Accueil > Archives de la XIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (1998-1999)

Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1997-1998 - 115ème jour de séance, 258ème séance

1ère SÉANCE DU MERCREDI 24 JUIN 1998

PRÉSIDENCE DE M. Laurent FABIUS

SOMMAIRE :

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT 1

    GESTION DE LA MNEF 1

    POLITIQUE FAMILIALE 2

    CAISSES D'ÉPARGNE 3

    DÉLINQUANCE JUVÉNILE 4

    ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES DE LA RÉUNION 5

    PARTICIPATION DES EMPLOYEURS À L'EFFORT DE CONSTRUCTION 5

    CONTREFAÇONS 6

    COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE 6

    ANCIENS COMBATTANTS D'AFRIQUE DU NORD 7

    GIAT INDUSTRIES 7

    SECTEUR FINANCIER PUBLIC ET PARAPUBLIC 8

ÉLECTION DES CONSEILS RÉGIONAUX (suite) 9

    ART. 3 (suite) 9

    ART. 4 11

CONVOCATION DU PARLEMENT EN SESSION EXTRAORDINAIRE 23

La séance est ouverte à quinze heures


Top Of Page

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement

GESTION DE LA MNEF

M. André Angot - Monsieur le Premier ministre, je vous ai interrogé le 29 avril dernier sur les suites que vous comptiez donner aux malversations signalées dans la gestion de la Mutuelle nationale des étudiants de France. Selon la presse en effet, une partie des cotisations versées chaque année par plus de 800 000 étudiants aurait été dilapidée au profit de responsables du syndicat étudiant de gauche UNEF-ID, de dirigeants d'associations et de personnalités de votre majorité plurielle.

M. Valls, votre conseiller en communication, accuse MM. Cambadelis et Le Guen. Ce dernier a déclaré que la MNEF était un gros pourvoyeur d'emplois fictifs pour le PS. ("Oh !" sur les bancs du groupe RPR) En outre, cette mutuelle aurait financé les campagnes électorales de certains candidats socialistes.

Il est scandaleux que les cotisations versées par les étudiants aient été utilisées de la sorte. Les étudiants et les familles souhaitent savoir comment a été dépensé leur argent.

Le 29 avril, sur un ton très agressif, Mme le ministre de l'emploi et de la solidarité m'a répondu que les rapports de l'Inspection générale des affaires sociales, de la Cour des comptes et de la commission de contrôle des mutuelles allaient être publiés "dans quelques jours ou dans quelques semaines". Deux mois plus tard, on attend toujours. Qu'avez-vous à cacher ?

Le président de la Mutualité française réclame la publication de ces rapports, et le directeur général de la MNEF a démissionné.

Monsieur le Premier ministre, je comprends que ma question vous dérange.

M. Lionel Jospin, Premier ministre - Pas du tout.

M. André Angot - Comptez-vous étouffer cette affaire, ou accepterez-vous de faire la lumière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Selon les textes en vigueur, les mutuelles sont soumises à deux types de contrôles. Au titre de l'assurance des étudiants au régime général, la MNEF est contrôlée par l'IGAS et par la Cour des comptes. Dans son dernier rapport, qui date de 1994, l'IGAS ne relève aucun fait délictueux. Vous étiez alors au pouvoir. Quant à la Cour des comptes, elle est en train d'examiner la situation de la MNEF.

Au titre de l'assurance complémentaire, sont compétentes la commission de contrôle des institutions de prévoyance et des mutuelles ainsi que la Cour des comptes. Ce contrôle ne relève donc pas du Gouvernement, mais principalement d'une autorité administrative indépendante composée de hauts magistrats et dont le secrétaire général est le président de l'IGAS.

Cette instance, tout comme la Cour des comptes ne peut contrôler les filiales des mutuelles, sauf si celles-ci ont elles-mêmes le statut de mutuelle. C'est ainsi que la commission de contrôle a décidé de compléter l'examen de la MNEF par celui de la Mutuelle professionnelle de France, de la Mutuelle Inter-jeunes, de la Mutuelle universitaire du logement et de l'Union technique des mutuelles professionnelles... (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

En outre, l'article L 131-1-5 du code de la mutualité l'autorise à contrôler "toute personne morale liée directement ou indirectement, par une convention, à une mutuelle" et pouvant "altérer son autonomie de fonctionnement ou de décision". Dans ce cas, la commission de contrôle aurait le devoir d'intervenir. Mais je vous rappelle qu'il s'agit d'un organisme indépendant. Le seul représentant de mon ministère a reçu il y a six mois des consignes très strictes : faire son devoir et poursuivre s'il y a lieu.

La commission de contrôle et la Cour des comptes publieront leur rapport dans le délai qui leur conviendra. Je comprends votre impatience, mais je préfère la réalité aux incantations et le contrôle rigoureux aux provocations ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV ; protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

POLITIQUE FAMILIALE

M. Richard Cazenave - Les questions les plus simples suscitant des réponses acrobatiques, je poserai pour ma part une question compliquée, dans l'espoir d'entendre une réponse simple... (Sourires sur les bancs du groupe du RPR)

C'est M. le Premier ministre que j'interroge, car nous ne pouvons nous satisfaire des non-réponses de M. Kouchner et de Mme Aubry.

Quelles sont les conséquences, sur le budget des familles, des mesures prises depuis votre arrivée au pouvoir ? Pour éviter les réponses dilatoires, j'ai recensé les gains et les pertes.

En faveur des familles, citons le versement des allocations familiales pour les enfants âgés de 18 à 20 ans, soit 1,1 milliard, l'augmentation de l'allocation de rentrée scolaire, soit 400 millions, le financement des crèches, soit 400 millions, l'extension aux allocataires du RMI des majorations d'âge, soit 300 millions, et l'unification du barème des allocations logement, d'ailleurs engagée par le précédent Gouvernement, soit 400 millions. Au total, 2,7 milliards.

Mais en renonçant à réduire l'impôt sur le revenu, vous retirez 11 milliards aux familles !

Plusieurs députés socialistes - Lesquelles ?

M. Richard Cazenave - Vous leur avez aussi fait perdre 400 millions en mettant les allocations familiales sous condition de ressources, 900 millions en reconduisant la diminution de moitié de l'AGED, 700 millions en réduisant l'avantage fiscal pour l'emploi à domicile, un milliard enfin en reportant de onze à seize ans le bénéfice des majorations d'âge. Au total, 17,6 milliards.

Cela fait donc 15 milliards de moins, chaque année, pour les familles ! Qu'a donc de familial une politique qui matraque ainsi les familles ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité - Quelle est donc la politique familiale d'un gouvernement qui laisse une branche "famille" déficitaire de 12 milliards ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV ; vives protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) D'un gouvernement qui fait voter une loi non financée, dont le coût annuel s'élève à 12 milliards ?

Depuis que nous sommes au pouvoir, nous avons tout fait, nous, pour aider les familles, et particulièrement celles qui sont en difficulté. La majoration des aides aux ménages louant des logements privés coûtera 1,3 milliard, et non 300 millions. C'est une des erreurs que j'ai relevées dans votre propos. Nous avons prolongé l'année dernière le bénéfice des allocations familiales pour les enfants de 19 ans, et nous l'accordons cette année aux enfants de 20 ans. Nous avons aussi augmenté l'allocation de rentrée scolaire.

Vous ne supportez pas que nous puissions travailler avec les associations familiales... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV ; interruptions sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) ni que nous reconnaissions et valorisions le rôle des pères et mères de famille. (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

L'accompagnement des familles en difficulté, le logement, l'adéquation entre vie familiale et vie professionnelle sont des priorités pour le Gouvernement. Vous devrez vous habituer à cette politique, qui continuera d'être appliquée sous l'égide de la délégation interministérielle à la famille créée par le Premier ministre. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. le Président - Vous devez, je vous le rappelle, écouter qui intervient. D'ailleurs, les téléspectateurs n'entendent que les propos de l'orateur, les interruptions n'étant pas retransmises. Ainsi, ceux d'entre vous qui font du bruit donnent au téléspectateur le sentiment qu'ils s'excitent vainement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

CAISSES D'ÉPARGNE

M. Dominique Dord - Vous vous apprêtez, Monsieur le ministre de l'économie et des finances, à transformer le statut des caisses d'épargne. Nous sommes favorables à cette transformation devenue nécessaire, même si nous craignons la banalisation de cette institution financière de proximité.

Mais vous semblez vouloir profiter une nouvelle fois d'une réforme nécessaire pour opérer une ponction très importante sur l'épargne des Français.

Après avoir profité, il y a quelques jours, d'un rétablissement acrobatique et tardif des allocations familiales pour prélever 4 milliards supplémentaires sur les familles, vous vous apprêtez, en effet, à ponctionner au passage plus de 30 milliards dont, selon le président du directoire des caisses d'épargne, 17 milliards sur les fonds centraux de ces caisses, c'est-à-dire sur l'épargne patiemment, difficilement constituée par plus de 20 millions de petits épargnants français. (Applaudissements sur les bancs du groupe DL ; exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

Il nous paraît choquant de nationaliser ainsi de telles sommes collectées par un établissement financier qui n'a jamais rien demandé à l'Etat alors que d'autres -publics il est vrai- lui coûtent si cher !

Les petits épargnants n'ont pas plus que les retraités et les familles à payer les factures de vos dépenses excessives ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DL) Vous avez déjà réduit dernièrement la rémunération des livrets de caisse d'épargne ; ne vous acharnez pas sur les petits épargnants !

Plusieurs députés socialistes - La question !

M. Dominique Dord - Ces sommes vertigineuses sur lesquelles vous allez faire main basse appartiennent aux Français, et souvent aux Français très modestes. Pourquoi ne pas leur faire confiance pour une fois en les laissant choisir ce qu'ils souhaitent faire de cet argent qui leur appartient ?

Pourquoi ne pas le leur rendre en abaissant d'autant les impôts et les charges qui pèsent trop lourdement sur eux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe DL)

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Les caisses d'épargne sont une réussite de la France. Elles constituent un grand réseau qui travaille au plus près des collectivités territoriales et de l'épargne locale et qui a contribué à financer le logement social. Nous pouvons tous être fiers du développement de ce réseau.

Celui-ci est, toutefois, à un tournant de son histoire, car son organisation doit être revue et sa rentabilité améliorée. Aussi une réforme est-elle nécessaire.

Si cette réforme devait prendre les aspects financiers que vous avez décrits, je comprendrais que vous vous y opposiez. Fort heureusement, toutes les informations que vous venez de délivrer sont fausses ! (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste)

En aucun cas il ne s'agit pour l'Etat de prélever 35 milliards pour honorer ses dépenses.

Le réseau des caisses d'épargne a besoin de renforcer son système de retraites : nous y veillerons. Il a besoin d'avoir des ratios de fonds propres confortables, mais qui n'ont nullement à être deux fois supérieurs à ceux de tous les réseaux financiers. Il s'agit de sommes qui, comme vous le disiez, appartiennent à la nation. Elles n'appartiennent ni aux épargnants, ni aux dirigeants, ni aux salariés, mais bien à la nation tout entière. Dans le projet de loi que le Gouvernement vous proposera, une affectation conforme à l'intérêt national vous sera soumise. Ces sommes, en effet, ne devront pas servir à financer des dépenses ponctuelles, mais être utilisées pour répondre à des besoins structurels.

Un député RPR - Le Crédit Lyonnais ! La SNCF !

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je suis convaincu que dans ces conditions, vous approuverez l'ensemble de la réforme que nous vous proposerons. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

DÉLINQUANCE JUVÉNILE

M. Georges Sarre - La délinquance juvénile, dont on a conscience, prend des proportions inquiétantes. Je vous donnerai des exemples parisiens.

Un lycéen de 17 ans a été interpellé cinq fois en 1997 et 1998 : une fois pour vol avec violence et quatre fois pour vol avec effraction. Laissé libre chaque fois par le parquet, il peut poursuivre ses activités.

Un autre lycéen, interpellé en compagnie du précédent en mars dernier pour vol avec effraction a, de même, été laissé libre par le parquet.

A l'occasion de la fête de la musique, des vols avec violence ont été commis à Beaubourg. Les auteurs, une cinquantaine de jeunes dont vingt-trois interpellés, sont âgés de 15 à 22 ans. La moitié d'entre eux étaient déjà connus pour des vols, violences ou effractions commis les années antérieures. L'un d'entre eux est même connu pour une vingtaine d'affaires, en 1996-1997, portant sur des faits particulièrement graves.

Ainsi, une petite minorité d'individus sont à l'origine à la fois d'un sentiment d'insécurité et d'une insécurité réelle. Remis en liberté immédiatement par le parquet, ils reviennent dans leur quartier et accréditent l'idée d'un laxisme généralisé.

Aujourd'hui, le juge n'a guère le choix qu'entre Fleury-Mérogis et le retour du délinquant dans son quartier. Il faut un moyen terme : le juge doit pouvoir envoyer les jeunes dans un foyer, loin de leur quartier, de leur bande, de leurs forfaits, pour qu'ils puissent se réinsérer.

Monsieur le ministre du budget, les moyens de cette politique définie au conseil de sécurité intérieure du 8 juin seront-ils débloqués ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et sur plusieurs bancs du groupe socialiste)

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget - La délinquance juvénile s'est, en effet, développée depuis de nombreuses années, et vous en avez donné des exemples récents.

Le conseil de sécurité intérieure du 8 juin, présidé par le Premier ministre, a pris des décisions énergiques sur ce sujet. Mme la Garde des Sceaux et M. le ministre de l'intérieur les ont exposées. Vous m'interrogez sur les moyens financiers qui seront consacrés à ces actions. Bien que le budget pour 1999 ne soit pas encore arrêté, je peux vous rassurer.

En effet, le Premier ministre a décidé qu'en 1999 le budget de la justice serait prioritaire, comme en 1998. Les dépenses de ce budget progresseront donc plus vite que l'ensemble du budget de l'Etat ; leur augmentation sera donc supérieure à 2,2 %. En outre, dans le cadre de la stabilité globale des effectifs de fonctionnaires annoncée par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, il y aura des créations d'emplois pour la justice en 1999 comme en 1998.

Tout ce qui touche la délinquance juvénile -la protection judiciaire de la jeunesse, les possibilités d'hébergement et d'éloignement, le développement des quartiers spécialisés avec les personnels formés à cet effet- sera une des toutes premières priorités du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES DE LA RÉUNION

M. Michel Tamaya - La situation des établissements pénitentiaires de la Réunion est particulièrement difficile.

Le nombre des détenus augmentant très fortement, le surencombrement de ces établissements avoisine les 200 %. En trois ans, on est passé de 700 à plus de 1 000 détenus alors que le nombre de places théoriques de prison restait de 610.

Les infrastructures carcérales étant, en outre, vétustes, les moyens existants ne permettent plus de faire face à la situation actuelle. La construction d'une nouvelle maison d'arrêt, envisagée dès 1996, devient donc une absolue nécessité, d'autant que le contexte socio-économique est difficile, l'évolution démographique très forte et que la délinquance progresse.

Comment et quand, Madame la ministre de la justice, l'Etat tiendra-t-il l'engagement qu'il a pris de réaliser cette construction ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Daniel Vaillant, ministre des relations avec le Parlement - Je réponds à la place de Mme Guigou, qui est en ce moment au Sénat.

Le département de la Réunion compte trois établissements pénitentiaires ; les maisons d'arrêt de Saint-Denis et de Saint-Pierre et le pénitentiaire du port.

La population carcérale est très importante : au 1er juin 1998, il y avait 1 012 détenus pour 610 places.

La maison d'arrêt de Saint-Denis pose le plus de problèmes. Vétuste -construite en 1876- et enclavée en zone urbaine, elle ne répond pas aux normes de sécurité.

L'effort financier du ministère de la justice en faveur de la rénovation des établissements pénitentiaires du département va être poursuivi : 18 millions ont déjà été engagés depuis trois ans ; 14,5 millions sont programmés pour 1998 et 1999. Mais un nouvel établissement d'environ 400 places est nécessaire ; le ministère examinera la possibilité d'en lancer la construction dans le cadre de la deuxième tranche de travaux qu'il s'apprête à programmer, sur des sites dont il n'a pas encore arrêté la liste. Il pourrait ainsi prolonger l'effort qu'il a engagé en direction de l'outre-mer, avec l'ouverture depuis dix-huit mois de nouveaux établissements en Guadeloupe, en Martinique et, il y a quelques semaines, en Guyane. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

PARTICIPATION DES EMPLOYEURS À L'EFFORT DE CONSTRUCTION

M. Jean-Louis Dumont - Les entreprises apportent, par le 1 %, une contribution importante au financement du logement locatif social, de l'accession à la propriété ou de politiques ciblées. Mais l'avenir du système est incertain, la convention liant les collecteurs et l'Etat arrivant à son terme.

Lors du débat budgétaire, j'avais suggéré de saisir le Conseil économique et social ; celui-ci a rendu ses conclusions. J'avais aussi évoqué d'autres pistes quant à l'utilisation de l'épargne. A l'occasion de la rencontre nationale du logement, le 5 juin dernier, le Gouvernement, par la voix de MM. Gayssot et Besson, a annoncé l'ouverture de négociations avec les partenaires sociaux sur une prochaine convention quinquennale. Quelles sont ses intentions ? Quel sort compte-t-il réserver à la participation des employeurs ? Dément-il les rumeurs persistantes d'une prochaine fiscalisation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Louis Besson, secrétaire d'Etat au logement - Etant président de la Fédération des sociétés coopératives HLM, vous connaissez bien ce dossier. La convention du 17 septembre 1996, signée par le gouvernement précédent avec l'Union nationale interprofessionnelle du logement, a conduit à prélever en 1997 et 1998 50 % de la collecte et des retours de prêt du "1 %" pour financer intégralement le prêt à taux 0. Ainsi, depuis deux ans, le budget de l'Etat ne finance plus l'accession sociale à la propriété ; or celle-ci représente environ 40 % de la production annuelle de logements.

Pour 1999, le Gouvernement veut prévoir des mécanismes de financement adaptés à l'accession sociale -en faisant en sorte qu'il n'y ait pas, après les sinistres du PAP, les sinistres du prêt à taux 0. En même temps, il souhaite préserver le rôle du "1 %", notamment dans le financement du logement locatif social.

Le rapporteur du budget a été entendu puisque, comme vous l'avez rappelé, le Premier ministre a saisi le Conseil économique et social. Dans son avis, celui-ci préconise une "démarche contractuelle, loyale et équilibrée entre l'Etat et les partenaires sociaux, permettant au "1 % logement" d'intervenir de façon consensuelle dans le financement de l'accession sociale à la propriété". Un examen de la situation est en cours avec l'Union d'économie sociale du logement, qui regroupe l'ensemble des partenaires sociaux. Ceux-ci doivent prendre pleinement leur part dans ce dossier. Le Gouvernement prendra les décisions appropriées dans les prochains jours et vous en serez aussitôt informé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

CONTREFAÇONS

Mme Brigitte Douay - La Coupe du monde de football met les projecteurs sur un phénomène qui, en réalité, pose des problèmes permanents : la contrefaçon de nos marques et produits. Aujourd'hui les articles et vêtements de sport, mais tout au long de l'année tous les secteurs d'activité sont touchés par ce fléau, qui met en cause la création, la propriété industrielle, nos emplois, notre patrimoine, la réputation de nos produits et la sécurité des consommateurs. Pouvez-vous, Monsieur le ministre de l'industrie, confirmer la volonté du Gouvernement de renforcer les moyens de prévention et de sanctionner les auteurs d'infractions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie - La contrefaçon sur les marques, dessins et modèles est en effet un fléau économique qui coûte chaque année des milliards de francs à nos entreprises, et aussi plusieurs milliers d'emplois. A l'origine, elle portait sur des produits de luxe ; aujourd'hui, tous les secteurs industriels sont atteints, en particulier la parfumerie, les jouets, les pièces automobiles, les médicaments, l'audiovisuel, les articles de sport...

Le ministère de l'industrie coordonne une action interministérielle à laquelle participent, sous les ordres de M. Sautter, la direction des douanes, et, sous les ordres de Mme Lebranchu, la direction de la concurrence. Nous sommes déterminés à appliquer avec rigueur la loi de 1994 - qui prévoit jusqu'à deux ans de prison et un million de francs d'amende pour les contrevenants. Dans le cadre de la Coupe du monde, la coopération interministérielle a été très efficace puisqu'on a empêché de déverser sur le marché 220 000 produits délictueux. Le nombre d'articles saisis par les douanes a été multiplié par dix depuis 1994.

Le 30 juin prochain, je participerai au comité national anti-contrefaçon que vous présidez avec efficacité, Madame la députée, et j'y parlerai du rôle important que peut jouer l'Etat en matière d'information, de sensibilisation des entreprises et de répression. Croyez à notre totale détermination. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE

M. Christophe Caresche - En ce moment se tient à Rome, à l'initiative de l'ONU, une conférence diplomatique sur la création d'une cour criminelle internationale. Il s'agit de traduire dans la réalité l'idée simple née de l'effroi suscité par les crimes nazis : aucun de ceux qui ont participé à de tels actes ne doit demeurer impuni. Il aura fallu plus de cinquante ans, et de nombreux autres crimes, pour qu'on envisage enfin la création d'un tribunal permanent international, seul à même de garantir que les auteurs de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre seront poursuivis. La France, qui a été à l'origine de cette démarche, a paru dans un passé récent hésiter, notamment en demandant de conditionner la saisine de cette cour criminelle à l'accord des Etats concernés. Notre pays, par son histoire et ce qu'il représente dans le monde, a pourtant un rôle majeur à jouer dans cette conférence. Pouvez-vous, Monsieur le ministre des affaires étrangères, nous indiquer quelle sera la position du gouvernement français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères - Cette conférence s'est ouverte le 15 juin et j'ai présenté le 17 juin les positions arrêtées par le Premier ministre, avec l'accord du Président de la République. Elle va durer plusieurs semaines et son travail sera compliqué. La réussite suppose la conciliation de plusieurs exigences.

Nous voulons une cour qui puisse véritablement s'imposer et mettre un terme à l'impunité de crimes particulièrement odieux ; d'où une compétence qui devrait être automatique pour les crimes de génocide et contre l'humanité. En revanche nous avons proposé que la négociation de Rome détermine les modalités de la compétence de la cour sur les crimes de guerre, qui ne comportent pas toujours le même caractère d'automaticité que les autres crimes que j'ai cité.

Une autre question sur laquelle l'accord n'est pas encore réalisé est celle de la saisine. Nous proposons que la cour puisse s'auto saisir dès lors qu'il y a accord entre le procureur et la chambre préliminaire. Nous souhaitons en effet réconcilier dans cette institution le droit de tradition romano-germanique et la common law, qui ne doit pas y prévaloir seule. Reste aussi la question de l'accès des victimes à la procédure. Reste enfin le problème du Conseil de sécurité, sur lequel existent de vraies divergences. Certains pays soutiennent qu'il n'a pas son mot à dire. D'autres, dont la France, ne souhaitent pas créer un organisme qui risquerait d'entrer en contradiction avec les responsabilités du Conseil de sécurité, dont ce n'est pas le moment de se passer, si l'on considère le nombre de conflits qui échappent à tout contrôle. La France, reprenant une initiative de Singapour, a proposé que dans les cas où la cour se saisirait d'un dossier traité en même temps par le Conseil de sécurité, celui-ci puisse lui demander de renoncer.

Nous avons adopté une position ouverte, mais responsable. Nous voulons que cette organisation s'inscrive dans la durée, s'impose dans le système international, et contribue à empêcher l'impunité. Nous ne savons pas encore si nous parviendrons à un accord à Rome, car les positions sont très différentes. La France a une position médiane, respectée de tous, et elle est en mesure de contribuer de façon décisive à une solution. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

ANCIENS COMBATTANTS D'AFRIQUE DU NORD

M. Dominique Paillé - Parmi les conditions d'attribution de la carte de combattant, deux suscitent aujourd'hui le rejet des organisations d'anciens combattants d'Afrique du Nord. La première est l'obligation de quatre-vingt-dix jours, retenue au lendemain du premier conflit mondial, qui présentait des caractères tout à fait différents de ceux des opérations en Afrique du Nord. La seconde est l'obligation pour les demandeurs de justifier d'actions de feu. Or dans certains cas les archives militaires qui permettaient de justifier leur demande ont disparu, ce qui entraîne une réponse négative. Qu'entend faire M. le secrétaire d'Etat aux Anciens combattants pour résoudre ces deux questions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Alain Richard, ministre de la défense - Vous évoquez un débat déjà ancien, et bien connu du ministère des Anciens combattants comme des associations. Parmi les préoccupations du ministère figure au premier chef un souci d'harmonie et d'équité entre les différentes générations du feu. Les conditions posées, et qui ont été négociées avec les organisations représentatives, tiennent compte des usages anciens qui furent appliqués aux générations précédentes. S'agissant de la durée de présence, il est difficile de revenir sur ce principe sans rouvrir les conditions d'attribution des reconnaissances à l'ensemble des générations antérieures.

Pour ce qui concerne en revanche les lacunes des archives permettant de justifier les demandes, le ministère a repris avec les associations une discussion qui avance. Naturellement l'attention vigilante des parlementaires pour soutenir les intérêts moraux des anciens combattants d'Algérie est pris en compte par mon collègue Jean-Pierre Masseret. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

GIAT INDUSTRIES

M. Jean-Claude Sandrier - Vous avez abordé hier, Monsieur le ministre de la défense, la situation de GIAT Industries, en évoquant la baisse des marchés, le budget d'investissement de la défense, la diversification. Sur tous ces points la responsabilité de l'Etat, actionnaire quasi-unique, est totalement engagée. ("C'est vrai !" sur plusieurs bancs du groupe du RPR) Des commandes qui auraient dû être passées depuis le 1er janvier ne l'ont pas été. (Mêmes mouvements) Des engagements pris lors du vote du budget n'ont pas été tenus. (Mêmes mouvements) L'augmentation prévue du budget de la défense pour 1999 n'apporte rien de plus à GIAT. A cela s'ajoutent la politique de changement du format et de la mission des armées, et le choix d'immerger brutalement GIAT dans la jungle d'une loi du marché sans limites. Après une baisse des effectifs de 50 % en dix ans, il est question d'en supprimer à nouveau 30 à 40 %, ce qui mettrait en cause la capacité industrielle, technique et de recherche du groupe, et la vie de plusieurs bassins d'emploi, situés dans des régions déjà fragilisées.

En outre il n'y a jamais eu une réelle volonté, ni les moyens nécessaires, pour une diversification des activités civiles en interne, qui peut seule sauver et consolider le potentiel industriel. Elle n'est pas menée à la hauteur voulue, quand elle n'est pas freinée et de multiples propositions négligées.

Il serait inconcevable qu'une décision aussi lourde que la suppression de 30 ou 40 % des emplois soit prise de façon technocratique et arbitraire, hors de l'avis des principaux intéressés et de l'Assemblée nationale. Avec mon collègue Bernard Outin, de la Loire, département concerné par trois sites, je vous pose ces questions. Etes-vous d'accord pour tenir une réunion en urgence avec la direction de GIAT, la DGA, les syndicats et les élus concernés, sur la situation et l'avenir de GIAT ? Cette réunion devrait notamment examiner un plan de transition associant recherche et production, tant militaires que civiles. Etes-vous d'accord pour arrêter, ou au moins suspendre, le plan de suppression d'emplois programmé ? Etes-vous d'accord enfin avec la proposition du groupe communiste d'organiser un débat à l'Assemblée sur les restructurations des industries d'armement, la politique d'alliances européennes dans ce domaine et leurs conséquences sur la capacité de décision de la France et sur sa souveraineté ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

M. Alain Richard, ministre de la défense - GIAT Industries se heurte à un marché en très forte diminution, conséquence d'une situation internationale dont nous voyons aussi les aspects positifs : les risques de guerre en Europe -j'entends de guerre massive- ont fortement diminué. La situation de GIAT Industries est donc difficile, même si la baisse des crédits est stabilisée. Le Gouvernement a pris sur les programmes une position qui a assuré à l'entreprise une meilleure vision de l'avenir. Il lui apporte par ailleurs un soutien maximal à l'exportation. Mais nous ne pouvons pas créer des marchés artificiels. Un plan d'adaptation est donc nécessaire. La direction le prépare. Le rôle de l'Etat actionnaire est de soutenir l'entreprise dans cet effort pour réaliser les conditions de sa pérennité.

L'Etat a consacré à l'entreprise huit milliards de recapitalisation depuis un an, ce qui est la meilleure preuve de sa volonté d'assurer sa consolidation à long terme. (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR) Cela dit, la ligne stratégique qu'elle doit suivre consiste à tenir sa place dans une concurrence dure ; ainsi seulement assurera-t-elle son avenir. On n'imposera à aucun Etat étranger d'acheter les armes de GIAT si elles ne sont pas compétitives. Les premiers signes encourageants en matière de partenariat montrent que GIAT a déjà acquis une crédibilité dans ce domaine.

Il y a une autre responsabilité de l'Etat : c'est de soutenir un nouveau développement dans les villes ou les départements qui ont des implantations de GIAT Industries. A cet égard, l'Etat a donné à l'entreprise des orientations claires et j'en parlais encore ce matin à son président. Pour favoriser ce développement, elle peut s'appuyer sur de nouveaux crédits d'incitation, votés par l'Assemblée dans le budget de 1998. Des comités de sites ont d'autre part été créés, regroupant tous les acteurs économiques et sociaux. Leur fonction est de saisir tous les potentiels nouveaux qui peuvent être développés localement. Je suis d'accord pour faire la synthèse de ces propositions au niveau national, sur la base du travail des comités de site. Mais tout d'abord je réaffirme la confiance du Gouvernement dans la direction de l'entreprise et dans le développement de la concertation sociale en son sein, pour mener à bien la transformation vers la compétitivité, qui est la seule garantie d'avenir, et qui est déjà bien engagée.

Je suis bien sûr à la disposition de l'Assemblée pour tout débat sur le dossier, comme je l'ai fait il y a huit jours devant votre commission de la défense, et comme je le ferai dans huit jours devant votre commission des finances. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

SECTEUR FINANCIER PUBLIC ET PARAPUBLIC

M. Jean-Pierre Brard - Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances. Les salariés des caisses d'épargne sont en grève et leur inquiétude n'a d'égale que la nôtre. Celle-ci ne porte pas seulement sur les caisses d'épargne, mais sur l'avenir de tout le secteur financier public et parapublic, dont le Gouvernement a absolument besoin pour mener avec détermination ses politiques en faveur de l'emploi. Pour le dire franchement, la façon dont vous gérez ces dossiers ne nous convient pas. Bien que députés, et membres de la commission des finances, nous découvrons dans les journaux vos décisions sur le GAN, le CIC... Il paraît même que le Crédit foncier serait vendu, ce qui serait un comble, à General Motors ! Concernant les caisses d'épargne, je suis très loin de la question posée tout à l'heure, laquelle n'était pas en contradiction avec les appétits de l'Association française de banques, désireuse de démanteler le réseau des caisses d'épargne... Les salariés et les millions de déposants ont besoin de savoir vos intentions quant à ce réseau. Lui reconnaissez-vous, contrairement à un rapport qui vous a été remis récemment, un rôle de banquier pour des millions de familles modestes ? Reconnaissez-vous aux caisses d'épargne un rôle dans l'aménagement du territoire ? Quels sont votre calendrier et vos intentions ? Quand, enfin, débattrons-nous ici de ce que doit être la politique de la nation envers le pôle financier public et parapublic ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie - Je ne reviendrai pas sur l'ensemble de la gestion du secteur financier. Je regrette que vous n'en appréciez pas les modalités, d'autant que s'agissant de la privatisation du CIC par exemple -imposée par la Commission de Bruxelles en raison de recapitalisations qui avaient eu lieu- l'ensemble des organisations syndicales ont remercié le Gouvernement pour sa façon de procéder et pour le résultat obtenu.

Les caisses d'épargne, je l'ai dit, sont un grand réseau qui a une vocation d'intérêt général en ce qui concerne la collecte comme l'emploi des ressources. Il fournit des services divers, dont le livret A, à une population qui n'est pas des plus favorisées, et il finance le logement social, ce qui est une mission de base à laquelle personne ne veut renoncer.

Mais trop spécialisé sur le livret A, ce réseau a des parts de marché trop faibles et donc une rentabilité insuffisante. Pour assurer sa pérennité, il faut -toujours dans le souci de l'intérêt général- lui ouvrir un champ plus large.

Une vaste concertation a eu lieu avec les salariés, leurs organisations, les dirigeants, l'Etat. M. Raymond Douyère a rédigé un excellent rapport et fait des propositions que le Gouvernement a l'intention de suivre. La concertation se poursuit afin de recueillir l'avis de chacun sur une esquisse de projet. Lorsqu'il sera élaboré, il vous sera soumis.

Quelles en sont les grandes orientations ? D'abord, il faut donner à ces caisses, propriété de la nation, un statut coopératif ; ensuite, il faut donner à ce qui est un réseau une vraie structure de groupe pour pouvoir lutter contre la concurrence ; enfin, il faut réaffirmer sa mission d'intérêt général. Le Gouvernement veut un secteur financier puissant qui puisse fournir des emplois, et financer au mieux les besoins de l'économie et du logement social. Ce sera le cas avec le projet sur les caisses d'épargne.

Les discussions avec les partenaires seront terminées dans quelques semaines. Le projet de loi pourra être présenté au conseil des ministres et la discussion s'engager à l'automne ; elle aura lieu le plus tôt possible à l'Assemblée pour que la réforme puisse prendre effet au 1er janvier 1999.

M. le Président - Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Je suspends la séance.

La séance, suspendue à 16 heures 5, est reprise à 17 heures 15 sous la présidence de M. de Robien.

PRÉSIDENCE DE M. Gilles de ROBIEN

vice-président


Top Of Page

ÉLECTION DES CONSEILS RÉGIONAUX (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi relatif au mode d'élection des conseillers régionaux et des conseillers à l'Assemblée de Corse et au fonctionnement des conseils régionaux.

ART. 3 (suite)

M. René Dosière, rapporteur de la commission des lois - L'amendement 20 de la commission a pour objet que le nombre de sièges accordé au titre de la "prime" soit arrondi à l'entier supérieur plutôt qu'inférieur.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur - Pas d'objection.

L'amendement 20, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Claude Sandrier - Notre amendement 50 tend à ce que la répartition à la proportionnelle, qui suit l'attribution de sièges faite à la liste ayant recueilli la majorité absolue, se fasse non entre toutes les listes mais entre toutes les "autres" listes que celle-là.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement.

M. le Ministre - Même avis défavorable.

L'amendement 50, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alfred Marie-Jeanne - Mon amendement 14 tend à rédiger ainsi le troisième alinéa : "Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour il est procédé à un second tour de scrutin à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application du quatrième alinéa ci-après".

M. Jean Claude Sandrier - Notre amendement 51 substitue aux mots : "au quart du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier inférieur, les mots : "à la moitié du nombre des sièges à pourvoir, arrondi à l'entier supérieur, plus trois".

M. le Rapporteur - Avis défavorable sur les amendements 14 et 51. L'amendement 21 est retiré.

M. Christian Paul - L'amendement 42 est retiré.

M. le Ministre - Même avis défavorable.

L'amendement 14, mis aux voix, n'est pas adopté.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement 51, mis aux voix par assis et levés, est adopté.

M. le Président - Par conséquent, l'amendement 22 tombe.

M. le Rapporteur - L'amendement 23 dit qu'en cas d'égalité des suffrages, avantage est donné à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la moins élevée.

M. le Ministre - Pas d'objection.

L'amendement 23, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Claude Sandrier - Dans la dernière phrase du troisième alinéa de cet article, notre amendement 52 subsiste aux mots "toutes les listes" les mots : "les autres".

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement 52, mis aux voix par assis et levés, est adopté.

M. Jean-Claude Sandrier - Dès lors que le mode de scrutin garantit une majorité absolue des sièges pour une liste, il est inutile d'introduire un seuil. Aussi proposons-nous, par notre amendement 53, de supprimer le quatrième alinéa.

M. le Rapporteur - Avis défavorable.

M. le Ministre - Même avis.

L'amendement 53, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 24, de coordination, donne l'avantage aux plus jeunes, au lieu des plus âgés.

M. le Ministre - Pas d'objection.

L'amendement 24, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Claude Sandrier - Notre amendement 54 assure une représentation minimale de 3 élus à chaque département et dit que les candidats doivent, à cet effet, indiquer le département auquel ils se rattachent.

M. le Rapporteur - Avis défavorable car il n'est pas opportun de réintroduire le cadre départemental dans un projet qui crée une circonscription régionale.

M. le Ministre - Il serait en effet paradoxal d'exiger de chaque élu un tel rattachement alors que ce projet entend promouvoir le fait régional.

M. Christian Paul - La circonscription régionale unique est en effet un élément clé du texte, qui aidera nos concitoyens à mieux comprendre l'institution qu'est la région.

M. Pierre Albertini - Il ne s'agit pas de réintroduire un cadre départemental mais d'assurer une juste représentation de tous les départements. Je conçois que la disposition proposée soulève quelques problèmes techniques ; mais nous pouvons y remédier d'ici à la deuxième lecture. Faute de l'adopter, en cas de fusion des listes, certains départements risquent de se retrouver privés de toute représentation.

Mme Michèle Alliot-Marie - Notre souci est que tous les départements, même ruraux, même peu peuplés, soient représentés au conseil régional afin que leurs intérêts y soient bien défendus. C'est d'autant plus important que la politique d'aménagement du territoire semble en ce moment plus tournée vers les villes que vers les campagnes.

Nous soutenons donc cet amendement.

M. le Rapporteur - Nous sommes opposés à toutes les propositions par lesquelles on voudrait revenir sur le principe du cadre régional. En constituant leur liste, les responsables politiques veilleront à ce que l'ensemble du territoire soit représenté.

M. le Ministre - Cet amendement rendrait le mode de scrutin trop opaque. Il faut trouver autre chose. Avis défavorable.

M. Christian Estrosi - La réaction du rapporteur me surprend. S'il fait confiance aux formations politiques, pourquoi a-t-il déposé à l'article suivant, un amendement pour leur imposer la parité entre candidats masculins et féminins ?

L'amendement 54, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Je vous invite à voter l'article 3 ; mais en raison des modifications qui lui ont été apportées, je demanderai une deuxième délibération.

L'article 3, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 4

M. Pierre Albertini - Le choix de la représentation proportionnelle à deux tours impose au Gouvernement bien des contorsions, qu'il s'agisse de la fusion des listes ou du score minimal pour se présenter au second tour.

En toute logique, un scrutin proportionnel ne doit comporter qu'un seul tour. La diversité de la représentation est ainsi garantie, même si la liste gagnante bénéficie d'une prime. Ce système, qui a l'avantage de la simplicité, empêche tout rapprochement de circonstance. Je fais miens les arguments développés hier par Mme Alliot-Marie et M. Goasguen.

Le ministre a dit que la représentation proportionnelle à un tour est contraire à la tradition française. Mais c'est la proportionnelle en général qui nous est étrangère. Pourtant, c'est vous qui avez choisi ce mode de scrutin en 1985.

Enfin, on ne peut comparer le scrutin régional à l'élection municipale. Dans les villes de plus de 3 500 habitants, le mode de scrutin est majoritaire pour les trois quarts des sièges...

M. Gérard Gouzes - Pour la moitié !

M. Pierre Albertini - La moitié des sièges va à la liste arrivée en tête, mais l'autre moitié est répartie à la proportionnelle entre toutes les listes, y compris celle-ci. Dans les faits, ce sont donc bien les trois quarts des sièges qui lui sont attribués. Il s'agit en réalité d'un scrutin majoritaire corrigé par la proportionnelle. Ce n'est pas le cas de ce que vous proposez pour les régionales.

En outre, le principe de proximité et l'équation personnelle jouent un rôle beaucoup plus grand aux municipales qu'aux régionales.

Par ailleurs, Monsieur le ministre, les fusions de listes sont extrêmement rares aux municipales. Vos services pourront vous le confirmer pour les élections de 1989 et de 1995. En choisissant sa liste, l'électeur choisit aussi son maire. Les réflexes électoraux ne sont pas les mêmes aux régionales.

Votre dispositif, en revanche, tend à encourager les fusions. Ainsi, un amendement qui vient de nous être distribué vise à abaisser de 5 à 3 % le score minimal à partir duquel une liste peut fusionner avec une autre.

Politiquement déséquilibré, le mode de scrutin que vous nous proposez sera favorable à la gauche et défavorable à la droite modérée.

M. Maurice Leroy - Ma collègue Christine Boutin souhaitait intervenir à propos de l'amendement 25, relatif à la parité et adopté par la commission. Le groupe UDF ne prendra pas part au vote de cet amendement, qui reprend le texte d'un amendement déposé naguère par Mme Neiertz pour modifier une loi relative aux élections municipales. On sait qu'il avait été jugé inconstitutionnel. C'est pour cette raison, d'ailleurs, que le Gouvernement a déposé un projet de révision.

Votre amendement est un cavalier, il est vrai très médiatique. Mais il est parfaitement inconstitutionnel aujourd'hui. Du reste, pourquoi voudriez-vous nous faire réviser notre loi suprême ?

Le texte rédigé par le Gouvernement est d'ailleurs plus clair que celui de votre amendement 25, selon lequel "chaque liste assure la parité entre candidats masculins et féminins". Sur une liste de vingt candidats, rien n'empêche de réserver les dix premiers sièges aux hommes ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) Je comprends que cela vous gêne, comme dirait Mme Aubry...

Il est heureux qu'à l'article précédent, le groupe communiste ait déposé un amendement pour garantir la parité entre ruraux et urbains. Nous l'avons voté, d'ailleurs. Mais il va passer sous le couperet de la deuxième délibération !

Pourtant, il est clair que par électoralisme, les formations donneront l'avantage aux zones les plus peuplées. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

Vous devriez écouter Elisabeth Badinter, qui vient de signer un article remarquable. Selon elle, "le combat pour l'égalité ne doit pas passer par la parité, même à travers une formulation aussi anodine que celle proposée par le Gouvernement. C'est un mauvais coup porté à la République, car c'est la porte ouverte au différentialisme, comme n'aurait osé le rêver les plus véhémentes des féministes américaines. La grandeur de la République, c'est qu'un citoyen abstrait, n'importe quel être humain, puisse représenter tous les autres. Or on introduit le biologique dans le politique. C'est la première fois qu'on inscrit une telle différence entre les sexes dans la Constitution, et c'est grave."

Nous aurons un débat à ce sujet lorsque vous modifierez la Constitution. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

En attendant, vous avez voulu faire un coup médiatique. L'opposition n'est pas obligée de tomber dans tous les pièges qui lui sont tendus. Le groupe UDF ne participera pas au vote sur cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Gérard Gouzes - Courage, fuyons !

M. Christian Estrosi - Vous n'avez cessé de dire hier, Monsieur le ministre et Monsieur le rapporteur, que vous entendiez, par ce nouveau mode de scrutin, donner des majorités stables aux assemblées régionales et limiter les tentations qui pouvaient mener certains élus de la droite républicaine aux côtés du Front national. Nous avons, au contraire, affirmé que cette loi était un texte de circonstance, de confort, et qu'il y avait même une certaine complicité entre l'extrême-droite et vous. Je voudrais le démontrer à propos de cet article.

M. Mégret déclarait ce matin : "Ca va peut-être nous faire reculer en nombre de sièges, dans certaines régions, à score constant, mais dans la mesure où il y aura une prime pour ceux qui arriveront en tête, cela peut nous permettre de gagner certaines régions comme Provence-Alpes-Côte-d'Azur." "Les réformes du scrutin, note-t-il encore, se retournent souvent contre ceux qui les avaient concoctées à leur profit."

La démonstration de ce que nous disions hier est éclatante !

Vous déclariez hier à cette tribune, Monsieur le ministre : "On ne combat pas le Front national en changeant le mode de scrutin ; on le combat par les idées, en montrant par exemple que l'expression "préférence nationale" signifie qu'on remet en question le principe de l'égalité républicaine". N'êtes-vous pas gêné quand vous signez des arrêtés qui décernent la médaille de la famille française ?

Un décret du commissariat général à la famille définissait cette médaille comme "une récompense accordée, dans les familles dont le chef et les enfants sont français, aux mères de famille françaises d'origine qui ont dignement élevé de nombreux enfants". Un deuxième décret disait que cette médaille ne pouvait être accordée qu'aux mères de famille de nationalité française dont le mari et tous les enfants sont français. Cette médaille, par votre signature, vous la décernez sans cesse, Monsieur le ministre ! Dois-je rappeler que le premier décret date du 17 décembre 1943, qu'il est signé Pierre Laval et que le deuxième date du 23 octobre 1982 et qu'il est signé Pierre Mauroy ?

A propos du présent projet de loi, vous avez voulu nous donner des leçons...

M. Jean-Pierre Baeumler - Vous en avez besoin !

M. Christian Estrosi - Le débat a démontré, au contraire, qu'il y a une véritable complicité entre vous et l'extrême-droite. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Sur cette modification scélérate du mode de scrutin, nous vous combattrons donc de toutes nos forces ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR)

M. Henri Plagnol - Le Gouvernement et la majorité nous ont gratifiés de tout un catéchisme sur la moralisation de nos institutions et des modes de scrutin.

Il s'agissait, paraît-il, de faire que les régions soient gouvernables. On comprend qu'il y ait urgence pour le Gouvernement à légiférer pour résoudre le problème que lui posent les régions Ile-de-France et Provence-Alpes-Côtes d'Azur, mais faut-il faire une loi de portée générale en visant ainsi deux cas d'espèce ?

Il fallait, d'autre part, selon vos dires, faire que les exécutifs régionaux ne dépendent plus des votes extrêmes et mettre fin au chantage des formations qui ne s'inscrivent pas dans la tradition républicaine. Or vous avez inventé, à l'article 4, un système qui aboutit au résultat inverse. Vous avez d'ailleurs fait, pour cela, preuve d'une imagination qui n'a pu s'appuyer que sur le précédent des apparentements destinés à sauver les notables croupissants de la IVème République. Il est fâcheux de vous voir, Monsieur le ministre, vous qui aimez à évoquer la citoyenneté et la défense de la République, en vous référant même parfois, abusivement, aux idéaux gaullistes, renouer avec des pratiques qui rappellent les errements de la IVème République finissante.

Vous nous proposez un mode de scrutin proportionnel à deux tours. La proportionnelle a un sens quand le scrutin est à un tour et si elle permet de représenter les minorités.

Il aurait été facile, si votre seul but était de rendre les régions gouvernables, de donner la prime majoritaire à la liste arrivée en tête au premier tour.

Plusieurs députés socialistes - Nous nous inspirons des municipales !

M. Henri Plagnol - Ce parallélisme, je le montrerai, ne tient pas !

Vous proposez, en outre, un système de fusion artificiel et scandaleux, en mettant la barre à 10 % des suffrages exprimés, c'est-à-dire juste au niveau qui vous aurait assuré, avec les votes émis aux dernières régionales, le pouvoir dans la quasi totalité des régions ! Si ce n'est pas une magouille, qu'est-ce que c'est ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)

Il y a d'ailleurs, sur ce point, quelques inquiétudes dans les rangs de la majorité plurielle. Un amendement du groupe communiste, repris par le Gouvernement, tend à abaisser ce seuil jusqu'à 3 % des suffrages exprimés ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste)

Avec votre système, soit nous ferons alliance avec le Front national au second tour (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) et vous continuerez à nous infliger les leçons que vous nous faites subir depuis des mois ; soit nous refusons cette alliance, et vous nous condamnez à être dans l'opposition ! Vous faites du Front national l'arbitre des prochaines élections régionales. Vous ne pouviez concevoir projet plus pervers, plus éloigné des intentions affichées ! Ce n'est pas un projet de moralisation de nos institutions : c'est un projet de démoralisation et de confusion dont vous porterez la responsabilité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Patrick Devedjian - Le mécanisme de la fusion est, certes, emprunté à la loi relative au scrutin municipal, mais il est immoral.

En effet, il suffit d'un accord entre les deux têtes de liste pour que la fusion ait lieu. La loi autorise ainsi la tête de liste à tromper ses co-listiers et à conclure des accords immoraux.

En outre, la fusion a lieu au deuxième tour, alors qu'il n'est plus possible de présenter une liste nouvelle. On peut ne pas annoncer au premier tour les fusions auxquelles on procédera au deuxième.

Plusieurs députés socialistes - Millon !

M. Patrick Devedjian - Quand il y a fusion, au deuxième tour, il n'est plus possible de présenter une nouvelle liste.

Plusieurs députés socialistes - Soisson !

M. Patrick Devedjian - Ainsi, le corps électoral est trompé.

La fusion est donc bien immorale. (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR)

M. Christian Paul - On pouvait espérer jusqu'à hier que ce débat soit l'occasion de chercher ensemble une réforme du mode de scrutin régional, (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) d'autant qu'une large majorité semblait d'accord pour instituer une circonscription électorale unique.

Mais pour l'opposition, une réforme vient toujours trop tôt ou trop tard ; elle constitue toujours une surenchère et n'est dictée que par des arrière-pensées ! Mais depuis hier, nous vous voyons chercher dans une réforme du mode de scrutin régional un remède aux tentations d'alliance avec le Front national. (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

Vous ne trouverez jamais dans un mode de scrutin ni le courage qui vous manque, ni les valeurs qui devraient vous guider et que M. Millon, M. Soisson, M. Balladur même, ont oubliées ! (Exclamations sur les mêmes bancs)

Les solutions que vous proposez sont inopérantes. Ainsi de votre amendement qui porte à 10 % des inscrits la barre à franchir pour participer au second tour, ce qui, avec les résultats qu'il a obtenus au printemps 1998, n'empêcherait pas le Front national de se maintenir, y compris chez vous, Monsieur Estrosi !

M. Christian Estrosi - Il gagnerait, même, avec votre texte !

M. Christian Paul - Tout ce que vous défendez n'est donc qu'un leurre. Le Gouvernement, pour sa part, nous propose un texte équilibré, qui permettra de constituer des majorités stables. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Renaud Donnedieu de Vabres - Il est normal que notre discussion soit un peu passionnée car le moment est solennel. Que nos concitoyens nous comprennent bien : nous ne cherchons pas, à travers une loi électorale, à brider l'expression légitime de leurs opinions. Si nous voulons réduire l'audience de certaines formations politiques, c'est par de bonnes propositions et par l'abandon de mesures provocatrices... (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UDF)

Certains ici devraient s'abstenir de donner des leçons. Je mes mets en garde contre l'utilisation de la loi électorale pour créer la paralysie politique et donner l'audience la plus grande possible à une certaine formation : cet article est du sur-mesure pour le Front national !

En outre, le raffinement des propositions nouvelles relève de la haute couture : l'amendement sur les 3 %, s'agissant du droit de fusionner, est sans doute un geste envers une partie du Gouvernement...

En tout cas, les dispositions que vous proposez, notamment à cet article, vous interdiront de nous donner à l'avenir des leçons de républicanisme ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Jean-Pierre Soisson - Ce texte comporte deux parties. S'agissant du fonctionnement des conseils régionaux, il organise un pouvoir présidentiel. Certains membres de la majorité n'y étaient pas favorables autrefois... Je n'en ai pas besoin en Bourgogne, j'en profiterai, merci.

En ce qui concerne le mode de scrutin, l'article 4 conduit à une véritable banalisation du Front national.

Plusieurs députés communistes et socialistes - Pas vous !

M. Jean-Pierre Soisson - Il met la droite modérée dans les bras du Front national, pour vous permettre de dénoncer ensuite ses liaisons dangereuses !

M. Christophe Caresche - Je suis assez surpris par l'attitude de l'opposition car ce projet ne fait que reprendre le système en vigueur pour les élections municipales.

MM. Yves Nicolin et Claude Goasguen - Cela n'a rien à voir !

M. Christophe Caresche - D'ailleurs, l'adoption de ce système avait également été proposée par l'opposition.

M. Pierre Albertini - Pas du tout !

M. Christophe Caresche - M. Soisson n'est vraiment pas le mieux placé pour parler du Front national... Notre objectif est de sortir celui-ci de l'enjeu régional. (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Pierre Albertini - C'est une plaisanterie !

M. Christian Estrosi - Le crime est signé...

M. Christophe Caresche - C'est ce qui nous conduit à donner aux majorités relatives le pouvoir de gouverner. Ainsi, écarte-t-on les coalitions, affichées ou non, avec le Front national : à cet égard, ce texte va dans le sens de la moralisation.

Enfin, nous considérons que la moralité impose que les alliances se fassent devant les électeurs. L'immoralité, Monsieur Devedjian, c'est que, comme vous le proposez, les alliances se fassent après les élections ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Rapporteur - L'amendement 25 de la commission est identique au 43, que va défendre M. Christian Paul.

M. Christian Paul - L'objectif de parité entre les hommes et les femmes dans l'accès aux responsabilités et aux mandats sera bientôt inscrit dans notre Constitution. Il est donc normal que nous inscrivions la parité dans ce texte par lequel nous réformons un mode de scrutin : il serait à l'honneur de l'Assemblée tout entière de montrer sa volonté de réaliser ce changement historique -fondé sur le principe d'égalité, sans utiliser la méthode des quotas.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois - M. Maurice Leroy a qualifié cet amendement de cavalier et a invoqué son inconstitutionnalité. Je constate cependant qu'avec raison il envisage de ne pas s'y opposer...

Nous allons être saisis d'un projet de loi constitutionnelle sur la parité. Quoi de plus normal que de concrétiser ce principe ? Si par malheur l'adoption de ce texte constitutionnel venait à être retardée, il serait toujours temps d'en tirer les conséquences. Quelle mine aurions-nous si, une fois la révision constitutionnelle votée, nous devions encore attendre des mois ou des années pour en donner une traduction dans un texte législatif ?

Quant à la crainte que les candidatures féminines soient refoulées en queue de liste, je comprends que les femmes de l'opposition l'éprouvent ; dans la majorité, les femmes sont sur ce point tout à fait tranquilles ! (Protestations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR ; applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Muguette Jacquaint - Je voudrais dire l'accord du groupe communiste sur ces amendements relatifs à la parité. Les femmes ont désormais leur place dans tous les domaines ; elles entendent avoir celle qui leur revient dans les décisions politiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste)

M. Christian Estrosi - Cet amendement me gène pour plusieurs raisons. D'abord, si je souhaite constituer une liste comportant plus de femmes que d'hommes, je ne le pourrai pas. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe socialiste) Mais ceci touche au débat de fond, que nous aurons à propos de la loi constitutionnelle. Dans l'immédiat, d'un point de vue juridique, je suis surpris que vous puissiez introduire la parité dans la loi avant même que le Parlement ait modifié la Constitution, ce qui rend ce texte inconstitutionnel. En outre, et cette fois il s'agit de technique législative, l'adoption de ces amendements rendrait inapplicable la loi pour la constitution des listes. Voyez, dans l'annexe du rapport, les effectifs des conseils régionaux : ce sont tous des nombres impairs ! Comment les préfets pourront-ils prononcer la recevabilité des listes ?

Le peu de succès des listes de femmes aux élections régionales le montre, là n'est pas la préoccupation principale de nos concitoyens. Mais puisque vous pensez que nous vivons dans un système discriminatoire à l'égard des femmes, ne devriez-vous pas préciser si le numéro un de la liste sera un homme ou une femme ? Si l'amendement est adopté, il faut préciser l'ensemble des conditions d'application de cette parité.

M. Maurice Leroy - Je m'étonne, Madame la présidente de la commission des lois, que, compte tenu de cette fonction, vous puissiez dire que ces questions juridiques n'ont pas tellement d'importance. Le Gouvernement est maître de l'ordre du jour. Qu'est-ce qui l'empêchait de faire adopter la loi constitutionnelle avant le présent projet ? Quant aux femmes de l'opposition, ne vous inquiétez pas pour elles ! Dans mon département du Loir-et-Cher, M. Lang pourra vous le confirmer, c'est une femme remarquable qui a conduit notre liste. Il y a des femmes dans l'opposition, elles se battent, et vous le verrez !

Mme la Présidente de la commission - Il est clair que, dans ma fonction de présidence de la commission des lois, je ne saurais considérer avec légèreté les règles juridiques, et particulièrement constitutionnelles. Toutefois, Monsieur Leroy, il ne peut y avoir éventuellement inconstitutionnalité que lors de la promulgation de la loi ; c'est donc un abus de langage de dire que l'amendement est inconstitutionnel. D'autre part le Conseil constitutionnel, comme toutes les hautes instances de ce pays, est attentif à l'évolution de l'opinion et des moeurs. Ce qui fut sa jurisprudence en 1982, il lui appartient, et à lui seul, de la faire évoluer.

M. Christian Paul - Je ne résiste pas au désir de rapporter des propos récents tenus par une de nos collègues du RPR, Mme Bachelot. Evoquant la situation des femmes en politique, elle affirme qu'il faut "sortir de la proto-histoire". Nous en avons ici une manifestation éclatante, puisque je ne vois pas une seule femme sur les bancs de l'opposition. Mme Bachelot avoue ensuite qu'elle aurait préféré voir engager cette réforme par un homme ou une femme de sa sensibilité. Je regrette qu'elle ne soit pas là pour confirmer ce témoignage. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste).

M. Yves Cochet - Je me félicite de ces amendements...

Un député RPR - Trois pour cent !

M. Yves Cochet - Nous faisons beaucoup plus que cela aux élections régionales, et notamment parce que nos listes sont paritaires depuis 1986. Pour renforcer la pertinence de ces amendements, j'aimerais proposer un sous-amendement oral, pour écrire : "la parité en nombre et en places".

M. Christian Estrosi - Nous n'avons toujours pas entendu l'avis de M. le ministre.

M. le Rapporteur - Il est dommage -mais chacun a ses obligations- que le groupe de M. Cochet n'ait pu participer à cette réunion de la commission, car nous aurions pu alors approfondir cette discussion. Compte tenu des difficultés que comporte la rédaction de ce texte, je préfèrerais renvoyer à la deuxième lecture une éventuelle modification, ce qui nous permettrait d'y réfléchir.

M. le Ministre - M. Estrosi a dit hier que dans ce débat il avait peine à me suivre. J'en vois une nouvelle confirmation, puisque, s'il avait écouté mon discours liminaire, il aurait entendu que j'étais favorable à l'amendement sur la parité. Il suffit de regarder vos bancs : cela manque de femmes ! L'amendement réparera des oublis fâcheux qui doivent être corrigés. Et il sera constitutionnel, puisque le conseil des ministres a déjà approuvé le texte qui prévoit l'égalité d'accès des hommes et des femmes aux fonctions politiques. Le fait que le nombre de sièges soit impair n'a pas d'importance ; la parité sera réalisée à une unité près.

M. Renaud Donnedieu de Vabres - Il y a une ambiguïté dans notre débat. Nous pouvons tous partager l'objectif qu'il y ait plus de femmes dans la vie politique et parmi les élus. Ce que nous contestons, c'est que ce sujet ne fasse pas comme tel l'objet d'un débat, qu'il soit traité sporadiquement. Il en va de même pour les modes de scrutin. Pourquoi ne pas avoir un débat où nous fixerions des règles applicables à toutes les élections, quelles qu'elles soient, et notamment en ce qui concerne la grille d'accès au deuxième tour ? Pour ce qui est de la parité, n'essayez pas, vis-à-vis de nos concitoyens, de vous donner le beau rôle : il n'y a pas que la gauche qui se préoccupe de l'accès des femmes à la vie politique. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Il se trouve que vous avez la responsabilité de l'action gouvernementale : il est normal que vous fassiez des propositions. Mais je vous rappelle que le droit de vote à dix-huit ans, c'était nous, pas vous !

M. Yves Cochet - Au bénéfice des remarques du rapporteur, je retire mon sous-amendement oral.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de scrutin public sur les amendements 25, 43 et 69.

M. Christian Estrosi - Le groupe RPR demande une suspension.

M. le Président - Le scrutin est déjà annoncé.

A la majorité de 94 voix contre 0 sur 94 votants et 94 suffrages exprimés, les amendements identiques 25, 43 et 69 sont adoptés. (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV)

M. Gérard Gouzes - Mon amendement 17 prévoit que les listes doivent mentionner le département de la région auquel chaque candidat est rattaché. Il ne s'agit pas d'un amendement départementaliste. Régionaliste je suis, ayant su sur le terrain ce que donne l'addition des intérêts départementaux. Mais il est bon que la liste représente tous les secteurs géographiques de la région. Mon amendement n'est pas contraignant, il est pédagogique et vise à ce qu'on tienne compte des petits départements. C'est une voie modérée à laquelle le rapporteur pourrait se rallier pour réaliser un consensus entre les partisans de ce qui a été voté, qui est un peu compliqué, et ceux des sections départementales.

M. le Rapporteur - Cet amendement a au moins le mérite de respecter le cadre régional du scrutin et j'ai déjà dit qu'il fallait tenir compte du sentiment qu'il exprime. Le scrutin régional ne doit pas conduire à ce que des zones peu peuplées ne soient plus représentées. Pour autant il ne faut pas retomber dans la départementalisation. Apparemment, ce n'est pas le cas. Apparemment. Mais après discussion la commission a repoussé l'amendement. Mieux vaudrait que son auteur le retire pour que nous puissions examiner plus à fond ses conséquences d'ici la deuxième lecture.

M. le Ministre - Il me semble -je m'exprime avec précaution- que l'amendement n'atteindrait pas son objectif, qui est de toucher l'opinion. En effet la déclaration déposée en préfecture ne fait pas l'objet de publicité et sert à l'administration au cas où elle veut contester la régularité de la liste. Il faudrait au moins rédiger le texte de façon plus pertinente. Mieux vaudrait le retirer.

M. Gérard Gouzes - Je note la prudence du ministre et du rapporteur. Il n'y aurait pas publicité certes, mais une simple mention. Mais elle nourrirait le dialogue républicain avec l'opinion, en sorte que chaque liste assure la représentation de tous les territoires. Je veux bien retirer cet amendement en espérant le voir revenir sous une autre forme, car il s'agit d'éviter qu'une liste ne représente que la partie urbaine ou la métropole d'une région.

Mme Michèle Alliot-Marie - Je reprends l'amendement. M. Gouzes et moi -solidarité Aquitaine, peut-être...- partageons le même souci. Tous les départements d'une région doivent être représentés. C'est dans le même esprit que nous avons soutenu l'amendement communiste. Il s'agit pour nous de faire pression en ce sens.

M. Gérard Gouzes - J'ai plaisir à entendre Mme Alliot-Marie, revenue parmi nous. Mais l'amendement qui était le mien ne prévoit pas que tous les départements soient représentés. Il oblige seulement à indiquer le département du rattachement de chaque candidat. Même si on l'adoptait, rien n'empêcherait de présenter une liste de candidats et de candidates -je le dis pour Mme Alliot-Marie puisqu'on a voté sur la parité en son absence -venant d'un seul département. Evidemment dans un tel cas cela se saurait, on se le dirait, on jugerait. Plutôt que de reprendre cet amendement par politique politicienne (Protestations sur les bancs du groupe du RPR) mieux vaut, Madame Alliot-Marie, le retirer pour avoir une chance de voter en deuxième lecture une disposition qui ira dans le sens que nous souhaitons tous les deux.

Mme Michèle Alliot-Marie - D'abord je vous rassure, Monsieur Gouzes. Je ne vous avais pas quittés, je me suis absentée une demi-heure pour dire sur RTL ce que je pense du texte du Gouvernement.

Ensuite, je veux conforter votre position. Je ne pense pas que vous avez déposé un amendement politicien. Vous n'auriez jamais fait une telle chose... (Sourires) Non, je suis sûre que votre amendement était mûrement réfléchi et comme il marque tout de même une petite avancée, je le reprends, fût-ce contre votre avis. (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF)

M. le Rapporteur - Le débat qui vient d'avoir lieu justifie la position initiale de la commission, à savoir le rejet.

Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'amendement 17, mis aux voix par assis et levés, n'est pas adopté.

M. Jacques Brunhes - Nous en arrivons à une série d'amendements tout à fait essentiels pour nous, concernant les seuils.

Dès lors que le système qui nous est proposé permet de dégager une majorité, on ne voit pas pourquoi il existerait des seuils, sinon pour écarter les petites listes, ce qui, on l'avouera, pose un problème de fond du point de vue de la démocratie et de la représentation de tous les courants de pensée. C'est pourquoi notre amendement 55 tend à supprimer toute restriction prenant la forme d'un seuil.

La fixation de seuils nous inquiète d'autant plus qu'elle s'inscrit dans un contexte préoccupant : on nous oblige à légiférer dans l'urgence sans que nous ayons été consultés, pas plus que nous ne l'avons été au sujet de la réforme du mode de scrutin européen. Bref, nous craignons une volonté hégémonique ("Ah !" sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) alors que la majorité est une majorité plurielle où chacun doit être écouté, entendu et consulté.

La réflexion du parti socialiste sur tous ces thèmes s'appuie sur la convention nationale de 1996, dont les conclusions conduisent, me semble-t-il, à accentuer la bipolarisation de la vie politique française, avec par exemple l'instauration d'un quinquennat qui ferait concorder élections législatives et présidentielle. En contrepartie, on nous dit que le président serait un président citoyen, soit mais nous en avons eu un qui avait écrit Le coup d'Etat permanent et on a vu ce qui s'en est suivi.

Bref, le groupe communiste ne transigera pas sur cette question des seuils. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement qui s'inscrit dans une logique de scrutin à un tour, où toutes les manoeuvres sont possibles, alors que nous prévoyons deux tours, avec entre les deux des regroupements s'opérant en toute clarté et ensuite ratifiés ou non par les électeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Ministre - M. Brunhes se trompe car le but du Gouvernement est seulement dans cette affaire d'assurer la gouvernabilité des régions en même temps que l'expression de la pluralité. (Protestations sur les bancs du groupe communiste ; exclamations sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR) C'est le souci de cet équilibre qui nous conduit à ne pas transposer mécaniquement le mode de scrutin municipal à l'échelon régional et donc à prévoir une prime de 25 % au lieu de 50 %. Quant au seuil requis pour fusionner avant le second tour, le Gouvernement vous proposera de l'abaisser à 3 %, ce qui garantit la représentation de la pluralité.

Entre les deux exigences que j'évoquais, il faut trouver un équilibre et placer le curseur au bon endroit, en évitant de se faire des procès d'intention. Je regrette qu'un compromis n'ait pu être trouvé sur cette question, car cela m'amène à émettre un avis défavorable sur cet amendement.

M. Jean-Marc Ayrault - Connaissant la rigueur intellectuelle et politique de M. Brunhes, (Murmures sur les bancs du groupe communiste) je suis un peu surpris par sa tentative de démonstration (Exclamations sur les mêmes bancs) et je voudrais rappeler que la convention nationale du parti socialiste qui s'intitulait "les acteurs de la démocratie" et qui a été soumise au vote des militants ne portait pas seulement sur les modes de scrutin mais aussi sur la parité, la réduction à cinq ans de tous les mandats, la justice, la démocratie sociale...

Pour ce qui est des élections régionales, nous disions qu'une réforme était nécessaire et qu'il fallait s'inspirer du modèle municipal, qui est contesté par une partie de certaines formations politiques, et peut-être à la marge par le parti communiste. ("Ah !" sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL), mais qui fait tout de même l'objet d'un certain consensus. Globalement, en effet, ce scrutin est apprécié par une très grande majorité de Français, conciliant représentation des différentes sensibilités et émergence d'une majorité.

Je suis donc très étonné que nos amis communistes considèrent comme un progrès de passer d'un seuil de 10 % à un de 5 %, car on voit, par exemple à la Knesset, ce qui se passe quand les petites minorités sont en position de faire -ou défaire- les majorités.

M. Gérard Gouzes - Tout à fait.

M. Jean-Marc Ayrault - Nous avons connu ce type de situation dans nos communes. Nous y avons mis fin en modifiant le mode de scrutin municipal. Ce n'est pas pour faire le contraire dans les régions !

Nos collègues communistes ont voté, avec la droite, une autre disposition qui relève de la même logique. Je vous mets en garde contre le risque que vous faites courir ainsi de permettre au Front national de se maintenir au second tour. (Protestations sur les bancs du groupe communiste) Je vous invite à réfléchir. Après avoir profité d'une coalition d'un instant, (Mêmes mouvements) j'espère que vous allez revenir à la raison. Monsieur Brunhes, ne caricaturez pas les positions du PS. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jacques Brunhes - Il n'est pas question, Monsieur le rapporteur, de proposer une élection à un seul tour. La question est réglée. Mais, Monsieur Ayrault, le PS n'est pas la seule composante de la majorité. Ce ne sont pas les textes des conventions socialistes qu'il faut mettre en oeuvre, mais des propositions résultant d'une réflexion commune. Or il n'y a eu aucune concertation sur les deux projets relatifs aux élections déposés par le Gouvernement. C'est grave.

Monsieur le ministre, nul ne souhaite rendre ingouvernable les régions. Mais grâce à la prime de 25 %, il est désormais certain qu'une majorité se dégagera partout. Il s'agit maintenant de réfléchir sur la répartition des sièges restants.

Ne confondons pas deux seuils. Le premier, qui peut être de 3 ou 5 %, est le score minimum pour pouvoir participer à la constitution de listes fusionnées au second tour. L'autre seuil est celui qui autorise une liste à se maintenir. En le fixant à 10 %, vous empêchez les petites listes qui ne veulent pas fusionner de rester présentes. Elles peuvent pourtant vouloir se maintenir pour des raisons de fond. Et s'il y a fusion, celle-ci doit avoir en vue un objectif politique.

M. Louis Mexandeau - Mon collègue Brunhes, dont j'apprécie les qualités, veut supprimer les seuils. Mais nous avons déjà connu un tel système, dans les années 30. On pouvait même se présenter au second tour sans avoir été candidat au premier et une liste pouvait se maintenir avec 2,65 % des voix. Cela a donné des résultats désastreux, car les petites listes ne disposent que du pouvoir de nuire et de gêner la liste arrivée en tête.

Je souhaite le retrait de cet amendement.

M. Yves Cochet - Monsieur Ayrault, c'est une autre "marge" qui va parler. (Sourires) M. Evin vient d'arriver et je le salue. S'il a été élu à Saint-Nazaire, c'est bien parce que la majorité était particulièrement plurielle...

M. Arnaud Montebourg - On pourrait en discuter ! (Sourires)

M. Yves Cochet - Le soutien des Verts vous a été utile. On gagne d'ailleurs toujours les élections à la marge. C'est ainsi qu'ont été élues quelques dizaines de députés socialistes, ainsi que les nôtres et ceux du PC. C'est ensemble que nous formons une majorité. Encore faut-il que les partenaires aient le choix de s'allier ou non et qu'ils soient à égalité, même s'il faut évidemment prendre en compte le vote des électeurs.

Pour cela, il ne faut pas que la loi en oblige certains à passer sous les fourches caudines ou à disparaître.

L'amendement de M. Brunhes va trop loin, car il vise à supprimer les seuils. Je crois qu'il en faut. Le Gouvernement a raison d'abaisser à 3 % le seuil autorisant la fusion. De la sorte, les listes folkloriques seront éliminées, tandis que les mouvements émergents pourront s'allier aux grosses formations. Pour le maintien au second tour, il convient de fixer le seuil à 5 %, score qui correspond à un niveau correct de représentativité, déjà reconnu par le code électoral.

Avoir le droit de se maintenir n'empêche nullement de fusionner. C'est une question de responsabilité devant les électeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

M. Alain Tourret - Il est certain que si nous étions en 1924, j'approuverais la position du PS, car les radicaux étaient alors majoritaires. (Sourires)

Les listes minoritaires n'auront pas d'existence politique si elles n'ont pas la possibilité de rester en lice au second tour.

L'amendement du groupe communiste va trop loin, mais il n'est pas question d'adopter un dispositif qui ferait disparaître toutes les composantes de la majorité autres que le PS. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

L'amendement 55, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Alfred Marie-Jeanne - Mon amendement 15 corrigé vise à abaisser à 5 % le seuil autorisant le maintien d'une liste au second tour.

Le projet permet aux listes ayant obtenu plus de 5 % des suffrages exprimés d'être admises à la répartition des sièges au premier tour, dans le cas où il n'y a pas de second tour. Mais il faudrait un score de 10 % pour se maintenir. Il serait plus logique d'adopter un seuil unique.

M. Alain Bocquet - Ce débat doit rester serein. Il y a certes une discussion au sein de la majorité plurielle, mais c'est plutôt bon signe. Nos différences nous enrichissent.

Qu'il n'y ait pas de confusion : nous sommes favorables à la proportionnelle et nous voulons que les régions soient gouvernables. Grâce à la prime de 25 %, il y aura toujours une majorité, quelles que soient les formations majoritaires et les listes minoritaires, quelles que soient les régions. On légifère pour tout le monde.

Mais s'il faut qu'une majorité existe, il importe aussi que les différentes sensibilités soient représentées.

Jules Guesde disait : "Au premier tour, on se compte, au second tour, on se rassemble".

Il est bon qu'au premier tour, chacun puisse s'exprimer et qu'au second, ce rassemblement se fasse en toute clarté sur un programme commun de gouvernement. C'est là une condition du respect du pluralisme.

Mettra-t-on la barre à 10 % ? Si l'on observe les résultats des élections, y compris ceux des régionales de 1992, on s'aperçoit qu'au-dessus de 10 %, on trouve le parti socialiste, les partis de droite et le Front national, mais non les autres formations qui composent la majorité plurielle.

Il n'est pas question que l'union, à laquelle nous sommes attachés, se fasse sous la contrainte d'une loi ; elle doit se faire librement si l'on veut que les composantes de la gauche plurielle fassent ensemble un travail solide.

Gare au vertige hégémonique ! On sait à quoi il conduit. De grâce, ne recommençons pas ! M. Brunhes supprimait tout seuil. Dans un esprit de conciliation, nous proposons, par l'amendement 72, de fixer un seuil à 5 %. Si ce seuil n'est pas accepté, nous voterons contre le projet.

Une loi votée par une majorité qui ne se retrouve pas est une loi boiteuse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste)

M. Yves Cochet - Très bien.

M. le Rapporteur - La commission a repoussé l'amendement 15 corrigé. Elle n'a pas eu l'occasion d'examiner l'amendement 72, mais puisqu'il est semblable à l'amendement 15 corrigé, elle l'aurait également repoussé.

M. le Ministre - Dans un texte resté célèbre, François Mitterrand, dans les années 1950, disait que le choix d'un mode de scrutin était affaire de circonstances ; il rejoignait ainsi les propos du général de Gaulle et la pensée de beaucoup d'entre nous.

François Mitterrand disait qu'il se demanderait d'abord à ce propos si ce choix était conforme à l'intérêt du pays ; ensuite, s'il l'était à la majorité à laquelle il appartenait ; enfin, il s'interrogerait, disait-il, sur les intérêts de son parti. N'inversons pas l'ordre des facteurs ! Quel est l'intérêt du pays ? C'est d'avoir des régions gouvernables.

Plusieurs députés communistes - C'est le pluralisme !

M. le Ministre - La pluralité des opinions doit, en effet, être respectée. C'est cet équilibre que nous recherchons.

Une fois garantie la possibilité de gouverner les régions, il n'est quand même pas tout à fait indifférent, Monsieur Brunhes, de savoir si une région sera gouvernée par la droite ou par la gauche ! Ayons confiance dans l'avenir. La cohésion de toute coalition exige que l'on respecte l'intérêt des différentes composantes. Le parti communiste est nécessaire et le parti socialiste est indispensable et sans doute les membres du RPR et de l'UDF tiennent-ils le même raisonnement pour ce qui les concerne.

Au demeurant, je souhaite que l'atmosphère reste sereine. Nous pouvons quand même nous réjouir de la victoire de la France sur le Danemark grâce à deux buts marqués par Petit et Djorkaeff. (Sourires)

A la majorité de 64 voix contre 20 sur 84 votants et 84 suffrages exprimés, les amendements 15 corrigé et 72 ne sont pas adoptés.

M. Pierre Albertini - Je vous présente les excuses de M. Valéry Giscard d'Estaing qui a pris ce matin un avion pour les Etats-Unis. Il était sur nos bancs hier ; une suspension de séance très longue nous a empêchés d'examiner son amendement 1. Il l'aurait défendu avec beaucoup plus de talent que moi (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), mais j'y mettrai toute la force de ma conviction.

Cet amendement vise à faire passer le seuil pour la présentation au second tour de 10 % des suffrages exprimés à 10 % des inscrits.

Pour les législatives, le seuil est fixé à 12,5 % des inscrits ; pour les cantonales, à 10 % des inscrits ; pour les municipales, 10 % des suffrages exprimés.

Pourquoi le projet du Gouvernement reprend-il pour les régionales, la solution retenue pour les municipales malgré les différences sensibles qui existent de l'aveu même du ministre, dont la pensée subtile est parfois difficile à suivre, entre ces deux types d'élections ?

Peut-être quelques simulations ont-elles montré le caractère politiquement plus avantageux de ce seuil.

Qu'on n'invoque pas, en tout cas, une volonté d'uniformité, puisque pour les élections, nous avons 3 seuils différents !

L'objectif affiché par le Gouvernement tout au long de ce débat, même si nous avons assisté tout à l'heure à une discussion d'ailleurs édifiante à l'intérieur de la majorité, est de concilier la possibilité de gouverner les régions et la représentation des familles politiques dans toute leur diversité. La meilleure solution, à notre avis, aurait consisté à adopter un scrutin proportionnel à un seul tour avec une prime majoritaire convenable pour que la clarté règne et qu'il n'y ait pas de combines. La liste arrivée en tête aurait, en effet, reçu tous les moyens de gouverner la région.

Le dispositif que le Gouvernement nous propose combinera les inconvénients de la proportionnelle et du scrutin majoritaire ; il en résultera un système très confus et politiquement dangereux.

Au premier tour, en effet, ce dispositif favorise la dispersion. Entre le premier et le second tour, il encourage la fusion d'autant que le Gouvernement proposera un amendement qui abaisse de 5 à 3 % le seuil requis pour participer aux fusions. Ce dispositif qui pousse à la combinazione est tout à fait contraire au désir de clarté qui m'avait poussé à proposer de donner valeur constitutionnelle non certes aux modes de scrutin, mais à quelques principes simples qui devaient, à nos yeux, ne pas être soumis à l'alternance des majorités.

L'adoption de l'amendement de M. Giscard d'Estaing permettrait, au premier tour, que toutes les diversités de notre vie politique s'expriment et, au second tour, il simplifierait le choix des électeurs qui auraient à se prononcer pour une gauche unie ou pour le centre et la droite modérée, les extrêmes étant exclus.

Si le Gouvernement rejette cet amendement, la manoeuvre politique nous apparaîtra très clairement. Ce serait la danse du ventre devant le Front national et la danse du scalp devant la droite modérée !

On ne combat certes pas l'extrémisme en modifiant le mode de scrutin. Mais on peut le favoriser par un mode de scrutin.

En 1979, Monsieur Gouzes, le Front national était à 1,3 %, en 1984 il a franchi la barre des 10 %... Et quel est le mode de scrutin qui a permis son éclosion ?

Pour toutes ces raisons, nous demanderons un scrutin public.

M. le Rapporteur - L'auteur de cet amendement n'a pas pu le défendre en commission mais comme il a beaucoup écrit et beaucoup parlé sur le sujet, d'ailleurs en reconstruisant un peu la réalité, je peux lui répondre.

La commission ne l'a pas suivi pour deux raisons. La première, c'est que son amendement ne répond pas à son objectif -l'élimination du Front national au second tour. J'ai fait des calculs : si on l'avait appliqué aux régionales de 1992, le Front national se serait maintenu en Alsace, Ile-de-France, Languedoc-Roussillon, PACA et Rhône-Alpes ; en 1998, il se serait maintenu en Alsace, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Languedoc-Roussillon, Picardie, PACA et Rhône-Alpes. S'il y avait eu moins d'abstentions et une configuration politique semblable à celle des législatives de 1997, il aurait été présent au second tour dans treize régions sur vingt-deux.

Sur un plan plus politique, il ne paraît pas opportun de fournir au Front national l'occasion d'apparaître comme persécuté. D'ailleurs, M. Albertini a bien voulu reconnaître que le problème des rapports entre la droite et l'extrême-droite ne sera pas réglé par ce type d'amendement. Comme l'a écrit M. Giscard d'Estaing lui-même : "L'essentiel restera de convaincre les électeurs de la droite modérée, qui l'ont abandonnée, pour des raisons souvent justifiées, de revenir vers elle". (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Ministre - Le Gouvernement partage entièrement l'avis de M. Dosière. J'ai été choqué d'entendre plusieurs interventions véhémentes, d'une démagogie confondante, tendant à faire accroire que le Front national serait au centre de nos débats. Mieux vaudrait que certains s'abstiennent de faire des déclarations sur la préférence nationale, d'autant que, d'après un sondage récent publié par le Figaro Magazine, les Français qui n'étaient qu'à 45 % pour l'égalité des droits sociaux en 1991, le sont aujourd'hui à 68 %. Cela montre le succès de la politique menée par le Gouvernement.

Mme Alliot-Marie - Entre 1993 et 1997 !

M. le Ministre - Fixer la barre à 10 % des inscrits, c'est-à-dire à 15 à 18 % des suffrages exprimés -ce qui, comme l'a dit M. Dosière, ne réglerait pas le problème-, c'est évidemment empêcher l'expression légitime de certains courants démocratiques.

M. Pierre Albertin - Que fait-on pour les législatives ?

M. le Ministre - Ne resteraient que le parti socialiste, à droite le... je ne sais plus, comment vous vous appelez (Rires sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL) et le Front national. Il est tout à fait démagogique, de la part de M. Giscard d'Estaing, de nous avoir laissés cet amendement, négligemment, avant de prendre l'avion pour les Etats-Unis ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UDF)

M. le Président - Sur l'amendement 1, je suis saisi par le groupe UDF -tel est son nom- d'une demande de scrutin public.

M. Philippe Douste-Blazy - Je voudrais d'abord dire ma surprise devant le mépris du ministre de l'intérieur à l'égard de l'opposition. Vous connaissez notre nom, Monsieur le ministre...

Après avoir noté le départ de tous les députés communistes de l'hémicycle, je voudrais défendre l'amendement du Président Giscard d'Estaing, qui pose un problème de principe.

Le Gouvernement nous a promis une modernisation de la vie politique française. S'agissant des régions, tout le monde s'accorde à penser que le mode de scrutin actuel est insatisfaisant ; dès lors il aurait fallu, pour le réformer, rechercher sinon un consensus, du moins un large accord sur ces bancs, en fixant quelques objectifs simples et concrets. Or le Gouvernement a choisi le calcul : en introduisant un second tour, il laisse la porte ouverte à toutes les transactions, tous les marchandages. Avec le système proposé, une liste majoritaire au premier tour pourra devenir minoritaire au second.

Le groupe UDF milite pour un scrutin proportionnel à un tour, avec attribution d'une prime majoritaire. Il permettrait d'assurer l'expression des minorités et de respecter le choix des électeurs.

M. Gérard Gouzes - Les transactions se feraient ensuite dans les couloirs ! (Protestations sur les bancs du groupe UDF)

M. Philippe Douste-Blazy - Au contraire, le mécanisme proposé aujourd'hui institue, de fait, une prime aux extrêmes. En l'imaginant, vous avez pensé à nous ; mais nous pensons également à vous, qui, avec la montée de l'extrême-gauche, serez peut-être un jour pris à votre propre piège...

L'amendement du Président Giscard d'Estaing permet aux électeurs de choisir clairement et n'autorise pas les compromissions entre les forces en présence. Le sort qui lui sera réservé nous éclairera sur la bonne volonté, ou la mauvaise foi, de la majorité plurielle. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Christian Paul - A entendre le discours de nos collègues, on finirait par croire que la droite est condamnée à l'alliance avec le Front national, en oubliant que dans dix régions, elle conduit les affaires sans y avoir eu recours.

Cet amendement aurait pour effet de brider l'expression des formations politiques minoritaires. Au demeurant, il serait totalement inopérant pour faire barrage au Front national dans les régions, comme M. Dosière l'a démontré. Il illustre donc de manière éclatante le double langage de l'opposition, qui s'apparente parfois à de l'imposture. (Protestations sur les bancs du groupe UDF) Si immoralisme il y a, c'est bien là qu'il se trouve.

C'est en vous-mêmes que vous devrez trouver les ressorts nécessaires pour combattre le Front national ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. Patrick Delnatte - Nous faisons la démonstration de ce que, lorsqu'on s'éloigne de principes fondamentaux, nos débats risquent de paraître totalement obscurs à nos concitoyens. Le groupe RPR est favorable à un rapprochement entre l'élu et la population, et donc au scrutin majoritaire ; mais le scrutin proportionnel à un tour avec une prime majoritaire permet d'assurer représentativité et gouvernabilité. Au-delà, on entre dans une cuisine électorale dont les Français ne veulent plus. L'avantage de l'amendement du président Giscard d'Estaing est d'apporter un peu de cohérence, et c'est pourquoi nous le soutiendrons.

M. Renaud Donnedieu de Vabres - J'ai trouvé le terme "imposture" choquant et scandaleux. La réalité, c'est que vous êtes nés des triangulaires et que vous voulez survivre par les triangulaires ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) Vous n'êtes pas d'accord ? Alors acceptez un principe clair, qui serait compris de tous nos concitoyens : pour les législatives comme pour les présidentielles, scrutins uninominaux à deux tours, faites en sorte qu'au second tour ne restent que les deux candidats arrivés en tête. Pour les élections municipales et régionales, notre objectif est qu'il y ait une majorité pour gouverner. Votre objectif n'est pas celui-là : il est de mettre en place une sorte de stéréo diabolique. Vous prenez des mesures provocatrices, comme la réforme du code de la nationalité et le texte sur l'immigration ; puis, pour en récupérer les effets, il y a le filet électoral que vous proposez aujourd'hui. Si vous êtes convaincus que nos concitoyens doivent choisir clairement entre deux pôles, faites en sorte que disparaissent les triangulaires qui empoisonnent notre vie politique. Mais vous faites exactement le contraire. Ayez donc au moins la pudeur de ne pas vous targuer d'intentions pures, tout en ayant recours à ce genre de petites manoeuvres ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

A la majorité de 63 voix contre 28, sur 91 votants et 91 suffrages exprimés, l'amendement 1 n'est pas adopté.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.


Top Of Page

CONVOCATION DU PARLEMENT EN SESSION EXTRAORDINAIRE

M. le Président - M. le Président de l'Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre une lettre du 24 juin accompagnée de la copie du décret du Président de la République portant convocation du Parlement en session extraordinaire. Ce décret dispose en son article premier que "Le Parlement est convoqué en session extraordinaire à compter du 1er juillet 1998" ; en son article 2 que "l'ordre du jour de la session extraordinaire comprendra l'examen ou la poursuite de l'examen des projets de loi suivants :

    - projet de loi d'orientation relatif à la lutte contre les exclusions ;

    - projet de loi modifiant la loi du 7 juillet 1977 relative à l'élection des représentants au Parlement européen."

Prochaine séance ce soir, à 21 heures 15.

La séance est levée à 19 heures 50.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


© Assemblée nationale