S O M M A I R E

_____

 

 

conclusion

·  La Corse sur la route difficile de l’Etat de droit

·  Une double responsabilité pour l’avenir

·  Quatre appels solennels

 

annexes 5

 

EXPLICATIONS DE VOTE *

CONCLUSION

 

La Corse sur la route difficile de l’État de droit ?

État de droit : " Un État dans lequel les différents organes agissent en vertu du droit et ne peuvent agir qu’ainsi ".

Les carences de l’État de droit en Corse se traduisent par l’absence de ses garanties ou par les limites qu’elles rencontrent.

La veuve n’a pas la garantie que l’assassin sera châtié, la victime d’un plasticage la garantie que l’auteur en sera recherché activement, le juge n’a pas la garantie que sa sécurité est assurée, le contribuable n’a pas la certitude que la dépense publique est engagée selon les règles en vigueur, ni que le prélèvement public est recouvré équitablement.

Et au-delà, s’agissant des fonds publics et de leur emploi, les critères habituels d’efficacité et de contrôle, trop souvent, ne sont pas remplis.

La stratégie de réponse que le gouvernement confie aux représentants de l’État en Corse et aux administrations centrales les plus engagées réclame une faveur rare dans la conduite des affaires publiques : le temps.

Or, déjà, des critiques ont germé au cours des derniers mois, venant de quatre horizons :

– Des élus insulaires, certes peu nombreux, parfois se sont plaints de la vigueur de la méthode, craignant les effets d’amalgame. A ceux-là, il faut concéder que la démarche engagée est inévitablement douloureuse. Mais elle doit s’attaquer prioritairement aux faits emblématiques et demeurer sous le contrôle de la justice.

D’autres, qui depuis longtemps savent que l’imposture profite du désordre, et oublieux de leurs mises en causes personnelles, tentent quelques diversions.

– Dans les administrations de l’État ont pu naître ici ou là quelques doutes, chez des fonctionnaires craignant de payer les zigzags des politiques menées par les gouvernements successifs.

– Les reproches émanent également d’éléments nationalistes.

Bastia n’est pas Palerme ", écrivait il y a peu, avec une ironie involontaire, le FLNC Canal historique. C’est vrai. En Sicile, depuis 1992 et grâce à l’offensive engagée après l’assassinat du juge Falcone, la situation s’est améliorée. En Corse, elle s’est dégradée.

– Quant à la population, si elle paraît majoritairement acquise à la ligne directrice affirmée aujourd’hui, elle n’est pas exempte de trois craintes. Que la politique d’établissement de l’État de droit ne dure que peu de temps. Qu’elle détériore un peu plus l’image de l’île. Qu’elle épargne les principaux responsables ou les coupables, pour ne s’attaquer qu’aux infractions les plus mineures.

Si le travail de la commission d’enquête n’avait qu’une vertu, ce devrait être de répondre à ces trois dernières craintes.

La durée, on l’a dit, est indispensable à la réussite de cette politique qui doit être menée au grand jour et demeurer sous le regard du Parlement et la vigilance de l’opinion publique.

C’est le soutien de tous qui en garantira la pérennité. La Corse ne peut que sortir apaisée et grandie d’une meilleure application des lois de la République.

Une double responsabilité pour l’avenir

L’esprit du statut particulier de 1991 ne doit pas être perverti. C’est une expérience poussée de décentralisation dont l’ensemble des forces politiques, en Corse comme à Paris, acceptent aujourd’hui le principe. Cela n’empêche en rien d’en améliorer la pratique ou d’en ajuster quelques détails, après sept années d’application. Cela conduit néanmoins à éviter toute régression centralisatrice, mais aussi à bloquer toute tentation de relance artificielle du débat statutaire.

Cette construction politique confère donc une responsabilité forte aux élus corses en matière de développement économique, social et culturel, et donc d’emploi des fonds publics : celle d’exprimer les attentes de la communauté insulaire en faisant des choix, en rendant des arbitrages de leur seul ressort, et en s’engageant dans une pratique moderne de développement local et régional.

A l’État, revient bien sûr la responsabilité d’assurer le respect des lois et de l’ordre public. Mais aussi de passer contrat avec la Corse. Le contrat de plan à venir doit illustrer cette responsabilité partagée.

La commission d’enquête et son rapporteur ne veulent pas croire que le défi relancé aujourd’hui à la Corse et à l’État reste sans réponses.

La politique à conduire ne doit pas être l’affaire de quelques hommes, mais l’engagement du gouvernement et celui de l’État tout entier.

Quatre appels solennels

Il appartient à l’Assemblée nationale de rester à l’écoute de la Corse et de mesurer les progrès accomplis. C’est son rôle et sa responsabilité.

C’est pourquoi la commission d’enquête, au terme de ce rapport, a souhaité lancer solennellement quatre appels :

1°) Un appel aux gouvernements de la France, pour le présent et pour l’avenir, afin que la ligne directrice aujourd’hui suivie soit maintenue.

Pour que soit définitivement abandonnée l’idée que la paix civile s’achète ou se vend, à coup de nouvelles dérogations fiscales, de dettes effacées ou d’amnisties excessives.

Pour que les alternances ne soient pas synonymes en Corse de changement de cap ou de retour en arrière.

2°) Un appel aux responsables élus de la Corse, pour aujourd’hui et pour demain, afin que l’intérêt général de l’île ne cesse de guider leur attitude, afin que le respect de l’État et du droit demeure leur constante préoccupation.

L’État républicain ne peut être réduit au rôle d’un guichet sans limite. Dans ce rôle ambigü, il serait bon quant il est généreux, mauvais quand il est ferme, odieux quand il est juste.

L’État doit être, en cohérence, ferme et généreux. L’État ne peut agir en Corse sans les élus que l’île se donne, pour rompre ensemble l’enchaînement inexorable que vingt années de drame ont produit.

3°) Un appel aux citoyens de Corse, nourris d’un réel sentiment républicain, pour que le sentiment civique plusieurs fois manifesté, et encore en février 1998 après l’assassinat du préfet Claude Erignac, devienne une volonté politique incontestable.

Ce réveil citoyen doit s’inscrire dans la durée, déterminer leur attitude et leurs choix à venir. Les Corses et la République ne doivent plus s’attendre mais, ensemble, faire mouvement.

4°) Un appel, enfin, à tous nos concitoyens, qui regardent cette île, au mieux, avec un regard amusé par les " légendes sans fin " que produit la terre corse, ou pire et plus souvent, avec l’exaspération et l’incompréhension de ceux qui aimeraient se débarrasser à bon compte de ce problème.

A tous, il faut dire combien cette île, riche de ses paysages, de son patrimoine et de sa culture, et dont tant d’enfants ont versé leur sang pour la patrie, participe au rayonnement de la France et, donc, mérite toute sa place dans la République.

 

*

* *

 

 

 

A n n e x e s

 

Annexes 1 et 2

cartes

Annexe 3

paysage institutionnel du tourisme corse

Annexe 4

poids du ministère de l’Agriculture dans chacun des contrats de plan

Annexe 5

DOCUP : opérations pour lesquelles la participation du FEDER se situe entre 5 et 7 millions de francs

Annexe 6

DOCUP : opérations pour lesquelles la participation du FEDER est supérieure à 7 millions de francs

Annexes 7 (a et b)

exemples d’opérations gérées par l’ODARC en 1998

Annexe 8

historique des missions auprès de la caisse régionale de Corse de l’inspection générale de la caisse nationale de Crédit agricole

Annexe 9

note du 15 octobre 1997 de M. Gérard Bougrier, préfet adjoint pour la sécurité en Corse

Annexe 10

extrait du rapport sur la consommation des crédits publics en Corse au cours des années 1994 et 1995

 

Annexe 1

 

La Corse

 

Annexe 2

 

Annexe 3

annexe3.gif (11879 octets)

Annexe 4

 

Poids du ministère de l’agriculture dans chacun des contrats de plans

REGIONS

ALSACE

3, 97 %

AQUITAINE

18, 68 %

AUVERGNE

7, 63 %

BOURGOGNE

10, 95 %

BRETAGNE

12, 18 %

CENTRE

6, 75 %

CHAMPAGNE ARDENNE

5, 12 %

CORSE

21, 02 %

FRANCHE COMTE

8, 83 %

ILE DE France

0, 57 %

LANGUEDOC ROUSSILLON

23, 96 %

LIMOUSIN

17, 96 %

LORRAINE

5, 89 %

MIDI PYRENEES

22, 01 %

NORD PAS DE CALAIS

4, 92 %

BASSE NORMANDIE

6, 31 %

HAUTE NORMANDIE

4, 79 %

PAYS DE LA LOIRE

9, 51 %

PICARDIE

4, 68 %

POITOU CHARENTES

6, 23 %

PROVENCE ALPES COTE D'AZUR

9, 16 %

RHONE ALPES

7, 87 %

BASSIN PARISIENS

0, 00 %

 

 

 

 

Annexe 5

 

DOCUP : Opérations pour lesquelles la participation du FEDER se situe entre 5.000.000 F et 7.000.000 F

Situation au 15/07/98

 

BÉNÉFICIAIRE

OBJET

FEDER ENGAGÉ

FEDER PAYÉ

COUT TOTAL

Collectivité territoriale de Corse

Réalisation du carrefour de Crucetta sur la RN 193 entre Bastia et Folelli

5.966.000,00 F

4.983.070,00 F

15.684.000,00 F

Chambre de Commerce et d’industrie de Bastia et de la Haute Corse

Aérogare de Bastia : réalisation de la partie centrale et des extérieurs

7.000.000,00 F

5.600.000,00 F

14.000.000,00 F

Office d’Equipement hydraulique de Corse

Barrage de l’Ortolo (5ème tranche, 2ème partie)

6.250.000,00 F

5.000.000,00 F

15.000.000,00 F

SIVOM du Cavo

Extension du réseau d’assainissement et de la station d’épuration de Sainte-Lucie de Porto-Vecchio

6.917.400,00 F

5.533.920,00 F

31.000.000,00 F

SIVOM des communes du canton de Vescovato

Travaux d’assainissement (station d’épuration, émissaire en mer, réseaux) Première tranche

6.900.000,00 F

 

46.000.000,00 F

Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres

Acquisition des terrains

6.356.302,00 F

5.784.233,00 F

14.033.110,00 F

SEM Bastia Aménagement

Réalisation de la Maison du parc technologique d’Erbajolo

6.211.800,00 F

1.136.800,00 F

14.981.000,00 F

Collectivité territoriale de Corse

Abondement du FRG

7.000.000,00 F

7.000.000,00 F

14.000.000,00 F

 

 

 

Annexe 6

 

DOCUP : Opérations pour lesquelles la participation du FEDER est supérieure à 7.000.000 F

Situation au 15/07/98

 

BÉNÉFICIAIRE

OBJET

FEDER ENGAGÉ

FEDER PAYÉ

COUT TOTAL

Collectivité territoriale de Corse

Réalisation de la section pont de Piedicorte-Fajo sur la RN 200

Première phase

 

17.500.000,00 F

 

15.728.000,00 F

 

87.448.000,00 F

Collectivité territoriale de Corse

Réalisation du Pont du Vecchio

17.653.400,00 F

10.761.200,00 F

48.000.000,00 F

Collectivité territoriale de Corse

Carrefour de Casamozza

8.569.000,00 F

 

18.700.000,00 F

Collectivité territoriale de Corse

Carrefour de Tragone

10.340.000,00 F

 

22.600.000,00 F

Collectivité territoriale de Corse

Réalisation de la section pont de Piedicorte-Fajo sur la RN 200

Deuxième phase

15.000.000,00 F

 

87.448.000,00 F

Chambre de Commerce et d’industrie d’Ajaccio et de la Corse du Sud

Aérogare d’Ajaccio

21.500.000,00 F

16.361.594,00 F

43.000.000,00 F

Office d’Equipement hydraulique de Corse

Equipement de l’aval de l’Ortolo

Programme 1997

 

7.500.000,00 F

 

3.750.000,00 F

 

15.000.000,00 F

SIVOM de la Rive-Sud du Golfe d’Ajaccio

Station de traitement des eaux de Bomortu

9.009.600,00 F

8.559.120,00 F

30.032.000,00 F

Commune d’Ajaccio

Réalisation de l’unité de traitement d’eau potable de la Confina

16.800.000,00F

8.400.000,00 F

56.000.000,00 F

Commune d’Ajaccio

Schéma directeur - Deuxième tranche

8.595.000,00 F

 

28.650.000,00 F

Collectivité territoriale de Corse

Réalisation du musée de la Corse

Deuxième tranche - Modification de l’arrêté 97/132 en date du 22 avril 1997

10.096.402,00 F

4.570.876,00 F

26.190.436,00 F

SIVOM de la Rive-Sud du Golfe d’Ajaccio

Réseau d’assainissement

8.469.657,00 F

8.215.567,00 F

28.232.190,00 F

District de Bastia

Station d’épuration de Bastia sud -

Deuxième tranche

8.820.000,00 F

 

80.000.000,00 F

 

 

Annexe 7a

OPERATIONS D’INTERVENTION ET DE DEVELOPPEMENT AGRICOLE

GEREES PAR L’ODARC EN 1998

quelques exemples

(en millions de francs)

Opérations d’intervention et de développement agricole en Corse  

COUTS TOTAUX

de ces opérations

Financements gérés par l’ODARC

 

Autres crédits et Autofinancement

Dotation régionale jeunes agriculteurs 11

11 (intégralement issus de la Collectivité territoriale)

 
 

 

Modernisation des exploitations

 

52,60 

38 dont :

15 de la CTC

19 de l’Etat

4 de fonds communautaires

Autofinancement : 14,60
Appui technique spécialisé aux filières de production 7,70

1,98 (entièrement issus de la CTC)

Autres crédits : 3,08

Autofinancement : 2,72

Amélioration et diversification des productions végétales 12

3,4 dont :

1,40 de la CTC

2 de l’Union européenne

Autofinancement : 4,63
 

Amélioration et diversification des productions animales

1,23

0,5 dont :

0,3 de la CTC

0,2 de l’Union européenne.

Autofinancement : 0,73
 

Fonds de modernisation de la viticulture

33,12

1,47

(issus en totalité de la CTC)

Autres crédits : 15,09

Autofinancement : 16,59

Financement

d’unités d’abattage

 

13,04

3,91

(issus en totalité de la CTC)

Autres crédits : 6,20

Autofinancement : 2,93

Promotion

des produits locaux

 

 

7,13

5,56 dont :

1 de la CTC

2,66 de l’Etat

1,90  de l’Union européenne

Autres crédits : 0,34

Autofinancement : 1,23

 

 

Annexe 7b

 

OPERATIONS D’INTERVENTION ET DE DEVELOPPEMENT FORESTIER

GEREES PAR L’ODARC EN 1998

quelques exemples

(en millions de francs)

Opérations d’intervention et de développement forestier COUTS TOTAUX

de ces opérations

 

Financements gérés par l’ODARC

Autres crédits et Autofinancement
Sauvegarde et amélioration des espaces boisés – Châtaigneraie

 

7,38

6,78 dont :

2,60 de la CTC

2,35 de l’Etat

1,83 de l’Union européenne

 

Autofinancement : 0,60

Oliveraie

 

5

 

3 dont :

1 de la CTC

0,30 de l’Etat

1,70 de l’Union européenne

Autofinancement : 2

 

 

LES ACTIONS SPECIFIQUES

GEREES PAR L’ODARC EN 1998

quelques exemples

(en millions de francs)

Opérations spécifiques  

COUTS TOTAUX

de ces opérations

Financements gérés par l’ODARC  

Autres crédits et Autofinancement

Compensation financière pour le transport des productions agricoles  

 

5,36

4,50

(issus en totalité de la CTC)

Aide au transport

(des vins, du fourrage et des aliments du bétail)

 

 

4,75

3,80

(issus en totalité de la CTC)

Autofinancement : 0,95
Réaménagement de la dette sociale des agriculteurs  

 

4,20

1,60

(issus en totalité de la CTC)

 

Autres crédits : 2,60

 

 

Annexe 8

 

Le 23 avril 1998

 

HISTORIQUE DES MISSIONS C.R. CORSE

De L’INSPECTION GENERALE

DE LA CAISSE NATIONALE DE CREDIT AGRICOLE

 

1980 (4 mars au 11 avril 1980): 4 Inspecteurs

1983 (26 avril au 17 juin 1983) : 5 Inspecteurs

1983 (mission de suivi Comptabilité) (29 nov. au 9 déc. 1983) : 2 Inspecteurs

1985 (mission de suivi sur la situation comptable) (18 au 26 avril 1985) 2 Inspecteurs

1986 (23 septembre au 07 novembre 1986) : 4 Inspecteurs

- 1987 (décembre 1987-février 1988) Commission Bancaire

1991 ( 25 septembre au 1er novembre 1991) : 5 Inspecteurs

1995 (mission Risques Crédit) (24 janvier au 10 mars 1995) : 4 Inspecteurs

1996 (mission suivi CDL et provisions) (16 déc. 1996 au 3 janvier 1997) : 4 Inspecteurs

1997 (mission suivi CDL et provisions) (1 er au 19 décembre 1997) : 4 Inspecteurs

 

 

Annexe 9

NOTE

A l’attention de Madame Catherine DELMAS-COMOLLI,

Directeur adjoint du Cabinet du Ministre de l’Intérieur

Par lettre confidentielle du 10 Octobre 1997, que je vous ai remise en mains propres lors de notre entretien de lundi, j’ai proposé au Ministre une liste non exhaustive mais diversifiée des objectifs sur lesquels des investigations approfondies pourraient être opérées par les services spécialisés du Ministère des Finances.

Après avoir à nouveau consulté les Préfets de Corse du Sud et de Haute Corse, je suis en mesure de vous signaler les dossiers qui pourraient être privilégiés dans cet exercice.

Il s’agit :

- dans le secteur agriculture

-dossier J.M LUCCIANI

M. VALENTINI

Roger SIMONI

Stéphane BERTRAND

auxquels il convient d’ajouter celui de M. LORENZONI, dont vous trouverez une présentation ci-joint *

- dans le domaine du banditisme

dossiers frères LANTIERI

frères VOILLEMIER

- dans le domaine des investissements

- dossier du port de l’Amirauté à AJACCIO

- dossier du bar Alba à VILLENEUVE LOUBET

- dossier COFIDE

- dossier BASTIA SECURITA

En outre, il paraît indiqué d’envisager le contrôle des comptes et du fonctionnement des deux principaux organismes financiers de l’économie locale, à savoir :

- la Caisse Régionale du Crédit Agricole **

- la Caisse de développement économique de la Corse (CADEC).

 

Annexe 10

Extrait du rapport sur la consommation des crédits publics en Corse au cours des années 1994 et 1995 

_______

Synthèse des Propositions pour une meilleure gestion
des crédits publics disponibles en Corse

 

La recherche d’une meilleure utilisation des crédits publics doit être une priorité pour l’ensemble des responsables publics.

A cet égard, le rapport formule deux séries de propositions de portée technico-administrative et institutionnelle, regroupées en huit thèmes principaux de réflexion.

Les propositions de portée technico-administrative consistent à solliciter des administrations centrales un appui à la mise en œuvre des orientations suivantes :

1/ un suivi plus précis de l’exécution des dépenses de l’Etat, par un outil renforcé au plan informatique et interconnecté entre les préfectures et les services déconcentrés de l’Etat. La mise en place de la nouvelle dépense locale (NDL) constituera une première réponse ; elle doit être complétée par l’établissement d’indicateurs physiques de réalisation du contrat de plan et du document unique de programmation (DOCUP).

2/ une gestion plus souple des délégations de crédits : délégations plus tôt en début d’exercice budgétaire, avant le 20 janvier, pour laquelle la Corse pourrait servir de région pilote ; souplesse d’appréciation donnée aux ordonnateurs secondaires délégués, ensuite, dans la gestion des crédits délégués ; enfin, possibilité de redistribution des crédits de paiement non utilisés à l’échelon local.

En matière de crédits européens, il conviendrait également de parvenir à échapper à la règle des reports au niveau central et d’assouplir les procédures d’appels de fonds à la Commission pour obtenir une plus grande rapidité de disponibilité des crédits.

La Commission devrait accepter le principe d’un rééchelonnement régulier des tranches annuelles pour le FEDER, et notifier plus rapidement les programmes applicables à la Corse. Une simplification des règles de gestion du FEOGA et une accélération des circuits de versement du fonds social européen (FSE) devraient également être recherchées avec les administrations centrales.

3/ une fongibilité plus grande des lignes budgétaires devrait être mise en œuvre ; ainsi pour les crédits destinés à la forêt, aux industries agro-alimentaires ou aux aides au logement.

Pour cette dernière ligne de crédits, il conviendrait qu’une totale fongibilité des crédits au logement prévale en cours d’exercice budgétaire, après répartition des enveloppes annuelles par l’Assemblée de Corse. Cette proposition prend appui sur l’existence d’une ligne budgétaire unique dans les départements d’Outre-mer ; celle-ci peut servir d’exemple à étudier pour améliorer le dispositif en Corse, qui ne permet pas de consommer annuellement tous les crédits mis à sa disposition.

4/ l’assouplissement des règles d’éligibilité de certaines subventions devrait, notamment, concerner les crédits de politique industrielle et en faveur des entreprises de production artisanale, ainsi que les crédits pour la forêt.

Les propositions de portée institutionnelle s’attachent à esquisser des éléments de réponse aux fragilités et aux spécificités structurelles de la Corse, qui expliquent les difficultés à consommer tous les crédits mis à sa disposition. Elles sont regroupées sous quatre rubriques :

1/ le soutien aux maîtres d’ouvrage, collectivités locales et entreprises

Le retard d’engagement et de consommation des crédits, notamment européens, s’explique en grande partie par les difficultés des maîtres d’ouvrage à entreprendre les opérations éligibles au contrat de plan et au DOCUP et à mobiliser les financements croisés, à l’exception de la Collectivité territoriale de Corse.

En regard de la fragilité des collectivités locales, un mode de conseil et de soutien à la maîtrise d’ouvrage locale est à prévoir pour permettre de concrétiser leurs projets d’infrastructures notamment.

Il pourrait être fait appel aux services de l’Etat ainsi qu’à un fonds régional d’ingénierie, un observatoire de la commande publique devant être parallèlement mis en place dès 1996, en association étroite avec les entreprises du BTP.

S’agissant de l’assistance aux dossiers de financement des entreprises, un pilotage par le directeur régional de l’industrie, de la recherche et de l’environnement, pour le compte de l’ensemble des services de l’Etat concernés par les relations aux entreprises, devrait permettre d’assurer une réponse mieux coordonnée aux besoins des entreprises insulaires, parallèlement au rôle de guichet unique que vise à assurer l’Agence de développement économique de la Corse (ADEC) pour le compte de la Collectivité territoriale.

Cette expérience mérite pour sa mise en œuvre l’accord des administrations centrales concernées. Elle prolongerait et enrichirait l’expérience des chefs de projets ou des pôles de compétences réalisée jusqu’ici.

2/ renforcer le caractère pluriannuel de la programmation constitue la seconde proposition institutionnelle.

Elle concerne tout à la fois la programmation des crédits de l’Etat, ce qui nécessiterait un assouplissement de la règle de l’annualité budgétaire, ainsi que la programmation du DOCUP, qui devrait s’appuyer sur une liste d’opérations en projet, pré-instruites et susceptibles de démarrer. Au-delà du simple rééchelonnement des tranches annuelles, un exercice de reprogrammation devra être prévu dans les deux ans à venir, afin de réaffecter sur les actions les plus consommatrices de crédits du DOCUP les crédits non employés sur des axes où les opérations ne parviennent pas à démarrer.

3/ une meilleure consommation des crédits nécessite, par ailleurs, de mieux coordonner l’intervention des décideurs publics

La conférence régionale d’aménagement et de développement du territoire, créée en application de la loi d’orientation du 4 février 1995, a vocation à devenir le cadre institutionnel de cette coordination des investissements, dont les choix seront à analyser au regard du futur schéma d’aménagement de la Corse, en cours d’élaboration.

Par ailleurs, la question de la coordination des décideurs publics soulève la question du grand nombre d’intervenants institutionnels, qui résulte du statut particulier de la Collectivité territoriale de Corse.

Elle appelle une investigation sur le rôle et les missions des offices et agences relevant d’elle au regard de ceux de l’Etat et des organismes parapublics, notamment les chambres consulaires, dans le sens des quatre audits réalisés en 1994 qui ont concerné : l’office de développement agricole et rural (ODARC), l’office d’équipement hydraulique (OEHC), l’office des transports au titre de la gestion de la dotation de la continuité territoriale dans le cadre du rapport OUDIN, l'agence de développement économique de la Corse (ADEC).

Les conclusions et les propositions de ces différents rapports mériteraient d’être à nouveau étudiées dans le cadre d’un tour de table qui devrait faire intervenir les responsables de la Collectivité territoriale de Corse, et qui devrait être élargi aux deux autres offices non audités en1994 (l’office de l’environnement et l’agence du tourisme).

4/ favoriser le développement d’une gestion interministérielle des moyens communs à différents services de l’Etat auprès du préfet, appelle, en premier lieu, une meilleure répartition des emplois au sein de la fonction publique, une priorité méritant d’être accordée au renforcement des personnels chargés du suivi des fonds européens et de certaines directions techniques, ainsi qu’à la constitution de cellules d’évaluation et de contrôle au sein des directions régionales en charge des plus grosses dotations budgétaires, à l’image de la mission créée auprès des services académiques.

Par ailleurs, en terme de moyens budgétaires interministériels, la Corse pourrait servir d’expérience à une mise en réserve, au plan régional, des crédits des départements ministériels en début d’exercice, ainsi qu’à la création d’un fonds unique placé auprès des préfets qui regrouperait la quasi-totalité des fonds existants pour permettre d’animer le développement économique des bassins d’emploi.

*

* *

La réflexion, les analyses et les propositions soulevées mériteraient d’être complétées sur certains aspects, qui n’ont pas été abordés par manque de temps et d’éléments d’investigation de la part de la préfecture de Corse pour y procéder, tels que :

– l’affectation des dotations transférées par l’Etat aux départements et aux communes, ainsi qu’auprès des offices et agences de la Collectivité territoriale ;

– ou le contrôle de l’emploi des fonds publics versés aux collectivités locales et aux entreprises, dont l’analyse nécessiterait un délai supplémentaire et des enquêtes de terrain, qui relèvent d’une autre démarche que celle adoptée ici.

Aux principales questions que se posent, sur le continent ou en Corse, les responsables des collectivités publiques sur la consommation des crédits et leur emploi, des réponses sont apportées par le présent rapport dans le délai, nécessairement court, des trois mois qui était imparti, il peut être répondu globalement de la façon suivante :

– il y a beaucoup de crédits publics mis à la disposition de la Corse par l’Etat ou susceptibles de l’être dans le cas des procédures, particulièrement contraignantes, d’appel de fonds européens ;

– une partie des crédits publics annoncés, notamment au plan communautaire et pour partie en dépenses d’investissement de l’Etat, ne peut pas être engagée avec la rapidité que nécessiterait le besoin de développement de l’île et de mise à niveau de ses équipements, faute d’une maîtrise d’ouvrage assez forte techniquement et suffisamment dotée financièrement pour concrétiser les projets qui existent dans la plupart des domaines ;

– le maintien des crédits au niveau actuel, de même qu’une forte implication de l’Etat s’imposent donc, en partenariat avec la Collectivité territoriale, pour faire aboutir les projets et concrétiser les ambitions du plan de développement de la Corse : modèle de développement, global, ouvert, multi-polaire, équilibré entre le littoral et l’intérieur ;

– une meilleure utilisation des crédits est possible et doit être recherchée avec les grands élus de la Corse, et notamment le président de l’Assemblée de Corse et le président du Conseil exécutif de Corse, ainsi qu’avec les responsables des offices et agences relevant d’eux, qui mériteraient une analyse complémentaire.

La réflexion pourrait, notamment, porter sur la redéfinition du rôle et de la mission de ces offices par rapport à l’Etat, ainsi que sur les marges de redéploiement des crédits publics pour en optimiser l’emploi au bénéfice du développement économique insulaire ;

– des marges de redéploiement existent mais, pour être mises en œuvre, il convient de rechercher un consensus sur le développement de la Corse et le meilleur emploi des crédits publics avec les parlementaires et les responsables des diverses collectivités de l’île : Collectivité territoriale, bien sûr, mais aussi départements, villes principales et associations des maires. L’exigence d’un meilleur appel aux fonds communautaires y conduit nécessairement à brève échéance.

Parallèlement, l’Etat en Corse doit montrer sa capacité à se réformer et la Corse peut ainsi, dans la poursuite du rapport, devenir un laboratoire de la réforme de l’Etat.

Beaucoup de fonctionnaires exercent en Corse (14.000), de manière éclatée entre de nombreuses administrations qui sont très inégalement dotées en moyens humains et financiers.

La nécessité d’un redéploiement des effectifs s’impose entre les services de l’Etat, en fonction des impératifs de gestion publique et notamment, des responsabilités de suivi des crédits européens, dont il a été souligné l’importance pour la Corse.

*

* *

 

 

 

 

 

 

*

* *

 

La Commission a examiné le présent rapport au cours de ses séances de 10 heures et de 15 heures du mercredi 2 septembre 1998 et l’a adopté à l’unanimité.

Elle a ensuite décidé qu’il serait remis à M. le président de l’Assemblée nationale afin d’être imprimé et distribué, conformément aux dispositions de l’article 143 du Règlement de l’Assemblée nationale.

 

*

* *

 

EXPLICATIONS DE VOTE

 

EXPLICATIONS DE VOTE des COMMISSAIREs APPARTENANT
AU GROUPE socialiste

 

La Corse est une affaire d’État.

En décidant le 3 avril 1998 de créer une commission d’enquête sur l’utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse, l’Assemblée nationale a voulu, avec détermination, poursuivre les travaux inachevés de la mission d’information parlementaire de la précédente législature et répondre dans l’urgence à la situation créée par le lâche et odieux assassinat du préfet Claude Erignac.

Il est certain que, même sans cet assassinat qui porte une atteinte intolérable aux fondements de la République, la création de cette commission eut été indispensable.

En effet, c’est l’autorité de l’État qui est en jeu, le seuil de tolérance est depuis longtemps franchi ; le défi doit être relevé sans faiblesse.

La différence revendiquée ne peut pas continuer à s’exprimer sur le terrain de la fraude fiscale, du trafic des monopoles, du record des faux pensionnés, faux invalides, faux Rmistes, sans compter les vaches fantômes inscrites à l’abreuvoir de Bruxelles.

Les membres de la commission sous la conduite de leur président Jean Glavany et de leur rapporteur Christian Paul ont travaillé avec sérieux et assiduité pendant 6 mois, travail fait d’auditions, de déplacements sur l’île pour appréhender directement, de visu, les dysfonctionnements les plus flagrants des divers services de l’État ainsi que les dérives des comportements locaux.

Enfin par de larges débats, ils ont eu la volonté d’aller au fond des choses afin de proposer aux pouvoirs publics des modalités d’action rigoureuses et dans la durée.

Comme l’indique le président Glavany dans son avant-propos, il faut mettre fin à la politique de zigzags de l’exécutif, et comme le proposait un ancien Président de la République avoir une seule ligne, la plus difficile, une ligne droite.

Le groupe socialiste exprime son parfait accord avec la politique mise en oeuvre par le gouvernement depuis plus d’un an afin de retrouver, en Corse, un véritable État de droit.

Les membres de la commission ont eu une volonté sans faille de décrire la vérité dans le constat qui a été établi.

L’élévation de l’état d’esprit, du sens de l’État, sans connotation partisane ou politicienne, est un élément déterminant de la qualité du travail accompli.

Le rapport retrace fidèlement dans sa première partie le constat des dérives auxquelles il convient de mettre fin rapidement et d’une façon durable par une action implacable des représentants de l’État sur le territoire et en premier lieu par un combat quotidien contre le système pré-mafieux qui se met en place.

La réussite de cette action dépendra tout autant de la capacité des Corses et de leurs représentants à s’y associer et à être des acteurs actifs de cette évolution démocratique indispensable.

On ne changera pas la Corse contre les Corses.

La société corse doit trouver en elle-même les capacités à se réformer, notamment à rompre avec le clanisme.

C’est à travers la mise en œuvre de cette double responsabilité que la Corse pourra enfin sortir de l’impasse dans laquelle elle se trouve.

Il est certain que cette volonté devra s’accompagner de mesures de soutien transitoires pour permettre et favoriser, par des redéploiements financiers et budgétaires, le développement économique dans l’ensemble des divers secteurs d’activité.

Il en est ainsi, en particulier, pour l’agriculture et le tourisme qui constituent les deux principales richesses à développer.

Le groupe socialiste approuve le rapporteur dans sa volonté de ne pas faire du problème institutionnel un préalable.

Il est reconnu par tous que les grandes réformes de 1982 et 1991 permettent, s’ils le veulent, aux Corses d’assumer la responsabilité du destin de l’île, même si l’on peut regretter que des décisions de la compétence des élus soient parfois illégalement déléguées à d’autres représentants non élus au suffrage universel.

L’expérience montre que l’on ne saurait admettre une dilution des responsabilités qui doivent être assumées par les élus eux-mêmes.

Ces derniers, pour avoir une crédibilité indispensable, doivent être des élus de scrutins sincères. L’établissement de listes électorales incontestables est le fondement nécessaire à l’exercice d’une démocratie rénovée. Cela passe, comme le préconise le rapport, par une modification de la loi qui permette à l’autorité publique d’intervenir efficacement dans le processus de révision des listes électorales.

Sur ce point, comme sur les autres préconisations du rapport, le groupe socialiste attend du gouvernement leur mise en œuvre rapide.

Au-delà de cette commission d’enquête, le groupe socialiste continuera à exercer sa vigilance pour que l’indispensable action publique en Corse soit conduite avec détermination et continuité.

 

*

* *

EXPLICATIONS DE VOTE des COMMISSAIREs APPARTENANT
AU GROUPE du rassemblement pour la république

 

Le groupe RPR a approuvé la création, au printemps dernier, d’une commission d’enquête parlementaire sur l’utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse.

Il approuve également le rapport rendu par cette commission.

Ce rapport comporte une description de la situation en Corse et des dérives constatées qui reprend largement les analyses recueillies dans le cadre de la mission d’information commune sur la Corse présidée par M. Henri Cuq et dont les auditions ont été publiées en 1997.

Le groupe RPR souscrit à l’orientation générale du rapport d’enquête qui préconise le retour à l’État de droit en Corse, l’application des lois de la République, la lutte contre toutes les formes de violence et de criminalité, la restauration de la sécurité et de la justice. De même, il approuve la mise en œuvre d’une politique de développement économique et culturel fondée sur la participation pleine et entière des Corses, auxquels il renouvelle toute sa confiance. Il insiste enfin sur la nécessité d’inscrire l’action de l’État et des pouvoirs publics dans la continuité et dans la durée, tout en aménageant les transitions nécessaires, en particulier s’agissant du développement économique de l’île.

Le groupe RPR se réjouit que les propositions avancées dans le rapport reprennent pour l’essentiel les orientations définies par M. Alain Juppé, Premier ministre, devant l’Assemblée territoriale de Corse le 17 juillet 1996.

Au-delà de son approbation générale, le groupe RPR tient à souligner que les gouvernements devront être particulièrement vigilants pour l’avenir dans plusieurs domaines. La restauration de l’État de droit appelle une politique juste, mais ferme. Il faut à cet égard souligner que les lois d’amnisties générales (1981 et 1988) ou particulières à la Corse (mars 1982 – juillet 1989) n’ont pas contribué à l’efficacité de la lutte contre la violence et la criminalité.

Il faut aussi rappeler que les modifications institutionnelles, en particulier la mise en œuvre du " statut Joxe " en 1991, ont tendu dans certains aspects à encourager les dérives aujourd’hui constatées. Tel est le cas de la multiplication des offices, qui ont démembré l’institution territoriale de Corse et réduit les responsabilités des élus. Aussi, le groupe RPR, tout en approuvant le souci du rapport de ne pas réengager le débat institutionnel, se réjouit de la proposition consistant à supprimer ou à réintégrer dans la Collectivité territoriale certains offices confortés par le " statut Joxe " et souhaite qu’on aille plus loin encore dans cette direction.

Le groupe RPR regrette que certaines propositions du rapport, notamment dans le domaine économique ne soient pas toujours suffisamment précises ou opérationnelles. Il insiste sur le rôle majeur du tourisme dans la politique de développement économique.

Surtout, nous réaffirmons notre confiance en nos compatriotes corses dont l’immense majorité n’est pas concernée par les errements constatés et les réprouve, dont l’immense majorité est attachée à la République et à la France. Notre confiance dans l’avenir, grâce à la restauration de l’État de droit, s’appuie aussi sur les multiples réussites observées par la commission d’enquête en Corse, notamment dans les secteurs économique, éducatif ou culturel, qui ne doivent en aucun cas être occultées par des dérives hélas réelles.

En approuvant le rapport, le groupe RPR souhaite ainsi marquer son souci de la responsabilité et de l’unité nationale face à un défi porté au cœur de la République et symbolisé, hélas, par le lâche assassinat du préfet Claude Erignac.

 

*

* *

 

EXPLICATIONS DE VOTE des COMMISSAIREs APPARTENANT
AU GROUPE union pour la démocratie française-Alliance

 

Le groupe UDF avait voté en mars dernier en faveur de la création d’une commission d’enquête sur l’utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse, considérant que le retour à l’État de droit constituait un objectif partagé par toute la représentation nationale et correspondait aux vœux de nos concitoyens, en particulier ceux habitant en Corse.

Nous avions alors souhaité qu’il soit tiré le meilleur parti des travaux de la mission d’information commune sur la Corse, créée en novembre 1996, et qui avait recueilli une masse considérable d’informations au cours de quatre-vingts auditions de plus de cent personnalités.

I – Le diagnostic est insuffisant sur ces deux points

Si nous partageons pour l’essentiel l’analyse de la première partie du rapport qui qualifie d’inacceptable et d’accablante la gestion des fonds publics et des services publics en Corse, celle-ci devrait être complétée sur deux points.

Tout d’abord, le rapport ne souligne pas assez que la gestion des services publics en Corse est souvent inefficace alors même qu’ils disposent fréquemment de moyens supérieurs à la moyenne nationale et que l’impact des fonds publics, considérables au regard des autres régions françaises, dont bénéficie la Corse ne se traduit pas par des résultats proportionnés.

En second lieu, le rapport tend à accréditer l’idée que seule une petite minorité bénéficie du système alors même que des données tant en matière de prélèvements obligatoires que de prestations sociales ou d’aides économiques montrent que la proportion de personnes concernées représente une forte minorité.

II – L’analyse des causes de cette situation est incomplète

Si nous partageons l’analyse des causes de la situation gravement dégradée de la Corse établie par le rapport, ces dernières sont malheureusement incomplètes et orientées politiquement.

Tout d’abord, il est à signaler que les lois de 1982 et de 1991 sur le statut particulier de la région Corse ont contribué à la dégradation de la situation en fournissant des opportunités nouvelles de dérive.

Par ailleurs, le rapport qualifie de pré-mafieuse la situation de la Corse alors qu’il serait plus exact de la qualifier de système clanique.

III – Les propositions ne sont pas à la hauteur du problème posé

Beaucoup de propositions contenues dans le rapport relèvent plus de l’incantation que de l’action.

La réforme des institutions en Corse ne peut être éludée, en particulier la réintégration des offices dans la Collectivité territoriale de Corse ainsi que l’examen de la faisabilité de la fusion des deux départements de Haute-Corse et de Corse-du-Sud.

Le nécessaire retour à l’application des lois de la République en Corse suppose tout à la fois de la fermeté et de la constance, mais aussi des mesures d’accompagnement pour assurer une transition sans heurts.

C’est pourquoi, le groupe Union pour la démocratie française–Alliance vote pour l’adoption de ce rapport bien qu’il en souligne les insuffisances du diagnostic, de l’analyse des causes et des solutions proposées.

 

*

* *

EXPLICATIONS DE VOTE des COMMISSAIREs APPARTENANT
AU GROUPE démocratie libérale et indépendants

 

A l’issue des travaux de la commission d’enquête sur l’utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse, les députés membres du groupe Démocratie Libérale et Indépendants considèrent que l’État doit, sans relâche, affirmer dans cette région comme dans les autres, la préémimence de l’ordre public et la nécessité du respect de la loi.

Les investigations de la commission ont mis en évidence de nombreuses faiblesses dans le fonctionnement des administrations en Corse, qui appellent de sérieuses mesures de redressement ; elles ont également permis d’établir que, du fait d’une défaillance généralisée des contrôles, l’utilisation des fonds publics était marquée par de trop nombreux abus et détournements.

Il importe que les responsables, chacun à leur niveau, s’attachent à corriger les errements condamnables qui ont été relevés. Ceci requiert résolution, rigueur et continuité dans l’action.

Les députés du groupe Démocratie Libérale et Indépendants ont également acquis la conviction que les Corses, dans leur immense majorité, appelaient de leurs vœux une telle orientation.

Ils réprouvent toute présentation de la situation en Corse visant à mettre l’ensemble de la population en position d’accusée. Au contraire, ils estiment que les Corses ont constamment montré leur attachement à notre communauté nationale et qu’ils aspirent, comme tous les Français, à une juste application de nos lois, dans le cadre du statut qui est celui de leur région.

Considérant qu’il est particulièrement utile aujourd’hui de manifester le sentiment unanime de la représentation nationale, de voir le respect des lois et le maintien de l’ordre public affirmé comme une nécessité absolue, les députés du groupe Démocratie Libérale et Indépendants ont approuvé le rapport de la commission d’enquête sur l’utilisation des fonds publics et la gestion des services publics en Corse.

EXPLICATIONS DE VOTE du COMMISSAIRE APPARTENANT
AU GROUPE communiste

 

Le commissaire communiste se félicite de l’important travail de la commission d’enquête. Il témoigne, s’il en était besoin, du bien fondé de la proposition du groupe communiste qui a demandé sa constitution à plusieurs reprises.

Qu’elle ait fonctionné sous le régime du secret ne la dispense pas de rendre compte de la façon la plus exhaustive des constats et observations qu’elle a pu faire. Les Corses dans leur ensemble ont besoin de cette transparence pour prolonger le travail de la commission.

Aussi complet soit-il, le rapport de la commission ne saurait faire le tour de tous les problèmes et en aucun cas être une fin en soi. Il doit être, au contraire, la première étape d’un long travail de redressement et de développement qui reste à accomplir. Il peut constituer un formidable point d’appui à la communauté corse dans sa diversité dès lors que les Corses s’en saisissent pour s’engager activement dans la prise en mains de leur avenir. Il faut leur en donner les moyens.

Le commissaire communiste a voté le rapport. Tout en se félicitant de la prise en compte de son amendement en ce sens, il insiste sur la nécessité de pousser plus loin la recommandation d’une exigence essentielle : celle d’une aide à un développement sans précédent de la consultation et de la participation des Corses eux-mêmes.

Rien de décisif ne pourra en effet se réaliser si les Corses qui refusent la violence et les atteintes à la légalité républicaine ne sont pas sérieusement et toujours plus et mieux associés tout à la fois au travail de redressement que suggèrent les orientations du rapport et à l’élaboration d’un projet global de développement économique, social et culturel de l’île.

Cette exigence de l’intervention des Corses dans la gestion de leurs affaires ne soustrait pas l’État à ses obligations, elle les renforce. Elle rend plus impérieuse encore l’affirmation d’une volonté politique forte et claire de l’État de rompre définitivement et dans la durée avec ses démissions et, trop de fois, ses compromissions passées. L’État a une responsabilité que personne ne saurait contester dans l’évolution de la situation en Corse. Le laxisme, l’absence de rigueur, le silence judiciaire, les compromissions… témoignent d’autant de carences qui expliquent pour une part significative d’insupportables dérapages.

On ne saurait confondre ces défaillances avec les comportements de délinquance lourde d’une minorité d’individus ou de groupes " d’affaires " qui sont " les seuls et vrais colonisateurs de l’île ". Cette minorité de grande délinquance est le véritable obstacle à l’assainissement de la situation dans l’île et à son développement économique, social et culturel.

Rien ne saurait plus dangereux que d’entretenir l’insupportable amalgame entre cette minorité et l’immense majorité des Corses qui aspirent à vivre sereinement dans une île débarrassée de la délinquance économique et financière, où s’appliquent les lois de la République, qui sera associée à tous les grands projets d’aménagement harmonieux de son territoire et qui pourra épanouir sa personnalité singulière.

Pour cela, l’État doit poursuivre l’action engagée depuis plusieurs mois aussi longtemps que la situation le nécessitera. Aller jusqu’au bout, sans se disperser mais en ciblant l’essentiel : le noyau dur de la délinquance économique et financière, le grand banditisme, les dossiers les plus sensibles, c’est-à-dire ceux qui nourrissent les crimes et les délits, déstabilisent les institutions et bloquent le développement économique.

Le rétablissement de l’État de droit est une condition nécessaire mais non suffisante. Il faut faire vivre la citoyenneté et la démocratie contre l’affairisme. L’État doit affirmer nettement sa détermination politique et doter les institutions insulaires des moyens nécessaires à l’accomplissement de toutes leurs missions.

Cela serait encore insuffisant si cette volonté clairement affichée et ces moyens réunis, la communauté corse dans son ensemble n’exprimait pas, elle-aussi, sa propre volonté d’accompagner l’action de rétablissement de l’État de droit et du développement de l’île.

Lui en donner les moyens, c’est d’abord jouer à fond la carte de la démocratie, de la transparence et de l’information la plus exhaustive de tous les Corses, pour leur permettre de devenir les véritables acteurs du développement économique, social et culturel de l’île.

Leur en donner les moyens, c’est les associer de bout en bout à l’élaboration des projets et des décisions qui engagent leur avenir. C’est conjuguer en permanence démocratie directe et démocratie représentative, c’est travailler avec les Corses à l’adoption d’un projet collectif global et cohérent d’aménagement et de développement de l’île.

L’élaboration de ce projet de croissance durable et d’épanouissement de l’identité culturelle doit être le vecteur essentiel d’un élargissement audacieux de la démocratie participative.

Au plan économique, la Corse est riche de potentialités peu ou mal exploitées. Le respect d’un environnement exceptionnel qu’il convient de protéger n’est aucunement incompatible avec, pour ne prendre que quelques exemples, l’accueil et le développement d’activités de nouvelles technologies, la constitution de pôles nationaux et internationaux de recherche, le développement d’une agriculture spécifique aux conditions de l’insularité, un essor touristique respectueux du paysage favorisant la promotion d’une image positive de la Corse et des Corses et promouvant des activités commerciales, culturelles, de loisirs, de services, maîtrisées dans le cadre d’un schéma d’aménagement collectivement élaboré.

L’épanouissement de la culture et de la langue est une chance, autant pour la Corse que pour le patrimoine culturel national dans son ensemble, car c’est bien dans sa diversité qu’il puise sa richesse.

Sur la base de projets clairement identifiés, les moyens doivent être donnés à cette région insulaire pour lui permettre de conduire à leur terme la continuité territoriale par des équipements publics à vocation sociale, la réalisation d’infrastructures de transport interne, d’urbanisme et de logement répondant à l’attente de l’ensemble de la population résidente, d’un service public de santé et d’éducation, de recherche, indispensables à l’essor d’une des plus belles régions françaises. Telle est la volonté de l’immense majorité des hommes et des femmes qui y vivent, voir respecter leur identité et leur culture, voir satisfaire leurs aspirations à une vie meilleure, riche d’emplois, voir confirmer leur appartenance pleine et entière à la République française avec tout ce que cela signifie de droits et de responsabilités.

 

*

* *

Explication de vote du commissaire Radical de Gauche
appartenant au groupe RCV

A quelques mois près, cela fait maintenant dix ans que les élus radicaux de gauche de Corse réclamaient la création d’une commission d’enquête sur l’utilisation des fonds publics en Corse. M. Emile Zuccarelli, ministre de la Fonction publique, de la réforme de l’État et de la décentralisation n’a eu de cesse de déposer, dès 1989, des propositions de résolution en ce sens sur le bureau de notre assemblée lorsqu’il était député. Et je souhaite, au nom des radicaux, lui manifester notre sympathie pour le courage dont il fait preuve dans ses prises de position politiques face aux dérives terroristes et mafieuses, sous toutes les formes, telles qu’elles se sont manifestées en Corse.

Ce n’est donc pas en réaction au terrible assassinat du préfet Claude Erignac que M. Roger Franzoni, devenu député en remplacement de M. Emile Zuccarelli, nommé membre du gouvernement, a déposé la proposition de résolution n° 219 le 12 septembre 1997. Si les radicaux de gauche ont demandé cette création c’est parce qu’ils souhaitaient lever l’hypothèque. En effet, nous considérions que les difficultés réelles à déclencher le développement de l’île ne pouvaient s’expliquer par la seule survenance de cinq cents attentats par an et que le soupçon existait " que les structures locales ou certains comportements individuels ne soient un facteur d’inefficacité " aux efforts consentis par la collectivité nationale et l’Union européenne.

Parce que nous avons toujours résolument combattu les dérives locales et institutionnelles, nous souhaitions que la représentation nationale se saisisse de la question pour effectivement montrer aux Corses que les institutions de la République jouent pleinement sur cette île.

Pendant six mois notre commission a donc auditionné les forces vives de la Corse, les autorités de l’État qui exercent ou ont exercé leurs fonctions sur place et tous ceux qui, de près ou de loin, ont eu à traiter de la Corse dans leurs attributions ou leurs fonctions.

Les conclusions de notre rapporteur sont riches et il est évident que je m’y rallie avec force et conviction. Oui, il faut un État ferme, prêt à sanctionner les infractions aux lois républicaines et il est évident que la personnalité même de l’actuel ministre de l’Intérieur, M. Jean-Pierre Chevènement, est le meilleur des gages que les Corses pouvaient souhaiter pour que l’État de droit soit effectivement restauré en Corse. Il a su, sous l’autorité de M. Lionel Jospin et avec le soutien de tout le gouvernement, affirmer pleinement ses convictions et donner aux Corses le message qu’ils attendaient depuis trop longtemps.

Depuis le 6 février 1998, il existe une véritable prise de conscience collective, au plan national, de la crise qui touche la Corse et ses habitants. En assassinant le préfet de région, des terroristes ont tué le plus haut représentant de l’État sur l’île.

Ils ont clairement déclaré la guerre à la République et l’émotion suscitée n’a sans doute pas été sans effet sur la quasi-unanimité, au sein de notre assemblée, à soutenir la démarche de notre collègue M. Roger Franzoni.

Pour ce qui la concerne, notre commission prend toute sa place dans cette démarche. De nos travaux il est maintenant nécessaire que les propositions formulées soient étudiées avec pour unique volonté d’aider la Corse et ses habitants qui ne doivent pas être montrés du doigt. Les Corses n’aspirent qu’à la sécurité et à la paix civile et nous leur devons l’application de la loi, avec les moyens ordinaires de la République.

Si des voix s’élèvent pour dénoncer une politique d’exception qui serait menée par le gouvernement, ce n’est, de la part des auteurs de ces commentaires, que l’expression d’une extraordinaire fébrilité, voire d’une inquiétude sur laquelle on peut s’interroger. Sinon, pourquoi dénoncer la seule et juste application de la loi républicaine en Corse, partie intégrante du territoire national ?

Nul ne peut nier que des manquements graves se sont fait jour en Corse depuis des années. Plusieurs instructions judiciaires en cours ont clairement démontré que des habitudes avaient été prises par certaines personnes qui ont commis des forfaits dont ils devront répondre devant la justice.

" La commission n’a pas souhaité approfondir ses investigations sur un sujet qui ne relevait pas directement de sa mission mais, au vu des quelques éléments partiels mis à sa disposition, le rapporteur ne peut qu’exprimer à son tour ses plus vives préoccupations à l’égard d’une certaine dégradation de l’autorité de l’État qui pourrait rapprocher effectivement la Corse de la Sicile. " Ces lignes sont extraites du rapport parlementaire de 1992 qui fut publié à l’issue des travaux de la commission d’enquête parlementaire sur les tentatives de pénétration de la mafia en France. A l’époque on connaissait donc les problèmes et c’est effectivement un véritable " système " qui émerge. Alors comment y remédier ?

Il est clair que les offices, prévus par le " statut Joxe ", ne donnent pas aujourd’hui toute la satisfaction que l’on pouvait en attendre. Ce sont les socio-professionnels qui en dirigent certains et le processus de décision n’appartient pas aux élus qui seuls pourtant disposent de la légitimité et de la responsabilité démocratiques.

Quoi qu’il en soit, une politique forte et volontariste est engagée et les radicaux de gauche en sont pleinement solidaires. Toutefois, ils escomptent que la justice et les procédures aillent à terme et regrettent que la délocalisation de certaines affaires en cours soit parfois remise en cause. Comme pour le terrorisme étranger qui touche notre pays, il faut en effet que certaines instructions concernant des affaires ayant lieu en Corse soient centralisées à Paris.

On ne restaurera l’État de droit en Corse que si l’on refuse tout compromis avec les terroristes et que si l’on expose clairement les dérives constatées. Les Corses doivent savoir si certains d’entre eux ont failli. Ils doivent pouvoir identifier ceux qui les ont trompés, manipulés et offensés. Leur dignité est grande. Ils ont à chaque fois que la République les sollicitait, répondu présents. Aujourd’hui, c’est à la République de répondre à leur appel lancé en février dernier.

Les radicaux de gauche voteront bien évidemment les conclusions de ce rapport qu’ils attendaient depuis longtemps, tant ils sont attachés à la restauration de l’État de droit en Corse qu’ils considèrent comme une nécessité première mais aussi comme une étape. Les pouvoirs publics devront veiller au développement social, culturel et surtout économique de la Corse qui, bien que dotée de formidables atouts, ne peut les utiliser dans le contexte actuel.

Dans ce contexte, les radicaux se félicitent que les conclusions de ce rapport ne débouchent pas, une nouvelle fois, sur des propositions de modifications institutionnelles qui ne répondraient en rien à la situation observée.

Enfin, le commissaire représentant le parti radical de gauche remercie les président et rapporteur, Jean Glavany et Christian Paul, pour l’objectivité et la franchise des débats qu’ils ont menés et la qualité du travail accompli.

 

- Cliquer ici pour retourner au sommaire général

 



© Assemblée nationale