusion, partie prenante de notre exception culturelle. Aujourd’hui, le nouveau défi de la filière est son adaptation à l’économie numérique, particulièrement à la vente en ligne. La concurrence, que je qualifierai de déloyale, du géant américain Amazon représente un risque majeur pour la survie de nos librairies, comme en témoigne le phénomène observé en Angleterre, où les librairies ferment une à une. La vitalité de notre réseau et le prix unique du livre représentent une protection de notre exception culturelle qui a probablement manqué à nos voisins.
Tous les professionnels s’accordent sur la nécessité de structurer la filière livre. Je sais que, consciente de leurs difficultés, vous avez demandé à vos services d’engager un certain nombre de réflexions et de travaux destinés à la soutenir. D’ici à l’été 2013, vous nous proposerez des mesures destinées à améliorer la rentabilité de la librairie indépendante dans un contexte de fortes tensions dues aux évolutions technologiques.
Je voudrais dire un mot du différend qui nous oppose à la Commission européenne concernant notre taux de TVA réduit sur le livre numérique, appliqué depuis le 1er janvier 2012.
La Commission européenne, sous prétexte qu’un livre numérique constitue un service fourni par voie électronique, exclut l’application d’un taux de TVA réduit à ce type de service. Or, comme le souligne le syndicat national de l’édition, « un livre est avant tout une œuvre de l’esprit, quel que soit son support, papier ou numérique ». Nous avons besoin de maintenir ce taux réduit afin de développer une offre légale attractive, alors que le marché du livre numérique est en train de se constituer dans notre pays. Le fait que la Commission européenne ait mis parallèlement en place une vaste consultation sur les taux réduits de TVA nous laisse peut-être un bon espoir de voir la situation se débloquer à notre avantage.
Les préconisations apportées par Mme Lagarde sont intéressantes : nécessité de réfléchir au dispositif des aides, nécessité pour les libraires de se mutualiser par la mise en place d’une nouvelle plate-forme numérique commune – à la suite de l’échec du portail 1001libraires.com, que vous êtes en train d’analyser – et par le regroupement de commandes permettant la négociation de remises auprès des éditeurs. J’insisterai tout particulièrement sur l’accès des librairies aux marchés d’achats de livres des bibliothèques sans appel d’offre, qui permettrait de garantir un chiffre d’affaires aux librairies, comme l’a également souligné notre collègue Isabelle Attard. En revanche, je mettrai un bémol au sujet de la facturation des centimes supplémentaires sur les commandes passées par le réseau DILICOM, qui ne fait pas l’unanimité parmi les acteurs de la filière.
Sur tous ces sujets, vous avez déjà mis en place, madame la ministre, un certain nombre de missions de réflexions, dont les résultats seront connus d’ici à l’été 2013. Vous serez ensuite amenée à soumettre des propositions de textes au Parlement et nous serons alors à vos côtés pour soutenir les nouvelles perspectives qui s’offrent aux industries culturelles.
Pour conclure, comme le disait Jules Renard, « quand je pense à tous les livres qu’il me reste à lire, j’ai la certitude d’être encore heureux ». (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Moudenc.
M. Jean-Luc Moudenc. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, dans le cadre de la mission médias, livres et industries culturelles, le projet de loi de finances de 2013 prévoit, pour France Télévisions, une dotation totale des ressources publiques de 2,4533 milliards d’euros, ce qui représente une baisse de 2,3 % par rapport à 2012, alors même que le groupe fait face à une dégradation inquiétante de sa situation financière.
Le président de France Télévisions, M. Rémy Pflimlin, auditionné au Sénat, a indiqué pour sa part que le projet de budget prévoit une dotation diminuée de 87 millions d’euros, ce qui représente une baisse de 3,4 % des concours alloués à France Télévisions, contre 0,3 % en moyenne pour les autres sociétés de l’audiovisuel public.
M. Marcel Rogemont. Il l’a dit aussi à l’Assemblée nationale !
M. Jean-Luc Moudenc. En y ajoutant une diminution des ressources commerciales de 67 millions, le budget 2013 accusera au total une baisse de 150 millions d’euros, soit 5,1 %.
M. Yves Censi. C’est dramatique !
M. Marcel Rogemont. Il faut bien combler les déficits !
M. Jean-Luc Moudenc. Certes, en cette période de crise qui dure, de restrictions budgétaires et d’efforts de maîtrise de la dépense publique, une contribution de France Télévisions apparaît justifiée, à l’aune de réformes à poursuivre.
Dans le même temps, le Gouvernement, en prévoyant une dotation publique inférieure à celle prévue par le contrat d’objectifs et de moyens 2011-2015, et en imposant, de facto, des efforts supplémentaires brutaux et d’ampleur à France Télévisions, prend le risque de fragiliser encore plus l’équilibre précaire d’une entreprise déjà largement déstabilisée.
M. Franck Riester. Quel scandale !
M. Jean-Luc Moudenc. Cette fragilisation touche déjà l’ensemble des entités de France Télévisions, ce qui m’amène à évoquer la situation des antennes régionales de France 3, dont la présence et le maillage territoriaux sont essentiels.
Véritables créateurs de lien social territorial, les émissions et les journaux télévisés locaux revêtent une importance majeure dans nos régions et dans les outre-mer. Qu’il me soit permis d’avoir une pensée toute particulière pour l’antenne de la région toulousaine – ce n’est pas Mme Martinel qui me le reprochera…
Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles pour l’audiovisuel et les avances à l’audiovisuel public. Je les soutenais déjà du temps où j’étais dans l’opposition !
M. Jean-Luc Moudenc. …notamment avec l’édition occitane.
Certes, à l’instar de bien d’autres établissements publics et des entités de France Télévisions, les antennes régionales de France 3 doivent procéder à des économies sur leurs dépenses de fonctionnement. Cela s’est d’ores et déjà traduit, pour France 3, par la suspension de 12 éditions locales d’information pendant les vacances de la Toussaint et de Noël.
De même, de nombreux CDD ne sont pas reconduits, alors que ces contrats représentent 15 % des effectifs de l’entreprise et que leurs titulaires travaillent à France 3 depuis de longues années. Aujourd’hui, les salariés sont particulièrement inquiets…
M. Jean-Frédéric Poisson. Il y a de quoi !
M. Jean-Luc Moudenc. …dès lors qu’aucune perspective ne leur a été véritablement exposée sur l’ampleur globale du plan d’économie et sur sa durée. Ils ne comprennent pas que ces économies atteignent le cœur même de l’activité de fabrication des grilles de programmes régionaux, alors qu’aucun bilan de la nouvelle organisation et de la structure globale de France Télévisions n’a jamais été effectué.
De plus, ils ne peuvent pas adhérer à un plan dont la présentation serait purement et essentiellement comptable et qui touche à la raison d’exister de France 3 en région, sans avoir en contrepartie un projet fédérateur et mobilisateur de développement, et sans que les salariés soient informés en toute transparence par le biais des instances représentatives du personnel.
M. Yves Censi. Très bien !
M. Jean-Luc Moudenc. Ils redoutent donc, in fine, un abandon progressif et définitif des antennes locales et régionales au lieu d’une phase d’efforts temporaires, nécessaires et partagés par tous, mais seulement le temps de revenir à un équilibre pérenne.
Dans de telles conditions, au regard des enjeux, des risques et des défis, je vous remercie donc, madame la ministre, de bien vouloir nous préciser quels sont les objectifs chiffrés du Gouvernement sur les économies à réaliser par France Télévisions, sur les achats externes, sur l’emploi, sur le type et le volume des programmes.
Plus généralement, quelle est la réflexion de l’État, actionnaire unique de France Télévisions, pour les missions de service public audiovisuel national et en région, en tenant compte du fait qu’à une crise financière s’ajoute une crise d’identité avec, en filigrane, la problématique de l’aboutissement de l’entreprise unique ?
M. Marcel Rogemont. C’est vous qui en avez décidé !
M. Jean-Luc Moudenc. Au regard des contraintes que j’ai mentionnées, comment la direction de France Télévisions peut-elle – et elle le doit – minimiser autant que faire se peut l’impact sur les emplois et sur les conditions de travail ?
Nous le savons, nos concitoyens sont particulièrement et sincèrement attachés à la télévision publique, à la qualité de ses programmes, au développement et au renouvellement de la création, à la promotion du pluralisme et de la diversité, à ses journalistes, à ses personnels et aux antennes régionales de France 3, qui sont et demeurent un atout. Compte tenu de la gravité de la situation que traverse cette insigne maison, je crois que nous sommes tous dans le temps de l’engagement en faveur de France Télévisions qui doit, certes, se réformer et s’adapter.
Mais je reste, pour ma part, persuadé qu’un traitement trop brutal, un effort trop important dans un laps de temps trop bref, hypothéquerait la pérennité de cette belle entreprise…
M. Franck Riester. Évidemment !
M. Jean-Marie Beffara, rapporteur spécial. Et la suppression de la publicité, elle s’est faite dans la plus grande douceur ?
M. Jean-Luc Moudenc. …au moins dans son format actuel, un format d’excellence plébiscité par les Françaises et les Français.
Vous êtes, madame la ministre, désormais en responsabilité. Il vous revient donc de nous faire connaître vos orientations. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Travert.
M. Stéphane Travert. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la liberté de la presse, écrite ou audiovisuelle, n’est pas un privilège de journalistes, mais un droit fondamental de nos concitoyens.
Je tiens à saluer ici le budget courageux et calibré au plus juste présenté par Mme la ministre de la culture pour participer au redressement de notre économie dans le contexte difficile que nous connaissons, dont nous avons hérité au mois de mai dernier. Nul ne peut plus ignorer, en effet, le bilan laissé par nos prédécesseurs…
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères pour l’action audiovisuelle extérieure. Ah, ça y est : le bilan !
M. Stéphane Travert. …à savoir un déficit de plus de 5 % du produit intérieur brut et une dette de 1 700 milliards d’euros, qui a augmenté de 600 milliards d’euros durant les cinq dernières années.
M. Yves Censi. Vous découvrez la crise ?
M. Stéphane Travert. Mais je veux évoquer ici, dans le cadre de notre discussion générale, les perspectives pour la presse écrite et l’audiovisuel public. Audiovisuel, presse écrite : tous les médias traditionnels, publics comme privés, sont particulièrement touchés par la crise économique et financière mondiale. La disparition de France-Soir, mais aussi de nombreux quotidiens de province, la quasi-faillite de Paris Normandie – car la presse régionale, qui a longtemps mieux résisté que ses consœurs, commence à être également touchée –, voilà quelques exemples, parmi tant d’autres, des dommages irréversibles causés par la crise que nous traversons.
Le Gouvernement et la majorité s’attachent, avec la plus grande détermination, à soutenir ce secteur stratégique. En effet, les perspectives budgétaires actuelles nous font porter l’effort sur le système de distribution de la presse. Ainsi, notre majorité a procédé in extremis au sauvetage du distributeur Presstalis, dont le dossier avait été laissé au fond d’un tiroir par nos prédécesseurs. Préparer l’avenir, voilà maintenant notre tâche dans ce domaine.
Nous appelons à une action volontariste, comme l’a très bien démontré Michel Françaix dans son rapport consacré à ce sujet. Une politique de soutien à la presse citoyenne contribue au pluralisme des idées que, bien évidemment, nous ne remettons nullement en cause. La participation des moyens publics doit s’adapter aux besoins essentiels de chaque titre. Le développement du numérique nous invite à accompagner cette mutation irréversible.
Mais en matière d’audiovisuel public, outre la crise économique, c’est bien l’irresponsabilité du gouvernement précédent qui a fragilisé encore davantage le groupe France Télévisions.
M. Franck Riester. Pourquoi rejetez-vous toujours la responsabilité sur les autres ?
M. Stéphane Travert. L’ancien Président de la République voulait tout à la fois être celui qui nomme les présidents des chaînes, mais aussi le directeur des programmes, le présentateur et parfois même son propre spectateur ! (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)
Tout cela est derrière nous, conformément aux engagements du Président de la République, depuis le mois de mai dernier. La France a besoin d’un service public audiovisuel qui s’adresse à tous les publics…
M. Marcel Rogemont. Pas seulement à Sarkozy !
M. Stéphane Travert. …pour aller chercher le meilleur de lui-même : un engagement nécessaire vers la création française, l’innovation, la diversité culturelle.
Au travers de nos politiques, nous soutenons la recherche d’une meilleure complémentarité de l’identité des différentes chaînes, sans pour autant appauvrir l’une au profit de l’autre sans concertation. Nous soutenons la poursuite de la modernisation de l’information et des magazines, ainsi qu’une stratégie numérique complète. Nous rappelons notre soutien aux missions de proximité en métropole comme en outre-mer.
L’équation est simple : dès 2009, en supprimant la publicité après 20 heures et en surestimant les recettes de la publicité en journée, le gouvernement Fillon a laissé France Télévisions dans une situation financière inextricable.
M. Marcel Rogemont. Exactement !
M. Stéphane Travert. Alors que, fin 2008, les recettes publicitaires de France Télévisions représentaient près d’un tiers des moyens de financement du groupe, avec près de 800 millions d’euros, fin 2012, elles n’atteindront que difficilement les 385 millions d’euros, bien loin des prévisions du contrat d’objectifs et de moyens, qui prévoyait 425 millions d’euros.
M. Pascal Deguilhem. Ça fait tout de même une sacrée différence !
M. Stéphane Travert. En conséquence, le budget 2013 prévoit une revalorisation de la contribution à l’audiovisuel public. Pour autant, la hausse des recettes ne viendra pas rééquilibrer le budget de l’audiovisuel public. Aujourd’hui, la déstabilisation générale du budget, issue de la réforme Copé…
M. Franck Riester. Ce n’est pas vrai ! Assumez vos responsabilités !
M. Stéphane Travert. …se traduit au sein des équipes techniques de France Télévisions, particulièrement inquiètes de leur avenir. La chaîne France 3 et ses antennes régionales sont particulièrement touchées.
M. Franck Riester. Soyez sérieux !
M. Stéphane Travert. Le mouvement de grève du 2 octobre dernier symbolise la souffrance au travail vécue par l’ensemble des salariés du groupe. Et ce n’est pas l’éditorial du Figaro Magazine de la semaine dernière qui ramènera la sérénité, quand on lit que « personne ne s’est posé la question de savoir s’il était vraiment indispensable de maintenir les 24 coûteuses stations régionales de France 3, dont les journaux ne passionnent guère les foules ». Les salariés du service public apprécieront ; ils savent ainsi sur qui ils peuvent compter !
M. Franck Riester. C’est honteux de se cacher comme ça ! Quel budget proposez-vous ?
M. Stéphane Travert. Faire mieux avec moins : le défi est de taille.
M. Franck Riester. C’est votre responsabilité !
M. Yves Censi. Assez de sophismes !
M. Stéphane Travert. C’est pourquoi je me félicite que France Télévisions et l’État aient engagé des discussions pour signer un nouveau plan d’affaires et un avenant au contrat d’objectifs et de moyens, de façon à établir un nouvel équilibre entre les objectifs et les moyens alloués au groupe France Télévisions.
À l’heure où le deuxième écran, celui de l’ordinateur, est entré dans de très nombreux foyers et concurrence directement la télévision, je souhaite que la télévision publique continue à proposer des programmes de qualité, qu’ils soient régionaux ou nationaux, des journaux d’information et des programmes culturels à tous les Français.
M. Franck Riester. Dans ce cas, votez un budget digne !
M. Stéphane Travert. Nous voterons donc ce budget. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Colette Langlade, dernière oratrice inscrite dans la discussion.
Mme Colette Langlade. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme le Président de la République, les députés socialistes, républicains et citoyens ne peuvent accepter « qu’un seul enfant de la République puisse être, à cause de l’endroit où il est né, du milieu où il a grandi, écarté de la culture, l’art, la peinture, la sculpture, la connaissance. »
M. Franck Riester. Encore une belle âme !
Mme Colette Langlade. Voilà un bel objectif pour cette mission : offrir à tous les jeunes Français – à tous les Français – un accès aux livres. Or cela ne va pas de soi, tout d’abord parce que trop nombreux sont ceux de nos compatriotes qui ne savent pas lire.
La lutte contre l’illettrisme est un combat toujours d’actualité. La France compte en effet plus de 3 millions de personnes illettrées, c’est-à-dire qui ont été scolarisées mais n’ont pas acquis une maîtrise suffisante de la lecture et de l’écriture pour être autonomes dans les situations simples de la vie courante.
Cette question est un enjeu de politique économique : 57 % des personnes en situation d’illettrisme sont dans l’emploi. Élue d’un territoire rural, je constate que les campagnes ne sont pas épargnées : 28 % des personnes illettrées y vivent. Il y a donc urgence et je profite d’être à cette tribune pour dire mon souhait que l’illettrisme devienne une grande cause nationale pour 2013.
Trop de Français n’ont pas accès à la culture ; seuls 22 % fréquentent un lieu culturel – musée, cinéma, spectacle. C’est trop peu. Les raisons en sont multiples.
Les bibliothèques sont concernées par ce triste chiffre. Ces lieux doivent, eux aussi, devenir plus accessibles.
Plus accessibles géographiquement, d’abord. Nous devons orienter nos efforts vers le développement et la consolidation d’un maillage des bibliothèques, afin que chaque zone de notre territoire puisse garantir à chaque citoyen un accès facilité aux ressources des bibliothèques. La pérennité de nos bibliothèques, particulièrement des petites bibliothèques en milieu rural, doit donc constituer une priorité pour démocratiser l’accès aux livres.
La stratégie que met en place le Gouvernement ne peut que nous satisfaire. Les quatre-vingts contrats territoires lecture vont permettre, dans nos bassins de vie, de garantir la qualité et la cohérence du développement de la lecture publique.
Les députés de la majorité sont également satisfaits de voir que les crédits de la Bibliothèque publique d’information, laboratoire au service de toutes les bibliothèques, sont préservés, permettant ainsi à notre réseau d’innover pour remplir encore davantage ses missions.
M. Yves Censi. C’est le docteur Pangloss qui parle !
Mme Colette Langlade. Plus accessibles, ensuite, aux personnes en situation de handicap. En la matière, il reste des efforts à faire. Ces personnes sont parfois coupées des lieux de culture en raison de l’absence de rampes d’accès et d’ascenseurs. Le Gouvernement renforce son soutien aux investissements en faveur de l’accessibilité des équipements et des services aux personnes en situations de handicap.
L’accès aux livres passe par les bibliothèques, bien sûr, mais pas seulement : les libraires sont aussi concernés et doivent être accompagnés. Là encore, le Gouvernement a su prendre ses responsabilités.
M. Yves Censi. Ah bon ?
Mme Colette Langlade. La précédente majorité avait choisi, au printemps dernier, de faire passer de 5,5 % à 7 % le taux de TVA sur le livre, faisant ainsi payer aux lecteurs, libraires, éditeurs et auteurs le prix de sa mauvaise gestion et son choix de ne faire des cadeaux qu’aux riches.
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Rassurez-vous, bientôt il n’y en aura plus !
M. Yves Censi. C’est pour cela que vous voulez augmenter la TVA sur la restauration ?
Mme Colette Langlade. Dès le projet de loi de finances rectificative de l’été dernier, nous sommes revenus sur cette mesure en abaissant le taux de TVA sur le livre. C’est là une mesure de justice : il faut, non pas rendre plus chère la culture, mais permettre à tous d’avoir accès aux livres.
Surtout, cette hausse de la TVA menaçait, non pas les grands groupes, qui auraient pu l’amortir, mais les petites librairies indépendantes, qui ont vu leur chiffre d’affaires baisser de 5,4 % depuis 2003, à mesure que leur importance s’effritait au profit de la vente par internet, qui représente aujourd’hui 13 % des parts de marché. Ce retour au taux de 5,5 % vise à protéger les libraires et éditeurs indépendants, qui étaient menacés, et avec eux la richesse de notre création littéraire.
À l’heure d’internet, l’attrait du livre ne faiblit pas. Les internautes ne tournent pas le dos aux bibliothèques, au contraire : les Français, qui se définissent comme de gros consommateurs d’internet, sont également 45 % à fréquenter les bibliothèques municipales. Il faut, non pas opposer internautes et lecteurs, mais mettre internet au service du livre. La question du prix du livre numérique reste en suspens, mais nous faisons confiance au Gouvernement pour la traiter.
Le développement du numérique dans les bibliothèques apparaît dans ce projet de loi de finances ; cela doit continuer. C’est en numérisant leurs collections que les bibliothèques pourront les faire connaître au plus grand nombre. Le numérique peut et doit constituer l’avenir de la démocratisation de l’accès aux livres.
L’Europe s’est aussi emparée de cet enjeu, mais il faudra être vigilants : Google Books dépasse les 20 millions d’ouvrages numérisés. L’accord conclu entre Google et Hachette en 2011 repose sur quatre piliers : l’éditeur peut contrôler la numérisation des œuvres ; il a la possibilité de commercialiser les livres numérisés ; en cas d’apparition de nouvelles opportunités commerciales, des impressions sont possibles ; enfin, le partage des œuvres numérisées avec des institutions publiques comme la BNF est prévu.
Madame la ministre, ce projet de loi de finances va dans le bon sens, mais de nombreux défis doivent être relevés pour préserver le livre, qui est, selon Stefan Zweig, ce qui permet aux hommes de rester liés « par-delà la mort et pour nous défendre ainsi contre l’ennemi le plus implacable de toute vie, le temps qui passe et l’oubli ». (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)
M. le président. Nous avons terminé la discussion sur cette mission.
La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, nous voilà donc réunis pour examiner le budget de la mission « Médias, livre et industries culturelles ».
Ce budget marque une rupture avec le gouvernement précédent, qui pratiquait le marketing, les annonces commerciales, la publicité mensongère et prétendait développer des projets en creusant la dette. La rupture avec ces méthodes est bien la marque de fabrique du Président de la République et du Gouvernement.
Les annonces à grands frais et les grands projets non financés, c’est terminé. Les choix irresponsables qui ont été faits pendant cinq ans, financés par l’augmentation de la pression fiscale sur les plus modestes afin de préserver les intérêts des plus riches, ne seront pas ma marque de fabrique, pas plus que celle du Gouvernement.
Vous avez tous insisté sur la nécessité d’opérer des changements structurels, de trouver de nouveaux modèles, bref de cesser d’être dans la reconduction de dispositifs anciens. Il faut marquer de vrais changements et prendre nos responsabilités. Tel est évidemment l’enjeu de ce budget.
M. Yves Censi. Rien ne change, mis à part le fait que le budget diminue !
M. Marcel Rogemont. C’est la dette qui diminue !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Je prends ces dossiers en mains, et force est de constater, comme on l’a rappelé, que l’héritage est lourd.
C’est un lourd héritage, tout d’abord, en matière de finances publiques, puisque nous devons faire face à une situation très dégradée. Le budget de la culture, en particulier celui de la mission « Médias, livre et industries culturelles » prend donc courageusement toute sa part dans l’effort de redressement des comptes publics qui est demandé à l’ensemble des périmètres ministériels.
M. Yves Censi. À côté de cela, vous avez supprimé la TVA sociale !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Plus généralement, nous initions une réforme de fond, dans la conception même de la politique publique.
Vous avez évoqué quelques-uns des dossiers que nous devons traiter : le dossier de Presstalis et la réforme des aides à la presse ; la réflexion sur les missions du service public de l’audiovisuel ; l’acte II de l’exception culturelle, avec la mission qui est confiée à Pierre Lescure ; le travail sur le livre et les librairies ; la priorité donnée à l’action déconcentrée et, surtout, les discussions en cours avec la Commission européenne pour affirmer la pérennité et la modernité du modèle français d’exception culturelle, au service de la diversité culturelle. Tels sont les chantiers, constamment retardés par le gouvernement précédent, que nous avons ouverts.
Certes, nous aurions préféré pouvoir les aborder avec un budget en augmentation, mais, vu la lourde dette, cela n’aurait pas été responsable vis-à-vis de nos concitoyens. D’ailleurs, l’ensemble des acteurs et des professionnels des secteurs concernés, que j’ai associés, depuis le début des discussions budgétaires, à chaque étape de l’élaboration de ce budget, l’ont bien compris.
Ma première préoccupation a été de préserver les missions fondamentales, aussi bien celles du ministère de la culture dans son ensemble que celles des secteurs concernés par la mission « Médias, livre et industries culturelles ». C’est aujourd’hui chose faite, même si bien sûr les discussions se poursuivent, notamment avec France Télévisions.
Ma seconde priorité était de faire porter l’effort sur les entreprises et les opérateurs les plus solides financièrement, ceux qui pouvaient dégager, par des synergies et des économies, les crédits dont nous avions besoin pour rétablir les finances publiques.
Le budget que je vous propose témoigne donc de cet effort particulier. Cependant, et contrairement à ce qui se faisait précédemment, ce n’est pas un coup de rabot à l’aveugle ; ce budget est le fruit d’une succession de choix pensés, mesurés et orientés selon des perspectives précises.
La présente mission sera dotée, en 2013, d’une enveloppe globale de 1,219 milliard d’euros, auxquels s’ajoutent les crédits du compte de concours financier « Avances à l’audiovisuel public », qui s’élèvent à 3,398 milliards. Au total, le soutien public en faveur des médias et de l’audiovisuel public atteint donc 4,617 milliards en 2013, en recul de 1,8 % par rapport à 2012.
À l’intérieur de cette enveloppe, que je soumets à votre examen aujourd’hui, 784 millions d’euros sont consacrés à la presse, au livre et aux industries culturelles et 3,832 milliards viennent financer les entreprises de l’audiovisuel public.
Je répondrai d’abord à vos questions, qui ont été nombreuses, sur la politique et le budget en faveur de la presse, qui représente évidemment un enjeu stratégique. Michel Françaix, qui a préparé un rapport très intéressant et fouillé, avec la compétence qu’on lui connaît, l’a évoqué, de même que Rudy Salles. C’est là, disais-je, un enjeu majeur, pour un secteur indispensable à toute grande démocratie et qui connaît aujourd’hui une crise grave, une fragilité liée à la transition du numérique.
La réduction du budget des aides à la presse est de 3,3 % à périmètre constant, c’est-à-dire une fois écarté le transfert des crédits du programme 134 vers le programme 180, pour soutenir le transport postal de la presse.
À quoi correspond ce retrait ? D’abord, il s’agit, non pas d’un recul, mais d’un ajustement raisonné tenant compte de la situation globale du secteur et de la mise en œuvre des États généraux de la presse. Le secteur de la presse est bien sûr en recul, mais, aujourd’hui, on doit réfléchir – c’est le travail que nous avons commencé avec Michel Françaix et que nous allons poursuivre – sur la réforme des aides à la presse, dont le montant s’élève à 396,5 millions d’euros.
En d’autres termes, la baisse globale que je vous ai annoncée est essentiellement liée à l’arrêt progressif des aides exceptionnelles et à l’ajustement au plus près de la réalité des besoins. Je vous rappelle qu’il y a eu un changement de périmètre, qui permet de rendre plus lisibles les crédits destinés au transport postal de la presse, lesquels étaient auparavant divisés entre le ministère de l’économie et celui la culture ; ils sont aujourd’hui ramenés intégralement dans le budget de la culture, pour 143 millions d’euros.
S’agissant de l’aide au transport postal de la presse, qui a été évoquée et sur laquelle certains s’interrogent, je rappelle que nous devons honorer le contrat qui a été passé entre l’État et La Poste jusqu’en 2015. Cet accord prévoit, pour 2013, une contribution de 217 millions d’euros. Celle-ci est toutefois ciblée, puisque, dans le coût du transport postal, il y a une différence entre les journaux d’information politique générale, dont le coût unitaire à l’exemplaire est de 29 centimes, et les autres titres de presse, qui sont distribués pour un coût de 44 centimes.
Il y a également la compensation du manque à gagner pour La Poste du report d’un an de la mise en œuvre de l’accord, décidé par le précédent Gouvernement, qui s’élève à 32,4 millions.
Les autres aides à la diffusion connaissent effectivement une baisse de 10,6 %, mais l’engagement de l’État en faveur du pluralisme se poursuit à travers l’aide aux quotidiens nationaux d’information politique et générale à faibles ressources publicitaires, sans oublier le soutien aux quotidiens régionaux à faibles ressources publicitaires et l’aide à la presse hebdomadaire régionale. Cette démarche est consolidée, pour un total de 12 millions.
Nous proposons également une aide à la modernisation : 19,7 millions d’euros pour accompagner la modernisation sociale de la fabrication de la presse quotidienne. Pour les diffuseurs, à la suite des États généraux de la presse écrite, l’effort financier exceptionnel de la part de l’État, qui a été consenti pour trois années, de 2009 à 2011, prend progressivement fin. Pour 2013, il est donc ramené à 4 millions d’euros, contre 6 millions en 2012, ce qui correspond à la décroissance « en sifflet » de ces aides exceptionnelles.
Créé en 2012, le fonds stratégique pour le développement de la presse, dédié à l’investissement, sera doté de 33,5 millions d’euros. Là encore, les aides sont bien ciblées, orientées vers des objectifs de pluralisme et de démocratie.
Le travail sur la réforme, le ciblage plus précis des aides à la presse, l’articulation entre les trois types d’aides s’accompagnent d’une réflexion sur la TVA, même si celle-ci comporte aussi des incidences européennes. Une TVA à taux réduit pour certains titres de presse me semble tout à fait légitime, mais nous nous efforçons également d’obtenir de la Commission une TVA à taux réduit pour la presse en ligne. Dans le cadre de la réflexion sur la TVA en cours à Bruxelles, le Gouvernement transmettra ses conclusions avant le mois de janvier.
Vous l’avez dit, l’effondrement de Presstalis aurait été une catastrophe pour l’ensemble du secteur de la presse. Le gouvernement précédent n’a pas suffisamment agi ; il était de notre responsabilité de parvenir à un accord. Dans la suite des rapports Rameix et Le Pape, un accord, validé par le tribunal de commerce le 30 septembre, engage l’ensemble des acteurs. Les éditeurs voient leur contribution augmenter, et l’État prend ses responsabilités, à hauteur de 18,9 millions d’euros dans le budget pour 2013, afin d’accompagner l’effort de restructuration. Mais cet accord prévoit aussi que l’opérateur concurrent, les Messageries lyonnaises de presse ou MLP, assume également ses responsabilités : il est bien légitime que cet opérateur, dans un secteur qui repose sur la mutualisation, prenne sa part dans la péréquation des coûts historiques de l’opérateur Presstalis. Le contraire serait inacceptable et je souhaite que les termes de cet accord, obtenu après de longues discussions, soient respectés par chacune des parties.
Par ailleurs, il ne faudrait pas que se reproduise pour Presstalis ce qui s’est passé avec le groupe Hersant médias, GHM. Nous avons pris nos responsabilités, afin que le traitement de ce dossier soit le plus juste possible et que les salariés de Presstalis bénéficient d’un accompagnement social.
Stéphane Travert m’a questionnée sur GHM. Le groupe est actuellement proposé à la vente par appartement. Le pôle normand a été repris ; j’espère que le pôle Champagne Ardennes Picardie et le pôle Sud le seront également. Je souhaite que ce soient des entreprises de presse qui s’engagent dans la reprise des titres du groupe.
Le précédent gouvernement n’a pas réussi à obtenir du groupe GHM qu’il rétrocède aux titres les aides à la presse dont il avait bénéficié. L’ancien actionnaire est parti en laissant derrière lui un coût social et un coût de restructuration très lourds, après avoir bénéficié d’aides à la presse, et même d’abandons de créances de la part d’un certain nombre de banques : c’est une situation que nos prédécesseurs n’auraient pas dû tolérer.
En matière d’indépendance de la presse, je suis très attentive au devenir de l’AFP. Le contrat d’objectifs et de moyens arrive à échéance à la fin de cette année et une nouvelle négociation s’engagera bientôt. L’État versera cette année le montant prévu au COM, soit 119,6 millions d’euros, en hausse de 1,8 %. L’AFP se diversifie aujourd’hui, étend son rayonnement et porte haut la voix de la France dans le monde.
Je vais maintenant aborder le chapitre de l’audiovisuel public, un sujet évoqué par certains d’entre vous et pour lequel vous nourrissez des préoccupations bien légitimes.
Le budget de l’audiovisuel public est marqué par une participation importante à l’effort de redressement des finances publiques.
M. Jean-Frédéric Poisson. C’est le moins que l’on puisse dire !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. La ressource publique s’élève à 3,832 milliards d’euros, dont 3,398 milliards sont issus de la contribution à l’audiovisuel public, tandis que 434,8 millions sont accordés via le budget général.
La dotation publique est donc en recul global de 1,6 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2012. Dans cette évolution, ce sont évidemment les crédits issus du budget général de l’État qui diminuent, de 168,1 millions d’euros par rapport à 2012. La contribution à l’audiovisuel public augmente, elle, de 107 millions d’euros.
Martine Martinel, Jean-Marie Beffara, Marcel Rogemont, entre autres, m’ont interrogée sur cette augmentation de la redevance, rappelant la situation dont nous avons hérité.
M. Franck Riester. Avec une grande mauvaise foi !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. L’audiovisuel public est en effet soumis à une double peine : la suppression des ressources publicitaires, décidée de manière unilatérale et brutale, et la dégradation des finances publiques, qui empêche l’État de compenser cette diminution des ressources.
Le Gouvernement a choisi une ligne courageuse, qui est de renforcer ce qui constitue la ressource la plus stable, la plus solide et la plus prévisible pour l’entreprise. Cette ressource est aussi la plus moderne, car son assiette peut être modifiée pour s’adapter aux évolutions technologiques. Elle est également juste socialement, dans la mesure où elle peut faire l’objet d’exonérations, en fonction de l’âge, des revenus ou du handicap.
Afin de renforcer la visibilité pour les entreprises de l’audiovisuel public, le Gouvernement a donc choisi d’augmenter la redevance de 2 euros, en sus de l’inflation, ce qui la porte à 129 euros. Un amendement, qui sera prochainement présenté au Sénat par David Assouline, vise à fixer son montant à 131 euros. Cela semble tout à fait légitime, dans la mesure où il serait encore largement inférieur aux montants des redevances allemande – 215 euros – ou britannique – 180 euros.
Christian Kert m’a demandé si les 2 euros supplémentaires prévus par l’amendement Assouline seraient intégralement affectés à France Télévisions. Ce sera bien le cas, dans la mesure où France Télévisions est l’entreprise la plus mise à contribution dans l’effort de redressement des finances publiques.
Pour autant, cela ne l’exonérera pas de mener un effort de restructuration – qui devrait impliquer une réflexion sur les strates hiérarchiques – et un effort financier. Cet effort financier, auquel l’État actionnaire prendra sa part, ne doit pas entamer les missions fondamentales du service public…
M. Franck Riester. Pas sûr !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. …missions à propos desquelles nous conduisons, avec le président Rémy Pflimlin, une réflexion en profondeur. Des synergies peuvent être utilisées afin de réaliser ces économies.
M. Yves Censi. Magie des mots !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Le service public d’aujourd’hui doit être moderne, adapté au XXIe siècle. Réfléchir aux missions implique de se pencher sur la création. Une des missions essentielles du service public audiovisuel est, non pas le soutien, mais l’utilisation de la création audiovisuelle française et européenne. L’effort consacré à la création, de l’ordre de 20 % aujourd’hui, doit être maintenu, car il est au cœur des missions de France Télévisions.
L’accessibilité pour les personnes handicapées, sujet à propos duquel m’interrogeait Christian Kert, fait aussi partie des missions fondamentales du service audiovisuel public.
De la même manière, la proximité, une marque de France 3, chaîne à propos de laquelle Michel Pouzol m’a interpellée, est une mission de service public. Nous réfléchissons à la manière de nous rapprocher encore davantage des besoins de nos concitoyens en encourageant notamment l’information régionale, laquelle constitue, pour France 3, une véritable plus-value.
Bien entendu, les actions en matière de technologie numérique seront poursuivies, tout comme la réflexion sur la place des documentaires dans les chaînes de service public. Cela s’inscrit dans une réflexion plus globale sur les nouvelles missions du service public audiovisuel et sur la régulation, à l’heure de la télévision connectée.
Jean-Luc Moudenc m’a interrogée sur la suspension des éditions locales d’information de France 3 lors des vacances scolaires. Précisons que cela a été décidé avant l’arrivée de ce gouvernement et avant ce budget. Il s’agit d’un procédé habituel de France Télévisions, qui permet de ne pas trop recourir à l’intermittence et de contenir les budgets.
Tout cela nous conduira à négocier un avenant au contrat d’objectifs et de moyens, qui sera proposé pour avis aux commissions des affaires culturelles des deux assemblées. Il donnera lieu à une délibération au conseil d’administration de France Télévisions, puis à une signature entre l’État, représenté par le ministère de la culture et de la communication et par le ministère des finances, et France Télévisions.
Vous l’avez tous souligné, cet engagement en faveur du service public doit être encore peaufiné, réfléchi. C’est le travail que j’ai engagé avec les équipes de France Télévisions et le président Pflimlin.
Les autres entreprises, comme Radio France, Arte, l’audiovisuel extérieur – avec la question de TV5 monde – et l’INA, voient leur budget globalement préservé.
Au sujet de l’AEF, François Rochebloine, Martine Martinel, Jean-Marie Beffara et Jean-Jacques Guillet ont souligné le bon accueil réservé à la nomination de Marie-Christine Saragosse. Celle-ci s’est faite sur proposition du CSA, anticipant la réforme qui, dès 2013, confiera à la future autorité de régulation de l’audiovisuel le pouvoir de nomination des présidents de l’audiovisuel public.
M. Rudy Salles. Enfin !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Monsieur Rochebloine, vous m’avez interrogée sur le contrat d’objectifs et de moyens de l’AEF. Il n’y avait pas de COM à l’époque d’Alain de Pouzilhac…
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Il était préparé, mais n’avait pas été signé !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Il y en aura un en 2013, Marie-Christine Saragosse y travaille.
Quant à votre question sur France 24 en arabe, elle est pertinente, comme l’est la présence de RFI en Afrique. L’identité des deux chaînes sera préservée. Deux directeurs de rédaction ont été nommés, ce qui ne m’empêche pas de souhaiter que se créent des synergies dans l’ensemble du paysage audiovisuel public français, c’est-à-dire entre France Télévisions, l’AEF, TV5 et Arte.
J’en profite ici pour dire que France Télévisions prendra une participation de 49 % dans TV5 Monde ; nous ne dépassons pas ce taux par respect pour nos partenaires francophones, et parce qu’au-delà nous aurions été obligés de constituer une nouvelle société nationale de programmes, ce qui n’était pas indispensable. Un nouveau directeur général – ou une directrice générale – sera nommé dans les semaines à venir. Quant au budget de TV5 Monde, il sera stabilisé à 75 millions d’euros en 2013.
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Il manque de l’argent, madame la ministre !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Là encore, il s’agit de montrer l’importance que nous accordons à cette chaîne, qui fait très bien son travail, notamment à travers ses excellents programmes d’animation, diffusés dans le monde entier.
M. François Rochebloine, rapporteur pour avis. Elle, au moins, on la voit à l’étranger, ce qui n’est pas le cas de France 24 !
M. Marcel Rogemont. Eh oui !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Un mot sur l’INA, qui constitue un magnifique outil de préservation de nos archives audiovisuelles mais également un instrument de formation pour l’ensemble de nos professionnels. Ses crédits sont stabilisés, à 0,5 % près.
Michel Pouzol m’a interrogée sur les télévisions locales. Conscients de leur fragilité, nous menons actuellement une réflexion pour travailler avec les collectivités locales. Nous avons besoin de ces télévisions locales, ce qui ne doit pas nous empêcher de prendre en compte l’importance et la pertinence de l’offre régionale de France 3.
En ce qui concerne les radios associatives, elles constituent un secteur d’expression très important, dont les crédits sont maintenus à 29 millions d’euros.
Pour répondre aux questions de Martine Martinel et de Marcel Rogemont sur la présidence du CSA et les trois mandats qui arrivent à terme en janvier, la durée de ces mandats a été fixée par la loi du 30 septembre 1986. Les prolonger exigerait donc une nouvelle loi, forcément intuitu personae, ce qui n’est guère justifié au moment où nous travaillons sur une réforme en profondeur de l’autorité de régulation.
M. Marcel Rogemont. Je vous remercie pour cette réponse.
Mme Aurélie Filippetti, ministre. J’en viens à présent au secteur du livre et de la lecture. Je remercie Sonia Lagarde et Colette Langlade qui ont travaillé sur ces questions et ont souligné l’engagement fort du Gouvernement en faveur des crédits déconcentrés, partout dans les régions, pour soutenir le livre et la lecture.
Ce sont 250 millions d’euros qui sont engagés en 2013 pour le livre et la lecture. La légère diminution du budget de la BNF, qui poursuit sa mission de numérisation et de valorisation des collections, de renouvellement et de modernisation des services proposés au public, est due à une petite baisse des crédits budgétaires mais également à un rééchelonnement des travaux sur le quadrilatère Richelieu, voué à devenir un grand pôle de ressources en matière d’histoire de l’art.
La diffusion du patrimoine écrit sur tout le territoire passe également par les bibliothèques territoriales. Là encore, notre soutien passe par les budgets voués à l’acquisition de textes et manuscrits d’intérêt national, le financement d’appels à projets coordonnés ou le soutien à des structures intervenant en faveur du patrimoine écrit, tout cela pour un montant avoisinant les 3 millions d’euros en 2013, sachant que la BNF affecte un montant à peu près comparable aux actions de coopération en régions, qu’elle coordonne pour le compte de l’État.
Brigitte Bourguignon a souligné l’importance des contrats territoires lecture, dont quatre-vingts ont déjà été signés à ce jour et qui constituent des dispositifs de coordination essentiels entre l’État et les collectivités locales pour développer le maillage territorial des bibliothèques.
Les bibliothèques-médiathèques sont des équipements culturels de proximité, qui fonctionnent très bien notamment à la campagne. Vous connaissez mon attachement pour la culture en zone rurale, et j’entends que l’État cofinance certains investissements, même si cela relève de la compétence des collectivités locales. J’ai donc maintenu les crédits d’intervention en région à travers les DRAC pour le livre et la lecture. De la même manière, la Bibliothèque publique d’information voit ses crédits préservés à hauteur de 7 millions d’euros pour 2013.
Colette Langlade a parlé des investissements en faveur de l’accessibilité aux personnes handicapées ; ils sont préservés.
Le développement du numérique dans les bibliothèques, par le biais des contrats numériques conclus avec les collectivités locales, est lui aussi préservé.
Cela étant, il faut, plus largement, entamer une réflexion globale et structurelle sur la filière livre. Sonia Lagarde a parlé d’Amazon, acteur dominant et problématique de la vente en ligne, notamment parce qu’il pratique la gratuité des frais de port, ce qui fragilise le réseau des libraires indépendants constitué sur tout le territoire depuis trente ans grâce à la loi Lang sur le prix unique du livre.
Nous sommes en pourparlers serrés avec Bruxelles sur la question de la TVA à taux réduit s’appliquant au livre numérique. La France fait l’objet d’une procédure, mais nous continuerons à défendre notre position, considérant le livre avant tout comme un texte, qui ne dépend pas du support sur lequel il circule. Nous sommes ici dans la droite ligne du vote unanime qui avait eu lieu dans votre assemblée l’an dernier pour un prix unique du livre numérique, lequel, heureusement, ne semble guère poser de problèmes à Bruxelles. L’action principale et première du Gouvernement a été de ramener la TVA sur le livre à 5,5 %, dès le mois de juin dernier, ce qui témoigne de notre fort engagement en faveur du livre.
Le deuxième axe de notre politique est le soutien à l’édition et à la numérisation ; il passe par les aides octroyées au Centre national du livre et par un soutien fort aux auteurs, avec plus de 10 millions d’euros destinés à financer le droit de prêt en bibliothèque.
Quatre groupes de travail ont été constitués pour faire le point sur l’ensemble des aides dont bénéficient aujourd’hui les libraires. Ces aides extrêmement diverses et parfois désordonnées mériteraient un effort de rationalisation pour les rendre plus efficaces.
D’autres missions sont en cours sur l’adaptation de notre législation à l’ère du numérique ou sur le Centre national du livre, qui rendront leurs conclusions d’ici la fin de l’année et me permettront de prendre un certain nombre de décisions au début de l’année 2013, pour renforcer la politique de soutien au livre, à la lecture et aux librairies indépendantes sur l’ensemble du territoire.
J’en viens enfin aux industries culturelles. Les moyens consacrés à la politique en faveur des industries culturelles sont reconduits en 2013. Franck Riester m’a interrogée sur le Centre national de la musique et Jean-Marie Beffara sur les musiques actuelles. La musique est une priorité pour le Gouvernement, mais le Centre national de la musique, en tant qu’établissement public, ne garantissait pas de financement réel au secteur de la musique. Le Gouvernement a, là encore, choisi l’efficacité, tout d’abord avec un crédit d’impôt phonographique mieux ciblé en faveur des PME du secteur musical, puisque son taux est porté de 20 à 30 % en faveur de ces dernières et que son montant est plafonné à 800 000 euros. Il s’agit d’une mesure extrêmement importante, saluée par les entreprises du secteur.
De la même manière, j’ai décidé de créer au sein du ministère de la culture une mission musique, à cheval sur les deux directions, ce qui permettra d’accompagner le secteur dans la transition numérique. Cette mission sera également chargée de mettre en œuvre des mesures d’urgence, comme les 200 000 euros que j’ai pu dégager en juillet dernier pour accompagner les producteurs musicaux menacés par la disparition de l’un de leurs partenaires.
Je l’ai dit, le Centre national de la musique était un établissement public, supportant en tant que tel des coûts fixes, ce qui, dans une période budgétaire comme celle que nous connaissons, n’était pas forcément justifié. Mais le plus grave était surtout qu’il était financé par une manière de dérivation de la TSTD, la taxe sur les services de télévision payés par les distributeurs, taxe qui est aujourd’hui dans le collimateur de la Commission européenne.
M. Franck Riester. Exact ! Pour 150 millions d’euros !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Le Gouvernement entend donc signaler à la Commission la mise en place d’une nouvelle TSTD, liée au chiffre d’affaires des entreprises du secteur et assortie d’un abattement, pour éviter l’effet d’emballement que l’on a pu connaître au cours des dernières années du fait de la croissance très rapide des offres triple play.
Le nouveau mécanisme que nous allons proposer à Bruxelles permettra de préserver notre système de financement du cinéma français, dans lequel les diffuseurs participent à l’émergence de la création en amont. Cette priorité du Gouvernement se traduit dans le budget par la fin de l’écrêtement de la TSTD décidé l’an dernier par le précédent gouvernement, écrêtement non seulement injuste mais contraire au principe d’affectation de la taxe.
M. Franck Riester. Et les 150 millions d’euros, ils sont justes ?
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Étant donnée la situation des finances publiques, nous avons fait le choix, avec les professionnels du cinéma, de prélever 150 millions d’euros sur le fonds de roulement du CNC. Ce prélèvement est exceptionnel, contrairement à l’écrêtement de la taxe, qui était prévu pour durer. Ce prélèvement, c’est la contribution des acteurs du cinéma à l’effort de redressement des finances publiques ; qu’ils soient ici remerciés pour leur courage et leur sens des responsabilités.
Nous travaillerons avec la mission musique pour que le financement du secteur musical soit le mieux adapté possible à cette transition numérique, qui pose un certain nombre de problèmes.
Les crédits destinés au cinéma dans les DRAC sont reconduits à hauteur de 2,6 millions d’euros, car j’ai à cœur de montrer que la politique culturelle se joue partout sur le territoire. La culture est dans notre pays un levier de développement économique et d’attractivité. C’est la raison pour laquelle l’État accompagne l’action des collectivités locales et des acteurs régionaux.
Un mot enfin sur HADOPI, à propos de laquelle m’a interrogée Isabelle Attard. La mission de Pierre Lescure rendra ses conclusions au printemps 2013. Dans l’attente, nous avons évalué les besoins de la Haute autorité en travaillant avec ses dirigeants, que nous avons consultés sur notre proposition budgétaire.
Pour conclure, je dirai quelques mots sur les dispositifs fiscaux.
Dans le domaine de la presse, je vous propose de proroger le crédit d’impôt qui bénéficie aux entreprises investissant dans le capital des sociétés de presse, ainsi que le crédit d’impôt concernant le régime spécial des provisions pour investissements en faveur de la presse écrite. Ce sont des dispositifs indispensables à l’économie très fragile de ce secteur.
Vous le savez, une réflexion est en cours sur une loi concernant la création d’un droit voisin au bénéfice des éditeurs de presse. Le Président de la République est très engagé sur ce dossier, comme sur le financement de la culture en général. Il a demandé que des réflexions aient lieu entre ces entreprises, ces sites moteurs de recherche agrégateurs de contenus, et les éditeurs de presse. Si ces discussions ne devaient pas aboutir, il y aurait début 2013 une loi permettant la création d’un droit voisin pour les éditeurs de presse.
Le Gouvernement propose aussi de prolonger le crédit d’impôt international destiné à encourager le tournage en France de films étrangers. Nous avons sur ce point des discussions très rudes avec la Commission concernant la territorialisation des aides d’État. Il faut que l’ensemble de la représentation nationale soit soudé pour que nous puissions défendre ces mécanismes indispensables au financement du cinéma français.
Ma conviction, c’est que les défis qui sont encore devant nous – la poursuite de la transition numérique, l’émergence de nouveaux modèles économiques, une nouvelle étape de l’exception culturelle – nécessitent de combiner différents modes de financement. Il y a la dépense budgétaire, mais aussi la dépense fiscale et les dispositifs fiscaux ciblés. Cela doit se combiner avec des choix politiques forts en faveur de la diversité culturelle.
C’est la raison pour laquelle, dans les mois à venir, le Gouvernement vous présentera de nouvelles propositions qui seront issues des travaux sur la compétitivité…
M. Franck Riester. Ah, la compétitivité ! Parlons de compétitivité…
Mme Aurélie Filippetti, ministre. …dans lesquels le ministère de la culture et de la communication est pleinement engagé. Ces travaux, conduits dans le cadre de la mission Lescure, engagent une réflexion sur les aides à la presse ; je pense également à la mission musique.
Toutes ces propositions compléteront le cadre réglementaire et législatif indispensable à la consolidation de nos secteurs culturels qui sont des piliers de la citoyenneté française puisque c’est à travers eux que nos concitoyens ont un regard sur le passé, mais aussi sur leur avenir. C’est également un pilier du développement économique de notre pays et des secteurs dans lesquels l’excellence française n’est plus à démontrer.
Pour répondre à la critique de Franck Riester, nous avons pleinement conscience de la crise, mais contrairement au précédent gouvernement, nous nous en occupons pleinement et courageusement, avec lucidité, en opérant les modifications structurelles indispensables et en faisant des choix budgétaires courageux, mais nullement aveugles et toujours définis dans le cadre de priorités claires dont j’espère vous avoir exposé les grandes lignes. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)
M. le président. Nous en arrivons aux questions.
Mes chers collègues, il nous reste probablement vingt-cinq minutes d’échanges. Je vous propose de terminer ce budget, car cela ne vaut pas la peine de reprendre à seize heures trente pour si peu de temps.
Je serai extrêmement rigoureux sur les temps de parole : chaque intervenant disposera de deux minutes pour exposer sa question et Mme la ministre de deux minutes pour répondre.
Nous commençons par le groupe GDR.
La parole est à Mme Marie-George Buffet.
Mme Marie-George Buffet. Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, ne disposant que de deux minutes pour intervenir sur cette mission, je vais consacrer mon propos à Presstalis.
Les salariés de la coopérative, qui sont un peu les oubliés de ce débat, ont manifesté mercredi dernier devant votre ministère à l’appel de l’intersyndicale, fait assez rare pour être souligné.
Leur mobilisation est porteuse de deux exigences, qu’on ne peut que partager : défendre leurs emplois – 1 200 emplois sont menacés, soit un salarié sur deux –, mais aussi défendre le pluralisme de la presse, un élément de notre démocratie.
À l’origine des difficultés de Presstalis, il y a la baisse des ventes de la presse quotidienne nationale et régionale ; il y a aussi et surtout la concurrence déloyale exercée par les MLP. Celles-ci se gardent les marchés juteux des magazines tandis que Presstalis remplit des missions de service public en assurant partout en France la distribution de la presse citoyenne.
Licencier la moitié des salariés de Presstalis ne résoudra pas ces deux problèmes, mais annoncera le déclin de la messagerie historique et, dans la foulée, la disparition de plusieurs journaux. Les solutions sont ailleurs.
Sur la diffusion de la presse, M. le rapporteur a insisté en commission sur la nécessité de revoir les aides à la presse pour les rendre plus efficaces. J’espère, madame la ministre, que vous pourrez nous faire rapidement des propositions en ce sens.
Sur la concurrence déloyale, il y a urgence à fusionner les deux messageries, puis à recapitaliser la messagerie coopérative unique pour qu’elle puisse mener à bien ses missions.
La direction générale du groupe Presstalis vient d’annoncer un moratoire dans l’attente de l’expertise. Allez-vous profiter de ce délai, madame la ministre, pour mettre en place une réunion tripartite – État, organisations syndicales, direction – pour qu’enfin, les salariés soient entendus dans cette réforme de la coopérative ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Madame la députée, concernant Presstalis, la situation est grave. Il y a eu un certain nombre de préconisations : le rapport Mettling, le rapport Rameix et le rapport Le Pape. L’idée, aujourd’hui, est d’avoir la contribution de tous les acteurs de la filière.
L’État a assumé ses responsabilités en versant une avance de 11,9 millions d’euros sur l’aide à la distribution des quotidiens d’information politique et générale. En contrepartie, les coopératives d’éditeurs se sont engagées, pour leur part, à procéder à une augmentation de capital à hauteur de 0,5 % du chiffre d’affaires de Presstalis, c’est-à-dire 7,6 millions d’euros, et à reporter d’une décade le paiement des montants dus aux éditeurs, le mandat ducroire, ce qui permet de soulager la trésorerie de Presstalis.
Le but n’est pas d’ajouter un plan de plus, après tous ceux que nous avons connus. Le but est de dégager une réelle synergie et de pouvoir associer les MLP au financement de la péréquation indispensable pour assumer les coûts dits « historiques » de la distribution de la presse. Donc, les MLP, qui sont partie prenante dans cet accord, doivent suivre les conclusions de cet accord validé par le tribunal de commerce.
Concernant l’aspect social, mon objectif est de préserver au maximum le niveau 3, celui des distributeurs, c’est-à-dire les 28 000 points de vente que nous avons sur l’ensemble de notre territoire et qui ont été trop souvent oubliés au cours des restructurations précédentes. Nous serons extrêmement attentifs à cela.
Concernant le niveau 2, celui des dépôts, les MLP doivent aussi prendre leur part. Vous appelez de vos vœux la création d’une entreprise unique. Ce n’est pas aujourd’hui la situation telle qu’elle est définie par les termes de l’accord, mais en tout cas, il y a une forme de mutualisation par la reprise d’un certain nombre de dépôts et le décroisement des filières.
M. le président. La parole est à Mme Martine Faure, pour le groupe SRC.
Mme Martine Faure. Madame la ministre, dans un moment difficile où les contraintes budgétaires sont imposées, nous nous réjouissons de voir préservés les moyens consacrés à la politique en faveur du livre et de la lecture. Madame la ministre, soyez-en remerciée !
Les priorités du programme 334 sont très claires : aides à l’économie du livre et à l’ensemble des différents acteurs de la chaîne du livre, soutien et valorisation de la lecture sous toutes ses formes, et ce, dans un contexte où nous sommes confrontés aux défis de la numérisation et de l’internet.
Permettez-moi, madame la ministre, de revenir quelques instants sur le programme des médiathèques, lesquelles, dans les territoires ruraux comme celui que je représente et que nous sommes un certain nombre à représenter ici, constituent souvent le seul service public culturel de qualité.
Pour assurer cette qualité, les établissements doivent disposer d’infrastructures accueillantes, de collections multisupports, de services aux normes en vigueur, sans oublier le professionnalisme du personnel.
Pouvez-vous nous dire, madame la ministre, quels moyens l’État va accorder aux médiathèques et à leurs réseaux pour aider les collectivités territoriales, sachant que l’évolution accélérée du monde du livre et l’apparition de la génération des écrans provoquent des mutations majeures ? Et sans anticiper sur les préconisations de la mission confiée à Pierre Lescure, pouvez-vous nous dire comment vous allez nous aider à gagner le pari du numérique jusque dans nos campagnes ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Madame la députée, les bibliothèques-médiathèques, en particulier en zone rurale, sont l’une de nos priorités puisque l’action en matière de soutien à la lecture publique est une compétence des collectivités locales, mais l’État accompagne celles-ci, notamment par la signature de plus de quatre-vingts contrats territoires lecture, par les contrats numériques et par le soutien aux équipements culturels de proximité, à travers des cofinancements sur les investissements. C’est pourquoi j’ai maintenu les crédits d’intervention en région pour l’ensemble du secteur du livre et de la lecture publique, qui est l’une de nos priorités.
Concernant le numérique, une réflexion est en cours. J’ai rencontré l’ensemble des acteurs de la filière, ainsi que les auteurs. Certains proposent, à Bruxelles, la création d’un droit de prêt numérique. Je ne souhaite pas que nous en arrivions là. Nous allons plutôt travailler à encourager les accords entre les partenaires de la filière.
M. le président. La parole est à M. Vincent Feltesse.
M. Vincent Feltesse. Madame la ministre, après mes collègues Lagarde, Langlade et Bourguignon, je reviens sur la situation des librairies indépendantes.
Si nous intervenons sur cette question, c’est qu’il y a un véritable état d’urgence culturelle ; nous pouvons nous demander si nous n’avons pas perdu quelques années, voire dix ans. Nous avions un socle fondamental avec la loi du 30 août 1981 sur le prix unique du livre. Ces dernières années, les mutations ont été importantes : renchérissement du coût des loyers et du foncier en centre ville, centralisation avec l’urbanisme commercial, diffusion par le numérique.
Or ces dernières années, il y a eu beaucoup de discussions, de commissions, de rapports, il y a eu les Entretiens de Valois sur le spectacle vivant et les assises de Lyon. Mais concrètement, qu’a-t-on fait, au-delà du label de librairie indépendante de 2009, dont le principal levier est de demander aux collectivités locales l’exemption de la CET – la contribution économique territoriale ? C’est un pas, certes, mais ce n’est pas suffisant.
Ce matin, nous avons appris la disparition de la librairie du Moniteur, librairie spécialisée dans le domaine de l’architecture en centre ville à Paris. Et nous connaissons tous d’autres exemples à travers la France. Ce bien précieux est en train de disparaître et je ne voudrais pas que, de la fierté que nous ressentons à vivre dans un pays où il y a des librairies, nous passions à la nostalgie.
Vous avez pris des premières mesures fortes en revenant à la TVA à 5,5 % : alors que l’excédent brut d’exploitation des libraires – l’EBE, puisque nous parlons d’entreprises – n’était plus que de 1 %, la hausse de la TVA, c’était la mort de tout le réseau des libraires indépendants.
Vous avez pris une autre mesure, dans un contexte budgétaire très contraint, comme l’a rappelé Martine Faure, en maintenant les crédits du livre.
Madame la ministre, quelles sont les autres pistes ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Concernant les librairies, j’ai, bien sûr, été informée de la fermeture de la librairie du Moniteur, car les éditeurs spécialisés en architecture m’ont écrit à ce sujet. Ce n’est pas la première fois qu’une librairie est menacée. Nous avons réussi à sauver la librairie Grangier, à Dijon, qui va rouvrir grâce à une mobilisation très intense des services de l’État, de la DRAC, de la préfecture, auprès du repreneur.
S’agissant de la librairie Camponovo, à Besançon, j’espère que nous allons réussir à trouver une solution et une reprise par un véritable libraire.
En ce qui concerne la librairie du Moniteur, il faut savoir que les fonds de pensions spéculent sur les librairies, ce qui est absolument inacceptable. Elles sont revendues cinq ou six ans après, dans un but purement spéculatif. Je vais demander à rencontrer très rapidement les dirigeants du groupe pour les interroger sur le devenir de cette librairie, qui est emblématique pour tout le secteur de l’architecture.
Plus largement, il y aura un plan librairie en 2013, après que les quatre groupes de travail que j’ai évoqués auront remis leurs conclusions à la fois sur l’accès des libraires de proximité aux marchés publics, sur l’éparpillement des aides aux libraires, sur la question des prix et des rabais qui sont octroyés et sur les raisons pour lesquelles le site « 1001 libraires », qui a été évoqué tout à l’heure, a dû fermer et sur la façon dont on peut remplacer ou compenser cette fermeture.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.
Mme Marie-Christine Dalloz. Je m’étonne des conditions dans lesquelles nous travaillons et me borne à constater que plus les budgets baissent, plus le temps de parole du Gouvernement augmente. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Marcel Rogemont. C’est la première fois qu’elle intervient !
Mme Marie-Christine Dalloz. Je déplore le fait que France Télévisions soit la variable d’ajustement de ce budget, subissant une baisse conséquente de ses crédits malgré l’augmentation de la contribution à l’audiovisuel qui sera supportée par le contribuable. Encore une nouvelle taxe qui pèse sur le pouvoir d’achat ! Je constate d’ailleurs que vous parlez de moins en moins de pouvoir d’achat à mesure que vous taxez toujours plus le contribuable. C’est incroyable !
M. Frédéric Reiss. Eh oui !
Mme Marie-Christine Dalloz. Pour autant, la compensation qui sera versée à France Télévisions ne suffit pas à rétablir les crédits de la loi de finances de 2012. Doit-on voir dans cette réduction de crédits la volonté du Gouvernement de réduire les missions de France Télévisions ? Dans ce contexte, quelles orientations seront données à France 3 ? Au sujet de cette chaîne, deux axes de réflexion émergent : ou bien constituer un conglomérat de grandes chaînes régionales pour permettre à France 3 de développer à la fois ses programmes et sa présence territoriale, ou bien recentrer France 3 en antenne nationale pouvant proposer des décrochages. Au-delà, cela pose la question du rôle de l’audiovisuel public en région et de la nécessaire proximité de France 3 avec son public. Il s’agira, une fois ce débat tranché, d’assurer la lisibilité et la pérennité des missions assignées à France 3. À nouvelle majorité, nouveau gouvernement et nouveau budget, disait tout à l’heure un de nos collègues socialistes. Mais pour quelle politique ? Pour quelles orientations ? Six mois après l’avènement de François Hollande, vous n’avez pas démontré votre capacité à impulser des choix clairs !
M. Franck Riester. C’est le moins que l’on puisse dire !
Mme Marie-Christine Dalloz. Or le service public a besoin de connaître votre volonté ainsi que les orientations que vous envisagez, afin de réfléchir à son organisation future. Vous avez l’obligation de répondre clairement aux attentes de France Télévisions par le biais d’un contrat d’objectifs et de moyens durables ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre, dont je rappelle qu’elle n’a utilisé que 43 minutes sur les 45 qui lui étaient allouées.
Mme Aurélie Filippetti, ministre. En matière de durabilité, madame la députée Dalloz, je pense que nous n’avons aucune leçon à recevoir de votre côté de l’hémicycle, puisque c’est le précédent gouvernement, ou plutôt, devrais-je dire, le précédent Président de la République qui, contre sa propre ministre de la culture et sans en informer sa propre majorité, avait décidé unilatéralement et brutalement la suppression de la publicité sur le service public. Cela a eu des conséquences très lourdes, en premier lieu la suppression de 400 millions d’euros de ressources pour le service public ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Mme Marie-Christine Dalloz. Il y avait un contrat d’objectifs et de moyens !
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Ajouté à votre incurie budgétaire qui a mis les finances publiques dans une situation désastreuse, cela nous oblige à prendre des mesures aujourd’hui. Vous avez en outre laissé six nouvelles chaînes sur la TNT qui vont diluer la publicité, héritage que nous sommes aujourd’hui dans l’obligation d’assumer, l’État de droit ne nous permettant pas de revenir sur cette décision. Face à cette situation, le Gouvernement fait un choix courageux, celui d’augmenter la redevance de 4 ou 6 euros. Ce choix permet en outre de rappeler à France Télévisions ses obligations en matière de service public, c’est-à-dire l’engagement de soutenir la création, la proximité avec l’information régionale et locale par le biais de France 3, et le soutien aux émissions de société. Nous y travaillons avec les présidents de l’audiovisuel public, contrairement au précédent gouvernement, ou plutôt là encore au précédent Président de la République, qui prenait ses décisions tout seul le matin en se rasant, qui nommait les présidents de l’audiovisuel tout seul et qui nous a laissé une situation face à laquelle il faut prendre des mesures stratégiques qui demandent un peu de temps ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Marcel Rogemont. D’ailleurs, depuis qu’il est parti, il ne se rase plus !
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Moudenc.
M. Jean-Luc Moudenc. Je serai moins polémique, madame la ministre.
M. Marcel Rogemont. C’est Mme Dalloz qui l’était !
M. Jean-Luc Moudenc. Je souhaite aborder la question de la librairie indépendante, diffuseur culturel de qualité qui se bat pour préserver un modèle d’excellence sur l’ensemble de nos territoires. Les libraires sont en proie à des difficultés de financement qui mettent en péril leurs établissements, en particulier deux, la frilosité des banques à leur endroit et la toute-puissance des grands groupes d’édition, qui choisissent le rythme de parution par le biais du système des offices, et dont les libraires dépendent pour 80 % de leur chiffre d’affaires. C’est un véritable paradoxe : d’un côté les libraires, pour leurs activités normales, ne peuvent trouver de financement auprès de leurs banquiers, et de l’autre ils servent de banquiers aux grands groupes d’édition ! Il est donc urgent, si on veut conserver cette diversité d’offre éditoriale et cette prescription culturelle de proximité, d’aider les librairies indépendantes en leur procurant des avances de trésorerie. Certains acteurs du livre considèrent qu’un fonds de soutien à la librairie doté de 25 millions d’euros et géré par le Centre national du livre pourrait être la solution. Une piste de financement existe dans le cadre des crédits centraux et déconcentrés de la sous-section 4 de l’action livre et lecture. Madame la ministre, pensez-vous que la création prochaine d’un tel fonds d’aide spécifique, dans le cadre du plan librairie 2013 que vous venez de nous annoncer, soit possible ?
M. Franck Riester. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Aurélie Filippetti, ministre. Monsieur le député Moudenc, je sais qu’à Toulouse aussi on se préoccupe des librairies historiques et indépendantes. Vous aurez évidemment tout le soutien du Gouvernement pour la défense de ces librairies. Je n’oppose pas pour ma part les libraires aux éditeurs, qui sont partie prenante de l’ADEL qui soutient les librairies indépendantes partout sur le territoire. Cela fait partie des aides qui seront évaluées par les groupes de travail que j’évoquais. Nous allons essayer d’accroître leur efficacité. Si les préconisations conduisent à proposer la création d’un fonds de soutien aux libraires, nous examinerons cette hypothèse avec attention. En tout état de cause, il existe aujourd’hui plusieurs rapports, un sur le CNL, un autre sur les marchés publics suggérant de permettre aux collectivités de faire appel aux librairies de proximité, un autre encore sur les prix et les rabais pratiqués par certains éditeurs de manière différenciée. J’ai d’ailleurs engagé sur ce sujet une réflexion globale pour accompagner les libraires. Ce secteur est aujourd’hui le commerce de proximité présentant la moins bonne rentabilité, inférieure à 2 %. Je souhaite qu’on arrive à redonner ces deux points de rentabilité à l’ensemble des librairies indépendantes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. Marcel Rogemont. Très bien !
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions.
M. le président. Je mets aux voix les crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles ».
(Les crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles » sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État » inscrits à l’état D.
(les crédits du compte d’affectation spéciale « Gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien, des systèmes et des infrastructures de télécommunications de l’État » sont adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » inscrits à l’état D.
(les crédits du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public » sont adoptés.)
M. le président. Nous avons terminé l’examen des crédits relatifs aux médias, aux livres et aux industries culturelles.
M. le président. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Questions au Gouvernement.
La séance est levée.
(La séance est levée à treize heures trente-sept.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l’Assemblée nationale,
Nicolas Véron