Accueil > Projet de loi de finances pour 2014 > Les comptes rendus des réunions des commissions élargies > Compte rendu

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit

Assemblée nationale

commission élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission des affaires étrangères

Commission des affaires culturelles
et de l’éducation

(Application de l’article 120 du Règlement)

Mardi 22 octobre 2013

Présidence de M. Alain Muet,
vice-président de la Commission des finances,
de Mme Élisabeth Guigou,
présidente de la Commission
des affaires étrangères,
et de Mme Marie-Odile Bouillé,
vice-présidente de la commission des affaires culturelles

La réunion de la commission élargie commence à vingt et une heures dix.

projet de loi de finances pour 2014

Action extérieure de l’État

M. Pierre-Alain Muet, président. Monsieur le ministre des affaires étrangères, Élisabeth Guigou, présidente de la commission des affaires étrangères, Marie-Odile Bouillé, vice-présidente de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, et moi-même, sommes heureux de vous accueillir.

Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2014 consacrés à la mission « Action extérieure de l’État ». La conférence des présidents du 11 juillet 2013 a décidé que l’ensemble des missions sera, cette année, discuté en commission élargie, procédure destinée à favoriser les échanges entre les ministres et les députés.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Monsieur le ministre, le budget que vous soumettez au Parlement montre bien que l’on peut concilier l’économie des deniers publics et l’efficacité. L’effort de rigueur s’accompagne d’un redéploiement des crédits et de l’affichage d’un certain nombre de priorités : le réseau diplomatique est préservé ; la sécurité des postes est prise en compte ; la réforme des bourses est en bonne voie. En particulier, le réseau poursuit son adaptation en direction des pays émergents, manière primordiale de mettre le Quai d’Orsay au service du redressement économique.

L’une de vos priorités étant la diplomatie économique, le bilan de la nomination des représentants spéciaux et de l’articulation de leur travail avec celui des postes est-il positif ? Pour ce qui des postes, comment les différents services s’approprient-ils cette dimension de la politique étrangère ? Collaborent-ils activement à cet effet ? En Chine, le regroupement sur un seul site des services de l’ambassade a joué un rôle important. Observons-nous le même regroupement ailleurs – en particulier dans les pays émergents ?

Vous m’avez par ailleurs fait parvenir, ainsi qu’à Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles, et aux deux rapporteurs pour avis sur les crédits de la diplomatie culturelle et d’influence, François Loncle et Claudine Schmid, le troisième rapport d’évaluation de l’expérimentation du rattachement à l’Institut français du réseau culturel de la France à l’étranger. Ses conclusions sont très négatives : « L’expérimentation ne revêt pas de caractère concluant ; elle confirme l’existence du risque majeur pour la stabilité de notre réseau culturel et de coopération à l’étranger, en cas de rattachement. Outre ces incertitudes, le rattachement impliquerait un surcoût budgétaire estimé à 52 millions d’euros sur la période 2014-2016. La nature du lien avec notre dispositif culturel à l’étranger traduit aussi, aux yeux des autorités des publics locaux, le rôle que nous entendons assigner à notre diplomatie d’influence. Le rattachement poserait donc la question de l’articulation de notre politique dans ce domaine avec les autres champs de notre action diplomatique, et présenterait le risque de mettre en défaut le positionnement emblématique d’une diplomatie culturelle installée au cœur de notre action internationale. »

Quelles conclusions tirez-vous de ce rapport ?

Mme Marie-Odile Bouillé, présidente. La commission des affaires culturelles et de l’éducation se saisit traditionnellement de votre budget, monsieur le ministre, pour examiner les crédits consacrés à la diplomatie culturelle et d’influence, le programme 185. Les actions de coopération culturelle sont essentielles pour valoriser la culture et la langue française, mais elle constitue aussi un indispensable outil de promotion, voire de défense, de la diversité culturelle. Nous y sommes donc particulièrement attachés.

Pour ce qui est de la politique d’attractivité, le Parlement a dernièrement été saisi du projet de contrat d’objectifs et de moyens de Campus France. La commission des affaires culturelles devant se prononcer dans quelques semaines sur le sujet, je souhaite connaître votre sentiment sur l’action menée par cet organisme depuis sa création par la loi du 27 juillet 2010.

La commission des affaires culturelles a confié à Mme Claudine Schmid la rédaction d’un rapport pour avis sur la diplomatie culturelle et d’influence. Au-delà de l’examen des crédits de ce programme, elle a choisi de s’intéresser tout particulièrement aux résidences de créateurs qui constituent un moyen peu connu de soutien aux échanges artistiques et au dialogue des cultures. Je tiens à la remercier du travail qu’elle a accompli.

La commission des affaires culturelles examinera l’avis de sa rapporteure et votera les crédits en question non pas à l’issue de la présente commission élargie, mais lors de sa réunion du mardi 29 octobre.

M. Jacques Myard. Je tiens à protester contre l’organisation de cette réunion : il n’est pas admissible que nous n’ayons pas un vrai débat de politique étrangère en séance plénière. C’est abaisser la voix de la France et c’est même insulter le ministre des affaires étrangères que de le traiter ainsi. Il s’agit d’un budget régalien qui suppose autre chose qu’une série de questions qui vont être « évacuées » en quelques minutes. La conférence des présidents se trompe. La situation internationale étant ce qu’elle est, nous devons débattre des affaires étrangères, j’y insiste, en séance publique.

M. Pierre-Alain Muet, président. Il y aura bien un débat en séance publique qui ne sera pas très différent de ce qu’il était les années précédentes. A simplement été ajouté un débat en commission élargie qui le précède et permet à tous les députés de s’exprimer.

M. Jacques Myard. L’Assemblée, c’est dans l’hémicycle, pas ici !

M. Jérôme Lambert, rapporteur spécial. Monsieur le ministre, en un an, vous avez accompli deux réformes d’ampleur, pas entièrement achevées mais largement engagées : celle de l’aide à la scolarité des enfants français vivant à l’étranger et celle de l’Assemblée des Français de l’étranger.

La première correspond au remplacement de la prise en charge (PEC), très onéreuse et inéquitable, par un système de bourses réformé, plus juste et dont le montant a été augmenté – il le sera à nouveau en 2014 et 2015. Malgré l’expression d’inquiétudes lors de la présentation du projet, il semblerait que le basculement d’un système sur l’autre se soit bien passé : les décisions finales d’attribution ne sont plus prises de manière centralisée à Paris, mais ont été déléguées aux commissions locales des bourses.

La réforme de l’Assemblée des Français de l’étranger vise pour sa part à donner une plus grande représentativité à ses membres. Elle a été largement débattue et adoptée par le Parlement il y a quelques mois. L’élection des membres de cette nouvelle AFE est prévue pour le printemps 2014 et je ne doute pas du bon fonctionnement de cette instance rénovée.

À côté de ces deux réformes, vous avez entamé une évolution peut-être moins visible aux yeux du grand public, mais dont certains observateurs ont souligné « l’ampleur inégalée » : vous avez commencé à rééquilibrer les moyens, financiers mais surtout humains, d’un certain nombre de nos postes, visiblement surdotés pour des raisons historiques, en faveur de postes situés dans les pays émergents. Nous déclarions déjà, l’année dernière, que la diplomatie devait s’adapter aux réalités nouvelles du XXIe siècle. Elle a commencé de le faire et j’ai cru comprendre que la démarche serait poursuivie l’an prochain. Peut-être pourrez-vous nous en dire quelques mots.

Vous avez réussi à entamer ce rééquilibrage tout en conservant la quasi-universalité du réseau diplomatique de la France et en menant les travaux de sécurisation nécessaires des postes les plus exposés – l’une des priorités de votre action.

Troisième point, votre administration a réussi à faire face à la demande croissante de visas, de 8 % par an depuis 2009, alors que les moyens des consulats, eux, ont tendance à diminuer. Pour cela, le réseau consulaire a dû innover : l’instruction des demandes de visas est

le plus souvent externalisée, parfois en coopération avec nos partenaires de l’espace Schengen.

Les premiers résultats sont encourageants. Ainsi, des agences Schengen ont ouvert leurs portes dans des villes où la France ne dispose pas de consulat, comme à Vladivostok, à Shenyang ou à Izmir. Ce sont autant de touristes potentiels qui peuvent être tentés de venir visiter notre pays, avec les retombées économiques que nous savons.

Toutes ces réformes et actions ont été menées avec des moyens financiers et humains malheureusement en diminution constante.

En 2014, les moyens de la diplomatie française seront réduits de 3 % si l’on prend en considération le ministère des affaires étrangères, ou de 0,8 % si l’on considère le seul périmètre de la mission « Action extérieure de l’État ». Les effectifs de la mission diminueront de près de 200 emplois supplémentaires, à l’exception notable du recrutement de vingt-cinq agents qui seront affectés à la délivrance des visas. Le budget de l’action extérieure de l’État participe donc bien à l’effort de maîtrise de la dépense publique, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.

Néanmoins, des sujets de préoccupation demeurent, sur lesquels je souhaite vous interroger.

Les crédits de fonctionnement des postes sont globalement insuffisants. Ils ont atteint un point d’étiage qui, souvent, ne permet plus l’entretien courant, d’autant que les contrats d’externalisation, qui ont été encouragés, sont imputés sur le fonctionnement. Lorsque des investissements sont réalisés, les contrats d’entretien ne peuvent pas être conclus faute de crédits. Dans tel pays, j’ai rencontré un consul ayant du mal à assurer la révision périodique de son véhicule de fonction, puis un autre ne disposant plus des crédits nécessaires au fonctionnement des portes sécurisées. En matière de fonctionnement, les postes semblent être arrivés au bout des économies réalisables. Que comptez-vous faire ?

Deuxième question : l’entretien du parc immobilier du ministère des affaires étrangères n’est plus assuré de manière satisfaisante dans de nombreux pays, faute de moyens. Dans les cas extrêmes, lorsqu’un bien est trop dégradé, le ministère le vend pour en acquérir ou en louer un autre plus modeste. Quelles instructions donnez-vous à vos services sur ce point ?

Enfin, les agents de droit local (ADL) représentent désormais plus du tiers des emplois de la mission – un peu plus de 5 000 sur un total de 14 500 agents. Chacun s’accorde à reconnaître que le ministère ne pourrait plus fonctionner sans eux. Rémunérés en fonction du marché du travail local, ils coûtent beaucoup moins cher que le personnel expatrié. Mais dans certains pays, le coût de la vie augmente vite et, pour ces personnels, la situation devient parfois difficile. Or les ADL sont qualifiés, polyglottes, et ils comparent avec amertume leurs rémunérations avec celles proposées par les autres ambassades ou par les multinationales. Dans plusieurs postes où je me suis rendu, le thème de leur démotivation n’est plus tabou. Dans tel pays, le SMIC a tant augmenté que les salaires les moins élevés versés aux ADL y sont désormais inférieurs, si bien que certains agents ont dû trouver un second emploi. Envisagez-vous de prendre des mesures pour essayer de maintenir le niveau de vie de ces agents ?

Le rapport de la Cour des comptes sur le réseau consulaire est très positif à l’égard de votre gestion et de celle de nos agents, dont le travail est largement reconnu et que je tiens donc à saluer.

Mme Claudine Schmid, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, sur le programme « Diplomatie culturelle et d’influence ». Monsieur le ministre, je déplore que la diplomatie culturelle et d’influence se développe dans un cadre budgétaire contraint qui se traduit par des économies imposées à l’ensemble des instruments, y compris aux opérateurs. Comment, dans ces conditions, ne pas s’inquiéter pour la poursuite de la politique d’influence de la France et du fait que cette politique, ses ambitions et ses actions sont tributaires de financements extrabudgétaires ?

Le projet annuel de performance pour 2014 indique que la mise en œuvre de la stratégie d’influence privilégiera des moyens d’intervention capables de mobiliser des cofinancements. Or, dans son rapport concernant le réseau culturel de la France à l’étranger, la Cour des comptes souligne que, dans cette activité complexe de recherche de fonds, le ministère, et en particulier la direction générale de la mondialisation (DGM), n’accompagne pas suffisamment les postes. Selon la Cour, « ce sont les ambassadeurs, les conseillers de coopération et d’action culturelle et leurs collaborateurs qui effectuent le travail de lobbying nécessaire. L’impression prévaut d’une organisation fonctionnant de manière artisanale, sans vision ou stratégie globale et qui ne déploie pas des efforts coordonnés en vue de développer les cofinancements de façon systématique et avec des instruments adaptés ». Quel est votre commentaire sur cette appréciation de la Cour des comptes et de quelle manière comptez-vous répondre aux attentes des postes ?

Ma deuxième question concerne l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE). Le 19 février 2013, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision qu’a prise en 2009 l’AEFE d’instaurer une contribution de 6 %, assise sur les frais de scolarité des établissements en gestion directe et conventionnée, pour compenser partiellement l’intégration dans ses charges de la part patronale de la pension civile des personnels. L’Agence a fait appel du jugement et a également demandé de surseoir à son exécution. Au cas où le jugement du tribunal administratif serait confirmé en appel, quelle somme l’AEFE sera-t-elle appelée à rembourser ? Je n’ai pas trouvé trace d’une provision dans son budget : a-t-elle prévu une réserve de précaution à cet effet ?

Ma troisième question porte également sur l’AEFE dont le budget représente environ 60 % du programme 185. Voudriez-vous nous éclairer sur les propos tenus par Mme Conway en Conseil des ministres le 28 août dernier ? Elle mentionnait, au sujet des offres éducatives, que « des offres supplémentaires seront aussi encouragées pour répondre à une nouvelle demande des familles françaises ou étrangères qui souhaitent scolariser leurs enfants dans les systèmes d’enseignement locaux ». Quelle est votre position sur des écoles privées étrangères qui préparent avec succès les candidats au baccalauréat et qui ont le soutien de nos autorités diplomatiques ? Un label spécifique pourrait-il leur être accordé, qui leur assurerait une reconnaissance pédagogique sans coût pour l’État ?

M. Philippe Baumel, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, sur le programme « Action de la France en Europe et dans le monde » et sur le programme « Français à l’étranger et affaires consulaires ». L’exercice budgétaire pour 2014 sera difficile pour le ministère des affaires étrangères qui devra participer au désendettement de l’État avec une baisse des crédits de 0,7 % et de ses effectifs de plus de 1 %. Cet effort est d’autant plus difficile que le ministère a constamment contribué, depuis une décennie, aux politiques budgétaires en rendant de nombreux emplois : de 2006 à 2013, près de 1 900 emplois y ont été supprimés, soit une baisse de plus de 12 %.

Dans ce contexte, le présent projet de budget est bon car, tout en prenant sa part de l’effort, il conserve la faculté de financer des priorités, en particulier, comme en 2013, le renforcement de la sécurité de nos ambassades, avec des crédits en hausse de 28 %. Je note également un effort significatif pour les bourses scolaires de nos compatriotes à l’étranger. Pour le reste, notre réseau diplomatique parvient, pour le moment, à se réorganiser sans renoncer à son universalité. Il convient de saluer le caractère novateur des réformes engagées pour y parvenir : expérimentation de postes diplomatiques avec des équipes réduites, mutualisation des moyens des différents services dans les grandes capitales étrangères et regroupement des sites, valise « Itinera » qui permet d’avoir des consulats mobiles, simplification, voire dématérialisation de procédures… Seulement, à force de réduire les effectifs, ces mesures ne risquent-elles pas d’atteindre leurs limites et ne devrons-nous pas, à terme, renoncer à une part de notre réseau ?

Il en est de même pour l’immobilier. Depuis quelques années, les cessions financent non seulement les nouvelles acquisitions, mais aussi les travaux d’entretien, ce qui n’est pas normal. Par ailleurs, le programme de cessions du ministère comprend, certes, de nombreux appartements de fonction et terrains divers, mais aussi des biens de prestige pourvus d’une grande valeur patrimoniale ou symbolique. Sur la liste des biens susceptibles d’être cédés, figure toujours la Maison de France à Berlin. Quelles sont les intentions du Gouvernement sur ce cas particulier et, plus généralement, comment tracer une frontière nette entre les biens essentiels, incessibles, et les autres ? Car si la notion de domaine public inaliénable ne s’applique pas à ces biens à l’étranger, il est évident qu’il y a aussi à l’étranger des bâtiments qui constituent des symboles forts de la présence française.

En ce qui concerne les bourses, conformément aux engagements pris, le projet de loi de finances prévoit une hausse de 7,7 % des crédits. Le budget pour 2014 sera celui de la pleine application de la réforme mise en œuvre depuis la rentrée de septembre dernier. Cette réforme est juste car elle permettra de mieux prendre en compte la réalité des ressources des familles et les différences de coût de la vie entre les pays ; elle conduit à un dispositif plus progressif et à un léger rééquilibrage entre les zones géographiques. Toutefois, cette réforme répond aussi à une volonté, légitime dans le contexte actuel, de mieux contrôler la dépense. Néanmoins, envisagez-vous des adaptations du dispositif ?

Je terminerai par la politique des visas. Je tiens à saluer le volontarisme du Gouvernement et l’engagement commun de tous les ministères concernés – affaires étrangères, enseignement supérieur et recherche, intérieur – pour un changement de cap dans ce domaine. Nous avons rompu avec le temps de la circulaire Guéant et une politique purement méfiante et restrictive. L’ouverture aux talents étrangers est une nécessité pour l’internationalisation de nos entreprises et de nos universités et, plus généralement, pour le rayonnement de notre pays. Des mesures très intéressantes sont déjà en œuvre comme la délivrance d’un plus grand nombre de visas de circulation permettant des entrées multiples.

Je poserai deux questions sur deux points problématiques. Le premier est celui de l’hétérogénéité des taux de refus de visas. En 2012, moins de 10 % de toutes les demandes de visa adressées à la France ont été refusées, mais ce taux dépasse 20 %, voire 30 à 40 % en Algérie et dans de nombreux pays francophones d’Afrique subsaharienne. Je mesure les risques migratoires, mais nous avons des liens privilégiés avec ces pays où la jeunesse aime la France et veut souvent venir y étudier. Or les refus très fréquents de visa y sont mal vécus. Considérez-vous que cela appelle une analyse particulière des situations, afin de mesurer si ces taux sont réellement inévitables ?

Le second point concerne l’entrée des étudiants étrangers. En quelques années, la France est passée de la troisième à la cinquième position mondiale pour l’accueil d’étudiants étrangers, et de grands pays, comme l’Allemagne ou les États-Unis, se livrent une véritable concurrence pour libéraliser leurs règles d’entrée des étudiants étrangers afin d’attirer les meilleurs. Cette situation doit nous interpeller, car ce ne sont pas des pays que l’on peut considérer comme laxistes en matière d’immigration. Nous allons prochainement examiner le projet de loi sur l’immigration et l’asile : plaiderez-vous pour qu’il comporte des mesures fortes pour faciliter l’entrée des étudiants étrangers ? Ensuite, la procédure de délivrance des visas étudiants est parfois critiquée pour deux raisons : les refus ne sont pas motivés et le rôle de Campus France, point de passage obligé et chargé de donner un avis sur le dossier académique des demandeurs, est contesté. Ne pensez-vous pas que les universités et grandes écoles françaises pourraient avoir une plus grande part, avec la responsabilité qui va avec, dans le recrutement de leurs étudiants étrangers ?

M. François Loncle, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères, sur le programme « Diplomatie culturelle et d’influence ». Le contexte de ce budget est triple. Tout d’abord, le déclin des crédits de l’action culturelle extérieure de la France remonte à 1994, à l’exception de deux années alors que Lionel Jospin était Premier ministre. Aux termes du programme triennal d’économies budgétaires, les crédits ont baissé de 7 % en 2013, ils diminueront de 4 % en 2014 et de 4 % également en 2015. Ensuite, nous menons un travail commun avec la Cour des comptes qui a procédé à une évaluation fort intéressante et plutôt positive du réseau culturel de la France à l’étranger, évaluation sur laquelle nous donnerons un avis dans quelques semaines. Enfin, à la suite de la réforme de 2010 expérimentée dans douze pays, il convient de prendre une décision pour savoir si l’on rattache les centres culturels à l’étranger à la maison mère, l’Institut français à Paris.

Le programme 185 a été créé dans l’ambition de regrouper, au sein d’un même programme, les crédits de l’action culturelle extérieure au sens large, inscrits au budget du ministère des affaires étrangères, lequel porte quelque 60 % de ces crédits. Or, même si l’on s’en tient à une définition stricte de l’action culturelle, il demeure difficile de suivre les crédits qui y sont consacrés car certains relèvent du programme 209, « Aide publique au développement ». C’est le cas des actions bilatérales en matière de francophonie, même si je comprends qu’elles s’inscrivent également dans le cadre des objectifs du programme Objectifs du millénaire pour le développement, mais aussi des effectifs du réseau culturel qui continuent à relever d’une logique géographique et non pas thématique. Quelles améliorations vous semble-t-il possible d’apporter pour clarifier cette situation ?

Ensuite, notre dispositif d’action culturelle extérieure au sens large est en restructuration permanente, avec réussite grâce aux personnels à Paris et dans le réseau. Il est donc chaque année difficile de porter une appréciation sur les crédits ouverts lorsque l’on s’interroge sur la manière dont ils seront optimisés – optimisation rendue indispensable par leur diminution continue. Le temps est venu des dernières décisions et de la stabilisation, car la réforme aura été efficace mais aussi déstabilisatrice. L’année 2014 sera donc décisive.

Pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, ce qui devrait être décidé sur trois chantiers en cours ? Celui, d’abord, concernant l’expérimentation du rattachement au réseau. Comment envisagez-vous le rôle de l’Institut français à Paris comme instrument au service du réseau si les centres ne lui sont pas rattachés ? Le second chantier concerne l’exercice de la cartographie du réseau, appelée à évoluer. Le troisième point touche à la création de conseils d’influence : vous avez lancé cette excellente idée qu’il fallait rechercher des synergies entre les différentes composantes de ceux qui concourent à l’influence de la France, qu’il s’agisse des questions culturelles, des questions scientifiques ou de la diplomatie économique. La vitrine de la France à l’étranger, ce sont bien les entreprises françaises et la culture, les deux n’étant en rien antinomiques.

Une nouvelle mission prioritaire a été confiée à Campus France : créer et animer un outil de suivi des étudiants boursiers. C’est une initiative de bon sens, attendue depuis des années. Comment la développer ? Quel pourrait être le champ d’investigation de ces étudiants passés par notre enseignement ?

Je m’interroge également sur la diminution des crédits alloués tant aux bourses délivrées aux étudiants étrangers qu’à la diplomatie scientifique. Ces crédits sont des outils de notre rayonnement qu’il ne faudrait pas sacrifier.

Ma dernière question concerne France Expertise Internationale (FEI), qui n’est pas un opérateur au sens de la loi organique relative aux lois de finances. Cet établissement public est monté en puissance de façon remarquable et dispose d’une surface que n’ont pas les autres opérateurs, bénéficiant par ailleurs de subventions et d’emplois. Vous avez décidé de lancer une évaluation : je m’associe à cette démarche, espérant qu’elle permettra véritablement de rationaliser notre dispositif d’expertise et d’accroître notre influence. Il est essentiel de disposer d’un établissement public qui remporte des marchés européens et internationaux et donne une visibilité à l’action de la France, si l’on songe notamment au poids de la participation française dans l’aide multilatérale.

La culture et l’économie participent à égalité de la vitrine de la France à l’étranger.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Je suis évidemment à la disposition des différentes commissions de l’Assemblée nationale pour faire le point tant sur la politique générale de mon ministère que sur des aspects plus techniques.

Madame la présidente de la commission des affaires étrangères, vous avez soulevé des questions relatives notamment au bilan des représentants spéciaux, à la diplomatie économique, au lien entre les ambassades, le Quai d’Orsay et les autres administrations, ou encore à l’Institut français, auquel plusieurs députés se sont également intéressés.

Dès mon arrivée au Quai d’Orsay, j’ai fait de la diplomatie économique une de mes priorités tout en soulignant, comme vous, qu’on ne saurait séparer, dans le rayonnement de la France, la diplomatie économique des dimensions culturelles ou scientifiques, voire sportives de notre action à l’extérieur – je nommerai bientôt un ambassadeur pour le sport, qui est très important pour le rayonnement de la France. Les ambassadeurs sont chargés au premier rang de coordonner les différents aspects de la diplomatie économique, puisqu’ils dirigent l’administration française à l’étranger. D’autres services travaillent également sur le sujet : le ministère des finances ou celui du commerce extérieur. Les lettres de missions que j’envoie aux ambassadeurs comprennent des objectifs en matière de diplomatie économique : ils doivent m’envoyer des rapports réguliers sur l’évolution de la situation, leurs prévisions et les mesures prises. J’ai également créé une direction des entreprises, qui travaille sous l’autorité de la Direction générale de la mondialisation, du développement et des partenariats.

Quant aux représentants spéciaux, qui sont peu nombreux – sept ou huit –, ils suivent avec un intérêt particulier, compte tenu de leur histoire personnelle, les dossiers qui leur sont confiés. J’évoquerai quelques noms : Jean-Pierre Chevènement pour les relations avec la Russie, Jean-Pierre Raffarin pour les relations avec l’Algérie – il avait commencé d’apporter des solutions à certains problèmes sous le gouvernement précédent –, ou encore Louis Schweitzer pour les relations avec le Japon : c’est lui qui a réalisé l’alliance entre Renault et Nissan. Je n’ai qu’à me féliciter de l’action bénévole de ces représentants spéciaux, comme de l’action des ambassadeurs, notamment dans leurs relations avec les entreprises. Les grandes entreprises sont du reste très satisfaites de cette orientation. S’agissant des moyennes entreprises, en revanche, l’effort sera de longue haleine : chacun le sait, le bât blesse par rapport à l’Allemagne. Je peux toutefois d’ores et déjà assurer que la priorité accordée à la diplomatie économique demeurera, quelles que soient les évolutions du Quai d’Orsay.

La coordination entre le ministère des affaires étrangères et les autres ministères est excellente au plan local. Elle est également correcte au plan national : je traite les éventuels problèmes avec les autres membres du Gouvernement. Nous avançons dans la même direction.

S’agissant de l’Institut français, j’ai décidé de conserver les éléments positifs de son expérimentation, en commençant par son nom et les fonctions de coordination que l’Institut a fort bien assurées sous l’autorité de Xavier Darcos. C’est pourquoi je compte étendre certaines fonctions de l’Institut français, notamment en matière d’analyse des publics ou de gestion des équipes culturelles. Toutefois, je ne suis pas favorable à une systématisation de l’expérimentation : je ne l’étendrai donc pas à d’autres postes, et ce pour deux raisons principales. La première a déjà été soulignée par certains d’entre vous : une telle mesure coûterait plus de 50 millions d’euros, qui ne pourraient être pris que sur le budget du ministère, ce qui est inacceptable. La seconde tient au rayonnement même de la France, qui est un tout. Une systématisation du rattachement des offres culturelles à un établissement unique réduirait la richesse de la palette dont les ambassades doivent disposer.

Je tiens toutefois à préciser, madame la présidente, que les conclusions du rapport sur l’Institut français n’ont pas été « très négatives » – même si ces mots ont pu être employés. Si je ne suis pas favorable à une systématisation du rattachement de l’offre culturelle à l’Institut français, en revanche, l’Institut a réalisé du bon travail et je tiens à rendre hommage à ceux qui l’ont conduit.

Madame la vice-présidente de la commission des affaires culturelles, le nouveau contrat d’objectifs et de moyens de Campus France pour 2013-2015 sera signé avant la fin de l’année, après avoir été soumis pour avis aux assemblées. Je tiens à rappeler les objectifs qui ont présidé à la mise en place de Campus France : la promotion de nos établissements d’enseignement supérieur et de recherches, l’amélioration de l’accueil et de l’accompagnement des étudiants et chercheurs étrangers, ainsi que l’amélioration de la gestion administrative et financière des programmes de mobilité et d’attractivité. L’animation d’un réseau d’étudiants et de chercheurs est un élément nouveau que j’ai décidé de mettre en œuvre afin de valoriser la fonction de réseau. En effet, alors que, dans de nombreux pays, il existe des réseaux d’alumni – mot latin repris dans les pays anglo-saxons, et qui signifie « anciens élèves » –, j’ai été choqué, lors d’une rencontre à l’ambassade de France au Viêt-nam avec un Vietnamien, ancien élève de l’École normale supérieure et médaille Fields, qu’on ne puisse pas répondre à son désir de constituer un réseau d’anciens étudiants vietnamiens ayant suivi leurs études en France. Nous n’avons en effet aucun recensement des étudiants étrangers ayant suivi leurs études en France. Aucune trace de leur passage n’existe. C’est la raison pour laquelle, au cours de la Conférence des ambassadeurs, j’ai fixé comme tâche aux ambassadeurs de constituer des réseaux des anciens étudiants étrangers qui ont fréquenté nos écoles ou nos instituts culturels ou ont bénéficié de nos bourses. Campus France, qui doit reconstituer sur vingt ou trente ans une mémoire dont nous ne disposons pas à l’heure actuelle, nous aidera à animer de tels réseaux.

S’agissant des résidences de créateurs, je vous transmettrai la réponse par écrit.

Monsieur Lambert, dans l’ensemble, le remplacement de la PEC par des bourses a plutôt bien fonctionné. Des ajustements sont toutefois nécessaires dans le mécanisme d’attribution – le bilan sera tiré en décembre. Les bourses permettent de mieux prendre en compte la situation sociale et économique des familles.

Quant à la réforme de l’Assemblée des Français de l’étranger, elle est trop récente pour que je puisse, ce soir, en tirer le bilan. Elle a été faite dans un esprit positif.

Oui, nous continuerons l’an prochain de rééquilibrer les moyens de nos postes : 300 postes sont concernés sur trois ans – 100 par an. Même si on doit constater et déplorer, comme M. Loncle, la réduction de nos moyens depuis de trop nombreuses années, rien n’interdit, dans le cadre d’une contrainte que chacun connaît, d’agir intelligemment pour permettre au Quai d'Orsay de fonctionner efficacement et d’assurer le rayonnement de la France.

C’est vrai, monsieur Lambert, une partie de nos ressources provient de la vente de notre patrimoine immobilier. S’il existe encore des marges de manœuvre, on ne saurait poursuivre éternellement dans cette voie. Il faut procéder à de telles opérations avec un esprit d’à-propos. En effet, autant on peut céder des biens dont le caractère somptuaire est inutile, autant il faut préserver la qualité de l’installation de notre représentation diplomatique. Comme me le confiait récemment l’un d’entre eux, un ambassadeur doit pouvoir convier de hauts responsables dans sa résidence et non au restaurant ! Il est faux, en revanche, de prétendre que tous nos bâtiments à l’étranger participeraient du rayonnement de la France. C’est ainsi que nous disposons dans le Sud-est asiatique d’un terrain valant 150 millions d’euros, ce qui est loin d’être négligeable. Du reste, seuls des spécialistes de l’immobilier doivent, sous notre surveillance, procéder à des cessions de notre patrimoine à l’étranger. En effet, la formation des ambassadeurs ne les conduit pas à valoriser les biens dont ils ont la charge.

Il est vrai qu’on observe parfois un décrochage du revenu de nos personnels de droit local, qui font un travail remarquable, par rapport à la réalité de la vie. Il peut leur arriver de nous quitter pour une meilleure offre, ce qui conduit à un taux important de rotation. C’est pourquoi nous avons intégré une augmentation de 3 % de la rémunération des personnels de droit local et assurons leur protection sociale. Le tout est de trouver un équilibre entre leurs exigences et nos capacités financières. La difficulté de l’exercice, qui a des limites, varie selon les pays. Il convient de se montrer pragmatique en la matière.

Monsieur Baumel, la décision concernant la Maison de France de Berlin sera prise en décembre. J’ai demandé à notre ambassadeur en Allemagne, M. Gourdault-Montagne, de réexaminer la question à la suite des nombreuses protestations que la décision de fermeture a suscitées. Il faut toutefois savoir que, si l’immeuble est beau, il n’est pas du tout fonctionnel. Est-il possible d’en garder une partie ? J’attends les propositions de notre ambassadeur.

Plusieurs d’entre vous ont abordé la question des visas qui est très importante, car le visa est le premier contact que nos futurs visiteurs ont avec la France. J’ai évoqué cette question à plusieurs reprises avec le Premier ministre et le ministre de l’intérieur. Je rappelle que tout pays doit aujourd'hui avoir une politique migratoire. Aucun ne peut accepter que ses frontières soient entièrement ouvertes. Nous sommes donc conduits à avoir une politique des visas.

Il convient toutefois de prendre également en considération la question de notre attractivité. S’il faut être attentif vis-à-vis des pays dont la pression migratoire est forte, en revanche, il faut savoir que nous ne subissons aucune pression migratoire de la part d’autres pays, auprès desquels nous exerçons un grand attrait. Il convient, de plus, d’encourager certaines catégories de migrants, notamment les étudiants. Nous voulons recevoir en France des étudiants étrangers de grande qualité car, comme les autres pays, à l’avenir, nous nous renforcerons à proportion du nombre d’étudiants étrangers de grande valeur que nous accueillerons et qui, une fois rentrés chez eux, deviendront nos meilleurs ambassadeurs. Recevoir des étudiants étrangers est donc un bon investissement.

Il en est de même du monde des affaires ou de la coopération décentralisée, en direction du monde des artistes. C’est pourquoi le Gouvernement a décidé de conduire une politique des visas mieux adaptée aux diverses situations que par le passé. Les catégories de personnes auxquelles la France ne délivre pas de visas sont peu nombreuses et différentes selon la pression migratoire. Il convient en revanche d’encourager la venue d’autres catégories en facilitant l’obtention des visas. L’année prochaine verra le cinquantième anniversaire de l’établissement par le général de Gaulle des relations diplomatiques avec la Chine populaire : or, en Chine, le visa sera délivré sous quarante-huit heures en 2014 – tel est l’objectif que j’ai fixé. C’est un élément considérable d’attractivité.

Le tourisme, comme l’a déclaré le Président de la République à la Conférence des ambassadeurs, est une grande cause nationale. C’est un des secteurs dans lesquels nous pouvons réaliser des progrès extraordinaires en termes économiques. Avec 30 % de touristes en moins que la France, l’Espagne réalise 30 % de recettes en plus : nous avons donc des progrès à réaliser. Or le progrès commence avec le visa. Il continue avec l’amélioration de l’accueil à Roissy-Charles-de-Gaulle, actuellement très triste : je l’ai dit récemment à Augustin de Romanet, le nouveau président-directeur général d’Aéroports de Paris (ADP). Il en est de même de l’accueil des touristes britanniques à la Gare du Nord de Paris, bien inférieur à celui de Saint-Pancras, à Londres – je l’ai dit à Guillaume Pepy.

Madame Schmid, vous avez raison, la décision du tribunal administratif de Paris d’annuler la contribution de 6 % destinée à aider l’AEFE à financer la part patronale est ennuyeuse. La quasi-totalité des établissements ont manifesté leur soutien à l’agence lorsqu’ils ont eu connaissance du jugement et ont confirmé leur volonté de l’aider. L’AEFE a pris ses dispositions pour faire face à un éventuel arrêt du Conseil d’État confirmant le jugement en appel. Si tel était le cas, l’AEFE serait très fortement pénalisée et ce sont les familles qui en supporteraient les conséquences financières. Or il n’est dans l’intérêt de personne de fragiliser cet établissement. J’espère que les choses se passeront pour le mieux.

S’agissant du Label France, je me rappelle très bien la communication de Mme Conway au Conseil des ministres du 28 août dernier. Je tiens à rappeler que nous n’avons pas les moyens de financer partout des établissements AEFE, alors même qu’ils rencontrent un succès extraordinaire. C’est pourquoi nous proposons de donner le Label France à des établissements locaux qui font un effort particulier dans l’enseignement du français. J’ai visité l’un de ces établissements, tout à fait extraordinaire, à Brooklyn. Dans cette petite école primaire publique, qui dépend de la ville de New York, les enfants apprennent à la fois l’anglais et le français. Ce type d’établissement ne nous dispense certes pas d’efforts, d’autant qu’il faudra assurer la suite dans le secondaire, mais il concourt indubitablement à notre réseau. On en compte une trentaine actuellement, dont un bon nombre aux États-Unis. Il faut encourager ces initiatives.

Monsieur Loncle, vous avez rappelé que les crédits avaient diminué par le passé, à l’exception de deux années. Pour ce qui est de l’évaluation de la Cour des comptes, elle est dans l’ensemble objective et juste. Je ne reviens pas sur la décision concernant l’Institut français. Nous allons nous efforcer de clarifier l’ensemble des crédits. Pour ce qui est de la cartographie du réseau, dès lors que les moyens ne sont pas extensibles à l’infini, l’orientation est de faire porter l’effort dans les pays où nous ne sommes pas assez présents. Lorsqu’on pense au développement auquel sont promis des pays comme l’Indonésie en Asie, le Mexique en Amérique latine ou le Nigéria en Afrique, il est évident que nous n’y sommes pas du tout au niveau où nous devrions être.

Pour ce qui est de la création de conseils d’influence, j’ai demandé aux ambassadeurs de regrouper autour d’eux diverses personnalités susceptibles de faire le lien entre les différents aspects de notre influence, économique, culturelle, scientifique, sportive…

J’en viens à France Expertise Internationale. Le Premier ministre nous a demandé de de rationaliser l’expertise française, car voilà un domaine où nous faisons beaucoup, mais de manière trop dispersée. Avec le potentiel qui est le nôtre, nous devrions emporter davantage de contrats.

Au total, le ministère des affaires étrangères respecte bien entendu le cadre budgétaire qui s’impose à nous compte tenu de la situation des finances publiques. Bien que nous ayons déjà été assez lourdement ponctionnés, nous essayons de concilier l’indispensable discipline budgétaire avec le lancement ou la poursuite de certaines réformes.

Enfin, je ne voudrais pas conclure sans saluer la compétence et le dévouement de notre administration. Les fonctionnaires du ministère des affaires étrangères, tant en France qu’à l’étranger, ne sont pas arrivés là par hasard, mais l’ont choisi. La représentation nationale peut, comme moi, compter sur leur loyauté et la qualité de leur travail.

M. Jean-Pierre Dufau. Les députés SRC voteront le budget de la mission « Action extérieure de l’État », même si ce n’est bien sûr pas celui qu’ils auraient souhaité.

Ce vote positif relève à la fois du bon sens et de la raison. Le Gouvernement et sa majorité doivent en effet faire face à l’endettement inconsidéré du pays qui leur a été laissé en héritage. Sous peine que la France ne perde sa place dans le concert européen et celui des grandes nations, le Gouvernement se devait de serrer les boulons de la dépense publique.

Comme d’autres, le ministère des affaires étrangères doit donc faire un effort – effort douloureux, mais indispensable pour préserver l’avenir. Difficile, l’exercice est néanmoins demeuré modéré et n’altère pas la possibilité de rebondir dans le futur.

Un effort de rationalisation a eu lieu, qui a pu s’appuyer sur le repli conjoncturel de nos contributions obligatoires. Poursuivant dans des voies déjà explorées ces dernières années, on s’est efforcé de combiner économies et efficacité administrative. Ainsi a-t-on mutualisé des services diplomatiques, consulaires et culturels extérieurs avec certains partenaires européens, l’Allemagne en particulier. Concourent également à l’effort un recours accru au numérique, qui permet de réduire les frais d’abonnement à certaines publications, et le recrutement de personnels locaux – lesquels bénéficient désormais d’une couverture sociale.

Ces choix, contraints, ont permis de dégager quelques marges qui ont été utilisées au mieux dans le contexte budgétaire actuel. Les bourses au bénéfice des enfants de nos compatriotes résidant à l’étranger ont été abondées. La sécurité de nos ambassades et consulats situés dans des régions sensibles a été renforcée. Trois cents agents ont été affectés dans des pays émergents, où, placés au service de la diplomatie économique à laquelle vous tenez, monsieur le ministre, ils devraient contribuer à renforcer l’attrait et l’influence de la France.

Notre vote positif en faveur de ce budget, imposé par la raison plus que choisi, ne peut toutefois masquer nos interrogations pour le futur.

Bien qu’il en aille de l’influence de notre pays, le ministère des affaires étrangères a, depuis plusieurs années, contribué plus que d’autres à l’effort de réduction de la dépense publique.

La France peut s’enorgueillir d’avoir l’un des réseaux diplomatiques les plus importants au monde, en tout cas le plus dense de tous les pays européens. Elle souhaite aujourd’hui, pour reprendre votre propos, monsieur le ministre, « aller au-delà de l’héritage pour couvrir la géographie du futur ».

Sous le quinquennat précédent, les ambassades ont été classées en différentes catégories, certaines, dites à format réduit, ayant vu leurs personnels diminuer. Des consulats ont été classés « en gestion simplifiée ». D’autres, ainsi d’ailleurs que plusieurs ambassades, ont fermé. La question se posera tôt ou tard du maintien d’un réseau diplomatique certes encore étendu, mais de plus en plus virtuel.

Responsable par délégation de la section française de l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF), il ne m’a pas échappé que le nombre de nos agents avait diminué dans certains pays d’Afrique noire et du Maghreb, de même que la part des bourses accordées par la France à des étudiants étrangers. Je partage votre ambition, monsieur le ministre, d’aller vers l’avenir. Mais, si l’avenir est en Asie ou en Amérique latine, il est également, pour la France, au Maghreb et en Afrique noire.

Dans l’attente de ce que vous pourrez nous dire sur ces deux points, je vous renouvelle, monsieur le ministre, le soutien des députés SRC, qui sont conscients des difficultés et de la nécessité pour notre pays d’assainir la situation des finances publiques qui lui a été laissée en héritage.

M. André Schneider. Le gaulliste que je suis est convaincu que nous partageons tous « une certaine idée de la France ». Le budget de la mission « Action extérieure de la France » est celui qui doit nous permettre de faire vivre notre vision du monde, notre vision de l’Europe, de renouveler nos relations avec le continent africain ou encore de renforcer le dialogue avec des régions du monde comme l’Amérique latine où il était jusqu’à présent limité. Pour résister au géant que sont les États-Unis, nous devons faire preuve de détermination dans notre action diplomatique.

Les crédits du programme 151 augmentent de 8 % par rapport à l’an passé, en raison essentiellement de l’organisation des élections à l’Assemblée des Français de l’étranger. Ces crédits servent à animer le vaste réseau de consulats généraux qui fait notre fierté : il faut renforcer notre action en ce domaine, tout en la réorganisant. La dotation prévue devrait nous permettre de conserver ce réseau, le deuxième au monde. Les crédits attribués à la Maison des Français de l’étranger, dont la mission est d’informer les Français désireux de s’installer à l’étranger, progressent de 34 %, du fait surtout de l’extension de ses activités. Les crédits de l’action 2 « Accès des élèves français au réseau de l’AEFE » augmentent de 8,5 millions d’euros. Mais, dans le même temps, ceux de l’AEFE baissent de 8 millions, si bien que c’est l’Agence qui financera l’essentiel de l’augmentation de ces bourses.

Si les crédits du programme 105 ne régressent que légèrement, ceux de l’action 4 « Contributions internationales » diminuent, eux, de 5 %. Il est regrettable que la contribution de notre pays à l’Organisation des Nations unies baisse de 43 millions d’euros. Notre influence dans les organisations internationales, qui n’est déjà pas des plus fortes, ne pourra qu’en pâtir. L’effort de 10 millions d’euros supplémentaires consenti en faveur de la sécurité de nos ambassades est, quant à lui, indispensable.

Avec plus de 220 millions de locuteurs, le français est encore la sixième langue parlée au monde. Or, au sein du programme 185 « Diplomatie culturelle et d’influence », dont les crédits baissent de 3 %, ceux destinés à la promotion de la langue française diminuent de 3,5 millions d’euros. Ce n’est pas en réduisant sans cesse ces crédits que nous parviendrons à accroître la diffusion de notre culture et de nos valeurs, et donc aussi à conforter notre poids économique dans le monde.

Alors que 7 millions d’euros vont être dépensés en licences Microsoft, ne pourrait-on pas former des agents consulaires à des logiciels libres comme Linux, dont l’exploitation est gratuite ? Les sommes économisées pourraient utilement être réaffectées.

Mme Schmid évoquait tout à l’heure le Label France. Sans doute serait-il judicieux de trouver une autre dénomination, plus appropriée pour les écoles francophones.

Monsieur le ministre, on ne peut qu’être d’accord avec les grandes lignes de votre action et la philosophie qui l’inspire, mais force est de reconnaître que « l’intendance ne suit pas ». Ce n’est certes pas de votre faute, mais il faudrait faire quelques efforts. Le professeur bienveillant que j’étais et que je suis sans doute resté vous mettrait une note satisfaisante, monsieur le ministre, assortie toutefois de l’observation « Peut mieux faire ».

Même s’il reste beaucoup à faire, en matière de bâtiments notamment, nous avons la chance de disposer d’un réseau diplomatique exceptionnel. Le monde attend énormément de la France : donnons-nous les moyens de continuer à professer nos valeurs de démocratie, de liberté, de respect des droits de l’homme, de culture et de paix. Ni votre bonne volonté ni celle de tout notre réseau diplomatique ne peuvent, hélas, pallier le manque de moyens. Nous n’avons plus aujourd’hui les moyens de nos ambitions.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP ne pourra pas voter ce budget.

M. Meyer Habib. Au nom du groupe UDI, je tiens à saluer l’action de nos diplomates et de nos agents qui œuvrent dans des conditions parfois difficiles au rayonnement de notre pays. Député de la huitième circonscription des Français établis hors de France, j’ai eu le privilège de pouvoir apprécier leurs compétences, et je leur rends hommage.

Son exceptionnel réseau diplomatique et culturel permet à la France de faire entendre dans le monde sa voix si forte et si particulière. Il lui permet également de diffuser sa vision du respect des droits de l’homme, sa créativité, son humanisme et ses valeurs universelles auxquelles, à l’UDI, nous sommes si attachés.

Il faut donc encourager le développement de ce réseau de 163 ambassades, seize représentations permanentes et deux antennes diplomatiques, tout en en redéployant les moyens et les effectifs vers les pays émergents. Le groupe UDI salue donc l’action du Gouvernement en ce sens, tout en appelant à la plus grande vigilance afin que notre pays ne perde pas en influence auprès de ses partenaires traditionnels.

Nous découvrons non sans surprise que le Gouvernement a retranché 43 millions d’euros à la contribution totale de notre pays aux soixante-douze organisations internationales auxquelles nous contribuons ainsi qu’aux opérations de maintien de la paix. Il en va pourtant de la stature de la France dans le monde. Ce choix est-il judicieux, alors que, dans un monde de plus en plus dangereux et multipolaire, les organisations internationales devraient nécessairement être appelées à jouer un plus grand rôle ?

Nos valeurs universelles sont aussi portées par notre culture. L’AEFE, Campus France et l’Institut français jouent à ce titre un rôle essentiel. Le groupe UDI comprend que, en période de restrictions budgétaires, des efforts particuliers leur soient demandés. Mais il s’interroge sur la capacité qu’elles auront à rendre soutenable leur masse salariale et à développer de manière plus systématique des ressources propres. Leur donnerez-vous la liberté et la flexibilité nécessaires pour qu’elles fassent aussi bien avec moins ?

En matière de bourses, le groupe UDI s’interroge sur le nouveau mode de calcul des quotités attribuées aux familles dans le besoin, consécutif à la réforme du système d’attribution. Certaines familles, qui vivent déjà dans des conditions très difficiles, ont vu diminuer la somme qui leur est attribuée sans que le niveau de leurs revenus ait changé. Je reviens d’Italie, qui fait partie de ma circonscription : à Milan et à Rome, des mères m’ont dit qu’elles allaient être obligées de retirer leurs enfants du lycée français – j’ai d’ailleurs écrit à ce sujet à la ministre déléguée, Mme Conway-Mouret. Les familles monoparentales, les plus vulnérables, sont les plus touchées. Comment accepter qu’une famille française soit contrainte, par manque d’argent, de retirer ses enfants de l’école ?

Du haut de sa morale à géométrie variable, une partie de la majorité s’indigne de « l’affaire Leonarda », dans laquelle le droit a été respecté, même si elle soulève la question de la sanctuarisation des espaces scolaires. Dans le même temps, nul ne s’émeut qu’à l’étranger des enfants français doivent quitter l’école de la République, parce que leurs parents ne peuvent pas payer leur scolarité et que les bourses diminuent. Aucun enfant ne doit être exclu du système scolaire français à l’étranger par manque de moyens de sa famille.

Il est prévu, dans le programme 151, d’augmenter les effectifs de fonctionnaires affectés à la délivrance des visas de tourisme. Il faut en effet faciliter la venue des touristes en France, mais la solution proposée est archaïque. Il aurait fallu se fixer pour objectif de délivrer plus de visas, plus rapidement, à effectifs constants. Certains pays y parviennent en recourant de façon massive et intelligente à internet. Pourquoi la France ne le pourrait-elle pas ?

Un dernier mot sur la réforme de la représentation des Français de l’étranger : le groupe UDI considère qu’elle n’a fait que multiplier les élus sans leur donner ni compétences ni moyens supplémentaires, et qu’il s’agit avant tout d’un tripatouillage électoral. De surcroît, il est pour le moins curieux de faire présider les conseils consulaires formés d’élus du peuple par des fonctionnaires, ceux-ci fussent-ils consuls. Voilà 4 millions d’euros bien mal dépensés !

Pour toutes ces raisons, le groupe UDI votera contre les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

Mme Françoise Dumas. Dans le cadre de la politique de redressement économique voulue par le Président de la République et mise en œuvre par le Gouvernement, les moyens d’influence du ministère des affaires étrangères doivent venir appuyer certains secteurs stratégiques pour la France : le tourisme, la recherche, les filières industrielles d’excellence, l’innovation.

Pour relever le défi de l’attractivité économique de la France, nous disposons du premier réseau culturel au monde. Vous avez décidé d’en faire évoluer la cartographie afin, notamment, que nous soyons plus présents dans les pays émergents. Notre langue constitue aussi un atout, notamment en Afrique, où l’on comptera bientôt 700 millions de francophones.

La diplomatie culturelle permet, au travers des instituts français et du corps diplomatique, de faire entendre la voix de la France dans un espace mondialisé. La culture française est un outil d’influence et un atout économique majeur, d’ailleurs envié.

Monsieur le ministre, la diplomatie culturelle doit servir la diplomatie économique, dont vous avez fait la première priorité. Elle fait partie de la stratégie globale d’influence de la France à l’étranger au travers de l’économie, de la culture, de l’éducation et de la science. Quels objectifs le Gouvernement a-t-il fixés aux opérateurs placés sous votre tutelle afin de participer au développement de l’attractivité économique de notre pays ? Quelles directives leur a-t-il données ? En matière de diplomatie économique, les opérateurs comme Ubifrance, la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (COFACE), l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et les missions économiques sont placés sous la tutelle du ministère de l’économie et des finances. Comment les deux ministères coopèrent-ils ? Comment opérateurs économiques et réseau de coopération culturelle travaillent-ils ensemble au service de l’objectif économique ? Quel bilan dressez-vous de votre action sur ce point depuis un an ?

M. Hervé Féron. La valorisation du parc immobilier à l’étranger sera poursuivie. Mais comment être sûr que sera garantie l’égalité de traitement entre les différents occupants du domaine de l’État et que seront pris en compte le caractère social ou la mission d’intérêt général de certaines organisations ?

Les subventions versées à l’AEFE, à Campus France et à l’Institut français diminuent globalement de 2 % en 2014, soit 11,4 millions d’euros. Quelles en seront les conséquences pour la promotion de la langue française, l’accueil des étudiants dans le supérieur et la gestion de leur mobilité internationale, ainsi que la formation des agents de notre réseau culturel ?

M. Philip Cordery. Merci, monsieur le ministre, pour ce budget qui décline à l’international les priorités nationales que sont l’éducation, la sécurité et le redressement économique, grâce à la nouvelle stratégie de diplomatie économique, si importante pour notre balance commerciale et qui commence de porter ses fruits.

Les crédits consacrés à l’enseignement français à l’étranger représentent près d’un cinquième du budget global de la mission « Action extérieure de l’État ». Je me félicite que le projet de budget mette l’accent sur la diversification de cet enseignement, avec des programmes comme le « Label FrancÉducation » ou FLAM (Français langue maternelle), qui permettront que davantage de jeunes aient accès à une éducation française de qualité. Mme Conway-Mouret a fait des propositions intéressantes en ce domaine.

Le nouveau système de bourses est plus juste et plus transparent. Des injustices demeurent toutefois, qui seront corrigées. L’une des solutions ne serait-elle pas de proroger les mesures d’atténuation, de façon qu’aucune famille ne puisse perdre plus de 20 % d’une année sur l’autre et n’ait donc pas à subir de choc financier aussi brutal ?

Plafond d’emplois, immobilier, pensions civiles, autant de postes susceptibles de faire exploser les frais de scolarité, alors même que les bourses se réduisent. Comment faire pour enrayer l’envolée de ces frais ?

Que prévoit le projet de budget pour que, à l’étranger, les élèves en situation de handicap puissent eux aussi être accueillis de manière satisfaisante ?

La loi pour l’enseignement supérieur et la recherche, adoptée en juillet dernier, vise à attirer dans les universités françaises non seulement les étudiants étrangers, mais aussi les jeunes Français de l’étranger. Cela pourrait-il faire partie des missions de Campus France ? Des moyens budgétaires sont-ils prévus ?

M. Guy-Michel Chauveau. Coopération décentralisée, culture, économie, développement : autant de domaines où des milliers de partenariats existent avec des pays étrangers. Même si la situation s’est améliorée, les délais sont, hélas, encore beaucoup trop longs pour obtenir un visa.

M. Alain Rodet. Monsieur le ministre, votre prédécesseur avait décidé de réaffecter une quarantaine de conseillers des affaires étrangères et de ministres plénipotentiaires à d’autres missions. Poursuivez-vous cette politique de « dégagement des cadres » et en avez-vous reçu une évaluation ?

Quelle est l’intensité de la présence française à Taïwan, économie performante de 25 millions d’habitants ?

Mme Monique Rabin. Le comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée nationale a pointé un manque de visibilité de nos services à l’étranger, notamment pour les entreprises qui souhaiteraient investir en France ; il convient de lutter contre cette faiblesse.

Plutôt que de disposer d’une politique de visas non ciblée, il faudrait attirer les anciens étudiants étrangers en France qui ne peuvent rester dans l’entreprise dans laquelle ils ont effectué un stage – alors que cette possibilité est offerte pendant deux ans en Allemagne.

Mesdames et messieurs les députés de l’opposition, le ministère des affaires étrangères concourt au redressement des finances publiques et vous ne pouvez pas en même temps regretter cet effort et douter de la capacité du Gouvernement à dégager 15 milliards d’euros d’économies. Nous devons maintenir ce cap, puis réallouer des moyens supplémentaires d’ici à deux ou trois ans.

M. Jean-Paul Bacquet. Je siège au conseil d’administration de France Expertise Internationale (FEI) et je n’ai toujours pas compris ce que faisait cet établissement public, mais je suis rassuré d’entendre que tel n’est pas votre cas !

Votre investissement dans la diplomatie économique commence à payer et, pour poursuivre cet effort, il y a lieu de rassembler les personnels qui exercent le même métier. Si le regroupement d’Ubifrance et de l’AFII ne présente que peu d’intérêts, le rapprochement d’Ubifrance, de la Banque publique d’investissement (BPI), de CCI International et de Sopexa-Atout France aurait du sens.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Seuls six ou sept ambassadeurs devaient être protégés il y a quelques années ; ils sont aujourd’hui plus d’une vingtaine, ce qui entraîne des coûts supplémentaires.

Nous conduisons un effort de mutualisation important, notamment avec l’Allemagne, que nous devons poursuivre – dans les projets immobiliers, par exemple, où nous devrions davantage solliciter le service européen pour l’action extérieure (SEAE) –, afin de réaliser davantage d’économies.

L’avenir passe par l’Afrique noire et le Maghreb, qui constituent notre zone prioritaire d’intervention. Le président de l’Afrique du Sud, M. Jacob Zuma, a récemment souligné l’efficacité de l’aide apportée par la France à l’ensemble du continent africain.

La contribution de la France à l’ONU s’élevait l’année dernière, selon le barème des quotes-parts, à 6,123 % du budget de l’organisation et atteint 5,597 % cette année – cette diminution étant due au tassement du poids relatif de notre économie dans le monde. Nous constituons certes le deuxième contributeur du Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme – notre contribution approchant les 300 millions d’euros –, mais nous n’occupons que rarement cette place. Néanmoins, l’influence ne se mesure pas aux engagements financiers, et 80 % des résolutions votées par le Conseil de sécurité sont présentées par la France ou par le Royaume-Uni.

Le réseau diplomatique français n’est plus que le troisième mondial, la Chine ayant accédé à la place de dauphin des États-Unis. L’Institut français s’occupera prochainement de la formation et de la professionnalisation de notre réseau, y compris celles des agents expatriés et recrutés locaux, il aidera à la gestion et à la mise en œuvre des programmes culturels, il développera les plateformes et les outils numériques innovants qu’utiliseront l’ensemble des postes, et il recherchera des mécénats – à l’image des 6 millions d’euros de financement privé qui permettront l’ouverture d’une librairie française au consulat de New York dans quelques mois.

Nous avons lancé, avec le ministre de l’intérieur, une refonte complète de notre système informatique de délivrance des visas, qui s’avérait obsolète et sera remplacé d’ici à deux ou trois ans. Lors de périodes d’intense activité, les chefs de poste doivent pouvoir faire appel à des personnes – comme des anciens fonctionnaires – permettant de gérer l’afflux de demandes ; tous les ambassadeurs me transmettent chaque mois un tableau comparant le nombre de dossiers de visas traités l’année précédente avec celui de l’année en cours : nous constatons une amélioration sensible dans de nombreux pays, principalement en Chine où des efforts considérables ont été réalisés.

Les ambassadeurs sont les préfets de l’extérieur : il leur revient de coordonner l’action des services placés sous leur autorité, responsabilité facilitée lorsque l’ensemble des départements sont regroupés géographiquement. Si des problèmes remontent à l’échelon central, ce sont alors les ministres qui interviennent.

Les crédits de fonctionnement de l’AEFE et de l’Institut français diminuent, ce mouvement pouvant n’avoir qu’un impact limité sur les actions conduites, à condition qu’il n’aille pas trop loin. Cette réduction ne justifie pas que l’accès à ces écoles soit réservé aux seuls élèves français. Bien que la demande surpasse largement l’offre de places, il convient de maintenir le brassage des nationalités qui constitue la qualité et la spécificité de notre enseignement à l’étranger.

Les frais de scolarité financent plus de la moitié du fonctionnement de l’AEFE, soit 600 millions d’euros, le budget de l’État apportant l’autre moitié de la contribution, ce qui représente une somme élevée. L’État ne contrôle que certains paramètres de la politique tarifaire des établissements scolaires, mais les responsables d’établissement essaient d’accueillir les enfants des familles les plus modestes et ne reçoivent en tout cas aucune instruction pour ne pas les accepter.

Monsieur Habib, vous avez parlé de « tripatouillage électoral », sans que je comprenne bien à quoi vous faisiez allusion. Sachez, en tout cas, que ce n’est pas le genre de la maison !

Monsieur Chauveau, j’ai demandé aux ambassadeurs d’anticiper l’afflux de demandes de visas lié à des manifestations – comme un spectacle ou le jumelage d’une commune française avec une ville étrangère – qui sont programmées à l’avance. Les risques de fraude restent marginaux et nous devons compter sur le sens des responsabilités des collectivités locales.

Monsieur Rodet, en plus des quarante personnes entrées dans le dispositif de fin d’activité, nous souhaitons qu’une vingtaine d’agents supplémentaires y accèdent.

L’Institut de Taipei assure la représentation de la France à Taïwan, notre pays étant bien implanté dans cette partie du monde.

Un inspecteur des finances est chargé de réfléchir au regroupement d’Ubifrance, de CCI International et de l’AFII ; son rapport nous permettra d’arrêter certaines décisions, le comité interministériel tenu sur ce sujet il y a quelques semaines n’ayant pas été concluant. Nous devons organiser les relations entre ces organismes de telle sorte que l’efficacité de notre action soit maximale.

FEI est un organisme intéressant, mais le ministère des affaires étrangères étudie l’ensemble des expertises publiques, afin d’en assurer la coordination. Ce travail permet de présenter à nos partenaires étrangers et aux organismes internationaux la richesse de l’expertise dont nous disposons dans de nombreux domaines, cette connaissance – notamment dans le domaine de la formation – s’avérant de plus en plus déterminante pour l’obtention de contrats à l’étranger.

S’agissant des amendements déposés à la partie du projet de loi de finances consacrée à l’action extérieure de l’État, je souhaiterais affirmer mon opposition à la suppression des postes d’ambassadeurs thématiques travaillant en direction des départements d’outre-mer. Par ailleurs, l’éventuelle augmentation des crédits dédiés à l’enseignement français à l’étranger ne doit pas s’effectuer au détriment de ceux finançant l’action européenne.

M. Pierre-Alain Muet, président. Monsieur le ministre, nous vous remercions.

La réunion de la commission élargie s’achève à vingt-trois heures dix.

© Assemblée nationale