N° 1511
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 31 mars 1999.
PROPOSITION DE LOI
tendant à permettre aux associations de lutte contre les sectes de se porter partie civile.

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée
par M. Eric DOLIGÉ,
Député.

Associations.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Les phénomènes sectaires ne cessent de progresser depuis plusieurs années, profitant de l'éclatement des cellules familiales, des difficultés économiques et sociales, de la perte de repères d'un certain nombre de nos concitoyens.
Face à ce dangereux accroissement, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur " les sectes en France " a dans son rapport de janvier 1996 rappelé les difficultés auxquelles sont confrontés les pouvoirs publics pour appréhender ces phénomènes et avait notamment affirmé la nécessité d'une mobilisation de tous les acteurs pour lutter plus efficacement contre de telles organisations.
Au premier rang de cette lutte se trouvent les associations qui, depuis plusieurs années, recensent les différentes sectes, analysent leur fonctionnement et alertent les pouvoirs publics.
Or, si ces associations mènent d'importantes campagnes d'information de prévention et assurent, par leur travail quotidien, une aide indispensable aux victimes des sectes et à leur famille, celles-ci ne peuvent intervenir en matière pénale.
En effet, aucune disposition ne permet, en l'état actuel de notre droit, à ces organismes de se porter partie civile dans le cadre d'affaires dont elles ont connaissance.
A ce jour, les rares dossiers où des associations de lutte contre les sectes ont pu se porter partie civile l'ont été sur le fondement des dispositions des articles 2-2 et 2-3 du code pénal, qui permettent à toute association déclarée depuis cinq ans, et dont l'objet est de lutter soit contre les violences sexuelles, soit contre l'enfance martyrisée, de se porter partie civile.
Or, comme l'avait, à juste titre, rappelé le rapport de la commission d'enquête parlementaire, la possibilité pour les associations de lutte contre les sectes d'agir en justice en lieu et place des victimes aurait trois avantages pour notre justice et l'efficacité de la répression des phénomènes sectaires. Premièrement, ces associations pourraient apporter une aide juridique et technique non négligeable aux victimes s'engageant dans une procédure judiciaire. Deuxièmement, il convient de ne pas négliger les chantages et menaces psychologiques et physiques que font peser les sectes, y compris sur leurs anciens adeptes, contraintes qui aboutissent souvent à l'absence de plainte. Les associations ont donc un rôle important à jouer dans le déclenchement de l'action pénale. Enfin, par leur connaissance des sectes, la participation de ces organismes aux procédures judiciaires ne peut aller que dans le sens d'une meilleure information de la justice.
Aussi, pour ces raisons, il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, d'adopter la présente proposition de loi permettant aux associations de défense des victimes de sectes d'exercer les droits reconnus à la partie civile dans le cadre de la poursuite de certaines infractions pénales.

PROPOSITION DE LOI
Article unique

Après l'article 2-16 du code de procédure pénale, il est inséré un article 2-17 ainsi rédigé :
" Art. 2-17. - Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits et dont l'objet statutaire est la défense des victimes des sectes peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues aux articles 222-1 à 222-6, 222-7 à 222-14, 222-15 à 222-18, 222-22 à 222-32, 223-5 à 223-6, 224-1 à 224-5, 225-5 à 225-12, 225-13 à 225-16, 227-15 à 227-17-2 et 227-22 à 227-27, 311-1, 311-3 à 311-11, 312-1 à 312-12, 313-1 à 313-4, 314-1 à 314-2 et 321-1 du code pénal à l'encontre des actes de toute personne physique ou morale qui, dans le cadre d'un mouvement ou d'une organisation, ont pour but de créer et d'exploiter une dépendance psychologique ou physique et portent dès lors atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales.
1511 - Proposition de loi de M. Eric Doligé tendant à permettre aux associations de lutte contre les sectes de se porter partie civile (commission des lois).


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