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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 34

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mardi 4 mai 1999
(Séance de 16 heures 15)

Présidence de M. Roland Blum, secrétaire

SOMMAIRE

 

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– Corruption d'agents étrangers dans les transactions internationales (nos 1564 à 1569) - rapport


3


– Accord de partenariat CEE / Mexique (n° 1194) - rapport


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– Rectification de la frontière franco-suisse (nos 1427 et 1428) - rapport ..........


5


– Convention OTAN/Partenariat pour la paix (n° 1426) - rapport ..........


6

   

Corruption d'agents étrangers dans les transactions internationales

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Pierre Brana, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, faite à Paris le 17 décembre 1997 (n° 1564) ; le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, faite à Bruxelles le 26 juillet 1995 (n° 1565) ; le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du protocole établi sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne à la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, fait à Dublin le 27 septembre 1996 (n° 1566) ; le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du protocole établi sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne concernant l'interprétation, à titre préjudiciel, par la Cour de justice des Communautés européennes de la Convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, fait à Bruxelles le 29 novembre 1996 (n° 1567) ; le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K. 3, paragraphe 2, point c, du traité sur l'Union européenne relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des Etats membres de l'Union européenne, faite à Bruxelles le 26 mai 1997 (n° 1568) ; le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification du protocole établi sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne à la convention relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, fait à Bruxelles le 19 juin 1997 (n° 1569).

Le Rapporteur a indiqué que les six projets soumis à l'Assemblée, après avoir été adoptés par le Sénat, visaient à lutter contre la corruption et à mieux réprimer certaines formes de délinquance financière.

La convention la plus importante est celle signée au sein de l'OCDE le 17 décembre 1997. Cette convention impose aux Etats qui l'auront ratifiée de sanctionner pénalement la corruption d'agents publics étrangers de la même façon qu'ils sanctionnent la corruption de leurs propres agents publics. La France, comme la plupart des autres pays, n'incrimine actuellement que la corruption des fonctionnaires français, et jusqu'à l'adoption de la présente convention, les commissions versées à des agents publics étrangers étaient même déductibles du bénéfice imposable des entreprises qui les avaient versées.

Or, la corruption est un fléau qu'il faut éradiquer. Elle sape les bases même de la démocratie et nuit au développement économique.

La convention conclue au sein de l'OCDE et qui est déjà en vigueur après avoir été ratifiée par la plupart des pays membres de cette organisation, constitue à cet égard un incontestable progrès, même si elle demeure insuffisante. Un projet de loi a du reste été adopté par le Gouvernement qui tend à prévoir des peines allant jusqu'à dix ans de réclusion pour la corruption d'agents publics étrangers.

Les autres textes concernent l'Union européenne. Ils visent d'abord à sanctionner la corruption des fonctionnaires européens dans les mêmes conditions que les fonctionnaires nationaux. Mais ils visent aussi à réprimer de manière plus ferme toutes les atteintes aux intérêts financiers des Communautés européennes, notamment les fraudes qui, concernant le domaine agricole, sont importantes. D'ores et déjà, l'Union européenne a créé une Unité centrale de lutte anti-fraude (UCLAF) qui a montré une réelle efficacité.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 1565, 1566, 1567, 1568 et 1569).

Accord de partenariat CEE/Mexique

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Jean-Claude Lefort, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de l'accord de partenariat économique, de coordination politique et de coopération entre la Communauté européenne et ses Etats membres, d'une part, et les Etats-Unis du Mexique, d'autre part (n° 1194).

M. Jean-Claude Lefort a exposé que la ratification de cet accord était importante à plusieurs titres.

Tout d'abord, le Mexique est un grand pays ami mais ses relations économiques avec l'Union européenne sont faibles. Cet accord peut rééquilibrer ces relations en approfondissant la coopération instituée par un précédent accord de 1991 et en développant le commerce des biens et des services par une libéralisation progressive et réciproque des échanges.

Cet accord a également une dimension politique claire : il s'insère dans une vision stratégique de l'Europe vis-à-vis du continent latino-américain, en particulier du Mexique. Depuis l'entrée en vigueur de l'ALENA, le poids des Etats-Unis au Mexique est devenu très lourd. C'est pourquoi, la négociation de cet accord a été engagée, à l'initiative de la France, dès 1994.

Cette convergence franco-mexicaine s'est manifestée avec un éclat tout particulier à l'occasion de la visite du Président de la République française en novembre 1998. Cette dernière a donné lieu à la signature de quatorze accords et à une déclaration conjointe.

Cet accord institutionnalise un dialogue politique qui paraît particulièrement opportun. Outre son évolution économique, le Mexique connaît une profonde évolution politique. Après avoir gouverné le pays sans discontinuité depuis les années trente, le Parti révolutionnaire institutionnel ne dispose plus de la majorité à la Chambre des Députés et une alternance est possible à l'issue des prochaines élections présidentielles.

La démocratisation n'a pas permis de trouver une solution au problème indigène. Depuis 1994, une guérilla revendique, dans l'Etat du Chiapas, une réforme agraire, la reconnaissance des coutumes et des langues indiennes, le respect du droit des femmes, du droit à l'éducation et de l'autonomie locale. La répression violente menée par des groupes paramilitaires a provoqué une légitime émotion internationale. Par ailleurs, les accords de San Andres, signés en 1996, n'ont pas encore trouvé de traduction constitutionnelle.

L'accord ne se voile pas la face sur ce problème qui perdure et qui atteint l'image du Mexique. Les dispositions de son article premier et de son article 58 peuvent permettre la suspension de tout ou partie de l'accord en cas de violation des droits de l'Homme. L'article 36 prévoit, dans le domaine de la coopération sociale, un dialogue sur les populations indigènes.

La ratification de cet accord est donc opportune, mais il conviendra de veiller à ce qu'il ne conduise pas à un libre-échange intégral.

M. Pierre Lequiller a souhaité savoir si d’autres projets de ce type étaient envisagés avec l’Amérique latine.

Rappelant que le Mexique est un pays où beaucoup d’enfants sont proposés à l’adoption internationale, Mme Bernadette Isaac-Sibille a demandé que l’on insiste pour que soient insérées dans ce type d'accords des dispositions stipulant le respect de la Convention des Nations-Unies sur les droits de l’enfant et de la Convention de La Haye sur l'adoption internationale.

M. Jean-Claude Lefort a approuvé les observations de Mme Bernadette Isaac-Sibille et a exposé qu'un prochain sommet réunirait l'Union européenne, les Caraïbes et l'Amérique latine. Par ailleurs, l'Union conduit des négociations agricoles avec de nombreux pays de ce continent.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1194).

Rectification de la frontière franco-suisse

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Joseph Tyrode, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse suite au raccordement des autoroutes entre Saint-Julien-en-Genevois (département de la Haute-Savoie) et Bardonnex (canton de Genève) (n° 1427), et le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre la République française et la Confédération suisse portant rectification de la frontière franco-suisse entre le département du Doubs et le canton de Vaud (n° 1428).

M. Joseph Tyrode a tout d’abord rappelé que, depuis 1958, six rectifications de frontière avaient eu lieu entre la France et la Suisse, liées, dans la plupart des cas, à la réalisation de travaux d’infrastructure à cheval sur la frontière.

La première convention fait suite au raccordement des autoroutes entre Saint-Julien-en-Genevois dans le département de Haute-Savoie et Bardonnex dans le canton de Genève. L’objet de cette convention est de situer en territoire français le pont autoroutier qui raccorde l’autoroute française A 401 à l’autoroute suisse N1A. Trois parcelles françaises, situées sur les territoires des communes de Sain-Julien-en-Genevois et de Viry, sont échangées contre une parcelle suisse située sur le territoire de la commune de Bardonnex et où se trouve le pont autoroutier. La superficie concernée représente 81 400 m².

La seconde convention porte rectification de frontière entre le département du Doubs et le canton de Vaud. Elle est liée aux travaux de canalisation du cours d’eau « la Jougnenaz » entrepris par la Suisse aux fins de reconstruction d’une plate-forme douanière. L’échange de terrains concerne deux parcelles de 30 m² sur les communes de Jougne en France et de Vallorbe en Suisse.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté les projets de loi (nos 1427 et 1428).

Convention OTAN/Partenariat pour la paix

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Patrick Delnatte, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant la ratification de la convention entre les Etats Parties au Traité de l'Atlantique-Nord et les autres Etats participant au Partenariat pour la paix sur le statut de leurs forces (ensemble un protocole additionnel) (n° 1426).

M. Patrick Delnatte a exposé que cette convention avait pour objet de définir le régime juridique applicable aux forces militaires appelées à stationner sur le sol d'un Etat dans le cadre des activités du Partenariat pour la paix. La Convention a repris, pour l'essentiel, les dispositions de la convention SOFA qui régit le statut des forces de l'OTAN.

Elle définit les compétences juridictionnelles respectives entre l'Etat d'accueil de la force et l'Etat d'origine. Chaque Etat dispose d'une compétence exclusive, dans les cas de trahison, sabotage, espionnage, violation du secret d'Etat ou du secret de la défense nationale. L'Etat d'envoi est prioritaire chaque fois que l'infraction concerne les biens de l'Etat d'origine, un membre de la force ou sa famille ou lorsque l'infraction a été commise en service. L'Etat de séjour est prioritaire dans tous les autres cas. Par ailleurs, chaque Etat peut demander à l'autre Etat de renoncer à sa priorité.

Pour le règlement des dommages, la Convention distingue quatre situations. Chaque Etat renonce à demander un dédommagement lorsque les dommages sont causés aux biens compris dans le matériel affecté aux actions relevant de l'activité du Partenariat. Le dédommagement est défini à l'amiable lorsque les dommages sont causés par les forces d'un Etat aux autres biens de l'Etat de séjour. Les dommages causés aux tiers sont instruits et réglés par les autorités de l'Etat de séjour selon ses normes. Les demandes d'indemnité concernant un membre des forces agissant en dehors du service sont instruites par les autorités de l'Etat de séjour qui saisit ensuite l'Etat d'origine.

La Convention traite également des questions fiscales et douanières.

Après avoir rappelé que le Partenariat pour la paix établissait une coopération militaire entre les membres de l'Alliance atlantique et vingt-cinq pays européens, le Rapporteur a estimé que la crise du Kosovo ébranlait ce dispositif.

Un des buts du Partenariat est d'établir une coopération entre l'Alliance et les neuf candidats à l'adhésion à l'OTAN. Or, la crise du Kosovo a démontré que cette structure n'était pas suffisante pour conforter la stabilité de ces Etats lorsque ceux-ci étaient confrontés à une situation de crise. Aussi, lors du récent sommet de Washington, les Alliés ont dû s'engager à garantir la sécurité des Etats de la région impliqués par les opérations de l'OTAN en République fédérale de Yougoslavie.

Le Partenariat a également pour but de renforcer le dialogue avec la Russie alors que celle-ci accepte difficilement l'élargissement de l'Alliance à la Hongrie, la Pologne et la République tchèque. Or, l'engagement de l'OTAN en République fédérale yougoslave a eu pour conséquence la décision de la Russie de suspendre sa coopération avec l'Alliance atlantique. Cette décision, cependant, reste plutôt symbolique. Elle s'est traduite concrètement par le départ du représentant russe à l'OTAN. En revanche, la Russie n'a pas remis en cause sa participation à la SFOR.

Ces derniers développements indiquent que le Partenariat pour la paix ne pourra, à lui seul, garantir la stabilité du continent européen. Pour autant, on ne peut dédaigner la coopération qu'il instaure.

M. Pierre Brana s'est étonné que ce texte, signé en décembre 1995, n'ait pas été soumis plus tôt au Parlement.

Mme Marie-Hélène Aubert s'est demandée si le Partenariat pour la paix était bien adapté à la situation créée par les derniers événements qui conduisaient à s'interroger sur l'articulation entre l'OTAN et l'Union européenne.

M. Jean-Claude Lefort a souligné le paradoxe entre l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam et les événements actuels qui devraient conduire l'Europe à s'affranchir de la tutelle américaine. Le Partenariat pour la paix constitue-t-il un progrès dans le cheminement de la politique européenne de sécurité commune ?

M. Pierre Lequiller a regretté le long délai entre la signature de cette convention et sa ratification qui paraît plus que jamais nécessaire compte tenu des événements. Par ailleurs, l'adhésion des PECO à l'OTAN doit être accélérée.

M. François Loncle a estimé que les événements illustraient la nécessité d'un rééquilibrage entre les pays européens et les Etats-Unis. Or, le Partenariat pour la paix vise à ce que les pays de l'ancien pacte de Varsovie soient davantage attirés par l'OTAN que par l'Union européenne.

M. Patrick Delnatte a répondu que la Convention avait un but essentiellement technique : définir le statut juridique des forces participant aux activités du Partenariat pour la paix. Par ailleurs, le Partenariat marque un progrès certain par rapport à l'époque où le continent européen était divisé. Il renforce le poids de l'Europe au sein de l'Alliance et ouvre celle-ci à tous les pays européens, y compris la Russie. Il est naturel que les pays de l'ancien pacte de Varsovie se tournent vers l'OTAN.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1426).

Union européenne

Mexique

Lutte contre la corruption

Partenariat pour la paix

Rectification de frontière


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