No 1849
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 octobre 1999.
PROPOSITION DE LOI
visant à la reconnaissance légale du roller
comme
moyen de déplacement.
(Renvoyée à la commission de la production et des échanges, à défaut de constitution
d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)
présentée
par M. Jean de GAULLE,
Député.

Transports urbains.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Il y a encore quelques années, le roller n'était, en France, qu'un jeu pratiqué par les enfants. Mais les grèves de l'automne 1995 ont obligé nombre de personnes, notamment en milieu urbain, à utiliser d'autres modes de déplacement que la voiture ou les transports en commun. Le roller a figuré au premier rang de ceux-ci et, depuis lors, son succès ne s'est pas démenti.
Aussi, on ne peut plus considérer aujourd'hui le roller comme un simple phénomène de mode, et il est fréquent de voir des citadins se rendre sur leur lieu de travail par ce moyen. Par ailleurs, les promenades en roller connaissent une affluence toujours croissante. Les diverses randonnées organisées dans les grandes villes de France, et notamment à Paris, voient se réunir plusieurs milliers de personnes chaque semaine, et attirent de plus en plus d'étrangers, qui ne connaissent pas dans leur pays de telle déferlante. De même, lors des promenades dominicales, il n'est pas rare de rencontrer des familles se déplaçant de cette manière. Enfin, la création, en juin 1998 à Paris, d'une unité de police en rollers, qui compte aujourd'hui onze fonctionnaires, est le signe de la prise en compte grandissante de ce mode de déplacement dans la vie de tous les jours.
La réglementation, quant à elle, est en retrait sur cette question : aucune disposition juridique n'a encore été prise concernant cette nouvelle pratique. L'absence de règles est telle que personne ne sait vraiment aujourd'hui où les rollers peuvent ou ne peuvent pas circuler. Le code de la route ignore totalement leur usage et, dans les faits, les pratiquants sont assimilés à des piétons.
A ce titre, ils sont tenus de circuler, conformément à l'article R. 217 du code de la route, sur les trottoirs lorsque ceux-ci existent. Or, le maintien et le développement de la circulation des rollers sur les trottoirs est de nature à mettre en danger la sécurité de tous.
Les utilisateurs de rollers ne sont pas des piétons et ne doivent plus être considérés comme tels. Tout d'abord, ils évoluent près de deux fois plus vite que ces derniers, ce qui rend toute comparaison inadéquate. Ensuite, ils effraient les piétons, qui ne les entendent pas ou qui les voient arriver face à eux et ne savent pas comment réagir. Enfin, un utilisateur de rollers, se déplaçant beaucoup plus vite qu'un piéton, sera aperçu par un automobiliste, ou un deux-roues, beaucoup plus tardivement qu'une personne à pied. Cette impossibilité d'anticiper correctement les mouvements des autres usagers de la voirie multiplie les risques d'accidents corporels graves.
Aussi, dans l'état actuel des choses, la circulation des rollers sur les trottoirs est dangereuse et les responsables de la sécurité routière sont amenés à s'intéresser à cet aspect du problème. Des solutions ont été mises en _uvre dans certaines communes, pour permettre aux rollers d'emprunter les bandes et pistes cyclables, voire la chaussée. Les maires et le préfet de police de Paris ont en effet, en vertu des articles L. 131-3 et L. 184-13 du code des communes, le pouvoir de réglementer l'usage de la circulation sur les routes des agglomérations. Mais ces dispositions, si elles permettent de résoudre localement le problème, ne garantissent nullement l'application de règles uniformes sur l'ensemble du territoire.
Cette carence s'étend, d'ailleurs, à l'ensemble des implications du roller dans notre vie quotidienne. Seules quelques collectivités locales et territoriales ont constitué des groupes de travail ayant pour objectif de mieux appréhender cette question. Penser l'intégration du roller, c'est réfléchir à ses conséquences sur les déplacements, la sécurité routière, la voirie, l'urbanisme et l'environnement.
Tous ces points sont liés à l'organisation des modes de déplacement, et donc aujourd'hui à l'étude dans la plupart des villes de France. Ce sont d'ailleurs les enjeux des plans de déplacements urbains, rendus obligatoires pour les villes de plus de 100 000 habitants, et conseillés pour les autres. Les collectivités élaborant ces plans intègrent aujourd'hui des réflexions sur le roller, qui tend, dès lors, à être reconnu dans les faits comme un moyen de transport à part entière.
Les aménagements de la voirie tiennent aujourd'hui compte, également, des nouvelles pratiques de déplacement urbain, avec notamment la mise en place de bandes et pistes cyclables. Ainsi, la loi sur l'air dispose que pour toute réalisation ou rénovation de voies urbaines, des itinéraires cyclables dédiés doivent être créés. Les collectivités locales se doivent, en conséquence, de rechercher la mise en _uvre de solutions permettant aux utilisateurs de rollers d'emprunter ces itinéraires.
En outre, ce moyen de transport est non polluant : comme le vélo, les rollers permettent une vitesse de déplacement intéressante, surtout pour de courts trajets en milieu urbain, et s'avèrent être une alternative crédible à l'utilisation de la voiture, notamment en période estivale, lorsque la chaleur accroît les risques de pollutions. Conscientes de ces atouts, quelques collectivités locales ont déjà engagé diverses réflexions pour favoriser ces pratiques.
Elles ont par ailleurs à prendre en considération d'autres aspects du roller. Au-delà de son acception comme mode de déplacement, il est toujours pratiqué comme un sport, notamment par les plus jeunes, qui utilisent le mobilier urbain (rampes, murets ...) à des fins ludiques. Cette pratique inquiète les riverains et altère le cadre de vie de tous. Quelques communes en France ont alors été conduites à créer des espaces dédiés, appelés roller-parcs, dans le centre des villes, afin de permettre aux jeunes de s'adonner à leur sport sans porter atteinte au mobilier urbain.
Très positives, toutes ces initiatives restent néanmoins limitées, et aucune solution globale n'existe à ce jour. La difficulté réside en effet dans la multiplicité des implications du roller et dans la diversité des autorités compétentes pour y répondre.
Ainsi, toute modification du code de la route visant à réglementer les conditions de circulation des utilisateurs de rollers est du domaine réglementaire. Par ailleurs, l'installation de pistes et bandes cyclables, ainsi que la création d'espaces dédiés, est de la compétence des maires. Quant à l'organisation des déplacements, elle est arrêtée par les collectivités territoriales.
Il revient donc au législateur, pour favoriser cette évolution, de donner une reconnaissance légale au roller, par le biais d'une modification de la loi sur l'orientation des transports intérieurs et de la loi sur l'air.
La loi d'orientation des transports intérieurs, modifiée par la loi sur l'air, indique que le développement des transports non polluants, comme le vélo ou la marche à pied, doit faire partie des orientations des plans de déplacements urbains. Aujourd'hui, le roller est également un mode de déplacement non polluant, qui doit être encouragé, au même titre que le vélo ou la marche.
De plus, la loi sur l'air préconise la création d'itinéraires cyclables, dont l'utilisation peut être judicieusement étendue, par le législateur, aux rollers.
La présente proposition de loi a pour objet de modifier ces deux textes et, par là même, de favoriser la mise en _uvre des mesures réglementaires et locales nécessaires.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Le troisième alinéa (2°) de l'article 28-1 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs est ainsi rédigé :
" 2° Le développement des transports collectifs et des moyens de déplacement économes et les moins polluants, notamment l'usage de la bicyclette, du roller et de la marche à pied. "

Article 2

Dans le premier alinéa de l'article 20 de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, après les mots : " itinéraires cyclables ", sont insérés les mots :
" utilisables par les cycles à deux et trois roues et par les rollers ".
N°1849. - PROPOSITION DE LOI de M. Jean de GAULLE visant à la reconnaissance légale du roller comme moyen de déplacement. (renvoyée à la commission de la production)


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