Accueil > Archives de la XIe législature > Comptes rendus de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République (1998-1999)

ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION des LOIS CONSTITUTIONNELLES,
de la LÉGISLATION et de l’ADMINISTRATION GÉNÉRALE
de la RÉPUBLIQUE

COMPTE RENDU N° 31

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 10 février 1999
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Gérard Gouzes, vice-président,

puis de M. Arnaud Montebourg, secrétaire

SOMMAIRE

 

pages

– Projet de loi constitutionnelle, modifié par le Sénat, relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes (n° 1354) (deuxième lecture)

– Proposition de loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crimes contre l’humanité (n° 1297) (rapport)

– Information relative à la Commission

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La Commission a examiné, en deuxième lecture, sur le rapport de Mme Catherine Tasca, le projet de loi constitutionnelle, modifié par le Sénat, relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes (n° 1354).

Mme Catherine Tasca, rapporteur, a souligné que la rédaction du projet de loi constitutionnelle relatif à l’égalité entre les femmes et les hommes, adopté par le Sénat le 26 janvier dernier, différait radicalement de celle présentée par le président de la République et le Premier ministre, puis corrigée par l’Assemblée nationale. Elle a indiqué que le choix du Sénat, de modifier l’article 4 et non l’article 3, répondait à la volonté d’écarter le recours à la technique du quota, alors que l’objet de la révision constitutionnelle était précisément de contourner la jurisprudence constitutionnelle de 1982 qui l’avait interdit, ajoutant que la modification de l’article 3 autoriserait, tout autant que celle de l’article 4, le législateur à utiliser des mesures financières incitatives à l’égard des partis pour promouvoir la parité.

Après avoir souligné également la portée symbolique de la révision constitutionnelle, qui propose une nouvelle lecture de la notion de souveraineté, Mme Catherine Tasca a répondu aux objections opposées par la seconde chambre au texte adopté par l’Assemblée nationale. Elle a tout d’abord rappelé que, les femmes ne constituant pas une communauté, cette révision ne pourrait ouvrir la porte au communautarisme et considéré que la société politique ne pouvait que s’enrichir en reconnaissant la mixité essentielle du genre humain. Elle a ensuite fait observer qu’imposer la parité dans les scrutins de liste ne serait pas plus attentatoire à la liberté de choix des électeurs que le fait que les candidats soient désignés par les partis politiques. Par ailleurs, elle a jugé que la rédaction proposée, à la suite des travaux de la Commission, était suffisamment précise pour éviter que le Conseil constitutionnel n’exerce son contrôle sur la base de règles constitutionnelles imprécises.

Estimant, en conclusion, que la rédaction adoptée par la seconde chambre ne ferait que confirmer un statu quo perpétuant la domination d’un sexe sur l’autre dans la sphère politique, Mme Catherine Tasca a donc proposé de revenir au texte voté par l’Assemblée nationale en première lecture.

M. Gérard Gouzes, président, a fait part de sa déception sur la façon dont le Sénat avait choisi d’aborder le débat sur la parité, soulignant qu’à cette occasion il avait donné une image quelque peu archaïque.

Précisant d’emblée que le groupe Démocratie libérale, attaché au principe de parité, n’entendait pas revenir sur son vote initial, M. Claude Goasguen a regretté que les sénateurs, quelle que soit leur tendance politique, aient pu mal comprendre la décision unanime de l’Assemblée nationale. Il a souligné le retard de la France en ce qui concerne la participation des femmes à la représentation politique, observant que le Conseil constitutionnel y avait pris sa part, en adoptant une interprétation restrictive du préambule de la Constitution. Pour tenter de faire mieux comprendre la rédaction adoptée par le Sénat, il a relevé que le choix de faire porter la révision sur l’article 4 de la Constitution, relatif au rôle des partis dans l’expression du suffrage, n’était pas absurde, rappelant qu’il avait inspiré un amendement présenté par son groupe à l’Assemblée nationale en première lecture. Mais il a souligné que le texte retenu par le Sénat était en revanche contestable, voire inapplicable, puisqu’il ne faisait peser l’obligation de favoriser l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats et fonctions que sur les partis politiques, alors qu’ils n’ont pas l’exclusivité de la présentation de candidats aux élections. Il a ensuite vivement déploré que le Gouvernement ait faussé le débat devant le Sénat par la menace d’une réforme électorale, appuyée par divers propos excessifs, observant qu’une telle attitude ne pouvait que susciter l’inquiétude de sénateurs, par ailleurs souvent animés par les mêmes préoccupations que les députés quant à l’égal accès des femmes et des hommes aux fonctions publiques. Présentant alors son sous-amendement tendant à prévoir que c’est par une loi organique qu’est organisé l’égal accès à ces fonctions, il a expliqué que son objet était de signifier qu’aucune remise en cause de la légitimité de l’une des deux chambres ne devait utiliser le prétexte d’une réforme sur la parité. Enfin, à l’adresse des sénateurs, il a fait remarquer que les arguments sur les discriminations positives n’étaient pas recevables, dans la mesure où la Constitution comporte déjà de telles discriminations, depuis la révision constitutionnelle sur la Nouvelle-Calédonie.

Mme Nicole Catala a insisté sur l’ambiguïté fondamentale de la position du Gouvernement, regrettant qu’il n’ait jamais dit si son objectif était de parvenir à une représentation strictement égale des femmes et des hommes, ou bien seulement, selon la position plus nuancée de Mme Catherine Tasca, à un plus large accès des femmes aux fonctions politiques. Elle a ajouté que le Gouvernement n’avait pas davantage explicité les voies qu’il entendait emprunter pour parvenir à cet objectif incertain : « méthode des quotas », réforme du mode de scrutin pour les élections sénatoriales et éventuellement législatives, modulation des règles de financement des partis politiques, ou combinaison de plusieurs de ces instruments. Pour sa part, elle a estimé que la meilleure méthode consisterait en une réforme du financement des partis. Afin de modérer l’ardeur de certaines critiques formulées à l’encontre de la position du Sénat, elle a rappelé que la plupart des arguments qui la fondaient avaient déjà été évoqués à l’Assemblée nationale, sans provoquer une tempête de protestations. Quant à la méthode, elle a exprimé une interrogation forte sur la nécessité d’une révision préalable de la Constitution, considérant qu’il serait suffisant de recourir à une loi simple si la modulation du financement des partis politiques permettait d’assurer la parité. Elle a rappelé, en conclusion, sa préférence pour l’adoption d’un texte très incitatif, voire contraignant, quelle qu’en soit la nature juridique.

Mme Nicole Feidt a rappelé que l’effort en faveur de la parité avait fait partie des principaux engagements du Premier ministre et de la majorité, et, plus généralement, de l’ensemble des formations politiques, lors des élections législatives de 1997. Constatant que, de l’avis unanime, les progrès en faveur de la parité réalisés par les différentes formations politiques n’étaient pas suffisants, elle a estimé que, dans ces conditions, il n’était pas possible de s’en remettre à l’initiative des partis politiques. C’est pourquoi elle a jugé que le choix du Sénat était condamnable et a donc marqué sa préférence pour la solution retenue par l’Assemblée nationale en première lecture, soulignant qu’elle avait le mérite d’assurer le résultat en renvoyant au Parlement le soin de fixer les règles électorales.

Insistant sur le fait qu’il ne fallait pas caricaturer l’attitude du Sénat sur le sujet, M. Richard Cazenave a jugé que les débats sénatoriaux avaient été d’un grand intérêt, évoquant notamment l’intervention de M. Robert Badinter. Rejoignant ce qui avait été dit au Sénat, il a observé que beaucoup de jeunes femmes ne semblaient pas convaincues par un système qui, imposant une parité, paraissait, à certains égards, vexatoire. Il a estimé que les divergences entre les deux assemblées portaient moins sur le principe lui-même que sur la manière de parvenir à la parité. Il a jugé indispensable que le Gouvernement clarifie ses intentions en la matière, notamment sur les conséquences qu’une telle réforme pourrait avoir sur les systèmes électoraux. Déplorant que les parlementaires ne disposent pas sur le sujet de davantage de précisions, il a plaidé pour la rédaction retenue par le Sénat, jugeant qu’une modification de l’article 4 de la Constitution, qui concerne le rôle des partis politiques, était préférable à une modification de l’article 3 qui porte sur la souveraineté indivisible.

M. Jean-Luc Warsmann a rappelé qu’en première lecture, le groupe R.P.R. avait soutenu le texte. Estimant inutile de revenir sur le constat de la place insuffisante des femmes dans la vie publique, il a tenu à souligner que beaucoup des arguments défendus au cours des débats au Sénat avaient déjà été évoqués au sein de la commission des Lois de l’Assemblée. C’est pourquoi il a considéré qu’il n’était pas justifié de susciter des oppositions factices entre les deux assemblées. Il a souhaité que le Gouvernement fasse preuve de loyauté envers les parlementaires et donne davantage de précisions sur l’application qu’il entend donner à la réforme et notamment ses conséquences sur les systèmes électoraux. Il a estimé qu’une telle attitude favoriserait l’apparition d’un consensus entre le Sénat et l’Assemblée.

M. Dominique Bussereau s’est déclaré réservé sur le principe de la révision constitutionnelle. Rappelant qu’il n’y avait pas eu de vote solennel sur le projet de loi constitutionnelle en première lecture, il a regretté que l’on fasse état du vote unanime de l’Assemblée qui n’était, en réalité, que celui des députés présents. Par ailleurs, il a jugé que la modification apportée par le Sénat était positive parce que, en complétant, non pas l’article 3, mais l’article 4 de la Constitution, elle renforçait l’importance des partis politiques, dont il a regretté que l’influence soit insuffisante en France.

M. Pascal Clément a déploré la pression politique qui était en train de s’exercer sur le Sénat. Il a considéré que les députés devaient légiférer en respectant le bicamérisme, sauf à se prononcer pour la suppression de la seconde chambre. Tout en convenant que les Français s’accordaient sur le constat de la place insuffisante des femmes dans la vie politique, il a estimé que l’affirmation du principe de la parité ne devait pas se traduire par des lois contraignantes. Il a insisté sur le fait que le Gouvernement devait faire connaître au plus tôt ses intentions quant à l’application de ce principe, s’il souhaitait qu’un consensus se dégage, ajoutant que les pressions qui se faisaient de plus en plus fortes pour réformer le mode de scrutin sénatorial contribuaient à fausser le débat sur la parité.

M. Jacques Floch a considéré que la position du Sénat sur la question des conditions d’accès des femmes à la vie publique soulevait le problème de son pouvoir d’obstruction sur des débats aussi essentiels. Soulignant que le Sénat ne représentait qu’imparfaitement la Nation, il a jugé que, dans le cadre de leurs relations avec le Gouvernement, les sénateurs semblaient surtout préoccupés de leur propre mode d’élection. Compte tenu de cette attitude, il s’est déclaré favorable à un retour pur et simple au texte adopté par l’Assemblée. Observant, par ailleurs, que le sous-amendement présenté par M. Claude Goasguen prévoyait que les conditions d’application du principe de la parité devraient être déterminées par une loi organique, il a souligné que cette mesure permettrait en fait au Sénat de freiner l’application de la réforme.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

—  L’analyse des arguments évoqués au Sénat ne doit pas conduire à un débat sur la place de la seconde chambre dans nos institutions, sujet sans lien avec le projet de loi constitutionnelle dont l’objet est d’instaurer un égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités politiques. Par ailleurs, il convient de se garder de propos caricaturaux sur l’institution sénatoriale, y compris à l’encontre de ceux de ses membres qui ont contesté de façon virulente la réforme.

—  La parité n’est pas un prétexte ou un alibi pour justifier d’éventuelles réformes des modes de scrutins, la volonté du Gouvernement de promouvoir le rôle des femmes dans la vie politique étant totalement indépendante de son intention de réformer le mode d’élection des sénateurs. Dès lors, ceux-ci ne sont pas fondés à utiliser le refus de la parité comme un bouclier contre une réforme de leur régime électoral.

—  Au-delà de cette inquiétude quant au mode de scrutin, la nature des arguments de fond opposés par le Sénat au projet de loi constitutionnelle ne permet pas, en l’état, aux deux assemblées de se rejoindre.

—  Une révision de la Constitution est nécessaire à la fois pour franchir l’obstacle que constitue la jurisprudence du Conseil constitutionnel et pour faire évoluer la manière dont est appréhendée la notion de souveraineté. L’initiative politique de cette réforme revient au Gouvernement et aux formations de la majorité plurielle, les partis politiques n’ayant pas su d’eux-mêmes favoriser la parité. Même si celle-ci doit entrer dans les mœurs politiques par paliers, une démarche volontariste, symbolisée par la révision de notre loi fondamentale, est indispensable.

—  Le Conseil constitutionnel ayant récemment réaffirmé l’inconstitutionnalité de toute disposition législative favorisant la parité, le recours à une loi organique n’est pas l’outil adéquat pour déterminer les conditions dans lesquelles est organisé l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives.

—  Le débat sur l’opportunité de modifier soit l’article 3, soit l’article 4 de la Constitution n’est pas sans intérêt, l’Assemblée s’étant d’ailleurs interrogée avant de se prononcer à l’unanimité, pour des raisons juridiques et philosophiques, en faveur d’un ajout dans l’article 3.

—  La garde des sceaux et le rapporteur ont la même interprétation du concept de « l’égal accès » : l’objectif est de parvenir à l’égalité entre les hommes et les femmes dans notre société, la parité étant l’instrument pour y arriver, notamment au travers des scrutins de liste et de l’alternance des sexes dans la composition des listes. Cette technique incitative a pour objet de faire naître un vivier de candidates permettant, à terme, la disparition des mesures contraignantes en faveur de la mixité.

—  Comme l’a évoqué le Sénat, des dispositions financières incitant les partis à présenter davantage de candidates féminines, peuvent avoir leur utilité. Cela étant, la rédaction proposée par l’Assemblée pour l’article 3 n’y fait pas obstacle et le Conseil constitutionnel ne pourra pas objecter le principe de la libre organisation des partis. De même, l’argument de la division de la souveraineté n’est pas recevable, puisque des hommes ou des femmes représenteront indifféremment des hommes et des femmes.

—  Si le vote du projet de loi constitutionnelle n’a pas donné lieu à un scrutin solennel, c’est parce qu’aucun groupe politique ne l’a demandé alors qu’il est loisible à tout président de groupe de le faire.

La Commission est ensuite passé à l’examen de l’article unique du projet de loi constitutionnelle.

Article unique :

La Commission a été saisie d’un amendement présenté par le rapporteur rétablissant le texte du projet de loi tel qu’il a été voté par l’Assemblée nationale en première lecture ainsi que d’un sous-amendement de M. Claude Goasguen prévoyant qu’il appartiendrait à la loi organique de déterminer les conditions dans lesquelles est organisé l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats et fonctions. Elle a d’abord rejeté ce sous-amendement. M. Claude Goasguen a alors fait savoir que, malgré le rejet de son sous-amendement, il voterait pour le texte proposé par le rapporteur. Il a précisé, à l’attention de ses collègues du Sénat, qu’il souhaitait que les deux assemblées parviennent à un accord sur la révision constitutionnelle qui devrait constituer un progrès de la démocratie ; il a également formulé le vœu que le Gouvernement s’engage, pour apaiser le débat, à ne modifier ni le mode de scrutin du Sénat, ni celui de l’Assemblée nationale. M. Gérard Gouzes a souligné que, quels que soient les engagements du Gouvernement en la matière, l’Assemblée nationale restait souveraine, les députés ayant la faculté de présenter des propositions s’ils le jugeaient bon.

La Commission a adopté, dans la rédaction proposée par le rapporteur, l’article unique du projet de loi constitutionnelle (n° 1354).

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La Commission a ensuite examiné, sur le rapport de Mme Christiane Taubira-Delannon, la proposition de loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crimes contre l’humanité (n° 1297).

Après avoir rappelé la portée symbolique de 1998, année de commémoration de la deuxième abolition de l’esclavage, du 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, du cent-cinquantenaire de la Révolution de 1848 et du « J’accuse » de Zola, le rapporteur a indiqué que la proposition de loi n° 1297 avait pour objet principal de qualifier la traite négrière transatlantique et l’esclavage de crime contre l’humanité. Ayant rappelé que l’esclavage n’avait été interdit au niveau international que par la convention de septembre 1926, complétée en 1956, ainsi que par divers textes internationaux tels que l’article 4 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ou la charte africaine des droits de l’homme, elle a précisé que, en droit interne, l’article 212-1 du code pénal faisait de l’esclavage un crime contre l’humanité. Puis elle a évoqué la spécificité de la traite négrière transatlantique et de l’esclavage par rapport au travail servile de l’Antiquité, due notamment à l’ampleur du phénomène et au nombre de pays impliqués, puis a rappelé le difficile chemin vers l’abolition de l’esclavage en France, le rôle joué par les insurrections d’esclaves et la dimension internationale du mouvement abolitionniste. Elle a insisté sur le devoir de mémoire de la France, en faisant état des limites de la politique d’assimilation.

Abordant le dispositif de la proposition de loi, le rapporteur a ensuite souligné que l’article 1er avait un objet limité, puisqu’il visait les faits précis et localisés que sont la traite négrière transatlantique et l’esclavage perpétrés à partir du XVsiècle contre les populations africaines. Elle a ensuite précisé que les autres articles de la proposition de loi encourageaient la transmission du savoir à travers l’enseignement et la recherche, incitaient la France à obtenir, auprès des organisations internationales, la reconnaissance de ce crime contre l’humanité, fixaient une date de commémoration correspondant à l’abolition de la traite négrière par le congrès de Vienne, instauraient un comité de personnalités qualifiées chargé de définir les modalités des éventuelles réparations et, enfin, étendaient les dispositions de la loi « Gayssot » au profit de la traite négrière et de l’esclavage. Elle a annoncé qu’en dehors de quelques amendements rédactionnels, elle proposerait deux modifications significatives à ce dispositif, l’une visant à préciser le rôle du comité de personnalités qualifiées, l’autre remplaçant les dispositions étendant la loi « Gayssot » par la possibilité, pour les associations défendant la mémoire des esclaves, de se constituer partie civile en cas d’incitation à la haine raciale, d’injure ou de diffamation.

Elle a enfin précisé que son rapport portait également sur les propositions de loi n° 792 de M. Bernard Birsinger relative à la célébration de l’abolition de l’esclavage en France métropolitaine, n° 1302 de Mme Huguette Bello relative à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité et n° 1050 de M. Bernard Birsinger tendant à perpétuer le souvenir du drame de l’esclavage.

Après s’être étonné que cette proposition de loi d’esprit libéral rende ainsi hommage au tsar Alexandre 1er et à Metternich, M. Robert Pandraud a indiqué, en préambule, qu’il voterait contre ce texte, s’interrogeant, par ailleurs, sur ses conséquences à l’encontre de chefs africains ayant tiré profit de la traite négrière dans le passé. Evoquant l’attitude de l’église, il a ensuite dénoncé une tendance des institutions à se repentir et considérant qu’il appartenait à chaque individu de se déterminer selon sa propre conscience. Il a conclu en soulignant qu’il convenait de ne légiférer que pour le présent, les appréciations portées sur le passé devant revenir aux historiens et aux lecteurs.

Tout en déclarant respecter profondément la démarche, qui avait inspiré les auteurs de la proposition de loi et en indiquant que son groupe politique ne s’y opposerait pas, M. Richard Cazenave s’est interrogé sur la portée de ce texte, compte tenu de la proscription de l’esclavage par des instruments internationaux depuis 1926. Il a par ailleurs exprimé la crainte qu’en se focalisant sur des périodes historiques données et sur des aspects géographiques de l’esclavage, le législateur ne détourne son regard de la réalité contemporaine dans certaines régions du monde. Il a ajouté que la République elle-même n’avait pas été toujours respectueuse des droits de l’homme, puis s’est inquiété des conséquences pratiques de telles dispositions en termes de réparation.

Après avoir salué l’exposé des motifs brillant de la proposition de loi de Mme Christiane Taubira-Delannon et estimé qu’il constituerait un bon sujet d’étude pour des étudiants, M. Louis Mermaz a fait observer que cela n’était pas un hasard si les propositions de loi soumises à la Commission avaient été signées par les présidents de trois groupes parlementaires et par nombre d’élus d’outre-mer. Rappelant que paradoxalement, la démocratie athénienne pratiquait sans complexe l’esclavage et que celui-ci ne posait pas de cas de conscience à Saint Paul avant sa conversion, il a relevé que l’église avait été très longtemps silencieuse sur ce sujet, certains théologiens se contentant de soutenir que la mort libérait l’esclave de son état en le faisant accéder à Dieu. Soulignant que les serfs de l’ancien régime n’étaient pas au courant de la traite des nègres, il a fait observer que les véritables responsables de cette pratique étaient en réalité les marchands européens, qui attisaient les rivalités en Afrique. Après avoir fait valoir que l’esclavage avait commencé avec le précapitalisme, que la Mauritanie ne l’avait aboli qu’en 1979 et que celui-ci perdurait au Soudan, M. Louis Mermaz a insisté sur la nécessité de remémorer le passé pour des raisons historiques mais également pédagogiques, notamment au regard des formes modernes de l’esclavage.

Constatant que la discussion de cette proposition de loi revêtait une portée symbolique importante, M. Jean-Luc Warsmann a jugé qu’il était à l’honneur de la France de dénoncer le crime contre l’humanité qu’a constitué l’esclavage et souligné que la démarche entreprise par les auteurs des propositions de loi soumises à la Commission ne pouvait que susciter le respect. Il a remarqué que, l’article 212-1 du code pénal faisant déjà de l’esclavage un crime contre l’humanité, on pouvait, en conséquence, s’interroger sur l’intérêt de voter en la matière un nouveau texte, portant sur une période et une aire géographique circonscrites. Il a jugé néanmoins que le législateur pouvait parfaitement entreprendre cette démarche, dont la portée symbolique et pédagogique est indéniable, mais s’est montré plus circonspect sur le dispositif juridique introduit par la proposition de loi. Il a ainsi estimé que prévoir dans la loi une requête en reconnaissance de la traite négrière comme crime contre l’humanité, auprès de l’Union européenne constituait un empiétement du pouvoir législatif sur les prérogatives du pouvoir exécutif. Il a jugé préférable que le Gouvernement s’engage, lors de l’examen en séance, à entreprendre la démarche proposée auprès de l’Union européenne, des organisations internationales et de l’O.N.U. et que la disposition en cause soit alors retirée de la proposition de loi par le rapporteur, précisant qu’il considérait que le vote de textes qui n’ont pas une véritable portée législative n’était pas souhaitable. Il s’est ensuite interrogé sur la mise en œuvre des conditions de réparation évoquées par la proposition, exprimant la crainte que la proposition de loi ne suscite en la matière, de faux espoirs. Il a noté aussi que prévoir la constitution d’une commission spécialisée en ce domaine ressortissait plutôt au pouvoir du ministre. Néanmoins, il a considéré qu’il était normal que le débat soit ouvert et indiqué que, pour sa part, il n’avait pas encore arrêté sa position. Il a souhaité, enfin, que l’on laisse les historiens accomplir leur travail, soulignant que, dans cinquante ans, d’autres responsabilités seraient peut-être mises à jour en ce qui concerne l’organisation de la traite négrière.

Intervenant en application de l’article 38, alinéa 1 du Règlement, M. Bernard Birsinger a estimé qu’il était nécessaire d’accomplir ce devoir de mémoire. Il a considéré qu’il était également l’occasion d’engager une réflexion sur la société actuelle, observant que le racisme, véritable poison de notre société, trouvait notamment ses racines dans quatre siècles d’esclavage. Reprenant l’observation faite par M. Louis Mermaz au sujet du caractère précapitalistique de la traite négrière, il s’est interrogé sur les raisons qui expliquent que la France ait procédé à cette déportation. Il s’est demandé également comment l’Afrique, continent à la dérive, pouvait gérer le poids de ce passé, mettant en exergue le devoir de solidarité que nos pays devrait respecter à l’égard de l’Afrique. Il a également invité ses collègues à réfléchir au processus qui avait conduit à l’abolition de l’esclavage en soulignant que, si 1848 était une étape fondamentale, il ne fallait pas oublier les luttes que les esclaves avaient eux-mêmes menées auparavant. Il a indiqué qu’il partageait les préoccupations exprimées par le texte soumis à la commission des Lois, mis en discussion commune avec deux propositions communistes sur le même sujet. En conclusion, il a considéré qu’il était opportun de prévoir dans la proposition une date de commémoration.

M. Claude Hoarau, s’exprimant également en application de l’article 38, alinéa 1, du Règlement, a tout d’abord insisté sur la présence encore très prégnante dans la société réunionnaise, ainsi que dans les autres départements d’outre-mer, du souvenir de l’esclavage. Il a indiqué que ces sociétés n’existaient que parce qu’il y avait eu la traite négrière et qu’elles avaient été organisées autour de ce phénomène. Il a rappelé le sort qu’avaient connu des dizaines de millions de personnes, insistant particulièrement sur celui réservé aux femmes. Evoquant également le souvenir de ces esclaves qui avaient refusé le destin qu’on leur réservait en se réfugiant dans les montagnes et en luttant pour leur liberté, il a souligné que les habitants de La Réunion étaient aussi des descendants de ces combattants. Il a jugé qu’il n’y avait pas eu de période plus sombre dans l’humanité et pas de crime plus grand que la traite négrière. Il a noté en effet qu’elle avait touché des millions d’hommes, qu’elle avait permis la construction de fortunes considérables qui existent encore et qu’elle avait marqué la mentalité de sociétés entières, comme c’est le cas à La Réunion. Il a ajouté que la pratique esclavagiste n’était pas seulement communément acceptée, mais aussi organisée et rendue légale dans le code noir, évoquant, à cet égard, les condamnations que les juges infligeaient aux esclaves en fuite et les chasses aux « marrons », à l’occasion desquelles on coupait la main des malheureux qui étaient repris. Rappelant qu’à l’époque, les esclaves n’étaient pas considérés comme des hommes, mais bien comme des sous-hommes, il a insisté sur le fait que les sociétés nées de cette pratique avaient besoin de la reconnaissance par la France de l’esclavage comme crime contre l’humanité. Il a également considéré qu’il appartiendrait à la France d’aller défendre ce point de vue auprès des organismes internationaux, non seulement pour faire œuvre de mémoire, mais aussi pour que cette démarche constitue le levier qui interdira que se reproduisent de tels actes. Il a appelé de ses vœux une jurisprudence internationale pour mieux combattre un esclavage qui existe encore aujourd’hui. Enfin, il a fait savoir que, le 20 décembre dernier, une grande manifestation avait été organisée à La Réunion pour soutenir l’ensemble de cette démarche, cette date étant l’anniversaire de l’abolition de l’esclavage dans cette île en 1848.

M. Claude Goasguen a considéré que la proposition de loi soumise à la Commission illustrait une nouvelle fois les questions juridiques que pose désormais la procédure des séances réservées à l’initiative des groupes. Il a fait valoir que la proposition de loi de Mme Christiane Taubira-Delannon était en réalité un manifeste, et s’est déclaré prêt à s’y associer pour faire de la condamnation de la traite négrière un acte fort de la législature. Mais il a souligné que la forme de la proposition de loi présentait de sérieux inconvénients juridiques, le premier étant que le contenu de l’article premier figure déjà à l’article 212-1 du code pénal, d’ailleurs récemment voté par le Parlement. En deuxième lieu, il a estimé que la proposition de loi, qui comporte de nombreuses dispositions de nature réglementaire relevant de la compétence du Gouvernement, engageait un processus peu conforme à nos traditions juridiques. S’agissant de l’article 2 relatif aux manuels scolaires, il l’a jugé directement contraire à l’article 8 de la loi du 11 juillet 1975 relative à l’éducation, repris dans la loi du 10 juillet 1989, qui régit l’organisation et le contenu des formations, en prévoyant la mise en œuvre, soit par décret, soit par arrêté, du principe d’autonomie des établissements dans le domaine pédagogique. Or, il a considéré que ce texte était une bonne loi, conciliant responsabilité et liberté de l’autorité investie du pouvoir réglementaire, les rares exceptions ne portant jamais sur le fond des programmes scolaires, mais sur des aspects particuliers, comme le respect des langues et cultures régionales. Il a également souligné que l’article 5 de la proposition de loi relatif au comité de réparation relevait de la compétence de l’exécutif, au même titre que les règles relatives aux commissions de réparation des juifs déportés durant la Deuxième Guerre Mondiale. Il a fait valoir enfin que l’article 3 prévoyant une saisine du Conseil de l’Europe et de l’Organisation des Nations unies représentait une injonction au Gouvernement.

Après avoir exprimé son accord avec M. Robert Pandraud pour dire qu’un acte de repentance n’était pas de mise, M. Jacques Floch a insisté pour que la France, pays majeur et cultivé, sache assumer son histoire, qui fait partie de notre vie politique. Il a considéré nécessaire de la faire connaître dans tous ses aspects, notamment pour faire pièce à ceux qui la nient ou préfèrent l’oublier. Elu de la région nantaise, dont le capitalisme est né de la traite qui a fondé sa prospérité, il a indiqué que l’esclavage avait représenté pour cette région un flux d’activité économique équivalant à celui d’une entreprise de 20.000 personnes actuellement. Après avoir regretté le silence fait sur cette question durant deux siècles, il a salué la présente proposition de loi, correspondant à un devoir de mémoire, qui conduit aussi à condamner les survivances actuelles de l’esclavage. Il a estimé que c’était faire injure aux descendants d’esclaves que de comprendre la proposition comme une demande d’indemnisation financière. Faisant référence aux commémorations du bicentenaire de la Révolution française, il a rappelé que deux siècles avaient été nécessaires pour pouvoir parler sans passion et de façon approfondie des guerres de Vendée et de l’ouest de la France.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

—  Le 8 février 1815 est la date à laquelle le congrès de Vienne s’est prononcé en faveur de l’abolition de la traite négrière ; cette date a été choisie parce qu’il s’agit de la première référence en la matière, commune aux pays européens. Les réactions qu’elle suscite sont significatives des différences dans l’enseignement de l’histoire outre-mer et en France métropolitaine ; elles montrent la nécessité de faire une plus grande place à l’esclavage dans la recherche et l’enseignement.

—  La reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité est réclamée par l’ensemble de la communauté outre-mer ; près de 20.000 personnes ont ainsi défilé, le 23 mai dernier, dans les rues de Paris pour demander cette reconnaissance.

—  L’O.N.U. doit examiner prochainement un projet de résolution de sa commission des droits de l’homme faisant de la traite négrière et de l’esclavage un crime contre l’humanité.

—  Ce n’est pas la première fois que des dispositions réglementaires figurent dans un texte de loi ; celles de la proposition de loi n° 1297 ont une justification politique et morale extrêmement forte.

La Commission est ensuite passée à l’examen des articles de la proposition de loi.

Article premier : La traite négrière et l’esclavage reconnus comme crime contre l’humanité :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant, dans la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité, la référence expresse aux puissances européennes comme auteurs de ce crime. M. Claude Hoarau a souhaité que soit introduite dans l’article premier la mention de la déportation des populations indiennes et malgaches. Après avoir considéré qu’il n’était pas nécessaire de citer les nations impliquées dans la traite, M. Louis Mermaz a souligné que le problème de l’esclavage des Indiens était très différent de celui de la traite négrière. Rappelant l’existence du comptoir de Zamzibar, M. Claude Goasguen a évoqué la dimension arabe de la traite. Tout en se déclarant favorable à l’article premier, M. Richard Cazenave a estimé que l’on devait s’en tenir là et ne pas adopter les autres articles de la proposition de loi, rappelant que le texte reconnaissant le génocide arménien ne comportait qu’un seul article.

La Commission a adopté l’article premier ainsi modifié.

Article 2 : Développement de l’enseignement et de la recherche sur la traite négrière et l’esclavage :

Après que son auteur eut indiqué à M. Bernard Birsinger que le terme de déportation figurait déjà à l’article premier, la Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur supprimant précisément dans cet article une nouvelle référence à la déportation des esclaves.

Un débat s’est ensuite engagé sur l’amendement de M. André Gerin précisant que les manuels scolaires et les programmes de recherche devront mettre en lumière la place occupée par la France dans le système esclavagiste. M. Louis Mermaz a fait valoir que l’ensemble des pays européens avaient été impliqués dans la traite négrière, la France se lançant dans ce commerce après l’Espagne, le Portugal et l’Angleterre. M. Jean-Luc Warsmann s’est opposé à cet amendement, estimant que, s’il était choquant que l’histoire de l’esclavage soit si peu présente des manuels scolaires, il ne fallait pas pour autant refaire l’histoire par l’intermédiaire d’un texte de loi. M. Robert Pandraud a jugé qu’il ne fallait pas déformer l’histoire, la France esclavagiste n’étant pas celle d’aujourd’hui. Répondant à une question de M. Jean-Luc Warsmann, le rapporteur a indiqué qu’elle était prête à retirer l’article 2 de la proposition de loi, si le Gouvernement s’engageait clairement sur la place accordée à l’histoire de l’esclavage dans l’enseignement. La Commission a alors rejeté l’amendement de M. André Gerin avant d’adopter l’article 2 ainsi modifié.

Articles 3 et 4 : Reconnaissance internationale de la traite négrière et de l’esclavage comme crime contre l’humanité et instauration d’une journée commémorative :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur prévoyant que la France saisisse, non l’Union européenne, mais le Conseil de l’Europe, en vue de la reconnaissance de l’esclavage comme crime contre l’humanité.

Un débat s’est engagé sur un amendement du rapporteur précisant que la requête en reconnaissance aura également pour objet la recherche d’une date commune pour commémorer l’abolition de la traite négrière et de l’esclavage. M. Bernard Birsinger a estimé qu’il serait souhaitable de prévoir d’abord une date de commémoration nationale, comme le propose l’amendement de M. André Gerin à l’article 4. M. Louis Mermaz a fait valoir que l’objectif de l’amendement du rapporteur était différent, puisqu’il s’agissait d’obtenir une date commune au niveau international ; il a ajouté que cette commémoration internationale pourrait avoir un effet pédagogique sur les pays qui tolèrent aujourd’hui encore l’esclavage. Le rapporteur a indiqué que le 27 avril de chaque année, une heure devait être consacrée dans les écoles à une réflexion sur l’esclavage. Elle a par ailleurs rappelé que l’UNESCO avait proposé le 23 août comme date de commémoration internationale, ce qui risque de poser quelques difficultés pratiques puisque cette date se situe au plus fort des vacances scolaires. Elle a néanmoins reconnu l’utilité d’une éventuelle date de commémoration nationale et suggéré que cette possibilité soit examinée lors de la réunion que la Commission tiendra au titre de l’article 88 du Règlement. La Commission a alors adopté son amendement, ainsi que l’article 3 ainsi modifié.

Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur supprimant, par coordination, l’article 4. L’amendement de M. André Gerin proposant une nouvelle rédaction de l’article 4 afin de prévoir la fixation d’une date de commémoration nationale de l’abolition de l’esclavage est ainsi devenu sans objet.

Article 5 : Réparation morale de l’esclavage :

La Commission a été saisie d’un amendement de M. André Gerin prévoyant la présence de représentants d’associations se battant pour la mémoire des esclaves dans le comité des personnalités qualifiées. M. Jean-Luc Warsmann a estimé suffisant d’interroger le Gouvernement sur la composition de ce comité, considérant que cette composition, comme d’ailleurs l’existence même de ce comité, relevait du pouvoir réglementaire. M. Louis Mermaz a fait valoir que, même en l’absence de dispositions expresses en ce sens, le Gouvernement nommerait au sein de ce comité des représentants de ce type d’associations. MM. Claude Hoarau et Bernard Birsinger ont insisté sur l’importance de la représentation de ces associations au sein de ce comité. Après que le rapporteur eut suggéré que cette proposition soit reprise sous forme d’amendement au texte adopté par la Commission, l’amendement a été retiré.

La Commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur précisant que le rôle du comité de personnalités qualifiées est de proposer des lieux et des actions de mémoire afin de garantir le souvenir de l’esclavage à travers les générations.

Elle a ensuite adopté l’article 5 ainsi modifié.

Articles 6 et 7 (art. 24 ter et 48-2-1 [nouveaux] de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) : Création d’une nouvelle infraction en cas de contestation du crime d’esclavage. Possibilité pour les associations de défense de la mémoire des esclaves de se constituer partie civile :

La Commission a adopté un amendement du rapporteur proposant une nouvelle rédaction de l’article 6 afin de donner la possibilité aux associations de défense de la mémoire des esclaves de se constituer partie civile en cas de provocation à la discrimination et à la haine raciales, de diffamation ou d’injure aboutissant à remettre en cause les atrocités de l’esclavage, ainsi qu’un amendement de conséquence du même auteur supprimant l’article 7. Mme Christiane Taubira-Delannon a fait valoir que l’extension des dispositions de la loi « Gayssot » ne paraissait pas opportune, parce que la contestation du crime d’esclavage n’a pas la même ampleur que le révisionnisme nazi et que cette extension risquerait de porter atteinte à la liberté d’expression des chercheurs et des historiens.

Après l’article 7 :

La Commission a rejeté un amendement de M. André Gerin prévoyant la création d’un mémorial et d’un musée de l’esclavage, après que le rapporteur eut souligné que l’article 5 amendé par la Commission permettait de répondre au souci de son auteur.

La Commission a alors adopté le texte de la proposition de loi ainsi rédigé.

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Information relative à la Commission

La Commission a nommé M. Raymond Forni, rapporteur pour la proposition de résolution de M. Jacques Myard visant à la création d’une commission d’enquête tendant à établir une analyse des phénomènes de la délinquance juvénile, un bilan de l’application de l’ordonnance de 1945 et à proposer des mesures de nature à répondre et corriger cette dérive dangereuse pour notre société (n° 1337).

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