Décollage et atterrissage de nuit

Groupe d’études parlementaire
sur les vols de nuit et
les nuisances aéroportuaires
(14 février 2002)

[Ce document émane du Groupe d'études sur les vols de nuit et les nuisances aéroportuaires.
 Il ne s'agit pas d'un rapport parlementaire publié au nom d'une commission permanente ou d'une mission d'information]

Conclusions du groupe d’études

Membres du groupe d’études sur les vols de nuit et les nuisances aéroportuaires :

Présidente : Martine David, députée du Rhône

Mme Yvette BENAYOUN-NAKACHE
M. Jean-Pierre BLAZY
M. André BERTHOL
M. Pierre BRANA
M. Jean-Marie BOCKEL
M. Jean-Michel BOUCHERON
Mme Christine BOUTIN
Mme Nicole BRICQ
M. François BROTTES
M. Yves BUR
M. Christian CABAL
M. Alain CALMAT
Mme Nicole CATALA
M. Jean-Paul CHARIÉ
M. Alain CLARY
M. Pierre COHEN
M. Georges COLOMBIER
M. Charles de COURSON
Mme Martine DAVID
M. Francis DELATTRE
M. Renaud DONNEDIEU DE VABRES
M. Nicolas DUPONT-AIGNAN
M. Renaud DUTREUIL
M. Charles EHRMANN
M. Christian ESTROSI
M. Alain FERRY

M. Michel HUNAULT
M. Jean-Yves GATEAUD
M. Jean-Pierre GIRAN
M. Denis JACQUAT
M. Jacky JALNEAU
M. Jean-Jacques JEGOU
M. Jacques KOSSOWSKIM. François LAMY
M. Edouard LANDRAIN
M. Pierre LEQUILLER
M. Lionnel LUCA
M. Jacques MASDEU-ARUS
Mme Hélène MIGNON
M. Gabriel MONTCHARMONT
M. Pierre MORANGE
M. Jacques MYARD
M. Patrick OLLIER
M. Michel PAJON
M. Jean-Pierre PERNOT
M. Étienne PINTE
M. Patrick RIMBERT
M. Yves ROME
M. Joseph ROSSIGNOL
Mme Odile SAUGUES
M. Yves TAVERNIER
M. Daniel VACHEZ
M. Michel VOISIN
M. Pierre-André WILTZER

Sommaire

Introduction p. 6

I- Etat des lieux : un trafic aérien croissant et des normes de bruit inadaptées p. 9

A- Evolution du trafic aérien : une croissance sans précédent p. 9

1. Au niveau mondial p. 9

2. En Europe p. 9

3. En France p. 10

a) Les données statistiques globales sont sans équivoque p. 10

b) De très nombreux mouvements ont lieu de nuit p. 11

B- Des normes de bruit aujourd’hui inadaptées p. 17

1. La réglementation internationale p. 17

2. Les normes européennes sont uniquement incitatives : elles ne sont pas aujourd'hui opératoires et les réformes prévues ne semblent pas à la hauteur du problème p. 18

a) La situation actuelle p. 18

b) Le projet de directive : une avancée mineure p. 19

II- Une moindre acceptation sociale du bruit :

mobilisation croissante des riverains p. 21

A- Des riverains de plus en plus largement touchés par les nuisances sonores aéroportuaires nocturnes p. 21

B- " Gêne sonore " et santé des riverains p. 22

C- Les nuisances sonores aéroportuaires suscitent des réactions de plus en plus vives des riverains p. 24

1. Une demande sociale forte mais jusqu’à aujourd’hui non satisfaite p. 24

2. Des règles détournées par les opérateurs p. 25

3. Un risque de développement des contentieux p. 26

III- La lutte contre les nuisances sonores nocturnes n’est toujours pas

une priorité, ni en France, ni au niveau européen p. 28

A- Des avancées qui restent insuffisantes p. 28

1. La France est en retrait par rapport aux autres pays européens p. 28

a) L’Allemagne p. 28

b) Le Royaume-Uni p. 28

c) La Belgique p. 29

d) La Suisse p. 29

e) Les Pays-Bas p. 29

f) Le Danemark p. 29

g) L’Italie p. 30

2. Des avancées encore insuffisantes en France p. 30

a) Des dispositions de nature réglementaire s’appliquent à certains aéroports français p. 30

b) La création de l'ACNUSA constitue une réelle avancée, mais ses propositions ne sont pas mises en œuvre suffisamment rapidement p. 32

c) Le projet de décret concernant les Plans d’Exposition au Bruit p. 33

d) La proposition de loi Cochet p. 34

B- Propositions p. 35

1. Maîtriser le développement des aéroports situés dans les zones

les plus urbanisées p. 35

2. Mieux prendre en compte les dommages causés aux riverains p. 35

3. Réduire les mouvements aériens nocturnes p. 36

4. Favoriser les techniques et les appareils les moins bruyants p. 37

5. Mieux sanctionner les abus p. 38

Introduction

Le problème posé par les vols de nuit ne peut aujourd’hui être considéré comme secondaire, compte tenu de la sensibilité croissante de la société aux questions environnementales. Ainsi, seul l’encadrement et l’atténuation des nuisances liées aux mouvements d’avions la nuit permettra aux populations riveraines d’aéroports de mieux accepter le développement du transport aérien.

Des progrès sont nécessaires à court terme dans la réduction des nuisances sonores aéroportuaires, notamment la nuit. Il s’agit d’un problème national, qui concerne plus de 500 000 riverains à proximité des plates-formes et bien plus encore si l’on compte ceux qui habitent sous les couloirs aériens. L’intensité du débat public qui a eu lieu sur le projet de nouvelle plate-forme dans le bassin parisien illustre bien l’inquiétude grandissante des populations menacées par ces pollutions sonores nocturnes, qui s’accroissent avec le développement de la circulation aérienne.

Ainsi, la multiplication des vols de nuit depuis plusieurs années suscite chez les riverains une légitime appréhension, que les pouvoirs publics se doivent désormais de prendre en compte.

Une avancée, même si elle demeure insuffisante, a été faite à travers la proposition de loi de M. Yves Cochet visant à interdire les vols de nuit, adoptée en première lecture le 26 avril 2001 à l’Assemblée Nationale. Cette proposition a naturellement provoqué de vives réactions de la part des secteurs économiques concernés, et le texte voté par l’Assemblée Nationale est malheureusement en retrait par rapport à la proposition initiale, qui prévoyait l’interdiction totale des vols de nuit sur l’ensemble du territoire national. En effet, la proposition de loi Cochet telle que votée reprend finalement les préconisations de l’ACNUSA et s’inscrit ainsi dans une démarche plus progressive que celle qui était envisagé au départ. Il conviendra donc, lors de la prochaine législature, de réfléchir à un texte plus ambitieux.

L’ACNUSA, créée par la loi n° 99-588 du 12 juillet 1999, a rendu ses premières recommandations au gouvernement le 18 avril 2001. Ces recommandations vont dans le sens d’une restriction des vols de nuit les plus bruyants. L’ACNUSA se positionne contre l’interdiction des vols de nuit à court terme et pour une limitation avec un indice événementiel du bruit des avions fixé à 85 dB(A). Ces propositions ne devraient constituer qu’un point de départ permettant d’ouvrir un débat sérieux sur ces problèmes. En effet, si elles limitent dans la zone C le bruit des avions à 85 décibels, elles ne permettent pas véritablement de réduire le nombre de vols de nuit. En outre, le seuil de 85dB(A) n’est pas assez dissuasif et devrait être ramené à 80 dB(A) pour s’appliquer à un plus grand pourcentage d’avions générant une pollution sonore qui doit être sanctionnée.

Il convient de rappeler que l’on a recensé, en 2000, 58 684 vols de nuit à l’aéroport de Roissy - Charles de Gaulle, ce qui correspond concrètement à 160 avions par nuit, soit 1 avion toutes les 3 minutes entre 22h et 6h !

L’introduction de la mesure du bruit au sol, se substituant à l’ancienne méthode du calcul, constitue néanmoins un progrès car cette technique permettra de mieux exprimer la réalité de la gêne physique ressentie par les riverains.

Ce groupe d’études parlementaire a procédé à l’audition de différents acteurs du transport aérien et a pu dégager des propositions qui reprennent et dépassent les recommandations faites par l’ACNUSA et qui sont destinées aux responsables politiques.

Nous considérons que l’augmentation des niveaux sonores autour de certains aéroports proches d’agglomérations et de zones résidentielles, qui résulte du développement de la circulation aérienne, ne devrait pas conduire à priver de sommeil les populations avoisinantes pour la seule satisfaction d’exigences purement commerciales – en matière de fret par exemple, on peut songer notamment aux activités nocturnes de l’Aéropostale (La Poste) et de FedEx (courrier express).

Il est urgent qu’un vaste programme intégré de lutte contre les nuisances sonores générées par les vols de nuit soit mis en œuvre, assorti de mesures contraignantes et concrètes et tenant compte des plaintes de plus en plus nombreuses que les citoyens formulent en ce domaine.

Nous sommes préoccupés par la persistance et l’accroissement des niveaux sonores la nuit sur certains aéroports, comme par exemple à Roissy Charles de Gaulle, où le trafic de nuit a proportionnellement doublé par rapport au trafic de jour et où l’on peut prévoir 80 000 vols de nuit à l’horizon 2005. Cette situation risque d’affecter gravement la santé de la population locale. Il en est de même dans certains aéroports de province.

Face à cet écueil, devant le silence de tous les gouvernants européens et le manque d’ambition des mesures préconisées par la Commission européenne, le groupe d’étude appelle les autorités publiques :

I- Etat des lieux :
un trafic aérien croissant et des normes de bruit inadaptées

A.- Evolution du trafic aérien : une croissance sans précédent

1. Au niveau mondial

2. En Europe

Année 2000

Aéroport

Nombre de mouvements

(évolution par rapport à 1999)

Fret en tonnes

(évolution par rapport à 1999)

Londres Heathrow

466 817 (+ 1,9 %)

1 402 090 (+ 3,4 %)

Londres Gatwick

259 885 (+ 2,3 %)

338 246 (+ 7,8 %)

Francfort

458 731 (+ 4,5 %)

1 710 145 (+ 11,1 %)

Amsterdam

432 480 (+ 5,5 %)

1 267 385 (+ 3,4 %)

Milan Malpensa

247 629 (+ 14,6 %)

290 980 (+ 18,8 %)

Chiffres 2000 (source : Aéroports magazine Hors Série mai 2001)

3. En France

a) Les données statistiques globales sont sans équivoque

Année 2000

Aéroport

Nombre de mouvements

(évolution par rapport à 1999)

Fret en tonnes

(évolution par rapport à 1999)

Paris CDG

517 657 (+ 8,8 %)

1 610 484 (+ 13,2 %)

Paris Orly

243 586 (- 0,9 %)

120 637 (- 16,4 %)

Nice

217 366 (+ 3,2 %)

21 182 (- 0,6 %)

Marseille

134 093 (+ 8,9 %)

59 389 (+ 1,4 %)

Lyon

199 797 (+ 1,4 %)

44 106 (+ 13 %)

Toulouse

103 962 (+ 0,4 %)

60 069 (+ 28,1 %)

Mulhouse/Bâle

126 895 (+ 1,6 %)

80 046 (+ 9,8 %)

Chiffres 2000 (source : Aéroports magazine Hors Série mai 2001)

b) De très nombreux mouvements ont lieu de nuit

Répartition par compagnie des vols entre 22 heures et 6 heures à Roissy en 2000

Compagnie
/Tranche horaire

22h-23h

23h-24h

0h-1h

1h-2h

2h-3h

3h-4h

4h-5h

5h-6h

Total

Air France

7725

2541

1009

231

159

137

443

1945

14190

Aéropostale

248

2587

2180

2447

1397

337

288

76

9560

Express Airways

0

334

1103

332

37

581

927

129

3443

European Air Transport

3

84

321

228

313

398

333

79

1759

FEDEX

672

296

225

155

32

61

235

73

1749

Airlinair

95

382

142

356

73

36

132

7

1233

Autres compagnies

8127

4799

3901

2315

2224

1476

1628

2180

16305

TOTAL

16870

11133

8881

6064

4235

3026

3986

4489

58684

Source : rapport n° 3002 du 24 avril 2001 de M. Yves Cochet, député, relatif à différentes propositions de loi visant à réglementer les vols de nuit

 

Trafic entre 22 heures et 6 heures fret et passagers sur les principaux aéroports français en 1999

Source : DGAC – service des bases aériennes

B.- Des normes de bruit aujourd’hui inadaptées

1. La réglementation internationale

Les normes acoustiques internationales ont été définies par l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) et insérées dans l'Annexe 16 à la Convention relative à l'aviation civile internationale. Ces normes, établies au début des années 1970, ont été remplacées en 1977 par des normes plus sévères, constituant le chapitre 3 de cette Annexe.

Elles définissent des niveaux de bruit maximaux en fonction des différentes catégories d'aéronefs et de la masse au décollage.

Ainsi, les avions sont classables en trois catégories :

- avions non certifiés ;

- avions certifiés selon les normes du " chapitre 2 ", dits appareils " chapitre 2 " ;

- avions certifiés selon les normes du " chapitre 3 ", dits appareils " chapitre 3 ".

La certification intervient en fonction de l'année de construction de l’appareil, mais surtout de son niveau de bruit à différentes étapes de son utilisation, en fonction du type d'appareil et de sa masse au décollage.

Si l'on s'appuie sur cette classification internationale, des progrès sensibles ont été réalisés : ainsi, en 1989, selon Aéroports de Paris, 2,57 % des mouvements à Roissy étaient le fait d’appareils non certifiés, 36,54 % d’appareils " chapitre 2 " et 57,89 % d’appareils " chapitre 3 ". En 1999, 93,36 % des mouvements ont été réalisés par des appareils " chapitre 3 ", seulement 6,46 % par des appareils " chapitre 2 " et 0,19 % par des appareils non-certifiés.

Mais ce classement n'est pas opérationnel d'un point de vue " sonore ", puisque certains appareils " chapitre 3 ", de conception ancienne, demeurent très bruyants par rapport aux autres avions du " chapitre 3 " et par rapport à certains petits appareils du " chapitre 2 ". Ce sont majoritairement des appareils " chapitre 2 " " hushkittés ", c'est-à-dire munis de dispositifs atténuateurs de bruit pour répondre aux normes du " chapitre 3 ".

L'OACI, consciente des limites de la réglementation existante, travaille actuellement à la mise en place d'une nouvelle norme d'encadrement des nuisances sonores plus pertinente.

En juin 2001, le Conseil de l'OACI a adopté une nouvelle norme de certification relative au bruit, qui figurera dans un nouveau " chapitre 4 " du volume 1 de l'annexe 16 de la convention relative à l'aviation civile internationale.

Cette nouvelle norme a les caractéristiques suivantes :

Mais l’application de cette norme ne suffira pas, à court terme, à faire sensiblement baisser les niveaux de bruit. En effet, elle ne fera sentir ses effets qu’à moyen, voire long terme, au fur et à mesure du renouvellement des flottes aériennes.

Ainsi, si cette avancée est importante, elle n’est pas suffisante.

2. Les normes européennes sont uniquement incitatives : elles ne sont pas aujourd'hui opératoires et les réformes prévues ne semblent pas à la hauteur du problème

a) La situation actuelle

En Europe, aucune réglementation n'interdit aujourd’hui les vols de nuit, même pour les avions certifiés les plus bruyants.

Les avions non certifiés ont été interdits d'exploitation dès 1989.

Par ailleurs, l'adjonction d'avions " chapitre 2 " à une flotte européenne a été interdite en 1990 et la directive n° 92-14 du 2 mars 1992 impose leur retrait progressif d'exploitation. Ce retrait doit être achevé au 1er avril 2002.

Le règlement (CEE) n°2408/92 du Conseil autorise, sans le rendre obligatoire, le retrait anticipé des appareils " chapitre 2 " sur les aéroports européens en période nocturne.

Il en est de même pour les avions " hushkittés ".

b) Le projet de directive : une avancée mineure

Elle se borne en réalité à mettre en œuvre certaines recommandations de l’OACI, sans chercher à développer une politique européenne de gestion du bruit innovante.

Comme indiqué dans l’exposé des motifs de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l’établissement de règles et de procédures concernant l’introduction de restrictions d’exploitation liées au bruit dans les aéroports de la Communauté (COM (2001) 695 final) :

La proposition jointe met en oeuvre et étend au niveau communautaire les orientations de l'OACI en matière de gestion du bruit qui ont été adoptées lors de la 33ème assemblée de l'OACI, qui s'est tenue à Montréal du 25 septembre au 5 octobre 2001 et qui sont définies dans la résolution A33/7 de l'assemblée ".

Les orientations de l’OACI se fondent sur 4 types de mesures :

– La réduction à la source des nuisances sonores engendrées par les aéronefs. Cette mesure ne peut produire d'effet que sur le long terme, à mesure que les aéronefs bruyants en service sont remplacés par des engins moins bruyants.

– La planification et la gestion de l'utilisation des sols. Les avantages potentiels supplémentaires de cette mesure dépendent de la rigueur avec laquelle elle a été appliquée par le passé.

– L'application de procédures d'exploitation dites "à moindre bruit" . Comme pour le point ci-dessus, les avantages potentiels supplémentaires de cette mesure dépendent de la rigueur avec laquelle ces procédures ont été appliquées par le passé.

– Les restrictions d'exploitation au niveau local pour des raisons de pollution sonore. Cette mesure comprend des restrictions d'exploitation partielles, qui ne sont autorisées que pour une période de temps donnée, et des restrictions d'exploitation qui ont pour but le retrait complet de la circulation des aéronefs présentant une faible marge de conformité.

– Des instruments économiques, comme des redevances aéroportuaires liées aux nuisances sonores. De ce point de vue, la Commission envisage l'adoption d'une proposition de directive portant création d’un cadre communautaire pour classer les émissions sonores produites par les aéronefs subsoniques civils aux fins de calculer les redevances sur le bruit. L'objet de cette proposition est d'accroître l'efficacité des redevances sur le bruit perçues par les aéroports comme mesure de protection de l'environnement. "

La mise en œuvre de ces mesures par les pays européens sera contrôlée par la Commission. Les pays devront prendre en compte le niveau de trafic et les nuisances générées aéroport par aéroport. Par ailleurs, " le choix d'une mesure ou combinaison de mesures visant à abaisser le niveau de bruit dans un aéroport donné reposera sur le principe selon lequel il faut chercher à obtenir l'effet bénéfique le plus important pour l'environnement au moindre coût. ".

Ainsi, par exemple, les restrictions de trafic ne pourront être mises en œuvre que sur les aéroports où la pollution sonore est importante. Elles sont par ailleurs rigoureusement encadrées :

Les performances environnementales des aéronefs ont été évaluées sur la base des valeurs limites de certification du chapitre 3. On considère que les aéronefs dont la marge cumulée est inférieure ou égale à 5 décibels par rapport aux valeurs limites de certification du chapitre 3 ne satisfont que dans une faible mesure aux normes et, à masse égale, contribuent de manière disproportionnée à l'aggravation de la situation sur le plan du bruit aux abords d'un aéroport donné. Conformément aux exigences d'évaluation, les aéroports où la pollution sonore est un problème seraient autorisés à interdire progressivement ces aéronefs. "

La proposition de directive prévoit également les principes et les règles d’évaluation de ce bruit, ainsi qu’un classement des aéroports en fonction du nombre de mouvements par an.

II – Une moindre acceptation sociale du bruit :
mobilisation croissante des riverains

A- Des riverains de plus en plus largement touchés par les nuisances sonores aéroportuaires nocturnes

Selon l'Union française contre les nuisances aériennes (UFCNA), fédération d’associations de riverains, 6 millions de personnes seraient concernées par le problème, en prenant en compte l'ensemble des aérodromes civils et militaires.

A l'inverse, si l'on recense uniquement les personnes vivant dans des lieux compris dans le périmètre des plans de gêne sonore institués par l'article 19-1 de la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 relative à la lutte contre le bruit, elles seraient environ 500 000. Ce chiffre correspond à une estimation basse. En effet, les plans de gêne sonore ne concernent que quelques aéroports et ne couvrent pas toutes les zones exposées au bruit.

Selon le rapport n° 3002 du 24 avril 2001 de M. Yves Cochet, député, relatif à différentes propositions de loi visant à réglementer les vols de nuit, " pour les aéroports civils, les nuisances les plus vives pour les riverains semblent liées au trafic au départ ou à destination des aéroports de Roissy, d'Orly, de Lyon, de Toulouse et de Metz. Cette liste n'est naturellement pas exhaustive et il importe en outre de rappeler que les nuisances peuvent être très significatives sur le trajet des avions, même à une distance relativement importante des aéroports. ".

Plus largement, au niveau mondial et européen, comme le souligne l’exposé des motifs de la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l’établissement de règles et de procédures concernant l’introduction de restrictions d’exploitation liées au bruit dans les aéroports de la Communauté (COM (2001) 695 final), " le trafic aérien est concentré dans un nombre relativement restreint d'aéroports dans la Communauté. Cette concentration est dans une large mesure à l'origine du degré élevé de nuisances sonores dans ces aéroports et à leur proximité. Cette analyse, effectuée dans le cadre du CAEP (Committee on Aviation Environmental Protection), a montré que, au niveau mondial, sur les 1700 aéroports concernés, 185 aéroports seulement, soit 11% (dont 35 sont situés dans des pays de la CEAC (Commission européenne de l'aviation civile) contribuent à hauteur de 91% à l'exposition au bruit de la population. "

B- " Gêne sonore " et santé des riverains

La gêne sonore est définie comme " une sensation perceptive et affective négative exprimée par des personnes qui entendent du bruit ". Elle constitue un problème de santé publique dans la mesure où la santé doit être entendue comme un état de complet bien-être physique, mental et social, conformément à la définition qu'en donne la charte de l'Organisation mondiale de la santé.

Cette gêne est réelle mais il est difficile de savoir exactement quelles sont ses conséquences sur la santé mentale et physique des riverains. Il est d’ailleurs regrettable qu’aucune étude épidémiologique n’ait été réalisée sur le sujet. Cette gêne a malgré tout été très précisément étudiée, par sondage, par l'Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité (INRETS) au voisinage des aéroports d'Orly et de Roissy.

Cette étude souligne très clairement la gêne ressentie et rappelle sans ambiguïté qu’elle n’est pas liée uniquement au niveau de bruit :

Par ailleurs, la répétition et la fréquence accrue de ce bruit, liées à la multiplication des décollages et atterrissages, entraînent un stress très important, qui a parfois des conséquences psychosomatiques non négligeables (troubles mentaux chez les personnes les plus fragiles entraînant une consommation accrue de psychotropes dans les zones riveraines des aéroports, troubles du système digestif, affaiblissement des défenses immunitaires, notamment chez les femmes enceintes, troubles cardio-vasculaires, etc).

Echelle des troubles du sommeil en fonction du bruit

Décibels (A)

 

75

Endormissement impossible

65

Réveil de l'adulte

55

Réveil de l'enfant

45

Sommeil paradoxal altéré

35

Perturbations de l'électroencéphalogramme

Source : rapport n° 3002 du 24 avril 2001 de M. Yves Cochet, député, relatif à différentes propositions de loi visant à réglementer les vols de nuit

L'OMS estime que, pour éviter des effets négatifs sur le sommeil, le " bruit de fond " en intérieur ne doit pas excéder 30 décibels, et les crêtes, 45 décibels.

En France, l’Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA) souligne également l’importance de ces problèmes, et rappelle qu’à proximité de l'aéroport Paris-Charles-de-Gaulle, 15 % des mouvements d'aéronefs donnent lieu à des mesures au sol supérieures à 85 décibels à la frontière des zones B et C des plans d'exposition au bruit, cette proportion passant à 44 % pour une mesure au sol de 80 décibels.

Comme le soulignait M. Yves Cochet dans son rapport précité, " lorsque l'on sait que l'isolation phonique sophistiquée d'un domicile (dont le résident ne profitera naturellement qu'à la condition de vivre calfeutré chez lui, ce qui n'ira pas sans engendrer d'autres conséquences sanitaires liées à la qualité de l'air intérieur) ne permet, au mieux, que de réduire d'environ 30 décibels le bruit constaté à l'extérieur, on mesure le caractère inacceptable de la situation actuelle. ".

C- Les nuisances sonores aéroportuaires suscitent des réactions de plus en plus vives des riverains

1. Une demande sociale forte mais jusqu’à aujourd’hui non satisfaite

Les protestations les plus vives sont liées aux nuisances causées par le trafic nocturne. En Allemagne, pour tempérer les craintes des riverains face à l'extension prévue de l'aéroport de Francfort, il a été proposé d'instituer en contrepartie un couvre-feu nocturne. En France, les exemples de larges mobilisations ne manquent pas, notamment en région parisienne, mais également en province. Ainsi, à Strasbourg, les riverains, inquiets de l'implantation prévue sur l'aéroport de leur ville du transporteur DHL, ont organisé une manifestation qui a rassemblé 15 000 personnes dans les rues de la ville en septembre 1996, conduisant à l'abandon du projet.

Il existe d'ailleurs dans notre pays un réseau dense d'associations actives qui dénoncent et combattent les conséquences néfastes pour les riverains du trafic aérien. Le groupe d’études a ainsi reçu M. Jean-Marie Gourdin, président de l’Union française contre les nuisances aériennes (UFNCA). Beaucoup des associations consacrées spécifiquement à cette question sont rassemblées au sein de cette union. Mais d’autres, dont le champ d’action est plus large, agissent également : par exemple, Les Amis de la terre France a récemment organisé une manifestation pour demander un couvre-feu entre 23 heures et 6 heures sur tous les aéroports français.

La vigueur des protestations émises par les victimes de ces nuisances atteste de l'importance du problème. Elle traduit surtout une demande sociale jusqu’à aujourd’hui non satisfaite : les pouvoirs publics ne se sont pas encore saisis avec suffisamment de vigueur de ce problème, alors qu’une action ferme et concertée s'impose.

Elle apparaît même, comme le soulignait déjà le rapport de M. Yves Cochet précité, "  dans l'intérêt du secteur du transport aérien tout entier ". En effet, " la pérennisation du statu quo réglementaire ou des réformes trop limitées risquent d'exposer, à terme, à une réaction de rejet global. ".

2. Des règles détournées par les opérateurs

Les infractions à la réglementation sont en effet nombreuses. A elle seule, la part relevant des infractions concernant le bruit sur l'aérodrome de Paris-Charles-de-Gaulle en 1998 et 1999 représente 1 215 sanctions. Entre 1998 et 1999, les infractions au couvre-feu nocturne constituaient plus de 90 % des affaires traitées sur l'ensemble des plates-formes. En 2000, le non-respect des trajectoires de départ représente une part importante du nombre des incidents relevés.

DOSSIERS D’INFRACTIONS DU 01/02/1999 au 31/12/2000

 

Sanctions

Relaxes

Instance CNPN

Total

Roissy-Charles de Gaulle

14

2

253

269

Le Bourget

6

9

53

68

Orly

8

1

41

50

Lyon-St Exupéry

9

1

15

25

Toulouse-Blagnac

6

0

4

10

Nice-Côte d’Azur

0

0

14

14

Total

43

13

380

436

Source : Rapport ACNUSA 2000

PART DES INFRACTIONS DANS LES MOUVEMENTS COMMERCIAUX

 

Nombre de mouvements commerciaux en 1999(*)


En % du total

Nombre de dossiers d’infractions 1999/2000


En % du total

% des infractions/

mouvements

Roissy-Charles de Gaulle

466 782

45 %

269

73 %

0,06 %

Orly

241 225

23 %

50

14 %

0,02 %

Lyon-St Exupéry

116 914

11 %

25

7 %

0,02 %

Toulouse-Blagnac

83 074

8 %

10

3 %

0,01 %

Nice-Côte d’Azur

119 059

12 %

14

4 %

0,01 %

Total

1 027 054

100 %

368

100 %

0,04 %

(*) Source : Direction générale de l’aviation civile (DGAC).

Source : Rapport ACNUSA 2000.

TYPE D’INFRACTION PAR PLATE-FORME

 

Arrivée

Départ

Déviation

Inverseurs

Total

Roissy-Charles de Gaulle

81

56

132

0

269

Le Bourget

29

39

0

0

68

Orly

0

0

50

0

50

Lyon-St Exupéry

10

15

0

0

25

Toulouse-Blagnac

5

5

0

0

10

Nice-Côte d’Azur

5

3

0

6

14

Total

130

118

182

6

436

Source : Rapport ACNUSA 2000

Par ailleurs, même lorsque les règles sont respectées, les dérogations trop nombreuses affaiblissent leur portée. Ainsi, sur Orly, les riverains se plaignent, à juste titre, des dérogations au couvre-feu nocturne, qui ont tendance à se multiplier aux périodes où elles entraînent pourtant une gêne maximale. Ainsi, en été, lorsque les compagnies aériennes sont très sollicitées, le couvre-feu perd tout son sens…

3. Un risque de développement des contentieux

L’exemple des riverains de l’aéroport d’Orly est symbolique à cet égard. Si la commune de Villeneuve-le-Roi a obtenu en 1987 qu’Air France (qui par la suite s’est retourné contre ADP) lui verse une indemnité de 1 119 308,45 francs, les riverains se battent depuis des années pour obtenir réparation du préjudice subi. La perte de valeur de leurs biens immobiliers est en effet indéniable depuis les années 1960.

Les propos des associations de riverains traduisent bien cette exaspération :

Le premier Plan d'exposition au bruit ( PEB ) qui entraîne une restriction de l'urbanisation autour d'Orly n'est mis en vigueur qu'a partir de 1975. Jusqu'en 1975 l'urbanisation se poursuit librement avec la bénédiction de l'état et des villes concernées. Les mouvements d'avions passent de 137.000 en 1961 (petits avions à hélices) à 310 000 mouvements par an en 1973 (avions à réaction), les nuisances sonores sont maintenant évidentes et insupportables, les maisons des riverains perdent 50% de leurs valeurs.

En 1981, les riverains assignent les compagnies aériennes pour obtenir une indemnisation correspondante à leur perte. (…) Ce qui c'est passé nous semble suffisamment exemplaire pour que l'UFCNA puisse saisir la Cour Européenne pour atteinte aux droits de l'homme. "

En la matière, les riverains du TGV ont obtenu des indemnités pour la perte de valeur de leur bien. Par ailleurs, La CEDH a rendu en 2001 un arrêt condamnant l’aéroport de Londres Heathrow à verser des dommages aux riverains, au motif que les vols de nuit les plus tardifs, de plus en plus nombreux, constituaient une atteinte aux droits de l’homme. Par ailleurs, ces vols tardifs doivent être interdits ou effectués sur des avions moins bruyants.

On peut donc penser que les contentieux risquent de se multiplier. Si l’on ne veut pas que, dans quelques années, le législateur légifère dans l’urgence, il conviendrait de réfléchir rapidement à des solutions pragmatiques.

III- La lutte contre les nuisances sonores nocturnes

n’est toujours pas une priorité,

ni en France ni au niveau européen

A.- Des avancées qui restent insuffisantes

1. La France est en retrait par rapport aux autres pays européens

a) L’Allemagne

– Francfort : Tous les atterrissages sont interdits de 0h à 5h dans le cas général, et de 1h à 4h pour le cas des appareils basés ou en maintenance. Cependant, le trafic de nuit demeure assez important (en 1998, on recensait en moyenne 106 mouvements par nuit entre 22h et 6h). En matière de sensibilisation, il convient de noter que l'aéroport diffuse régulièrement à l'ensemble des exploitants le palmarès des bruits mesurés aux stations pour chaque vol réalisé. A l'avenir, et dans le cadre des débats menés autour du projet d'extension de l'aéroport, le Parlement de Hesse s'est déclaré favorable l'an dernier à l'ouverture d'une quatrième piste en 2006 sous réserve qu'à cette échéance un couvre-feu total ait été mis en œuvre entre 23h et 5h. Le ministère chargé d'accorder la licence d'exploitation de la nouvelle piste va lancer cet automne des procédures juridiques et administratives, afin d'analyser les avantages et les inconvénients d'un tel couvre-feu. Aucune conclusion n'est prévue avant 2004.

– Munich : Une plage de silence est imposée de 0h à 5h, sauf pour les vols postaux. De plus, les mouvements de nuit sont contingentés : 38 mouvements sont autorisés entre 22h et 6h, dont un maximum de 28 vols programmés de 22h à 0h et de 5h à 6h.

b) Le Royaume-Uni

– Londres (Heathrow, Stansted, Gatwick) : Les restrictions nocturnes sur les aéroports londoniens incluent une limitation saisonnière en nombre de mouvements réels, une limitation saisonnière en nombre de mouvements pondérés selon leurs classes de bruit (règle dite des quotas count), une interdiction des avions les plus bruyants (de quota count égal à 8 ou 16), ainsi qu'une limitation du bruit mesuré au sol.

c) La Belgique

– Bruxelles : Un premier arrêté d'interdiction des vols de nuit, annoncé fin 1999 par la ministre des transports, a été immédiatement suspendu, sous la pression notamment de l'entreprise DHL implantée sur l'aéroport. En contrepartie, le gouvernement a lancé début 2000 un groupe de travail sur ce thème, visant à mieux concilier les différents intérêts économiques, sociaux et environnementaux. Dans ce cadre, un engagement de maîtrise du bruit la nuit de 23h à 6h a été pris, qui s'est traduit le 26 octobre 2000 par l'adoption d'un nouvel arrêté ministériel, imposant au gestionnaire d'aéroport :

•  d'une part une réduction de 30 % d'ici fin 2003 de l'énergie sonore globale des décollages la nuit, calculée chaque saison ;

•  d'autre part une limitation des énergies sonores produites individuellement par chaque mouvement d'aéronef, atterrissage ou décollage.

d) La Suisse

– Zurich et Genève : La nouvelle ordonnance fédérale suisse publiée en mai 2000 impose une plage de silence complète de 0h à 5h. Plus précisément, il s’agit d’une interdiction des décollages de 0h à 6h, et une interdiction des atterrissages de 0h à 5h, sauf dérogations. Cette plage de silence la nuit est assortie d'une limitation en fin de soirée, de 22h à 0h, des décollages d'avions les plus bruyants, c'est-à-dire ceux dont la moyenne des niveaux de bruit certifiés en survol et en latéral est supérieure à 98 EPNdB s'il s'agit de vols de plus de 5000 km, ou 96 EPNdB s'il s'agit de vols de moins de 5000 km.

Avec cette règle, la majorité du trafic nocturne se concentre sur la période comprise entre 22h et 0h. Ainsi, à Genève, en 2000, 75 mouvements ont été réalisés par semaine en moyenne entre 22h et 0h, et environ 200 dérogations annuelles ont été délivrées entre 0h et 6h.

e) Les Pays-Bas

– Amterdam-Schiphol : Sont interdits depuis une décision du ministre des transports d’octobre 1997, de 23h à 6h, les décollages d'avions les plus bruyants du chapitre 3.

f) Le Danemark

– Copenhague : Une valeur maximale de bruit est fixée la nuit sur 6 stations de mesure situées latéralement par rapport aux axes des pistes : le seuil actuel est de 85 dB(A) entre 23h et 6h. Il devrait être abaissé à 80 dB(A) en 2005. A ce jour, une trentaine de dossiers d'infractions sont examinés devant les tribunaux, mais les procédures sont longues.

g) L’Italie

En Italie, une loi cadre de 1995 imposait au gouvernement de prendre de nouveaux décrets en vue de réglementer le bruit autour des aéroports. Dans cette optique, deux décrets ont été successivement rédigés visant à interdire les vols de nuit sur tous les aéroports italiens, sauf sur les deux plus grands : Rome-Fiumcino et Milan-Malpensa. Ces décrets ont été annulés, pour des raisons de discrimination et de mauvaise procédure. Plus récemment, un nouveau projet de couvre-feu a été évoqué, mais n'a pas été vraiment discuté. Des débats pourraient reprendre avec la nouvelle législature. En conclusion, il n'existe donc à l’heure actuelle aucun couvre-feu sur les aéroports italiens.

2. Des avancées encore insuffisantes en France

a)Des dispositions de nature réglementaire s'appliquent à certains aéroports français

En France, un certain nombre de mesures existent déjà, mais elles s'appliquent uniquement aéroport par aéroport.

 

Orly

Décision du 4 août 1968

Couvre-feu total entre 23h30 et 6 heures

Arrêté du 6 octobre 1994 du ministre chargé de l'aviation civile

Limite à 250 000 le nombre de créneaux horaires attribuables annuellement tout en confirmant le maintien d'un couvre-feu total de 23h30 à 6h00

Paris - CDG

Arrêté du 17 décembre 1997 complété par l'arrêté du 18 juin 1998 et modifié le 31 août 1999

Seuls les appareils certifiés " chapitre 3 " peuvent atterrir entre 23h30 et 6h15 et décoller entre 23h15 et 6h00. Ces appareils doivent en outre respecter des procédures particulières de décollage et de montée initiale entre 23h15 et 6h00. Les tests moteurs sont par ailleurs interdits de 22h00 à 6h00.

Arrêté du ministre des transports du 2 août 2001

Les appareils certifiés " chapitre 3 " les plus bruyants (qui ne respectent que pour quelques décibels la norme) ne peuvent plus atterrir entre 23h30 et 6h15 et décoller entre 23h15 et 6h00. Des dispositions transitoires permettent de mettre progressivement en œuvre l’arrêté.

Le Bourget

Arrêté du ministre des transports du 17 décembre 1997, modifié le 31 août 1999

interdit aux avions à hélices d'un poids supérieur à 9 tonnes et non classés " chapitre 3 " de décoller ou d'atterrir entre 23h00 et 6h15. Les avions à réaction ne peuvent en aucun cas décoller à l'intérieur de ce créneau horaire.

Toulouse-Blagnac

Arrêté du ministre des transports du 9 septembre 1998 modifié le 31 août 1999

Interdit l'atterrissage des appareils non certifiés " chapitre 3 " entre 23h30 et 6h15 et le décollage de ces mêmes appareils entre 23h15 et 6h00 sauf exceptions (urgence médicale ou technique, problème météorologique)

Nice - Côte d'Azur

Arrêté du ministre des transports du 8 mars 1999 modifié le 31 août 1999

Idem

Lyon - Satolas

Arrêté du ministre chargé des transports du 30 juin 1999

Idem

Bâle - Mulhouse

Arrêté en préparation

 

Beauvais - Tillé

Arrêté en préparation

 

Lyon-Saint-Exupéry

Arrêté en préparation

 

 

b) La création de l'ACNUSA constitue une réelle avancée, mais ses propositions ne sont pas mises en œuvre assez rapidement

L'Autorité de contrôle des nuisances sonores aéroportuaires (ACNUSA) a été créée par la loi n° 99-588 du 12 juillet 1999, ce qui constitue un premier pas dans le sens d'une régulation plus globale de ces nuisances. C’est la première autorité administrative indépendante dans le domaine de l'environnement en France et l’unique autorité de ce genre en Europe.

Ses membres sont désignés pour six ans, ils sont non révocables, leur mandat n’est pas renouvelable et il est incompatible avec toute responsabilité élective, toute activité professionnelle ou associative en rapport avec l'activité des aéroports, ainsi que toute détention d'intérêts dans une entreprise des secteurs aéronautique ou aéroportuaire.

L’ACNUSA envoie un rapport annuel d'activité au Gouvernement et au Parlement qui est rendu public et énonce un certain nombre de recommandations (Cf. annexes).

L’Autorité peut être saisie par les ministres chargés de l'aviation civile, de l'urbanisme et du logement, de l'environnement, par un membre d'une commission consultative de l'environnement ou par une association concernée par l'environnement sonore aéroportuaire.

Elle dispose de compétences majoritairement consultatives :

- information des riverains,

- recommandations aux pouvoirs publics sur le bruit et sa mesure, les conditions d'exploitation des plates-formes, notamment les procédures de moindre bruit au décollage et à l'atterrissage et pouvoir d'alerte,

- conciliation entre les différentes parties.

Sur les dix principaux aéroports français, l'ACNUSA est compétente en matière de prescriptions applicables aux stations de mesure de bruit, mais également concernant le programme de diffusion auprès du public des informations sur le bruit. Par ailleurs, elle rend un avis sur les projets de plan d'exposition au bruit ou de plan de gêne sonore, sur les modification des procédures de départ, d'attente et d'approche et contrôle le respect des chartes de qualité de l'environnement sonore.

Mais elle peut également mettre en œuvre des sanctions, c’est-à-dire prononcer les amendes administratives, sur proposition de la Commission nationale de prévention des nuisances. Les infractions soumises à sanction sont les suivantes : non-respect des restrictions permanentes ou temporaires d'usage de la plate-forme ou de certains aéronefs, des procédures particulières de décollage ou d'atterrissage.

Si la création de l’ACNUSA et le travail important de concertation et de réflexion qu’elle a entrepris depuis sa création doivent être salués, il est indispensable que les pouvoirs publics ne se contentent pas de se féliciter de la pertinence des recommandations mais les reprennent à leur compte et les mettent rapidement en application. On ne peut donc que regretter le manque d’empressement des pouvoirs publics.

c) Le projet de décret concernant les Plans d’Exposition au Bruit

Selon le ministère de l’Equipement, un projet de décret mettant en œuvre une partie des recommandations de l’ACNUSA concernant les PEB et modifiant le code de l’urbanisme serait en cours de finalisation, mais il n’a pas encore fait l’objet d’un examen par le Conseil d’Etat.

d) La proposition de loi Cochet

Comme souligné précédemment, elle constituait, dans son texte initial, une avancée importante dans la réflexion sur les vols de nuit. Mais son examen par le Sénat semble peu probable avant la fin de la législature, alors que le texte voté par l’Assemblée nationale avait déjà été très largement vidé de son contenu initial. Il conviendra donc de reprendre très rapidement la réflexion sur ce sujet lors de la prochaine législature.

B- Propositions

1. Maîtriser le développement des aéroports situés dans les zones les plus urbanisées

Proposition n° 1 : Desserrer le trafic sur les aéroports situés dans les zones urbaines, non seulement dans le domaine du fret, mais pour tous les vols de nuit.

La création d’une nouvelle plate-forme à Chaulnes dans la Somme constitue une solution pour désengorger le trafic sur Roissy CDG à terme. A plus brève échéance et dans le même esprit, le groupe est favorable au transfert des activités de fret de l’aéroport Roissy CDG (notamment proposition de délocalisation de l’Aéropostale et des sociétés de courrier express type FedEx) sur l’aéroport de Vatry dans la Marne, cet aéroport pouvant par ailleurs accueillir une partie des vols charters de Roissy CDG.

Dans les aéroports de province, des solutions équivalentes doivent être recherchées.

Proposition n° 2 : Encourager une réforme du droit de l’urbanisme afin de maîtriser plus rigoureusement l’urbanisation autour des aéroports, notamment par la mise en place de plans d’exposition au bruit (PEB) suffisamment larges.

Ce point fait l’objet d’un projet de décret et a fait l’objet d’amendements à la loi " démocratie de proximité ". La loi n° 85-696 du 11 juillet 1985 a instauré les plans d'exposition au bruit (PEB) qui fixent, autour d'environ 200 aéroports aujourd'hui, 4 zones à l'intérieur desquelles toute nouvelle construction est soit interdite, soit réglementée.

Cette proposition est largement inspirée d’une des recommandations de l'ACNUSA qui demandait, dans son rapport, que le périmètre des zones quasiment inconstructibles des plans d'exposition au bruit (PEB) ainsi que celui de zones du plan de gêne sonore (PGS), à l'intérieur desquelles les riverains peuvent prétendre à une aide financière pour des travaux d'isolation phonique de leur logement, soit étendu.

2. Mieux prendre en compte les dommages causés aux riverains

Proposition n° 3 : Renforcer le système d’aide financière aux riverains.

Le dispositif d'aide aux riverains est en effet encore insuffisant. Il a été institué par la loi n° 92-1444 du 31 décembre 1992 et permet d'octroyer aux riverains des principaux aéroports une aide financière pour l'insonorisation de leur logement. Sur ces aéroports, aujourd'hui au nombre de dix, est établi un plan de gêne sonore (PGS), qui s'articule autour de trois zones, de niveaux de gêne différents, et en fonction desquelles les riverains peuvent prétendre à un montant d'aide. Ces PGS doivent être révisés et les fonds attribués augmentés.

Proposition n° 4 : Mettre à l’étude la possibilité d’une réforme de la fiscalité locale dans ces zones. Cette réforme devra prendre en compte la réduction de la valeur locative des biens, mais une compensation pérenne des pertes fiscales devra également être garantie aux communes concernées.

La baisse des impôts locaux est, dans ces communes, tout à fait justifiée, car les valeurs locatives sont basées sur des estimations erronées qui ne prennent pas en compte la perte de valeur du bien liée aux nuisances sonores aéroportuaires. Pour autant, cette diminution, logique, des impôts locaux ne doit avoir de conséquences sur la survie financière de la commune. En parallèle, un système de compensation pérenne doit donc être mis en œuvre.

3. Réduire les mouvements aériens nocturnes

Proposition n° 5 : Encourager l’utilisation, sur les courtes distances, des services ferroviaires à grande vitesse plutôt que celle des transports aériens.

Proposition n° 6 : Promouvoir un système d’attribution des créneaux horaires qui prenne mieux en compte les critères environnementaux tels que les niveaux de bruit nocturne.

Il faut en effet souligner que si le niveau moyen de bruit produit par appareil a diminué, la fréquence accrue des vols a augmenté les nuisances sonores dans leur ensemble.

Proposition n° 7 : Sur les aéroports peu actifs la nuit, promouvoir le dialogue entre les directeurs d’aéroports, les riverains et les compagnies aériennes, afin de trouver des solutions négociées aux problèmes ponctuels de créneaux horaire nocturnes perturbant le sommeil des riverains.

La solution mise en œuvre par l’aéroport de Toulouse, comme souligné par son directeur lors de son audition, est à cet égard exemplaire.

Proposition n° 8 : Moduler les taxes aéroportuaires en fonction des horaires de décollage et d’atterrissage des avions et des densités de population.

Les compagnies aériennes deviendraient redevables d’une taxe mettant en œuvre le principe pollueur-payeur. Plusieurs amendements à la loi de finances, non votés, allaient dans ce sens et visaient à instaurer une taxe de 0,46 euro (3 francs) par passager et 0,15 euro (1 franc) par tonne de fret.

Une taxe par avion serait encore plus incitative à la réduction des nuisances sonores nocturnes, puisque, dans ce cadre, le remplissage maximal des avions serait recherché, ce qui impliquerait un nombre plus réduit de vols sur la nuit.

Proposition n° 9 : Instaurer des couvre-feu totaux ou partiels sur la plage horaire 00h00-6h00.

Certains transporteurs semblent prêts pour un couvre-feu. Ce couvre-feu ne concernerait que les plus grandes plates-formes, inclues dans des zones urbanisées (celles déjà retenues dans la proposition de loi Cochet ou celles où la densité de population riveraine est importante).

4. Favoriser les techniques et les appareils les moins bruyants

Proposition n°10 : Dans la zone C, réduire le bruit des avions à 80 dB(A) maximum.

L’ACNUSA préconise dans son rapport un niveau de 85 décibels. Mais celui-ci n’est pas assez dissuasif et devrait être ramené très rapidement à 80 dB(A) afin qu’il s’applique à un plus grand nombre d’avions. Ces avions génèrent en effet une pollution sonore qui doit être sanctionnée.

Proposition n° 11 : Interdire, à certaines heures ou sur certaines pistes – voire totalement dans les cas les plus conflictuels - le décollage et l’atterrissage des avions dits " chapitre 3 ", qui sont les plus bruyants.

L’arrêté pris cet été sur l’aéroport de Roissy va dans ce sens mais n’est pas suffisant : il ne s’applique qu’à cet aéroport et la mise en œuvre de mesures transitoires risque de retarder son application effective.

Proposition n° 12 : Eliminer les avions les plus bruyants, de façon générale ou spécifique, et accélérer la construction d’avions répondant à des normes plus strictes de bruit (appareils dits " chapitre 4 "), rendue obligatoire seulement à compter du 1er janvier 2006.

Cette proposition fait partie des mesures préconisées par l’OACI, comme souligné précédemment.

Proposition n° 13 : Mettre en œuvre la norme " chapitre 4 " plus rapidement que prévu par l’OACI en Europe et contrôler strictement la bonne application de sa mise en œuvre.

Proposition n° 14 : Au sein de l’Union européenne, appliquer rapidement une directive interdisant les avions dits " chapitre 3 " qui répondent au niveau de bruit requis pour moins de 5 dB (A).

Le projet de directive évoqué précédemment répond partiellement à cette demande. Seraient notamment concernés les Boeing 747-200 et 300, les Tupolev 144, les Iliouchine 62, les DC 9-32, les Boeing 76 et les DC 8 cargo.

Proposition n° 15 : Mettre en place une structure tarifaire plus efficace incitant à utiliser les avions les moins bruyants et affectant les recettes perçues à l’atténuation des effets du bruit, notamment à des programmes d’isolation acoustique dans les zones voisines.

Proposition n° 16 : Optimiser les procédures de décollage et d’atterrissage pour aboutir à des trajectoires moins agressives et donc moins bruyantes.

5. Mieux sanctionner les abus

Proposition n° 17 : Renforcer et étendre le système d’amendes pour non-respect de la réglementation.

Le dispositif est très lourd à mettre en œuvre et les infractions restent très nombreuses. L'année 2000 a été marquée par l'entrée en vigueur du nouveau dispositif de sanctions administratives lié à la création de l’ACNUSA. Elle est l'instance qui saisit la Commission nationale de prévention des nuisances (CNPN, constituée le 19 janvier 1998) des manquements aux mesures prises par le ministre chargé de l'aviation civile sur les aérodromes. Les amendes peuvent s'élever à 1524 euros (10 000 francs) pour une personne physique et 12 195 euros (80 000 francs) pour une personne morale.