SOMMAIRE
1. Projet de loi de finances pour 2013 Première partie (suite)
Amendement no 506
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget
Amendements nos 456, 457, 184, 458, 673, 108, 186, 188, 729
Amendement no 459
Amendements nos 570, 831, 584, 845, 839, 841, 842, 843, 591, 844, 840, 762, 594, 596
Amendement no 832 rectifié
Amendements nos 563, 435, 567, 433, 561 rectifié
Amendements nos 778, 833 (sous-amendement), 834 (sous-amendement), 835 (sous-amendement), 836 (sous-amendement)
Amendement no 468
Amendement no 837
Amendements nos 425, 401, 403, 406, 392, 516, 109, 132, 558, 132, 558, 110, 144, 245, 559 rectifié, 398
Amendement no 62
Amendement no 85
Amendement no 838
M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances
Amendements nos 399, 391, 394, 424, 393, 400, 397
Mme Danielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes
Amendement no 212
Suspension et reprise de la séance
Amendement no 1
Amendement no 2
M. le président. La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à seize heures.)
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2013 (nos 235, 251).
M. le président. Vendredi, l’Assemblée a poursuivi l’examen de la première partie du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement n° 24 à l’article 27.
Cet amendement n’est pas défendu.
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement n° 506.
M. Nicolas Sansu. Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre du budget, mon amendement n° 506 vise à tripler la fraction du produit de la taxe sur les transactions financières affectée au fonds de solidarité pour le développement. Nous avons eu ce débat vendredi en examinant l’article 26 relatif aux taxes affectées. Cette proposition s’inscrit dans la ligne de deux autres amendements que j’ai défendus la semaine dernière : ils visaient à augmenter l’assiette de la taxe par un abaissement du niveau de chiffre d’affaires à partir duquel les entreprises sont concernées et à relever le taux à 0,5 %.
Il s’agit donc d’une mesure de cohérence avec deux amendements rejetés. Mais je souhaitais poser la question, sachant, monsieur le ministre, que j’ai été alerté par un certain nombre d’organisations non gouvernementales qui se sont émues de la diminution des crédits affectés à la coopération et au développement.
M. le président. La parole est M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. La commission n’a pas retenu cet amendement : avis défavorable. J’indique à M. Sansu qu’en ce qui concerne l’aide au développement via le FSD, il n’y a pas de diminution des crédits. Il y aura en 2014 un passage à 100 millions et l’année suivante à 160 millions : c’est quand même un progrès. Certains avaient imaginé que l’on puisse aller plus vite et plus fort, malheureusement les finances publiques ne le permettent pas. Notre collègue Jean-François Mancel avait défendu un amendement de ce type dans la nuit de vendredi. Mais il n’y a pas de diminution, j’y insiste, puisqu’on passe à 100 puis 160 millions comme le prévoit la loi de programmation. C’est ce que les finances publiques permettent de faire, pas plus.
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Monsieur Sansu, le Gouvernement est défavorable à votre amendement. Outre les éléments donnés par le rapporteur général et que naturellement je confirme – nous passerons de 60 à 160 millions –, il me paraît utile de rappeler à ceux qui se sont émus auprès de vous de ce que pourrait être la contribution de la France à l’aide publique au développement quelques éléments factuels. D’abord, la France contribue à l’aide publique au développement pour un peu moins de 9,5 milliards d’euros. Deuxièmement, en valeur absolue la France est au quatrième rang des pays contributeurs. Enfin, si on rapporte cette aide au produit national brut, alors la France est en deuxième position, très loin devant l’Allemagne. Il me semble que la France ne méconnaît absolument pas le rôle qu’elle doit jouer dans l’aide publique au développement, qu’elle se conforme dans son action à la mission qui est la sienne depuis toujours et à laquelle tout le monde adhère sur ces bancs.
Quant au pourcentage de la taxe sur les transactions financières qui sera consacré à l’aide publique au développement, les montants que je vous ai indiqués sont rigoureusement conformes aux engagements que le Président de la République a pu prendre quand il était candidat et depuis qu’il est élu.
Pour toutes ces raisons, je crois que cet amendement, que je devine être d’appel, mériterait d’être retiré, pour ne pas donner l’impression que votre assemblée, en votant contre, méconnaîtrait les éléments que je viens d’indiquer.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Mancel.
M. Jean-François Mancel. Je me réjouis d’entendre le ministre du budget nous dire enfin que l’héritage est bon, en particulier pour ce qui est de l’aide publique au développement.
Cela étant, je reviens d’un mot au débat qui a eu lieu très tardivement vendredi soir. J’avais défendu un amendement assez comparable, avec l’idée de faire modifier l’article 26, celui qui nous bloque au moment d’aborder l’article 27.
Ce que je reprochais à l’article 27, et que je veux redire aujourd’hui, c’est qu’il s’agit d’un affichage qui ne correspond pas à la réalité. L’article 27 nous dit clairement que 10 % de la taxe sur les transactions financières vont être affectés au développement. Ce n’est pas du tout le cas, puisque dans son deuxième alinéa il fait référence à l’article 26 selon lequel ce sont seulement 3,7 % de la taxe sur les transactions financières qui seront affectés à cette aide en 2013. Non seulement l’affichage est faux, mais cette mesure va à l’encontre, monsieur le ministre, des engagements pris par le Président de la République, puisqu’il avait parlé, lui, d’une « part importante » de la taxe sur les transactions financières qui serait affectée au développement. En l’occurrence, 3,7 %, c’est loin d’être une part importante.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Merci, monsieur Mancel, de préciser la différence entre les crédits de paiement et les autorisations d’engagement. Pour les autorisations d’engagement, les chiffres que je vous ai donnés sont rigoureusement exacts. Pour les crédits de paiement, vous avez raison, le temps que cette aide monte en charge, ils sont ce que vous indiquez. À terme, les autorisations d’engagement que le Gouvernement demande au Parlement de voter sont bien celles que je viens d’indiquer. Nous avons une divergence d’appréciation sur les engagements du Président de la République : j’ai le sentiment, en conscience, que ces engagements sont respectés.
M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.
M. Nicolas Sansu. Dans le souci de bonne compréhension qui a présidé à l’examen du projet de loi de finances, je vais retirer l’amendement, mais comprenez bien qu’il s’agit d’un amendement d’appel et que la taxe sur les transactions financières devra porter ses fruits pour l’aide au développement.
(L’amendement n°506 est retiré.)
(L'article 27 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, inscrit sur l’article.
M. Hervé Mariton. L’article 28 opère un prélèvement sur le fonds de roulement du Centre national de la cinématographie. Quelque coordination – au sein même de notre groupe d’ailleurs – aurait permis d’assurer des positions plus homogènes.
Il est intéressant de rappeler la difficulté de procédure à laquelle j’ai été confronté. J’avais déposé un amendement augmentant le prélèvement, qui n’a pas passé la rampe de l’article 40 : il s’agissait certes d’un amendement vertueux pour les finances de l’État, mais la baisse de recettes du CNC aurait dû être gagée. On n’est jamais assez prudent avec l’article 40.
Aujourd’hui le CNC a une trésorerie considérable : 789 millions fin août 2011, c’est-à-dire 313 jours de fonctionnement. Les ressources fiscales affectées au CNC ont progressé de 40 % de 2007 à 2011 : plus de 130 millions. Or, dans le même temps, ses dépenses de soutien au cinéma n’ont augmenté que de 25 %. Nous avons eu le débat pour une autre part, les recettes en tant que telles, dans la nuit de vendredi à samedi. Il s’agit là d’augmenter le prélèvement souhaité par le Gouvernement. Il propose 150 millions : c’est déjà ça. Je pense qu’on pourrait aller bien au-delà et au passage expliquer à nos collègues, animés, nul n’en doute, d’une bonne intention, qu’ils n’avaient peut-être pas mesuré que le fonds de roulement du CNC était déjà excessif.
M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin, pour soutenir l’amendement n° 107.
M. Jacques Lamblin. Je vous remercie, monsieur le président, de donner la parole à l’hétérogénéité, pour reprendre en l’inversant l’expression d’Hervé Mariton. Nous ne sommes pas d’accord sur cet article-là.
Le premier sentiment qui me vient, c’est que ce n’est qu’un début, et les propos mêmes de M. Mariton pourraient vous encourager à aller plus loin l’année prochaine.
De plus, dans les attendus qui motivent la position du Gouvernement, il est précisé que le CNC est financé « par affectation d’impositions de toute nature », dont la principale est la taxe de soutien à l’activité, c’est-à-dire une taxe d’environ 10 % sur le ticket d’entrée au cinéma. Cela signifie clairement que les fonds du CNC viennent avant tout des spectateurs.
Le cinéma en France, contrairement à la quasi-totalité des cinémas européens, est celui qui, en dehors du temps béni des années 1960-1970, a survécu, voire prospéré. Il y a là une réussite économique incontestable, une filière qui va de la création à la production et à la diffusion. Cette industrie cinématographique, il serait dommage de prendre le risque de l’affaiblir. Or elle est liée à l’organisation de la filière sur le plan financier.
Il s’agit aussi d’une composante majeure de notre politique culturelle. Dans de nombreux territoires, le cinéma est même l’unique outil culturel.
Toute mesure visant à affaiblir le CNC me semble donc contre-productive. C’est pourquoi mon amendement n° 107 vise à supprimer l’article 28.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. J’ai entendu M. Mariton, je viens d’entendre M. Lamblin : je ne vais pas vous faire le coup du couac, mais l’un défend le contraire de l’autre ! Cela peut arriver, c’est la richesse de la diversité au sein de votre groupe.
Mais soyons sérieux. Comme l’a souligné M. Mariton, les ressources du CNC sont très dynamiques puisqu’elles ont augmenté de près de 60 % de 2004 à 2007.
M. Jacques Lamblin. D’où proviennent-elles ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Quand vous me posez ce genre de question, j’ai l’impression que vous faites comme M. de Courson : on dirait que c’est l’interrogatoire systématique de l’élève au professeur.
La taxe sur les services de télévision est payée par les distributeurs. Son caractère très dynamique avait conduit certains d’entre nous à envisager de la plafonner.
M. Hervé Mariton. À bon droit !
M. Christian Eckert, rapporteur général. Finalement, c’est un autre arbitrage qu’a fait le Gouvernement après avoir observé son fonctionnement, ses opérations immobilières, son fonds de roulement, la nature de ses interventions. Compte tenu de la trésorerie abondante du CNC, pour ne pas dire surabondante, il a décidé d’opérer un prélèvement de 150 millions d’euros sans plafonner l’opérateur. Mais il n’est pas exclu qu’à l’avenir on procède différemment. Il va probablement falloir continuer à exercer une petite pression sur le CNC pour qu’il participe, comme l’ensemble des opérateurs de l’État, à l’effort de redressement des comptes publics.
Avis défavorable à l’amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Lamblin, vous appartenez à un groupe qui reproche au Gouvernement de ne pas faire d’économies. Or j’ai à l’esprit au moins deux de vos amendements qui prévoient des dépenses supplémentaires, l’un qui propose d’indexer la DGF sur l’inflation, l’autre – celui que nous sommes en train d’examiner – de supprimer une recette sur le fonds de roulement du CNC, dont chacun s’accorde à reconnaître qu’il est largement suffisant, surtout au regard des recettes très dynamiques qui lui sont affectées.
Le financement du CNC est assuré par trois taxes : une taxe sur les vidéos et services à la vidéo qui représente 30 millions d’euros, une taxe sur les tickets d’entrée pour 130 millions d’euros, enfin une taxe qui se décline en deux sous-taxes, l’une sur les éditeurs – 300 millions d’euros – et l’autre sur les diffuseurs : 250 millions d’euros.
Vous avez raison d’indiquer que le cinéma est, en France, une industrie prospère qui rencontre du succès, précisément grâce à l’organisation de son financement, que les pouvoirs publics ont décidé de maintenir au-delà des alternances. Pour autant, ce succès ne doit pas, me semble-t-il, épargner le CNC des efforts que toutes les administrations, et notamment les opérateurs, doivent consentir.
Le prélèvement de 150 millions d’euros me paraît donc justifié, d’autant que l’on peut s’interroger sur la progression de la masse salariale au sein du CNC, de 35 % au cours des huit ou neuf dernières années, alors même qu’il n’y a pas eu de recrutements. Cela représente donc un gain de pouvoir d’achat important pour les personnels. De même, la politique immobilière semble surprenante puisque le CNC a acheté des immeubles en plein Paris sans qu’il y ait eu vraiment de négociations, d’après les renseignements que j’ai pu avoir, achats qui ont été faits de surcroît pour le compte propre du CNC et non pas pour l’État, alors même que son financement provient d’impositions de toute nature. On aurait donc pu imaginer que l’État se retrouve propriétaire et non le CNC.
Bref, il y a une forme d’autonomie de la part de cet opérateur, qui est certainement souhaitable en termes de créativité et qu’il faut saluer dès lors que l’on constate le succès de l’industrie du cinéma, mais il ne faut pas qu’il aille jusqu’à utiliser les fonds publics de manière déraisonnable, de manière sinon contradictoire, en tout cas différente de ce que l’État souhaite faire à cet égard.
Si vous maintenez votre amendement, outre la surprise que vous créerez dans votre groupe, le Gouvernement appellera résolument à voter contre.
M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin.
M. Jacques Lamblin. Monsieur le ministre, j’ai bien entendu vos explications. Vous avez dit que certaines des décisions prises par le CNC sont quelque peu surprenantes. Cela signifie peut-être qu’il faut mieux contrôler ce qui s’y passe.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Ça n’a pas été fait dans le passé !
M. Jacques Lamblin. C’est un autre problème que celui que j’évoque.
J’ai développé mon argumentaire car je sais que, dans de nombreux territoires – et le développement harmonieux des territoires passe aussi par le maintien des structures de toute nature, en particulier culturelles –, on a besoin du soutien du CNC.
J’admets que j’ignorais l’importance des réserves du CNC. Aussi, à condition que ce ne soit pas le bout du doigt mis dans un engrenage pour les temps futurs, je suis prêt à retirer mon amendement.
(L'amendement n° 107 est retiré.)
M. le président. La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 183.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Favorable.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel.
Mme Marie-Françoise Bechtel. Monsieur le rapporteur général, permettez-moi de vous poser une question sur la rédaction de cet amendement. Je ne m’oppose pas sur le fond, le ministre ayant parfaitement expliqué les raisons pour lesquelles les politiques un peu erratiques du CNC, que la tutelle a d’ailleurs parfaitement laissé faire, justifient la méthode retenue.
Ma question concerne plutôt la forme. Comment peut-on traiter comme une taxe ce qui est un prélèvement sur le fonds de roulement autorisé par la loi envers un établissement public d’État ? Je ne comprends pas que l’on écrive que le prélèvement est « recouvré » dans les mêmes conditions qu’une taxe.
M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.
M. Christian Eckert, rapporteur général. L’article 28 prévoit que le recouvrement s’effectue selon la procédure en matière de taxe sur les salaires. C’était la volonté du Gouvernement. Mon amendement rédactionnel n’y change rien.
Votre question, madame Bechtel, porte sur le fond et non sur la forme. S’il le souhaite, le ministre pourra vous éclairer sur le choix de cette procédure.
M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Juridiquement, c’est une bonne question !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est une commodité juridique.
(L'amendement n° 183 est adopté.)
(L'article 28, amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l'amendement n° 456.
M. Sergio Coronado. Pour un étranger, vous le savez, la régularisation est parfois un parcours long, difficile, voire un parcours du combattant.
Cet amendement a pour objet, dans une perspective égalitaire, d’abaisser le montant des taxes exigées pour la première délivrance de tout titre de séjour pour les régularisations pour raisons privées et familiales ou les cas d’admission exceptionnelle au séjour des salariés. Il s’inscrit dans la logique de l’article 29, qui vise à diminuer les taxes perçues pour les régularisations. Une taxe trop élevée peut en effet avoir un effet dissuasif, voire contraindre ceux qui sont demandeurs d’une régularisation à demeurer encore plus longtemps dans la clandestinité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet article a pour objet de rééquilibrer l’ensemble des taxes concernant la délivrance des titres de séjour. Le Gouvernement a réalisé des avancées en diminuant certaines de ces taxes. Évidemment, entre le possible et le souhaitable il y a un peu de chemin. Cela dit, celui que vous nous proposez d’emprunter, monsieur Coronado, coûte 16 millions d’euros.
Compte tenu de l’effort déjà consenti pour la délivrance des titres de séjour, je propose que nous restions à l’écart de ce chemin. Je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, j’appelle à voter contre.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Défavorable.
Monsieur Coronado, le niveau de la taxe de primo-délivrance est élevé, et ce constat est assez largement partagé, en tout cas sur les bancs de la majorité. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement propose de la diminuer d’un tiers. Vous jugez cet effort insuffisant ; je l’estime raisonnable au regard de la perte de recettes qu’il occasionne, d’autant que l’Office français de l’immigration et de l’intégration doit continuer à fonctionner. Vous le savez, 80 % de ses ressources proviennent de cette taxe affectée. J’observe d'ailleurs que vous proposez sa diminution sans envisager de financement complémentaire qui permettrait de pallier le manque de recettes.
Comme le rapporteur général, je vous suggère de retirer votre amendement. À défaut, je demande son rejet. L’OFII doit pouvoir continuer à fonctionner dans de bonnes conditions.
Enfin, il me semble que l’effort réalisé, diminuer d’un tiers, montre bien quelle est la volonté politique du Gouvernement en la matière, volonté dont personne ne doit douter.
M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado.
M. Sergio Coronado. Personne ne nie les efforts qui ont été réalisés par le Gouvernement. Pour autant, la taxe exigée pour la première délivrance d’un titre de séjour est la plus lourde. Je maintiens donc mon amendement.
(L'amendement n° 456 n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l'amendement n° 457.
M. Sergio Coronado. Il est proposé que la taxe perçue pour les demandes d’un premier titre de séjour ne le soit qu’à la délivrance du titre et non à sa demande. Il est anormal en effet de faire financer l’Office qui s’occupe de l’accueil et de l’intégration des migrants par ceux qui verront cette demande refusée.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Même avis que précédemment.
De manière générale, tous les titres donnant lieu au paiement d’une taxe ou d’un droit de timbre sont réglés au moment de la demande du titre et non de sa délivrance, car les frais administratifs sont engagés dès la demande quelle qu’en soit l’issue. Il me semble cohérent d’en rester à cette pratique qui prévaut pour l’ensemble des titres.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Défavorable.
M. le président. Monsieur Coronado, maintenez-vous l’amendement ?
M. Sergio Coronado. Oui, monsieur le président.
(L'amendement n° 457 n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n° 184.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Amendement de précision.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Favorable.
(L'amendement n° 184 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l'amendement n° 458.
M. Sergio Coronado. Cet amendement s’inscrit dans la même logique que les précédents.
Pour une demande de régularisation, 110 euros sont obligatoirement acquittés et non remboursés, même si la demande est refusée. Là encore, il est anormal de faire financer l’Office par ceux qui ne sont pas régularisés.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Monsieur Coronado, la commission vous demande de retirer cet amendement au profit de l’amendement n° 673 de M. Grandguillaume qui traite du même sujet.
Vous demandez l’exonération de la totalité de la part du droit de visa de régularisation, tandis que M. Grandguillaume propose de la diminuer de 110 à 50 euros, ce qui représente un coût de 500 000 euros. Comme la réforme alimente les caisses de l’OFII à hauteur de 700 000 euros, son amendement est absorbable pour l’Office tandis que le vôtre ne le serait pas.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement de M. Coronado. J’indique dès à présent qu’il sera favorable à l’adoption de l’amendement n° 673 de M. Grandguillaume, qui paraît plus adapté.
M. Sergio Coronado. Je retire mon amendement.
(L'amendement n° 458 est retiré.)
M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 673 qui, avant même d’avoir été présenté, a reçu un avis favorable de la commission et du Gouvernement.
Vous avez la parole, monsieur Grandguillaume.
M. Laurent Grandguillaume. Cet amendement vise à diminuer de 110 à 50 euros la part du droit de visa de régularisation qui est acquittée lors de la demande de titre de séjour et qui peut donc être considérée comme une entrave à cette demande.
L’amendement vise en outre à clarifier la rédaction des conditions d’application du droit de visa de régularisation, en précisant le droit applicable en cas de demande de renouvellement tardive, lorsque la sanction du refus de renouvellement de titre parait excessive : dans cette hypothèse, le tarif de 340 euros actuellement applicable paraît trop élevé, et un droit de 180 euros lui est substitué.
Il faut certes de la fermeté, mais dans le respect de la dignité. Il nous reste en la matière de longs et pénibles efforts à accomplir, et j’invite d’ailleurs mes collègues à assister, jeudi soir à 21 heures, à l’audition du ministre de l’intérieur ; de nombreuses propositions d’économies seront réalisées.
(L'amendement n° 673, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin, pour soutenir l'amendement n° 108.
M. Jacques Lamblin. Cet amendement demande la suppression de l’alinéa 10, qui relève, selon moi, d’un certain irénisme, pour ne pas dire d’un irénisme certain. Dans un monde de Bisounours, cet alinéa serait généreux, presque parfait. Mais j’ai l’avantage d’être cumulard, c'est-à-dire député-maire, ce qui me permet d’être confronté aux réalités du terrain. Voici donc un épisode survenu il y a quinze jours dans ma circonscription : en une journée, un propriétaire d’immeuble sans grands scrupules a loué onze appartements à onze familles roumaines.
Or il existe une dissymétrie entre les moyens de contrôle que nous pouvons mettre en œuvre et les procédés auxquels ont recours certaines personnes ; du côté des autorités, les contrôles sont longs et fastidieux, de l’autre, on sait « s’arranger ». Si le contrôle de baux et de contrats est difficile, celui des papiers l’est tout autant, exigeant de longues procédures, qui nécessitent parfois de repasser par les ambassades. Il est donc assez facile, pour quelqu’un qui souhaite s’installer dans notre pays et a besoin pour signer son contrat de location d’un statut de travailleur, de s’organiser pour produire des papiers et un contrat de travail.
Dans ces conditions, exonérer de taxe l’établissement des contrats de travail, c’est plutôt aider ceux qui ont parfois tendance à contourner les règles que les contrecarrer. Je souhaite donc la suppression de l’alinéa 10, dont je comprends les principes mais qui, dans la pratique, est particulièrement périlleux.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Monsieur Lamblin, en tant que député meurthe-et-mosellan, vous me faites de la peine, car il émane de votre amendement quelques relents nauséabonds.
La règle veut que la délivrance de ce type de titre donne lieu à la perception de la même taxe pour l’ensemble des ressortissants de l’Union européenne ; que je sache, la Roumanie et la Bulgarie en sont ! Une période transitoire avait été mise en place pour ces deux pays, à la suite de raisons qui m’échappent ; aujourd’hui, le traitement est le même pour tous, et je ne vois pas pourquoi les Roumains et les Bulgares subiraient un traitement discriminatoire.
Je n’en dirai pas plus. Je suis élu du même département que vous, et sans doute plus que vous confronté à ces questions, car ma circonscription est plus proche de la frontière. Nous avons un devoir d’égalité de traitement de l’ensemble des ressortissants européens. Mon avis est donc très défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le député, vous n’êtes pas le seul à avoir conscience des réalités du terrain. Vous êtes député-maire ; beaucoup d’autres l’ont été ou le demeurent, qui discutent avec vous. L’ayant moi-même été, je me garderais bien d’expliquer à mes interlocuteurs que je détiens une vérité à laquelle, n’étant pas dans ce cas, ils n’auraient aucune part.
Pour ce qui concerne le fond de votre intervention, la suppression de cette taxation était inscrite dans le traité d’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie, que la France a signé, puis ratifié sous le gouvernement Fillon. Cette taxe était appelée à disparaître au plus tard le 1er janvier 2014. Nous la supprimons au 1er janvier 2013, parce que nous estimons qu’on ne peut demander tout et son contraire.
Quant à l’exemple que vous citez d’un particulier qui louerait des biens à des ressortissants roumains, je ne vois pas en quoi la disposition dont il est question permettrait soit de l’éviter, soit de le favoriser. Il s’agit de deux sujets disjoints. De surcroît, vous semblez oublier le respect de la propriété privée, et je ne vois pas comment, même en tant que député-maire, vous pourriez empêcher un propriétaire de louer ainsi son bien.
Donc, avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Jacques Lamblin.
M. Jacques Lamblin. Je voudrais d’abord vous dire, monsieur Eckert, que parler de « relents nauséabonds » me semble totalement inapproprié. Je suis désolé, mais je vous mets au défi de trouver dans mon activité une preuve quelconque qui justifie vos propos.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Nous aussi, nous sommes désolés !
M. Jacques Lamblin. Je vous demande donc de les retirer.
M. Patrick Ollier. Ce serait bien qu’il le fasse !
M. Jacques Lamblin. Ensuite, ce que je conteste, ce n’est pas tant le principe qui consiste à accueillir des Roumains ou des Bulgares, mais la lourdeur et la lenteur des procédures que notre administration se doit de respecter. Nous ne sommes plus – Dieu merci ! – sous l’Occupation, et on ne peut évidemment pas perquisitionner les appartements.
Mais certains parmi les candidats à l’installation adoptent nos règles et notre mode de vie avec une certaine « souplesse », et nous n’avons pas le temps matériel d’effectuer les contrôles préalables nécessaires à leur installation sur notre territoire. Votre proposition va simplifier la vie de ces personnes, dont je qualifierai d’assez souple le comportement vis-à-vis des règles que nous avons, nous, l’habitude de respecter. C’est le sens de mon amendement, auquel on ne peut en aucun cas trouver de relents nauséabonds, expression que vous n’auriez pas dû employer, monsieur Eckert.
M. le président. La parole est à M. Thierry Mandon.
M. Thierry Mandon. Monsieur Lamblin, je ne sais si le terme nauséabond est approprié, mais vous prenez, dans votre exposé des motifs, des libertés avec des concepts que nous n’étions pas habitués à vous voir manier avec autant de légèreté.
C’est d’abord la préférence nationale, que vous revendiquez en écrivant qu’ « il convient de favoriser l’emploi des citoyens français ».
M. Marc Le Fur. Arrêtez de faire la leçon !
M. Thierry Mandon. Cela s’appelle bien la préférence nationale, concept auquel il ne m’avait pas semblé jusqu’à présent que l’UMP était attachée.
Vous établissez ensuite, en dépit de votre ton doucereux, une discrimination, puisque vous suggérez qu’ « exonérer les employeurs de taxe pour inciter à l’embauche de ressortissants européens, notamment originaires de Bulgarie et de Roumanie, est un non-sens ». Il s’agit là d’une discrimination caractérisée !
M. Jacques Lamblin. C’est vous qui la faites !
M. Thierry Mandon. À la réflexion, je me demande si les propos de M. Eckert n’étaient pas en deçà de la vérité.
(L'amendement n° 108 n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi par M. Christian Eckert de deux amendements rédactionnels, nos 186 et 188, auxquels le Gouvernement est favorable.
(Les amendements nos 186 et 188 sont successivement adoptés.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 729.
M. Christian Eckert, rapporteur général. En vertu de son article L. 111-2, le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile régit l’entrée et le séjour des étrangers en France métropolitaine, dans les départements d’outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. Il n’est donc pas utile de le répéter dans l’article L. 311-13 du même code modifié par le I du présent article.
En revanche, les dispositions relatives aux « taxes employeurs » concernant l’accès au travail des étrangers relèvent de la compétence transférée à Saint-Martin et Saint-Barthélemy. Par conséquent, il convient de préciser que le II n’est pas applicable dans ces deux collectivités.
(L'amendement n° 729, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 29, amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l'amendement n° 459, portant article additionnel après l’article 29.
M. Sergio Coronado. Une taxe de 30 euros est acquittée pour toute demande de validation d’une attestation d’accueil. Nous souhaitons sa suppression, car il ne nous paraît pas normal de taxer ainsi l’hospitalité.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.
(L'amendement n° 459 n'est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi par M. Christian Eckert d’un amendement rédactionnel, n° 570, auquel le Gouvernement est favorable.
(L'amendement n° 570 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 831.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement présente à cet article une série d’amendements qui ont été découpés par la séance mais n’en formaient qu’un à l’origine. Ces amendements, de nature technique, visent à préciser les modalités de fonctionnement du prélèvement institué au IV de l’article 30 du présent projet de loi. Il s’agit de supprimer toute ambiguïté dans la définition de ce prélèvement. L’ensemble de ces modifications est neutre sur le montant et les modalités d’affectation et de répartition.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert Avis favorable.
(L'amendement n° 831 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 584.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement est retiré, car son adoption aurait pour conséquence de faire tomber un amendement du Gouvernement, ce qui serait assez scandaleux. (Sourires.)
(L'amendement n° 584 est retiré.)
M. le président. Je suis saisi par M. Christian Eckert d’un amendement rédactionnel, n° 845, auquel le Gouvernement est favorable.
(L'amendement n° 845 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement n° 839.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. L’amendement n° 839, comme les amendements nos 841, 842, 843, 844 et 840, fait partie de la série d’amendements techniques que je viens de présenter. Ces amendements ne modifient ni le montant ni les modalités d’affectation du prélèvement, mais ils sont techniquement nécessaires pour que les choses se passent bien.
(L'amendement n° 839, accepté par la commission, est adopté.)
M. le président. Les amendements nos 841, 842, 843 ont été défendus par le Gouvernement.
(Les amendements nos 841, 842, 843, acceptés par la commission, sont successivement adoptés.)
M. le président. Je suis saisi par M. Christian Eckert, d’un amendement de précision, n° 591, auquel le Gouvernement est favorable.
(L'amendement n° 591 est adopté.)
M. le président. Les amendements nos 844 et 840 ont été défendus par le Gouvernement.
(Les amendements nos 844 et 840, acceptés par la commission, sont successivement adoptés.)
M. le président. Je suis saisi par M. Christian Eckert de trois amendements rédactionnels, nos 762, 594 et 596, auxquels le Gouvernement est favorable.
(Les amendements nos 762, 594 et 596 sont successivement adoptés.)
(L'article 30, amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 832 rectifié, portant article additionnel après l’article 30.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le présent amendement vise à confier à titre transitoire à l’AGRASC, l’agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, la gestion des sommes saisies dans le cadre d’affaires pénales en cours, et pour lesquelles l’identification de leur statut fait encore défaut.
Il s’agit d’éviter la neutralisation de sommes d’argent dont le service public de la justice a bien besoin, comme chacun sait. L’agence assurera la gestion de ces sommes, dans le cadre d’une comptabilité naturellement séparée des autres affaires, afin de ne pas méconnaître les droits éventuels de personnes qui se verraient restituer lesdites sommes.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas examiné cet amendement, mais les explications du ministre ont convaincu le rapporteur de son bien-fondé.
Avis favorable.
(L'amendement n° 832 rectifié est adopté.)
(L'article 31 est adopté.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements rédactionnels de M. Eckert.
(Les amendements nos 563, 435, 567, 433 et 561 rectifié, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)
(L'article 32, amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 778, qui fait l'objet de quatre sous-amendements du Gouvernement, nos 833, 834, 835 et 836.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement complexe concerne le compte d’affectation spéciale « Radars », dont les recettes sont particulièrement dynamiques. Il tend à prélever une petite partie des recettes de ce compte, à hauteur de 10 millions d’euros, pour abonder le fonds interministériel de prévention de la délinquance, le FIPD, et permettre à celui-ci de financer des projets de vidéoprotection déjà engagés. Il prévoit également de faire bénéficier les collectivités locales du dynamisme du produit des amendes radars et de police, en majorant de 20 millions d’euros la fraction qui leur est affectée.
J’ai cru comprendre que le Gouvernement serait susceptible de donner un avis favorable à cet amendement, au prix de l’adoption de sous-amendements qui ramèneraient à 10 millions d’euros la somme reversée aux collectivités locales.
M. le président. Monsieur le ministre, pouvez-vous donner votre avis sur l’amendement de la commission et défendre vos sous-amendements ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Les quatre sous-amendements du Gouvernement visent à satisfaire l’amendement de la commission des finances, ainsi que l’amendement n° 229 de M. Terrasse. Pour cela, ils procèdent à plusieurs ajustements, et non à une modification radicale, par rapport au projet initial du Gouvernement.
D’abord, afin de faire bénéficier les collectivités territoriales de la dynamique des amendes des radars automatiques, la part de ces amendes qui leur est réservée est majorée de 10 millions d’euros, ce qui se traduit, toutes choses égales par ailleurs, par une baisse à concurrence des recettes de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France.
Ensuite, afin d’abonder le fonds interministériel de prévention de la délinquance, qui finance notamment la vidéosurveillance, et de lui permettre de financer les projets déjà engagés dans des communes comme Cergy, Pontault-Combault, Les Mureaux, Asnières-sur-Seine, Angers, Dijon, Aubervilliers et d’autres, la fraction des amendes de police de la circulation qui lui est affectée est majorée de 10 millions d’euros, ce qui se traduit, toutes choses égales par ailleurs, par une baisse des recettes de l’État de 4,7 millions d’euros et des collectivités territoriales de 5,3 millions d’euros. Il est toutefois à noter que ces dépenses du FIPD bénéficient aux collectivités territoriales, puisque ce fonds vient précisément en aide aux collectivités qui décident souverainement de mettre en œuvre une vidéoprotection.
M. Marc Le Fur. Vous êtes plutôt favorables aux caméras, à présent !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Enfin, en vue d’assurer la couverture des frais de recouvrement des amendes de radars, qui progressent du fait de la hausse de ces mêmes amendes, le champ des dépenses imputables sur la première section « Contrôle automatisé » du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers » est élargi aux frais liés à l’activité de recouvrement de la trésorerie du contrôle automatisé.
Au total, le présent dispositif conduit, par rapport au projet initial du Gouvernement, à majorer les ressources affectées au FIPD de 10 millions d’euros, et aux collectivités territoriales de 5 millions d’euros, en les gageant par une diminution des ressources affectées à l’État de 5 millions d’euros et à l’AFITF de 10 millions d’euros.
Je suis certain que chacun aura parfaitement suivi cette mécanique budgétaire, bien connue des parlementaires.
M. le président. J’en conclus, monsieur le ministre, qu’à condition que ces sous-amendements nos 833 à 836 soient adoptés, vous donnerez un avis favorable à l’amendement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il va de soi, monsieur le président, que le Gouvernement donnerait un avis favorable à cet amendement si l’Assemblée décidait de se prononcer favorablement sur les sous-amendements que je viens de défendre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Malgré la complexité de ce dispositif qui met en jeu un compte d’affectation spéciale, je me réjouis des dispositions proposées et je me fais l’interprète de notre collègue Pascal Terrasse, à qui l’on doit l’idée de prélever 10 millions d’euros sur les amendes de police.
La commission donne un avis favorable aux sous-amendements du Gouvernement, en espérant que l’amendement de son rapporteur sera ainsi adopté.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire. Je dirai juste un mot pour soutenir l’amendement du rapporteur général tendant à porter à 20 millions d’euros les recettes affectées aux collectivités territoriales.
Il existe deux fonds distincts.
Le premier, le grand fonds des amendes forfaitaires et des amendes forfaitaires majorées, représente un peu plus d’un milliard d’euros – il collecte notamment les amendes de stationnement. Nous sommes arrivés l’an dernier à un accord d’une grande honnêteté avec l’État, puisque désormais 47% de ses recettes reviennent à l’État et 53% aux collectivités territoriales. Ce fonds, cependant, n’est pas très dynamique.
Le deuxième fonds est le CAS « Radars », et les radars, eux, rapportent toujours plus d’argent. Le fonds qui collecte ces amendes représente aujourd’hui 500 millions d’euros. On est parti de très bas, mais sa progression est de 10 % par an. Au moment de sa création, il était prévu que la totalité des fonds du CAS « Radars » aille à l’État. Par la suite, l’État a accepté d’en donner une partie aux collectivités locales. Les départements ont obtenu, non sans mal, de se voir reverser 30 millions d’euros. Ils ont fait valoir qu’il n’y avait aucune raison qu’ils ne bénéficient pas des recettes des radars, alors qu’ils en installent beaucoup sur les routes départementales. Les communes ont fait le même raisonnement : je rappelle que le périphérique, la voie qui compte le plus grand nombre de radars, est une voie communale.
M. Marc Le Fur. Un chemin vicinal ! (Sourires.)
M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Comme il s’agit du fonds le plus dynamique, la commission des finances a souhaité que l’on accorde 20 millions d’euros supplémentaires aux collectivités locales, faisant passer leur dotation de 160 à 180 millions d’euros. Le ministre nous propose, quant à lui, de limiter cette augmentation à 10 millions d’euros. Si nous pouvions nous accorder sur une augmentation de 15 millions d’euros, je pense que tout le monde serait content. (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier.
Mme Sandrine Mazetier. C’est en tant que rapporteure spéciale de la commission des finances sur ce délicieux compte d’affectation spéciale que je souhaite intervenir. (Sourires)
L’exposé du président de la commission des finances m’a aidée à mieux saisir le fonctionnement de ce compte, et je comprends le sens de la proposition qu’il vient de formuler. Pour autant, je pense que ni l’État, ni les collectivités locales, ne doivent s’habituer au dynamisme de ces ressources, car les radars, en définitive, sont faits avant tout pour que les automobilistes respectent les limitations de vitesse. On peut donc souhaiter, pour la sécurité de nos concitoyens, que les recettes liées aux radars atteignent un seuil, puis décroissent.
Sans vouloir rien retrancher à ce que vient de plaider le président de la commission, je veux seulement signaler qu’il ne faut pas trop parier, dans l’intérêt général, sur le dynamisme de ces ressources.
(Les sous-amendements nos 833, 834, 835 et 836 sont successivement adoptés.)
(L'amendement n° 778, sous-amendé, est adopté et l’article 33 est ainsi rédigé.)
(L’amendement n° 229 tombe.)
(L'article 34 est adopté.)
(L'article 35 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l'amendement n° 468.
M. Éric Alauzet. L’article 36 porte sur le financement des lignes d’équilibre du territoire, les trains Corail, qui rencontrent actuellement des difficultés financières. Pour y remédier, il est proposé de relever de 45 millions d’euros le plafond de la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires. Jusqu’ici, le financement de ces lignes était assuré à hauteur de 16 % par les contributions des sociétés autoroutières et de 84 % par celles des sociétés ferroviaires. Or il est prévu que seules les entreprises ferroviaires supporteront l’augmentation des coûts.
Cet amendement vise, à l’inverse, à faire porter ce surcroît de dépenses sur les sociétés autoroutières, dont vous savez qu’elles ont largement pénalisé les recettes de l’État français depuis qu’il existe des concessions privées.
Il ne vous aura pas échappé que cette disposition va dans le sens d’une éco-fiscalité émergente et de la lutte contre l’effet de serre.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Le problème soulevé est connu et concerne les subventions d’équilibre sur les trains Corail et Intercités. La question est de savoir qui, de la SNCF ou des sociétés autoroutières, doit supporter l’essentiel de cette contribution.
Un certain nombre de nos collègues avaient proposé de la faire peser entièrement sur les sociétés d’autoroutes ; il me semble, monsieur Alauzet, que vous proposez, quant à vous, de la faire peser pour moitié sur les sociétés d’autoroutes et pour moitié sur la SNCF. La commission, pas plus que le Gouvernement ne souhaite modifier le mode de répartition existant, compte tenu du fait qu’il pèse déjà sur les sociétés d’autoroutes un certain nombre d’autres contributions, qui sont elles-mêmes susceptibles de monter prochainement en puissance.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur le député, le Gouvernement est défavorable à votre amendement, même s’il partage votre objectif de veiller à un équilibre optimal du financement intermodal de la politique des transports.
Nous jugeons plus raisonnable, conformément à l’article que propose le Gouvernement, de demander aux entreprises ferroviaires davantage qu’aux usagers de véhicules particuliers de contribuer à ce financement. En effet, la mesure que vous proposez reviendrait, de fait, à une augmentation des péages autoroutiers. Nous souhaitons maintenir l’équilibre du financement tel qu’il existe, d’autant plus que les modalités proposées par le Gouvernement entraîneront un surcroît de recettes de l’ordre de 25 à 30 millions d’euros.
Le Gouvernement appelle au rejet de votre amendement dans un double objectif : conserver l’équilibre actuel du financement et le surcroît de recettes.
M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet.
M. Éric Alauzet. Monsieur le ministre, il me semble qu’il y a méprise lorsque vous parlez de maintenir l’équilibre existant, puisque l’équilibre actuel fait reposer 16 % de la contribution sur les sociétés autoroutières et 84 % sur les sociétés ferroviaires.
En augmentant de 45 millions la contribution générale, qui était jusqu’à présent de 210 millions d’euros, on détruit totalement l’équilibre existant, puisque cette augmentation ne sera supportée que par les sociétés ferroviaires ; les sociétés autoroutières, elles, seront totalement exonérées de leur part de contribution.
Il convient donc, au minimum, de respecter l’équilibre antérieur et de faire peser 16 % de cette contribution supplémentaire sur les sociétés autoroutières, sans quoi c’est l’usager ferroviaire qui paiera.
(L'amendement n° 468 n'est pas adopté.)
(L'article 36 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 837.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cet amendement s’instruit de certains incidents malheureux que notre assemblée a eus à connaître. Il vise à sécuriser, à compter du 1er janvier 2013, la cession de maisons forestières dont l’État n’a plus l’utilité mais qui sont situées dans une forêt domaniale. Actuellement, elles ne peuvent en être dissociées.
Il autorise en outre la cession de la partie correspondant à une zone artisanale d’une ancienne base de l’OTAN située sur la commune de Velaine-en-Haye, en Meurthe-et-Moselle, et remise en gestion à l’ONF en 1968.
Les recettes totales attendues en 2013 sur le compte « Gestion du patrimoine immobilier de l’État » du fait de cet amendement s’élèveraient à environ 30 millions d’euros.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission n’a pas examiné cet amendement, mais votre rapporteur général, élu de Meurthe-et-Moselle, en a beaucoup entendu parler.
Notre collègue Dominique Potier se réjouirait de l’adoption de cet amendement qui fait consensus au niveau local, car il entre dans le cadre d’un véritable projet. Les élus des collectivités territoriales, toutes tendances politiques confondues, souhaitaient que cette partie de la forêt domaniale de Haye située aux portes de Nancy puisse être distraite et cédée.
Comme l’a précisé M. le ministre, la procédure a été parfaitement respectée dans ce cas puisque ce type de cession doit faire l’objet d’une décision législative. Avis favorable.
(L'amendement n° 837 est adopté.)
(L'article 37 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 425.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement un peu compliqué est la conséquence d’amendements à venir au PLFSS. Compte tenu des discussions en cours, je vous propose de corriger oralement cet amendement afin de remplacer le taux de 0,58 % initialement prévu par le taux de 0,5 %.
Cet amendement est lié à une décision sur la question des emplois à domicile qui devrait être prise dans le cadre du PLFSS ; un amendement a d’ailleurs été adopté à ce sujet par la commission des affaires sociales. En conséquence, un transfert sera nécessaire du budget de l’État vers les comptes sociaux. Ce transfert devra être adapté en fonction du montant définitivement retenu.
Je suggère d’adopter cet amendement en prenant en compte la modification orale que je viens d’effectuer. Le transfert envisagé correspond à une somme de 260 millions d’euros, soit 0,5 % de la fraction de TVA affectée à la sécurité sociale ; tandis que le taux de 0,58 % prévu par la rédaction initiale représente une somme de 384 millions d’euros.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Ce sujet est délicat. Si l’on comprend parfaitement la légitimité de la proposition du rapporteur général, il se trouve que l’essentiel du dispositif en cause va être examiné dans le PLFSS. Ce dispositif est encore en cours de concertation et il n’est pas improbable que les propositions actuelles soient modifiées, du moins en partie.
Je suis donc très gêné pour donner un avis dans un sens ou un autre, car cet avis dépend en réalité du niveau d’exonération que fixera l’Assemblée nationale lors de l’examen de la loi de financement. En supprimant la possibilité du forfait, il s’agit d’imposer les employeurs au réel afin de préserver le droit des salariés œuvrant dans le cadre des emplois à domicile. Tant que ce dispositif n’est pas calé, anticiper sa compensation risque de nous amener soit à une surcompensation, soit à une compensation insuffisante. Il est naturellement possible que la compensation décidée soit judicieuse et se cale parfaitement avec ce que l’Assemblée déciderait en PLFSS, mais c’est peu probable.
À ce point de nos discussions, que je sais parfaitement sincères de part et d’autre, il me semblerait judicieux d’attendre de connaître le niveau qui sera fixé par le PLFSS. Nous pourrons ensuite caler le taux de compensation dans la loi de finances, probablement en commission mixte paritaire ou, à défaut, en deuxième lecture et à votre initiative, le tout sans risquer la surcompensation ou le manque de compensation, qui seraient tous deux regrettables.
Je me vois donc contraint de demander à la commission de retirer cet amendement, au moins temporairement, afin que l’Assemblée puisse légiférer en toute connaissance de cause, soit à partir d’un texte de commission mixte paritaire, soit à partir d’initiatives que vous prendriez en deuxième lecture.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Afin que l’Assemblée comprenne bien ce qu’il en est, il faut rappeler que certaines mesures ont un pied dans la loi de finances et un pied dans le PLFSS. En voilà un exemple.
Il s’agit d’instaurer une exonération de cotisations sociales pour les particuliers employeurs de salariés à domicile. Elle a été adoptée par la commission des affaires sociales, mais elle ne figure pas encore dans le PLFSS. Cet amendement porte sur le financement de cette dépense, afin d’en assurer l’affectation au bon budget.
Le dispositif que je propose se base sur une exonération de charges sociales à hauteur de 8 % pour les particuliers employeurs. Certaines réflexions en cours, auxquelles je participe, visent à proposer une mesure plus identifiée qui consisterait par exemple en une réduction d’un montant fixe, correspondant environ à 10 % des charges sociales affectées à un salaire horaire de type SMIC, soit un euro pour chaque heure utilisée. Après calcul, cela représente 260 millions d’euros. Les 0,58 % que je proposais représentent 384 millions. D’où la modification que je suggère.
Nous sommes confrontés à un serpent de mer : faut-il tirer immédiatement les conséquences dans la tuyauterie des articles d’une décision qui n’est pas encore effectivement prise dans le PLFSS ?
Si je retire mon amendement, monsieur le ministre, il ne faut pas qu’au moment de l’adoption de la mesure dans le PLFSS, vous nous opposiez le fait que les dispositions correspondantes n’ont pas été prises préalablement dans le PLF afin d’assurer le bon équilibre des deux budgets séparément. Mais ce n’est pas ce que j’ai cru comprendre de votre intervention.
Je suis prêt à retirer mon amendement si vous vous engagez à permettre la réalisation du bon équilibre, soit en CMP, soit en seconde lecture, si d’aventure nous étions suivis et que le PLFSS propose bien une réduction de charges sociales.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le procédé demeurera parfaitement loyal entre le Gouvernement et l’Assemblée. Puisque le fait générateur figure dans le PLFSS, les conséquences ne doivent pas en être adoptées avant même qu’il n’existe.
Je vous remercie donc, monsieur le rapporteur général, de bien vouloir retirer cet amendement, et je suis convaincu que nous nous mettrons d’accord dans le PLFSS sur le fait générateur lui-même. Puis nous en tirerons ensemble les conséquences dans le projet de loi de finances.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Au bénéfice de ces explications, je retire l’amendement.
(L'amendement n° 425 est retiré.)
M. Julien Aubert. Je tiens à vous féliciter de ce premier pas vers la TVA sociale !
M. Christian Eckert, rapporteur général. Cela n’a rien à voir !
M. Marc Le Fur. Si, vous remplacez une charge sociale par de la TVA.
M. le président. Les amendements nos 401, 403, 406 et 392, présentés par M. Eckert, sont rédactionnels.
(Les amendements nos 401, 403, 406 et 392, acceptés par le Gouvernement, sont successivement adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Julien Aubert, pour soutenir l'amendement n° 516.
M. Julien Aubert. Le projet de loi de finances supprime les exonérations de cotisations perçues sur le travail agricole permanent. Lorsqu’elles avaient été mises en place, une taxe « soda » sur les boissons sucrées et édulcorées avait été créée et affectée à leur financement. Le projet de loi revient sur ces exonérations mais garde la taxe pour l’affecter à d’autres usages.
La révision de ces mécanismes d’exonération aura un impact extrêmement défavorable sur l’emploi des travailleurs agricoles : le projet du Gouvernement aurait pour conséquence de mettre dans le rouge jusqu’à 71 % des exploitations arboricoles dans mon département. Il ne s’agit donc pas d’une proposition anodine, mais au contraire d’une mesure très lourde pour l’équilibre de ces exploitations.
Je vous propose donc un amendement de cohérence : puisque nous sommes hostiles à cette révision des exonérations, nous considérons qu’à défaut de les maintenir, il faut supprimer la taxe. Il semble particulièrement illogique de la conserver dès lors que les exonérations disparaissent. C’est ainsi que perdurent dans le budget de l’État des taxes qui, au départ, avaient été créées dans un objectif précis mais que l’on a oublié de supprimer. Ces omissions devraient disparaître.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Le problème est bien connu : lorsque vous déteniez la majorité, vous avez mis en place une taxe que vous avez décidé d’affecter à une opération dont la compatibilité avec les règles européennes est, c’est un euphémisme, loin d’être assurée.
Pour l’instant, nous attendons la décision définitive de Bruxelles. Ce que nous supprimons, c’est l’affectation de la taxe, mais il ne serait pas de bonne gestion de la supprimer. Je n’aurai pas la cruauté de vous rappeler l’ampleur des déficits que vous nous avez laissés !
La taxe, que vous avez tous votée, est conservée pour le moment mais son affectation ne peut se faire comme vous l’aviez imaginé. Appliquer cette aide comme vous l’aviez prévu, alors qu’il existe de fortes présomptions qu’elle soit annulée par Bruxelles, pourrait entraîner des remboursements considérables. Vous savez que, selon la législation européenne, les aides indûment versées doivent être intégralement remboursées. Cela conduirait les exploitations à des difficultés financières supplémentaires. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Avis défavorable, mais je crains qu’il n’y ait une confusion : il ne s’agit pas de supprimer la taxe que vous aviez votée. Il s’agit simplement d’en supprimer l’affectation pour une raison assez simple : cette affectation n’est jamais entrée en vigueur.
C’est l’une des deux taxes qui avaient été adoptées dans l’espoir de compenser des exonérations de cotisations dans le secteur agricole au profit des travailleurs saisonniers.
M. Marc Le Fur. Non, des travailleurs permanents.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est juste : au profit des travailleurs permanents. L’idée n’est pas à rejeter en soi, à ceci près que ce que le gouvernement et la majorité précédente avaient voulu faire n’a jamais été fait, et pour une raison simple : affecter cette taxe à cet effet est illégal au regard du droit communautaire. Cette taxe n’a donc jamais été affectée pour compenser l’exonération.
Le produit de la taxe est donc disponible, et nous décidons de l’affecter au fonds de financement de la CMU. C’est un choix politique que nous assumons, mais je récuse l’argumentation selon laquelle nous soustrairions du régime social agricole je ne sais quelle aide provenant de ces taxes pour une raison très simple, que je répète : l’affectation de cette taxe prévue par le précédent gouvernement et votée par sa majorité ne s’est jamais produite. Car ce gouvernement savait parfaitement qu’elle était contraire au droit communautaire, et c’est donc fort sagement, d’une certaine manière, qu’il a refusé que les agriculteurs qui auraient pu en bénéficier se retrouvent victimes d’une obligation de remboursement, comme certains le sont aujourd’hui.
Nous avons tous connaissance des plans de campagne : il s’agit de l’obligation, pour des organismes ou des exploitations, de rembourser les aides qui leur avaient été attribuées mais qui ont été déclarées illégales par la Communauté européenne. Les agriculteurs doivent maintenant rembourser ces aides alors même que les exploitations ont été transmises ou remembrées depuis leur attribution. Ainsi, ce sont les nouveaux propriétaires qui doivent rembourser des aides qu’ils n’ont en réalité jamais perçues !
Pour éviter de connaître à nouveau une telle situation, le précédent gouvernement s’est contenté d’un affichage, en créant une taxe destinée à compenser des exonérations qu’il n’a pas concrétisées puisque l’affectation de la taxe n’a jamais été mise en œuvre.
Nous affectons le produit de cette taxe que vous avez votée au fonds CMU. Je comprends que vous refusiez cette affectation, mais je conteste l’affirmation selon laquelle le produit de cette taxe serait soustrait, d’une manière ou d’une autre, au monde agricole.
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur général, ne nous perdons pas dans les détails !
M. Christian Eckert, rapporteur général. Ce n’est pas un détail !
M. Marc Le Fur. Si nous avions adopté cette règle l’an dernier, c’est parce que nous avions conscience de l’existence d’un problème de coût du travail pour les travailleurs agricoles,…
M. Christian Eckert, rapporteur général. Vous avez conscience de beaucoup de choses !
M. Marc Le Fur. …qu’ils soient saisonniers, comme nous l’avons évoqué, ou permanents, comme nous en avions débattu l’an dernier. Il fallait donc réduire les charges pesant sur le travail agricole afin d’éviter des concurrences excessives. Ces concurrences proviennent, en particulier, de nos voisins et amis européens, notamment allemands.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Et espagnols.
M. Marc Le Fur. Les Allemands sont devenus les premiers producteurs de fraises en Europe.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Et d’asperges !
M. Marc Le Fur. Ils nous dament le pion dans ce domaine comme dans d’autres : il fallait donc réagir !
Pour réagir, nous avons décidé de baisser les charges. Je souhaite savoir quelles sont les intentions du Gouvernement au sujet de cette baisse. Afin de financer cette opération, nous avions imaginé deux recettes concomitantes. La première était la taxe soda, que nous évoquons à l’instant et qui avait été conçue par notre collègue Bernard Reynès. Les deux décisions étaient concomitantes de façon à garantir la neutralité budgétaire. Nous avions également imaginé – vous vous le rappelez, monsieur le ministre, vous étiez président de la commission des finances à l’époque – une mesure pesant sur ce que l’on appelle « le rouge » dans les campagnes, c’est-à-dire le fioul agricole : nous avions relevé le prix du fioul agricole pour financer la baisse des charges sur les emplois permanents.
Notre dispositif avait une vraie cohérence. Il poursuivait un objectif : la baisse du coût du travail, dont vous niez bien souvent la réalité. Il comportait une dépense – la baisse des charges – ainsi que deux recettes.
Notre souci est clair. Nous ne nions pas les difficultés européennes qui peuvent exister, mais vous voulons connaître la position du Gouvernement. Celui-ci ne doit pas nous balader entre le PLF et le PLFSS, mais nous dire dès maintenant – parce qu’il y a des inquiétudes dans nos campagnes, en particulier dans les exploitations recourant à des emplois agricoles – quelle est la volonté gouvernementale quant à la dépense, c’est-à-dire à la baisse des charges, et quant aux modalités de la recette.
M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert. Je ne reviendrai pas sur une partie de l’argumentation qui m’a semblé un peu spécieuse. Même si les recettes n’ont pas encore été affectées à l’exonération des charges, vous ne pouvez pas dire que la suppression de cette ressource n’enlève rien au monde agricole, puisqu’il s’agit de la principale source de financement du mécanisme d’exonération. Comme vous revenez concomitamment sur ce mécanisme,…
M. Jean Glavany. Mais il n’est pas question de le supprimer puisqu’il n’existe pas !
M. Julien Aubert. …cela ne se traduit pas mathématiquement par une hausse des revenus et des ressources pour le monde agricole !
Je tiens à appuyer les propos de Marc Le Fur. Cet amendement concerne un sujet extrêmement sérieux sur lequel les intentions du Gouvernement sont très floues. La concentration de la révision de cette exonération sur un certain type de productions arboricoles – le maraîchage, la viticulture – pose un vrai problème : les études d’impact réalisées par les professionnels de ces secteurs montrent que le passage du dispositif d’exonération de 3 à 1,5 fois le SMIC produirait des effets catastrophiques sur ces exploitations.
Il est assez logique d’interroger le Gouvernement sur ce sujet dès cette étape de l’examen du PLF, et de maintenir la cohérence. Si l’on s’aperçoit que le Gouvernement veut revenir en arrière sur l’ampleur de l’exonération, alors il faudra attribuer concomitamment des ressources, et donc conserver peut-être en partie le produit de cette taxe. Il s’agit d’un vrai sujet d’équilibre qui nécessite une clarification, parce que de nombreuses professions sont aujourd’hui suspendues à la décision du Gouvernement et du Parlement ; elles attendent un signal clair car la survie de leurs exploitations est en jeu.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Les parlementaires demandent des explications : il est bien normal que le Gouvernement les leur donne !
Deux cas de figure doivent être distingués : les emplois saisonniers et les emplois permanents. Merci, monsieur Le Fur, d’avoir centré votre question sur les emplois permanents, qui sont naturellement concernés.
Le gouvernement et la majorité précédents – monsieur Aubert, vous n’apparteniez pas à cette majorité parlementaire, mais M. Le Fur s’en souvient bien – avaient fait un constat sur lequel nous pouvons tomber d’accord : le coût du travail dans l’industrie agroalimentaire est incontestablement plus élevé en France qu’en Allemagne. M. Le Fur a parlé de la culture de la fraise : on pourrait aussi évoquer la culture de l’asperge, pour laquelle l’Allemagne était auparavant très loin d’être compétitive alors qu’elle est devenue aujourd’hui la plus compétitive en Europe. C’est parce que le problème existe à n’en pas douter et que le constat fait l’objet d’un consensus que l’économie générale du dispositif avait été adoptée de manière assez unanime en commission des finances. Là encore, Marc Le Fur s’en souvient bien.
Quelle était cette économie ? Elle consistait d’abord en une baisse du coût du travail, pour les emplois permanents, d’un euro par heure travaillée au niveau du SMIC. D’ailleurs, à l’époque, nous avions été nombreux – vous-même, monsieur Le Fur, mais moi aussi je crois – à signaler que ce n’était pas en baissant le coût du travail d’un euro par heure travaillée au niveau du SMIC qu’on rendrait la France plus compétitive que l’Allemagne ; mais nous avions pris un chemin sur lequel nous pouvions marcher ensemble. Pour financer cette baisse du coût du travail dans les entreprises agricoles, il a donc été décidé d’instaurer les taxes qui sont l’objet de l’article que le Gouvernement propose au Parlement.
Monsieur Aubert, je me permets de reprendre la parole car je crains soit une méconnaissance du dispositif, soit une interprétation un peu trop favorable par rapport à ce qui fut fait. En effet, quand on regarde dans le détail le sort réservé à ces deux mesures – la baisse du coût du travail d’un euro par heure travaillée au niveau du SMIC et l’affectation d’une taxe pour compenser cette perte de recettes –, on s’aperçoit qu’aucune des deux n’est jamais entrée en vigueur. L’exonération que vous appelez de vos vœux et que vos amis avaient votée l’année dernière n’a pas été mise en œuvre. Et l’affectation de la taxe pour compenser cette perte de recettes a été d’autant moins mise en œuvre que, d’une part, elle était illégale, et d’autre part, il n’y avait rien à compenser puisque vos amis n’ont pas tenu la promesse que le Parlement avait votée, c’est-à-dire la baisse du coût du travail d’un euro par heure travaillée au niveau du SMIC.
Monsieur Aubert, j’ai bien entendu votre discours sur les exploitations en péril. À ceux qui pourraient s’inquiéter de leur sort, vous pourriez peut-être signaler, par honnêteté intellectuelle, que le gouvernement précédent et la majorité alors composée de vos amis avaient tenté de faire quelque chose en faisant adopter des dispositions par le Parlement, mais que celles-ci n’ont jamais été mises en œuvre par ceux-là mêmes qui les préconisaient, parce qu’ils savaient qu’elles étaient illégales.
M. Marc Le Fur et M. Julien Aubert. Alors, que fait-on maintenant ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. On ne donne pas de leçons au Gouvernement !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Quand on a agi de la sorte, monsieur Aubert, on ne se permet pas de donner des leçons !
M. Julien Aubert. Donc, on ne fait rien ?
(L’amendement n° 516 n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 109, 132 et 558.
La parole est à M. Jacques Lamblin, pour soutenir l’amendement n° 109.
M. Jacques Lamblin. Finalement, monsieur le ministre, vous gardez la taxe…
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Oui.
M. Jacques Lamblin. …sans nous dire si vous avez l’intention de maintenir l’exonération que nous avions prévu de mettre en place. Il est vrai qu’elle ne l’est pas encore, mais vous savez aussi bien que moi que quelques mois sont parfois nécessaires pour que des décrets d’application soient mis en œuvre. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – M. le ministre et M. le rapporteur général font mine de s’étouffer.)
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Aucun décret n’était nécessaire : la loi était suffisamment explicite.
M. Jacques Lamblin. Monsieur le ministre, ne faites pas une mimique qui altère la noblesse de votre profil romain !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Fait personnel ! (Sourires.)
M. Jacques Lamblin. Puisqu’on m’a dit que j’étais doucereux, j’essaie de vous convaincre d’une façon différente !
Il me semble que vous maintiendrez la recette, mais que vous avez la ferme intention de ne pas maintenir l’exonération, au motif qu’elle ne serait pas légale. La preuve : vous n’avez pas répondu quant à vos intentions. En tout cas, si vous aviez cette intention à mes yeux impensable, ce serait une grave erreur, parce que M. Aubert serait obligé, et ce serait dommage, de retirer les compliments qu’il vous a adressés tout à l’heure. Si vous créez des taxes et supprimez des exonérations, vous inventez l’anti-TVA sociale, alors qu’il vous félicitait de vous voir y venir.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Gardez-les, vos compliments !
M. Jacques Lamblin. À défaut de cette aide en direction de l’agriculture, je voudrais vous suggérer, en deuxième partie du PLF, une autre piste pour essayer de donner une compensation à nos concitoyens agriculteurs. Renoncez à leur porter un autre coup en supprimant le crédit d’impôt pour les remplacements de vacances. Car la possibilité pour les agriculteurs de prendre des vacances constitue une avancée sociale considérable et un bel atout quant à l’attractivité de leur profession. Et vous savez qu’ils butent souvent sur la difficulté de trouver des successeurs.
M. le président. La parole est à M. Aubert, pour soutenir l’amendement n° 132.
M. Julien Aubert. Monsieur le ministre, je suis désolé de vous avoir fâché en vous portant la contradiction. Je comprends vos propos sur la légalité et le contexte européen. Mais si la taxe est illégale, comme l’a affirmé M. le rapporteur, pourquoi la maintenir ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est l’affectation qui est illégale !
M. Julien Aubert. Honnêtement, nos agriculteurs se soucient assez peu de la légalité. Ce qu’ils voient, c’est qu’ils ont un problème de charges. On ne peut pas leur dire : « Circulez, il n’y a rien à voir ; impossible de vous aider parce que nous avons adopté une disposition illégale ! » Quand bien même vous auriez raison sur le fond, vous ne régleriez pas pour autant le problème de l’agriculture française. On ne résoudra pas le problème de compétitivité de notre économie si l’on supprime régulièrement les exonérations et que l’on garde les taxes qui avaient été concomitamment votées pour les financer.
M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est faux : nous ne supprimons pas l’exonération. Vous racontez n’importe quoi ! La majorité précédente avait voté une disposition bancale en sachant qu’elle n’était pas applicable.
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 558.
M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, votre propos est, une fois de plus, talentueux. Vous affirmez une vérité que nous partageons et qui fut parfois niée par vos collègues socialistes : au moins dans le domaine de l’agroalimentaire, nous connaissons un vrai problème de coût du travail.
M. Jean Glavany. Pas dans tous les secteurs !
M. Marc Le Fur. Si : dans le domaine de l’agroalimentaire c’est un constat ! Monsieur Glavany, vous fûtes ministre de l’agriculture. Vous n’étiez peut-être pas un très bon ministre, mais vous devriez tout de même savoir cela… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Guillaume Bachelay. C’est très bas !
M. Jean Glavany. Vous n’êtes peut-être pas un très bon député non plus !
M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, vous admettez qu’il existe un problème de coût du travail. Alors, que fait-on ? Pour les emplois saisonniers, nous sommes d’accord : il n’y a pas sujet à controverse, et vous nous le confirmerez. Mais pour les emplois permanents, maintenez-vous la baisse ? Il faut nous le dire très clairement !
Deuxièmement, comme le dirait mieux que moi le président de la commission des finances, la recette n’était pas affectée : elle avait été suggérée à l’époque comme mesure compensatoire afin de trouver l’équilibre.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. La première taxe, pas la deuxième !
M. Marc Le Fur. Que devient cette recette sur les sodas et à quoi la destinez-vous ? Vous voulez l’affecter à des dispositifs de nature sociale. Mais disposerez-vous malgré tout des moyens suffisants pour financer les mesures relatives au travail agricole que nous souhaitons ?
Il reste une autre question à laquelle vous n’avez pas répondu. Je conviens qu’elle ne concerne pas tout à fait notre débat, mais sûrement la cohérence de votre politique. Il existait une autre recette, touchant au fioul rouge, ou fioul agricole, destinée à payer la dépense supplémentaire résultant de la baisse des charges sur les emplois permanents de l’agriculture. Rappelez-vous nos débats de l’an dernier : nous en avions moins parlé, mais elle était quand même aussi importante. Que devient ce supplément sur le fioul rouge ? S’il perd son utilité, j’espère qu’il disparaîtra. Cette question semble mettre le ministre et ses conseillers dans l’embarras…
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Je ne l’ai plus en tête, c’est vrai.
M. Jacques Lamblin. C’est donc une bonne question !
M. Marc Le Fur. J’aimerais obtenir des réponses à ces interrogations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Nous vivons vraiment dans un monde virtuel ! Vous nous avez accusés de supprimer, dans la loi de finances rectificative, une TVA que vous aviez instaurée et que vous n’aviez pas encore mise en recouvrement.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est vrai !
M. Christian Eckert, rapporteur général. Vous nous accusez maintenant de supprimer une aide que vous aviez soi-disant instaurée, mais dont vous saviez vous-même qu’elle n’était guère applicable.
Je vais donner la preuve de ce que j’avance. L’article 114 de la loi de finances initiale pour 2012, issu d’un amendement déposé par nombre de vos collègues, dispose que les allégements de charges dits Reynès ne s’appliqueront que « lorsque la Commission européenne aura confirmé que cette mesure est compatible avec l’article 170.1 du traité ».
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Ce qu’elle n’est pas.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Voilà qui montre bien que vous aviez un doute, mes chers collègues.
Nous ne supprimons rien, monsieur Aubert.
M. Jacques Lamblin. Vous gardez les sous !
M. Patrick Ollier. Nous avons un souci de vérité !
M. Christian Eckert, rapporteur général. Vous pouvez le répéter sur tous les tons, mais nous ne supprimons rien car il n’y avait pas d’allégements en vigueur. Vous auriez souhaité le faire mais, en tout état de cause, ce n’était pas compatible avec le traité..
Avis défavorable donc sur ces trois amendements, qui ont la même finalité.
M. Jacques Lamblin. Dommage !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Le Fur, pour le fioul rouge, ne m’en veuillez pas si je n’ai pas de réponse à vous donner à l’instant, je vous la donnerai ultérieurement. Et, en tout état de cause, ce n’est pas l’objet de l’article.
M. Jacques Lamblin. Soit.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Quant au reste, je précise que l’article voté à l’époque par la précédente majorité prévoyait cette clause de conformité. L’examen juridique du dispositif semait déjà le plus grand doute quant à l’effectivité des dispositions votées par la majorité parlementaire. On peut même penser que dans l’appareil d’État, naturellement pas au Parlement, où chacun des députés l’avait fait en conscience, certains savaient parfaitement que ce qu’ils demandaient au Parlement de voter ne rencontrerait pas d’application effective.
J’en avais du reste fait le reproche à Bruno Le Maire lors d’une séance de questions au Gouvernement. Si nous en discutons ensemble de façon posée, calme et objective, il en conviendra aisément.
Nous ne supprimons rien. Ni la baisse des charges parce qu’elle n’est jamais intervenue. Ni la compensation, car elle n’a jamais eu à entrer en vigueur.
En revanche, je veux bien vous en donner acte, nous gardons la recette des deux taxes que vous aviez votées.
M. Julien Aubert. Et voilà !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Et nous décidons – c’est un choix politique que le Gouvernement assume parfaitement, et que, je l’espère, sa majorité assumera avec lui – d’affecter le produit de cette taxe au fonds CMU, parce que ce fonds en a besoin pour des raisons d’équilibre financier. Vous pouvez contester l’affectation de cette taxe au fonds CMU, mais tel est le choix du Gouvernement et, je l’espère, de la majorité. Vous pouvez contester le fait que l’on maintienne des taxes que vous avez votées, car vous estimeriez inutile d’abonder le fonds CMU. Vous en auriez parfaitement le droit, la critique ne serait ni médiocre, ni illégitime, mais le Gouvernement et sa majorité ont le droit de les maintenir.
En revanche, monsieur Aubert, il s’agit moins de votre part d’une contradiction que, peut-être, d’une tentative polémique…
M. Julien Aubert. Pas du tout !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. …sur laquelle je ne vous suivrai pas. Il ne s’agit évidemment pas pour le Gouvernement de supprimer une exonération – car elle n’existe pas –, ni de supprimer une compensation, qui n’a pas à entrer en jeu, car l’exonération n’a jamais été appliquée. J’ai tendance à penser qu’à l’époque déjà, celles et ceux qui ont proposé à leur majorité de voter ces dispositions savaient parfaitement qu’il s’agissait d’une grande hypocrisie…
M. Julien Aubert. Et cela, ce n’est pas de la polémique ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. …et que rien de tout cela n’entrerait en vigueur. Après tout, à chacun de juger.
Avis défavorable, donc, à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur. Nos échanges m’inspirent trois remarques, monsieur le ministre.
Première remarque : cette recette qui avait pour finalité de compenser une dépense agricole, vous l’utilisez pour tout autre chose.
M. Jacques Lamblin. Voilà !
M. Jean Glavany. C’est la règle budgétaire des affectations.
M. Marc Le Fur. De l’argent destiné à l’agriculture ne va plus à l’agriculture : nous en prenons acte.
Deuxième remarque : vous dites que nous avons un problème européen – tel un mistigri –, mais personne ne l’explicite. Je veux bien l’entendre, mais qu’on nous éclaire.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Cela a été fait !
M. Marc Le Fur. Pas plus en commission que dans l’hémicycle nous n’avons eu d’explications. De même, nous n’avons pas eu communication de documents particuliers. Nous ne demandons qu’à savoir. Nous sommes des parlementaires et nous disposons évidemment de moins d’informations que le Gouvernement, ce qui est dans l’ordre des choses. Mais nous souhaiterions que le Gouvernement nous donne la raison du refus de Bruxelles et que, dans le même temps, il nous fasse savoir s’il se bat pour passer outre à ce refus. L’Europe, c’est cela, c’est défendre nos intérêts.
M. Jean Glavany. Modifiez la PAC !
M. Marc Le Fur. Troisième remarque : vous dites très justement, monsieur le ministre, qu’il y a un problème de charges excessives dans le secteur agricole, un coût du travail excessif dans le domaine agricole et agroalimentaire. Oui ou non, maintenez-vous cette baisse des charges sur l’emploi permanent en agriculture ?
M. Jacques Lamblin. Puisque vous avez l’argent.
M. Julien Aubert. Touchez pas au grisbi !
M. le président. La parole est à M. Christian Jacob.
M. Christian Jacob. Nous avons bien compris que vous mainteniez la recette, mais notre interrogation porte sur son affectation.
Dans sa réponse, le rapporteur général n’a fait que répéter à plusieurs reprises : c’est illégal. Monsieur le rapporteur général, sur quels éléments juridiques vous fondez-vous ? Pouvez-vous citer un texte de la Commission qui dise très clairement que cette affectation est illégale ? Pour ma part, je ne dispose pas d’un tel texte, et, en tout état de cause, il n’est pas public.
À la question précise de l’affectation, nous n’avons aucune réponse. Vous dites que c’est illégal. Soit vous l’avez décidé, soit c’est une interprétation.
M. Jean-Frédéric Poisson. Ça les arrange.
M. Christian Jacob. Quoi qu’il en soit, nous aimerions une explication.
M. le président. La parole est à M. Gérard Bapt.
M. Gérard Bapt. J’ai, monsieur Le Fur, un très bon souvenir de la discussion qui s’était engagée au sein de la commission des finances au cours de la dernière législature.
Rétablissons la chronologie des faits. Nous avons débattu de cela à propos d’une taxe sur le sucre, présentée comme une mesure de salut public.
M. Dominique Baert. Absolument !
M. Gérard Bapt. La majorité de l’époque a soulevé un problème réel, M. le ministre vient d’en convenir, un problème de charges sociales sur les salariés agricoles. Pour ma part, élu d’un département du sud, je sais de quoi je parle par rapport à nos concurrents espagnols. En cours de discussion, vous aviez soulevé ce problème et, parce qu’il manquait des recettes pour arriver à l’objectif de baisse d’un euro, vous avez ajouté, en parallèle à la taxe sur le sucre, une taxe sur les édulcorants. Pour le Gouvernement de l’époque, il s’agissait d’une recette destinée à une mesure de santé publique.
M. Christian Jacob. C’était la vision de Bercy, pas de l’agriculture !
M. Gérard Bapt. M. le ministre vient en effet de dire que cette disposition était contraire aux directives européennes et que la logique voudrait qu’elle bénéficie à une mesure de santé publique, en faveur du financement du fonds CMU, pour aider ceux qui ne peuvent pas accéder aux soins en raison de problèmes financiers.
M. le président. Nous allons passer au vote.
M. Christian Jacob. Nous n’avons pas eu de réponse.
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Nous répondrons à l’occasion du prochain amendement.
(Les amendements identiques nos 109, 132 et 558 ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 110, 144, 245 et 559 rectifié.
La parole est à M. Jacques Lamblin, pour soutenir l’amendement n° 110.
M. Jacques Lamblin. Il est défendu.
M. Julien Aubert. De même que l’amendement n° 144.
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 245.
M. Hervé Mariton. Je reprends le cours du débat, ayant dû m’absenter quelques instants.
Le Gouvernement peut-il nous dire ce qu’il a l’intention de faire pour la compétitivité des agriculteurs ? (Rires sur les bancs du groupe SRC.)
M. Pierre-Alain Muet. Nous venons d’en discuter !
M. Hervé Mariton. Je ne pense pas qu’il y ait matière à rigoler. Je suis effondré qu’un tel sujet vous fasse rire.
M. Jean Glavany. C’est une liberté fondamentale !
M. Hervé Mariton. Vous avez le droit de rire, mais je ne pense pas que l’on puisse rire de la situation des agriculteurs.
À supposer que le Gouvernement développe des arguments fondés, je n’ai pas compris comment il entendait répondre aux problèmes des agriculteurs. Faisons l’hypothèse de votre bonne foi et de la qualité de votre argumentation, imaginons que le dispositif antérieur ait eu quelques fragilités ; mais vous, que proposez-vous ?
Le problème des charges sociales des agriculteurs est un vrai problème. On voit bien que notre agriculture a perdu des parts de marché importantes au moment où d’autres agricultures en Europe ont connu une évolution plus favorable. Ce problème des charges sociales demeure. Quelles sont les intentions du Gouvernement à cet égard ?
Il ne peut pas s’abriter derrière une argumentation uniquement juridique, même si on peut l’entendre. Il doit aussi nous dire quelles sont les actions de fond qu’il a l’intention de mener au profit des agriculteurs.
Telle est ma question. L’amendement vaut pour ce qu’il est, mais il est surtout destiné à obtenir une réponse du Gouvernement. Les agriculteurs peuvent entendre des arguments juridiques, mais ils ne peuvent pas concevoir qu’il n’y ait pas de réponse au problème de compétitivité et de charges sociales qui est le leur.
M. Jean-Frédéric Poisson. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 559 rectifié.
M. Marc Le Fur. Le débat paraît assez pointu, monsieur le ministre. Mais il ne l’est pas car, à un niveau très limité, nous posons la question de la TVA pour la compétitivité.
Nous évoquons la question d’une baisse des charges financée par un impôt indirect. C’est la seule façon, nous semble-t-il, de nous en sortir. Et j’ai l’impression que vous semblez y revenir. On attend le rapport de M. Gallois dont on a déjà un avant-goût dans la presse.
Pour ce qui concerne l’agroalimentaire et alors que vous admettez qu’il existe un problème de coût du travail dans ce secteur, qu’entendez-vous faire pour l’atténuer face à la concurrence intra-européenne et quel financement prévoyez-vous ?
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les quatre amendements identiques ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission est défavorable à ces amendements, car ce sont toujours les mêmes débats.
À l’intention de M. Jacob, qui m’interpellait à ce sujet, je répète qu’il s’agit de l’article 107, alinéa 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Je le tiens à votre disposition, monsieur Jacob.
M. Christian Jacob. C’est un cadre général, ce n’est pas une réponse précise.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Vous pourrez le lire et le relire à loisir. En tout cas, c’est le renseignement que vous avez demandé.
Avis défavorable à ces amendements.
M. Marc Le Fur. Y a-t-il une date ?
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Ce sont les aides sectorielles qui sont visées et le gouvernement précédent que vous avez soutenu, monsieur Jacob, en avait tellement conscience que, dans le texte qui vous a été lu tout à l’heure, il est bien explicité que le dispositif imaginé par le dernier gouvernement Fillon ne pouvait être appliqué qu’à la condition qu’il soit conforme à cet article du traité. Ceux qui ont pris cette précaution savaient parfaitement qu’ils condamnaient le dispositif, voté par ailleurs par une majorité à laquelle vous apparteniez.
Il n’y a pas de suppression d’exonérations car ces exonérations ne sont jamais intervenues.
M. Marc Le Fur. Donc il n’y a pas d’amélioration ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il n’y avait pas d’exonérations avant l’examen de ce projet de loi de finances initiale et il n’y en aura pas après. Vous pouvez peut-être nous le reprocher, mais vous ne pouvez pas, me semble-t-il, à moins de vouloir polémiquer, nous reprocher de supprimer des exonérations qui, de fait, n’étaient pas intervenues.
Pour la baisse des charges, il n’y a donc pas lieu de maintenir ce qui n’existait pas. Quant au problème européen, il existait lorsque le texte a été voté par la précédente majorité. Il demeure sous l’actuelle majorité les mêmes obstacles de nature juridique relatifs aux aides sectorielles. Je me suis permis de rappeler ce qu’a été le sort final des exploitations agricoles et de leurs propriétaires qui avaient dû rembourser ce que l’on appelle des plans de campagne, c’est-à-dire des aides à la filière du verger ou du légume, M. Censi s’en souvient, cela a mis les exploitations et leurs propriétaires dans des conditions extraordinairement difficiles. Nous tentons de régler ces problèmes aujourd’hui.
Quant à la vision des choses, monsieur Jacob, je rappelle que Mme Pécresse avait défendu cette taxe avec une motivation de santé publique. Je vous ai entendu la contester au motif que c’était la vision de Bercy et non de l’agriculture. Mais Mme Pécresse parlait au nom de tout le Gouvernement ; du moins lorsqu’elle a défendu cette taxe avec des arguments de santé publique, elle n’a pas précisé qu’elle la défendait à titre personnel. Elle a bien précisé qu’elle s’exprimait au nom du Gouvernement. J’en ai le souvenir très précis car il y a eu contestation sur la finalité réelle de cette taxe.
Quant au problème plus général de la compétitivité – c’est un des reproches que vous faites au projet de loi de finances –, ce texte n’a pas pour finalité de régler cette question. Je confesse qu’en quatre ou cinq mois nous n’avons pas fait mieux que nos prédécesseurs en dix ans. Vous pouvez nous le reprocher mais nous vous rappellerons alors ce que fut votre inaction pendant tant d’années. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Pierre-Alain Muet. Très bien !
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Nous avons l’intention – une réunion s’est tenue à Matignon il y a quelques heures pour y réfléchir – de faire des propositions substantielles et nécessaires en termes de compétitivité.
Cette réforme de la compétitivité ne se fera pas à l’occasion de ce projet de loi de finances initiale. Vous pouvez nous le reprocher mais il relève du libre choix du Gouvernement de décider à quel moment et avec quel véhicule législatif une réforme de ce type peut être soumise au Parlement. Nous avons accordé la priorité au redressement des finances publiques, dont on sait l’état après dix ans d’une politique qui reposait, je l’ai déjà dit, sur une équation impossible puisqu’elle a consisté à diminuer les recettes et à augmenter les dépenses publiques, vous obligeant à recourir à l’échappatoire de l’endettement.
Nous voulons mettre un terme à cette politique-là et tentons d’équilibrer les finances de la France, ce qui nécessitera plusieurs exercices, je le rappellerai chaque fois que cela s’imposera. Nous commençons avec ce projet de loi de finances. Le projet de loi portant réforme de la compétitivité interviendra, je le crois, ultérieurement.
Cela dit, monsieur Le Fur, qu’il s’agisse du domaine agricole ou d’autres secteurs, vous avez raison de vous inquiéter, car c’est durant ces dix dernières années que la France est passée du premier au troisième rang européen pour l’exportation des denrées agro-alimentaires. L’Allemagne nous a devancés, ce qui est malheureusement devenu une habitude, mais les Pays-Bas aussi, fait nouveau depuis dix ans.
M. Jacques Lamblin. Juste après les 35 heures, il n’y a pas de hasard !
M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert. Monsieur le ministre, vous expliquez que tout ceci n’a pas de portée puisque l’exonération n’a jamais été mise en œuvre. Dois-je vous rappeler que vous n’avez pas hésité à intégrer dans le chiffrage de vos mesures fiscales la suppression des hausses de TVA voulues par le précédent gouvernement, alors même qu’elles n’étaient pas entrées en vigueur ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. C’est faux !
M. Julien Aubert. Ce qui était vertu il y a six mois serait-il donc devenu vice aujourd’hui ?
Par ailleurs, citer un article de traité européen pour condamner cette exonération revient à ne pas appliquer la présomption d’innocence à ce pauvre mécanisme qui n’a jamais rien demandé. Vous n’avez ni avis juridique, ni décision de la Cour de justice de l’Union européenne, ni lettre de la Commission. Les données sont exactement les mêmes qu’il y a un an.
Que vous vouliez changer le système, c’est votre droit en tant que majorité, mais ne venez pas enfumer l’honnête député…
M. Christian Eckert, rapporteur général. Arrêtez un peu !
M. Julien Aubert. …en expliquant que votre décision a des fondements juridiques. C’est faux !
Vous avez insisté sur le fait que cette mesure était illégale mais, à cet instant précis, vous ne disposez d’aucun élément vous permettant de le prouver. En réalité, vous la supprimez préventivement en nous expliquant que cela n’aura pas d’impact. Moi, tout ce que je vois après ces grands mouvements de rhétorique, c’est qu’il nous reste une taxe qui devra être acquittée.
Dans les faits, vous augmentez les impôts. La compétitivité de l’agriculture n’est manifestement pas à l’ordre du jour, et nous le regrettons car, comme le dit M. Mariton, ce n’est pas un sujet sur lequel on peut rire.
Il nous reste à la fin une mesure de pur rendement financier qui n’a d’autre but que de faire rentrer l’argent dans les caisses. Fort bien. Touchez pas au grisbi !
M. Pierre-Alain Muet. Avec le déficit extérieur de 75 milliards d’euros que vous nous avez laissé, vous êtes mal placés pour faire de telles remarques !
M. Christian Eckert, rapporteur général. Pensez-vous à tous ces contentieux que nous avons, certains atteignent 8 milliards d’euros !
M. le président. La parole est à M. Christian Jacob.
M. Christian Jacob. Monsieur le ministre, nous avons été heureux de vous entendre reconnaître qu’il y avait un problème de compétitivité, ce que votre camp, à commencer par le Président de la République, avait contesté tout au long de la campagne et que le Gouvernement a jusqu’alors nié. Nous voyons bien que les choses évoluent ; reste à savoir quel traitement vous allez réserver au rapport Gallois lorsqu’il sera publié. Il est important que le Gouvernement s’engage sur le sujet de la compétitivité.
Le rapporteur général comme vous-même reprenez toujours la même argumentation, citant ce même article du traité européen, en arguant que cette exonération est illégale. Voilà une position totalement générique qui ne correspond absolument pas à la nature de l’exonération que nous voulons mettre en œuvre. Si vous êtes d’accord pour reconnaître que l’agriculture connaît un problème de compétitivité et si vous êtes d’accord sur le fait qu’il est nécessaire de baisser le coût du travail, il serait intéressant que vous nous disiez si vous continuez à vous battre à Bruxelles pour obtenir un accord sur cette exonération. Depuis vos prises de fonctions, il y a cinq mois, avez-vous entamé une démarche, de quelque nature qu’elle soit, pour plaider en faveur de cette mesure si elle suscite un doute ?
Pour ma part, j’ai le sentiment que vous maniez un double langage, affirmant que cette exonération est illégale tout en ne faisant rien de concret. C’est cette attitude qui suscite une incompréhension. Nous avons créé une recette dont nous avons clairement indiqué dans cet hémicycle qu’elle serait affectée au financement d’une baisse du coût du travail. Sur ce sujet, je ne vous entends pas et je n’ai pas connaissance de démarches que vous auriez entreprises pour aller dans notre sens.
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur. Votre attitude, monsieur le ministre, est d’autant plus surprenante que, sur le fond, vous admettez qu’il y a un problème de coût du travail et que ce problème est très singulier dans le secteur agro-alimentaire. Tirons-en donc des conséquences quant à l’action gouvernementale.
J’insiste sur l’exonération, pardonnez-moi. C’était une mesure sociale financée pour deux tiers par la « taxe soda » et pour un tiers par la taxe sur le fioul rouge avec un impact particulièrement sensible dans le monde agricole puisque c’étaient les agriculteurs qui payaient pour les agriculteurs. Que devient la recette qui était affectée à l’agriculture ? Je suis convaincu que nombre d’agriculteurs attendent des réponses précises.
(Les amendements identiques nos 110, 144, 245, 559 rectifié ne sont pas adoptés.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n° 398.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Favorable.
(L'amendement n° 398 est adopté.)
(L'article 38, amendé, est adopté.)
M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article.
La parole est à M. Patrick Bloche.
M. Patrick Bloche. Monsieur le président, bien qu’ayant retiré l’amendement que j’avais déposé sur cet article, j’ai souhaité prendre la parole. Je ne peux en effet m’empêcher à cet instant de pointer – le plus tranquillement possible, rassurez-vous – le bilan accablant de la précédente majorité en matière de financement de l’audiovisuel public, de France Télévisions en particulier, ces dix dernières années. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)
M. Jean-Frédéric Poisson. Ça nous manquait !
M. Patrick Bloche. L’irresponsabilité a marqué trois décisions lourdes de conséquences que nous payons au prix fort aujourd’hui. Rappelons simplement qu’il y a dix ans le financement de France Télévisions reposait sur deux piliers : la redevance et les ressources publicitaires, le budget de l’État n’étant quasiment pas sollicité.
Ces trois décisions, que nous pouvons qualifier au minimum de malheureuses, quelle sont-elles ?
Premièrement, entre 2002 et l’indexation de 2009, les gouvernements successifs se sont offert la facilité de ne pas augmenter la redevance, ce qui a créé un manque à gagner évident.
Deuxièmement en 2005, il y a seulement sept ans, est intervenue la suppression de la redevance sur les résidences secondaires : 300 millions de recettes ont été rayés lors du vote du projet de loi de finances pour 2005.
Troisièmement – et nous en arrivons au bouquet – en 2009, avec la réforme Sarkozy, la publicité a été supprimée en soirée sur France Télévisions. Un bon coup politique qui aura eu un coût budgétaire qui n’a rien de négligeable, c’est le moins que l’on puisse dire, puisque 450 millions d’euros de recettes publicitaires ont été supprimés du jour au lendemain. De surcroît, la « taxe télécoms » créée pour compenser cette perte est aujourd’hui menacée car elle fait l’objet d’une instruction de la Cour de justice de l’Union européenne.
Comme vous l’aurez compris, durant ces dix dernières années, le budget de l’État a été chaque fois davantage sollicité pour compenser les pertes de recettes liées soit aux manques à gagner de la redevance, soit à la suppression des ressources publicitaires. Entre 2011 et aujourd’hui, ces dernières ont diminué de 60 millions d’euros, ce qui les ramène au niveau de 2009. Nous nous trouvons donc dans une situation où l’audiovisuel public, notamment France Télévisions, nécessite des financements qui ne sont pas là.
Je me réjouis que le projet de loi de finances prévoit deux euros exceptionnels d’augmentation de la redevance. Bien entendu, il faut que France Télévisions montre l’exemple en maîtrisant et en réduisant ses coûts, je me suis permis de le souligner, au nom de notre assemblée, lors de la dernière réunion de son conseil d’administration.
Je souhaitais donc alerter la représentation nationale sur le problème du financement de l’audiovisuel public qui, compte tenu de la manière dont il a été géré depuis dix ans, est plus que jamais devant nous.
Mme Martine Martinel. Très juste !
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
M. Hervé Mariton. L’occasion est trop tentante, monsieur le président, pour que je ne revienne pas sur la fable du Gouvernement selon laquelle neuf Français sur dix ne seront pas concernés par l’augmentation des impôts.
Nous avons déjà entendu M. Moscovici démentir cette proportion en nous expliquant qu’au moins trois à quatre fois plus de Français seraient amenés à trinquer. Et là, nous avons la démonstration, si je comprends bien, que les Français qui n’auront pas à supporter d’augmentation de leurs charges fiscales seraient ceux qui n’ont pas la télévision. Reconnaissez que l’on peut difficilement considérer que leur proportion atteint 90 %.
Et puis, monsieur le ministre, il y a eu un moment où vous avez envisagé de taxer les propriétaires de résidences secondaires. Mais à force de constater que cette fable avait du mal à passer, vous avez dû vous rendre à l’évidence que les propriétaires de résidences secondaires n’étaient pas uniquement les Français les plus favorisés. Nous aurons l’occasion d’en reparler demain.
Vous avez un projet de budget qui aura, sous les pressions extérieures, compris en partie les Français les plus riches mais qui est manifestement très sévère avec certaines catégories de nos concitoyens. Nous avons déjà compris que le parti socialiste avait une définition extrêmement large des classes moyennes, avec son seuil de 3 000 euros par mois. Nous savons maintenant qu’appartenir aux classes moyennes, c’est avoir une télévision. Il y a manifestement beaucoup de dégâts à prévoir.
Monsieur le ministre, alors que vous avez oublié ce qu’a été il y a quelques jours votre proposition maléfique d’étendre le paiement de la redevance aux résidences secondaires, il me semble que cela valait la peine de faire ce petit rappel.
Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean-François Mancel, pour soutenir l’amendement de suppression de l’article, n° 62.
M. Jean-François Mancel. Il est défendu.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Défavorable. Faute d’augmentation de la redevance, France Télévisions aurait subi une baisse de ses dotations de 168 millions d’euros. Si les mesures prévues dans cet article ne sont pas modifiées, les ressources qui lui sont garanties seront en hausse de 107,3 millions d’euros. Autrement dit, France Télévisions est appelée à la solidarité pour redresser les comptes publics à hauteur de 60,7 millions d’euros, un effort somme toute modeste eu égard à l’ensemble de son budget.
Quant à vous, monsieur Mariton, je vous appelle à un peu de raison et de modestie si vous considérez qu’une hausse de deux euros par an – même si ce n’est pas rien, je vous l’accorde – pour contribuer au redressement des comptes publics s’apparente à un coup de gourdin fiscal.
M. Hervé Mariton. Il n’y a pas que ça !
M. Christian Jacob. C’est la goutte d’eau de trop !
M. Yves Censi. Le supplice chinois !
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Avis défavorable.
(L'amendement n° 62 n'est pas adopté.)
(L'article 39 est adopté.)
(L'article 40 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l'amendement n°85.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Il vise à reconduire un dégrèvement pour les 350 000 bénéficiaire âgés de plus de 75 ans en 2013 et non imposables à l’impôt sur le revenu.
Cette prolongation est décidée chaque année en faveur d’une population qui viendra à extinction – le plus tard possible. Tel est l’objet de cet amendement.
(L'amendement n° 85, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L'article 41, amendé, est adopté.)
(L'article 42 est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances, pour soutenir l'amendement n°838.
M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Cet amendement vise à acter juridiquement la suppression de l’une des subdivisions du compte de commerce « Opérations commerciales des domaines ».
Cette subdivision, créée par la loi de finances pour 1968 et inactive depuis 2010, retraçait en recettes et en dépenses, dans les départements visés par les arrêtés d’application du décret du 12 juillet 1967 sur les services dits « fonciers », les opérations d’acquisition d’emprises foncières par voie amiable ou d’expropriation réalisées par les services de l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics ou les sociétés d’économie mixte.
Je vous propose donc de suivre la recommandation de la Cour des comptes en prenant acte juridiquement de la clôture de cette subdivision.
(L'amendement n° 838, accepté par la commission, est adopté.)
(L'article 42, amendé, est adopté.)
M. le président. Je suis saisi d’une série d’amendements rédactionnels de M. Eckert, nos 399, 391, 394, 424, 393 et 400.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?
M. Pierre Moscovici, ministre. Avis favorable.
(Les amendements nos 399, 391, 394, 424, 393 et 400 sont successivement adoptés.)
M. le président. La parole est à M. Christian Eckert, pour soutenir l'amendement n°397.
M. Christian Eckert, rapporteur général. Cet amendement vise à préciser la date d’entrée en vigueur du dispositif prévu à l’article 43 et instituant des clauses d’action collective dans les contrats d’émission de titres de l'État, ce dispositif étant imposé par le traité instituant le Mécanisme européen de stabilité.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Moscovici, ministre. Avis favorable.
(L'amendement n° 397 est adopté.)
(L'article 43, amendé, est adopté.)
M. le président. Sur l’article 44 et le prélèvement européen, plusieurs orateurs sont inscrits.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires européennes.
Mme Danielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes. En tant que présidente de la commission des affaires européennes, je souhaite rappeler l'importance du budget européen, si ce n'est dans son volume, du moins dans ses effets. Que feraient en effet les régions s’il n’existait pas de fonds FEDER, FEADER et FSE, pour ne citer que les plus classiques ?
Le budget européen, privilégiant l'investissement, constitue à ce titre un outil pertinent de soutien à la croissance et à l'emploi dans le contexte économique difficile que nous connaissons.
Dès lors, je salue la priorité donnée dans le budget pour 2013 aux dépenses en faveur de la croissance et de l'emploi, qui devront naturellement soutenir l’investissement écologique et la transition pour les emplois verts. Je souhaite que cet effort soit amplifié dans le prochain cadre financier pluriannuel aujourd'hui en négociation.
Le prochain budget de l'Union devra en outre revêtir une dimension sociale et environnementale accrue. Les conséquences de la crise économique nous en montrent tous les jours la nécessité.
Pour cela, le budget européen nécessite l’octroi de moyens supplémentaires. Pouvez-vous nous indiquer, monsieur le ministre, où en sont les discussions sur la possibilité de doter ce budget de nouvelles ressources propres, comme la taxe sur les transactions financières ou la taxe carbone ?
Je souhaite enfin appeler votre attention sur l'absolue nécessité que constitue la résolution de la question du reste à liquider. Celui-ci devrait en effet s'élever, selon la Commission européenne, à 207 milliards d'euros à la fin de l'année 2013, hypothéquant d'autant les moyens mobilisables dans le cadre du prochain cadre financier pluriannuel.
Il est impératif de prendre ce problème à bras le corps. Pouvez-vous nous préciser les pistes que vous privilégiez ?
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
M. Hervé Mariton. Il nous est proposé une augmentation du prélèvement de 720 millions d’euros. Au moment où le « zéro valeur » s’applique en France, avec quelques astuces de présentation de votre part,…
M. Christian Eckert, rapporteur général. Oh ! Quel mauvais procès !
M. Hervé Mariton. …pourquoi ne s’appliquerait-il pas également au budget de l’Union et au prélèvement que la France assure pour abonder ce budget ? De même que la vertu budgétaire mérite d’être renforcée dans le pays, elle devrait l’être également à l’échelle européenne.
Certes, il existe des évolutions positives en Europe : ainsi, le dernier sommet a été l’occasion de demander à la Commission d’écheniller un certain nombre de ses textes – directives ou règlements –, permettant une simplification de l’action et, par voie de conséquence, de l’économie.
Le Premier ministre avait à bon droit rappelé dans son discours sur le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l'union économique et monétaire l’importance du principe de subsidiarité. En parler est une bonne chose, mais il est préférable de l’appliquer.
Il faut donc absolument contraindre davantage le budget de l’Union, et faire évoluer les prélèvements de sorte que ceux-ci respectent la règle du « zéro valeur » ; ceci me paraît indispensable.
Je ne conteste pas que les différents dispositifs évoqués par Mme la présidente de la commission des affaires européennes aient leur utilité. Mais, à l’instar d’autres dépenses publiques, ils ne doivent pas être dispensés pour autant d’évaluation, de revue, de révision, qui permettent de faire évoluer la dépense de manière mieux maîtrisée.
Sans doute le Gouvernement et le Parlement n’ont-ils pas la pleine maîtrise de la définition et du niveau de ce prélèvement ; mais pourriez-vous au moins nous dire, monsieur le ministre, ce qu’ont été les efforts du Gouvernement pour contraindre davantage ce prélèvement ?
Le résultat auquel vous aboutissez n’est pas heureux. Vous nous direz sans doute que ce n’est pas votre faute, mais celle des autres Le résultat n’en demeure pas moins le même : il existe un véritable dérapage du prélèvement européen.
Bien que fortement engagés dans notre groupe en faveur de l’efficacité des politiques européennes, nous ne mesurons pas celle-ci uniquement au travers de l’augmentation des dépenses. S’il y a augmentation des dépenses, nous le regrettons ! Nous sommes donc défavorables à cet article.
M. le président. La parole est à M. Olivier Carré.
M. Olivier Carré. Étant chargé par la commission des finances d’examiner ce point, je me suis attaché à le résumer en quelques questions, déjà évoquées.
Tout d’abord, même si des progrès sont constatés – M. Mariton l’a indiqué –, nous restons toutefois nettement en dessous des demandes de la Commission.
Je souhaiterais ainsi connaître la position de la France au sein du Conseil européen concernant les propositions de la Commission pour cette année, notamment pour l’élaboration en cours du programme pluriannuel. Celui-ci devrait en effet aboutir à une augmentation substantielle de la part de la France, alors même que nos ressources budgétaires sont déjà extrêmement contraintes.
Des recettes additionnelles ont été évoquées, notamment par Mme la présidente de la commission des affaires européennes concernant la taxe sur les transactions financières. Or la France applique déjà cette taxe sur son territoire – pour son propre compte, en quelque sorte – et l’Allemagne le fera sans doute prochainement.
Comment envisagez-vous la mise en place de cette taxe au niveau européen ? Comment sera-t-elle conjuguée avec nos propres recettes ? Le dispositif reposera-t-il sur un transfert, ou bien sur l’addition d’une nouvelle taxe à la taxe nationale ? Comment anticipez-vous la consolidation des deux recettes, étant précisé que les prévisions de recettes de la taxe française sont relativement importantes pour les prochaines années ?
Par ailleurs, le problème des restes à liquider risque effectivement d’obérer l’avenir. M. Lamassoure s’est montré plutôt rassurant la semaine dernière lors de son audition, à laquelle vous étiez vous-même présent, monsieur le ministre. Selon lui, cela ne pose pas réellement de problème. Il est vrai que nous sommes habitués en France à la comptabilité d’engagements et de crédits de paiement, ce qui ne semble pas être la technique financière en vigueur dans tous les pays. Quoi qu’il en soit, M. Lamassoure a estimé que cela ne constituait pas un véritable problème.
Cela étant, les montants en jeu sont très importants : ils s’élèvent en effet à 200 milliards d’euros, soit plus d’une année d’engagements de la Commission – rappelons qu’une année budgétaire représente environ 150 milliards d’euros. Même si leur paiement est étalé, ces sommes restent relativement importantes.
Je terminerai par une question de fond : même si tel n’est pas l’objet des crédits européens, qui servent la collectivité, chaque pays examine combien il perçoit en retour. Aujourd'hui, la PAC représente l’essentiel du retour destiné à la France : elle représente environ deux tiers à trois quarts des sommes versées.
Si, comme cela est envisagé, la contribution de la France au budget européen augmente substantiellement, le retour perçu par notre pays sera-t-il toujours équilibré et juste ? Même si je n’aime pas cette expression – Mme Viviane Reding a justement rappelé qu’il était difficile pour un pays d’invoquer un « juste retour » alors qu’il œuvre pour la collectivité –, j’aimerais savoir si les discussions sur la PAC sont bien engagées, comparées aux retours provenant d’autres secteurs de l’action européenne.
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l'amendement n°212.
M. Hervé Mariton. Je souhaite ajouter, sans malice aucune, que j’ai trouvé un peu décevante la réunion spéciale de l’Assemblée lundi dernier à la salle Lamartine, avec vous-même, Mme Reding et M. Alain Lamassoure, président de la commission des budgets du Parlement européen.
La discussion s’est cantonnée à la manière de faire et à la forme, et n’a absolument pas abordé la question de fond, qui portait sur la compatibilité de nos choix budgétaires avec les orientations de l’Union européenne.
C’était assez commode pour vous, car cela vous a permis d’éviter d’aborder le sujet de fond et d’avouer la fragilité de votre budget. Cela vous évitait en outre de demander à la Commission son opinion concernant le jugement porté par M. Bartolone sur l’objectif des 3%, qualifié d’absurde, puisque M. Bartolone présidait justement la séance.
C’est franchement dommage car, au-delà des débats sur la gouvernance, nous devons absolument multiplier les occasions de rencontres entre la Commission, le Parlement européen et l’Assemblée, afin de parler non seulement de la forme, mais aussi du fond.
Vous y avez échappé, et c’était tout à votre avantage. Je souhaite cependant que ce débat de fond puisse vraiment se tenir.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Le montant des dépenses du budget européen ne dépend pas de l’évaluation qu’en fait la loi de finances, mais des négociations menées au niveau communautaire.
La modification de la prévision du prélèvement sur recettes est donc non seulement inutile, mais elle pourrait en outre être accusée d’insincérité. Il est donc évidemment impensable d’accepter pareil amendement.
Sur la question du budget communautaire, le Gouvernement est attaché à ce que les institutions réalisent les mêmes efforts de maîtrise budgétaire que les États. Le ministre ici présent pourra s’il le souhaite vous le confirmer.
L’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Moscovici, ministre. Je saisis cette occasion pour répondre aux différents orateurs. Je n’insisterai pas sur l’amendement lui-même, l’intervention du rapporteur général ayant opportunément rappelé que le prélèvement était une application des traités.
Tout d’abord, le paquet financier négocié par la majorité précédente s’appliquera encore en 2013. Vous devriez donc adresser vos critiques en matière de discipline budgétaire à ceux qui se trouvaient alors à cette même place. Il faut faire preuve de cohérence et être bien conscient de ce que l’on fait.
Nous sommes un grand pays qui respecte les traités qu’il a signés. Dès lors qu’une pluriannualité est instituée, il est logique qu’un gouvernement agisse dans la continuité de ses prédécesseurs. Je vous invite donc à retirer ces critiques, qui ne s’adressent pas à nous ; et si elles s’adressaient à d’autres, il fallait les faire avant.
J’en viens, plus sérieusement, au problème de fond : les perspectives annuelles pour les années 2014 à 2020 se négocient maintenant. Le Gouvernement fera connaître ses positions lors du prochain Conseil européen. J’ai, en ma qualité d’ancien ministre des affaires européennes et négociateur de l’Agenda 2000 en 1999 – cela ne me rajeunit pas ! – une vieille expérience de ces discussions qui sont toujours extrêmement compliquées.
C’est compliqué parce qu’il y a une pluralité d’acteurs : la Commission européenne et le Parlement européen, qui ont souvent des positions comparables, et les différents États membres.
Il en est un, la Grande-Bretagne, qui demande systématiquement un juste retour. Comme vous, monsieur Carré, je pense que l’expression est des plus maladroites et qu’il ne faut pas l’utiliser : laissons-la à ceux qui veulent leur argent en retour.
D’autres pays, ceux de la cohésion, souhaitent une logique expansive.
Enfin, il y a ceux, comme la France ou l’Allemagne, qui paient pour le budget européen, qui sont dans une situation de débiteurs nets et souhaitent voir ce débit contenu dans des limites raisonnables, mais qui veulent aussi une politique amitieuse. Personne, sur aucun des bancs de cette assemblée, ne souhaite que l’on abandonne la politique agricole commune. Personne ne souhaite que les fonds structurels délaissent les régions de France, qui ont déjà vu leurs montants diminuer fortement. Personne, encore moins dans la majorité que dans l’opposition, ne se prononcera contre une politique de croissance, d’innovation, de recherche, contre une politique culturelle ambitieuse.
C’est cela qu’il va s’agir de négocier. Le Président de la République François Hollande s’attend à ce que le prochain Conseil européen demande quelques nuits de travail. Il y est prêt, manifestement. Comme toujours, la France défendra une position ambitieuse, raisonnable, équilibrée et qui permette d’aller de l’avant dans la construction européenne.
Enfin, en ce qui concerne la taxe sur les transactions financières, vous me donnez l’occasion de souligner à nouveau, comme récemment en réponse à une question au Gouvernement, qu’il s’agit d’un très grand succès pour la France. Cette proposition était bloquée depuis des années. Au nom du Gouvernement, j’ai repris l’initiative avec mon collègue Wolfgang Schäuble.
M. Jacques Lamblin. Bravo !
M. Pierre Moscovici, ministre. Merci de vos soutiens !
Nous avons réussi ce qui n’avait pas été fait auparavant – je le précise parce que j’ai lu des choses un peu fantaisistes à cet égard –, à regrouper autour de nous onze pays qui sont favorables à cette taxe. D’autres seraient désormais intéressés. Cette taxe a donc vocation à s’élargir encore au sein d’une coopération renforcée qui est en train de se mettre en œuvre. La Commission va faire sa proposition, qui ressemblera furieusement à celle qu’elle faisait auparavant à l’ensemble des pays membres de l’Union européenne.
Une fois cette taxe créée, il restera à débattre de ses utilisations. Parmi les réflexions menées en la matière, il en est au moins une qui me paraît certaine, après avoir eu le privilège – un ministre des finances fait des choses plus originales que d’autres – de recevoir récemment Bill Gates et Bono, au nom de son organisation One : j’ai pu leur confirmer que le Gouvernement estime tout à fait important qu’une partie substantielle du produit de cette taxe soit affectée au développement des pays les plus pauvres de la planète, des populations qui souffrent. C’est ce que nous ferons.
Pour le reste, une partie de la taxe sera-t-elle affectée à des actions de l’Union européenne ou à des actions des pays qui sont parties prenantes à ladite taxe ? La question se posera le moment venu. Nous verrons bien.
Voilà les éléments que je voulais vous apporter pour, à mon tour, après Christian Eckert, demander le rejet de cet amendement.
(L’amendement n° 212 n’est pas adopté.)
(L’article 44 est adopté.)
M. le président. Afin d’avoir le temps de vous faire distribuer des documents nécessaires à la suite du débat, je vais suspendre la séance durant une dizaine de minutes.
M. le président. La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures trente.)
M. le président. La séance est reprise.
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, inscrit sur l’article.
M. Hervé Mariton. Cet article d’équilibre est l’occasion pour nous de rappeler, nous l’avons dit à plusieurs reprises mais cela reste vrai – et malheureusement, vous n’avez pas saisi l’occasion de la discussion budgétaire pour essayer de vous rattraper –, qu’il y a dans ce budget à la fois trop d’impôts et trop peu d’économies.
Très modestement, nous proposons donc d’améliorer l’équilibre de 5 milliards. Une telle somme n’est pas introuvable : il y a déjà 4 milliards de décalage entre la prévision d’évolution des dépenses de la Cour des comptes et la vôtre ! Vous vous êtes réservé 4 milliards de marge. Autant assumer la prévision de la Cour des comptes, cela fait déjà 4 milliards d’économies.
On trouvera le dernier milliard dans les propositions que nous avons faites au fil de cette discussion budgétaire, sur la gestion des effectifs de la fonction publique par exemple, ou sur les marges que l’on peut dégager sur les opérateurs. Le débat sur cette question, l’autre soir, était pathétique. C’est M. Cahuzac qui était au banc du Gouvernement. Les membres de la majorité ont proposé quelques timides amendements pour aussitôt les retirer… Les seules dispositions prises par le Gouvernement concernent les chambres de commerce. Tous les autres opérateurs ont été piteusement protégés. On peut aussi proposer des économies au regard de l’explosion des dépenses de l’aide médicale d’État que va provoquer votre politique.
Au fil de la discussion donc, nous avons identifié largement 5 milliards d’économies, et nous pourrions aller bien au-delà. Le présent amendement est donc une sorte d’amendement d’appel. Cela ne met pas fondamentalement en cause la nature de votre politique. Vous pourriez au moins reconnaître cette erreur-là et ajuster le tir.
Vous avez quelquefois dans la discussion budgétaire reconnu certaines erreurs. Or il y a là l’erreur fondatrice de votre budget. Nous pourrions, pour être en ligne avec notre vision, notre projet, réclamer des économies plus ambitieuses encore – et je rappelle qu’une économie, ce n’est pas une moindre augmentation de dépense ! Les gestions précédentes n’ont pas été parfaites de ce point de vue, je l’ai toujours admis, mais il faut constamment progresser. Nous proposons, sans dénaturer votre budget, un petit progrès de 5 milliards. Je suis sûr que vous aurez à cœur de l’accepter.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Lamour, pour soutenir l'amendement n° 179.
M. Jean-François Lamour. Cet article 45 gagnerait à être rebaptisé « article de déséquilibre ». Vous n’avez eu de cesse, pendant ce débat – long et aux échanges assez fructueux, il faut bien le reconnaître – de refuser les propositions que nous faisions en matière de réduction de la dépense publique. Le péché originel date des mois de juin et juillet, puisque déjà à ce moment vous avez engagé, comme l’a très bien rappelé Gilles Carrez, près de 20 milliards de dépenses nouvelles sur cinq ans. Dès lors, comment proposer aujourd’hui un article d’équilibre ?
Et puis, vous avez tapé sans compter, et pas seulement sur un foyer sur dix. Vous-même, monsieur le ministre, n’avez d’ailleurs jamais utilisé ce chiffre. Vous estimez plutôt que ce seront la moitié des foyers qui seront touchés, voire six sur dix comme le pense Gilles Carrez, par les différentes augmentations de taxes et d’impôts que vous avez fait voter au Parlement. Tout y passe : fiscalisation des heures supplémentaires, tabac, retraites, prélèvements sociaux sur les auto-entrepreneurs, entreprises dont vous plombez la capacité de développement et de financement…
Cet article n’a donc strictement aucune valeur. Nous devrons nous retrouver très vite pour combler les manques et rectifier ce qui ressort de cette semaine de débats. Je trouve que c’est une erreur. Vous auriez pu assumer la situation de notre pays, écouter les propositions que nous faisions en matière de réduction de la dépense publique. Vous n’avez rien entendu. Je vous dis donc à très bientôt.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Avis défavorable. Le débat a eu lieu. Il a été riche, comme vous avez eu l’honnêteté de le reconnaître, monsieur le député. Il est inutile de revenir sur ce qui a pu nous séparer. Mais je trouve tout de même un peu cavalier de parler d’article de déséquilibre quand on sait que, dans celui qui a été présenté par la majorité précédente il y a un an, le déséquilibre était largement plus prononcé.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Pierre Moscovici, ministre. Ne refaisons pas le débat. Beaucoup de choses ont été dites, on ne peut pas rebattre sans arrêt les mêmes arguments. Mais je remarque d’abord que 5 milliards, c’est plus que ce que vous avez jamais fait, et de très loin. Cela n’a donc pas de sens de donner ce genre de leçons. Et ensuite, bien que je n’aie pas pu assister à la totalité des débats – nous nous relayons avec Jérôme Cahuzac – je sais bien que, contrairement à ce que vous avez dit, vous n’avez rien, ou très peu, proposé en matière de baisse des dépenses publiques (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce sont des mots ! Ce sont des généralités, des propos bateaux, des fariboles !
M. Hervé Mariton. Le débat sur les opérateurs a été affligeant !
M. Pierre Moscovici, ministre. Je n’ai vu que deux propositions : l’une sur la DGF, soit 500 millions, et l’autre que nous avons évoquée il y a quelques minutes sur le prélèvement européen, proposition dont l’absurdité n’aura échappé à personne.
M. Hervé Mariton. Il y a une surévaluation tendancielle !
M. Pierre Moscovici, ministre. Je vais donc faire comme M. Lamour, vous donner rendez-vous pour la deuxième partie de la loi de finances. On verra alors ce que vous avez vraiment dans votre sac !
M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert. Je suis frappé par les termes utilisés. Le précédent gouvernement n’aurait jamais réduit la dépense, ou pas avec la même ampleur que l’actuelle majorité.
M. Dominique Baert. Certainement pas !
M. Julien Aubert. Mais les chiffres sont là ! La réduction du nombre de fonctionnaires, en année pleine et sur une durée de carrière de quarante ans,…
M. Christian Eckert, rapporteur général. Avec les frais d’obsèques !
M. Julien Aubert. … représente en valeur actualisée nette des économies structurelles bien supérieures aux 5 milliards qui nous sont proposés.
Le débat mériterait d’être un peu plus respectueux. Ce n’est pas en prétendant que le précédent gouvernement n’a fait aucun effort, alors qu’il a sans doute pris les réformes les plus courageuses des quarante dernières années en la matière, que vous ferez apparaître par comparaison le présent projet de loi de finances comme le tournant historique de la réduction de la dépense.
(L'amendement n° 179 n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l'amendement n° 846.
M. Pierre Moscovici, ministre. Au terme de la première partie, je voudrais profiter de cet amendement pour adresser quelques remerciements particuliers et tirer quelques leçons générales.
Des remerciements d’abord au rapporteur général : vous vous acquittez de cette tache extrêmement lourde avec beaucoup de cœur et d’intelligence, et le contenu technique et la qualité pédagogique de vos explications ont énormément apporté aux débats. Vos propositions aussi, qui ont permis d’améliorer encore le solde budgétaire de plus de 240 millions.
Je remercie aussi le groupe socialiste de son soutien. Je ne veux pas faire de distinction : les contributions de Pierre-Alain Muet, Daniel Goldberg, Sandrine Mazetier et de beaucoup d’autres ont été très utiles.
Je remercie les partenaires de la majorité pour leur soutien exigeant et pour leurs propositions, même si elles tenaient parfois plus de l’aiguillon – je pense par exemple aux contributions de M. Sansu ou de Mme Sas.
Et je donne acte aux orateurs de l’ancienne majorité de leur opposition franche et constante. Une opposition de cette nature est toujours utile pour faire émerger les termes du débat et les positions des partis sur chacun des aspects du texte. Les Français qui auront suivi les débats sont à même de juger exactement ce que vous pensez et ce que nous faisons, par rapport au présent, au futur et aussi au passé.
Dans le domaine de la fiscalité des entreprises, je note que le débat fut relativement apaisé, parfois même consensuel. J’ai bien noté par exemple le soutien constructif du président de la commission, que je salue, à la majorité de nos mesures relatives à l'impôt sur les sociétés, en particulier sur la réforme de la niche Copé. Cela s’explique par le fait que nous ayons posé un diagnostic incontestable. Le texte a pu de ce fait être accepté sans difficulté par tous. Je remercie la majorité pour son soutien à l’aménagement proposé par le Gouvernement, qui permet d’exclure les loyers de la mesure de limitation de la déductibilité des charges financières.
Pour la fiscalité des ménages, les différences de vue furent évidemment beaucoup plus marquées. Ce n’est pas étonnant, c’est la conséquence de la rupture politique que représente toujours une alternance, surtout après une si longue période. Vous aviez décidé des baisses d’impôts en faveur des ménages aisés. Cela a échoué, sur le plan social comme sur le plan économique. Nous avons choisi de rompre avec cette politique, et nous le faisons dans la justice.
M. Hervé Mariton. Par le retour du bouclier fiscal !
M. Pierre Moscovici, ministre. J’ai eu l’occasion d’expliquer ici que ce n’était pas la même chose, pas la même philosophie. Notre mesure ne vise qu’à répondre aux exigences du Conseil constitutionnel et n’a rien à voir avec le bouclier fiscal.
Je remercie la majorité pour ses suggestions pertinentes. Le rapporteur général et la commission des finances ont proposé plusieurs modifications : une baisse du plafond de la déduction forfaitaire des frais professionnels – mesure juste, qui ne touche que les salariés les plus aisés – la révision du barème de l’ISF pour maintenir le seuil d’entrée à 1,3 million – là encore, mesure juste – la suppression de la réduction d’ISF de 300 euros par personne à charge…
M. Hervé Mariton. Mesure très injuste !
M. Pierre Moscovici, ministre. Je n’ignore rien des débats qui ont eu lieu au sein même de la majorité. Je pense à l’amendement relatif à l’inclusion des œuvres d’art dans le champ de l’ISF. C’est un débat de fond utile, de qualité, qui a pu se tenir sur ce point, avec des positions qui, toutes, étaient légitimes et respectables de part et d’autre. Il n’y a pas de solution évidente à cette question. Je remercie la majorité pour avoir choisi finalement d’aller dans le sens que souhaitait le Gouvernement. Je pense à l’inverse à la limitation globale des dons aux partis proposée par la commission des finances, adoptée au terme d’un débat riche et cette fois contre l’avis du Gouvernement, qui a remarqué que cette mesure pouvait pour partie excéder le champ d’une loi de finances. Le Gouvernement se rallie à la position exprimée par l’Assemblée et ne lui demandera pas de revenir sur ce vote.
En ce qui concerne l’alignement de la fiscalité des revenus du capital sur ceux du travail, chacun sait que c’est un engagement essentiel du Président de la République qui est désormais réalisé. Nous avons cependant entendu les positions de chacun. L’amendement que nous vous avons proposé, je le dis avec force, n’est pas un recul. J’ai au contraire la conviction que c’est une avancée.
Nous voulons distinguer l’investisseur qui certes prend des risques – pour créer des emplois, pour embaucher, pour exporter, pour innover – du créateur d’entreprise, qui prend ces mêmes risques, mais fait beaucoup plus encore. Nous voulons taxer la rente, pas le risque.
L’entrepreneur, le vrai, travaille dans l’entreprise, il la développe. C’est celui qui fait des efforts dans la durée.
M. Hervé Mariton. C’est quoi, un faux entrepreneur ?
M. Pierre Moscovici, ministre. Ce n’est pas la question.
Nous avons fait une distinction, que vous avez comprise, entre la rente et le risque. C’est cela qui a fondé nos amendements. Nous avons donc, sans renoncer, naturellement, au principe de l’alignement des fiscalités, proposé certains aménagements, que vous avez votés, et nous pensons qu’un équilibre a été trouvé, favorable aux entreprises de ce pays, que nous devons encourager. Nous devons être à leurs côtés parce que, répétons-le, c’est dans l’entreprise que se crée la richesse. C’est là que se développe la croissance. En même temps, nous avons maintenu le principe de la réforme voulue par le Président de la République.
L’outil fiscal est également mis au service de la priorité accordée par le Gouvernement au logement, en particulier pour créer un choc de l’offre dans ce domaine. Nous estimons que c’est absolument nécessaire. Certains amendements – je pense à ceux de M. Goldberg – ont permis d’améliorer encore les choses.
La représentation nationale a également fait plusieurs propositions qui permettront de mettre en œuvre une fiscalité plus verte. Je les salue, elles sont tout à fait utiles.
D’autres améliorations diverses peuvent être saluées. Je pense aux améliorations qui concrétisent l’engagement de l’Assemblée nationale en faveur de certains secteurs : la presse, la création musicale…
M. Hervé Mariton. Pas l’agriculture !
M. Marc Le Fur. Vous avez choisi les œuvres d’art contre l’agriculture !
M. Julien Aubert. Vous avez choisi la culture et pas l’agriculture !
M. Pierre Moscovici, ministre. Je salue le fait que le logement ait été mis en sécurité dans le périmètre des industries à risques.
Compte tenu des difficultés persistantes d’établissement du cadastre, nous avons choisi, à l’initiative de MM. Pupponi et Giacobbi, de proroger les exonérations de droits de succession sur immeubles en Corse.
Enfin, les débats ont permis de faire progresser la réflexion sur les taxes affectées. Je remercie particulièrement Sandrine Mazetier et Dominique Lefebvre pour leur contribution. Ce travail se poursuivra.
Voilà ce que je voulais dire pour résumer très succinctement les débats de cette première partie.
J’en viens maintenant au traditionnel amendement à l’article d’équilibre – je dis bien « d’équilibre », monsieur Lamour –, qui tire les conséquences des votes de votre assemblée sur la première partie du projet de loi de finances initiale pour 2013.
Les recettes fiscales nettes sont globalement améliorées de 269 millions d’euros. Cela résulte essentiellement de l’augmentation des recettes d’impôt sur le revenu consécutive aux modifications apportées à l’évaluation des frais professionnels. Sur 200 millions d’euros de recettes supplémentaires d’impôt sur le revenu, 125 millions d’euros proviennent de ces modifications.
S’agissant de l’impôt de solidarité sur la fortune, son rendement devrait être amélioré par la suppression de la réduction d’impôt de 300 euros par enfant à charge ainsi que par l’abaissement du seuil des tranches. Cela représente 34 millions d’euros.
Enfin, je rappelle que l’aménagement du régime d’imposition des plus-values immobilières, de même que les modifications apportées au régime des stock-options et attributions gratuites d’actions, est intégralement gagé sur une reconduction de la contribution supplémentaire de 5 % sur l’impôt sur les sociétés des grandes entreprises. Les recettes non fiscales sont, quant à elles, majorées de 128 millions d’euros, essentiellement en raison d’une opération de reprise de trésorerie. Pour ce qui concerne les comptes spéciaux, l’amendement n° 86 rectifié, qui a pour objet de revoir à la baisse le barème du malus automobile, conduit à une diminution de 40 millions d’euros des ressources affectées au financement des bonus et déséquilibre d’autant ce mécanisme ; c’est ainsi, et le Gouvernement regrette l’adoption de cet amendement.
Enfin, par coordination avec l’amendement adopté à l’article 25, les prélèvements sur les recettes de l’État au profit des collectivités territoriales sont majorés, eux, de 36 millions d’euros. Ces prélèvements entrant dans le champ de la norme de dépenses de l’État, qui doit être stabilisée en valeur entre 2012 et 2013, il convient de trouver un gage. C’est pour cela que le Gouvernement vous propose de revoir à la baisse, de 36 millions d’euros, le plafond des dépenses du budget général. Ce gage sera réparti en seconde partie.
En résumé, l’ensemble de vos votes, mesdames et messieurs les députés, que je remercie encore, en mon nom et au nom de Jérôme Cahuzac, pour ce débat très constructif et très positif, conduisent à une amélioration de 358 millions d’euros du solde budgétaire. Je m’en réjouis. Je me réjouis du soutien de la majorité, je me réjouis de son sens des responsabilités. Votant cette première partie dans ces conditions, vous aurez contribué à un redressement encore plus important des comptes, et toujours dans la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission ne peut être que favorable à cet amendement qui ne fait que tirer les conséquences de nos décisions de la semaine dernière.
J’en profite, monsieur le ministre, pour vous remercier de vos propos, si gentils à mon égard et, indirectement, à l’égard de ceux qui m’entourent, qui ont beaucoup travaillé. Je me félicite de la qualité de la communication, ces dernières semaines, entre moi-même, rapporteur général de la commission des finances, vous-même, ministre de l’économie et des finances, et le ministre délégué chargé du budget ; je me félicite de la qualité de la communication entre nos services respectifs, qui ont permis de préparer un certain nombre de nos décisions. Ce n’est jamais simple, parce que la moindre modification, le déplacement du moindre curseur a souvent des conséquences budgétaires qu’il est difficile de maîtriser.
J’émets donc, bien sûr, un avis favorable sur cet amendement qui ne fait que tirer les conséquences de nos décisions précédentes.
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
M. Hervé Mariton. Je salue l’amélioration, à hauteur d’un pour mille, du budget. Cela résulte pour l’essentiel d’une aggravation des impôts.
Lorsque Jean-François Lamour parle, monsieur le ministre, de déséquilibre, il n’a pas tort. Je m’inscris en faux contre ce que vous avez dit quant à la fiscalité des entreprises ; nous désapprouvons vos projets.
La réalité, c’est que la base fiscale va vous échapper.
M. Jean-Frédéric Poisson. Tout à fait !
M. Hervé Mariton. Votre problème, aujourd’hui, c’est de savoir comment vous allez réagir à cet épuisement de la base fiscale.
Comme vous comprenez un certain nombre de choses et que vous entendez parfois les pressions, vous avez entendu le mouvement des « pigeons » et vous avez, en effet, assumé de vidanger à hauteur de 80 % un des dispositifs d’aggravation de la fiscalité des entreprises que vous aviez prévus. Las, ce dispositif n’était pas tout, et il y a d’autres aggravations de la fiscalité des entreprises et de celle des ménages qui, vous le savez, ne produiront pas leurs pleins effets.
Je ne crois pas que vous ayez répondu dans le débat à cette question qui se pose lors de l’examen de toute loi de finances. Une fois les impôts votés, nous préférons qu’ils rentrent plutôt qu’ils ne rentrent pas, mais il est hélas probable que les recettes fiscales ne seront pas au rendez-vous compte tenu de ce que la plupart des analystes disent, y compris ceux qui vous aiment bien. Que ferez-vous alors ? Prévoyez-vous d’entrer enfin, sérieusement, à mesure de l’exécution, dans une politique d’économie ? Ou allez-vous encore aggraver, faisant preuve d’un surcroît de cette ingéniosité fiscale qui vous caractérise, l’impôt des ménages et des entreprises ?
Oui, monsieur le ministre, nous avons combattu vos projets, parce qu’ils nous paraissent mauvais, parce qu’ils nous paraissent injustes, parce qu’ils nous paraissent inefficaces. Nous avons combattu vos projets d’aggravation de l’impôt des ménages, nous avons aussi combattu vos projets d’aggravation de l’impôt des entreprises.
Quelques-uns des dégâts les plus sévères auront été évités, sous la pression sinon de la rue du moins d’internet. Malheureusement, d’autres nous menacent, qui sont considérables aussi. Alors, si, comme nous pouvons le craindre, la base fiscale se dérobe, que ferez-vous pour limiter les dégâts ?
M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur.
M. Marc Le Fur. Tout à l’heure, monsieur le ministre, j’avais posé une question en présence de votre collègue Jérôme Cahuzac. Pardonnez ma ténacité mais je n’ai pas eu de réponse, c’est pour cela que j’y reviens. Elle portait sur la protection sociale en agriculture.
L’an dernier, rappelez-vous, nous avions imaginé un système pour atténuer les charges pesant sur les employeurs de salariés agricoles. Nous avions imaginé deux recettes : l’une issue de la taxe soda, qui est affectée à tout autre chose, et les agriculteurs apprécieront qu’une taxe créée pour eux serve à d’autres ; l’autre assise sur une augmentation du fioul rouge. Ce sont 60 millions d’euros qui sont payés par les agriculteurs et qui, si je comprends bien, en l’absence de réponse de votre part, continueront à l’être. Comme ils étaient destinés à financer une dépense au profit des agriculteurs, il y avait une certaine logique : les payeurs étaient aussi les bénéficiaires. Visiblement, cette taxe demeure, mais elle ne bénéficiera plus du tout aux agriculteurs.
Je vous remercie de me donner une réponse précise sur ce point. C’est une réponse attendue. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert. Monsieur le ministre, nous arrivons effectivement là où les Athéniens s’atteignirent. Je crains que la maxime « il faut presser le citron jusqu’à ce que les pépins craquent » ne se vérifie. Faute de justice fiscale, la principale conclusion que l’on peut tirer de l’examen de ce texte, c’est que les entrepreneurs, malheureusement, vont être douloureusement frappés par les mesures votées, avec des effets irréversibles, notamment une fuite à l’étranger.
M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est demain, les explications de vote !
M. Julien Aubert. Les Français ont voté, aux mois de mai et juin derniers. Aujourd’hui, les entrepreneurs et les détenteurs de patrimoines votent à nouveau, mais avec leurs pieds. Ils quittent le territoire, sans doute pour ne plus revenir, parce qu’ils n’ont plus confiance en la parole de l’État.
Il est normal qu’un gouvernement veuille imprimer sa marque sur la politique budgétaire de l’État, mais il doit le faire en étant conscient qu’aucune des mesures qu’il prend ne doit être irréversible. Il engage également l’avenir, et les gouvernements qui lui succèderont devront pouvoir revenir sur les mesures prises. Je crains que les accrocs faits à la confiance des entrepreneurs et d’une partie des Français ne puissent jamais être reprisés. En d’autres termes, nos entrepreneurs s’en vont, je ne peux pas m’en féliciter, et j’espère que, si un projet de loi de finances rectificative doit être examiné, il sera encore temps pour que vous reveniez sur les mesures les plus discriminatoires. Si tous les Français sont égaux, ceux qui créent de la richesse, ceux qui font vivre notre économie sont essentiels.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Pierre Moscovici, ministre. Tout d’abord, je ne peux, monsieur Le Fur, que réitérer l’engagement de vous adresser une réponse extrêmement précise et documentée pris par Jérôme Cahuzac. Comme ce n’est pas précisément la question que vous soulevez que nous discutons maintenant, je ne veux pas improviser.
Je n’ai pas l’intention de relancer le débat mais les orateurs de l’opposition ne cessent d’évoquer de possibles malheurs et de déplorer je ne sais quel exil. Je ne crois pas que ce soit une attitude extrêmement saine ; on ne souhaite pas malheur à son pays, et on ne souhaite pas que les investisseurs s’en aillent.
M. Hervé Mariton. En effet !
M. Pierre Moscovici, ministre. Au fond, pardonnez-moi de vous le dire, vous paraissez vous réjouir des difficultés des temps présents. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Je pense que cette attitude n’est pas bonne. Vous devriez plutôt souhaiter que la politique que nous menons soit couronnée de succès. Vous avez été aux responsabilités pendant cinq ans, et nous travaillons pour notre pays. C’est ce pays que nous voulons servir. C’est cela que nous devons espérer et construire.
M. Hervé Mariton. J’espère que nous le servons tous, notre pays !
M. Pierre Moscovici, ministre. Je vous rappellerai simplement trois petites choses à propos de la démarche qui est celle du Gouvernement et de la majorité.
C’est d’abord une démarche de redressement des comptes. Je n’ai pas envie de rouvrir ici le sempiternel débat sur l’héritage et la facture que nous avons trouvée,…
M. Jacques Lamblin. Vous ne faites que ça !
M. Pierre Moscovici, ministre. …mais si nous demandons aux Français un effort de 30 milliards d’euros, c’est bien parce que nous devons faire un effort exceptionnel, je dirai même historique : passer d’un déficit de 5 % du PIB à un déficit de 3 % en un an. Rien ne doit être négligé, car ce redressement doit être un redressement dans la justice. Les 10 milliards d’économies sont 10 milliards d’économies effectives et, croyez-moi, les services publics les ressentent comme tels. Il ne faut pas le refuser, mais c’est ainsi, et j’ai déjà fait des commentaires sur la fiscalité des ménages comme sur celle des entreprises.
Deuxième point, le Gouvernement souhaite que les entreprises de ce pays soient placées dans une situation qui leur permette d’investir, d’embaucher, de créer, d’innover, d’exporter. C’est la raison pour laquelle, en effet, nous avons mené les concertations utiles, et avec les représentants des entreprises, et avec la majorité parlementaire, pour faire évoluer un certain nombre de nos propositions, pour faire en sorte que, oui, l’esprit d’entreprise soit préservé, tout en respectant ce grand principe de l’alignement de la fiscalité du capital sur celle du travail. Oui, nous faisons cette grande réforme, mais de façon intelligente. Je pense que cela devrait être salué plutôt que critiqué.
Troisième point, nous sommes confrontés à une situation économique, à une situation financière, à une situation sociale extrêmement difficiles.
Le redressement des comptes n’est pas tout. Je participais cet après-midi, comme la moitié des membres du Gouvernement, à une réunion autour du Premier ministre sur le thème de la compétitivité. Nous n’avons jamais considéré – jamais ! – que la compétitivité française n’était pas un problème. Le Premier ministre l’avait évoqué à la tribune de l’Assemblée nationale dès sa déclaration de politique générale. Nous voulons que notre approche soit ambitieuse, globale et rapide, afin de rattraper le déficit de compétitivité que vous nous laissez. Les chiffres sont cruels et, quand on analyse les choses en profondeur, on aperçoit toute une série de faiblesses auxquelles on n’a pas remédié pendant les dix dernières années. Au contraire, les choses se sont aggravées !
M. Hervé Mariton. Vous avez dit qu’il ne fallait pas regarder le passé !
M. Pierre Moscovici, ministre. Vous devriez plutôt faire confiance à la France…
M. Julien Aubert. À la France, oui, mais à vous, non !
M. Pierre Moscovici, ministre. …et au Gouvernement qui mène un effort historique de redressement pour que notre économie redevienne plus compétitive et plus forte. C’est ce que nous souhaitons tous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour un rappel au règlement.
M. Hervé Mariton. Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l’article 58, alinéa 1, de notre règlement. Je vous rappelle, monsieur le ministre, que la France ne vous fait déjà plus confiance. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. Christian Eckert, rapporteur général. Ce n’est pas un rappel au règlement !
M. le président. Sur quel article du règlement vous fondez-vous vraiment, monsieur Mariton ?
M. Hervé Mariton. Il va, monsieur le président, de la dignité de nos travaux.
Le Gouvernement a dit, à la fin de la semaine dernière, que les entreprises font du tort à la France. Vous avez à peu près dit, monsieur le ministre, à l’instant, que l’opposition fait du tort à la France. Monsieur le ministre, tous, les uns comme les autres, nous aimons la France !
M. le président. Monsieur Mariton, vous revenez au débat : ce n’est pas un rappel au règlement.
M. Hervé Mariton. Il est scandaleux que vous défendiez votre budget en avançant l’idée que des entreprises ou l’opposition feraient du tort à la France. Cela n’est pas admissible ! J’espère, monsieur le ministre, que tous – vous comme nous – nous aimons la France.
Mme Sandrine Mazetier. Avec votre bilan !
M. Hervé Mariton. Je pense que nous le faisons mieux que vous. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Nous admettons que vous cherchez la vérité mais, s’il vous plaît, n’insultez ni les entreprises, ni l’opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)
M. le président. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.
M. Pierre-Alain Muet. Monsieur le président, je ferai un rappel au règlement du même ordre que celui de mon collègue Hervé Mariton. Vu la façon dont vous vous exprimez tous aujourd’hui, il semble que vous oubliiez les raisons pour lesquelles nous opérons une réduction du déficit budgétaire de 30 milliards d’euros. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Plusieurs députés du groupe UMP. Ce n’est pas un rappel au règlement ! Sur quel article ?
M. Pierre-Alain Muet. Vous avez laissé pendant cinq ans, pour la première fois dans l’histoire de notre pays, un déficit structurel compris entre 3 % et 5 % du PIB. C’est du jamais vu ! Vous avez laissé dériver pendant dix ans le déficit extérieur de notre pays.
M. Jacques Lamblin. On va voir ce que vous ferez !
M. Pierre-Alain Muet. Je rappelle que notre balance commerciale était excédentaire de 10 à 20 milliards d’euros jusqu’en 2003 ! Que s’est-il passé ensuite ? En 2004, la balance commerciale est devenue déficitaire, et en 2005 ce déficit a augmenté de 10 milliards d’euros, pour atteindre aujourd’hui 75 milliards d’euros ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
Vous nous dites qu’il faut se préoccuper de la compétitivité. Mais qu’avez-vous fait pendant dix ans, en laissant dériver le déficit ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Si nous prenons aujourd’hui de telles mesures, c’est parce qu’il faut résoudre les problèmes auxquels vous ne vous êtes pas attaqués pendant dix ans. Vous avez laissé dériver la dette, le chômage et le déficit extérieur. C’est à ce gouvernement de rétablir la situation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)
(L’amendement n° 846 du Gouvernemen, est adopté, et les amendements nos 18 et 247 tombent.)
M. le président. L’amendement n° 185, présenté par M. Eckert, est rédactionnel.
(L’amendement n° 185, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L’article 45 et l’état A annexé, amendés, sont adoptés.)
M. le président. En application de l’article 119, alinéa 4, du règlement de l’Assemblée nationale, le Gouvernement a demandé qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 12 ainsi que de l’article 45 et de l’état A annexé de la première partie du projet de loi de finances pour 2013.
La seconde délibération est de droit.
Je rappelle que le rejet des amendements vaut confirmation de la décision prise en première délibération.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 1.
M. Pierre Moscovici, ministre. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je profite de cette dernière prise de parole pour remercier les collaborateurs de M. le rapporteur général. Je l’avais fait implicitement, je le fais à présent explicitement. Je sais ce que représente un tel travail. Je remercie également les collaborateurs du ministre du budget, car ils ont vraiment beaucoup donné de leur personne. Je remercie enfin mes propres services.
Cette seconde délibération avait déjà été annoncée. Elle porte sur un unique sujet : l’amendement n° 86 rectifié portant sur l’article 12. Cet amendement abaisse le barème du malus automobile et conduit à une perte de recettes de 40 millions d’euros. Ces recettes devaient servir à financer le bonus écologique, qui a été renforcé dans le cadre du plan de soutien à la filière automobile. Je ne crois pas que quiconque sur ces bancs souhaite remettre en cause ce dispositif. Dès lors, il faut assurer son financement. Le Gouvernement souhaite donc revenir à sa proposition initiale, qui assure un bon équilibre – j’en ai la conviction – entre les différentes positions qui ont été exprimées sur ces bancs. Plusieurs députés, notamment au sein du groupe écologiste, souhaitaient au contraire renforcer les malus.
L’objet de ce premier amendement est de rétablir la proposition initiale du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Eckert, rapporteur général. Ce débat a déjà eu lieu. Je n’ai rien à ajouter à ce que dit M. le ministre, si ce n’est que je m’étonne toujours des variations des estimations de coût. Quand on va dans un sens ou dans l’autre, les évaluations fournies par les uns ou les autres ne sont pas toujours les mêmes. Ce phénomène n’est pas complètement nouveau ; il n’en pose pas moins question.
J’avais fait remarquer, au moment de l’examen de l’amendement n° 86 rectifié, que le texte gouvernemental était à mi-chemin des demandes de différents députés. Il me paraissait donc trouver le point d’équilibre entre les deux positions. Aussi mon avis est-il favorable à son rétablissement.
M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.
M. Hervé Mariton. L’amendement qui avait été adopté par la majorité me paraissait plutôt bon. Je suis d’accord avec vous, monsieur le ministre : il faut améliorer l’équilibre de ce dispositif. Mais il existe une autre méthode : diminuer les dépenses, et non pas augmenter les impôts. Depuis longtemps déjà, je propose que l’on réduise le bonus. Voilà une illustration très concrète de la méthode que nous proposons : elle trouverait à s’appliquer dans ce cas.
Les députés de la majorité avaient voté un amendement qui permettait de ne pas augmenter exagérément le malus, à la fois pour que l’évolution du dispositif reste raisonnable et maîtrisée, et parce que les enjeux de l’industrie automobile – à laquelle je crois que vous n’êtes pas insensible – commandent d’avoir la main légère.
La préoccupation de ne pas trop augmenter les impôts justifierait le maintien de l’article tel que modifié par l’amendement n° 86 rectifié. Peut-être, pour une fois que nous sommes prêts à appuyer nos collègues de la majorité, serait-il bon qu’ils ne se dérobent pas en route.
(L’amendement n° 1 est adopté.)
M. Hervé Mariton. Merci à nos collègues communistes d’avoir voté avec nous contre cet amendement !
(L’article 12, amendé, est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 2.
M. Pierre Moscovici, ministre. Cet amendement tire les conséquences de l’amendement n° 1 : il adapte par suite les chiffres présentés dans l’état A.
(L’amendement n° 2, accepté par la commission, est adopté.)
(L’article 45 et l’état A annexé, modifiés, sont adoptés.)
M. le président. Nous en avons terminé avec l’examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2013.
Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2013 auraient lieu le mardi 23 octobre après les questions au Gouvernement.
M. le président. Prochaine séance, mardi 23 octobre à quinze heures :
Questions au Gouvernement ;
Votes solennels sur le projet de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 et la première partie du projet de loi de finances pour 2013 ;
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-neuf heures dix.)
Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l’Assemblée nationale,
Nicolas Véron