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Première séance du mardi 29 janvier 2013

Présidence de M. Marc Le Fur
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

Décisions sur des requêtes
en contestation d’opérations électorales

M. le président. En application de l’article LO 185 du code électoral, M. le président a reçu du Conseil constitutionnel communication de deux décisions portant annulation de l’élection législative des 10 et 17 juin 2012 dans la deuxième circonscription de l’Oise et dans la circonscription de Wallis-et-Futuna, à la suite de laquelle M. Jean-François Mancel et M. David Vergé avaient été proclamés élus.

Questions orales sans débat

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

Évolution du prix du lait

M. le président. La parole est à Mme Clotilde Valter, pour exposer sa question, n° 102, relative à l’évolution du prix du lait.

Mme Clotilde Valter. Monsieur le ministre de l’agriculture, les producteurs de lait sont une nouvelle fois confrontés à une baisse du prix du lait alors même que leurs coûts de production augmentent. Lors de la grève du lait en 2009, ils exigeaient un prix du litre de lait de quarante centimes. Aujourd’hui, le prix moyen européen est de vingt-sept centimes alors que la hausse des coûts de production nécessiterait un prix de quarante-cinq centimes pour assurer une juste rémunération des éleveurs laitiers.

Face à cette situation, nombre d’entre eux ont d’ores et déjà décidé d’arrêter leur production. Si chaque producteur a un prix dépendant de sa propre situation et de celle de l’entreprise à laquelle il livre, il existe cependant plusieurs échelons collectifs dans la fixation du prix du lait à la production en France. Dans mon département, le Calvados, le groupe coopératif Agrial a fixé le tarif du litre de lait à trente centimes pour janvier 2013, soit le même qu’en 2003, en dépit de l’augmentation du coût de la production et en particulier des matières premières.

Quelles mesures pourraient être engagées rapidement pour pallier ces difficultés, en particulier au niveau européen, par exemple une régulation de la production ou un rééquilibrage des aides européennes vers l’élevage ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Vous évoquez, madame la députée, un effet de ciseaux entre le prix du lait, qui se stabilise à un niveau bas, et le coût de production, qui a augmenté en raison de l’accroissement du coût des céréales, qui semble se stabiliser lui aussi sur le marché mondial, voire baisser, effet de ciseaux qui nous oblige à prendre des mesures.

Un certain nombre de producteurs laitiers réclament un prix à quarante centimes. Avec un tel prix à l’échelle européenne, certains producteurs pourraient poursuivre leur activité mais d’autres auraient une rémunération que nous ne pouvons accepter. Il y a des écarts énormes. Il est très difficile de fixer un prix à l’échelle européenne.

Toute la bataille que nous devons mener à l’échelle européenne est de faire comprendre à un certain nombre de nos partenaires que nous avons besoin d’une régulation du marché, que nous devons essayer de mieux organiser les producteurs et que nous ne pouvons pas laisser des industriels, voire les grandes coopératives, fixer les lignes stratégiques de la production laitière, surtout que ces dernières se tournent souvent vers l’exportation. Si, un jour, un marché à l’exportation ne trouve pas de débouchés, toute la production revient sur le continent européen, ce qui fait baisser les prix.

Nous devons donc être capables, ensemble, surtout avec la perspective de sortie des quotas de 2015, de rediscuter d’un certain nombre de mécanismes. Nous avons mis sur la table des idées pour réguler le marché du lait à l’échelle européenne. Je vous avoue que ce n’est pas facile, mais la France est à l’initiative.

Au niveau national, dans un cadre de contractualisation que nous allons faire évoluer, nous avons pris des mesures pour permettre aux producteurs de s’organiser. Neuf organisations de producteurs ont d’ailleurs été reconnues, dont l’une fait partie de France Milk Board.

Nous essayons d’organiser la filière et, surtout, de donner du pouvoir aux producteurs. La réforme de la PAC devra tenir compte aussi, dans la répartition des aides, de la déprise laitière que nous constatons vous et moi dans le grand Ouest mais aussi partout ailleurs. Les producteurs laitiers arrêtent souvent la production laitière pour faire des céréales et il faut arrêter ce processus. Nous avons besoin de garder de l’élevage, de la polyculture élevage. Cela fera partie des propositions que j’ai faites et sur lesquelles j’ai obtenu, je le pense, une écoute favorable à l’échelle européenne ; il faut voir comment l’on peut primer les premiers hectares, ceux sur lesquels il y a de l’élevage, de l’emploi.

Tel est en tout cas tout le débat qui va nous occuper au cours de cette année 2013, la réforme de la PAC, la loi d’avenir agricole, sur lesquelles nous aurons bien sûr à revenir.

Conclusion d’accords professionnels
remplaçant la taxe fiscale affectée sur le lait

M. le président. La parole est à M. Paul Salen, pour exposer sa question, n° 98, relative à la conclusion d’accords professionnels remplaçant la taxe fiscale affectée sur le lait.

M. Paul Salen. Monsieur le ministre de l’agriculture, le Gouvernement a mis fin au mécanisme de la taxe fiscale affectée sur le lait le 3 octobre 2012, décision répondant aux exigences imposées par l’Union européenne et ayant de fortes répercussions pour le secteur des producteurs de lait. À ce stade, les producteurs pourraient dépasser leurs quotas sans encourir de sanctions directes.

Le ministère de l’agriculture souhaite que les laiteries et les producteurs instaurent un système d’accords produisant les mêmes effets que la TFA. Or, pour que cela soit possible, il faudrait faciliter la mise en place d’organisations de producteurs agréées, qui sont les seules habilitées à négocier ce type d’accord.

À ce jour, d’après les informations que j’ai en tout cas, aucun cadre légal précis n’existe. À partir de quel moment sera opérationnel un cadre réglementaire précis permettant aux professionnels du secteur laitier de conclure ces accords destinés à remplacer la taxe fiscale affectée aujourd’hui disparue ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Soyons clairs, monsieur le député, ce n’est pas le Gouvernement qui a supprimé la taxe fiscale affectée, ce sont des producteurs laitiers qui ont contesté le fait qu’ils pouvaient être sanctionnés pour des dépassements individuels de quotas alors que, selon la règle européenne, les sanctions individuelles ne s’appliquaient que lorsque le quota national était dépassé. La règle dérogatoire s’appliquant en France ayant été mal notifiée à l’échelle européenne et n’étant donc pas reconnue, la France, qui appliquait des sanctions alors qu’elle ne dépassait pas son quota de lait national, a été condamnée.

Nous avons donc un vrai problème. D’ailleurs, en 2008, en pleine crise laitière, la France, qui appliquait des sanctions de façon dérogatoire, est l’un des pays dont la production a baissé, alors que dans d’autres pays, en dépit de la crise, elle a continué à augmenter.

J’évoquais tout à l’heure la manière dont nous devons fixer à l’échelle européenne des règles permettant d’éviter dans certains pays une croissance de la production sans aucune règle et sans aucun moyen de la réguler. C’est tout le débat que nous avons engagé à l’échelle européenne pour essayer de répondre à votre question. Que mettons-nous en particulier à la place du système qui existait de manière dérogatoire en France ?

Un débat est engagé sur le rapport de Michel Dantin, qui a été adopté en commission de l’agriculture et qui le sera, je l’espère, en séance plénière. Il prévoit justement la possibilité d’avoir à l’échelle européenne des sanctions individuelles lorsque la production laitière augmente trop fortement. Nous sommes donc en train de chercher des outils, et j’appuierai bien sûr cette démarche.

Ensuite, vous avez raison, ce sont les organisateurs de producteurs qui doivent agir. C’est de façon collective qu’il faut gérer la production, et même d’ailleurs au niveau de bassins laitiers, et voir comment les professionnels peuvent se donner des règles pour maîtriser les évolutions de la production.

Cela dit, je le répète, le Gouvernement n’a pas décidé de supprimer la TFA, elle a été supprimée parce qu’elle ne correspondait malheureusement pas à un droit européen et a été dénoncée par des producteurs laitiers.

M. le président. La parole est à M. Paul Salen.

M. Paul Salen. Il y aurait tout de même peut-être quelques pistes, monsieur le ministre, pour une telle organisation. Ce que souhaitent en tout cas les agriculteurs, c’est que ce soit géré par une sorte de collectivité. Si l’on veut que cela fonctionne, la pénalité ne doit pas être individuelle mais devenir collective. Si on leur donne des responsabilités collectives, les pénalités aussi doivent être collectives.

harmonisation européenne du coût de la main-d’œuvre
dans le secteur agricole

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour exposer sa question, n° 122, relative à l’harmonisation européenne du coût de la main-d’oeuvre dans le secteur agricole.

M. Nicolas Dhuicq. On ne le dit pas assez, monsieur le ministre de l’agriculture, la France a la première des libertés, l’indépendance et la sécurité alimentaires. Or, dans le mode de construction actuelle de l’Union européenne, nos producteurs de légumes, particulièrement d’endives, sont confrontés à une concurrence forte et déloyale, menaçant de les faire disparaître à terme, de la part d’entreprises ou d’exploitants belges ou allemands principalement, qui utilisent des dérogations européennes pour employer des salariés venus des ex-pays de l’Est, qu’ils rémunèrent aux tarifs des pays d’origine. Alors que ces hectares génèrent un très grand nombre d’emplois, nous risquons de voir disparaître dans les années qui viennent ces producteurs qui maillent nos territoires ruraux.

Que compte faire le Gouvernement face à ce problème européen fort qui menace directement une partie de notre indépendance nationale ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt.

M. Stéphane Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt. Vous évoquez, monsieur le député, le problème de la compétitivité à l’intérieur de l’Europe et, en particulier, le recours à une main-d’œuvre rémunérée au niveau des pays d’origine et non du pays d’accueil. Cela ne concerne pas la directive « Services », feu la directive Bolkestein, c’est la directive « Détachement » qui permet de détacher des salariés sur de courtes durées dans différents pays.

La France, Michel Sapin l’a expliqué, je crois, devant la représentation nationale a pris l’initiative de renégocier le cadre de cette directive, qui entraîne effectivement des dérives et permet de recourir à une main-d’œuvre trop bon marché. Cela se passe en Europe centrale mais cela se passe aussi chez nous dans un certain nombre d’endroits. Nous devons donc revoir totalement le cadre d’application de cette directive.

Des mesures en faveur de la compétitivité ont été prises, avec 506 millions pour les TODE, les exonérations sur le travail saisonnier et, surtout, pour le secteur des fruits et légumes, le crédit d’impôt compétitivité emploi, qui s’applique à toutes les entreprises, l’Assemblée nationale ayant ajouté les coopératives, sur la base de la masse salariale jusqu’à deux fois et demie le SMIC, et qui permet de réduire les coûts de production de 4 % dès 2013 et de 6 % dès 2014.

Nous allons donner à la représentation nationale les simulations que nous avons réalisées sur des entreprises types. Pour quinze ou vingt salariés, ce sont entre 11 000 et 16 000 euros qui, grâce aux TODE et au crédit d’impôt, peuvent être déduits, ce qui permet à nos entreprises de retrouver de la marge, de la compétitivité, des capacités d’autofinancement, et donc d’assurer leur pérennité.

Je suis comme vous dans un département où il y a beaucoup d’arboriculture. Je sais le rôle que joue ce secteur dans nos territoires et qu’il faut non seulement le préserver mais surtout le développer.

M. le président. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. Nicolas Dhuicq. Je note la technicité et la bonne volonté de M. le ministre, mais je répète qu’il y a urgence. Plus largement, je pense que ce mode de construction européenne pose de plus en plus de problèmes et qu’il faudra envisager une construction de nature fortement différente.

M. le président. Vous pouvez reprendre la parole si vous le souhaitez, monsieur le ministre.

M. Stéphane Le Foll, ministre. Je suis convaincu, monsieur le député, que le débat engagé sur le projet européen est un débat majeur et qu’il faut corriger la tendance à la libéralisation en vigueur depuis trop longtemps. Les débats sur la directive Bolkestein, que j’ai évoquée, ou sur la directive « Détachement » sont la preuve que nous avons besoin de règles nouvelles dans ce domaine. M. Cameron, il n’y a pas longtemps, a demandé la possibilité d’utiliser le marché intérieur européen mais sans contrainte sociale ni fiscale ; nous voyons bien qu’il faudra conduire le débat avec la volonté de dire que l’Europe ne doit pas être simplement un marché, du libre-échange, mais un projet politique, social et environnemental.

Conditions de transport des marchandises dans l’agglomération rouennaise

M. le président. La parole est à Mme Luce Pane, pour exposer sa question, n° 101, relative aux conditions de transport des marchandises dans l’agglomération rouennaise.

Mme Luce Pane. Monsieur le ministre chargé des transports, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur les conséquences de la fermeture du pont Mathilde dans l’agglomération rouennaise. Le 29 octobre dernier, l’incendie d’un poids lourd transportant des hydrocarbures a profondément endommagé le pont Mathilde, à Rouen, entraînant sa fermeture totale à la circulation. Principal point de passage entre les deux rives de la Seine à l’est de la capitale normande, ce pont concentrait jusqu’à sa fermeture l’essentiel du trafic des poids lourds en centre-ville.

Cet événement m’amène à poser deux questions. La première concerne l’achèvement du contournement routier de notre agglomération, par la liaison A 28-A 13, d’une part, et l’achèvement des voies d’accès du pont Flaubert, d’autre part. L’agglomération rouennaise est la seule de sa taille à ne pas avoir de rocade de contournement sur son ensemble, et la fermeture du pont Mathilde révèle la fragilité de la circulation dans notre région. Le contournement Est est donc un aménagement attendu par la région et ses habitants. De même, l’achèvement des voies d’accès du pont Flaubert est aujourd’hui une urgence, eu égard aux embouteillages quotidiens sur la Sud 3. Je souhaite connaître les intentions du Gouvernement en la matière, notamment en ce qui concerne le financement par l’État de ces deux équipements.

Ma seconde question porte sur le report du trafic de poids lourds de la route vers le rail. Cela passe par une relance du fret ferroviaire, comme vous vous y êtes engagé. Le site de triage de Sotteville-lès-Rouen subit une diminution constante de ses emplois depuis de nombreuses années. Ce site assure notamment la desserte ferroviaire du port de Rouen, premier port céréalier d’Europe. Les agents du triage de Sotteville-lès-Rouen, reconnus pour leur savoir-faire, sont particulièrement inquiets face aux menaces qui pèsent sur la tranchée couverte desservant toute la rive gauche industrielle de notre agglomération. Aussi, je souhaiterais connaître vos intentions pour relancer le fret ferroviaire, et plus particulièrement le triage de Sotteville-lès-Rouen.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la députée, merci pour votre question précise, qui concerne une situation extrêmement délicate, notamment depuis l’incendie sous le pont Mathilde qui a mis en exergue les difficultés de la traversée de l’agglomération de Rouen, avec toutes les conséquences économiques que cela comporte s’agissant, comme vous venez de le rappeler, d’un grand port. La traversée par la zone industrielle est très problématique. Il nous faut prendre en considération ce cumul de difficultés, héritage d’un parti d’aménagement urbain qui n’a pas nécessairement été au profit de la qualité de vie ni de l’efficacité économique. L’agglomération de Rouen, nœud routier à la fois régional et national, connaît aujourd’hui une dégradation énorme de ses conditions de circulation, tout particulièrement dans le centre-ville.

Dans ce contexte, le projet de contournement autoroutier de Rouen par l’est, porté par l’État, vise à délester le centre-ville de Rouen d’une part importante du trafic qui le traverse en le reportant sur une infrastructure nouvelle assurant une liaison directe entre les autoroutes A 28 et A 13. Il apportera une réponse efficace aux problèmes de sécurité – démontrés par l’incendie – et de congestion liés à ces trafics. Au-delà, le contournement relève aussi d’un grand projet d’aménagement cohérent avec les politiques locales de structuration des échanges entre les plateaux situés au nord et à l’est de Rouen et le centre-ville, avec une réappropriation des quais, option fondamentale.

À la suite du débat public de 2005, les études préalables et les phases de concertation ont été poursuivies afin de rechercher un tracé préférentiel de passage. En octobre dernier, une étape très importante a été franchie : le comité de pilotage, réunissant l’État et l’ensemble des acteurs locaux concernés, s’est accordé pour retenir un fuseau préférentiel de passage. Les études se poursuivent aujourd’hui sur cette base en vue de parvenir dans les meilleurs délais à une déclaration d’utilité publique.

Cette opération, dont le coût est estimé à plus d’un milliard d’euros, figure dans le projet de Schéma national des infrastructures de transport, et est donc à l’ordre du jour de la commission Mobilité 21 destinée à hiérarchiser l’ensemble de ces projets d’infrastructures. Ces sujets sont suffisamment importants pour que j’aie jugé bon de recevoir les différents élus ; et je me rendrai vendredi à Rouen pour discuter de ces difficultés, de l’arrivée du pont Flaubert, très problématique – je m’en étais entretenu à l’époque avec le préfet de région –, ainsi que de l’ensemble des autres grands projets.

En ce qui concerne le fret ferroviaire, votre région est une région ferroviaire s’il en est. Je partage vos préoccupations : nous essayons de relancer le fret ferroviaire ; nous ne devons pas nous résoudre à la régression de ce mode environnemental de transport, contraire aux ambitions affichées dans le cadre du Grenelle de l’environnement.

En concertation avec l’ensemble des acteurs, la mise en œuvre d’un plan d’action doit permettre d’inscrire cette activité dans une nouvelle dynamique de développement. Ce plan s’appuiera sur des actions concrètes destinées à lever les freins au développement du fret ferroviaire. C’est également l’objet de la réforme du fret ferroviaire dont vous serez saisis dans quelques semaines et qui visera aussi à préserver des sillons de qualité.

Les trains complets, les autoroutes ferroviaires, dont la relance est prévue par le Gouvernement, mais aussi l’articulation avec les ports, sont autant d’axes de la politique de transport que nous souhaitons impulser, dans une meilleure relation entre les opérateurs ferroviaires, SNCF et RFF – j’étais avec leurs deux présidents hier soir. L’enjeu du fret sera réaffirmé.

En ce qui concerne Sotteville-lès-Rouen, nous connaissons le poids de l’activité ferroviaire pour ce site, qui s’est adapté à une baisse constante du fret. Nous souhaitons que cette plateforme régionale ait toute sa place dans la relance du ferroviaire. Aujourd’hui, 85 % des effectifs de l’établissement Fret SNCF sont rattachés à ce site. Je serai très attentif à ce que la relance du fret ferroviaire conforte le site de Sotteville-lès-Rouen.

M. le président. La parole est à Mme Luce Pane.

Mme Luce Pane. Je me réjouis de la réponse de M. le ministre, importante aux plans économique et écologique comme au plan de la santé publique.

Prolongement de l’autoroute A 51

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner, pour exposer sa question, n° 106, relative au prolongement de l’autoroute A 51.

M. Christophe Castaner. Monsieur le ministre chargé des transports, je souhaite vous parler de l’A 51, cette autoroute lancée en 1987, dont le dernier coup de pioche a été réalisé en 1999, et qui s’arrête au sud de Gap, ne permettant pas de relier la ville de Marseille à la ville de Grenoble et à l’Isère. Ce projet d’autoroute unique pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et permettant de relier le nord au sud, n’est pas aujourd’hui parachevé ; une région de cinq millions d’habitants n’est pas connectée avec son nord.

Vous savez que le gouvernement précédent a abandonné le projet de poursuite de cette autoroute, envisageant, dans le cadre du Schéma national des infrastructures de transport, des investissements lourds qui seraient réalisés sur l’une des quatre solutions de l’interconnexion : la liaison de Sisteron à Grenoble par le col de Luce-La-Croix-Haute.

Vous avez souhaité, monsieur le ministre, pour des raisons parfaitement légitimes, évaluer le SNIT, qui représente un engagement totalement virtuel de 245 milliards d’euros, bien au-delà des capacités de l’État et des collectivités locales pour réaliser ces investissements.

Toutefois, s’il existe des réflexions et un plan B visant à mobiliser les sociétés autoroutières, il ne faut pas négliger le fait que l’inscription au SNIT de cette solution alternative par l’axe E 712, donc par la RD 1075 et la RN 85, était déjà une solution de repli. J’appelle donc votre attention sur le risque qu’au terme de cette évaluation le gouvernement actuel, après l’abandon de l’A 51 par le précédent gouvernement, pense devoir abandonner cette interconnexion. Il est impératif que nous réalisions, dans les années à venir, une liaison rapide et sûre reliant la région Provence-Alpes-Côte d’Azur à la région Rhône-Alpes.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, vous appelez mon attention sur une question majeure d’aménagement du territoire dans votre région : le projet d’autoroute A 51 entre le col du Fau et La Saulce, dont le coût, estimé aujourd’hui à 2,5 milliards, n’a pas été intégré par l’ancien gouvernement dans le Schéma national des infrastructures de transport. Vous avez souligné à juste titre l’enjeu que représente ce barreau manquant pour la relation entre les différentes régions et pour votre bassin de vie.

Dans ce cadre, la possibilité d’une réalisation en concession sans aucun recours à des fonds publics est évoquée. J’ai eu l’occasion de travailler sur ce dossier : il convient d’être prudent, car tous les scénarios envisagés posent des questions d’acceptabilité, financières ou juridiques. Il est important d’être dans la réalité plutôt que dans l’annonce. De ce point de vue, je sais que j’ai affaire à des élus responsables, à rebours des faux espoirs que l’on a pu faire naître en d’autres temps.

L’estimation du trafic est comprise entre 9 000 et 14 000 véhicules par jour ; les études menées montrent malheureusement que les recettes de péage couvriraient à peine les coûts d’exploitation de la nouvelle infrastructure, ce qui rendrait donc nécessaire le versement au concessionnaire par les collectivités publiques d’une subvention d’équilibre très importante. En outre, la possibilité juridique de recourir à une concession autonome n’est pas avérée, compte tenu de la faiblesse des montants de péages attendus par rapport aux standards définis par la jurisprudence.

L’une des solutions permettant de ne pas faire financer le projet sur des fonds publics serait une forme d’adossement : l’intégration du projet à une concession existante, en compensant au concessionnaire, notamment par la prolongation de la durée de concession, les dépenses supplémentaires d’investissement.

Je suis en discussion avec l’ensemble des concessionnaires et le Gouvernement a la volonté, comme je l’ai indiqué lors de l’inauguration de l’A 89, d’établir un plan de relance autoroutier dans un dialogue et des relations équilibrés entre l’État et les concessionnaires. Le projet doit donc être évalué dans le cadre de ce plan de relance.

L’adossement se heurte malgré tout à plusieurs difficultés, liées notamment à la réglementation européenne ; il faudra vérifier qu’elles ne s’opposent pas à un financement assuré de cette manière.

La discussion est ouverte et le dossier a été déposé. Vous avez souligné la compétence de la commission Mobilité 21, qui aura, avec son président Philippe Duron, à expertiser, hiérarchiser et rendre aussi réalisable que réaliste ce qui a été listé pour 245 milliards d’euros. Voilà qui est de la plus grande importance pour les territoires.

Sachez que nous sommes très attachés à ce projet : nous nous interrogeons sur la nature de son financement et sur l’éventualité de solutions alternatives auxquelles vous faisiez référence. Je suis persuadé que, mobilisés dans cet esprit de responsabilité que je soulignais, nous parviendrons à faire de ce projet important pour votre région une entreprise visible et soutenable.

M. le président. La parole est à M. Christophe Castaner.

M. Christophe Castaner. M. le ministre, je partage vos ambitions de responsabilité et de réalisation, grâce au plan de relance autoroutier. Toutefois, dans notre cas précis, il ne faudrait pas que les études relatives à l’hypothèse d’une solution autoroutière, comprenant un adossement complémentaire, gèlent la réflexion, et partant son inscription dans le schéma nouveau de transports de mobilité durable que vous allez proposer, autour de la solution RD 1 075–RN 85, dont le coût serait quatre fois inférieur à celui d’une solution autoroutière. Si, d’aventure, les raisons juridiques que vous avez évoquées rendaient la solution autoroutière impossible, il serait bon de rester mobilisés autour de cette quatrième option, qui est sans doute la moins coûteuse et la plus efficace s’agissant du développement durable.

Contournement routier d’Ernée

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec, pour exposer sa question, n° 114, relative au contournement routier d’Ernée.

M. Yannick Favennec. Le 24 octobre dernier, lors de votre audition par la commission du développement durable monsieur le ministre des transports, je m’étais permis de vous interroger sur la RN 12, et plus particulièrement sur le tronçon qui relie Alençon et Fougères, traversant ainsi tout le nord du département de la Mayenne. À ma demande et à celle de mon collègue député d’Ille-et-Vilaine Thierry Benoit, mais également de l’ensemble des acteurs de ce territoire, cette portion de la RN 12 a fait l’objet d’une étude de modernisation et de sécurisation.

À la suite de ces études, votre prédécesseur, M. Mariani, avait pris l’engagement formel, par un courrier daté du 9 février 2011, de transformer cette route nationale entre Alençon et Fougères en une 2x2 voies. Il avait également défini plus particulièrement deux priorités : le contournement de Saint-Denis-sur-Sarthon, dans l’Orne, et celui d’Ernée, dans la Mayenne.

Lors de votre audition, je vous ai demandé si, au nom de la continuité de l’État, vous confirmiez bien les engagements pris par M. Mariani : votre réponse ne m’a pas satisfait. C’est pourquoi, ce matin, je vous demande, avec M. Thierry Benoit, de vous engager solennellement à pérenniser les orientations prises par le gouvernement Fillon, en inscrivant au PDMI 2015-2020 les contournements de Saint-Denis-sur-Sarthon et d’Ernée.

Les Mayennais ainsi que les habitants du secteur de Fougères, mais également tous les acteurs de terrain concernés attendent avec fermeté une réponse claire, nette et précise de votre part : vos services doivent travailler à la sécurisation et à la modernisation de la RN 12. Pour rappel, cette route est très accidentogène : un accident mortel s’y est déjà produit depuis le début de l’année. Cette route représente également un vecteur incontournable d’attractivité, de développement économique et de désenclavement du Nord-Mayenne et du pays de Fougères.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, nous ne baisserons pas les bras. Nous attendons de vous le même engagement fort que celui pris par M. Thierry Mariani. La RN 12 n’est en effet pas un enjeu de politique politicienne : ni de droite, ni de gauche, elle représente un enjeu fondamental d’aménagement du territoire. Nous ne voulons pas que le Nord-Mayenne et le pays de Fougères soient les maillons faibles de cette route nationale.

M. Thierry Benoit. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Vous le soulignez, M. Favennec, la RN 12 est un axe important du réseau routier national et son aménagement est une préoccupation majeure de l’État. Je vais revenir sur les différents engagements pris par l’État, notamment dans le cadre du programme de modernisation des itinéraires routiers de la région Basse-Normandie : 38.3 millions d’euros, dont 30 de l’État, ont été inscrits pour la déviation de Mortagne–Tourouvre et celle de Sainte-Anne–Saint-Maurice – les déclarations d’utilité publique sont attendues pour la fin de l’année 2 014 ou le début de 2015.

Par ailleurs, dans cette région, l’achèvement des travaux de mise en 2x2 voies de la partie ouest de la déviation d’Alençon, financés par des crédits du volet routier de l’ancien CPER, est prévu pour le deuxième trimestre de 2013.

La déviation de Saint-Denis-sur-Sarthon, qui se situe dans le prolongement de celle d’Alençon, n’avait pas été jugée envisageable par le gouvernement précédent. Aussi avons-nous fait procéder à des expertises complémentaires, qui ont montré que le projet, pourtant déclaré d’utilité publique, se heurtait à des difficultés environnementales – notamment de transparence hydraulique – et que sa réalisation ne pouvait s’envisager sans modifications substantielles. Toutefois, celles-ci conduiraient à augmenter de façon significative le coût de l’opération et à mettre en cause la sécurité juridique de la déclaration d’utilité publique.

J’ai donc décidé une reprise des études pour permettre une meilleure insertion environnementale de l’opération et le maintien de son coût dans une enveloppe compatible avec les contraintes budgétaires que nous connaissons. 200 000 euros de crédits ont déjà été débloqués à cette fin en 2012 : notre ambition est d’avancer dans ces études, afin de pouvoir réaliser ces travaux dans le cadre de la prochaine génération du PDMI.

Dans le cadre du PDMI des Pays de la Loire, 35 millions d’euros, financés pour moitié par l’État, ont été inscrits pour l’aménagement de la partie sud de la déviation de Moulay-Mayenne – la partie centrale ayant été mise en service en juillet 2008. Les appels d’offres pour les marchés principaux de terrassement, d’assainissement, de chaussées et de viaducs ont été lancés durant l’été 2012 et les marchés correspondants ont été connus en fin d’année dernière.

Plus globalement, l’étude est aujourd’hui bien engagée afin de préciser le parti d’aménagement de la RN 12 entre Alençon et Fougères – ce tronçon qui vous concerne –, avec pour objectif de trouver des solutions qui répondent aux enjeux véritables de mobilité et de sécurité – vous avez raison, un accident mortel s’est encore produit où un jeune a perdu la vie. Cette phase d’étude doit nous permettre d’obtenir un diagnostic de territoire et de sécurité sur les infrastructures existantes.

Peut-être y a-t-il eu ambiguïté dans mes propos. S’il y a certainement eu un engagement de la part de mon prédécesseur, dans un courrier qui vous a été adressé, nous ne sommes cependant pas encore dans la programmation de la future génération de PDMI, qui ne commencera probablement qu’en 2015.

L’État s’engage à poursuivre son action. À l’engagement opposable, je préfère les réalisations opposables : je serai le ministre des réalisations. Vous avez raison de préciser qu’il n’y a pas de difficultés politiques, qu’il s’agit d’abord de responsabilité et de sécurité au service de la population mayennaise et de l’ensemble des départements. Je suis extrêmement attentif au caractère accidentogène de cette route et je tenterai de trouver les solutions afin de rendre faisable ce qui n’est aujourd’hui encore qu’un projet.

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec.

M. Yannick Favennec. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour cette réponse, plus claire en effet que celle que vous aviez donnée lors de la réunion de la commission. Vous dites avec raison que le PDMI ne prendra effet qu’à partir de 2015, mais ce que nous souhaitons, avec Thierry Benoit et l’ensemble des acteurs de terrain concernés, c’est d’être prêts afin d’inscrire réellement ce projet dans la prochaine génération de PDMI. Nous comptons sur vous, et vous pouvez également compter sur notre détermination à interagir avec vous, afin de parvenir à un résultat satisfaisant pour notre territoire.

M. Thierry Benoit. Bravo, bon travail !

Achèvement des tronçons des autoroutes A 48 et A 51

M. le président. La parole est à M. Alain Moyne-Bressand, pour exposer sa question, n° 117, relative à l’achèvement des tronçons des autoroutes A 48 et A 51.

M. Alain Moyne-Bressand. Ma question porte sur l’achèvement du tronçon manquant de l’A 51, Grenoble–Sisteron, et celui de l’A 48, Ambérieu–Bourgoin-Jallieu, tronçons autoroutiers qui attendent d’être terminés depuis près de vingt ans. Ces deux tronçons manquants sont stratégiques, tant en termes d’aménagement du territoire que de développement économique ; pour rappel, ils ont été programmés à l’origine comme un doublement de l’A 7.

Ils sont conformes au Grenelle de l’environnement, dont l’article 10 prévoit que « tout ouvrage commencé doit être terminé, et ce dans les meilleurs délais ». En outre, le 26 janvier 2012, François Hollande, alors en campagne électorale, déclarait dans Le Dauphiné Libéré : « Il faut terminer les [autoroutes] qui sont engagées. Si ces infrastructures sont indispensables pour la sécurité, si elles correspondent à un projet de désenclavement, et si elles sont tournées vers l'Europe, j'y suis favorable ».

Par ailleurs, plusieurs présidents de conseils généraux, que vous avez reçus, dont M. André Vallini pour l'Isère, ont annoncé que le projet du tronçon de l'A 51 pouvait être réalisé avec des fonds privés, sans aucun recours à des fonds publics. Quelle est votre position sur cette question ? Pouvons-nous compter sur le soutien du Gouvernement pour que les promesses électorales soient tenues et que notre région voie la finalisation de ces ouvrages, étant donné que toutes les conditions posées par le président Hollande sont réalisées ?

M. le président. La parole est à M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Il ne s’agit pas, monsieur Moyne-Bressand, de promesses électorales mais, comme vous l’avez souligné, d’un constat de carence qui dure depuis des années et dont votre région pâtit. Vous dites qu’il conviendrait de terminer ce qui a été commencé, mais on ne peut rendre le Président de la République responsable de ce qui n’était alors que le constat d’une absence de suivi d’une politique des infrastructures de transports, telle qu’elle a été menée jusqu’à présent.

Qu’il s’agisse du contournement de Montpellier ou de la L 2 à Marseille, nous sommes en train d’expertiser et de réaliser un certain nombre d’infrastructures qui n’ont pas été achevées. Il est en effet insupportable pour nos concitoyens de voir un peu partout sur le territoire de notre pays ici un viaduc, là un rond-point, là encore une déviation qui ne mène nulle part, à cause du morcellement et du découpage des projets.

Vous citez, suite à M. Castaner, les difficultés relatives à l’A 51. Comme je l’ai déjà précisé, il existe un certain nombre de scenarii, mais le coût envisagé est loin d’être minime : 2,5 milliards d’euros pour l’A 51 et un peu plus de 1 milliard d’euros pour l’A 48 – ce ne sont ni des petites sommes, ni des petits chantiers. Il faut donc que nous puissions examiner le plus pragmatiquement possible les conditions de réalisation des désenclavements, dans le cadre d’un schéma global d’aménagement, ainsi que la sécurité nécessaire de solutions proposées parfois un peu trop rapidement.

Nous devons nous entourer de toutes les garanties juridiques, notamment relativement aux adossements. Le Gouvernement est prêt pour les plans de relance, si les concessionnaires autoroutiers sont en capacité de nous dire quels sont les tronçons qui peuvent faire l’objet d’un adossement et relancer ainsi des programmes d’investissement d’avenir – le président a d’ailleurs présidé un comité interministériel à ce sujet.

Les projets qui peuvent déjà être validés, comme celui du tunnel de Toulon, doivent l’être en toute responsabilité. Je suis en discussion depuis des mois désormais avec les concessionnaires autoroutiers et j’aimerais que la volonté qu’ils affichent médiatiquement se traduise par un acte de confiance entre eux et l’État, pour que l’on puisse examiner l’ensemble de ces projets. Si la solution de l’adossement, n’était pas juridiquement la bonne solution, pour des raisons de concurrence européenne, il faudrait s’intéresser à différentes possibilités, y compris celle d’une mobilisation des financements publics, qui serait alors la seule solution envisageable.

Différents dispositifs sont envisageables : cet après-midi, je serai au Sénat pour débattre de l’éco-taxe poids lourds, et il faudra aussi regarder quels sont les moyens dont disposent les collectivités pour accompagner ce type de projets. Ce tronçon manquant mérite un vrai travail de fond car il répond certainement à une attente locale. Je souhaite aborder ce projet lourd de plusieurs milliards avec pragmatisme, avec le souci de la sécurité financière et juridique.

M. le président. La parole est à M. Alain Moyne-Bressand.

M. Alain Moyne-Bressand. Je rappelle qu’en 1997 l’enquête d’utilité publique avait été engagée et que, après le changement politique que nous savons, tout le projet est tombé à l’eau. Depuis, rien ne s’est fait, et les élus concernés l’ont regretté. J’ai écouté avec beaucoup d’attention, monsieur le ministre, ce que vous venez de dire concernant ce projet important financièrement mais aussi pour notre région. Je souhaite que l’optimisme du président du conseil régional et des présidents des conseils généraux ne retombe pas et que l’on puisse y voir plus clair. Je vous en remercie à l’avance.

Gratuité des péages franciliens des autoroutes A 10 et A 11

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour exposer sa question, n° 119, relative à la gratuité des péages franciliens des autoroutes A 10 et A 11.

M. Jean-Frédéric Poisson. Les habitants du sud de l’Île-de-France, monsieur le ministre, qui résident dans l’Essonne ou dans les Yvelines, ont trois accès aux autoroutes A 10 et A 11, c’est-à-dire les autoroutes Paris-Bordeaux et Paris-Nantes. L’accès autoroutier coûte à ceux qui l’empruntent tous les matins pour aller travailler plus de 600 euros par an, et je rappelle qu’il s’agit d’une zone rurale en Île-de-France. Je sais bien que la notion de ruralité francilienne est parfois difficile à percevoir pour certains esprits, c’est-à-dire pour ceux qui travaillent en deçà du boulevard périphérique, mais il y a neuf circonscriptions rurales dans cette région et j’ai l’honneur d’être le député de l’une d’entre elles. Nous avons le tort infini d’habiter un territoire qui n’est pas exactement configuré comme le reste de la région : pas de densité urbaine, pas de réseau de transport dense, peu de dessertes de transports de substitution à l’autoroute. Il faut donc que les Sud-Yvelinois et les habitants de l’Essonne empruntent l’autoroute pour aller travailler. Il leur en coûte 600 euros par an, et vous comprendrez, monsieur le ministre, que beaucoup de budgets familiaux ne peuvent pas aujourd’hui supporter une telle dépense. Lorsque les gens sont néanmoins contraints d’aller travailler en voiture, ils empruntent les réseaux secondaires, ce qui produit sur nos départementales de campagne, quelquefois sur des chemins ruraux qui servent de déviation, une saturation qui a beaucoup d’effets quant au coût à supporter par les collectivités locales mais aussi en termes de pollution, de nuisances sonores et j’en passe.

Il se trouve que les trois accès autoroutiers d’Allainville-Aux-Bois, d’Ablis et de Dourdan se situent sur un tronçon à péage qui est le plus proche de Paris. Les autres accès aux autoroutes franciliennes sont en effet payants à partir de cinquante kilomètres de la capitale, tandis que ceux-ci le sont dès vingt-trois kilomètres. Il y a donc, en plus des inconvénients que je viens de mentionner, une injustice flagrante à l’égard des habitants du sud des Yvelines et du sud de l’Essonne qu’il convient de réparer.

Depuis quelques années, une association, que nombre d’élus et moi-même soutenons, essaie d’obtenir la gratuité des trois péages des autoroutes A 10 et A 11, au sud de l’Île-de-France. Après une marche à petits pas, qui a conduit récemment à la tenue d’une table ronde avec Cofiroute, l’exploitant du réseau, nous espérons toujours voir progresser ce dossier pour que l’équité et une facilité quotidienne soient accordées aux familles qui en ont besoin.

Ma question est donc simple, monsieur le ministre, et j’y associe mon collègue Philippe Vigier, député de l’Eure-et-Loir, dont le nord de la circonscription est également concerné : quelle est la prochaine étape vers la gratuité de l’accès aux péages des autoroutes A 10 et A 11 dans les Yvelines ?

M. Jacques Alain Bénisti. Très bonne intervention !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, vous soulignez que, depuis plusieurs années, certaines associations d’usagers demandent la gratuité de l’A 10 et de l’A 11 en Île-de-France. Cette situation n’est pas atypique, elle se retrouve sur d’autres tronçons d’infrastructures autoroutières – l’A 1, l’A 4, l’A 5, l’A 14 et le tunnel duplex de l’A 86 –, eux aussi des sections à péage à proximité de la capitale et qui font l’objet d’un certain nombre de revendications. Je rappelle que la section autoroutière en question est concédée à une société en vertu d’un contrat signé avec l’État et que toute modification unilatérale doit donner lieu à une compensation financière, c’est une règle de droit opposable. Soyons clairs : imposer la gratuité de ce tronçon à la société concessionnaire supposerait de lui verser une indemnité s’élevant à plusieurs centaines de millions d’euros, à la charge des autres usagers ou de l’État. En effet, du fait du principe de l’égalité devant le péage, cette gratuité ne pourrait se limiter aux seuls usagers locaux mais s’appliquerait aux 90 000 véhicules qui empruntent chaque jour cette section. Vous conviendrez que la situation économique actuelle n’est pas la plus favorable pour ce type d’indemnisation.

En revanche, les usagers locaux, à peu près 5 000 par jour pour ce qui est de l’échangeur de Dourdan, un peu moins pour Ablis et Allainville, bénéficient déjà de diverses dispositions mises en place localement : des remises tarifaires dans le cadre d’abonnements réduisent jusqu’à 70 % le coût d’utilisation du péage, il y a un aménagement de parkings de covoiturage à Dourdan, à Ablis et à Allainville, et surtout un effort extrêmement important a été engagé par le conseil général de l’Essonne et par la région Île-de-France pour proposer des lignes de transport en commun régulières qui empruntent l’autoroute pour desservir le pôle intermodal de Massy – deux lignes RER et une ligne TGV. Je souhaite que l’on poursuive avec le conseil général la démarche engagée pour répondre aux préoccupations des usagers, notamment locaux. Certes, cela ne répondra pas à vos vœux de gratuité totale, mais j’en ai souligné les limites, voire les impasses. Il s’agit d’aménager, à titre expérimental, une partie terminale de l’autoroute A10 afin de permettre une circulation de bus sur des voies dédiées. Nous essayons de démultiplier ce type d’aménagement lorsque aucune question de sécurité ne s’y oppose. Il est important de pouvoir offrir la plus grande mobilité à un coût accessible aux habitants de votre région.

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, mais elle ne me surprend pas vraiment. Elle se situe, comme on dit au Quai d’Orsay, dans la continuité parfaite de celles de vos prédécesseurs, que j’avais déjà contestées.

Je ferai deux remarques. La première, c’est que le prix des péages et les recettes qui en découlent font à l’évidence partie d’un contrat de concession passé par l’État avec Cofiroute, mais je me souviens que, lorsqu’on a révisé les derniers avenants, j’étais dans le bureau de votre prédécesseur, Dominique Bussereau, pour y inclure le fameux parking-relais au péage de Dourdan, désormais dans l’escarcelle de ma communauté de communes. C’est une décision qui date d’il y a trois ans. Vous voyez donc qu’il est possible d’inclure dans les responsabilités du concessionnaire des choses auxquelles il n’aurait peut-être pas pensé spontanément. Deuxièmement, les concessionnaires d’autoroute, celui-ci en particulier, dégagent des marges d’exploitation suffisamment confortables pour envisager de faire plus d’efforts en faveur des habitants qui sont dans leur région. C’est un des arguments des associations et il faut l’entendre. Je comprends que nous allions à marche lente vers l’objectif que nous souhaitons tous deux, mais il y a encore des efforts à faire. Du fait de la situation particulière des Franciliens du sud, on devrait pouvoir trouver des modalités nouvelles. Je travaille avec les associations concernées, et j’aurai très certainement l’occasion, monsieur le ministre, de vous saisir à nouveau, dans les mois qui viennent, de ce dossier qui pourrait nous occuper quelque temps.

financement de l'aménagement
des quais des gares de Dordives, Ferrières et Fontenay

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour exposer sa question, n° 121, relative au financement de l'aménagement des quais de Dordives, Ferrières et Fontenay.

M. Jean-Pierre Door. Monsieur le ministre, je vous remercie par avance de votre écoute concernant un dossier qui fait l’objet depuis maintenant trois ans de questionnements et de débats : il s’agit du dossier des gares SNCF de Ferrières-en-Gâtinais et de Dordives, dans le Loiret. Je souhaite que l’on conclue enfin ce problème quelque peu ubuesque. Vous savez de quoi il s’agit puisque vous m’avez répondu par courrier, de même, il y a quelques jours, qu’aux sénateurs Jean-Pierre Sueur et Éric Dolige, par ailleurs président du conseil général. Le préfet de région a également été très impliqué de façon positive.

Monsieur le ministre, ces gares sont très importantes car 200 à 250 usagers se rendent chaque jour par le train à leur travail dans la région parisienne ; ils sont issus d’un territoire en pleine expansion démographique. La desserte sur la ligne SNCF Paris-Montargis-Nevers est assurée, à raison d’une vingtaine de trains par jour, par la ligne R du Transilien que le syndicat des transports d’Île-de-France, le STIF, a choisi par commodité pour son propre trafic. Or la situation est ubuesque : soit les quais sont trop courts, soit les trains sont trop longs. En effet, le STIF a décidé, en raison de l’affluence, d’allonger ses trains d’un wagon, et les quais sont de ce fait devenus trop courts, ne permettant plus, par souci de sécurité, l’arrêt à cet endroit. Les usagers vont donc regarder passer les trains. Je vous laisse imaginer la réaction des populations, mais également de tous les élus de ce territoire. Ils vont devoir utiliser leur voiture pour venir dans la région parisienne s’ils ne veulent pas risquer de perdre leur travail.

Il y a une solution, confirmée par le cabinet d’études Ingerop, financé par RFF : elle consiste à allonger les quais de quelques mètres dans les deux gares pour un montant total d’environ 3 millions d’euros. La région Centre et la SNCF, ainsi que RFF à hauteur de 20 %, sont appelés à financer, mais il manque 50 %. Cela n’a que trop duré : trois ans de débats, trois ans de questions. Monsieur le ministre, je vous demande, au nom des habitants, de conclure ce dossier pour que RFF et les autres financeurs augmentent leur participation, afin que l’on puisse allonger les quais et que la population puisse prendre le train.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Vous avez souligné l’une de mes préoccupations depuis que ma nomination en qualité de ministre des transports a été officialisée. La situation que vous qualifiez d’ubuesque l’est en effet. Il s’agit d’offrir au plus grand nombre l’accès quotidien au train, mais des difficultés ont été en l’occurrence enregistrées. Le STIF a pris la décision d’allonger les trains de la ligne R du Transilien. C’est une bonne décision mais, si elle répond à la capacité du matériel roulant, elle ne répond pas à toutes les difficultés, en particulier s’agissant de la longueur des quais.

Vous avez souligné combien j’ai été sollicité par le sénateur et président de la commission des lois constitutionnelles, M. Jean-Pierre Sueur, qui m’a immédiatement indiqué les difficultés de longueurs de quais, tant à Dordives qu’à Ferrières-Fontenay. Le coût est estimé à 1,4 million pour les travaux à Dordives et à 1,6 million pour la gare de Ferrières-Fontenay. J’ai tout de suite demandé à RFF de prendre les mesures nécessaires pour que ces travaux soient effectués car ils peuvent régler des questions du quotidien. Il ne s’agit tout de même pas de mobiliser des milliards, et la situation actuelle est extrêmement pénalisante pour le transport de tous les jours.

Plus globalement, au-delà de cette demande que j’ai appuyée auprès du président du RFF, l’ancien comme le nouveau, Jacques Rapoport, que j’ai encore rencontré hier soit avec M. Pepy, il est important que les opérateurs ferroviaires, que ce soient le gestionnaire d’infrastructures ou l’utilisateur, SNCF ou RATP, fassent preuve d’efficacité dans la mise en place des cadencements, dans l’entretien du matériel et dans l’adaptation des conditions d’accueil des usagers. Il en sera question à l’Assemblée demain, où un groupe de travail se réunit à ce sujet, mais aussi à travers une série de préconisations extrêmement claires que j’ai demandées pour les prochains jours aux deux opérateurs, à savoir la SNCF et RFF.

Nous devons donc coordonner nos efforts – je m’entretiens avec Jean-Paul Huchon compte tenu de la responsabilité du Syndicat des transports d’Île-de-France – pour apporter des réponses immédiates à ces difficultés qui ne sont pas insurmontables mais qui pénalisent beaucoup les populations. Vous me trouverez donc à vos côtés pour que nous œuvrions ensemble à la résolution de ces difficultés dans les meilleurs délais.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Merci, monsieur le ministre, de votre soutien. Effectivement, les choses n’ont que trop duré pour cette population : trois ans de débats et trois ministres saisis. Le préfet de région, les sénateurs et surtout la population sont très concernés. Le train est un outil extraordinaire de déplacement pour ceux qui vont travailler à Paris tous les matins : plus de 7 000 personnes partent de Cergy et quelque 200 à 300 autres d’un territoire situé entre la Seine-et-Marne et le Loiret.

Les habitants concernés entendent débattre de la ligne à grande vitesse reliant Paris à Clermont-Ferrand, qui représente un budget de 15 milliards d’euros,…

M. Jean-Paul Bacquet. Très bon projet !

M. Jean-Pierre Door. …tout en constatant que leur petit quai de gare n’est pas assez long pour permettre l’arrêt des trains. Il y a vraiment deux poids deux mesures. Merci de comprendre que nous devons répondre rapidement à ces deux petites gares du Gâtinais.

Desserte ferroviaire du Montreuillois

M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour exposer sa question, n° 123, relative à la desserte ferroviaire du Montreuillois.

M. Daniel Fasquelle. Monsieur le ministre chargé des transports, ma question ne va pas vous surprendre puisque, dès le 18 mai, je vous écrivais sur ce sujet que vous connaissez bien : l’avenir de la ligne ferroviaire reliant Saint-Pol-sur-Ternoise, Étaples et Le Touquet.

Cette desserte est vitale pour tout le sud du Pas-de-Calais – l’arrondissement de Montreuil mais aussi le Saint-Polois –, un territoire rural sans transports collectifs et donc dépendant du train. Je me fais ici le porte-parole de très nombreux concitoyens, notamment des élèves et étudiants des établissements concernés. Outre les collèges et lycées, citons les maisons familiales et rurales de Marconne, Hucquelier et Campagne-lès-Boulonnais, dont les directeurs m’ont écrit, le lycée agricole de Rollancourt, le lycée hôtelier du Touquet. Citons encore l’Université du Littoral Côte d’Opale à Boulogne-sur-Mer qui accueille aussi des étudiants du sud du département venant en train à défaut d’autres moyens de locomotion et d’un budget suffisant pour louer une chambre à l’année dans les villes universitaires.

Cette desserte est vitale aussi pour les apprentis et les entreprises. Selon un sondage effectué par la chambre de commerce et d’industrie de la Côte d’Opale, cette ligne de chemin de fer est jugée essentielle par une entreprise sur trois et un salarié sur quatre, sans parler des demandeurs d’emploi, qui ont besoin de se déplacer pour retrouver un travail, et des malades qui utilisent le train pour aller se faire soigner.

Je n’ai pas besoin de vous convaincre mais je voulais quand même le rappeler parce qu’il s’agit d’un enjeu vital. Il est urgent de moderniser cette ligne qui n’a pas fait l’objet de travaux depuis quarante ans, qui compte cinquante-cinq passages à niveau et utilise des technologies très anciennes qui auraient davantage leur place dans un musée. Il est surtout urgent de rénover le ballast et les traverses, qui sont en si mauvais état que la vitesse a dû être considérablement réduite et que le service s’en trouve affecté. Si l’on ne fait rien, dans cinq ans, dans dix ans au plus, cette ligne sera fermée.

La mobilisation s’organise. Les pays du Ternois, des Sept Vallées, du Montreuillois et leurs élus locaux montrent qu’ils croient à ce dossier. Avec la communauté de communes Mer et terre d’Opale je porte un dossier de rénovation de la gare d’Étaples et du Touquet, avec bien évidemment les élus d’Étaples.

La région a été sensibilisée. Daniel Percheron et Alain Wacheux ont annoncé 17,5 millions d’euros d’investissements mais cela ne suffira pas : il faut entre 35 et 50, voire 60 millions d’euros pour sauver cette ligne. Nous avons aussi besoin du soutien du ministre des transports, d’où ma question : dans quelle mesure pouvez-vous épauler les élus locaux et régionaux pour sauver cette ligne vitale pour notre territoire ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, cher Daniel Fasquelle, merci de la confiance que vous témoignez à ce gouvernement pour répondre à ces difficultés fort anciennes, comme vous l’avez souligné vous-même, et qui montrent que certaines carences ont pénalisé le territoire.

Vous n’avez effectivement pas tardé à me saisir à propos des difficultés de cette ligne importante pour tout le Pas-de-Calais, de Saint-Pol sur Ternoise à Étaples-sur-Mer. Avec d’autres élus, tels Jean-Jacques Cottel et Jean-Claude Leroy, vous avez fait valoir que la modernisation était indispensable. Les investigations menées sur cette ligne extrêmement dégradée ont montré un niveau de corrosion avancé des traverses. Je ne vais pas énumérer les problèmes de peur d’inquiéter, mais l’abaissement du seuil de vitesse répondait à un réel besoin de sécurité sur les TER.

Face à l’urgence de la situation, la région Nord-Pas-de-Calais a décidé, dès fin 2011, de financer pour un montant de 200 000 euros les études préliminaires de modernisation de la ligne. J’ai immédiatement demandé à Réseau ferré de France d’engager rapidement des travaux de gros entretien avant de pouvoir purger les difficultés majeures. Ces premiers travaux ont été réalisés, ce qui a occasionné des coupures de trafic – pénalisantes mais indispensables – durant quelques semaines.

Ce n’est pas suffisant. La remise en état complète de la ligne, permettant de revenir à la vitesse de circulation de 100 kilomètres à l’heure, nécessite d’importants travaux complémentaires dont le montant est évalué à une trentaine de millions d’euros. La région est prête à s’engager et RFF suit ce dossier avec beaucoup d’intérêt. Puisque vous m’avez demandé d’être à vos côtés, je vous demande à mon tour de mobiliser tout le territoire parce que peu de lignes aussi sensibles en termes d’aménagement du territoire sont dans un état aussi dégradé.

Par ailleurs, j’ai à cœur d’activer l’électrification de la ligne Boulogne-Amiens-Paris et de ne pas nous en tenir aux délais annoncés. Il s’agit d’apporter des solutions plus rapides à cette zone ferroviaire trop longtemps oubliée, victime d’autres grands aménagements. Cela répond aux enjeux de cette majorité et du Président de la République lorsqu’il s’agit de répondre aux transports du quotidien.

M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle.

M. Daniel Fasquelle. Merci, monsieur le ministre, de l’intérêt que vous portez à cette ligne. C’est un combat que je mène depuis plusieurs années et je continuerai à le faire avec tous les élus du territoire. Vous pouvez compter sur nous pour nous mobiliser, pour accompagner cette démarche, y compris en nous engageant dans la modernisation des différentes gares.

Je prends aussi bonne note de votre combat en faveur de l’électrification de la ligne Paris-Amiens-Boulogne, un projet essentiel. L’électrification de la dizaine de kilomètres manquante nous permettrait de gagner un temps précieux et d’améliorer le confort, ce que réclament les usagers.

Indemenisation des orphelins de guerre

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet, pour exposer sa question, n° 103, relative à l’indemnisation des orphelins de guerre.

M. Jean-Paul Bacquet. Ma question à M. le ministre des anciens combattants concerne les orphelins de guerre.

Plusieurs textes sont parus au cours des dernières années, parmi lesquels le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000, instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont le père ou la mère a été déporté depuis la France dans le cadre des persécutions antisémites et raciales, et le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004, instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale.

Pour indispensables qu’elles aient été, ces reconnaissances – tardives – ont paradoxalement institué une différence entre les orphelins de guerre, excluant de facto du droit à indemnisation ceux ne correspondant pas aux critères restrictifs fixés par lesdits décrets.

Il en résulte un problème en matière d’égalité et de non-discrimination entre personnes ayant objectivement le même statut d’orphelin de guerre. Cette question a été souvent relevée par les associations de pupilles de la nation et d’orphelins de guerre. Ceux-ci se sentent injustement exclus d’un dispositif basé sur le contexte dans lequel se sont retrouvés les parents et non sur la situation des enfants, alors qu’ils sont les premiers concernés par les mesures exposées.

André Lefebvre, président de l’ANPNOGD, a fait savoir à ses adhérents – j’ai lu le courrier qui leur a été adressé – qu’à la suite d’une rencontre entre une délégation de son association et le ministère, ce dernier a reconnu la souffrance des enfants orphelins, mais qu’aucune somme n’était actuellement budgétée pour l’indemnisation, malgré le fait que le nombre d’orphelins et de pupilles soit certainement moins important que les évaluations réalisées jusqu’ici.

De plus, estimant que ces pupilles étaient trop âgés pour qu’une juste reconnaissance de la nation soit encore reportée, le ministère, en préconisant la rente plutôt que le capital, a saisi le secrétariat général de l’administration.

Cette inégalité n’ayant que trop duré, et bien que chacun comprenne la difficulté du contexte financier du pays et de l’effort collectif demandé à la nation, j’aimerais savoir quelles mesures le ministère envisage d’apporter au droit existant afin d’étendre le bénéfice du dispositif d’indemnisation à tous les orphelins de guerre et pupilles de la nation. Cela ne sera que justice, même si elle est bien tardive.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la francophonie.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser mon collègue Kader Arif, qui est actuellement à Lille pour représenter le ministre de la défense au cinquième forum international de la cybercriminalité.

Comme vous, je suis très attachée au devoir de mémoire. Comme vous, j’entends et je comprends la détresse et la souffrance de celles et ceux que la guerre a privés de leurs parents. C’est pourquoi j’accorde une attention toute particulière aux préoccupations concernant l’accompagnement par l’État des orphelins de guerre et des pupilles de la nation.

C’est notamment le cas de votre requête qui vise à faire bénéficier l’ensemble des orphelins et pupilles des mécanismes d’indemnisation prévus par les décrets du 13 juillet 2000 et du 27 juillet 2004.

Ces décrets répondent toutefois à une situation tout à fait spécifique : celui de 2000 institue une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions en raison de leur « race » ; celui de 2004 complète ce dispositif en indemnisant les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Deuxième Guerre mondiale.

Dans l’un et l’autre cas, il s’agit de prendre en compte l’extrême inhumanité des persécutions et crimes en question, et un traumatisme, notamment celui de la déportation, dépassant le strict cadre des conflits armés.

Ce dispositif doit rester fidèle à sa justification essentielle qui est de consacrer solennellement le souvenir des victimes de la barbarie nazie à travers leurs enfants mineurs au moment des faits. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de maintenir cette spécificité et de ne pas étendre le champ de ces deux décrets, qui seront néanmoins mis en œuvre de façon éclairée, afin de leur donner leur pleine portée.

Par ailleurs, je me permets d’ajouter qu’à ce jour, en matière d’indemnisation, le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre prévoit déjà que tout orphelin de guerre perçoit, ou a perçu jusqu’à son vingt et unième anniversaire, une pension spécifique qui s’ajoute, ou s’est ajoutée, à la pension de veuve versée à sa mère.

M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Bacquet.

M. Jean-Paul Bacquet. Madame la ministre, je suis surpris de votre réponse. En premier lieu, la nation n’a pas seulement un devoir de mémoire, elle a également un devoir de reconnaissance et un devoir de réparation. En second lieu, je suis étonné que la mise en place d’une réforme portée par une ambition de justice ait créée d’autres injustices. Pire encore, on a pris en 2000 un décret instituant une réparation en 2004 on l’a corrigé, car il était insuffisant, par un nouveau texte améliorant l’indemnisation, mais on se rend compte ensuite que ces deux textes n’ont fait qu’accentuer l’injustice vis-à-vis des orphelins.

Les orphelins, qu’ils le soient parce que leurs parents ont été déportés ou que leur père est mort dans le torpilleur Sirocco, sont orphelins. Ils demandent non pas la pension à laquelle ils ont droit en tant que pupilles de la nation, mais un droit à réparation au même titre que ceux qui l’ont déjà obtenu.

Madame la ministre, cela constitue une inégalité, vous ne pouvez le contester. Cette inégalité suscite indignation, amertume et incompréhension de la part de ceux qui attendent réparation. Elle donne lieu à des explications et des justifications de la part de ceux qui ne sont pas indemnisés, fondées sur des arguments que nous aimerions malheureusement ne plus jamais entendre.

Enfin, cela concerne des personnes âgées aujourd’hui de 70, 80 ans, voire plus. Ne croyez-vous pas qu’il serait temps de corriger la chose ? Ces enfants ont souvent été élevés seuls, par une mère veuve, sans grands moyens, dans un contexte difficile. Ces enfants ont souvent fait la guerre d’Algérie. Ils ont souvent servi la nation quand elle le leur a demandé. Madame la ministre, je le crois, en 2000, on a créé une injustice en voulant à juste titre offrir une réparation, cela fait aujourd’hui treize ans. En 2004, on a voulu remédier à cette injustice par un nouveau texte qui est insuffisant, cela fait huit ans. Aujourd’hui, nous avons la responsabilité collective, je dis bien collective, sur tous les bancs de l’hémicycle, de corriger cette nouvelle injustice.

Critères d'éligibilité au crédit impôt recherche

M. le président. La parole est à M. Philippe Bies, pour exposer sa question, n° 113, relative aux critères d'éligibilité au crédit d’impôt recherche.

M. Philippe Bies. Je souhaitais interroger M. le ministre du redressement productif sur les critères encadrant le crédit d’impôt recherche suite à l'annonce par l'entreprise Delphi de la suppression de 103 emplois à Illkirch-Graffenstaden dans le Bas-Rhin. L'entreprise Delphi conçoit et fabrique des composants électriques et électroniques pour l'automobile. Son site d'Illkirch est spécialisé en recherche et développement dans la mécatronique, plus particulièrement dans les systèmes électroniques de commandes pour les véhicules PSA, Fiat et Renault. La direction de Delphi a annoncé au mois de décembre la suppression de 103 postes sur le site d'Illkirch qui en compte 140, principalement des postes d'ingénieurs. Il s'agit donc d'emplois à haute valeur ajoutée. Ces emplois seront délocalisés sur une plateforme en Pologne dont les ingénieurs, ironie du sort, ont été formés par ceux-là mêmes qui vont être licenciés. Or Delphi Illkirch a bénéficié et continue de bénéficier d'aides publiques et notamment de la mesure standard du crédit d’impôt recherche qui lui a permis d'obtenir un crédit d'impôt de près de 4,6 millions d'euros depuis 2008. Face à ce type de situation quelles sont les intentions du Gouvernement, compte tenu des critères actuels ? Est-il possible d'encadrer plus strictement le crédit d’impôt recherche pour que le retour sur investissement profite en priorité aux salariés et à l'économie française ?

M. le président. La parole est à Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie. Monsieur le député, je vous prie de bien vouloir excuser Arnaud Montebourg, actuellement retenu au comité stratégique de la filière nucléaire à Montbard.

La stratégie mise en œuvre par Delphi n'apparaît pas compréhensible. Le groupe américain a décidé de restructurer sévèrement ses sites d'Illkirch dans le Bas-Rhin et de Villepinte en Seine-Saint-Denis, dédiés au développement de systèmes électroniques automobiles.

Cette décision s'accompagnera de la suppression de 103 emplois sur 140 à Illkirch ainsi que de 54 emplois sur 78 au sein du centre technique de Villepinte. La direction du groupe a annoncé son intention de transférer son activité développement à Cracovie en Pologne. Sur les deux sites, les équipes de recherche et d'innovation seraient cependant maintenues.

Cette stratégie de concentration des activités de développement de la division « Electronique et Sécurité » sur un seul site concerne d'ailleurs toute l'Europe : le groupe a mis un terme récemment à l'exploitation de plusieurs sites techniques en Allemagne et en Turquie.

Cette stratégie est d'autant plus incompréhensible que, lors de la conception d'un produit, la phase de développement est celle qui demande le plus d'échanges avec le client afin d'adapter les technologies issues de la recherche aux véhicules du client.

Les services du ministère du redressement productif sont en lien avec Delphi pour obtenir des éclaircissements sur les intentions industrielles de l'équipementier américain sur ces sites et sur l'ensemble de ses emprises en France.

Activité du site de Texas instruments à Villeneuve-Loubet

M. le président. La parole est à M. Lionnel Luca, pour exposer sa question, n° 118, relative à l'activité du site de Texas Instruments à Villeneuve-Loubet.

M. Lionnel Luca. Ma question s’adressait à M. Montebourg puisqu’elle concerne la fermeture programmée du site de Texas Instruments dans les Alpes-Maritimes à Villeneuve-Loubet.

Rien ne permettait d’envisager une telle issue à la restructuration décidée il y a trois ans, après les engagements pris par la direction américaine avec Christine Lagarde.

Cette annonce brutale va porter un grave coup à la première technopole européenne de Sofia-Antipolis dont Texas Instruments est le fleuron, et à la Côte d’Azur d’une manière générale.

J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec M. le ministre et avec son cabinet. La question que je pose ce matin est la suivante : M. le ministre a-t-il pu prendre contact avec la direction américaine à Dallas pour négocier avec elle le maintien du site comme cela était prévu il y a encore quelques semaines. Il s’agissait de conserver 150 à 200 emplois sur le site en attendant une conjoncture plus favorable, comme cela a déjà été le cas par le passé.

Texas Instruments a reçu au titre du crédit d’impôt recherche environ 100 millions d’euros ces cinq dernières années. L’entreprise avoue également avoir investi 372 millions d’euros. Pour quoi faire si elle part en abandonnant une activité essentielle pour notre département et, oserais-je dire, pour notre pays ?

Ma question, je l’avais précisé, est celle-là : quelle suite sera donnée à l’entretien qu’avait eu, avec succès, Mme Lagarde ? Seul le rapport de force établi par le ministre du redressement productif avec la direction américaine pourra faire plier cette multinationale qui ne manifeste à l’évidence pas une grande considération pour notre pays puisque la France sera le seul site fermé dans le monde.

M. le président. La parole est à Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie. Monsieur le président, messieurs les députés, monsieur le député, Texas Instrument a eu une influence considérable dans l'histoire industrielle des Alpes-Maritimes. Le groupe s'est en effet implanté sur la Côte d'Azur, dix ans avant la création de Sophia Antipolis, participant ainsi au rayonnement international de la région.

Le groupe Texas Instruments a annoncé le 14 novembre dernier l'arrêt des activités en matière de microprocesseurs et de connectivité sans fil destinés aux smartphones et aux tablettes. Ce choix s'explique à la fois par le développement de technologies propres par deux des principaux clients de Texas Instruments et par les difficultés d'un troisième.

Cet arrêt se traduit par la suppression de 517 postes en France dont 514 sur le site de Villeneuve-Loubet, entraînant sa fermeture. 1 700 emplois seront par ailleurs supprimés au niveau mondial dans les sites de Dallas, Bangalore et Tel Aviv. Avec 50 emplois chez les sous-traitants et les emplois induits (gardiennage, sécurité, cafétéria), ce sont plus de 600 emplois qui sont supprimés sur la Côte d'Azur.

Monsieur le député, parfaitement conscient de l'importance de ce dossier pour la Côte d'Azur, le ministère du redressement productif a pris acte de la forte mobilisation relayée par nombre d'élus des territoires concernés. Des rencontres avec la direction de Texas instruments et les syndicats ont eu lieu en janvier. Des questionnements précis sur sa stratégie sont adressés au groupe. Une réflexion sur la filière des semi-conducteurs, sur les meilleurs moyens de développer l'attractivité de Sophia-Antipolis ainsi que sur l'avenir des salariés a d'ores et déjà été engagée. Soyez assuré que vous serez tenu régulièrement informé des évolutions de ces discussions et de ce plan d'action.

M. Lionnel Luca. Je regrette de ne pas avoir de réponse à ma question. M. le ministre la connaissait pourtant puisque je lui en avais fait part la semaine dernière. Je répète que seul un rapport de forces entre le ministre et la direction américaine, comme il a déjà pu être créé par le passé, permettra d’éviter le pire.

Je soutiens le ministre dans ses démarches tant qu’il les effectue. Je ne pourrai plus le soutenir s’il baisse les bras. Je m’interrogerai à ce moment-là sur la signification de l’intitulé du ministère du redressement productif. Il n’y a pas de fatalité à la fermeture du site de Villeneuve-Loubet. Cela doit être clair pour le Gouvernement, pas seulement pour le cabinet qui mène traditionnellement ce genre de négociations. Il s’agit d’une démarche politique. Charles Pasqua, il y a vingt ans, avait empêché la fermeture de ce site alors que l’entreprise Bedford, pourtant dirigée par un ancien ministre de Mme Thatcher, devait fermer. C’est le volontarisme politique qui peut empêcher cette fermeture aux conséquences qu’on ne peut mesurer. L’idée d’une reprise n’est qu’un leurre destiné à endormir tout le monde. Je le dis très solennellement ce matin, j’attends du ministre du redressement productif qu’il fasse son travail en allant discuter à Dallas, avec la direction qui elle seule peut donner des assurances au gouvernement de la France.

Formation des sapeurs-pompiers volontaires

M. le président. La parole est à M. Rémi Delatte, pour exposer sa question, n° 99, relative à la formation des sapeurs-pompiers volontaires.

M. Rémi Delatte. Ma question s’adressait à M. Valls, puisqu’elle porte sur la formation des jeunes sapeurs-pompiers volontaires.

On peut se féliciter que l'organisation en France des services d'incendie et de secours repose sur un équilibre entre pompiers professionnels et volontaires. Il est cependant important que les vocations des jeunes ne soient pas déçues ou découragées. Le conseil d’administration du service d’incendie et de secours de Côte-d’Or, en examinant sa politique en matière de recrutement, a regretté que le contenu des formations des jeunes sapeurs-pompiers fasse une part beaucoup trop importante à la théorie au détriment de la pratique. Certains jeunes sont ainsi souvent découragés par une pédagogie manifestement beaucoup trop scolaire. Pour le département de la Côte-d’Or, c’est au moins une dizaine de jeunes qui ne va pas au terme d’un cursus jugé peu incitatif.

Face à la diminution du nombre de sapeurs-pompiers volontaires, je pense que le scénario pédagogique devrait s’appuyer davantage sur la pratique, l'utilisation des appareillages notamment.

Je prends un exemple : l'unité de valeur « culture-administration », qui développe un programme sur les institutions républicaines, est jugée beaucoup trop approfondie alors qu’elle ne constitue pas un élément fondamental de l'organisation pratique des secours sur le terrain, vous en conviendrez. De même, la répartition des modules de formation manque de cohérence avec la réalité de la pratique. Autre exemple, trois heures de cours théoriques sur la connaissance des animaux pour une seule heure sur la problématique des fuites de gaz, qui sont pourtant l’objet d’interventions beaucoup plus nombreuses, cela paraît disproportionné.

Si l’on souhaite promouvoir l'engagement des jeunes sapeurs-pompiers volontaires, quelle réforme de leur formation est envisagée ? Comment leur redonner envie, c’est là l’essentiel, leur permettre de s'épanouir, de mettre leur énergie, leur jeunesse et leur sens civique au service des personnes, dans le cadre du service public ?

M. le président. La parole est à Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie. Monsieur le député, Manuel Valls participe actuellement à Bruxelles à une conférence sur les droits des acteurs locaux en matière de lutte contre l’extrémisme violent à l’invitation du commissaire européen.

Vous avez attiré son attention sur la formation des jeunes sapeurs-pompiers. Il regrette de ne pas pouvoir vous répondre personnellement.

Vous vous interrogez notamment sur la part importante laissée à la théorie au détriment de la pratique. Cette situation vous paraît de nature à décourager les vocations.

Il est important de rappeler que les jeunes sapeurs-pompiers se destinent à l’obtention d’un brevet, appelé « brevet de jeune sapeur-pompier ». C’est l’équivalent de la formation initiale exigée pour devenir sapeur-pompier volontaire. Il faut le reconnaître, c’est un investissement exigeant pour les 30 000 jeunes, âgés de onze à dix-huit ans, qui suivent ce cursus.

Le dispositif de formation des jeunes sapeurs-pompiers est donc intimement lié à celui des sapeurs-pompiers volontaires. Or ces volontaires représentent 80 % des effectifs des services départementaux d’incendie et de secours, soit 200 000 sapeurs-pompiers. Ils sont le socle du modèle français de sécurité civile.

Cette formation dispensée aux jeunes sapeurs-pompiers comprend à la fois une dimension théorique et une dimension pratique, essentiellement fondée sur l’apprentissage des techniques de secours et l’entraînement sportif. Elle couvre la plus grande partie des opérations auxquelles les sapeurs-pompiers sont amenés à concourir : secours à personne, lutte contre les incendies ou toute autre mission de protection des biens et de l’environnement.

Vous citez l’unité de valeur culture-administration. C’est un module probablement fastidieux. Il serait néanmoins très préjudiciable de s’en passer, car c’est au travers de cet enseignement que les jeunes sapeurs-pompiers appréhendent le cadre administratif et juridique dans lequel ils interviennent. La complexité et la dangerosité des opérations de secours imposent une vigilance pratique, mais aussi de bien comprendre pourquoi les sapeurs-pompiers interviennent et jusqu’où ils peuvent intervenir. C’est tout l’environnement et les valeurs du monde des sapeurs-pompiers qui sont transmis au travers de cet enseignement, qui comporte une dimension civique. Être sapeur-pompier, c’est être un citoyen engagé.

Projet de ligne rouge du Grand Paris Express

M. le président. La parole est à M. Jacques Alain Bénisti, pour exposer sa question, n° 95, relative au projet de ligne rouge du Grand Paris Express.

M. Jacques Alain Bénisti. Je souhaitais une nouvelle fois interpeller Mme Duflot, ministre de l’égalité des territoires et du logement, mais, comme pour ma précédente question d’actualité, Mme Duflot n’est pas là pour répondre. Je voulais l’interpeller à la suite du rapport Auzannet, qui remet en cause, à la stupéfaction de tous, le tronçon qui relie Champigny à Noisy-Champs, scindant en deux le projet de ligne rouge du Grand Paris Express dans sa partie est. Hormis le fait que cette préconisation est, de l’avis de tous, incohérente et inique, ce rapport menace la philosophie même du Grand Paris qui, ne l’oublions pas, devait avoir une vocation à rééquilibrer l’Est et l’Ouest franciliens en matière de transports mais surtout d’emploi, cause nationale selon le Président de la République. En repoussant à 2030 la réalisation de la gare des quatre communes et donc ce tronçon, vous bafouez tous les espoirs des habitants de l’Est parisien, particulièrement ceux de ce secteur, qui avaient massivement adhéré à ce formidable projet pour retrouver un emploi proche de leur domicile et diviser leur temps de transport par trois, voire par quatre. De plus, remettre en cause un projet qui est le fruit d’un accord historique unanime entre l’État, la région, les départements, les communes, toutes tendances politiques confondues, est un véritable déni de démocratie. Surtout, cela témoigne d’un manque de considération flagrant pour l’ensemble des élus de terrain du secteur.

L’aspect financier évoqué pour justifier ce report est un vrai contresens car, dès lors qu’on repousse un projet, on en augmente ipso facto le coût. Les maires que nous sommes nombreux à être dans cet hémicycle sont d’ailleurs bien placés pour le savoir. Je n’ose vous parler de l’ineptie de la suppression du poste de commandement et du centre de remisage et d’entretien accolés à cette gare ; elle rend à l’évidence l’ensemble du projet caduc. C’est pourquoi, je demande de ne pas suivre les préconisations de ce rapport et au ministre de s’engager à revenir à une mise en œuvre du premier tronçon dès l’année 2018, rendant ainsi cohérent le tronçon Pont de Sèvres-Noisy-Champs.

M. le président. La parole est à Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie.

Mme Yamina Benguigui, ministre déléguée chargée de la francophonie. Je vous prie, monsieur le député, de bien vouloir excuser Cécile Duflot, qui anime une table ronde sur l’habitat indigne avec les élus de Seine-Saint-Denis.

Le Gouvernement vous remercie du soutien que vous apportez au projet de métro automatique Grand Paris Express. Comme vous le savez, ce projet demandait à être ordonné pour pouvoir être effectivement engagé.

Dès l’été dernier, Cécile Duflot a confirmé le tracé des lignes et la localisation des gares du Grand Paris Express, et autorisé la Société du Grand Paris à ouvrir toutes les enquêtes publiques. Le lancement de l’enquête publique sur la ligne rouge sud, entre Pont de Sèvres et Noisy-Champs, qui traversera le Val-de-Marne, est d’ailleurs aussitôt intervenu.

Une mission d’expertise, visant à actualiser les estimations des coûts et à proposer des scenarii de priorisation compatibles avec les exigences opérationnelles et les contraintes économiques du projet, a été commandée le 1er septembre dernier.

Deux éléments dominent ce rapport.

Il s’agit, d’une part, de l’actualisation des coûts du Grand Paris Express. C’est vrai, le rapporteur calcule que le projet coûte aujourd’hui non pas 20,5 milliards d’euros comme prévu, mais 30 milliards d’euros. Quelles que soient les responsabilités engagées, le Gouvernement ne souhaite pas polémiquer sur ces chiffres. On constate une dérive monétaire entre euros 2008 et euros 2012, le coût complet de la ligne orange était inconnu, le rapport propose une estimation des interconnexions aux réseaux de transports existants et une actualisation tenant compte des évolutions du projet.

D’autre part, le rapporteur propose des scenarii de priorisation de lignes, de tronçons, de travaux. Ce faisant, il apporte un éclairage utile au Gouvernement, mais ses propositions, et c’est normal, lui appartiennent.

Le Premier ministre a demandé au Gouvernement de le mettre en mesure de prendre ses décisions dès le mois de février. C’est à ce moment que seront donc connus le calendrier de la réalisation et du plan de financement du Grand Paris Express, mais aussi des mesures d’amélioration des transports quotidiens en Île-de-France.

Mme Duflot travaille avec son collègue chargé des transports Frédéric Cuvillier mais également avec les ministres des finances et du budget, et en liaison avec la représentation nationale, la région Île-de-France et, naturellement, son président Jean-Paul Huchon.

Les décisions qui seront prises seront positives, conformément aux orientations fixées par le Premier ministre le 30 octobre dernier, devant le septième forum de Paris-Île-de-France capitale économique.

Le Gouvernement est particulièrement attentif au moment auquel les trois lignes – rouge, orange et bleue – du nouveau métro traversant le Val-de-Marne, qui vous est cher autant qu’à Mme Duflot, pourront voir le jour.

C’est dans ce cadre sérieux, responsable, chiffré, maîtrisé, effectif, que toutes les lignes du Grand Paris Express verront progressivement le jour, au bénéfice des Franciliens légitimement impatients d’une amélioration de leurs réseaux de transports. Plutôt que de polémiquer, je vous propose que nous nous en réjouissions ensemble.

M. le président. La parole est à M. Jacques Alain Bénisti.

M. Jacques Alain Bénisti. Il n’est pas question pour moi de polémiquer. Simplement, il faut dire les choses clairement. Des centaines de milliers de contribuables de l’Est parisien ont déjà commencé à financer le Grand Paris : ils ont déjà versé 700 millions d’euros. En outre, le rapport Auzannet occulte totalement le financement provenant de la taxe sur les bureaux. Des dizaines de milliers de mètres carrés vont être construits, et les entreprises vont être assujettis à cette taxe, ce qui permettra la réalisation totale de ce projet sans qu’on fasse appel aux deniers de l’État.

S’il est hors de question de polémiquer, il faut cependant dire les choses telles qu’elles sont.

Avenir des centres d’adaptation et de redynamisation
au travail de la Vienne

M. le président. La parole est à Mme Véronique Massonneau, pour exposer sa question, n° 93, relative à l’avenir des centres d’adaptation et de redynamisation au travail de la Vienne.

Mme Véronique Massonneau. Ma question porte sur l’avenir des centres d’adaptation et de redynamisation au travail de la Vienne.

Ces CART accueillent des stagiaires âgés de dix-huit à trente ans, orientés par la maison départementale des personnes handicapées. Les stages ont une durée maximale de trois ans, avec une période d’essai de six mois. Leur but est d’aider la personne ayant un handicap intellectuel, psychologique ou psychiatrique stabilisé à développer au maximum son autonomie personnelle, sociale et, si possible, professionnelle, mais, contrairement aux établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, les CART ne comportent pas de budget de production, et les stagiaires ne bénéficient pas de la garantie de ressources. Ils sont financés par le conseil général et surtout par l’État via l’enveloppe ESAT. Depuis leur création en 1969, les CART de la Vienne ont permis l’insertion de 80 % des personnes accueillies, démontrant ainsi toute leur utilité.

Pourtant, il existe aujourd’hui un doute quant à la pérennité de ces structures. En effet, l’instauration de la convergence tarifaire en 2004 a considérablement freiné le développement de ces centres. Cela s’explique notamment par leur projet pédagogique différent de celui des ESAT. Alors que les ESAT permettent à la personne handicapée qui n’a pas acquis suffisamment d’autonomie pour travailler en milieu ordinaire d’exercer une activité dans un milieu protégé, les CART ne se contentent pas d’un simple accompagnement. Ils œuvrent pour l’insertion et une véritable autonomie des personnes handicapées, et ce, je le rappelle, en seulement trois ans. Je sais l’importance que le Gouvernement, Mme Carlotti en tête, accorde à la question du handicap. Il s’agissait d’ailleurs de l’un des postes les plus privilégiés de la loi de finances initiale pour 2013, et je m’en félicitais, mais ces CART, malgré la preuve de leur utilité, sont cannibalisés par les ESAT, du fait de leur enveloppe commune. Leur budget a encore une fois diminué cette année et ils se retrouvent sans aucune directive pour 2013.

C’est pourquoi je souhaite savoir quelle décision le Gouvernement compte prendre à l’égard de ces centres. La suppression de la convergence tarifaire actée par le PLFSS s’appliquera-t-elle à ces centres ? Surtout, créera-t-on une ligne budgétaire qui leur sera propre afin d’assurer leur fonctionnement et leur pérennité ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Madame la députée, Mme Marie-Arlette Carlotti, qui ne peut être parmi nous, m’a demandé de vous répondre.

Le Gouvernement connaît la situation particulière des centres d’adaptation et de redynamisation au travail, en particulier celles des CART de la Vienne. Il reconnaît la pertinence du travail effectué par ces structures, leur utilité et la qualité du service rendu.

Toutefois, comme vous le faites remarquer, bien que ces structures ne soient juridiquement pas des établissements et services d’aide par le travail, elles sont financées sur le programme 157 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Il s’agit donc du même budget que celui dédié aux ESAT et, en conséquence, elles sont soumises au mécanisme des tarifs plafonds fixés en application de l’article 74 de la loi de finances initiale pour 2009. Ce dispositif de plafonnement des tarifs vise avant tout l’équité territoriale lors de la répartition de l’allocation aux ESAT.

Souhaitant rompre avec la logique purement comptable du précédent gouvernement et avec la pression à laquelle il soumettait le financement des ESAT, le Gouvernement a voulu, en 2013, une pause dans l’application du processus de convergence. Nous avons donc opté pour le soutien aux structures existantes et le renforcement de la qualité de prise en charge des personnes accueillies par l’application d’un taux d’actualisation de la masse salariale proche de 1 %.

Au-delà de leur financement, les CART ont fait l’objet de deux évaluations : l’une, ancienne et interne, en 1999, et l’autre, externe, en 2008-2009. Ces deux évaluations n’ont jamais remis en cause l’utilité sociale des structures. Elles ont toutefois conclu à la nécessité de stabiliser leur assise juridique afin de leur permettre de continuer à fonctionner dans le temps.

Il a donc été demandé aux établissements concernés de bien vouloir se restructurer pour être conformes aux dispositions du code de l’action sociale et des familles. Les services de l’État, en lien avec l’agence régionale de santé et le conseil général de la Vienne, ont organisé diverses rencontres avec les responsables de l’association gestionnaire dans la Vienne, l’Association départementale pour la sauvegarde de l’enfance et de l’adolescence, l’ADSEA, afin d’examiner la solution qui correspondrait le mieux à la vocation originale de ces structures.