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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des AFFAIRES CULTURELLES,
FAMILIALES ET SOCIALES

COMPTE RENDU N° 6

(Application de l'article 46 du Règlement)

mardi 17 octobre 2000
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Jean Le Garrec, président

SOMMAIRE

 

pages

- Loi de finances pour 2001 : avis ville (Mme Chantal Robin-Rodrigo, rapporteure pour avis)

2

- Examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (n° 2606)

10

- Information relative à la commission

17

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné pour avis, sur le rapport de Mme Chantal Robin-Rodrigo, les crédits de la ville pour 2001.

La rapporteure pour avis a indiqué qu'après une augmentation de 32 % en 1999 et de 10 % en 2000, le budget du ministère délégué à la ville devrait connaître une nouvelle revalorisation en 2001 puisque les dotations demandées en crédits de paiement progressent de 70 %, atteignant 2,4 milliards de francs, contre 1,4 l'an dernier. Ainsi, ce budget est-il également, pour la troisième année consécutive, celui qui, de tous les ministères, augmente le plus fortement.

Cet effort considérable constitue la traduction financière des objectifs que s'est fixé le Gouvernement dans le cadre des derniers comités interministériels des villes (CIV).

Ainsi, le CIV du 14 décembre 1999 a défini les principes et modalités de mise en _uvre du plan gouvernemental de rénovation et de solidarité urbaines qu'avait annoncé, en septembre de la même année, le Premier ministre.

Ce programme s'organise principalement en trois volets :

· Premier volet : la réhabilitation urbaine, avec les grands projets de ville et les opérations de renouvellement urbain, ainsi que des mesures en faveur des copropriétés dégradées.

· Deuxième volet : la revitalisation économique et sociale. Un des aspects novateurs du programme tient d'ailleurs dans la place qu'il accorde à l'activité économique et dans le refus de cantonner la politique de la ville au seul domaine social.

Des dispositifs sont donc prévus pour alléger dans les quartiers en difficulté les charges des PME, artisans et commerçants (grâce notamment à l'institution d'un fonds de revitalisation économique), ainsi que pour aider à la création d'équipes emploi-insertion et au recrutement d'adultes-relais.

· Troisième volet : le renforcement du rôle des services publics doit passer par un éventail de mesures : meilleur maillage local, désignation de délégués de l'Etat dans les quartiers prioritaires, recrutement de 300 délégués du Médiateur en trois ans, aide à l'accès à la fonction publique pour les habitants des quartiers.

Par ailleurs, le projet de budget tient compte de la conclusion des contrats de ville pour la période 2000-2006. S'il est encore trop tôt pour dresser un bilan du contenu de ces contrats, du moins peut-on d'ores et déjà faire quelques constats :

- 247 contrats de ville devraient être signés d'ici la fin de cette année (contre 214 pour la période 1994-1999) ;

- 80 % sont intercommunaux, contre 40 % précédemment ;

- la majorité des contrats de ville signés l'a été par les conseils généraux ;

- l'implication des conseils régionaux est également plus forte, leur participation financière directe devant dépasser 5 milliards de francs contre 4 précédemment ;

- le Gouvernement a prévu des crédits d'Etat qui devraient, au total, atteindre près de 23 milliards de francs sur l'ensemble de la période.

Il faut souligner le rôle crucial que joueront les équipes de pilotage pour la réussite de ces contrats de ville. Pilotage politique et pilotage technique, chacun de ces niveaux doit prendre les responsabilités qui lui incombent. L'expérience des contrats de ville 1994-1999 a montré l'importance de dépasser les clivages propres aux différentes collectivités territoriales, mais aussi aux administrations de l'Etat, pour définir clairement les orientations de base. Parallèlement, les chefs de projet doivent voir leurs fonctions précisées et confortées.

Il est également indispensable que l'Etat, dont le rôle d'animation, de coordination et d'évaluation, dans la politique de la ville ne saurait être sous-estimé, dispose de moyens en personnel renforcés.

Le projet de budget du ministère délégué à la ville tel qu'il figure dans le fascicule bleu pour 2001 montre que le Gouvernement s'engage fortement en faveur des priorités qu'il a annoncées.

Le fonds de revitalisation économique, dont la création est prévue dans le cadre de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbains en cours d'examen devant le Parlement, devrait être doté en 2001 de 375 millions de francs en crédits de paiement (250 millions de francs en autorisations de programme).

Le dispositif « adultes-relais » sera soutenu par l'Etat à hauteur de 300 millions de francs pour 2001. Les missions confiées à ces adultes visent à « améliorer les rapports sociaux dans les espaces publics ou entre les habitants et les services publics ».

Outil essentiel de financement des contrats de ville, fonctionnant de façon déconcentrée, le fonds d'intervention pour la ville (FIV) bénéficiera de 1 127,8 millions de francs, contre 982,5 pour 2000, soit une augmentation de près de 15 %.

Par ailleurs, 20 millions de francs pourront être mobilisés en 2001 pour aider à la création d'équipes emploi-insertion dans les territoires prioritaires des contrats de ville. Ces équipes devraient servir de relais entre les personnes à la recherche d'un emploi et les différentes structures susceptibles de les aider.

Enfin, 3 millions de francs supplémentaires sont prévus pour financer la désignation de nouveaux délégués de l'Etat : il s'agit de fonctionnaires ou d'agents publics qui sont chargés, sous l'autorité du préfet, d'un rôle de coordination et d'animation des services publics.

Les résultats des actions entreprises devront faire l'objet d'évaluations, particulièrement dans le cadre des contrats de ville, mais aussi au niveau régional et national.

Les données statistiques disponibles actuellement sont anciennes ou parcellaires et des améliorations prochaines sont attendues, notamment grâce à l'exploitation du recensement général de la population de 1999. Mais il s'agit aussi d'affiner le choix des critères. Enfin, il est indispensable que les expériences menées à l'échelon local puissent être mieux connues afin que d'autres puissent aussi en tirer profit : les efforts accomplis par la délégation interministérielle à la ville et les centres de ressources locaux, dont le développement est prévu par le Gouvernement, doivent permettre d'améliorer encore la circulation de l'information en ce domaine.

La seconde partie du rapport insiste sur l'importance, en matière de politique de la ville, d'une démarche coordonnée portant tant sur l'insertion sociale que sur l'insertion économique.

En effet, s'il est évident que, dans les quartiers en difficulté, l'urgence appelle souvent par priorité des mesures purement sociales - notamment concernant la santé et le logement -, pour être pleinement efficace et porter ses fruits à plus longue échéance, la politique de la ville ne saurait, au risque de stigmatiser plus encore les territoires concernés, se limiter à ces domaines, tant il est vrai qu'à l'heure actuelle, pour être intégré dans la société, il faut être intégré économiquement. C'est cette conviction qui inspirait nombre des propositions faites en 1999 par M. Pierre Bourguignon et la rapporteure pour avis, dans le cadre de la mission d'étude que leur avait confiée le Premier ministre.

Faut-il rappeler que le préambule de la Constitution de 1946, repris en 1958, proclame que « chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi » ? Les pouvoirs publics doivent veiller à ce que la reprise économique actuelle n'aboutisse pas à creuser l'écart entre les quartiers et profite à ceux d'entre eux qui sont les plus défavorisés.

Il s'agit tout d'abord de renforcer le tissu économique local, trop souvent exsangue dans les quartiers de la politique de la ville. À cet égard, le Gouvernement a annoncé diverses mesures qui sont pour beaucoup suspendues à la loi SRU ; toutefois, le fonds de revitalisation économique pourrait démarrer à titre expérimental dès cette année puisqu'il a été doté de 100 millions de francs en loi de finances rectificative pour 2000.

Il s'agit aussi, bien évidemment, d'améliorer l'accès à l'emploi des habitants des quartiers.

Bien que la rapporteure pour avis ne dispose pas d'indications chiffrées concernant spécifiquement les quartiers de la politique de la ville, il semble que la création de microentreprises soit un champ porteur, comme le souligne un récent rapport de l'Inspection générale des affaires sociales, se référant aux réalisations de l'ADIE (l'Association pour le droit à l'initiative économique). Mais cela suppose que les porteurs de projets soient activement soutenus, ce qui passe par une meilleure visibilité des dispositifs d'aide existants et l'identification d'un lieu d'accueil et de conseil à leur intention au sein même des quartiers, ainsi que par un soutien financier adapté : trop souvent la multiplicité des conditions à remplir rend l'aide trop tardive pour être utile.

On peut à cet égard craindre que le prêt à la création d'entreprise qui doit être délivré par la BDPME, tel qu'il a été annoncé, étant subordonné comme l'EDEN à l'obligation d'un prêt bancaire complémentaire, il ne puisse bénéficier aux porteurs de projets ayant peu de moyens, cas le plus fréquent dans les quartiers.

Il est clair néanmoins que l'insertion passe le plus souvent par un poste salarié.

Les métiers dits de proximité constituent un gisement d'activité non négligeable pour les résidents des quartiers. Il importe toutefois de ne pas enfermer les intéressés dans des logiques territoriales trop étroites renforçant leur isolement au sein de la cité.

Une telle démarche concerne tout particulièrement les jeunes, dont la situation dans les quartiers reste très préoccupante.

Les efforts déjà engagés doivent être poursuivis et amplifiés afin de mieux structurer les parcours d'insertion qui leur sont proposés. Pour les jeunes les plus marginalisés, les programmes existants d'accès à l'emploi, tels que TRACE, doivent être précédés d'actions préparatoires à dominante plus sociale, voire médicale. Pour beaucoup d'autres, les dispositifs d'insertion par l'économique (associations intermédiaires, entreprises d'insertion et d'interim d'insertion, régies de quartier, chantiers d'insertion, etc...) restent une étape indispensable dont il importe de préserver l'efficacité, en réfléchissant aux éventuelles possibilités d'amélioration.

Construire un parcours d'insertion avec un jeune suppose aussi de lui donner, plus encore que l'envie d'un emploi, le goût d'un métier et, pour cela, de lui permettre de voir, le plus concrètement possible, ce en quoi il consiste. Construire un tel parcours d'insertion suppose enfin que soient résolus un certain nombre de problèmes matériels. Il n'est pas réaliste de demander à un jeune de s'investir dans un programme lourd d'accès à l'emploi s'il n'est assuré d'un minimum de continuité dans ses moyens d'existence. La rapporteure pour avis n'est nullement favorable à l'instauration d'un RMI-jeune. En revanche, l'assouplissement des conditions d'attribution des aides des FAJ lui semble une piste à étudier.

Au total, on recense de nombreux dispositifs mis en place pour aider les habitants des quartiers, jeunes ou moins jeunes, à prendre toute leur place dans la vie économique et sociale de la cité. Certains, sans être spécifiques à la politique de la ville, peuvent également les concerner, par exemple dans le cadre plus général de la lutte contre l'exclusion. Bien sûr, tous sont par définition perfectibles. Mais sans doute est-il aussi important, devant la multiplicité, d'essayer de réduire les procédures redondantes, de développer des synergies, de favoriser le partenariat entre les acteurs. Il s'agit là vraisemblablement d'une des conditions essentielles pour que la politique de la ville ait toutes ses chances de succès.

En conclusion, la rapporteure pour avis, après avoir déploré de ne pas disposer, à ce jour, d'une récapitulation exhaustive de l'effort public global qui sera consacré à la ville en 2001, a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du ministère de la ville.

Un débat a suivi l'exposé de la rapporteure pour avis.

Après s'être félicité de l'importance des moyens accordés par le présent budget au ministère de la ville, le président Jean Le Garrec a fait part de la difficulté à analyser l'efficacité des dépenses relatives à ce secteur. En la matière, le manque d'outils statistiques appelle un suivi plus approfondi dans le but d'évaluer l'ensemble des dispositifs en vigueur.

M. Denis Jacquat a, pour sa part, considéré que la clé de voûte des politiques de la ville était la politique de l'emploi. Par ailleurs, si les médias ont pu mettre en avant certains effets d'aubaine du fait de la création des zones franches urbaines, ce dispositif d'exonération a néanmoins des effets très positifs. Il serait cependant souhaitable que les entreprises bénéficiant de ces exonérations soient obligées d'embaucher plus que 20 % de personnes issues des zones éligibles. En outre, le succès du dispositif TRACE plaide pour son extension aux adultes. Enfin, le dispositif du plan d'aide au retour à l'emploi (PARE) ne s'adresse qu'aux chômeurs indemnisés et laisse, en conséquence, de côté 58 % des personnes au chômage. Pour cette raison, il est indispensable de mettre en place des dispositifs d'insertion plus contraignants, d'autant que le revenu minimum d'insertion (RMI) est souvent attribué sans qu'aucune mesure d'insertion n'ait été parallèlement mise en _uvre.

M. Bernard Perrut a considéré qu'en matière de politique de la ville l'évaluation qualitative devait primer sur l'approche purement quantitative. A ce titre, les contrats de ville, les politiques de réhabilitation des quartiers et les opérations de démolition doivent faire l'objet d'un bilan précis. Dans le même temps, la politique de la ville ne doit pas avoir pour conséquence d'opposer les quartiers entre eux en vertu de critères souvent trop restrictifs. Il serait préférable que cette politique bénéficie aux agglomérations dans leur ensemble. S'agissant du programme TRACE, il a des effets positifs, mais ne permet malheureusement pas aux jeunes créateurs d'entreprises, notamment artisans, de financer leur installation. Enfin, le montant des crédits alloués pour les expertises et colloques sur la politique de la ville, à hauteur de 4 millions de francs, est critiquable et suscite de nombreuses interrogations.

Mme Hélène Mignon a jugé que la politique de la ville avait un caractère foncièrement interministériel et, qu'à ce titre, elle intéressait au premier chef l'éducation nationale. Malgré les résultats satisfaisants du programme TRACE, les lacunes du suivi psychologique et social demeurent très fortes. Le manque de repères des jeunes des quartiers difficiles appelle une politique interministérielle qui s'applique dès le plus jeune âge. Une telle politique est en effet le seul moyen de valoriser aux yeux de ces jeunes l'exercice d'un emploi stable.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler a considéré que la lutte contre l'exclusion était une priorité fondamentale et qu'en la matière, les programmes d'insertion par l'économie constituaient un outil pertinent, dans la mesure où ils sont individualisés et adaptés à la situation de chacun. Par ailleurs, les contrats de ville constituent un instrument efficace pour fédérer les énergies des élus locaux et des services territoriaux de l'Etat. L'implication des préfets et des responsables des collectivités locales est donc indispensable à la mise en _uvre de politiques transversales efficaces.

Dans les quartiers, la situation des personnes âgées souvent isolées, dans certains cas très démunies financièrement, et souvent relativement peu intégrées dans la vie sociale, reste insuffisamment prise en compte. Nombre de ces personnes souffrent d'une réelle solitude ; elles demeurent quasiment recluses dans leur domicile dont elles n'osent guère sortir. Parfois de lourds handicaps physiques les empêchent de mener une vie normale sans une aide extérieure. Il est dommageable que les contrats de ville ne traitent que très rarement ou marginalement de la nécessaire dimension intergénérationnelle qui permettrait à ces publics largement négligés de mener une existence plus facile.

M. Maxime Gremetz a fait les observations suivantes :

- Il est certain que la politique de la ville doit se concevoir comme la résultante de toute une série d'actions devant être menées dans des domaines très divers. Cette politique est par définition de nature interministérielle, ce qui explique les difficultés rencontrées par le ministre en charge de ce dossier à peser sur les processus de prises de décision. L'amélioration de la vie dans les quartiers suppose en effet que soient entreprises simultanément et de manière concertée des actions fortes tant dans les domaines du logement social ou de la couverture maladie que dans ceux de l'intégration scolaire ou de la sécurité. Or ces secteurs dépendent, comme chacun sait, des sphères d'intervention de ministres sur lesquels le ministre chargé de la ville n'a aucune autorité institutionnelle.

- La violence dans les quartiers difficiles, illustrée par exemple par les incendies de voitures, trouve souvent ses racines dans le développement du marché de la drogue. Les trafiquants profitent alors dans une quasi-impunité d'une véritable économie souterraine qui gangrène le développement économique de ces quartiers.

- La méthode utilisée pour conclure les contrats de ville est éminemment critiquable : il n'est pas normal que ces contrats soient élaborés au sein de quelques cercles fermés par des responsables coupés des réalités concrètes qui ne prennent pas même la peine de consulter les citoyens directement concernés et les élus locaux. Il faut dénoncer avec virulence un tel manque de démocratie et de dialogue en ce domaine.

- Le PARE intégré dans le projet de convention sur l'UNEDIC représente un danger réel pour les salariés et les demandeurs d'emplois. Ce projet, soutenu par le MEDEF contre l'avis d'organisations syndicales majeures comme la CGT et la CGT-FO, constitue une grave menace sur le régime d'assurance chômage et sur la santé du mouvement social en France.

- Il convient de mettre en place un nouveau contrat de travail de retour à l'emploi, les dispositifs actuels d'accompagnement à l'insertion dans le monde professionnel restant déficients. Dans le prolongement des réflexions aujourd'hui engagées par plusieurs députés des groupes de la majorité, un outil rénové pourrait opportunément combler le vide actuel.

- La création des zones franches présente en général bien plus d'inconvénients que d'avantages. Il n'est pas rare de constater que des entreprises localisées en dehors du champ d'une telle zone prennent la décision de fermer leurs locaux pour s'implanter à l'intérieur du périmètre d'une zone franche, et ce, dans le seul but de bénéficier des exonérations de charges sociales et fiscales sans qu'un seul emploi soit créé. Ce mécanisme pervers aboutit en réalité à une véritable dilapidation des fonds publics au profit d'entreprises et de sociétés multinationales parfois très prospères.

M. Pierre Cardo a souligné les points suivants :

- Il convient de se féliciter de l'augmentation globale du budget consacré en 2001 à la politique de la ville, même s'il faut adopter en la matière une attitude faite de modestie car depuis près de vingt ans, la politique de la ville peine à définir son champ d'intervention.

- La tâche du ministre en charge de cette politique paraît particulièrement malaisée. Même si l'actuel ministre poursuit avec détermination et force son action, il semble évident que cette politique mériterait, afin d'être réellement efficace, d'être rattachée aux services du Premier ministre. Seul le Premier ministre possède en effet l'autorité nécessaire pour imposer à l'ensemble des ministères concernés - l'Education nationale, la Justice, l'Intérieur, l'Emploi et la solidarité notamment - un certain nombre d'actions.

- Cette politique, ambitieuse dans ses principes, continue de se heurter dans les faits à des lourdeurs et des lenteurs administratives préjudiciables à son efficacité. Les dispositifs se sont accumulés et complexifiés au fil du temps sans réelle cohérence.

- La politique de la ville semble continuellement hésiter entre deux niveaux d'intervention que sont le quartier d'une part et d'autre part l'agglomération. L'échelle de la commune, qui paraît dans bien des cas le plus pertinent afin de développer une vision globale des actions à mener, n'est pas privilégiée. Quant à l'intercommunalité, elle continue de faire peur à un certain nombre de petites communes qui redoutent l'hégémonie d'une plus grande commune. Il faut plaider pour que la politique de la ville ait, comme son nom l'indique, la ville pour cadre naturel.

- Cette politique se fonde fréquemment sur des discours lénifiants et des v_ux pieux, tandis que les dispositifs créés ont tendance à se superposer de telle sorte qu'il est aujourd'hui difficile aux travailleurs sociaux de dégager du temps pour des visites sur le terrain. Ils sont en effet accaparés par la gestion quotidienne d'une multitude de mécanismes et de formalités en tous genres. La présence institutionnelle a ainsi malheureusement tendance à s'éloigner de la réalité du terrain, ce qui accroît l'impression de déconnexion entre la population et des institutions pourtant centrales comme l'école, la police, la justice, les institutions sociales et de logement. Parmi les habitants de ces quartiers, le sentiment d'être rejetés par la société se nourrit précisément de ce décalage grandissant.

- La politique de la ville, qui devrait être conçue comme un plus pour les populations auxquelles elle s'adresse, ne représente bien souvent qu'un moyen de compenser partiellement les déficiences des institutions sur le terrain. Au lieu d'apporter une plus-value en termes de bien-être, son action consiste donc uniquement à tenter de combler les vides laissés par des services de l'Etat en déshérence. Les manques de moyens dévolus à l'éducation nationale, à la police et à la justice sont en effet patents dans des quartiers où des services de qualité seraient précisément les plus nécessaires. A titre d'exemple, on note souvent que les enseignants envoyés dans ces quartiers une fois leur formation à l'IUFM achevée, n'ont reçu aucune formation spécifique quant aux moyens de gérer les publics d'élèves en difficultés auxquels ils sont confrontés. D'une manière générale, la politique de la ville devrait, pour être efficace, permettre des actions en amont et non pas exclusivement en aval.

- Les maires sont supposés être au sein de leur commune les chefs d'orchestre entre les différents pans de la politique de la ville. Ils n'ont pour ce faire aucun pouvoir et ne peuvent traiter localement qu'avec des exécutants. Même s'ils souhaitent donner leur opinion sur la façon d'améliorer le cas échéant le fonctionnement du service public de l'enseignement, de la justice ou de la police, ils n'ont aucun moyen d'influer sur le cours des événements en ces domaines. Il est donc aujourd'hui plus que jamais nécessaire de rapprocher le pouvoir du territoire.

En réponse aux intervenants, la rapporteure pour avis, Mme Chantal Robin-Rodrigo, a fait les remarques suivantes :

- Si de 1994 à 1999, la politique de la ville a été axée autour de la notion de quartier, ce n'est plus le cas désormais, puisque le cadre naturel de cette politique est aujourd'hui l'agglomération. 80 % des contrats de ville ont aujourd'hui une dimension intercommunale et traitent de l'ensemble des questions liées au logement, à l'éducation nationale, aux services sociaux par exemple.

- Il appartient aux acteurs locaux, avec le concours des sous-préfets à la ville dont l'équipe devrait être renforcée, de s'investir dans les différents projets mis en _uvre. De la coordination entre les diverses initiatives découle la réussite de la démarche toute entière.

- Le PARE a vocation à concerner 42 % des demandeurs d'emploi recensés. Au-delà de la question de l'indemnisation du chômage, se pose le problème de l'insertion réelle dans le monde du travail pour les bénéficiaires du RMI. Cette dimension est malheureusement trop souvent négligée, y compris par les responsables départementaux alors que 20 % des crédits alloués pour les Rmistes proviennent des départements. On ne peut que se féliciter de ce que, dans plusieurs départements, des agents de l'ANPE aient été détachés et travaillent en concertation avec les travailleurs sociaux et les chargés du développements économique afin de donner un contenu concret aux actions d'insertion proposées aux personnes concernées.

- Le comité interministériel en date du 14 décembre 1999 a prévu un soutien financier de l'Etat pour le recrutement d'adultes-relais, ce qui complète dans une certaine mesure les dispositifs existants spécifiquement tournés vers les jeunes demandeurs d'emploi.

- Les crédits alloués à hauteur de 4 millions de francs pour 2001 pour les expertises et colloques restent au même niveau que l'année précédente. Ils permettent notamment d'organiser des journées de réflexion sur certains aspects de la politique de la ville et favorisent la connaissance par les différents acteurs des outils à leur disposition.

- Il serait nécessaire d'aider davantage les jeunes créateurs d'entreprises qui bénéficient aujourd'hui de certains soutiens au démarrage de leurs activités, mais sur un laps de temps souvent insuffisant. Un véritable suivi de ces créations d'entreprises pendant une période qui pourrait être de trois ans, augmenterait les chances d'insertion durable de ces jeunes dans le monde du travail.

- Il convient de lutter contre la « ghettoïsation » des quartiers dits difficiles et d'éviter de cantonner l'emploi des populations concernées dans le seul périmètre de leurs quartiers d'habitation.

- De véritables équipes devraient être mises en place autour des sous-préfets à la ville. Seuls, ces derniers ne peuvent impulser des actions réellement significatives.

Conformément aux conclusions de la rapporteure pour avis, la commission a ensuite donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la ville pour 2001.

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M. Bernard Accoyer a exprimé le souhait que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales se saisisse pour avis du projet de loi portant habilitation du Gouvernement à transposer, par ordonnances, des directives communautaires dont l'un des objets est la mise en _uvre d'un nouveau code de la mutualité et qui à ce titre doit être examiné avec attention par la commission la plus concernée, celle des affaires sociales.

M. Alfred Recours a relevé que la procédure d'habilitation allait permettre de transposer en droit interne une cinquantaine de directives européennes sur des sujets très divers intéressant potentiellement, les uns, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, les autres, la commission des finances, d'autres encore, la commission de la production et des échanges. Dans le cas du code de la mutualité, les dispositions concernées relèvent autant du secteur social - qui ressort naturellement de la compétence de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - que de celui des assurances - qui relève de la commission des finances. Il faut souligner enfin que l'adoption de la loi sur la couverture maladie universelle a par ailleurs permis de résoudre la question des compléments de couverture maladie pour les concitoyens rencontrant le plus de difficultés.

M. Yves Bur, après avoir souligné que la procédure d'habilitation conduisait à un désaisissement du Parlement français au profit du législateur européen et du Gouvernement, s'est dit sceptique quant au caractère complet des consultations ayant été menées en amont de la rédaction du code de la mutualité. Il n'est nullement certain que l'ensemble des acteurs concernés soient pleinement satisfaits par le texte.

M. Jean-Luc Préel a contesté l'urgence à transposer la directive concernant les mutuelles sans débat préalable à l'Assemblée nationale.

M. François Goulard a estimé qu'en choisissant cette procédure le Gouvernement avait surtout voulu éviter un débat délicat sur le problème de l'action sociale des mutuelles.

Le président Jean Le Garrec a estimé que la procédure d'habilitation était indispensable pour sortir du retard qui caractérise la France en matière de transposition de directives. Le code de la mutualité est un texte long et lourd qui ne pouvait être inscrit rapidement dans un ordre du jour déjà surchargé. Dès lors qu'il y a un large consensus dans le monde mutualiste tant sur la méthode que sur le projet de code, la procédure d'habilitation ne pose pas de problème. Quant à une saisine pour avis, elle paraît sans grand intérêt sur ce type de projet. Rien n'interdit aux groupes de l'opposition de déposer un amendement retirant du champ de l'habilitation les directives sur les assurances et la refonte du code de la mutualité. Le véritable problème est le contenu des ordonnances prises en vertu de l'habilitation et la manière dont le Parlement doit dire son mot sur ce contenu.

*

La commission des affaires culturelles a ensuite examiné, sur les rapports de M. Alfred Recours, pour les recettes et l'équilibre général, Mme Marie-Françoise Clergeau, pour la famille, M. Claude Evin, pour l'assurance maladie et les accidents du travail et M. Denis Jacquat, pour l'assurance vieillesse, le projet de loi de financement sur la sécurité sociale pour 2001 (n° 2606).

M. Alfred Recours a présenté son rapport pour les recettes et l'équilibre général.

Pour la deuxième année consécutive, l'ONDAM est rebasé c'est-à-dire qu'il est calculé par rapport aux prévisions de dépenses constatées en 2000 et non par rapport à l'objectif initialement voté. Avec un taux de progression de 3,5 %, il permettra d'assurer un financement suffisant de l'offre de soins. Le contexte économique actuel devrait en tout cas faciliter le débat sur cette loi de financement, la hausse des ressources autorisant des améliorations dans toutes les branches, ainsi que la satisfaction de plusieurs demandes présentées depuis longtemps.

Ainsi, une des mesures majeures de ce projet de loi est constituée par la réduction dégressive de CSG et de CRDS pour les salariés les plus modestes. Cette disposition, qui s'intègre dans le plan triennal de baisse des impôts proposé par le Gouvernement, permettra notamment de faire profiter des fruits de la croissance les salariés non imposables qui ne bénéficieront pas des baisses de l'impôt sur le revenu. Cette réduction concerne les salariés payés au SMIC ainsi que, de manière dégressive, tous les salaires inférieurs à 1,3 fois le SMIC. Le groupe socialiste proposera, par voie d'amendement, de relever ce seuil à 1,4 fois le SMIC, l'objectif étant, à terme, de couvrir les salaires allant jusqu'à 1,8 fois le SMIC.

Si cette mesure semble socialement juste et légitime, il faut toutefois regretter que le dispositif proposé par le Gouvernement laisse de côté les chômeurs, au prétexte que ceux-ci ne touchent pas un salaire mais un revenu de substitution. Tout chômeur devant être regardé comme un salarié en puissance, il sera proposé, par voie d'amendement, de remédier à cette lacune en ce qui concerne l'exonération de CRDS.

Il existe d'autres catégories de salariés qui sont de fait exclus du dispositif proposé : ce sont, par exemple, les salariés du bâtiment et des autres professions dont les congés sont mutualisés au sein de caisses de compensation. Ainsi, les salariés de ces secteurs ne peuvent, en l'état actuel du texte, bénéficier de la réduction de CSG et de CRDS sur les indemnités qui doivent être versées au titre des congés payés. De même, les ministres du culte, concierges ou vendeurs à domicile ne sont pas visés explicitement par le texte. Il convient d'y remédier.

De nombreuses autres questions vont venir en débat. Les retraites agricoles bénéficient de nouveau cette année d'une revalorisation importante. Il est prévu de donner un « coup de pouce » aux retraités non imposables par une exonération de CRDS. Avec un taux de progression de l'ONDAM de 3,5 %. Il serait incompréhensible que le sort de certaines professions comme les masseurs-kinésithérapeutes ne puisse pas être amélioré.

Les amendements qui seront proposés feront l'objet d'un véritable financement. Celui-ci sera par exemple trouvé par l'exclusion des « faux non imposables » du bénéfice de la réduction de la CSG, le financement du fonds de préretraite de l'amiante par d'autres recettes que les droits sur les tabacs ou par l'augmentation des minima de perception sur les tabacs.

Un débat a suivi l'exposé du rapporteur.

M. Jean-Luc Préel, tout en se félicitant de ce débat annuel sur la sécurité sociale, a regretté le manque de clarté et de lisibilité du texte et des mesures proposées. Les dépenses médicales ont été cette année encore largement supérieures aux prévisions, ce qui nécessite une nouvelle modification a posteriori de l'ONDAM. La comparaison de cet objectif d'une année sur l'autre est ainsi vidée de tout son sens. On ne peut certes qu'être d'accord avec la prise en compte des dépenses réelles mais on doit s'interroger quant à l'utilité d'un vote par le Parlement sur l'ONDAM s'il n'y a pas de loi de financement de la sécurité sociale rectificative en cours d'année.

Il a ensuite posé les questions suivantes :

- Sur quelles bases objectives l'ONDAM est-il fixé ? Dès lors que les sanctions en cas de dépassement ne sont pas appliquées, est-il envisagé de les supprimer ? Comment expliquer les différences en la matière entre les divers types de dépenses d'assurance maladie ? Ne faudrait-il pas prévoir pour l'hôpital la possibilité de réévaluer son objectif de dépenses en cours d'année ?

- Est-il opportun de remettre en cause l'universalité de la CSG, qui constituait jusqu'alors un prélèvement d'une grande simplicité ? Pourquoi ne pas avoir baissé un autre prélèvement ?

- Qu'en est-il du FOREC et, plus largement, du financement des trente-cinq heures ? Est-il logique de continuer à consacrer les droits de consommation sur les alcools et les tabacs au financement de la réduction du temps de travail plutôt qu'à une politique préventive en matière de santé qui fait défaut ?

- A combien se chiffrent les exonérations de cotisations sociales qui ne sont pas compensées par l'Etat ?

M. Maxime Gremetz a estimé que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale devait être examiné à la lumière d'un contexte économique et social qui n'est plus le même que l'an dernier. Alors que les entreprises dégagent des profits colossaux, que l'argent coule à flots et que les comptes de la sécurité sociale sont, pour la première fois depuis bien longtemps, devenus excédentaires, on ne peut plus dire qu'on ne peut rien faire. En effet, il faut prendre en compte non seulement les facteurs économiques mais aussi les impératifs sociaux. De même que le budget 2001 se veut celui de la justice fiscale et de la justice sociale, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale doit également prendre en compte l'ensemble des besoins.

Dans un contexte de croissance, on devrait pouvoir disposer des moyens de financements adaptés. Se pose précisément la question du mode de financement de la sécurité sociale. Il semble paradoxal de devoir compter sur la consommation d'alcool et de tabac ou sur la pollution pour disposer d'une bonne sécurité sociale. Un tel mode de financement constitue un cercle vicieux et la proposition du rapporteur d'augmenter le prix du tabac n'est certainement pas une solution efficace.

Après avoir rappelé que son groupe s'était opposé à la création de la CSG, M. Maxime Gremetz a indiqué qu'il fallait pratiquer une réduction au-delà de 1,3 fois le SMIC qui constitue un niveau notoirement insuffisant au regard de l'importance des exonérations de cotisations sociales patronales. Cette mesure exclut à la fois des millions de salariés, les retraités et les chômeurs. Elle est concomitante de l'absence de mesures pour les familles, et l'insuffisance du « coup de pouce » pour les pensions de retraite eu égard à la perte de pouvoir d'achat subie par cette catégorie de la population depuis plusieurs années.

Des questions essentielles sont posées pour le financement des dépenses sociales et elles ne sont pas abordées par le présent projet. Les revenus financiers ne sont pas suffisamment mis à contribution, la contribution sociale sur les bénéfices (CSB) n'est pas augmentée et il existe de nombreux effets de seuil induits par la CMU qui nécessitent de relever le plafond de ressources.

M. Pierre Hellier s'est élevé contre l'extrême confidentialité qui entoure les travaux préparatoires à la détermination de l'ONDAM et il a dénoncé les sanctions prises à l'encontre de professionnels de santé comme les infirmières ou les kinésithérapeutes, qui sont pourtant des professions prescrites. Ce dispositif conduit à démotiver les professionnels de santé. Par ailleurs, une mise à niveau du parc d'équipement local de type IRM ou scanner est nécessaire. Il faut enfin souligner que les effets pervers de la CMU conduisent les conseils généraux à mettre en place des prestations complémentaires.

M. Bernard Accoyer s'est étonné de l'absence d'un débat préalable, dans le cadre du rapport annexé, sur les priorités du Gouvernement en matière sanitaire et sociale. Il a dénoncé le caractère peu fiable du mécanisme de l'ONDAM ainsi que le financement de la réduction du temps de travail par des recettes fiscales qui font par ailleurs cruellement défaut pour d'autres dépenses sociales que les trente-cinq heures. Le présent projet de loi de financement se caractérise par le « siphonage » des régimes sociaux pour financer de multiples fonds, l'absence d'encouragements en direction des familles, le maintien de statu quo pour les régimes spéciaux de retraite. On doit soigner toujours mieux avec de moins en moins de moyens et une branche maladie toujours déficitaire. En trois ans, 160 milliards de francs supplémentaires ont été prélevés sans amélioration du niveau de protection sociale.

M. Yves Bur a souligné la mauvaise lisibilité du financement de la sécurité sociale et le manque de transparence de la gestion de nombreux fonds. Il s'est également interrogé sur la nécessité de voter un ONDAM de plus en plus virtuel et sur l'usage qui sera fait des vingt milliards de francs que doit finalement reverser l'UNEDIC à l'Etat.

Après avoir rappelé le caractère improvisé du présent projet et l'incroyable complexité du financement de la protection sociale à laquelle il a conduit, M. François Goulard a constaté des difficultés dans l'articulation entre loi de finances et loi de financement de la sécurité sociale. Ainsi, la TGAP ne sera pas discutée cette année dans le cadre du présent projet mais en collectif budgétaire de fin d'année. La création d'une réduction de la CSG entraîne aussi une grande incohérence avec la non-prise en compte de la situation familiale des contribuables.

En réponse aux intervenants, M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général, a apporté les précisions suivantes :

- Hérité du plan Juppé de 1995, l'ONDAM était mal défini. Depuis deux ans, le Gouvernement l'actualise en tenant compte des dépenses constatées, ce qui permet de disposer d'un environnement statistique et comptable enfin satisfaisant. Les dépenses remboursées correspondent d'une certaine façon aux besoins constatés de santé de la population. Pour autant, l'ONDAM est un objectif de dépenses et non un mécanisme de régulation budgétaire. Le taux de progression de l'ONDAM, qui n'est pas artificiel, est le même que celui du PIB en moyenne sur les années 1997-2000.

- En ce qui concerne la CSG, il faut bien rappeler que le but d'un impôt n'est pas d'être simple, la question étant de savoir s'il est juste.

- Le FOREC est financé sur les mêmes bases que l'année dernière. La TGAP sera discutée en loi de finances cette année car elle comporte trop d'aspects fiscaux et écologiques par trop éloignés du domaine social. Au demeurant, les conditions générales de l'équilibre financier figurent dans le présent projet. Par ailleurs, il faut rappeler que le FOREC reverse l'intégralité de ses recettes à la sécurité sociale dans le cadre des exonérations de cotisations sociales. On peut donc dire qu'il finance la protection sociale.

- Depuis 1997, aucune exonération de cotisations n'est restée non compensée. Il subsiste un stock, antérieur à 1994, de 18 milliards de francs.

- Il est effectivement souhaitable que les salaires bénéficient de la réduction de la CSG au même niveau que les exonérations de cotisations patronales, à savoir 1,8 fois le SMIC.

- Pour ce qui concerne les équipements médicaux lourds (IRM), des dispositions récentes ont été prises par le Gouvernement pour abaisser ce seuil.

- La complexité des circuits de financement des divers fonds existants est indéniable, une attention soutenue révèle cependant leur lisibilité. Ainsi, le fonds de réserve pour les retraites doit-il disposer de 55 milliards de francs à la fin de l'année 2001. Plutôt que de stigmatiser les modes de versement, il faut mieux se poser la question de la gestion et du contrôle de ces sommes, qui sont loin d'être négligeables.

- Le mécanisme qui a présidé à la création de la CADES en 1996 consistait à faire payer par les générations futures les dettes du passé. Grâce à la croissance, cette caisse connaît actuellement une bonne situation financière, avec deux ans d'avance de CRDS qui permettent de financer des mesures d'exonération.

- Les 20 milliards de francs que devrait reverser l'UNEDIC ne peuvent pas encore figurer dans les comptes.

- En ce qui concerne l'application de la CMU, le seuil est passé du niveau du RMI à 1,5 fois le RMI, ce qui a permis l'unification de dispositifs disparates en fonction des départements. Les collectivités territoriales peuvent compléter ces interventions sociales en cas de besoin.

- L'amélioration de l'articulation entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale relève de la réforme de l'ordonnance organique du 2 janvier 1959 qui est actuellement soumise à une commission spéciale de l'Assemblée.

Le président Jean Le Garrec a estimé qu'il convenait d'être prudent sur la possibilité de définir les besoins de santé de la population car de nombreux paramètres entrent en jeu. En ce qui concerne la maîtrise des dépenses d'assurance maladie, la France est un des rares pays d'Europe où la progression des dépenses de santé n'est pas supérieure au PIB. Enfin, il faut rappeler que l'OMS a classé la France avec un excellent rapport entre la qualité et les coûts des soins de santé.

Mme Marie-Françoise Clergeau a ensuite présenté son rapport sur la famille.

Elle a tout d'abord indiqué que les familles bénéficieraient en 2001 de 6 milliards de francs de mesures nouvelles, principalement destinées, selon les orientations retenues lors de la Conférence de la famille, au développement de l'accueil de la petite enfance, à la réforme des aides au logement et au congé pour enfant malade. La branche famille de la sécurité sociale devra également prendre en charge un certain nombre de dépenses, comme la majoration des pensions de retraite pour enfants à charge qui sera transférée sur sept ans, et la totalité de l'allocation de rentrée scolaire. Pour cette dernière, il faut rappeler qu'il avait été dit qu'elle serait à la charge de cette branche dès qu'elle serait en mesure de l'assumer financièrement.

La première des priorités retenues est la réconciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle.

Pour cela, il convenait tout d'abord d'améliorer les conditions d'accueil de la petite enfance. L'accueil en crèche, qui concerne les enfants de moins de trois ans, bénéficie aujourd'hui à 200 000 enfants de façon permanente et 330 000 enfants de façon occasionnelle, principalement en zone urbaine. Les différentes mesures proposées apportent des améliorations tout à la fois qualitatives et quantitatives aux modes d'accueil des petits enfants :

- amélioration de l'allocation versée aux familles employant une assistante maternelle (AFEAMA) ;

- création d'un fonds d'investissement de 1,5 milliard de francs pour développer les lieux d'accueil de la petite enfance, le dispositif, fortement incitatif, étant destiné à encourager les projets les plus innovants ;

- renforcement des dotations du fonds d'action sociale de la CNAF (FNAS) (1,7 milliards de francs), afin, notamment, de majorer les aides au fonctionnement des structures d'accueil collectif,

- réforme du financement des crèches pour encourager les implantations dans les zones les moins favorisées.

Enfin, il convient de souligner l'importance du décret du 1er août dernier relatif aux établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans. Si ces mesures ne trouvent pas de traduction budgétaire directe elles consacrent cependant la nécessaire diversité des structures d'accueil et renforce leur flexibilité.

Mais l'amélioration des rapports entre vie familiale et vie professionnelle passe également par l'aménagement du retour à l'exercice d'une activité professionnelle. Le projet de loi de financement rend donc possible le cumul temporaire de l'allocation parentale d'éducation avec une activité professionnelle et assortit cette mesure d'un nouveau dispositif d'aide à la reprise d'activité pour les femmes les plus en difficulté.

Le deuxième volet prioritaire du budget de la famille est la réforme des aides au logement.

Le principe d'une simplification et d'une harmonisation des barèmes du dispositif d'aides au logement avait été arrêté par la Conférence de la famille de juillet 1999. Le projet de loi de financement prévoit donc la mise en place d'un barème intermédiaire dès janvier 2001, avant d'aboutir à un nouveau barème totalement unifié en 2002. Ce nouveau système permettra notamment aux personnes ayant des revenus inférieurs ou équivalents au RMI de percevoir la même aide que les bénéficiaires de ce minimum social. Son coût total est évalué à 6,5 milliards de francs, financé, sur deux ans, par la branche famille et l'Etat.

Le projet de loi de financement permettra enfin de développer une politique de soutien aux parents en difficulté, principalement à travers deux mesures :

- la création d'un congé enfant malade destiné à aider les familles à s'organiser lorsqu'un de leurs enfants est gravement malade ou gravement blessé. Une allocation de présence parentale sera versée au parent cessant son activité ou décidant de travailler à temps partiel, voire aux deux parents quand ceux-ci passeront tous les deux à temps partiel. La rapporteure a précisé qu'elle proposerait d'améliorer le dispositif présenté afin de mieux prendre en compte la situation des familles monoparentales.

- le développement du soutien à la fonction parentale à travers les orientations budgétaires retenues pour le FNAS : actions collectives menées par les centres sociaux, actions d'animations sociales dans les autres structures, soutien aux lieux d'accueil parents-enfants, actions de médiation familiales. Ces actions bénéficieront de 300 millions de francs supplémentaires.

Un débat a suivi l'exposé de la rapporteure.

Mme Hélène Mignon s'est félicitée de la création du congé et de l'allocation pour enfant malade et du développement des structures de garde des jeunes enfants. Il est tout à fait souhaitable d'encourager leur diversité et la flexibilité de leur fonctionnement, tant par les financements que par des mesures réglementaires. De même, la formule des classes- passerelles entre la crèche et la maternelle pour les enfants de deux à trois ans est bienvenue.

M. Jean-Pierre Baeumler a approuvé la volonté d'assurer une meilleure conciliation entre vie familiale et vie professionnelle dans un esprit de parité. Il a également insisté sur les efforts nécessaires pour soutenir les parents dans l'exercice de leur responsabilité éducative car ceux-ci sont trop souvent démissionnaires.

M. Bernard Perrut, après avoir reconnu l'intérêt de certaines des innovations proposées par le projet de loi de financement pour 2001, et notamment de la création du congé pour enfant malade, s'est interrogé sur les conditions de préparation de cette loi de financement. Si l'on en croit les représentants de la CNAF et de l'UNAF, ces organismes n'ont pas été consultés sur les termes de l'équilibre financier proposés pour 2001, et tout particulièrement sur les choix effectués en matière de transferts de financement, qui viennent grever la capacité d'action du régime pour l'avenir.

M. Jean-Luc Préel a fait les observations suivantes :

- L'absence de concertation avec les organisations familiales s'est traduite notamment par le vote négatif du conseil d'administration de la CNAF sur le projet de loi de financement.

- L'harmonisation des règles d'attribution des prestations familiales n'a toujours pas progressé.

- Il est curieux d'avoir créé un fonds d'investissement pour les crèches dont l'extinction est déjà programmée au lieu d'une simple ligne budgétaire affectée à ces dépenses.

M. Marcel Rogemont a déclaré trouver trois motifs de satisfaction dans le volet famille du projet de loi :

- La réforme des aides au logement.

- L'aménagement de l'AFEAMA pour mieux prendre en compte les revenus des parents.

- Le retour à une action sociale collective qui permettra notamment la transmission des savoirs domestiques pour aider les parents à assumer leurs responsabilités envers leurs enfants.

En réponse aux intervenants, Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour la famille, a apporté les précisions suivantes :

- Plutôt que de parler de parents démissionnaires, il vaudrait mieux de parler de parents désemparés.

- Il est certain que les organisations familiales se sont plaintes de l'absence de consultation sur les mesures décidées tardivement telle que la prise en charge par la CNAF de la majoration de pension servie aux parents de trois enfants ou plus. Il ne faut cependant pas oublier tout le processus de concertation et de dialogue permanent mené avec elles dont la conférence annuelle de la famille est l'un des points forts.

- La CNAF travaille activement sur l'harmonisation et la simplification de ses règles internes. En ce qui concerne les dispositions législatives et réglementaires, il faut rappeler que la complexité résulte aussi du souci de prendre en compte la diversité des situations des bénéficiaires et de corriger les inégalités.

- La formule du fonds d'investissement pour les crèches permet de réaffecter les sommes non utilisées au cours d'un exercice.

Information relative à la commission

Mme Martine Lignières-Cassou a été nommée rapporteure sur le projet de loi relatif à l'interruption volontaire de grossesse et à la contraception - n° 2605.


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