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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

COMPTE RENDU N° 11

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 24 novembre 1999
(Séance de 10 heures)

Présidence de M. Jack Lang, Président

SOMMAIRE

 

page


- Présentation du rapport d'information sur la mondialisation ..........


3


- Accord d'investissements avec l'Algérie (n° 1198) - rapport ..........


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- Convention douanière avec la Hongrie (n° 1306) - rapport ..........


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- Convention douanière avec la Macédoine (n° 1308) - rapport ..........


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- Convention douanière avec la Russie (n° 1307) - rapport ..........


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- Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisés (n° 1429) - rapport ..........


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- Information relative à la Commission ..........


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Présentation du rapport d'information sur la mondialisation

M. Roland Blum a fait remarquer que le terme de mondialisation connaissait traditionnellement un grand succès qui était encore renforcé par la prochaine ouverture des négociations de l'OMC à Seattle. Pour les uns, elle serait la cause de tous nos maux, "l'horreur économique". Pour les autres, elle serait une des clefs du bonheur - c'est la "mondialisation heureuse" - et ceux qui la refusent seraient des irresponsables.

La mondialisation conduit-elle nécessairement à l'uniformisation ? Peut-elle avoir un visage humain ? Est-ce seulement un concept économique ? Quel rôle reste-t-il à l'Etat ? Voilà les questions auxquelles M. Roland Blum a déclaré vouloir apporter des réponses ou des éléments de réponse dans son rapport.

Quels sont les chiffres qui nous permettent de mesurer la mondialisation ? Les transactions commerciales ont augmenté en volume et en moyenne annuelle de 6% par an entre 1957 et 1997, alors que la production mondiale n'a progressé que de 3,7% durant cette même période ; les investissements directs à l'étranger représentaient 1% du PNB mondial en 1980 contre 2,5% en 1997 ; les fusions-acquisitions explosent : 411 millions de dollars en 1998, soit une augmentation de 7,4% par rapport à 1997.

Le Rapporteur a exposé les trois principales causes de la mondialisation.

- La faillite du système de Bretton Woods, liée à la décision du Président Nixon, le 15 août 1971, de suspendre la convertibilité du dollar en or a marqué l'échec du système, échec définitivement consacré en mars 1973 avec l'établissement d'un régime de taux de change flottants. Ce dernier a provoqué l'internationalisation et la déréglementation des mouvements de capitaux.

- Les nouvelles technologies, qui ont entraîné la dématérialisation de l'économie par la baisse des coûts des transports et des communications.

- Les politiques de déréglementation qui, commencées avec la création de zone de libre-échange, se sont poursuivies avec les négociations du GATT. Celles-ci ont progressivement aplani les obstacles à la circulation internationale des capitaux, marchandises et services.

Selon Mme Forrester, la mondialisation s'apparente à l'effroi diffus mais justifié de voir des êtres humains en grand nombre tenus pour superflus. Depuis le début des années 1990, le monde a été secoué par trois grandes crises : celle du SME en 1992/93, celle du Mexique en 1994/95 et celle de l'Asie du Sud-Est en 1997/98. Ces crises ont fait perdre leur emploi à plusieurs dizaines de millions de personnes et amputé le niveau de vie de centaines de millions d'autres.

La libéralisation des marchés financiers, si elle a eu incontestablement des effets positifs sur la croissance et en particulier sur celle des pays à économie émergente, a sans doute eu une responsabilité dans le développement des crises financières. Les entrées rapides et massives de capitaux étrangers ont eu un rôle déstabilisateur, provoquant des crises et favorisant leur extension.

Les transactions journalières sur le marché des changes s'effectuent de plus en plus souvent uniquement pour des raisons financières, c'est-à-dire sans contrepartie commerciale. Les prix des marchés se déterminent davantage sur des anticipations boursières qu'en fonction des déterminants économiques fondamentaux. Lorsque la confiance se perd, c'est la crise, l'explosion des inégalités, à la fois entre les pays et à l'intérieur des pays.

La mondialisation revêt certes un aspect positif sur le plan général ; l'intégration des marchés a bénéficié aux pays en voie de développement, leur part dans le commerce mondial s'est renforcée pour atteindre 30%, alors qu'elle ne représentait que moins de 15% il y a 15 ans. Cependant, lorsque l'on examine les résultats pays par pays, force est de constater que 80 pays ont un revenu par habitant inférieur à ce qu'il était il y a dix ans. L'écart de revenu entre les 20% de pays les plus riches et les 20% de pays les plus pauvres s'est accru de 1 à 30 en 1960 pour passer de 1 à 74 en 1997.

Selon un rapport du PNUD, les trois plus grosses fortunes du monde possèdent ensemble plus que le PNB total du groupe des pays les moins avancés qui compte 600 millions d'habitants. Si, malgré la crise financière, l'Asie a plutôt bénéficié de la mondialisation, le continent africain en a été presque totalement écarté. C'est donc vers les PMA qu'il convient de faire des efforts d'intégration pour faciliter leur accès aux marchés et les faire profiter de l'assistance technique.

Il faut espérer que Seattle prenne en considération ce grave problème et aille beaucoup plus loin que l'application du principe de non-réciprocité dans les négociations commerciales. Le marché n'a rien à gagner à laisser perdurer un système qui laisse au bord du chemin 3 milliards d'individus qui vivent avec moins de 2 dollars par jour.

De même, à l'intérieur des pays, une société à deux vitesses s'installe, avec un écart important entre les revenus, et un fossé entre une élite mondialisée qualifiée, à haut salaire, et une main d'_uvre non qualifiée menacée de chômage.

Le Rapporteur s'est demandé si tout cela est bel et bien le résultat de la mondialisation. En effet, aucun lien n'a pu être établi dans les sociétés développées entre les inégalités de revenus et la part représentée par les pays à bas salaires dans les importations. Ainsi, aux Etats-Unis, les écarts de revenus ont augmenté alors que les importations en provenance des PVD n'ont crû que de 1%. Le responsable de la fragmentation de nos sociétés serait plutôt le progrès technique qui entraîne une demande accrue de personnel qualifié au détriment des travailleurs les moins payés.

En fait, pour M. Roland Blum, la responsabilité est partagée. Progrès technique et mondialisation sont indissociables, le commerce international exerçant une pression accrue sur les structures économiques d'un pays.

La mondialisation semble remettre en cause le rôle de l'Etat et de ses trois principes : souveraineté, territorialité, sécurité. L'Etat se trouve concurrencé par les nouveaux acteurs de la mondialisation : les firmes globales, les organisations intergouvernementales, les ONG et les organisations régionales. Il ne dispose plus que de marges de man_uvre réduites et il a de plus en plus de difficultés à réguler la vie économique et sociale à l'intérieur de ses frontières.

Mais, si tel est le point de vue des farouches adversaires de la mondialisation, il faut cependant constater qu'elle est devenue une réalité incontournable. Il convient donc de la comprendre et de la maîtriser. En effet, le problème de la mondialisation est qu'elle s'est développée sans encadrement. Tel est le jugement qui a été formulé au dernier Forum de Davos, en février 1999. Le nouveau directeur général de l'OMC s'en est fait l'écho dans son discours de Marrakech, appelant de ses v_ux une meilleure distribution des revenus entre les nations et à l'intérieur des pays.

Cependant, quoique critiquée, la libéralisation des marchés a entraîné une plus grande liberté de choix pour les consommateurs, une utilisation plus efficace et plus productive des ressources, une pression sur les prix et la recherche de l'innovation pour rendre les produits plus compétitifs. Mais il est important que la libéralisation se fasse de façon ordonnée. La réglementation est d'autant plus indispensable que de nouveaux dangers apparaissent pour la sécurité, la santé et l'environnement. M. Roland Blum a souhaité que Seattle soit l'occasion de clarifier ces différents points.

Au-delà du débat entre partisans et adversaires de la mondialisation, il est clair qu'il faut se battre contre un modèle unique incarné par une uniformisation des valeurs et des pratiques culturelles. La culture, le cinéma, la musique, la littérature ne peuvent être traités comme des marchandises, contrairement à la conception américaine . Cela réduirait à néant tout espace de créativité pour les autres cultures. L'exception culturelle obtenue à Marrakech doit être à tout prix maintenue mais présentée, non pas de façon défensive comme un repli de la culture européenne sur elle-même, mais de façon offensive pour faire connaître cette culture à l'extérieur.

La mondialisation peut être une opportunité à saisir à condition d'arriver à une meilleure coopération internationale et d'engager des réformes approfondies.

S'agissant d'une meilleure coopération internationale, cela doit concerner la monnaie et les finances, le commerce et la régionalisation.

En matière de coopération monétaire et financière, il importe d'intégrer les pays en voie de développement dans le système monétaire international, de prévenir les crises financières et de contrôler les mouvements de capitaux. Dans ce domaine, M. Roland Blum ne pense pas que la taxe dite Tobin, consistant à taxer les mauvais capitaux à court terme, qui déstabilisent les marchés, et à privilégier les capitaux à long terme qui financent les projets industriels, soit réalisable. Il est toujours très difficile de séparer le bon grain de l'ivraie et cette taxe serait difficilement applicable au-delà des pays du G7.

M. Roland Blum a suggéré des réformes plus empreintes de pragmatisme : faire assurer le contrôle des banques et des mouvements de capitaux par les institutions internationales, améliorer l'information économique et sa transparence, associer les opérateurs privés au règlement des crises. C'est à ce prix que le processus de libéralisation des économies émergentes se réalisera. Il conviendrait également de mettre en place une nouvelle architecture financière internationale, fondée sur des taux de change "ciblés", c'est-à-dire un système dans lequel les monnaies fluctueraient à l'intérieur de larges marges autour de taux pivots régulièrement révisés. Les institutions financières (FMI, Banque mondiale, Banque de règlements internationaux) doivent quant à elles tenir un rôle important dans la régulation et le suivi des marchés, ce qui n'est pas le cas actuellement. Leur rôle pourrait être celui que joue en France la COB. Elles pourraient ainsi établir des codes de bonne conduite de la finance internationale.

En ce qui concerne la coopération commerciale, toute critiquée qu'elle soit, l'OMC constitue un grand progrès par rapport au GATT. Elle devient un arbitre et l'organe de règlement des différends (ORD) a joué un rôle positif. Sur les 167 plaintes examinées depuis 1995, 30 ont été réglées à l'amiable. Il est à noter que 54 de ces plaintes ont été déposées par les Etats-Unis qui ont obtenu satisfaction dans deux dossiers importants : la banane et la viande aux hormones.

Le problème consiste à tout mettre en _uvre pour que les décisions de l'ORD soient respectées et il est nécessaire que soit résolu le mode de désignation des "panélistes" de manière à assurer leur indépendance et s'assurer de leur compétence.

Cependant, ce système ne sera à terme viable que si les USA jouent le jeu et ne se réfugient pas dans l'unilatéralisme, avec les articles 301 et super 301 du Trade Act et les loi d'Amato et Helms Burton. Or, depuis la création de l'OMC, les Etats-Unis se sont pliés à ces règles lorsque l'OMC a épinglé le quart des exportations américaines pour subventions déguisées et obligé Washington à modifier sa législation fiscale. L'OMC est un arbitre, dont il faut renforcer les pouvoirs et tirer inconsidérément sur cet arbitre serait dangereux.

Mais votre Rapporteur est d'avis qu'il faudrait approfondir les réformes.

Humaniser la mondialisation nous conduit à envisager le rôle d'une communauté civile internationale et à redéfinir le rôle du politique.

La communauté civile internationale a tendance à devenir une réalité avec le rôle accru des ONG dans les relations internationales. Elles réclament des normes internationales, contribuent à fixer les agendas des négociations internationales, surveillent le respect de ces normes. Elles représentent de plus en plus l'opinion publique. Il convient à cet égard d'accélérer la mise en place des normes planétaires : normes sociales, droit d'organisation de travailleurs, interdiction du travail des enfants, travail forcé, grâce à une meilleure coopération entre OIT et OMC.

M. Roland Blum a également souhaité la création d'un Conseil de sécurité économique dans le cadre de l'ONU, composé à parité de pays développés et de pays en développement, ainsi que des organisations régionales. Le rôle de ce conseil serait notamment de prendre en compte les droits de la personne humaine en établissant des codes de bonne conduite, d'atténuer l'insécurité financière en prévenant les crises et en organisant l'aide aux populations dans ces périodes, de lutter contre la criminalité mondiale, d'assurer la protection de la diversité culturelle et de l'environnement.

Il faut enfin redéfinir le rôle du politique et de l'Etat

S'il est vrai que, progressivement, les entreprises globales ont enlevé à l'Etat quelques marges de man_uvre en matière économique et sociale, l'Etat doit se muer en Etat-stratège. La mondialisation est un exercice d'ajustement qui ne peut se réduire à un affrontement entre l'Etat et les marchés.

L'Etat demeure responsable de l'environnement légal, fiscal, normatif. Il doit participer à la création de zones régionales et à la conquête de marchés extérieurs pour les entreprises. Il doit également s'efforcer de redéfinir notre système de formation et d'éducation, trop rigide. Ainsi, favoriser les filières professionnelles, développer les passerelles entre les différents filières de formation, accentuer les synergies entre le monde de l'enseignement, de la recherche et de l'entreprise, développer l'apprentissage des langues, favoriser les politiques d'échange sont autant de défis que l'Etat doit relever et qui permettront à nos enfants d'aborder dans les meilleurs conditions l'économie globalisée.

La mondialisation est une aventure obligée. Certes, elle peut présenter des risques et c'est pourquoi il faut tout mettre en _uvre pour renforcer la sécurité. Il faut souhaiter que les négociations de Seattle donnent à cette mondialisation un supplément d'âme et placent l'humain en son centre. Entre le laissez-faire béat et la réglementation tatillonne, il doit exister une place pour une régulation souple, pour des codes de bonne conduite, pour une gestion des droits et des devoirs adaptés aux citoyens de ce nouveau monde.

M. Charles Ehrmann a demandé au Rapporteur s'il avait étudié le rôle de la langue anglaise dans le processus de mondialisation, ainsi que la lutte contre les paradis fiscaux et le trafic de drogue.

M. Roland Blum a confirmé que trop souvent les progrès de la globalisation sont allés de pair avec la montée de la criminalité qui, à l'image des autres activités économiques se mondialise. Les paradis fiscaux contribuent notamment au blanchiment de l'argent et il devient urgent que la communauté internationale réagisse en créant un espace judiciaire international.

Le problème de la suprématie de l'anglais au détriment des autres langues est un élément important de l'uniformisation culturelle dont le rapport traite abondamment.

M. Pierre Brana a fait part de son inquiétude face à l'uniformisation culturelle du monde. Il a demandé si des mesures concrètes étaient proposées dans le rapport à ce sujet.

M. Roland Blum a fait état de la baisse des parts de marché du cinéma français en Europe à l'avantage du cinéma américain. Le danger est réel et l'exception culturelle doit être utilisée à la fois comme bouclier et comme arme. La conception américaine de la culture, qui en fait une marchandise comme une autre, demeure inacceptable.

M. Roland Blum a par ailleurs rappelé qu'il avait été chargé par la Commission des Affaires étrangères d'un rapport spécifique sur l'exception culturelle.

M. Joseph Tyrode s'est réjoui de l'accent mis dans le rapport sur les questions culturelles. Il a demandé au Rapporteur quels moyens il envisageait, notamment de la part des Etats, pour faire prévaloir l'humanisme sur le profit.

Evoquant les difficultés nouvelles rencontrées par les Etats à assumer leurs attributions, M. Roland Blum a appelé de ses v_ux la formation d'une véritable communauté civile internationale, seule à même de contrebalancer les intérêts économiques. La politique américaine est déterminée en grande partie par les réactions de l'opinion publique, via CNN. Les ONG jouent déjà un rôle très important dans la défense de l'environnement et de la sécurité. Leur légitimité tient au fait qu'elles sont censées représenter l'opinion internationale.

La proposition de créer un Conseil de sécurité économique au sein de l'ONU serait également un moyen pour une meilleure prise en compte des droits de la personne humaine dans le développement économique.

M. Georges Hage a fait observer que cette réflexion sur la mondialisation s'imposait, celle-ci pouvant être la meilleure et la pire des choses. Il s'est interrogé sur les moyens de diminuer le primat de la puissance économique.

M. Roland Blum a souligné la justesse de cette réflexion dans un monde dominé par la puissance américaine. Cependant, les Etats-Unis ont accepté une certaine régulation du commerce mondial avec l'OMC, notamment en jouant le jeu en ce qui concerne l'Organe de règlement des différends, même s'ils ont maintenu, voire renforcé leur arsenal de sanctions unilatérales. Il a espéré que des règles de bonne conduite s'imposeront à tous, dans la mesure où chacun trouvera son intérêt dans un environnement stabilisé, y compris les Etats-Unis.

Le Président Jack Lang a approuvé cette fermeté, tout en soulignant la complexité de la situation actuelle et en récusant toute vision simpliste. En effet, il ne faut pas confondre le débat actuel avec celui de 1992-93 où la question de l'hégémonie américaine était clairement au c_ur du débat. La stratégie américaine est aujourd'hui beaucoup plus subtile, elle ne passe pas par une demande de remise en cause des accords de Marrakech sur ce sujet. L'exception culturelle semble en effet plus un slogan qu'une réalité. Les meilleurs alliés de l'hégémonie culturelle américaine se trouvent bien souvent en Europe : les gouvernements, les corporations et les groupes de production tiennent des discours très fermes mais capitulent au quotidien. Quelle tartufferie ! En témoignent ces films français tournés en langue anglaise ou ces hauts fonctionnaires français trouvant plaisir à utiliser la langue anglaise qu'ils parlent du reste si mal. La France est pourtant l'un des rares pays à résister à l'hégémonie américaine, par sa politique éducative, culturelle ou dans le domaine de la recherche. Mais cette politique doit être consolidée.

Le Président Jack Lang a précisé que les débats dans le cadre de l'OMC sur ce sujet concerneront uniquement le thème du commerce électronique. Par ce biais, ils peuvent donc avoir une incidence sur le cinéma, mais les intérêts des européens et des américains sont globalement communs, à savoir la lutte contre la piraterie et la protection de la propriété intellectuelle. Ainsi, le vrai débat pourrait se dérouler entre pays riches et pays pauvres. Les Etats-Unis ont tout intérêt à ce que des pays comme le Mexique ou la Corée du Sud n'aient aucune politique de défense de leur identité culturelle propre. Ils ont la même position à l'égard des pays d'Europe centrale et orientale candidats à l'adhésion à l'Union européenne : ces derniers doivent donc savoir que, pour entrer dans l'Union, il leur est indispensable de défendre notre conception de la culture.

En application de l'article 145 du Règlement, la Commission a décidé la publication du présent rapport d'information.

Accord d'investissements avec l'Algérie

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Georges Hage, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation d'un accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements (ensemble un échange de lettres interprétatif) (n° 1198).

M. Georges Hage a exposé que depuis l'élection du Président Bouteflika, la volonté réciproque de relancer et de reconstruire les relations bilatérales franco-algériennes semblait se concrétiser. Aussi l'accord d'encouragement et de protection réciproques des investissements entre l'Algérie et la France doit-il être ratifié . Les 800 000 Algériens vivant en France y seront sensibles. De facture classique, cet accord octroie aux investisseurs un traitement juste et équitable et prévoit une indemnisation adéquate en cas de dépossession, et un traitement aussi favorable que celui des nationaux en cas de dommages ou pertes provoqués par des circonstances exceptionnelles.

La ratification de cette convention encouragera les investissements français en Algérie, notamment dans les secteurs-clés de la modernisation de l'économie d'autant que la France demeure le premier partenaire économique de l'Algérie avec un solde commercial fortement excédentaire en sa faveur depuis 1993.

Le Rapporteur a souligné que depuis l'élection du Président Bouteflika les signes de rapprochement entre l'Algérie et la France se multipliaient : visites du Ministre des Affaires étrangères à Alger, du Ministre de l'Intérieur et du Ministre délégué à la Coopération et rencontre du Premier Ministre avec le Chef de l'Etat algérien à New York, en septembre. La France a pris des mesures concrètes pour restaurer les relations bilatérales. Depuis 1997, le dispositif de délivrance des visas a été considérablement assoupli et modernisé, ce qui s'est traduit par une augmentation de leur nombre. La réouverture du consulat d'Annaba doit intervenir en début d'année prochaine, suivie de celle du consulat d'Oran. Cependant, l'Algérie attend avec une certaine impatience la reprise des vols d'Air France suspendus depuis 1994.

Il a fait observer que depuis son élection, le Chef de l'Etat algérien tente de redonner à l'Algérie sa place sur la scène internationale. Ainsi, les discussions sur un accord de partenariat de l'Union européenne avec l'Algérie suspendues en mai 1997 ont repris et les Etats-Unis apportent un soutien critique à la démarche du Président.

Selon lui, sur le plan intérieur, les difficultés persistent. Si près de sept mois après son élection, le Président Bouteflika s'est acquis une réelle popularité parmi les Algériens il a suscité de grandes attentes. Or, il n'a pas encore formé son gouvernement ni précisé son programme, en particulier dans le domaine économique et social. Il est malaisé de cerner les relations entre le Chef de l'Etat et l'armée, dont l'influence est difficile à apprécier même si elle est patente. Certaines résistances se font jour au sein des partis au pouvoir. L'opposition légale reste, quant à elle, très discrète face aux initiatives du Chef de l'Etat. La mouvance islamiste proche de l'ex-FIS semble divisée sur l'attitude à adopter. L'assassinat d'Abdelkader Hachani, numéro trois du FIS, ne sera pas sans conséquence. Le Président Bouteflika devra en tirer les conclusions et sera désormais jugé sur ses actes car l'Algérie doit faire face à une crise économique et sociale et le terrorisme persiste.

Le chômage se maintient à un niveau très élevé (28 %) et frappe plus de 30 % des jeunes. Les phénomènes de grande pauvreté s'aggravent. L'Algérie dépend des hydrocarbures à hauteur de 96,5 % pour ses exportations et de 58 % pour ses recettes budgétaires et la rente pétrolière n'est pas un facteur de développement.

La trêve unilatérale décrétée en octobre 1997 par l'AIS, a marqué une étape importante dans l'évolution de la situation sécuritaire, mais les groupes islamistes opposés à la trêve continuent d'être actifs et dangereux comme en témoigne la recrudescence récente des attentats qui ont fait plus d'une centaine de victimes depuis la fin octobre, ce qui fait craindre un Ramadan sanglant. Selon le Ministère de l'Intérieur algérien, 1130 islamistes se seraient rendus aux autorités, répondant ainsi aux dispositions d'amnistie de la loi de concorde civile soumise à référendum en septembre dernier.

Le Rapporteur a souhaité que la France, au-delà de la ratification de cet accord, propose une négociation portant sur l'allégement de la dette qui s'élève à 32 milliards de dollars, et qu'elle accroisse son assistance technique pour moderniser les infrastructures.

M. Pierre Brana a demandé au Rapporteur si l'accord avait été ratifié par l'Algérie et si les droits d'auteur et les _uvres d'art plastique faisaient partie du champ d'application de ce type de convention.

M. Georges Hage a précisé que l'accord d'investissement signé le 13 février 1993 avait été ratifié par l'Algérie le 2 janvier 1994 et que la France, qui s'apprêtait à faire de même, avait différé la procédure à cause du détournement de l'Airbus d'Air France en décembre 1994.

S'agissant du champ d'application de l'accord d'investissement, il est défini par l'article premier d'interprétation large qui définit le terme investissement en incluant expressément les biens meubles donc les _uvres d'art et les droits d'auteur et de propriété industrielle.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1198).

Convention douanière avec la Hongrie

La Commission a examiné, sur le rapport de M. René André, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle en matière douanière entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hongroise (n° 1306).

M. René André a tout d'abord précisé qu'il s'attacherait à présenter une analyse succincte de la présente convention, préférant s'attarder sur les efforts fournis par la Hongrie en matière de lutte contre les fraudes qui s'insèrent dans le cadre de la mise aux normes européennes de ses institutions d'ores et déjà acquises à la démocratie et à l'économie de marché.

Les dispositions prévues par la présente convention s'inscrivent dans le cadre général de coopération administrative qui sert de base à la trentaine de conventions déjà signées par la France. Cependant, il convient de signaler trois particularités :

- en premier lieu, l'article 9.3 prévoit l'obligation pour l'administration qui reçoit l'information de la corriger ou de la détruire si l'administration qui l'a fournie constate qu'elle est inexacte ou qu'elle doit être supprimée ;

- en deuxième lieu, l'article 10.2 prévoit que les documents originaux peuvent être transmis à l'administration requérante lorsque des copies ne suffisent pas. Ils sont restitués dans les plus brefs délais ;

- enfin, l'article 11.3 mentionne expressément que l'application de la convention n'affecte pas les règles d'entraide judiciaire définies par l'accord bilatéral signé en 1980 par la France et la Hongrie. Cette précision allait de soi dans la mesure où la convention est un accord d'assistance administrative.

Il s'agit d'une convention qui vient compléter les efforts déjà importants de la Hongrie en matière de lutte contre la fraude et plus particulièrement le trafic de drogue. La Hongrie est en effet un pays consommateur, de transit et de dépôt. Elle produit du cannabis et des amphétamines et sert de pays de transit, via l'aéroport de Budapest notamment, pour la cocaïne en provenance d'Amérique du Sud et à destination de l'Europe occidentale. Elle est aussi un pays de transit et de dépôt pour l'héroïne en provenance de Turquie.

La France est d'ores et déjà directement concernée par ces trafics. Par exemple, deux saisies importantes d'héroïne (50 kg et 33 kg), en provenance de Budapest, ont été réalisées en 1998 en France.

Les efforts fournis par la Hongrie pour renforcer l'efficacité de la lutte contre la fraude et, plus particulièrement, de la lutte contre les stupéfiants, sont importants et de nombreux projets devraient conduire au renforcement de l'efficacité globale du dispositif douanier hongrois de lutte contre la fraude. D'une manière générale, les efforts d'adaptation des douanes hongroises s'inscrivent dans le cadre de la stratégie d'adhésion à l'Union européenne.

Par ailleurs, il est à noter que la Hongrie a d'ores et déjà ratifié la présente convention et fait parvenir sa notification à la France en mai 1999.

En conclusion, le Rapporteur a recommandé l'adoption du présent projet de loi.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1306).

Convention douanière avec la Macédoine

La Commission a examiné, sur le rapport de M. René André, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'entraide d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement français et le Gouvernement macédonien pour la prévention, la recherche, la constatation et la sanction des infractions douanières (n° 1308).

M. René André a précisé qu'il s'agissait d'une convention de type traditionnel avec quelques particularités techniques qui ne modifient cependant pas le fond du texte :

- le troisième considérant, à la demande de la Macédoine, met l'accent sur la nécessité de concilier la lutte contre la fraude et la libre circulation des personnes et des marchandises ;

- la Macédoine a également tenu à souligner la frontière entre l'assistance administrative et l'entraide judiciaire bien qu'il ne fût pas indispensable de le faire expressément ;

- trois types de procédures (enquêtes, administrative, judiciaire) sont distingués pour la Macédoine s'agissant de la présentation devant les instances définies des documents recueillis dans le cadre de l'assistance administrative ;

- il est prévu la possibilité de définir des mesures de coopération technique par voie d'arrangement administratif. Après l'entrée en vigueur de la présente convention, les douanes françaises et macédoniennes pourront signer des projets d'arrangement administratif qui ne feront pas l'objet d'une nouvelle convention et sous réserve de rester dans leur domaine de compétence.

Le Rapporteur a considéré que cette convention revêtait une importance toute particulière au regard du climat qui règne actuellement dans la région, climat marqué par la crise du Kosovo. Celle-ci a eu des conséquences indéniables sur la situation économique de ce pays qui avait déjà été victime des sanctions internationales contre la République fédérale de Yougoslavie de 1992 à 1995.

Ce n'est pas tant l'afflux des réfugiés kosovars, accueillis et pris en charge par les familles albanaises de Macédoine, que la fermeture du marché yougoslave qui ont provoqué un net ralentissement de l'activité économique. En effet, 23 % des exportations macédoniennes (pour l'essentiel des produits agro-alimentaires) sont destinées à la RFY alors que 45 % transitent sur son territoire. De plus, 40 % des importations macédoniennes sont issues de Yougoslavie (matières premières et surtout produits semi-dérivés destinés à alimenter les industries locales). La diminution des exportations et donc l'augmentation du chômage ont été directement provoquées par la fermeture des liaisons routières, ferroviaires et aériennes avec la Yougoslavie. Certes, des couloirs alternatifs existent via la Bulgarie ou la Grèce mais avec un surcoût important dû à l'allongement des trajets, à la nécessité d'effectuer des transbordements, etc. Le pays s'attend donc à de mauvais résultats pour 1999.

Autre conséquence, la crise du Kosovo, par l'afflux massif de réfugiés qu'elle a entraîné sur le territoire macédonien, fait courir à ce pays, composé de 65 % de Slavo-Macédoniens orthodoxes et de près d'un tiers d'Albanais (officiellement 23 % mais sans doute plus proche de 30 %), des risques intérieurs considérables.

Enfin, du fait de sa situation géographique, au c_ur d'une région en proie à des troubles politiques importants, la Macédoine est devenue un pays sensible en matière de fraudes et autres trafics illicites. Située sur la route des Balkans, la Macédoine est un pays de transit mais également un pays producteur d'héroïne, des laboratoires ayant été découverts dans la région de Skopje.

La France n'est pas encore directement menacée par ces trafics qui visent plus particulièrement la Suisse, l'Autriche et l'Allemagne. Cependant, des saisies ont été réalisées en 1997 à Marseille sur des véhicules de transport routier immatriculés en Macédoine. La drogue venait du Maroc et était destinée à la Slovénie.

Tout de même, il faut reconnaître l'importance des efforts déployés par la Macédoine dans la lutte contre la fraude : définition d'un nouveau code des douanes qui comporte des dispositions contre le trafic de stupéfiants, mise en place de structures spécialisées pour la lutte contre la drogue, important effort de formation des personnels, restructuration de la douane macédonienne, etc. En outre, la Macédoine a d'ores et déjà ratifié la présente convention et sa notification est parvenue à la France dès avril 1998.

En conclusion, le Rapporteur a considéré que l'adoption du présent projet de loi constituerait un signe d'encouragement et de soutien à l'égard du gouvernement macédonien qui déploie des efforts importants en vue de participer à un dispositif de lutte contre la fraude adapté et efficace.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1308).

Convention douanière avec la Russie

La Commission a examiné, sur le rapport de M. René André, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la Fédération de Russie pour la prévention, la recherche et la poursuite des fraudes douanières (n° 1307).

Concernant la convention d'assistance administrative douanière signée le 31 octobre 1997 entre la France et la Russie, que cette dernière a d'ailleurs d'ores et déjà ratifiée, M. René André a précisé qu'elle s'inscrivait dans le cadre général de coopération administrative qui sert de base à la trentaine de conventions déjà signées par la France. Cependant, il convient de signaler deux particularités :

- en premier lieu, la convention prévoit la possibilité de définir par voie d'arrangement administratif des mesures de coopération technique. Après l'entrée en vigueur de la présente convention, les douanes françaises et russes pourront signer des projets d'arrangement administratif qui ne feront pas l'objet d'une nouvelle convention et sous réserve de rester dans leur domaine de compétence. Il est prévu par exemple une coopération à l'aéroport de Moscou ;

- en second lieu, à la demande de la Russie, le texte cite expressément, parmi les marchandises susceptibles de faire l'objet de fraudes et devant par conséquent donner lieu à des échanges de renseignements spontanés, les objets d'art ou d'antiquité ayant une grande valeur artistique, archéologique ou d'antiquité. Cette précision a été apportée car, au moment de la négociation de la convention, la Russie devait faire face à un important trafic d'icônes.

L'objectif de cette convention est double. Il s'agit de donner une base juridique à la coopération entre les administrations douanières des deux pays afin de favoriser la prévention, la recherche et la répression des fraudes douanières. Il s'agit également de renforcer la coopération déjà organisée à la fois dans le cadre bilatéral et dans le cadre de l'Union européenne.

Si l'on ne peut constater de réels flux de fraude entre la France et la Russie, les risques demeurent potentiellement importants. D'une manière générale, ils concernent essentiellement les marchandises sensibles (cigarettes, viande bovine) expédiées sous titre de transit et les marchandises importées sous couvert de certificat d'origine exonérant les droits de douane. Mais depuis 1996, il n'y a pas eu de nouvelle invalidation de certificat d'origine de la douane russe à la demande de la douane française.

Concernant le trafic de stupéfiants, la Russie est un pays producteur d'opium, de cannabis et de drogues de synthèse. Elle dispose également de laboratoires en vue de la fabrication d'héroïne. La route des Balkans passe par ce pays qui est également voisin des zones sensibles d'Asie centrale.

Cependant, la Russie s'est dotée d'une législation spécifique sur la drogue et les substances psychotropes. Cette loi, entrée en vigueur en avril 1998, vise à mieux contrôler le commerce légal des substances stupéfiantes et psychotropes par le biais d'un renforcement des contrôles. Les structures de lutte contre la drogue sont également renforcées et le ministère de l'intérieur a augmenté ses effectifs.

Au vu de ces observations, le Rapporteur a recommandé l'adoption du présent projet de loi.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1307).

Convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées

La Commission a examiné, sur le rapport de M. Xavier Deniau, le projet de loi, adopté par le Sénat, autorisant l'adhésion de la République française à la convention sur les privilèges et immunités des institutions spécialisées approuvée par l'assemblée générale des Nations Unies le 21 novembre 1947 (ensemble dix-sept annexes approuvées par les institutions spécialisées) (n° 1429).

M. Xavier Deniau a indiqué que la convention, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 21 novembre 1947, définit les privilèges et immunités des institutions spécialisées, des fonctionnaires internationaux qu'elles emploient et des représentants des Etats membres participant à des réunions qu'elles organisent.

Le texte est historiquement lié à la Convention générale sur les privilèges et immunités des Nations Unies du 13 février 1946, ratifiée par le Parlement dès 1947. Les deux textes sont en effet presque identiques. La convention de 1947 concerne quant à elle 17 institutions spécialisées, parmi lesquelles on citera l'Organisation internationale du travail (sise à Genève), l'Organisation pour l'Alimentation et l'Agriculture (Rome), l'Organisation de l'Aviation civile internationale (Montréal), le FMI ou encore le groupe d'institutions de la Banque mondiale (installés à Washington), pour ne citer que les plus importantes en termes de personnel employé.

Comme on peut le constater, plus de cinquante années se sont écoulées entre l'adoption de la convention et l'adhésion de la France à celle-ci. Les raisons du grand retard pris pour l'adhésion à la présente convention n'ont jamais été précisées.

Pourtant, les relations entre la France et les institutions spécialisées sont nombreuses : notre pays finance des programmes, invite et rencontre les dirigeants de celles-ci, autorise l'organisation de manifestations sur son sol. Il existe aussi beaucoup de relations à caractère économique tels des achats ou des investissements qui bénéficient des privilèges fiscaux et douaniers et de l'immunité territoriale accordés aux institutions internationales. Ces opérations semblent s'être toujours déroulées sans incident, néanmoins l'absence de base juridique n'est pas une bonne solution : un important contentieux fiscal apparu dans les années 1990 entre l'administration fiscale française et les fonctionnaires internationaux résidant en France le démontre. C'est pourquoi le présent projet est enfin soumis à la représentation nationale.

L'abstention de la France a en effet pour conséquence un flou juridique en ce qui concerne le statut fiscal des fonctionnaires, l'administration fiscale leur refusant l'exonération depuis quelques années. Les organisations sises à Genève comptent quelque 1300 fonctionnaires français, mais sont aussi concernés par la convention de 1947 les fonctionnaires d'autres nationalités en poste à Genève ayant choisi de s'installer avec leur famille sur le territoire français, dans les départements limitrophes de l'Ain et de la Haute-Savoie. En outre, une politique d'imposition fiscale pourrait inciter les intéressés à résider en Suisse, ce qui priverait les économies locales des retombées positives de la présence en France des fonctionnaires internationaux et de leurs familles.

Les privilèges et immunités conférés par la convention de 1947 sont les suivants. La convention accorde aux organisations la personnalité juridique, leurs biens, fonds et avoirs bénéficient de l'immunité de juridiction. Ces derniers se voient aussi reconnaître, ainsi que les revenus, l'exonération fiscale en ce qui concerne tout impôt direct, ou droit de douane.

Pour les représentants des Etats membres, la convention prévoit un statut calqué sur le statut diplomatique.

Pour les fonctionnaires, la convention instaure l'immunité de juridiction et une exonération fiscale pour les traitements et émoluments.

La France, comme beaucoup d'Etats membres, a assorti l'immunité de juridiction d'une restriction en ce qui concerne les infractions à la circulation routière mais n'a finalement pas maintenu de réserve fiscale : les fonctionnaires internationaux seront bien exemptés d'impôt. On notera toutefois que leurs traitements sont soumis à un prélèvement interne affecté à un fonds de péréquation.

Enfin, certaines dispositions prévoient la possibilité de saisir la Cour internationale de justice. La France envisage d'émettre une réserve en ce domaine : cette réserve découle d'une pratique juridictionnelle répondant au souci de préserver la souveraineté et celle des juridictions françaises. Notre pays ne sera pas lié par deux dispositions de la convention prévoyant la saisine de la cour ; il s'agit d'une part du cas de l'abus de privilège, et d'autre part du cas de différends portant sur l'interprétation ou l'application de la convention. La France n'a pas accepté de considérer comme impératif l'avis « consultatif » émis par la cour.

Le Rapporteur a estimé que l'engagement pris par le Gouvernement français traduit une volonté diplomatique d'affirmer la participation sans restriction de la France aux institutions spécialisées, qu'en outre, il clarifie le statut des fonctionnaires internationaux résidant dans notre pays. En conclusion, le Rapporteur a proposé l'adoption du projet de loi.

M. Paul Dhaille a demandé si la convention comportait des conséquences quant au statut des organisations européennes installées en France.

M. Xavier Deniau a répondu que la convention ne concernait que les institutions de la "famille des Nations Unies". Les privilèges et immunités des organisations européennes sont définis par leur accord de siège, ainsi l'accord de 1949 relatif au Conseil de l'Europe ou le protocole de 1965 concernant les Communautés européennes. L'Unesco, bien que théoriquement concernée par la convention, a fait l'objet d'un accord de siège conclu en 1954, qui s'inspire d'ailleurs de la convention de 1947.

Le Président Jack Lang a déploré que notre pays n'accepte plus la juridiction obligatoire de la Cour internationale de justice depuis l'affaire des Essais nucléaires de 1974, affaire dans laquelle la cour s'était reconnue compétente, contrairement à l'interprétation de la France. Depuis cette affaire, qui remonte donc à plus de vingt ans, les autorités françaises préfèrent assortir de réserves les textes signés, ce qui est inacceptable alors que notre pays se fait par ailleurs l'avocat du respect du droit, et se trouve en première ligne dans la résolution de nombreux conflits. La France est en outre l'un des cinq membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unies. Il semble que l'administration résiste par conservatisme à faire évoluer cette position. De plus, les réserves posées par le Gouvernement concernent des points peu importants et dont les conséquences sont limitées, s'agissant de l'intervention de la Cour en cas d'abus des privilèges et de différend sur l'interprétation de la convention.

Le Président Jack Lang a formulé le v_u que la position du Gouvernement évoluera avant le dépôt de l'instrument d'adhésion au nom de la France.

M. Pierre Brana a approuvé cette position, se demandant si une intervention de la Commission était possible.

Le Président Jack Lang a indiqué que les réserves des membres de la Commission à ce sujet seraient transmises au Gouvernement.

Conformément aux conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (n° 1429).

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Information relative à la Commission

A été nommé, le mercredi 24 novembre :

- M. Marc Reymann, rapporteur pour le projet de loi, adopté par le Sénat (n° 1916), autorisant l'approbation de la convention entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement de la République Fédérale d'Allemagne, le Gouvernement de la République italienne, le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord portant création de l'Organisation conjointe de coopération en matière d'armement (OCCAR) (ensemble quatre annexes).

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