No 2571
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 septembre 2000.
PROPOSITION DE LOI
tendant à la création d'un salaire parental de libre choix.
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée

par MM. Jacques LE NAY, Jean-Claude ABRIOUX, André ANGOT, Jean AUCLAIR, Claude BIRRAUX, Mme Christine BOUTIN, MM. Jean BRIANE, Dominique CAILLAUD, Jean Charles CAVAILLÉ, Richard CAZENAVE, Henry CHABERT, Jean-François CHOSSY, Georges COLOMBIER, René COUANAU, Yves COUSSAIN, Marc-Philippe DAUBRESSE, Henri de GASTINES, Gilles de ROBIEN, Yves DENIAUD, Léonce DEPREZ, Dominique DORD, Charles EHRMANN, Christian ESTROSI, Jean-Michel FERRAND, Jean-Pierre FOUCHER, Roland FRANCISCI, Germain GENGENWIN, Michel GIRAUD, Hubert GRIMAULT, Jean-Jacques GUILLET, Pierre HÉRIAUD, Mme Bernadette ISAAC-SIBILLE, MM. Christian JACOB, Aimé KERGUERIS, Jacques KOSSOWSKI, Édouard LANDRAIN, Arnaud LEPERCQ, Maurice LEROY, Roger LESTAS, Lionnel LUCA, Thierry MARIANI, Mme Béatrice MARRE, MM. Jean MARSAUDON, Christian MARTIN, Philippe MARTIN, Pierre MENJUCQ, Jean-Marie MORISSET, Bernard PERRUT, Henri PLAGNOL, Jean-Luc PRÉEL, François ROCHEBLOINE, Joël SARLOT, Bernard SCHREINER, Guy TEISSIER, André THIEN AH KOON, François VANSONN et Michel VOISIN,

Députés.

Famille.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdasmes, Messieurs,
La politique familiale et tout particulièrement l'éducation de nos enfants sont à la base du projet de société que nous voulons bâtir pour demain.
Nous le savons, les actes de délinquance chez les jeunes sont bien souvent le résultat d'une démission - bien involontaire - des parents. L'exercice d'une activité professionnelle parfois pénible mais financièrement nécessaire, l'absence simultanée au foyer du père et de la mère qui en résulte sont autant de facteurs qui font que l'éducation des enfants ne peut être assumée comme elle le devrait.
A ce titre nous devons tout mettre en _uvre pour renforcer le tissu familial et restaurer l'autorité et la présence parentales dans l'intérêt des enfants.
La création d'un salaire parental de libre choix relève de cet objectif.
Attribué à celui des parents qui souhaite se consacrer à l'éducation de ses enfants, il redonnera aux familles, libérées d'un souci financier, la possibilité d'assumer pleinement leur rôle.
De plus, ce renforcement de la présence parentale pourra éventuellement constituer pour les enfants un soutien supplémentaire dans l'assimilation des connaissances scolaires.
Au-delà des effets bénéfiques pour l'enfant, le salaire parental serait aussi le moyen de libérer un certain nombre d'emplois. Certains de nos voisins européens l'ont déjà expérimenté. Or, dans notre pays où le chômage atteint encore - malgré les effets positifs de la croissance mondiale - près de 10% de la population, cette perspective est à prendre en considération.
Ajoutons qu'il ne s'agit pas, dans cette proposition, de remettre en cause l'engagement des femmes dans la vie professionnelle. Cet engagement constitue un acquis majeur de ces cinquante dernières années et il convient de l'encourager.
Simplement, le salaire parental permettra à ceux et à celles qui travaillent pour faire face à des besoins et engagements financiers trop élevés pour un seul revenu d'opérer un véritable choix de vie.
Il est probable que les couples qui décident de travailler à deux en dehors de toute contingence financière ne modifieront pas ou peu leur choix. En revanche, ceux pour qui travailler à deux relève d'une obligation financière pourront modifier leur mode de vie en l'adaptant à leur souhait.
Le salaire parental présente ainsi l'avantage de défendre à la fois la cause des enfants qui ont besoin qu'on leur consacre du temps et celle des parents qui désirent se réaliser dans leur vie familiale.
De sorte qu'il pourrait se révéler l'instrument d'un nouveau projet pour la famille.
Enfin, pour que le salaire parental n'exclue pas de la vie active celui ou celle qui le reçoit, des mesures de formation seront prévues pour favoriser le retour à l'emploi des personnes qui en auront bénéficié.
Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Il est institué un salaire parental de libre choix.
Ce salaire est versé à celui des parents qui souhaite se consacrer pleinement à l'éducation de ses enfants. Il est incompatible avec une activité professionnelle, même partielle.

Article 2

Le salaire parental est versé, mensuellement, par les caisses d'allocations familiales, à compter de la naissance, de l'adoption ou de l'accueil du premier enfant et jusqu'à ce que le dernier enfant y ouvrant droit ait atteint l'âge de dix ans.

Article 3

Le salaire parental de libre choix est d'un montant égal au salaire minimum interprofessionnel de croissance net; il est revalorisé selon les modalités afférentes au SMIC.

Article 4

Le salaire parental de libre choix n'est pas cumulable avec les allocations chômage, l'allocation parentale d'éducation, l'allocation pour jeune enfant et le revenu minimum d'insertion.

Article 5

Le salaire parental de libre choix est imposable au même titre que les traitements et salaires perçus par le foyer. Il ouvre droit aux prestations sociales que sont l'assurance maladie, l'assurance vieillesse et l'assurance veuvage. Les années au cours desquelles le salaire parental de libre choix a été perçu sont prises en compte dans le calcul de la retraite.

Article 6

Les personnes qui bénéficient du salaire parental de libre choix disposent d'un droit à la formation professionnelle. Celui-ci peut s'exercer, au choix du bénéficiaire, soit à raison de quinze jours par année, soit pour une durée de six mois à l'issue des années consacrées à l'éducation de ses enfants.

Article 7

Des indemnités de chômage sont versées aux personnes ayant suivi une formation, en application de l'article 6 de la présente loi, et qui ne trouveraient pas de travail à l'issue de celle-ci.

Article 8

Les employeurs qui embauchent une personne ayant bénéficié du salaire parental de libre choix sont exonérés de charges sociales la première année du contrat de travail.

Article 9

Un décret en Conseil d'Etat déterminera les modalités d'application de la présente loi.

Article 10

Les dépenses résultant de l'application de la présente loi sont compensées pour moitié par une taxe additionnelle aux droits de consommation sur les tabacs visés aux articles 575 et 575A du code général des impôts et pour moitié par une taxe additionnelle aux droits de consommation sur les alcools visés à l'article 403 dudit code dont le produit est attribué aux caisses d'allocations familiales, aux régimes sociaux et à l'assurance chômage, à concurrence des charges respectivement créées.
2571 - Proposition de loi de M. Jacques Le Nay (commission des affaires culturelles) tendant à la création d'un salaire parental de libre choix.


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