Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus de la session > Compte rendu intégral

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Première séance du vendredi 15 mars 2013

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Marc Le Fur

1. Dépôt d’une motion de censure

M. le président

2. Refondation de l’école de la République

Suite de la discussion d'un projet de loi d'orientation et de programmation

Discussion des articles (suite)

Article 6

Mme Annie Genevard

Mme Colette Langlade

M. Jean-Louis Bricout

M. Jean-Pierre Blazy

M. Jacques Cresta

M. Patrick Hetzel

M. Frédéric Reiss

M. Thierry Braillard

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale

Amendements nos 398, 811

M. Yves Durand, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Amendements nos 1063, 1513 rectifié, 924, 1347, 1348

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée chargée de la réussite éducative

Amendements nos 1371, 885, 1337

M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

Suspension et reprise de la séance

Article 6 (suite)

Amendements nos 927, 925, 1448

Article 6 bis

Mme Sandrine Mazetier

M. Patrick Hetzel

Mme Brigitte Bourguignon

Amendement no 1446

Après l’article 6 bis

Amendement no 1473 rectifié

Avant l’article 7

Amendements nos 812, 90, 1159, 1338

Article 7

M. Patrick Hetzel

M. Frédéric Reiss

Amendements nos 77, 1114, 1160, 1258, 400, 671, 1164, 435, 917, 1280, 91, 1163, 1260, 1161, 1022, 1261, 167, 1162, 1262 rectifié, 15 rectifié, 1165, 362, 672

Article 8

M. Patrick Hetzel

Article 9

Mme Annie Genevard

M. Patrick Hetzel

M. Vincent Peillon, ministre

Amendements nos 875, 78, 673, 1482, 1252, 1546

Article 10

Mme Annie Genevard

M. Pierre Léautey

M. Patrick Hetzel

M. Jean-Louis Bricout

M. Jacques Cresta

M. Vincent Peillon, ministre

Mme Annie Genevard

M. Vincent Peillon, ministre

Amendements nos 815, 814, 121, 912, 299, 168, 364, 377, 301, 303, 17 rectifié, 1263, 464, 913, 16, 661, 1264

Après l’article 10

Amendements nos 1401, 914, 120, 1166, 674

Avant l’article 11

Amendements nos 1247 rectifié, 1249 rectifié, 1246 rectifié, 1248 rectifié, 1265

Article 11

Amendements nos 436, 1167

Après l’article 11

Amendement no 256

Article 12

M. Patrick Hetzel

Amendement no 1387

Après l’article 12

Amendements nos 1072, 4

Article 13

Amendements nos 437, 1169, 656, 655

Article 14

Amendement no 438

Article 14 bis

Article 15

Article 16

Amendements nos 439, 675, 493

Article 17

Amendement no 92 rectifié

Article 18

Amendements nos 1392, 94

Après l’article 18

Amendement no 494

Article 18 bis

Article 19

Article 20

Mme Marianne Dubois

Amendements nos 440, 1266, 1116 rectifié, 79 rectifié, 1173 rectifié, 691, 1460, 170, 365, 378, 169, 1267, 818, 495

Article 21

Amendements nos 441, 1174, 1268, 80, 1180, 1117 rectifié, 320, 118, 1175, 442, 1176, 1269, 97 rectifié, 98, 1177, 1271, 171, 319, 1272, 693, 1461, 321, 99, 1178, 172, 322, 173, 1333, 367, 379, 1033, 1179, 496, 662, 1350, 101, 1273, 1457

Après l’article 21

Amendement no 174

Article 22

Article 23

Amendements nos 497, 694 rectifié, 177, 176

3. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Le Fur
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Dépôt d’une motion de censure

M. le président. Le président de l’Assemblée nationale a reçu aujourd’hui, 15 mars 2013, à dix heures quarante-cinq, une motion de censure déposée par M. Christian Jacob et cent quarante-quatre membres de l’Assemblée, en application de l’article 49, alinéa 2, de la Constitution.

Conformément aux dispositions de l’article 153, alinéa 4, du règlement, j’en donne lecture :

« Cela fait maintenant plus de dix mois que François Hollande a été élu Président de la République. Il dispose de tous les leviers pour mettre en œuvre sa politique : un gouvernement pléthorique, une majorité de gauche à l’Assemblée nationale et au Sénat, le soutien d’une grande majorité des départements et régions. Il peut compter sur la loyauté de l’administration, et même sur le zèle de ses proches, nommés à tous les postes clefs, en dépit de ses engagements de campagne.

« L’heure est venue de faire un premier bilan de son action. Pour l’année 2013, François Hollande avait pris cinq engagements solennels devant les Français : inverser la courbe du chômage ; atteindre un objectif de croissance de 0,8 % ; réduire le déficit public à 3 % du produit intérieur brut ; arrêter les hausses d’impôts ; réorienter l’Europe, avec un budget tourné vers la croissance.

« Ces objectifs ont été fixés par François Hollande lui-même, après son élection, en toute connaissance du contexte économique et social. Il ne sert donc à rien de se défausser sur son prédécesseur. C’est sur la base de ces cinq engagements que l’action du Gouvernement doit être jugée. C’est sur cette base que les Français sont aujourd’hui en droit de demander des comptes au Gouvernement.

« Quels sont les résultats de la politique économique et sociale de François Hollande et de son Gouvernement ?

« Plus de 3 millions de Français sont touchés par le chômage et la hausse s’amplifie, avec plus de 1 000 chômeurs supplémentaires par jour, en dépit de la multiplication des contrats aidés et des embauches dans la fonction publique.

« La croissance est étouffée : selon la Commission européenne, elle devrait s’établir à 0,1 % en 2013.

« Le déficit public n’est plus du tout maîtrisé ; il devrait atteindre les 3,7 % en 2013. Selon les prévisions de la Commission européenne, la situation devrait même empirer en 2014 avec un déficit à 3,9 % du PIB. Les premiers chiffres de l’exécution budgétaire 2013 démontrent cette “sortie de route” budgétaire. Le matraquage fiscal s’amplifie : le taux de prélèvements obligatoires a atteint un niveau record. Les entreprises et tous les Français, en particulier les classes moyennes et les retraités, sont étranglés par les nouveaux prélèvements.

« Quant au budget européen, pour la première fois, il sera en baisse pour les sept prochaines années. C’est un échec cinglant pour la diplomatie engagée par le Gouvernement.

« Sur les cinq engagements pris par François Hollande, l’échec est total. Celui qui devait “réenchanter le rêve français” est en train d’entrer dans l’histoire comme le Président des impôts et du chômage.

« Contrairement à ce que faisait le parti socialiste lorsqu’il était dans l’opposition, nous ne nions pas la réalité de la crise économique mondiale. Mais nous contestons la nature et l’intensité des réponses qui sont apportées par le Gouvernement. Loin de contrer la crise, la politique de François Hollande l’amplifie.

« Alors que la situation budgétaire de notre pays était connue de tous, François Hollande et le Gouvernement de Jean-Marc Ayrault ont multiplié les dépenses publiques supplémentaires : retour partiel à la retraite à 60 ans, embauche de fonctionnaires, suppression de la journée de carence dans la fonction publique, hausse du revenu de solidarité active, de l’allocation de rentrée scolaire ou de l’aide médicale d’État.

« En outre, les principales mesures mises en place ces dernières années par la précédente majorité pour baisser la dépense publique ont été supprimées et les trois quarts de l’effort budgétaire reposent sur la fiscalité. Le dernier rapport de la Cour des Comptes est à ce titre particulièrement sévère : contrairement aux engagements pris, les dépenses de l’État continueront d’augmenter et “aucune réforme porteuse d’économies substantielles au-delà de 2013 ne peut être identifiée”.

« Pour financer ces dépenses clientélistes (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),

M. Thierry Braillard. C’est l’hôpital qui se moque de la charité !

M. le président. …les prélèvements obligatoires ont été augmentés dans des proportions jamais atteintes. Le choc fiscal de 32 milliards d’euros en 2013, qui a frappé tous les ménages et toutes les entreprises, paralyse la consommation et l’investissement, au détriment de la croissance et donc de l’emploi.

« Le coût du travail et l’environnement réglementaire des entreprises ont été alourdis. La fiscalité anti-délocalisation a été abrogée par idéologie et le crédit d’impôt dit compétitivité emploi n’est pas financé !

« Sur la forme, l’action du Gouvernement est illisible. Les ministres se concurrencent et les annonces contradictoires se multiplient ; leurs outrances brouillent l’image de la France à l’étranger. Parce que son diagnostic était faux et qu’il n’est pas capable de fixer un cap clair et des moyens cohérents pour l’atteindre, François Hollande inquiète les acteurs économiques et isole la France sur la scène européenne, tout en dégradant l’attractivité de notre pays.

M. Luc Belot. Rien que ça !

M. le président. « Alors même qu’aucune réforme courageuse n’a été entreprise par François Hollande, jamais un Président de la République n’avait fait l’objet d’une telle défiance après seulement dix mois de mandat. Aucune catégorie d’âge ni aucune catégorie socioprofessionnelle ne lui fait confiance pour résoudre les problèmes qui se posent à la France. Le pessimisme s’est ancré dans toutes les strates de la société : chez les ménages, les jeunes, les chefs d’entreprises, les travailleurs indépendants, les retraités, l’inquiétude domine.

« François Hollande est désormais au pied du mur : soit il continue d’œuvrer au déclin économique et social de la France, soit il choisit enfin la voie du courage et de la réforme.

« Une autre politique est possible. Une autre politique est indispensable : nous devons collectivement produire plus et produire mieux. C’est le travail des uns qui crée l’emploi des autres. Ce sont les investissements d’aujourd’hui qui font les emplois de demain. Ce sont les entrepreneurs et les travailleurs du secteur marchand qui font la croissance et l’emploi durable. La compétitivité au service de l’emploi, c’est la seule voie possible pour construire une France dynamique, qui attire les talents et les investissements, une France de l’innovation, une France prospère et conquérante.

« Nous souhaitons avoir un dialogue en vérité avec le Gouvernement.

« Si François Hollande et le Gouvernement de Jean-Marc Ayrault acceptent de changer de politique pour œuvrer avec courage au relèvement de notre appareil productif, alors ils créeront les conditions d’une union nationale en faveur de la réforme, pour le bien de la France et des Français.

« Si sa seule réponse consiste à parler du passé et à travestir la réalité pour masquer ses échecs, l’Assemblée nationale devra censurer la politique économique d’un Gouvernement aux abois, incapable de s’élever au-dessus de ses intérêts électoraux et de ses réflexes idéologiques. »

L’Assemblée prend acte de ce dépôt. La motion de censure sera notifiée au Gouvernement et affichée.

La Conférence des présidents a décidé que la discussion de la motion de censure aurait lieu le mercredi 20 mars 2013, après les questions au Gouvernement.

Mme Colette Langlade. Aucun applaudissement !

M. Patrick Hetzel. Nous pensions que vous auriez applaudi à notre place !

M. Xavier Breton. Tout le monde ne peut qu’être d’accord avec le constat !

2

Refondation de l’école de la République

Suite de la discussion d’un projet de loi d’orientation et de programmation

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République (nos 653, 767).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’article 6.

Article 6

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 6.

La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Monsieur le président, monsieur le ministre de l’éducation nationale, madame la ministre de la culture et de la communication, mes chers collègues, l’article 6 est dédié à l’éducation artistique et culturelle, sujet qui nous est cher et qui justifie la présence de Mme Filipetti parmi nous aujourd’hui, ce dont nous nous en réjouissons.

C’est un sujet très vaste sur lequel nous aurons l’occasion de revenir lors de l’examen des amendements. L’élément le plus marquant, c’est que l’on passe de la notion d’enseignement à celle d’éducation, ce qui a des incidences relativement importantes dans l’organisation de ces disciplines.

Si l’on peut souscrire à l’idée selon laquelle l’enfant, le jeune, se forme à l’école et en dehors de l’école au champ artistique et culturel, la façon dont les choses vont s’organiser semble un peu confuse. Du reste, et je l’ai dit hier à M. le ministre, la collaboration entre vos deux ministères est très insuffisante, mais ce n’est pas nouveau. J’en veux pour preuve la réunion qui s’est tenue dans vos murs, il y a deux jours, à propos de la mission Desplechin, qui m’avait auditionnée. Nous avons eu l’occasion de parler du socle commun de compétences, de connaissances et de culture, de l’éducation artistique et culturelle, en présence de Mme Dolto que je vois ici.

Lors de cette réunion, je me suis entendu dire à plusieurs reprises : cela n’a rien à voir. Or nous parlons de culture, d’éducation artistique et culturelle, de parcours, qui interpellent tous les temps de l’enfant. Chacun ne peut pas rester dans son fortin, travailler de son côté et se dire que c’est tant mieux si les dispositifs peuvent par bonheur se croiser ici ou là.

La notion de parcours est intéressante car elle fait sortir des murs de l’école la notion d’éducation artistique et culturelle, mais tout reste à faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Merci ma chère collègue. Nous aurons l’occasion de revenir sur ce débat.

La parole est à Mme Colette Langlade.

Mme Colette Langlade. Monsieur le président, je tiens à saluer la présence de Mme la ministre de la culture et de M. le ministre de l’éducation nationale, et les remercier à nouveau pour les réformes courageuses qu’ils entreprennent en vue de redonner de la croissance à la France, faire baisser le nombre de chômeurs et surtout diminuer, mesdames, messieurs de l’ancienne majorité, la dette que vous avez accrue de plus de 600 milliards d’euros au cours de ces dernières années.

L’article 6 vise à modifier les articles L. 121-1 et L. 121-6 du code de l’éducation. On ne peut que se réjouir de l’encouragement à la démocratisation de l’accès à la culture. Le parcours d’éducation artistique et culturelle est mis en place afin de réduire sur nos territoires les inégalités d’accès à la culture et aux pratiques artistiques.

Cet article a été modifié en commission par de nombreux amendements qui précisent que l’éducation artistique et culturelle comprend un parcours pris en compte dans la validation des diplômes pour tous les élèves, y compris ceux en situation de handicap. Sa mise en œuvre est effectuée localement à travers les projets éducatifs territoriaux, très présents aussi dans ce projet de loi de refondation de l’école de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout. Madame la ministre, monsieur le ministre, c’est un plaisir de constater que l’éducation artistique et culturelle redevient une priorité éducative, comme en témoigne cet article qui lui est entièrement consacré.

Oui, les temps changent, et si les orientations budgétaires de ces dernières années suscitaient le doute quant à la volonté de faire progresser l’éducation artistique et culturelle, on peut se réjouir aujourd’hui des 15 millions supplémentaires prévus par le ministère de la culture pour les trois prochaines années.

Ce qui est innovant, c’est que l’éducation artistique et culturelle soit prise en compte aussi bien dans le temps scolaire que dans le temps périscolaire, ce qui nous montre tout l’intérêt de repenser nos rythmes scolaires et de laisser à nos enfants le temps de découvrir.

C’est une opportunité historique pour les élus de s’engager dans un si beau défi. Bien sûr, c’est difficile. C’est difficile pour les collectivités d’organiser et d’articuler l’offre culturelle locale avec le projet d’école. C’est bien sûr difficile de gérer des temps courts, de trouver des compétences locales suffisantes et qualifiées. Bien sûr, c’est un effort budgétaire, c’est difficile de mobiliser toutes les énergies : parents, enseignants, associations. Mais dépassons ensemble nos visions dogmatiques, nos idées corporatives, nos visions trop budgétaires, pour donner à la France une jeunesse épanouie, curieuse, créative.

Toutefois, monsieur le ministre, j’appelle votre attention sur les difficultés particulières des territoires les plus ruraux, où la réussite éducative pour tous peut être freinée par des inégalités en matière d’équipements et d’offre culturelle, sans oublier les inégalités socioculturelles et économiques entre les familles. Il me semble que l’accompagnement de l’État devra aller plus loin, pour que les parcours d’éducation artistique soient réussis pour tous.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. L’article 6 nous rappelle que la culture n’est pas dissociable de l’action éducative et scolaire : elle participe, tout comme les enseignements académiques, à l’éveil de l’intelligence chez l’enfant, qui peut ainsi appréhender dans une perspective plus large son parcours personnel et scolaire.

Aujourd’hui, très souvent, les écoles et les enseignants font appel, vous le savez madame et monsieur les ministres, aux collectivités locales pour développer des actions d’animation culturelle en milieu scolaire. Si je prends l’exemple modeste de ma commune, une ville d’un peu moins de trente mille habitants, sur un budget culturel de 3 millions d’euros, 2 millions vont au secteur scolaire, de la maternelle au lycée, dont 80 % aux écoles maternelles et primaires.

Nous touchons donc très largement le public scolaire de notre ville. Pour l’ensemble de ces actions, nous recevons aujourd’hui une aide absolument dérisoire de l’État, et celle-ci, dans la période précédente, malgré les 600 milliards de dette supplémentaire, s’est réduite considérablement. Le budget de la culture s’est réduit et, avec lui, l’aide aux collectivités locales qui mènent des actions en milieu scolaire.

Ces aides proviennent soit du ministère de la culture, soit du ministère de la ville. Demain, dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires, nous serons amenés à redéployer une partie de ces efforts et de ces interventions sur le temps périscolaire, qui doit lui aussi favoriser les enseignements artistiques et culturels. Dès lors, des questions se posent, et je me réjouis de la présence de Mme la ministre de la culture. Quels seront les moyens propres de l’éducation nationale pour favoriser l’éducation artistique et culturelle dans le cadre des apprentissages scolaires, dès lors que les collectivités locales choisiront d’abord de financer les actions sur le temps périscolaire ? Il y aura forcément un redéploiement. Comment, au niveau du droit commun de l’éducation nationale, financer les apprentissages scolaires relevant de l’éducation artistique et culturelle ?

Et puis, vous aurez, monsieur le ministre, tout comme Mme la ministre de la culture, à signer une convention avec le ministère de la ville, puisque les nouvelles orientations arrêtées par le conseil interministériel de la ville ont pour priorité la mobilisation du droit commun de l’éducation et de la culture.

Comment les ministères de l’éducation et de la culture pourront-ils envisager de soutenir l’action des territoires urbains et ruraux les plus en difficulté ?

M. le président. La parole est à M. Jacques Cresta.

M. Jacques Cresta. Monsieur le président, la nouvelle rédaction de l’article L 121-6 du code de l’éducation est assurément une très bonne nouvelle.

Je ne vais pas insister sur l’importance majeure que peut avoir l’éducation artistique et culturelle tout au long du parcours scolaire, mais plutôt rappeler le rôle que peut jouer une telle pratique dans le développement social de chaque élève.

Car, si on parle fréquemment d’ouverture au monde quand on évoque l’éducation artistique, il s’agit souvent, pour de nombreux élèves, d’une ouverture à soi.

Si l’intérêt de la pratique sportive fait aujourd’hui consensus, il convient de rappeler l’égale importance que peut avoir la pratique d’un art vivant comme le théâtre ou la danse. Je tiens à cet égard à souligner l’action menée en ce sens par de nombreuses associations, comme l’ANRAT Théâtréducation, qui, avec peu de moyens tissent des liens essentiels entre les artistes et les équipes pédagogiques pour parvenir à cette ouverture d’esprit indispensable au citoyen de demain.

Comme le souligne Marie Desplechin dans son rapport sur l’éducation artistique et culturelle, de nombreux freins existent encore pour l’intervention des artistes dans les établissements scolaires. Mais je tiens une nouvelle fois à préciser que l’article 6 constitue une étape importante, car il inscrit dans la loi l’éducation artistique et culturelle, rappelant que ce sont tous les élèves, où qu’ils se trouvent et quelles que soient leur origine sociale, qui doivent bénéficier de cette découverte du monde et d’eux-mêmes.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Nous arrivons à l’article 6 et je me réjouis de la présence de Mme la ministre de la culture et de la communication : je suis persuadé que sa présence nous permettra d’avoir un certain nombre de réponses aujourd’hui. Hier, hélas, au cours de ce débat, nous avons posé beaucoup de questions et nous n’avons que très rarement obtenu des réponses. La présence, aujourd’hui, d’un second ministre au banc du Gouvernement augure d’une meilleure séance. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Il est tout de même réjouissant de se dire qu’on va enfin obtenir des réponses.

Il y a d’abord une question centrale, parce que cet article est purement déclaratif et relève de l’affichage. Si le rapport annexé est suffisant en soi – en l’occurrence, les alinéas 82 à 85 –, nous n’avons plus besoin de l’article 6. Ou alors, nous avons eu l’occasion de le dire, si vous insistez autant sur la présence de l’article 6, ce que nous pouvons comprendre, permettez-nous de considérer que les alinéas 82 à 85 du rapport annexé sont superfétatoires. On a parlé de « loi bavarde » : nous en avons l’illustration.

Tout cela n’est pas cohérent et nous sommes très loin d’un texte de refondation.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la ministre, monsieur le rapporteur, monsieur le président de la commission, nous entamons cette nouvelle séance avec la question des enseignements artistiques.

J’ai eu un peu peur en lisant le projet initial, qui m’a paru purement déclaratif, d’autant que « les enseignements artistiques » disparaissaient au profit de « l’éducation artistique et culturelle ». J’y reviendrai.

La majorité, dans ses déclarations, laissait entendre que sous les législatures précédentes, rien ou pas grand-chose n’avait été fait en faveur de la culture. Je m’inscris en faux contre cette assertion, dans la mesure où il y a eu tout de même de belles dispositions, notamment en 2008, sur l’enseignement de l’histoire de l’art. Dans nos établissements scolaires, à tous les niveaux, les arts étaient déclinés de la meilleure façon qui soit : pas seulement les arts plastiques ou les arts visuels, mais également des arts comme le design, la photo, la danse ou les arts numériques, c’est-à-dire des disciplines très contemporaines.

Je voudrais relever le sursaut de lucidité du Gouvernement qui, même si la commission a enrichi le texte, a déposé un amendement tendant à réécrire les alinéas 6 à 11 et qui fera sans doute tomber quelques amendements de l’opposition. Cela n’empêche pas qu’à la fin de l’article L 121-6, on conserve : « Les enseignements artistiques font partie intégrante de la formation scolaire et secondaire. Ils font l’objet d’enseignements spécialisés et d’un enseignement supérieur. » C’est pour moi fondamental.

Le texte qu’on nous avait donné visait « tous les élèves de la maternelle à la terminale y compris les élèves en situation de handicap », ce qui était tout à fait louable, incluant « les activités scolaires et les activités éducatives ». Tout cela disparaît au profit d’une rédaction plus sobre et plus claire : je m’en félicite.

M. le président. La parole est à M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le président, j’ai cherché en vain une citation de Ferdinand Buisson pour commencer, afin de satisfaire le ministre, mais il faut reconnaître que nous nous sommes couchés assez tard et que nous avons dû nous lever tôt. (Sourires.)

Je vais donc commencer mon propos par une citation de Condorcet, ce qui n’est pas mal non plus : Le but de l’école, c’est de « rendre la raison populaire ». C’est à ce titre que la formation de l’élève, qui va au-delà de son éducation, est fondamentale.

Cet article est extrêmement important. En effet, l’art et la culture pour tous les élèves, où qu’ils soient, c’est un très bel objectif. Il s’oppose au triste constat de ce qui s’est passé ces dernières années : je regrette que vous ne l’ayez pas rappelé, mais nous aurons l’occasion d’y revenir en débattant de la motion de censure.

Si des initiatives nombreuses et souvent pertinentes existent, il n’en demeure pas moins qu’on peut constater, au sein même de nos territoires, de nos circonscriptions, des différences qui créent une fracture entre les établissements scolaires. Le rapport Desplechin, sur ce point, est clair et exhaustif.

Remédier à cette situation sera donc un des enjeux de la réforme des rythmes scolaires, une bonne utilisation du temps périscolaire permettant de développer les activités artistiques et culturelles. Ce sera aussi le moyen d’élargir encore l’accès aux musées, aux théâtres, pour l’ensemble des élèves. C’est la raison pour laquelle cet article est extrêmement important.

M. le président. La parole est à Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, tout d’abord permettez-moi de vous dire le plaisir que j’ai d’être ici, aux côtés de mon collègue Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale, pour défendre cet article 6 du projet de loi, concernant l’éducation artistique et culturelle.

En effet, cet l’6 introduit une grande innovation : les parcours d’éducation artistique et culturelle, parcours qui contribueront non seulement à l’épanouissement intellectuel et à l’éveil de l’esprit critique des élèves, mais aussi à la lutte contre les inégalités de naissance et de territoire.

À ce propos, je rappelle qu’une attention toute particulière sera portée non seulement aux zones urbaines les plus difficiles, à nos quartiers, mais aussi aux zones rurales. Trop souvent, on oublie que celles-ci sont plus éloignées encore des établissements et pratiques culturelles que certaines zones urbaines où existe une tradition associative très forte dans ce domaine.

Évidemment, ce parcours d’éducation artistique et culturelle s’inscrit pleinement dans ce qui existe aujourd’hui en matière d’enseignement artistique. En aucune manière, l’éducation artistique et culturelle ne vient balayer les enseignements artistiques qui existent en matière d’arts plastiques ou de musique. Ce sont bien des compléments, des enrichissements du processus de formation des élèves, qui leur permettront d’aborder les épreuves d’histoire des arts qui interviennent en classe de troisième, au brevet des collèges, avec une plus grande solidité et davantage de compétence.

Ces parcours d’éducation artistique et culturelle se feront dans le plus grand respect de l’autonomie et de la spécificité de chacun des territoires. C’est la raison pour laquelle, dès le début de cette réflexion, j’ai associé le Haut conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, dont vous faites partie, madame Genevard. C’est bien à partir des collectivités, à partir de leur expérience concrète, que nous pourrons généraliser et donner à tous les enfants de France l’accès à des parcours d’éducation artistique et culturelle.

L’idée est bien de partir de ce qui existe. Prenons les exemples, parmi des dizaines, d’Aurillac, ville spécialisée dans les spectacles de rue, de Marciac pour le jazz ou de Saint-Étienne, où j’étais hier, pour le design. Ces collectivités ont une compétence et il est naturel qu’elles orientent leurs établissements d’enseignement vers les professionnels de la culture. C’est la porte d’entrée, d’une certaine manière, à l’ensemble des pratiques de la culture.

Avec Vincent Peillon nous avons travaillé à partir de deux concertations, celle sur la refondation de l’école, et la consultation présidée par Marie Desplechin sur l’éducation artistique et culturelle, Nicole Belloubet étant chargée de l’interface entre les deux groupes.

Nous pouvons tous nous réjouir de l’intégration des parcours d’éducation artistique et culturelle dans le socle de ce qui doit être offert à chacun de nos enfants. Encore une fois, c’est une manière de lutter contre les inégalités, mais c’est aussi un grand ferment de citoyenneté pour les élèves. On sait que l’apprentissage de pratiques artistiques et de l’histoire des arts, que le contact avec les artistes et avec les œuvres donnent aux élèves parfois en rupture ou en échec scolaire davantage de confiance en eux-mêmes, renforce leur respect pour leurs camarades, leur confère un autre regard sur l’école et peut les amener, parfois, à reprendre confiance dans la manière dont ils abordent les enseignements plus traditionnels.

Ce parcours d’éducation artistique est donc non seulement bon en soi, parce qu’il correspond à cet idéal d’émancipation, mais aussi parce qu’il s’inscrit pleinement dans notre désir de lutter contre l’échec scolaire et contre les inégalités qui frappent encore trop souvent les enfants des différents territoires de France. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. J’insisterai sur l’importance toute particulière que nous accordons à ce parcours d’éducation artistique et culturelle. Je rappelle que le Président de la République, qui a choisi de faire de l’école sa priorité, a placé son action – car nous avons besoin de modèles, de mémoire, de traditions – sous le parrainage de Jean Zay, ministre du Front populaire, chargé de l’école mais aussi de la culture. Ce geste renvoie, pour éviter des mésinterprétations profondes de notre tradition, à ce qui était le message même de l’école de la République, non plus selon Ferdinand Buisson, mais selon Jules Ferry.

Jules Ferry voulait une éducation libérale. Cela signifiait que tous les enfants, quel que soit leur milieu d’origine, devaient pouvoir accéder à ce qu’on appelait à l’époque les arts libéraux, c’est-à-dire le meilleur de la culture. Nous devons être capables, et c’est la mission de l’éducation nationale, d’enseigner à chacun la lecture – lire c’est penser –, l’écriture et les apprentissages fondamentaux. Mais nous devons toujours veiller à ce que tous les enfants de France aient accès au meilleur de notre patrimoine.

Nous promouvons une définition de l’homme complet : sensibilité, esthétique et intelligence. Nous voulons honorer, au-delà de ce que nous sommes, des valeurs et un idéal : le bien – nous avons enfin reparlé de morale laïque ; le vrai – nous travaillons toujours sous l’égide de la tapisserie représentant L’école d’Athènes ; et le beau, qui élève chacun au-delà de ce qu’il est quand il se réduit à ses besoins les plus simples.

Avoir pu, avec Aurélie Filippetti, animée d’une volonté toute particulière et qu’on attendait depuis longtemps, faire travailler ensemble les deux ministères à travers des concertations et des actions, grâce à la mobilisation de nos administrations et des collectivités locales aujourd’hui fortement impliquées, est une bonne nouvelle.

J’ai déjà eu l’occasion d’indiquer que, comme pour tout ce qui est important, nous avons à agir. Vous en avez appelé à l’esprit d’initiative. Ce parcours, à la fois sensibilisation et action, contribuera à ce que chacun puisse mieux développer des qualités de production, d’invention, de création, de coopération. En même temps, ce que nous voulons pour les enfants, nous devons nous l’imposer à nous-mêmes.

Je souhaite que ce parcours, qui marque vraiment la philosophie de ce que nous appelons la refondation républicaine de l’école, recouvrant une dimension anthropologique, ait devant lui de très grandes années. Je remercie chaleureusement la ministre de la culture de nous avoir aidés à inscrire ce parcours artistique et culturel à l’article 6. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 398 et 811.

La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 398.

Mme Annie Genevard. Je retire cet amendement. Si vous le permettez, monsieur le président, je souhaite saisir l’occasion qui m’est offerte pour évoquer quelques points avec les membres du Gouvernement.

Madame la ministre de la culture, l’enjeu auquel nous sommes confrontés consiste, en matière d’éducation artistique et culturelle, à réussir la généralisation et à réussir le déploiement territorial. J’ai déjà eu l’occasion de préciser qu’au sein du conseil des collectivités territoriales à la culture il nous manquait un élément de visibilité sur ce qui se passe dans les territoires ruraux, puisque les statistiques ne prennent pas en compte les collectivités de moins de 10 000 habitants. On ne sait pas produire d’éléments d’analyse sur les politiques culturelles conduites par les communes de moins de 10 000 habitants. Or ce sont précisément elles qui représentent la ruralité.

Je souhaite à ce stade dissiper une idée reçue selon laquelle, étant donné la concentration des équipements culturels dans le secteur urbain, pour des raisons évidentes que nul ne conteste, on pourrait être amené à considérer que le reste du territoire est constitué de « terres blanches ». Or moi qui suis entrée dans la vie publique par la culture, moi qui ai conduit, dans le territoire dont j’ai la responsabilité, des politiques culturelles déterminées, je puis vous assurer qu’il s’y passe beaucoup de choses. Seulement, madame la ministre, vous n’en avez pas trace au ministère, car il n’existe pas d’outils pour évaluer ces politiques. D’où la nécessité de réaliser, dans les régions et sous l’égide de l’État, une analyse de ce qui s’y fait.

Nous ne sommes qu’au début du processus de généralisation de l’éducation artistique et culturelle. Quand nous examinons les chiffres, ils sont effrayants : l’éducation artistique et culturelle ne touche vraiment que très peu d’enfants. C’était ma première remarque.

Ensuite, nous pouvons être animés des meilleures intentions du monde, la réalité nous rattrape. Je vais vous faire de la peine, monsieur le ministre, vous qui prônez l’accès à la culture pour tous, mais j’ai lu dans la presse de ma région, ce matin, un article sur l’accès à la culture en péril à Pierrefontaine-les-Varans : « Les équipes éducatives des collèges Louis-Pergaud et Henri-Fertet s’inquiètent à l’annonce de la suppression d’un poste de professeur documentaliste à la rentrée prochaine. Alors que les réformes prévues avancent l’argument d’une ouverture culturelle plus importante, cette décision leur semble complètement contraire à ces principes. Cela semble être une nécessité absolue qu’il soit en mesure d’offrir un service public culturel minimum à tous, de manière équitable. Pourquoi ne pas mettre l’accent sur les zones qui en ont vraiment besoin ? Les équipes enseignantes envisagent d’autres actions. »

Il y a les discours et il y a la réalité, qui se rappelle à nous en permanence. En matière culturelle, soyons vigilants dans tous les territoires.

(L’amendement n° 398 est retiré.)

Mme Julie Sommaruga. En matière de suppressions de postes, vous n’avez aucune leçon à donner !

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement de suppression n° 811.

M. Philippe Gomes. Cet amendement vise à mettre en évidence un trait commun à tous les articles du texte : quel est l’objet de l’annexe à l’examen de laquelle nous avons passé deux journées pleines ? Ensuite, pourquoi retrouve-t-on dans les articles, pour une large part et dans une rédaction qui n’est que légèrement différente, le contenu de l’annexe ?

Ainsi, l’alinéa 85 de l’annexe précise : « Ce parcours doit permettre d’acquérir des savoirs artistiques et culturels, de pratiquer les arts, de découvrir des œuvres, des artistes, des monuments et des lieux à caractère artistique et culturel. » L’article 6, quant à lui, précise que ce parcours « favorise la connaissance du patrimoine artistique et culturel et la création contemporaine et participe au développement de la créativité des pratiques artistiques. »

Autre exemple : selon l’annexe, « ce parcours doit s’appuyer sur les apports conjugués de l’institution scolaire et de ses partenaires : collectivités locales, institutions culturelles, associations. » L’article 6 dispose : « Il est assuré par des enseignants de l’éducation nationale auxquels peuvent être associés des acteurs du monde culturel et artistique et du monde associatif. »

Et ainsi de suite.

À peu de choses près, la construction de la phrase, l’ajout ou l’omission d’un mot, un adjectif différent, on retrouve dans les articles les alinéas de l’annexe. Pourquoi avoir procédé ainsi, pourquoi avoir rédigé cette annexe, en quoi serait-elle une « valeur ajoutée » dès lors qu’elle répète ce que le projet de loi lui-même précise ? N’aurait-il pas fallu, dès lors, nous soumettre un texte à caractère purement normatif et donc un peu moins bavard ?

M. Patrick Hetzel. Très juste !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, pour donner l’avis de la commission.

M. Yves Durand, rapporteur de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Cet amendement vise à supprimer l’article 6 relatif au parcours d’éducation artistique et culturelle. Je n’aurai pas l’outrecuidance de reprendre l’argumentation des deux ministres, car je serais moins brillant qu’eux. Je rappellerai simplement qu’il était attendu depuis longtemps que l’on reconnaisse au sein de l’école ce parcours. Trop d’enfants encore n’ont pas accès à la culture. Il s’agit d’une inégalité devant le savoir, devant les savoirs, qui est pour nous comme, je suppose, pour les députés de tous les bancs, absolument intolérable.

L’article 6 a par conséquent toute sa place dans un texte sur la refondation de l’école. Il est d’autant plus important qu’il montre bien que le cœur de l’enseignement artistique se situe dans le temps scolaire. La commission a d’ailleurs rétabli les enseignements artistiques comme partie intégrante de la formation scolaire ; cette disposition sera réintroduite dans le code de l’éducation.

Nous voulons également placer ces parcours dans le cadre des projets éducatifs territoriaux, et donc prolonger ce qui se fait pendant le temps scolaire dans la sphère périscolaire. Il s’agit donc de faire d’un acte éducatif le centre de cette éducation artistique et culturelle.

L’article 6 est fondateur de l’école. La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Mon but n’est évidemment pas de supprimer l’éducation artistique et culturelle. Tout le monde aura compris que c’est la manière dont les choses sont présentées qui est en cause, le texte et l’annexe formant une sorte de tautologie, une redondance.

J’ajoute que les enseignements artistiques font déjà partie intégrante du parcours scolaire à l’école primaire et dans le secondaire. Ils font en outre l’objet d’un enseignement spécialisé dans le supérieur. Contrairement à ce qu’a affirmé le rapporteur, le texte n’apporte rien de plus que la législation en vigueur.

(L’amendement n° 811 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 1063 et 1513 rectifié.

La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement n° 1063.

M. Paul Molac. Cet amendement vise à ce que l’environnement local des élèves soit pris en compte dans l’enseignement, afin de favoriser leur prise de conscience de la diversité et la richesse qui les entoure. L’école ne doit pas être coupée des réalités locales si l’on veut que les enfants puissent s’y reconnaître et s’y investir dans le but de réussir leur scolarité.

J’ai été sensible aux propos qu’a tenus hier notre collègue Malek Boutih et je crois qu’il a tout à fait raison. Arriver à l’école sans en posséder les codes, la culture et parfois même la langue, c’est une source d’inquiétude pour l’enfant. Nous avons connu ce type de situation dans nos régions par le passé ; ce n’est plus le cas aujourd’hui, mais je comprends que la situation se présente ainsi dans certaines banlieues.

Comment aborder le problème ? Il ne s’agit évidemment pas de refuser la culture commune de l’école, bien au contraire, mais il importe de prendre en compte la culture et la position de l’élève pour être en mesure de le faire accéder à cette culture commune. En Catalogne Sud, par exemple, où l’on pratique l’enseignement bilingue en espagnol et en catalan, dans les quartiers où vivent beaucoup d’immigrés, l’école s’efforce de prendre en compte les règles de civilité propres à chaque langue ; il s’agit en l’espèce de langues étrangères.

L’enjeu, c’est de donner à l’enfant une certaine estime de soi et de faire en sorte qu’il se sente reconnu. En effet, lorsque des enfants rejettent le système éducatif, c’est souvent parce qu’ils ne se sentent pas pris en compte dans ce qu’ils sont, ou qu’ils ont le sentiment qu’on veut les changer. C’est un problème sérieux, qui se pose peut-être davantage aujourd’hui, je le reconnais, dans les banlieues que dans les territoires qui comptent des langues régionales. J’ai très bien saisi pourquoi M. Malek Boutih a parlé hier d’« ethnie », même si ce terme est problématique.

Cet amendement vise à attirer l’attention du pédagogue sur le local : je ne sais pas si je m’exprime clairement, mais c’est un point vraiment important.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 1513.

M. Patrick Hetzel. Monsieur le président, permettez-moi de vous associer à cet amendement. Vous ne pouvez pas le défendre puisque vous présidez la séance, mais vous le feriez évidemment bien mieux que moi.

M. Vincent Peillon, ministre. Il le ferait brillamment ! (Sourires)

M. Patrick Hetzel. Je voudrais y associer également mes collègues Annie Genevard et Frédéric Reiss, puisqu’il s’agit d’un amendement commun.

Madame la ministre de la culture, vous êtes élue de la Moselle. Ma circonscription est voisine de la vôtre et nos territoires, par-delà les frontières administratives, sont ceux des arts du feu, et plus précisément de la cristallerie.

Dans ma circonscription, des actions sont menées pour que les jeunes élèves puissent découvrir toute la richesse culturelle de leur environnement immédiat : je pense aux arts du feu, avec le musée Lalique que vous connaissez bien, aux arts du spectacle vivant, au château du Lichtenberg, aux métiers d’art, ou encore à l’art roman, avec l’abbatiale de Neuwiller-lès-Saverne. Tout cela pour dire qu’il est possible d’engager des actions importantes localement, dans l’environnement immédiat des élèves : c’est la raison pour laquelle nous souhaitons que cet environnement soit pleinement pris en considération.

Parmi les richesses de cet environnement local, il ne faut pas négliger tout ce qui relève de la culture linguistique. Langues et cultures régionales sont essentielles et devraient avoir toute leur place dans ce texte, puisqu’elles peuvent très bien s’inscrire dans une pédagogie qui va du particulier au général. Il faudrait préciser que les activités doivent commencer dans la région où se trouve l’établissement scolaire, puis s’étendre au-delà. Cet ancrage territorial doit être évoqué explicitement, car il s’agit d’une richesse inestimable.

Je pense que nos élèves sentiront mieux les choses si elles sont incarnées. Ils pourront ensuite, avec leurs parents, voir de plus près les richesses culturelles qui les environnent immédiatement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Je crois que la culture, c’est un moyen de s’élever, depuis l’endroit où l’on est, vers l’universel.

M. Patrick Hetzel. Certes, mais ce n’est pas contradictoire avec ce que j’ai dit !

M. Yves Durand, rapporteur. Qu’il faille partir des réalités locales et régionales, c’est une évidence, mais cela relève tout simplement de la pédagogie. Mais aller jusqu’à inscrire, dans une loi de la République, une référence à cet ancrage régional, cela tendrait, sinon à éliminer, du moins à ne pas mettre en évidence ce qui est essentiel, à savoir cette montée vers l’universel.

M. Patrick Hetzel. « Éliminer » ? Vous avez dit « éliminer » ?

M. Yves Durand, rapporteur. D’abord le pays, ensuite l’universel.

Voilà pourquoi, mes chers collègues, cet amendement a reçu un avis défavorable de la commission.

M. Patrick Hetzel. Toujours ce jacobinisme !

M. Yves Durand, rapporteur. Parce que je suis persuadé que nous sommes tous attachés à ce mouvement vers l’universel, je demande aux auteurs de cet amendement de le retirer.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Je voudrais d’abord revenir sur ce qu’a dit tout à l’heure votre collègue au sujet de la suppression d’un poste de professeur documentaliste. Plus le débat avance et plus je suis convaincu que vous allez finir par voter notre loi de programmation, car vous constatez, comme nous, que nous avons besoin de postes,…

M. Patrick Hetzel. Vous progressez habilement !

M. Vincent Peillon, ministre. …et je vous remercie d’avoir fait cette observation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) L’atmosphère s’est réchauffée, nous partageons maintenant un projet commun et nous nous accordons pour dire qu’il faut des postes dans les établissements. Merci de cette belle évolution.

S’agissant des amendements, je souhaiterais, monsieur Molac, que vous retiriez le vôtre, pour une raison qui n’est pas du tout celle qu’a exposée le rapporteur. En réalité, l’article L. 121-1, tel qu’il est formulé, n’exclut pas l’histoire et les cultures locales et régionales, qui font évidemment partie intégrante de l’histoire et de la culture françaises : il ne faut pas chercher à opposer toujours les unes aux autres.

Nous sommes unis dans la diversité au niveau européen et nous sommes aussi parvenus à l’être au niveau national, me semble-t-il : la nation est composée de toutes ses singularités et de toutes ses différences, qui l’enrichissent.

Je tiens par ailleurs à vous faire remarquer que l’article 6 dispose que le parcours artistique et culturel de l’élève sera mis en œuvre « localement », à travers ce qui constitue une vraie nouveauté, des projets éducatifs territoriaux. Vous vous posez des questions sur ce sujet et, même si tout ne sera pas simple, nous sommes bien décidés à unir tout le monde localement. Même s’il vise à partir du singulier pour accéder l’universel, ce projet éducatif local part bien du singulier, et c’est un universel concret.

Une large place sera donc faite au patrimoine régional, qui est aussi un patrimoine national, ainsi qu’aux ressources artistiques et culturelles locales, qui sont aussi des ressources nationales, et même, me semble-t-il, souvent universelles. Les élèves pourront les découvrir et se les approprier.

L’amendement trouve ses réponses dans le reste du texte. Je souhaiterais vraiment que vous en conveniez et que l’amendement soit retiré.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. J’ai bien écouté les réponses du rapporteur et du ministre et je trouve leur argumentation très fragile. S’il est vrai qu’à l’article L. 121-6 il est indiqué que les parcours d’éducation artistique et culturelle seront déclinés localement, en revanche l’article L. 121-1, qui porte sur les grands principes qui doivent régir notre école, indique que la formation dispensée dans les établissements scolaires doit être adaptée aux évolutions économiques, sociales et culturelles « du pays ou de son environnement international ».

J’entends bien le rapporteur lorsqu’il évoque le passage du particulier à l’universel, mais il serait préférable de faire référence à la « région où se trouve l’établissement scolaire » et de parler explicitement de la France, en supprimant le mot « pays ». Cela donnerait plus de force à l’article, et je regrette vraiment que la commission et le Gouvernement aient donné un avis négatif.

M. le président. La parole est à M. Paul Molac.

M. Paul Molac. J’ai bien noté les pirouettes de M. le rapporteur : il est vrai que les voies qui mènent à l’universel sont multiples. Je vous ai bien entendu aussi, monsieur le ministre, et je vous remercie pour vos paroles : il me semble que ça va mieux en le disant.

J’ai toujours considéré que j’étais à la fois Breton et Français. Nous faisons partie de la République et je considère que la langue bretonne est une langue de la République. J’ai parfois l’impression que tout le monde n’entend pas les choses comme moi, mais c’est un autre problème…

M. Patrick Hetzel et M. Frédéric Reiss. Bravo !

M. Paul Molac. Monsieur le ministre, nous sommes donc d’accord. Je vous remercie de vos paroles, que je garderai en mémoire, et je retire mon amendement.

(L’amendement n° 1063 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Monsieur le ministre, je doute que les professeurs des collèges Louis-Pergaud et Henri-Fertet se satisfassent de votre pirouette. Il peut être commode, après avoir supprimé un poste, de le rétablir : c’est une méthode comme une autre…

M. Vincent Peillon, ministre. J’ai compris votre demande, madame, et le message est bien passé.

Mme Annie Genevard. Je prends donc acte du fait que vous allez examiner ce dossier avec attention et je vous en remercie.

Sur le projet éducatif territorial, nous nous posons quelques questions, en tant que maires. Les choses semblent très simples sur le papier : il y a, au départ, la volonté politique de généraliser sur les territoires l’éducation artistique et culturelle. On définit un parcours, on y associe l’éducation nationale, les acteurs d’éducation populaire et les associations ; tout le monde se met autour de la table et, dans une grande concorde, on va porter la bonne parole. Dans la réalité, les choses sont plus compliquées.

Que demande-t-on aux communes ? Que demande-t-on aux territoires ? D’organiser les choses, ce qui n’est déjà pas simple, mais on leur demande aussi d’apporter des financements complémentaires. Où trouver ces financements alors qu’on nous annonce une baisse des dotations aux collectivités locales de 4,5 milliards d’euros ?

M. Jean-Pierre Blazy. Cela fait longtemps que vous avez diminué les crédits de la culture !

Mme Annie Genevard. De surcroît, tout cela doit être combiné avec la réforme des rythmes scolaires. Nous allons devoir passer d’une approche périscolaire qui concernait un petit nombre d’enfants à une approche beaucoup plus générale, qui va concerner un très grand nombre d’enfants.

Il faut également des ressources en matière d’encadrement. Si nous n’avons pas des gens formés pour dispenser une éducation artistique et culturelle, je peux vous dire comment cela va se terminer : ce sera foot et marelle. Ce n’est pas mal, mais cela ne fait pas une éducation artistique et culturelle.

La question des moyens et de l’organisation de ce projet éducatif territorial doit être au cœur de notre réflexion. Il faut aborder les choses concrètement, mes chers collègues : les déclarations d’intention, si belles et généreuses soient-elles, ne suffisent pas.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Contrairement à M. Molac, nous maintenons notre amendement. La réponse qu’a donnée M. le rapporteur ne nous satisfait pas, pour une raison toute simple :…

M. Yves Durand, rapporteur. Oh, ça suffit !

M. Patrick Hetzel. …nous partageons évidemment l’idée d’un mouvement vers l’universel – qui ne la partagerait pas ? – mais précisément, l’accès à l’universel sera beaucoup plus facile dès lors qu’il s’ancrera dans le quotidien et dans l’environnement immédiat de nos jeunes. C’est l’esprit de notre amendement.

Je rejoins pleinement M. Molac lorsqu’il évoque la Bretagne. Nous avons exactement la même sensibilité en Alsace : nous sommes à la fois Alsaciens et Français. Ce n’est pas contradictoire, bien au contraire. D’ailleurs, monsieur le ministre, vous avez vous-même insisté sur le fait que cette diversité, loin de nous appauvrir, ne pouvait que nous enrichir. Très bien, mais prenons-en acte !

Monsieur le rapporteur, vous avez eu tout à l’heure un mot malheureux : vous avez parlé d’« éliminer »…

M. Yves Durand, rapporteur. Éliminer quoi ?

M. Patrick Hetzel. …la référence au cadre régional. Et puis, par prudence, vous avez fait un dérapage contrôlé et avez indiqué que vous n’iriez pas jusqu’à la supprimer. Mais on voit bien que la tentation est présente, et c’est bien pour cela que nous nous battons. Nous pensons que notre identité culturelle régionale doit être valorisée, et l’école est un des éléments de cette valorisation. Nous souhaitons aussi que cette identité soit incarnée.

En passant tout à fait à côté de cela, vous ne rendez pas service à la République. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Julie Sommaruga. Oh ! Tout de même !

(L’amendement n° 1513 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 924.

M. Xavier Breton. Il est défendu.

(L’amendement n° 924, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Maud Olivier, pour soutenir l’amendement n° 1347.

Mme Maud Olivier. Monsieur le président, avec votre permission, je défendrai en même temps les amendements 1348 et 882.

M. le président. Je vous en prie.

Mme Maud Olivier. L’objet de cet amendement est de faire explicitement référence à la culture scientifique et technique dans l’enseignement culturel, depuis l’école primaire jusqu’à l’enseignement supérieur, en passant par les collèges et lycées.

Il est important que la culture scientifique et technique soit enseignée à tous les niveaux. Nous parlons ici du développement du goût des sciences, de l’apprentissage du questionnement et du raisonnement scientifique, de la connaissance de l’histoire des sciences et des techniques. Chaque élève doit bénéficier d’un véritable parcours culturel scientifique, de l’école à l’enseignement supérieur. Ce parcours pourrait intégrer simultanément enseignement pratique et culture, de manière à agir au mieux en faveur des publics qui n’auraient pas accès autrement aux résultats et aux méthodes de la démarche scientifique et technique.

La nécessité de rendre les carrières scientifiques attractives auprès des jeunes requiert un effort vigoureux des pouvoirs publics en matière de diffusion de la culture scientifique et technique dans la société. En milieu scolaire, elle devrait en particulier être inscrite dans une approche pédagogique transversale et pluridisciplinaire.

Situer la France dans une économie de la connaissance impose d’accroître significativement l’accès aux études scientifiques des jeunes. Il faut contrecarrer le poids de l’appartenance sociale dans les parcours des élèves et amoindrir l’influence que peut avoir le territoire ou l’environnement familial dans lequel on grandit.

Cette culture scientifique et technique doit également permettre à chaque citoyen de saisir les enjeux actuels, qui sont le plus souvent liés aux progrès de la science. En l’intégrant davantage à l’école de la République, nous permettons à toutes et à tous de se saisir des débats qui animent notre société.

À cette fin, il est également important de renforcer les actions de valorisation du patrimoine scientifique et industriel dans toutes ses dimensions ainsi que les actions de médiation culturelle ; et d’intégrer dans les enseignements artistiques et scientifiques une approche comparée des démarches de la création artistique et de la recherche scientifique.

J’espère que vous reconnaissez, chers collègues, l’importance de l’enjeu de l’intégration de la culture scientifique et technique à tous les niveaux d’apprentissage. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Patrick Hetzel. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Bien entendu, je suis moi aussi convaincu de l’importance de la culture scientifique et technique, que vous venez de rappeler. Nous n’avons donc aucun désaccord sur le fond de l’amendement. La question porte sur sa place dans le texte : il ne me semble pas que la culture scientifique et technique ait sa place dans le parcours artistique et culturel.

D’autre part, votre préoccupation est satisfaite par l’article 31 du projet de loi qui prévoit, en son alinéa 6 : « Elle dispense les éléments d’une culture historique, géographique, scientifique et technique. »

Je vous suggère donc de retirer vos amendements. À défaut je serais amené à donner un avis défavorable à leur adoption.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Madame Olivier, retirez-vous l’amendement n° 1347 ?

Mme Maud Olivier. J’ai bien noté la référence à la culture scientifique et technique qui figure à l’article 31, mais cet article concerne uniquement les enseignements du primaire, tandis que mon amendement porte sur tous les niveaux de l’apprentissage : maternelle, primaire, collège, lycée et enseignement supérieur.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Notre collègue Maud Olivier a parfaitement raison d’insister, car la réponse du rapporteur n’est que partielle : ce dont il est question, c’est d’irriguer l’ensemble de notre système éducatif.

C’est effectivement une question stratégique ; nous sommes plusieurs, dans cet hémicycle, à faire partie de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, et nous devons faire en sorte que cette culture scientifique et technique se répande dans notre société, car cela nous permettrait de lutter contre certains obscurantismes. Cela encouragerait aussi des vocations, notamment de la part de jeunes filles, qui s’engageraient plus aisément vers des carrières scientifiques.

Ce sont des sujets qui sont suffisamment importants pour que nous ne les négligions nullement.

M. le président. L’amendement est-il repris ?

M. Patrick Hetzel. Oui monsieur le président.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la réussite éducative.

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée chargée de la réussite éducative. Je voulais souligner l’intérêt de Maud Olivier pour cette question de la culture scientifique et technique, et insister sur un point : il faut que nous développions cette culture scientifique et technique, mais surtout que nous arrivions à ce que les jeunes filles soient davantage imprégnées de cette culture.

Aujourd’hui les filles réussissent très bien, mais elles ne s’orientent pas suffisamment vers les métiers scientifiques et techniques parce qu’elles n’ont pas cette culture.

Si je ne suis pas persuadée que ces dispositions aient leur place avec les enseignements artistiques, nous partageons la préoccupation de Mme Olivier, notamment la volonté de développer la culture scientifique et technique des filles.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Déaut.

M. Jean-Yves Le Déaut. Je soutiens notre collègue Maud Olivier, qui a d’ailleurs été chargée d’un rapport parlementaire sur la culture scientifique et technique.

Cette question est effectivement une composante de la culture, elle me semble donc figurer au bon endroit. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à un manque d’ingénieurs, tandis que ceux que l’on forme évoluent vers les métiers des banques, qui sont plus lucratifs. Il existe une défiance globale vis-à-vis de la science, pouvant porter sur les applications de la science, qui ne sont pas toutes utiles.

Monsieur le ministre, vous qui êtes un défenseur de la culture scientifique et technique et des travaux personnalisés à l’école,…

M. Patrick Hetzel. Sauf que l’aide personnalisée va disparaître !

M. Jean-Yves Le Déaut. …vous connaissez l’importance de la culture scientifique et technique et de son développement. Elle concourt à l’égalité entre les hommes et les femmes : peu de femmes se dirigent vers ces disciplines, et globalement, c’est un sujet qui n’est pas suffisamment traité dans notre pays.

Maud Olivier m’a demandé de cosigner cet amendement ; je l’ai fait, comme tous les membres de notre groupe. Je soutiens donc cet amendement et son adoption serait un beau message pour le développement de la culture scientifique et technique en France.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Nous sommes en train d’introduire une confusion. Comme l’a souligné M. Le Déaut, je suis très attaché, pour de nombreuses raisons, à la culture scientifique et technique, mais nous étudions ici le parcours d’éducation artistique et culturel.

Si vous voulez que nous ajoutions dans le cadre de la navette des éléments concernant la culture scientifique au code de l’éducation, j’y suis tout à fait favorable, mais cela n’a pas été proposé à ce stade.

Je ne comprends pas qu’un esprit scientifique, aux idées claires et distinctes, veuille mêler les choses et introduire cette confusion.

Je vous répète que nous pouvons honorer la culture scientifique et technique, mais à condition de ne pas la mélanger avec ce parcours artistique et culturel, dont les visées sont très particulières. D’ailleurs, Jean Zay n’était pas ministre de la science, l’approche était différente.

Je vous propose donc, si l’article actuel du code de l’éducation ne vous satisfait pas, de travailler à une nouvelle version au cours du parcours législatif. Mais ne raccrochons pas ces réflexions au parcours d’éducation artistique et culturel, qui perdrait alors toute sa force et son identité. Je suis favorable à votre demande, mais je vous demande à ce stade de retirer cet amendement.

M. Patrick Hetzel. C’est une vision restrictive de la culture !

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Je m’inquiète pour notre rapporteur, dont je ne voudrais pas qu’il souffrît de schizophrénie. Monsieur le rapporteur, vous êtes quand même cosignataire de cet amendement, à moins que vous ne soyez plus membre du groupe socialiste depuis que vous êtes devenu rapporteur !

M. Patrick Hetzel. Excellent !

Mme Annie Genevard. Laissons à nouveau l’École d’Athènes nous inspirer : sur la tapisserie tendue au-dessus de nous, nous voyons les mathématiques pratiques et spéculatives converser avec la philosophie. Il ne faut pas distinguer les sciences de la culture !

Depuis quinze ans, j’ai mis en œuvre un partenariat culturel pour tous les élèves scolarisés dans les écoles maternelles et primaires de ma commune. Chaque année, chaque enfant de la ville dont je suis maire va au théâtre, au spectacle, au musée, et reçoit une formation à caractère scientifique délivrée par le centre régional de culture scientifique, qui constitue un excellent support pédagogique. Personne au sein du corps enseignant ne m’a jamais dit qu’il était étrange de trouver de la science et des arts au sein du parcours culturel. Les arts libéraux comprenaient des disciplines scientifiques.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Yves Durand, rapporteur. Le débat parlementaire n’est pas terminé, et la proposition du ministre doit être entendue. Le texte doit passer devant le Sénat avant de revenir à l’Assemblée, nous avons encore de nombreuses possibilités pour l’amender et l’améliorer.

Je tiens tout de même à rappeler l’article L. 121-4 du code de l’éducation à Mme Olivier : « Les enseignements scolaires et universitaires ont pour objet de dispenser les connaissances de base et les éléments d’une culture générale incluant les données scientifiques et techniques, » Cet article du code demeure inchangé. La culture scientifique et technique est donc déjà inscrite dans le code de l’éducation.

Si nous souhaitons la faire figurer dans un article spécifique, le ministre vient de nous faire une proposition de travail. Compte tenu de ces éléments, nous pourrions peut-être obtenir le retrait de l’amendement…

M. le président. L’amendement a été retiré, puis repris.

M. Yves Durand, rapporteur. En ce cas, je réitère mon avis défavorable.

Mme Maud Olivier. Monsieur le président, je n’ai pas retiré mon amendement !

M. le président. Il n’a pas été retiré ? C’est pourtant ce que j’avais cru comprendre. Cela n’a pas d’importance : il y aura donc un vote sur l’amendement.

Vous avez la parole madame Olivier.

Mme Maud Olivier. Pour ma part, j’accepte la proposition du ministre, et je l’en remercie. Nous allons effectivement retravailler cette question avec notre collègue Jean-Yves Le Déaut et ceux qui le souhaitent, et nous pourrons y revenir dans le cadre de la navette parlementaire. Je retire donc l’amendement n° 1347.

M. Patrick Hetzel. Dans ce cas, je le reprends monsieur le président.

(L’amendement n° 1347 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Pinville, pour soutenir l’amendement n° 1371.

Mme Martine Pinville. Cet amendement s’inscrit dans la droite ligne de ce que nous avons adopté hier concernant l’éducation à la santé.

La rédaction actuelle de la septième phrase de l’article L. 121-1 du code de l’éducation est la suivante : « Les enseignements artistiques ainsi que l’éducation physique et sportive concourent directement à la formation de tous les élèves. »

L’amendement n° 1371 tend à insérer, dans cette même phrase, les mots : « et l’éducation à la santé et à la citoyenneté. » après le mot « sportive ». Il semble cohérent avec les amendements que nous avons adoptés hier soir que cette notion d’éducation à la santé et à la citoyenneté soit inscrite dans le code.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Même argumentaire que pour l’amendement précédent relatif à la culture scientifique et technique : certes, cette préoccupation est fondamentale, mais elle n’a absolument pas sa place dans un parcours d’éducation culturelle et artistique.

Madame Pinville, je souhaite que vous retiriez votre amendement, de façon à introduire ces dispositions à un autre emplacement, comme nous l’avons dit tout à l’heure.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Ce qui est en train de se passer est assez fabuleux. L’amendement précédent et celui que nous examinons actuellement ont été déposés par un certain nombre de parlementaires et, plus généralement, par les membres du groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Luc Belot. Nous avions déjà compris la première fois !

M. Patrick Hetzel. M. le rapporteur figure donc parmi les cosignataires de ces amendements. C’est extraordinaire et cela mérite d’être relevé, comme ma collègue Annie Genevard l’a fait tout à l’heure. Dans notre procédure parlementaire, je pense qu’il est assez exceptionnel que le rapporteur cosigne un amendement et décide ensuite de s’opposer à son propre amendement ; et quand celui-ci est repris, il donne un avis défavorable.

Hier soir, vous étiez très critiques à l’égard de certains parlementaires auxquels vous reprochiez de ne pas respecter la procédure parlementaire. C’est l’hôpital qui se moque de la charité ! Nous sommes en train de découvrir que soit vous ne savez pas travailler au sein de votre propre groupe,…

M. Michel Ménard. Rassurez-vous, monsieur Hetzel : tout va très bien entre nous !

M. Patrick Hetzel. …soit vous avez déposé ces amendements à la va-vite. En tout cas, il y a là quelque chose d’assez exceptionnel. Nous sommes en train d’atteindre un sommet en matière de non-respect du Parlement : je tenais absolument à le souligner.

M. Luc Belot. Quel talent !

Mme Colette Langlade. Nous ne sommes pas des élèves, monsieur Hetzel !

M. Patrick Hetzel. Nous non plus, madame Langlade. À plusieurs reprises, nos collègues de la majorité se sont comportés de même. C’est effectivement un travers, mais nous sommes enseignants : chassez le naturel, il revient au galop – je le confesse volontiers ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Je vais retirer mon amendement. Monsieur Hetzel, vous avez beau jeu de nous donner des leçons, notamment de parlementarisme.

M. Patrick Hetzel. Bien sûr ! Nous n’allons pas nous en priver !

Mme Martine Pinville. Lors de la précédente législature,…

M. Patrick Hetzel. Je n’y étais pas !

Mme Martine Pinville. …nous avons bien vu comment vous fonctionniez. C’est trop facile ! Vous n’avez aucune leçon à nous donner concernant notre travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Patrick Hetzel. Vous non plus !

(L’amendement n° 1371 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 885 et 1337, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Maud Olivier, pour soutenir l’amendement n° 885.

Mme Maud Olivier. Monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° 1337, ainsi que l’amendement n° 1338, si vous le voulez bien : il s’agit en effet du même sujet.

M. le président. Je vous en prie, ma chère collègue.

Mme Maud Olivier. Ces amendements visent à créer un enseignement de l’égalité entre les femmes et les hommes assuré tout au long de la scolarité. Cet enseignement doit permettre d’intégrer l’apprentissage des mécanismes de construction sociale des rôles sexués. Cette éducation a un rôle majeur à jouer dans la formation de l’enfant comme personne. Il s’agira d’un puissant levier d’émancipation et d’intégration sociale.

Mme Sandrine Mazetier. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l’article L. 121-1 du code de l’éducation, qui dispose que les écoles, collèges et lycées contribuent à favoriser la mixité et l’égalité entre les hommes et les femmes. Je demande donc le retrait de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. Madame Olivier, maintenez-vous votre amendement ?

Mme Maud Olivier. Il manque quand même, dans le code de l’éducation, la notion de construction des rôles sexués. Comme vous le savez, il s’agit d’un élément important dans la construction de l’enfant. Cette notion n’apparaît pas dans les dispositions législatives actuelles : c’est pourquoi j’ai déposé cet amendement.

M. le président. Madame Olivier, dois-je comprendre que votre amendement est maintenu ?

Mme Maud Olivier. Oui, monsieur le président.

(L’amendement n° 885 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Monsieur le président, pouvez-vous m’accordez une courte suspension de séance.

M. le président. Me permettez-vous de mettre aux voix l’amendement n° 1337, qui est en discussion commune ?

M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles. Je souhaiterais que vous suspendiez la séance maintenant.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 6 (suite)

M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 1337.

(L’amendement n° 1337 n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 927 est défendu.

(L’amendement n° 927, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1348 a été défendu ; nous pouvons considérer qu’il est retiré.

(L’amendement n° 1348 est retiré.)

M. le président. L’amendement n° 925 est défendu.

(L’amendement n° 925, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 1448.

M. Vincent Peillon, ministre. L’article 6 s’est beaucoup enrichi grâce aux apports de la commission à partir de propositions de Mme Pompili et de Mme Attard, notamment avec la mise en œuvre locale du parcours, qui peut s’effectuer à travers les projets éducatifs territoriaux. L’amendement du Gouvernement a pour objet de supprimer une disposition redondante portant sur le public d’élèves concernés, qui n’est pas nécessaire compte tenu du premier alinéa.

Concernant la prise en compte du parcours dans la validation du diplôme, je rappelle que le parcours artistique et culturel n’est pas un enseignement spécifique faisant l’objet d’un programme. C’est un dispositif d’éducation à la culture artistique qui englobe d’autres composantes que les seuls enseignements et qui va au-delà des enseignements et des programmes scolaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Avis favorable.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. La phrase adoptée en commission que vous souhaitez supprimer, monsieur le ministre, nous tient particulièrement à cœur. D’une part, parce qu’elle précise dans la durée l’idée de parcours qui va de la maternelle à la terminale. D’autre part, parce qu’elle concerne les enfants en situation de handicap. La notion de parcours n’est pas vaine car la durée et le cadre de la scolarité sont importants. Nous ne sommes pas dans un parcours artistique avec une juxtaposition de visites de musées, les unes après les autres, mais dans le cadre d’une suite articulée d’expériences dans les divers domaines de l’art, permettant à l’enfant de s’exprimer, d’éprouver et de réfléchir.

J’aimerais que cette phrase soit introduite dans le texte de l’article 6. Nous sommes donc opposés à cette suppression.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. J’ai sous les yeux la circulaire interministérielle relative au projet éducatif territorial.

Dans votre amendement, monsieur le ministre, vous établissez un lien précis entre le projet éducatif territorial et le parcours d’éducation artistique. Or dans cette circulaire – outil de collaboration locale –, il est fait mention des partenaires : éducation nationale, ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative ; autres administrations de l’État comme la CAF, la mutualité sociale agricole, autres collectivités territoriales, associations.

Où est le ministère de la culture ? Il ne figure parmi les partenaires du projet éducatif territorial que vous mettez en lien avec le parcours d’éducation artistique. Dans vos propres textes, monsieur le ministre, on ne trouve pas trace de cette collaboration indispensable !

M. Patrick Hetzel. Très bien.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Il est tout de même étonnant que vous lisiez une circulaire qui n’a pas été publiée, qui est en cours d’élaboration. Il est évident, madame la députée, que le ministère de la culture y sera mentionné. Vous auriez pu, en faisant preuve d’un peu de bonne volonté, le penser.

Outre cette circulaire en cours d’élaboration, il y en aura une autre pour le parcours d’éducation artistique.

Mais nous sommes un peu à côté du sujet. Je ne sais pas pourquoi vous voulez dresser la culture contre l’éducation nationale.

Mme Annie Genevard. Pas du tout.

M. Vincent Peillon, ministre. J’imagine que c’est parce que vous auriez aimé être à l’initiative de ce parcours.

Il y a un travail étroit entre les deux ministères. La ministre de la culture était présente tout à l’heure. Nous réunirons bientôt les recteurs et les DRAC. Nous voulons une collaboration entre les deux ministères. Nul besoin de la mettre en doute en vous appuyant sur d’hypothétiques intentions.

Mme Annie Genevard. Traduisez-le dans le texte.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Je souscris à la précision introduite par l’amendement du Gouvernement, mais je souhaite que vous clarifiiez un point, monsieur le ministre. Il est évident que les collectivités territoriales, étant à l’initiative des projets éducatifs territoriaux, financeront largement, comme c’est déjà le cas, les actions culturelles et artistiques dans le cadre de ce parcours et dans le temps périscolaire et éducatif.

Mais qu’en est-il dans le cadre de l’apprentissage scolaire ? Les moyens de l’éducation nationale seront-ils renforcés ? Les collectivités locales sont sollicitées en raison même des insuffisances des crédits de l’État – résultat de votre bilan, chers collègues de l’opposition. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Hetzel. Cela faisait longtemps !

Mme Annie Genevard. C’est un comble !

M. Jean-Pierre Blazy. Vous aviez réduit les crédits du ministère de la culture, qui finançaient beaucoup moins, le ministère de la ville étant, lui, mis à contribution.

Mme Annie Genevard. Scandale !

M. Patrick Hetzel. Mensonge ! C’est vous qui avez baissé les crédits de la culture. Tartuferie !

M. Jean-Pierre Blazy. C’est une réalité, chers collègues. Je peux vous communiquer les chiffres concernant mon territoire. Il faudra demain imaginer les choses autrement et prévoir un meilleur financement. Le mauvais bilan, il est de votre côté.

M. Patrick Hetzel. Ce gouvernement est le premier qui baisse les crédits de la culture !

M. Frédéric Reiss. Cela n’a jamais autant baissé !

M. Patrick Hetzel. Depuis Malraux !

M. Jean-Pierre Blazy. S’agissant de la réussite de ce parcours artistique dans le cadre des projets éducatifs territoriaux, pouvez-vous préciser, monsieur le ministre, ce qui relèvera de la responsabilité de l’éducation nationale et de la culture, d’une part, et des collectivités territoriales, d’autre part ? Le partenariat doit être équilibré

(L’amendement n° 1448 est adopté.)

M. le président. En conséquence les amendements nos 882, 883, 512, 758, 1303, 759, 166 et 229 tombent.

(L’article 6, amendé, est adopté.)

Article 6 bis

M. le président. La parole est à Mme Sandrine Mazetier, inscrite sur l’article.

Mme Sandrine Mazetier. Je souhaite évoquer un amendement, jugé irrecevable, qui aurait pu porter sur l’article 7 comme sur l’article précédent. Cet amendement faisait valoir le bénéfice apporté par les séjours de découverte dans les apprentissages et les acquisitions du socle commun de compétences, de connaissances et de culture. Mes collègues membres de la commission des affaires culturelles et de l’éducation ont souhaité amender l’alinéa 90 du rapport annexé à l’article 1er en précisant que l’école devait favoriser les séjours à l’étranger dans le cadre de la priorité donnée à l’apprentissage d’une langue étrangère.

Les séjours de découverte dans nos territoires sont également bénéfiques pour l’acquisition des compétences attendues au terme de la scolarité obligatoire. Dans votre propos liminaire, vous rappeliez, monsieur le ministre, que, dans le processus de développement de chaque enfant, il y a une volonté de décentration. Ces séjours sont l’occasion de découvrir un univers différent, de vivre en groupe, et participent de l’apprentissage de la vie sociale et civique, de l’autonomie et de l’initiative, mis en avant dans les sept compétences du socle commun de connaissances.

Cet amendement, qui n’a pas pu être examiné, n’était pas contradictoire, bien au contraire, avec la volonté affirmée du Gouvernement de reconnaître l’éducation sportive, mais aussi le voyage, la découverte des autres.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Manifestement, si nous avons des difficultés de compréhension avec le Gouvernement, c’est que, d’un côté, il y a des discours et, de l’autre, les actes. Ma collègue Annie Genevard a, à juste titre, montré le décalage entre l’affichage et ce qui se passe réellement sur le terrain. C’est évidemment un classique de l’art de l’exécution. En tout état de cause, nous constatons que ce décalage est abyssal. Nous souhaitons donc un peu moins d’effets de manche et plus d’actions concrètes prenant en compte la réalité quotidienne des établissements. S’il y a un tel écart entre la communauté éducative, les responsables des collectivités territoriales, les enfants et le Gouvernement, c’est parce que cela n’est pas pris en compte alors que, par ailleurs, il s’agit du seul ministère qui bénéficie de créations de postes – 60 000 au cours du quinquennat. Les autres ministères, la culture en particulier, seront soumis à la règle du « deux sur trois », bien plus sévère que le « un sur deux » du temps de Nicolas Sarkozy. Il y a là un vrai paradoxe. De grâce, plus d’effets de manche sur la prétendue valorisation de la culture alors que le ministère de la culture connaîtra une véritable saignée. Depuis Malraux, le budget de la culture n’a jamais autant baissé que depuis que François Hollande est Président de la République. (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Annie Genevard. C’est la réalité !

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Bourguignon.

Mme Brigitte Bourguignon. Je vais tenter d’apporter une note positive.

Monsieur le ministre, je me félicite de l’article 6 bis, qui reconnaît les valeurs du sport scolaire, des pratiques sportives dans la lutte contre l’échec scolaire, pour la réduction des inégalités sociales et culturelles, ainsi que son apport dans l’éducation à la santé.

Affirmer que l’éducation à la santé est une composante du droit à l’éducation est fondamental. Si la santé des jeunes relève de l’interministérialité, nous ne devons pas oublier que, dans notre pays, un enfant sur cinq est en situation de pauvreté, et la santé scolaire et l’éducation à la santé ont leur rôle à jouer.

Les mots ont un sens. Il convient, aux niveaux de la maternelle et du primaire, de parler d’éveil à la pratique sportive et au bien-être corporel. Si cette approche est bonne et non dissuasive, elle pourra donner par la suite à l’enfant le goût de pratiquer une activité sportive et de pousser un jour la porte d’un club ou d’une association. Tel est bien le but d’une éducation sportive. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 1446.

M. Vincent Peillon, ministre. À la fin de l’article 6 bis, la commission a adopté un amendement de l’UMP visant à préciser que l’éducation physique et sportive et le sport scolaire et universitaire contribuaient également « à l’éducation à la santé et à la sécurité ». Curieux ajout : les préoccupations de sécurité, vous le savez, nous tiennent particulièrement à cœur mais il ne nous semble pas qu’elles entrent dans les objectifs de l’éducation physique et sportive et qu’elles doivent se mêler aux questions de santé, qui sont prises pour la première fois en considération.

Nous proposons donc que les mots : « et à la sécurité » soient supprimés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Favorable.

(L’amendement n° 1446 est adopté.)

(L’article 6 bis, amendé, est adopté.)

Après l’article 6 bis

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 1473 rectifié, portant article additionnel après l’article 6 bis.

La parole est à Mme Martine Pinville.

Mme Martine Pinville. Cet amendement vise à préciser le champ de la mission de promotion de santé à l’école.

(L’amendement n° 1473 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Avant l’article 7

M. le président. Nous en venons à une série d’amendements portant articles additionnels avant l’article 7.

La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 812.

M. Philippe Gomes. Cet amendement vise à supprimer le mot « culture » de l’intitulé de la section III : « Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture ».

Le socle de connaissances et de compétences, instauré par la loi Fillon de 2005 et défini par cinq piliers, complétés en 2006 par deux piliers supplémentaires, avait donné lieu à des débats dans notre assemblée sur sa définition et sa mise en œuvre.

Le présent projet de loi évoque un « socle commun de connaissances, de compétences et de culture », sans qu’aucun élément n’ait été porté à la connaissance de notre assemblée sur ses contours réels. Pour cette raison, nous souhaitons en rester à la rédaction originelle.

(L’amendement n° 812, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 90 et 1159.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 90.

M. Patrick Hetzel. Les comportements et les références culturelles se formant dès le plus jeune âge, l’enseignement peut contribuer de manière déterminante à la réussite du défi entrepreneurial. Le Gouvernement lui-même a évoqué à plusieurs reprises l’enjeu que constituait la compétitivité de notre économie et de nos industries.

L’enseignement doit ainsi sensibiliser dès le plus jeune âge à l’esprit d’entreprise. Dès les années quatre-vingt – et ce n’est pas une référence habituelle pour le côté droit de cet hémicycle –, Jean-Pierre Chevènement dans son ouvrage Apprendre pour entreprendre indiquait qu’il s’agissait là d’un point essentiel.

L’initiation des jeunes contribue à développer leur créativité, leur esprit d’initiative, leur confiance en eux dans ce qu’ils entreprennent et les incite à se comporter d’une manière socialement responsable.

Plus que jamais, il importe d’encourager nos jeunes à devenir les entrepreneurs de demain, car c’est ainsi que l’on peut préparer l’avenir de la France. L’intérêt de la formation à l’entrepreneuriat ne se limite toutefois pas à l’accroissement du nombre de nouvelles entreprises. L’esprit d’entreprise est une aptitude qui doit être largement diffusée dans notre société, bien au-delà des limites du monde économique.

L’apprentissage par l’expérience pratique – par exemple, par la création et la gestion de mini-entreprises par des élèves ou étudiants – constitue un moyen des plus efficaces pour stimuler l’esprit d’entreprise et développer chez les jeunes les compétences entrepreneuriales. Ainsi, près de 20 % des jeunes participant aux activités d’une mini-entreprise dans l’enseignement secondaire créent leur propre entreprise au terme de leurs études.

En France, le nombre de lycéens désirant créer une entreprise est très faible et nos problèmes sont liés en partie à cette situation. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour défendre l’amendement n° 1159.

Mme Annie Genevard. Il y a quelques années, un sondage a montré que 70 % des jeunes interrogés sur leurs souhaits professionnels désiraient intégrer la fonction publique. Les commentateurs s’étaient alors émus du fait que cette génération se détourne si massivement du secteur privé et préfère au désir d’entreprendre la protection durable qu’apporte la fonction publique.

Loin de moi l’idée que ce désir d’entreprendre n’existe pas dans la fonction publique : celle-ci compte fort heureusement des personnes qui ont l’esprit d’entreprise mais on ne peut pas dire non plus que ce soit sa principale caractéristique.

Initier les jeunes au bonheur que peut apporter dans une vie la création d’une entreprise, l’engagement dans l’acte d’entreprendre, la carrière dans une entreprise que l’on crée ou que l’on contribue à créer me semble important. Il n’y a pas de grands pays sans tissu entrepreneurial fort et actif, dans lequel les jeunes puissent voir matière à accomplissement personnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 90 et 1159 ?

M. Yves Durand, rapporteur. Madame Genevard, l’alinéa 4 de l’article 2 précise déjà que la formation scolaire « favorise l’esprit d’initiative ».

Mme Annie Genevard. Ce n’est pas pareil.

M. Yves Durand, rapporteur. Je crois que l’esprit d’entreprendre est dans l’esprit d’initiative.

Par ailleurs, le futur parcours individuel d’information, d’orientation, de découverte du monde économique et professionnel permettra d’aborder le concept de l’entreprise et de l’entrepreneuriat, ce qui stimulera l’envie d’acquérir l’esprit d’entreprise.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même argumentation, même avis.

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Il est vrai que dans notre pays, il y a un problème entre les jeunes et l’entreprise mais il s’explique moins par le fait que les jeunes ne veulent pas se tourner vers l’entreprise que par le nombre d’obstacles que l’entreprise met à leur entrée.

Voyez le nombre de jeunes qui viennent dans nos permanences parce qu’ils cherchent désespérément un stage en entreprise et qu’aucune porte ne s’ouvre pour leur permettre de l’effectuer. Quelle image cela leur donne de l’entreprise !

Quand des jeunes, alors même qu’ils ont des diplômes, se voient proposer des sous-salaires, des emplois extrêmement précaires, quelle image cela leur donne de l’entreprise !

Je pense qu’il faut aussi que les entreprises s’ouvrent à la jeunesse de notre pays.

Par ailleurs, je tiens à dire qu’entreprendre ne se résume pas à entreprendre dans l’économie, même si c’est très important. Un jeune peut avoir envie d’entreprendre dans le domaine culturel, dans le domaine social, dans le domaine associatif, dans le domaine institutionnel, dans le domaine écologique. Mais pour qu’il ait envie d’entreprendre, il faut qu’il sente qu’il a les compétences, la maîtrise et les connaissances nécessaires. Tout cela demande qu’on l’accompagne le plus loin possible dans une culture commune grâce à l’éducation nationale.

Ce désir d’entreprise, j’ai l’impression que vous le contrariez par votre volonté toujours réaffirmée d’instaurer une orientation précoce. Oui, « entreprendre » est un beau mot, mais il faut donner à l’individu les moyens de le faire vivre.

Mme Isabelle Attard. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. J’entends ce que vous dites, madame Buffet. Ce qui nous différencie dans le rapport que nous avons à la société, c’est un point crucial. Évidemment, il est toujours possible de développer une vision négative de l’entreprise même si nous pensons qu’il ne faut pas le faire. Nous préférons insister sur l’esprit d’entreprise. J’ai eu la chance d’enseigner dans une cinquantaine de pays à travers le monde et d’échanger avec des jeunes : ce qui frappe lorsque l’on discute avec eux, c’est qu’ils sont très nombreux à vouloir créer leur propre emploi et leur propre entreprise. Or vos propos laissent penser que l’emploi serait extérieur à l’individu.

La philosophie que je cherche à défendre consiste à montrer que les jeunes peuvent être eux-mêmes porteurs, voire créateurs de leur propre emploi dans tous les domaines possibles, que ce soit l’économie, l’économie sociale ou l’environnement. Il faut tout faire pour qu’ils puissent se rendre compte par eux-mêmes qu’ils ont la possibilité de prendre leur destin en main. Les chances de trouver un emploi ne dépendent pas de facteurs exogènes mais de facteurs intrinsèques à l’individu lui-même. Et ce sont ces facteurs qu’il faut essayer de stimuler.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. J’ai défendu hier des amendements visant à ce que les ESPE ne soient pas recroquevillées sur elles-mêmes et s’ouvrent au monde économique. Ces amendements s’inscrivant dans cette perspective, je les soutiens.

(Les amendements identiques nos 90 et 1159 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Martine Martinel, pour soutenir l’amendement n° 1338.

Mme Martine Martinel. Je le retire.

(L’amendement n° 1338 est retiré.)

Article 7

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 7.

La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. La notion de socle commun de connaissances et de compétences est une innovation majeure de la loi Fillon de 2005 qui a permis de définir dans la loi le bagage minimum que l’État doit garantir à chaque élève – et j’insiste sur les termes de « chaque élève » – à l’issue de sa scolarité obligatoire.

La nouvelle rédaction proposée pour l’article L. 122-1 du code de l’éducation renvoie à un décret la définition des éléments de ce socle commun. Certes, je ne vais pas contester le pouvoir réglementaire des ministres, mais j’estime qu’il est important de laisser gravés dans le marbre de la loi certains éléments dont tout jeune Français doit avoir la maîtrise : la maîtrise de la langue française, la maîtrise des principaux éléments de mathématiques, une culture humaniste et scientifique permettant le libre exercice de la citoyenneté, la pratique d’au moins une langue vivante étrangère, la maîtrise des techniques usuelles de l’information et de la communication.

Le Gouvernement a fait le choix de légiférer dans le domaine éducatif et nous considérons que ces éléments doivent relever, non pas de la réglementation, même s’ils font l’objet d’un décret, mais de la loi. Il faut qu’ils restent inscrits dans le code de l’éducation.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. J’ai indiqué lors de la discussion générale que l’article 7 se trouve véritablement au cœur de ce projet de loi, et reprend – heureusement ! – ce qui constituait l’innovation majeure de la loi Fillon de 2005. Dans un monde où tout va très vite, parfois trop vite, la réduction des inégalités passe par l’acquisition d’un socle commun de connaissances et de compétences indispensables.

Depuis l’introduction de l’obligation scolaire, les principes d’égalité des chances et d’égalité de traitement ont guidé les politiques éducatives pour éviter les échecs. C’est bien là le but même de ce socle. Son contenu ne doit naturellement pas se substituer aux programmes des écoles et des collègues : nous sommes d’accord sur ce point, et je me réjouis même que nous étudiions cette articulation.

Pour une fois, je souhaite apporter une nuance aux propos de Patrick Hetzel : je ne parlerai pas de bagage minimum, mais plutôt de ce qu’aucun élève n’est censé ignorer à la fin d’une scolarité obligatoire, ce qui n’est pas tout à fait la même chose.

M. Vincent Peillon, ministre. Vous avez raison !

Mme Martine Faure. C’est mieux, en effet !

M. Frédéric Reiss. La maîtrise de ce socle permet non seulement de poursuivre les études, cela a été rappelé dans le rapport annexé, mais également de trouver sa place dans la société, et notamment dans le monde de l’entreprise, qui nous tient à cœur.

De plus, ce socle correspond à ce qu’il faut connaître pour avoir ensuite la garantie de bénéficier de la formation continue qui doit être offerte à chacun durant sa vie.

Pour revenir un instant sur les amendements présentés par Mme Olivier tout à l’heure, il est évident qu’au sein de ce socle, la culture scientifique et technique est très importante ; Patrick Hetzel vient d’en rappeler les piliers. Il faut en outre des évaluations pour déterminer les évolutions de la population scolaire et définir les moyens d’atteindre les objectifs.

Pour conclure, je me réjouis de la formulation de la première phrase du troisième alinéa : « La scolarité obligatoire doit au moins garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l’acquisition d’un socle commun de connaissances, de compétences et de culture ».

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 77, 1114, 1160 et 1258, tendant à supprimer l’article 7.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 77.

M. Patrick Hetzel. Je souhaite revenir sur la question spécifique de l’évaluation.

Dans sa rédaction actuelle, l’article 7 supprime la notion d’évaluation du socle. Or, si l’on examine les publications du Haut conseil de l’éducation, auquel il est souvent fait référence – notamment pour indiquer que lui-même souhaite évoluer vers une organisation bicéphale –, l’on constate que, dans son avis sur le projet de loi, le HCE préconise que l’acquisition du socle commun fasse l’objet d’une évaluation, et précise qu’il en va de « l’intérêt des élèves et [qu’il s’agit d’une] nécessité pour les enseignants, si l’on veut que les objectifs fixés par la nation soient atteints ».

Il s’agit donc bien d’un sujet de politique publique. Nous demandons la suppression de cet article dans sa rédaction actuelle, car nous pensons que la rédaction précédente non seulement est plus précise, mais permet surtout de fixer les orientations d’une politique publique et de s’assurer que l’on a la possibilité de procéder à son évaluation. Le HCE a fortement insisté sur ce point.

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l’amendement n° 1114.

Mme Marianne Dubois. La notion de socle commun de connaissances et de compétences est une innovation majeure de la loi Fillon de 2005, qui a permis de définir dans la loi le bagage minimum que l’État garantit à chaque élève à l’issue de sa scolarité obligatoire.

La nouvelle rédaction proposée de l’article L122-1-1 renvoie à un décret la définition des éléments de ce socle commun.

Il s’agit ici de réintégrer ce qui doit rester inscrit dans le marbre de la loi. Le socle commun doit en effet comprendre, comme cela avait été défini, la maîtrise de la langue française, la maîtrise des principaux éléments de mathématiques, une culture humaniste et scientifique permettant le libre exercice de la citoyenneté, la pratique d’au moins une langue vivante étrangère, ainsi que la maîtrise des techniques usuelles de l’information et de la communication.

En outre, la rédaction actuelle de l’article 7 supprime la notion d’évaluation du socle. Or comme le rappelle le Haut conseil de l’éducation dans son avis sur le projet de loi, l’acquisition du socle commun doit faire l’objet d’une évaluation. Il en va de « l’intérêt des élèves, et [d’une] nécessité pour les enseignants si l’on veut que les objectifs fixés par la nation soient atteints ».

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 1160.

Mme Annie Genevard. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 1258.

M. Philippe Gomes. Tout au long des débats, aussi bien sur le rapport annexé que sur les articles du projet de loi, nous avons discuté de nombreux sujets, certains d’importance, d’autres d’un intérêt plus relatif ; certains relevant du domaine législatif, d’autres dont on pouvait se demander s’ils ne relevaient pas du domaine du décret, de l’arrêté, voire de la circulaire.

Or concernant le socle commun de connaissances et de compétences – rappelons qu’il constitue l’innovation majeure de la loi Fillon de 2005, de même que les cycles étaient l’innovation majeure de la loi Jospin de 1989 –, l’on nous dit désormais que le législateur n’est en rien concerné et que cela ne relève pas de sa compétence. Tout juste lui a-t-on permis de compléter le titre, en ajoutant « culture » à « connaissances et compétences » ; pour le reste, on lui dit : « Laissez-nous faire et contentez-vous de choisir la couleur du papier : on verra ce qu’on mettra dans le paquet cadeau ! »

M. Patrick Hetzel. Très juste !

M. Philippe Gomes. Je trouve cela totalement hallucinant ! Sur l’essentiel, le fondement, à savoir le socle, nous n’avons pas le droit de nous exprimer !

Pensant que peut-être quelque chose m’échappait, ou que je n’avais probablement pas tout lu, j’ai donc cherché attentivement et trouvé l’argumentation du rapporteur. Celui-ci nous explique avec beaucoup de franchise qu’en 2005, il était favorable à ce que le socle soit défini dans la loi, mais que, sept ans plus tard, il ne l’est plus, pour deux raisons.

M. Yves Durand, rapporteur. Je n’ai jamais dit ça !

M. Philippe Gomes. La première raison est que le socle doit être évolutif – dix ans après son adoption, il n’est toujours pas mis en œuvre, mais il doit être évolutif !

M. Yves Durand, rapporteur. C’est précisément pour cela qu’il ne faut pas le figer dans la loi !

M. Philippe Gomes. La deuxième raison est que, si les députés intervenaient et faisaient des propositions, cela créerait des difficultés car ils seraient susceptibles de répondre à des demandes catégorielles – je cite les termes du compte rendu.

Aucun de ces deux arguments n’est recevable. Si les cinq piliers du socle – ou plutôt sept, puisqu’ils ont été complétés par un décret pris en 2006 par M. de Robien – doivent être modifiés, ce que l’on peut comprendre, alors il faut modifier l’article de la loi et en expliquer les raisons au Parlement.

Par ailleurs, on peut comprendre qu’actuellement, le socle ne soit pas satisfaisant, tant dans sa définition que dans son articulation avec les programmes et les cycles. Mais se passer d’un débat au Parlement n’est sain ni pour notre démocratie, ni pour notre système éducatif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable. Il n’a jamais été question de supprimer le socle, bien au contraire. J’ai rappelé dans le rapport que l’idée d’un socle est une idée ancienne : elle date des années soixante, puis a été inscrite dans la loi Fillon, et nous la confirmons aujourd’hui.

L’objet de cet article est de réaffirmer la nécessité du socle et de rendre ce dernier efficace, c’est-à-dire évolutif, ainsi que vous l’avez rappelé, monsieur Gomes. Or pour qu’il soit évolutif, il ne faut pas le figer ; et pour ne pas le figer, il ne faut pas l’inscrire dans le marbre de la loi.

Du reste, l’expérience nous l’a démontré : en 2005, nous avons longuement discuté – des nuits entières ! – de ce que devait contenir le socle, en déterminant cinq piliers de compétences.

M. Patrick Hetzel. Nous respections le Parlement à l’époque !

M. Vincent Peillon, ministre. Mais après, vous êtes intervenus par décret !

M. Yves Durand, rapporteur. Quelque temps après, le Haut conseil de l’éducation est revenu dessus, en ajoutant deux piliers.

En conséquence, on comprend aisément que si l’on fige cela dans la loi, on est obligé de se contredire soi-même. Le but de cet article est donc tout simplement de confirmer le socle, de le rendre plus efficace en définissant au mieux les connaissances, les compétences et la culture que l’on doit faire acquérir aux jeunes élèves.

Voilà pourquoi nous sommes défavorables à la suppression de l’article 7.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Je me réjouis tout d’abord que nous abordions là une question pédagogique centrale, dans un état d’esprit permettant d’aller à l’essentiel, comme M. Reiss l’a démontré.

Il y a tout d’abord de faux arguments. Ainsi, expliquer que l’on va supprimer l’évaluation démontre que l’on n’a pas lu le texte ni même compris le travail législatif que nous menons.

M. Patrick Hetzel. Ce n’est pas de cela que nous parlons !

M. Vincent Peillon, ministre. L’alinéa qui dispose que « l’acquisition du socle commun par les élèves fait l’objet d’une évaluation prise en compte dans la poursuite de la scolarité » ne fait pas partie des alinéas que nous avons modifiés. Nous conservons donc l’idée qu’une évaluation est nécessaire.

Par ailleurs, nous essayons tout de même de tirer les leçons de l’expérience, ainsi que M. le rapporteur vient de le rappeler. Pour ma part, je ne suis pas du tout défavorable à ce que les parlementaires soient associés : je le propose d’ailleurs moi-même pour l’évaluation et pour le Conseil supérieur des programmes, ce qui n’était pas le cas à ce jour. Ces discussions auront donc lieu.

Mais vous devriez vous montrer plus modestes. Dois-je vous rappeler l’article L.122-1-1 du code de l’éducation, qui dispose que « le Gouvernement présente tous les trois ans au Parlement un rapport sur la manière dont les programmes prennent en compte le socle commun et sur la maîtrise de celui-ci par les élèves au cours de leur scolarité obligatoire » ? Vous m’enverrez ce rapport, parce que je ne l’ai encore jamais reçu ! Autrement dit, le respect du Parlement sur les questions de contenu a déjà été contourné par la précédente majorité.

En revanche, nous avions besoin, et c’est absolument déterminant, d’avancer dans la consolidation du socle, afin qu’il devienne le véritable patrimoine commun de l’école française et qu’il permette des évolutions ultérieures – que certains d’entre vous appellent comme nous de leurs vœux ; mais ces évolutions sont lentes.

Nous devons être capables, vous l’avez vous-mêmes souligné à plusieurs reprises, de convaincre également ceux qui sont chargés de le mettre en œuvre, c’est-à-dire les enseignants.

Nous avons tous fait l’analyse finalement simple des difficultés qu’il fallait lever. Nous devons d’abord rassurer tous ceux, très nombreux, qui considéraient que le socle pouvait être interprété comme un minimum, voire un « SMIC culturel », comme j’ai pu l’entendre. Nous avons vu beaucoup de professeurs résister à sa mise en œuvre. Il fallait donc mener le combat pour montrer que le socle est, au contraire, un tremplin, une exigence que la nation s’impose pour chacun de ses enfants, afin qu’ils puissent avancer.

Cela méritait d’être précisé car, comme vous le savez, ces débats sont encore très vifs dans le monde enseignant. Nous avons donc réussi là un début de rassemblement intéressant, avec des personnes qui jusque-là y étaient défavorables.

Une difficulté se dresse devant nous, que j’ai évoquée à plusieurs reprises et que vous avez vous-même à l’instant rappelée : comment mieux articuler notre socle avec les programmes, et mettre ensuite véritablement en œuvre l’évaluation de ce socle ?

Je ne vois aucune raison, dans les arguments que vous avez développés, de nous accuser de vouloir contourner le Parlement : nous tirons des leçons collectives et nous associerons le Parlement car nous avons besoin sur ces questions d’un débat public, lequel a d’ailleurs déjà permis des évolutions.

Des tâches importantes nous attendent. Je ne sais pas si nous avons de réels désaccords sur la priorité au primaire ou la formation des enseignants, mais je ne vois pas pourquoi, sur ce sujet, il régnerait un esprit de polémique.

Vous nous avez accusés tout à l’heure, monsieur Hetzel, de refuser le rassemblement ; or c’est exactement l’inverse ! Je répète donc ce que je dis depuis le début du débat : sur nombre de sujets que nous traitons, nous pouvons nous rassembler.

Ne pas se rassembler sur l’article consacré au socle enverrait un curieux message !

M. Patrick Bloche, président de la commission. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Je remercie M. le ministre pour sa réponse très complète. Nous n’avons pas toujours eu ce bonheur sur d’autres amendements !

Je souhaite également dire que nous ne boudons pas notre plaisir d’entendre dire que la majorité précédente a tout de même réalisé de bonnes choses, car on nous accuse le plus souvent d’avoir un bilan désastreux. Pour une fois, la droite a donc fait œuvre utile !

Nous aurions naturellement souhaité conserver la rédaction actuelle de l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation. Nous ne nions d’ailleurs pas les difficultés liées à la mise en œuvre de ce socle, qui en effet, dans les écoles, a nécessité du temps pour convaincre les esprits.

Pour faire ce genre de choses, nous avons besoin de temps ! Comme plusieurs de mes collègues l’ont déjà dit, ce que nous reprochons aussi un peu à ce projet de loi de refondation de l’école, c’est l’idée que ce qui est décrété un jour pourrait être mis en application dès le lendemain. À la limite, on peut y arriver en publiant des circulaires, mais on ne peut procéder de la sorte au niveau législatif.

Je voudrais dire aussi combien le dialogue avec les familles au sujet du socle est important, car il permet de savoir quels élèves ont besoin d’une aide personnalisée.

Je terminerai en reprenant l’image employée par M. Gomes tout à l’heure par plaisanterie : celle du « paquet cadeau ». Je pense très sincèrement que le plus beau cadeau que l’on puisse offrir à des élèves, c’est ce socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Cela permettra à chacun d’entre eux d’entamer sa vie sous les meilleurs auspices. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Monsieur le président, je me permets d’intervenir à nouveau car ce sujet est sensible. J’ai écouté avec attention les observations du ministre sur cette question. La loi de 2005 utilise une seule fois le terme de « refondation » : c’est à propos du socle commun de connaissances et de compétences. Dans ce cas, monsieur le ministre, ce terme était utilisé à très juste titre ! Il correspondait tout à fait à l’acte accompli par le législateur en adoptant cette loi. Il pourrait, au même titre, être appliqué à la loi d’orientation sur l’éducation de 1989, dite loi Jospin, organisant la scolarité en plusieurs cycles.

En l’espèce, vous supprimez cet acte refondateur de la loi Fillon du corpus législatif et vous nous annoncez qu’un décret définira ces aspects. Je comprends l’argument selon lequel ce nouveau système permettra une plus grande souplesse. Nous avons bien compris que le socle était complexe, qu’il était mal articulé avec les programmes, que l’accompagnement pédagogique des enseignants était insuffisant, et que le discours de l’éducation nationale variait en fonction des inspecteurs. Nous sommes d’accord avec vous sur tous ces points ! Mais il ne me semble pas exorbitant que l’Assemblée nationale fixe dans la loi les trois, cinq, six ou sept piliers du socle. Cela ne me semble pas contraire à notre ordonnancement juridique.

Voilà pourquoi je considère que la suppression de la rédaction originelle de l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation, issue de la loi Fillon de 2005, n’est pas une bonne chose.

(Les amendements identiques nos 77, 1114, 1160 et 1258 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 400.

Mme Annie Genevard. Défendu.

(L’amendement n° 400, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 671 et 1164, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 671.

M. Frédéric Reiss. Permettez-moi de dire quelques mots de cet amendement. Ce qui me dérange, avec l’article 7, c’est que nous devons attendre que l’exécutif prenne un décret. J’ai bien compris que le Conseil national des programmes jouera un rôle essentiel dans ce processus. Toutefois, je crois que des choses méritent d’êtres dites par le législateur. Ainsi il est important de faire figurer explicitement dans la loi, parmi les objectifs du socle commun, le fait que la scolarité doit garantir à chaque élève « de savoir s’exprimer » – je pense à cet égard à ce qui est fait à l’école maternelle – « lire, écrire et compter » à la fin de l’école élémentaire. Je pense que cette précision serait utile.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 1164.

Mme Annie Genevard. Défendu.

(Les amendements nos 671 et 1164, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 435 et 917.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 435.

M. Patrick Hetzel. Défendu.

M. le président. L’amendement n° 917 est défendu.

(Les amendements identiques nos 435 et 917, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 1280 est défendu.

(L’amendement n° 1280, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 91, 1163 et 1260.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 91.

M. Patrick Hetzel. Défendu.

M. le président. L’amendement n° 1163 l’est également, madame Genevard ?

Mme Annie Genevard. Oui, monsieur le président.

M. le président. De même que l’amendement n° 1260, monsieur Gomes ?

M. Philippe Gomes. Oui.

(Les amendements identiques nos 91, 1163 et 1260, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 1161.

Mme Annie Genevard. Défendu.

(L’amendement n° 1161, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 1022, 1261 et 167, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l’amendement n° 1022.

M. Benoist Apparu. Défendu.

M. le président. L’amendement n° 1261 l’est-il également, monsieur Gomes ?

M. Philippe Gomes. Oui.

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 167.

Mme Barbara Pompili. Je reviendrai brièvement sur le débat qui a eu lieu au moment de l’examen des amendements précédents défendus par l’opposition. La rédaction de l’article définissant le socle commun de connaissances et de compétences, issue de la loi de 2005, identifiait des compétences clés, qui reprenaient les recommandations du Parlement européen.

On a décidé de supprimer la mention de ces compétences. Je trouve cela dommage, d’autant plus que, bien loin de les supprimer, nous aurions dû ajouter d’autres compétences clés recommandées par le Parlement européen, qui ne figuraient pas dans la loi de 2005. En effet, celles-ci sont tout à fait conformes à l’esprit du projet de loi, puisqu’il s’agit des compétences très importantes désignées par l’expression « apprendre à apprendre », qui sont vraiment au cœur de ce que nous cherchons, et des compétences sociales et civiques.

Certains amendements, notamment l’amendement n° 400 de M. Apparu, visaient également à réintégrer les compétences clés telles que recommandées par le Parlement européen, mais ils retenaient l’esprit d’initiative et d’entreprise, en oubliant les compétences « apprendre à apprendre » et les compétences sociales et civiques. On voit bien que c’est orienté !

M. Vincent Peillon, ministre. Oh ! (Sourires.)

Mme Barbara Pompili. Plutôt que de faire son marché dans la liste du Parlement européen, il serait plus conforme à l’esprit de la construction européenne que le socle commun soit identique dans tous les pays de l’Union européenne. Ce serait plutôt une bonne chose, car cela permettrait d’avancer vers une Europe fédérale plus intégrée, et pas seulement au niveau financier.

Je trouve donc qu’il est dommage de ne plus faire référence à ces compétences.

M. Patrick Hetzel. Ce n’est pas nous qui le proposons !

Mme Barbara Pompili. C’est pourquoi je propose, au moyen de cet amendement, de mentionner dans la loi toutes les compétences proposées par le Parlement européen, et pas uniquement celles qui plaisent à certains et pas à d’autres.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements soumis à une discussion commune ?

M. Yves Durand, rapporteur. La commission a donné un avis défavorable à ces trois amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Nous en revenons à la discussion générale : il s’agit là d’un choix de méthode. Nous avons examiné rapidement les autres amendements qui traitaient de cette question. Je comprends le souhait exprimé par certains. L’expérience montre, à mon avis, que cette discussion devrait avoir lieu au sein du Conseil national des programmes, avec la présence de parlementaires.

Je ne suis donc pas, sur le fond, opposé à votre proposition, madame Pompili ; simplement, nous n’avons pas choisi cette méthode. Je préférerais donc que vous retiriez votre amendement. En contrepartie, je vous assure que les compétences définies au niveau européen seront prises en compte.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Je soutiens l’amendement de Mme Pompili, car il n’est pas très contraignant. Il propose d’inscrire dans le projet de loi le fait que les éléments du socle commun fixés par décret « se réfèrent notamment à la recommandation du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 sur les compétences clés pour l’éducation et la formation tout au long de la vie. » Il faut bien lire cet amendement. Les éléments du socle commun « se réfèrent notamment à… » : on ne risque pas grand-chose ! On n’est pas mis le dos au mur ! Mme Pompili a vraiment été extrêmement douce dans cette rédaction.

Nous dira-t-on que, si cet amendement était adopté, le dispositif manquerait de souplesse ? Non, soyons sérieux ! Ce serait le minimum minimorum. Si nous l’adoptions, nous resterions fidèles à l’esprit de la loi Fillon de 2005, qui elle-même a été conçue et mise en œuvre, à l’époque, dans le respect des recommandations du Parlement européen.

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili.

Mme Barbara Pompili. J’ai bien entendu les assurances de M. le ministre. Nous sommes des européistes convaincus. Je retire donc mon amendement n° 167.

(L’amendement n° 167 est retiré.)

(Les amendements nos 1022 et 1261, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 1162.

Mme Annie Genevard. Défendu.

(L’amendement n° 1162, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 1262 rectifié, 15 rectifié et 1165, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 15 rectifié et 1165 sont identiques.

La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 1262 rectifié.

M. Philippe Gomes. Défendu.

M. le président. L’amendement n° 15 rectifié l’est également.

Madame Genevard, l’amendement n° 1165 est-il défendu ?

Mme Annie Genevard. Oui, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements en discussion commune ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

(L’amendement n° 1262 rectifié n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 15 rectifié et 1165 ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 362 est défendu.

(L’amendement n° 362, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 672.

M. Frédéric Reiss. Je ne comprends pas pourquoi le projet de loi prévoit la suppression du mot « obligatoire » à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation. À l’alinéa précédent, on parle pourtant bien de la « scolarité obligatoire » ! L’objectif étant la maîtrise par les élèves du socle commun au cours de leur scolarité, il importe de maintenir l’expression « scolarité obligatoire ». Ils ont en effet besoin de ce socle. Il faut donc qu’il soit maîtrisé jusqu’à la fin de la scolarité obligatoire, quel que soit le parcours des élèves.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Cet amendement est déjà satisfait, puisqu’à la première ligne de l’alinéa 3 de l’article 7 du projet de loi, il est bien précisé que « la scolarité obligatoire doit au moins garantir à chaque élève… ».

M. Frédéric Reiss. Mais non ! Ce n’est pas la même chose !

M. Yves Durand. Le socle étant celui de la scolarité obligatoire, il est nécessairement obligatoire lui-même !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Il importe de distinguer deux éléments. D’abord, dans le cadre de la scolarité obligatoire, la maîtrise du socle commun de connaissances, de compétences et de culture doit être garantie à chacun. Ensuite, nous devons également garantir la maîtrise de ce socle à ceux qui ne l’auraient pas acquise et qui ont dépassé l’âge de la scolarité obligatoire. C’est pourquoi nous proposons de supprimer le mot « obligatoire » à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 122-1-1 du code de l’éducation.

Nous couvrons ainsi les deux catégories d’élèves. Nous devons garantir à chacun la maîtrise du socle au cours de la scolarité obligatoire, mais aussi aux jeunes hommes et jeunes femmes qui n’ont pas acquis ce socle au cours de la scolarité obligatoire. Nous devons trouver les moyens de le faire acquérir aux élèves de plus de 16 ans.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. C’est à l’article L. 122-1-1 qu’est prévu le fameux rapport qui doit être présenté au Parlement tous les trois ans, afin de présenter l’état de la mise en œuvre du socle commun, et d’autres actions du même acabit.

M. Vincent Peillon, ministre. C’est une belle enveloppe !

M. Philippe Gomes. C’est une superbe enveloppe. Comme quoi les enveloppes peuvent parfois se faire concurrence !

Nous ne pouvons pas délibérer sur le contenu du socle commun, et n’avons pas d’idée de son architecture. Nous en sommes limités au titre. Soit : la majorité en a décidé ainsi. Je souhaite donc au moins qu’un rapport spécifique soit rendu à la commission des affaires culturelles, ou au Parlement, sur le travail accompli en la matière, comprenant l’avis du Conseil national des programmes. Un engagement du Gouvernement en ce sens suffirait.

La représentation nationale doit être informée du nouveau socle lorsqu’il aura été adopté, et de son articulation avec les programmes. Nous ne pouvons pas attendre trois ans avant la remise d’un rapport sur la manière dont ce socle est concrètement enseigné dans nos écoles. Cela nous emmènerait peut-être au-delà de 2017 !

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. C’est un point tout à fait important.

Nous avons d’ailleurs prévu qu’outre la participation, inédite à ce jour, des parlementaires au Conseil supérieur des programmes, celui-ci remettra chaque année au ministre un rapport, qui sera, ensuite, transmis au Parlement. C’est l’objet du texte proposé pour l’article L. 236-16 du code de l’éducation. Il est, en effet, tout à fait essentiel de disposer d’un rapport annuel pour suivre des travaux essentiels. En effet, c’est bien à partir de la définition des nouveaux programmes, de l’articulation avec le socle et, enfin, de l’évaluation que nous parviendrons ou non à mettre en œuvre le dispositif est souhaité par tous sur les bancs de cette assemblée.

(L’amendement n° 672 n’est pas adopté.)

(L’article 7 est adopté.)

Article 8

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, inscrit sur l’article.

M. Patrick Hetzel. Je reviendrai sur un point dont nous avons débattu lorsque nous avons examiné le rapport annexé, car il me semble suffisamment important pour qu’il soit de nouveau évoqué à l’article 8.

Le Gouvernement a rédigé ainsi le cinquième alinéa de cet article : « Tout jeune sortant du système éducatif sans diplôme bénéficie d’une durée complémentaire de formation qualifiante […] » L’idée sous-tendue ici serait que la formation qualifiante serait une fin en soi. Si la formation qualifiante est évidemment un objectif à viser, elle n’a de sens, a fortiori pour des jeunes sortis du système éducatif, que si elle est mise en perspective avec l’insertion professionnelle. C’est la raison pour laquelle il est important de considérer l’insertion professionnelle chaque fois que l’on aborde la question de la formation qualifiante.

(L’article 8 est adopté.)

Article 9

M. le président. Sur l’article 9, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Lorsque l’on compare la rédaction initiale, qui était satisfaisante, et celle issue des travaux de notre commission, on constate que trois mots ont été supprimés. J’aimerais en comprendre la raison.

En effet, monsieur le ministre, vous aviez souhaité ajouter à l’article L. 131-1 du code de l’éducation les mots : « son sens moral et son esprit critique », l’article 9 se trouvant ainsi rédigé : « Le droit de l’enfant à l’instruction a pour objet de lui garantir, d’une part, l’acquisition des instruments fondamentaux du savoir, des connaissances de base, des éléments de la culture générale et, selon les choix, de la formation professionnelle et technique et, d’autre part, l’éducation lui permettant de développer sa personnalité, son sens moral et son esprit critique, d’élever son niveau de formation initiale et continue, de s’insérer dans la vie sociale et professionnelle et d’exercer sa citoyenneté. » Ce très bel article est fondamental.

Pourquoi avoir conservé « l’esprit critique » et supprimé « le sens moral » ? Je répète ce que je vous ai dit, hier, il me semble que vous ressentez quelque gêne face à cette question de la morale. Lorsque nous avons débattu, hier, de la morale laïque, je vous ai dit que vous aviez ajouté le mot « laïque », parce que ne parler que de morale vous embarrassait. Or le « sens moral » disparaît de la rédaction de cet article. Je trouve cela dommage.

M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. Vous n’avez pas le monopole de la morale, madame Genevard ! (Sourires.)

Mme Annie Genevard. Oh, je ne prétends par l’avoir, cher président !

Je m’interroge d’autant plus que ce n’est pas nous, mais le Gouvernement qui a été à l’initiative de l’introduction de ces mots !

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Je serai très bref.

M. le président de la commission vient de préciser, avec raison, que nous n’avons évidemment pas le monopole du sens moral. Toutefois, la réciproque est également vraie ! Il est clair que, sur de tels sujets, nous devrions être d’accord. Nous sommes assez étonnés que le sens moral disparaisse, et ce d’autant plus que nous avons beaucoup débattu, hier, du point de savoir s’il était pertinent de parler de « morale laïque ». Nous vous avons alors dit que nous étions très favorables à ce que l’on évoque la morale, d’une part, et la laïcité d’autre part, mais que nous étions plus dubitatifs quant à la nécessité de parler de « morale laïque », ce qui nous semble être une vision quelque peu restrictive. La morale, oui ; la laïcité, oui ; la morale laïque est un peu plus discutable.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Le Gouvernement fait preuve d’une certaine obstination, puisqu’il présentera à cet article un amendement visant à insérer, après la première occurrence du mot : « mots », les mots : « son sens moral ».

Comme vous le souhaitez, nous rétablissons donc le texte. Vous pouvez donc constater que le sens moral ne nous gêne aucunement ! Et il ne s’agit pas de « sens moral laïc ».

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 875.

Mme Annie Genevard. Défendu !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. « Le but de l’instruction n’est pas de faire admirer aux hommes une législation toute faite, mais de les rendre capables de l’apprécier et de la corriger. » Cette citation est de Condorcet,…

M. Patrick Hetzel. C’est très beau !

M. Yves Durand, rapporteur. …lequel est, je le crois, aux sources mêmes de l’éducation. Cette citation justifie à elle seule l’avis de la commission, qui propose le rejet de cet amendement de suppression.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Je ne peux faire autrement que suivre M. le rapporteur !

(L’amendement n° 875 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 78 et 673, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour présenter l’amendement n° 78.

M. Patrick Hetzel. Défendu !

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 673.

M. Frédéric Reiss. Les choix éducatifs des parents doivent être respectés et doivent donc être mentionnés dans l’article 9. Nous proposons donc, par cet amendement, de rédiger ainsi la fin de l’article 9 : « dans le respect des choix éducatifs de ses parents, l’éducation lui permettant de développer sa personnalité, son sens moral et son esprit critique ». Nous avons eu ce débat hier. Nous voulons continuer à nous référer à l’esprit de Jules Ferry qui, dans sa lettre aux instituteurs, parlait des « règles élémentaires de la vie morale qui ne sont pas moins universellement acceptées que celles du langage ou du calcul. »

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Yves Durand, rapporteur. Je me souviens du débat assez vif que nous avons eu en commission sur cet amendement. Je reprendrai donc l’argumentation qui a d’ailleurs fait alors l’objet d’une large adhésion.

Il convient à la fois de respecter la liberté et la responsabilité des enseignants et celles de l’école elle-même dans ce qu’elle doit enseigner. La nation donne mission aux enseignants de porter un certain nombre de valeurs par des programmes, par des enseignements. Le Conseil national des programmes aura, d’ailleurs, à en juger. Je vous ai dit et je le répète, ici, publiquement, si nous acceptions votre amendement, monsieur Reiss, comment pourrions-nous, ensuite, empêcher des parents, choqués dans leurs convictions religieuses ou philosophiques, de demander, au nom du respect de ces convictions, à un enseignant de ne pas aborder dans sa classe telle période de l’histoire ou tel enseignement de sciences physiques ou de sciences naturelles ? L’école est là pour enseigner au nom de la République, dans le respect, évidemment, des convictions de chacun et de la laïcité – la lettre de Jules Ferry est à rappeler –, mais indépendamment de ces convictions, certes respectables, mais qui sont intimes et ne trouvent pas leur place dans l’école.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même argumentation.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Je voudrais réagir aux propos du rapporteur. Je me référerai à la proposition qu’a faite le président Bloche lorsque nous avons discuté, hier, du statut des parents. Nous pourrions traiter de cet aspect lorsque la commission chargée de réfléchir au rôle des parents à l’école sera mise en place.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. J’insisterai sur deux points.

J’ai cru comprendre que le premier était susceptible de faire consensus. La lettre de Jules Ferry reste éminemment d’actualité à cet égard. Nous devons continuer à nous y référer parce qu’elle comporte des réflexions extrêmement pertinentes pour notre système éducatif.

Par ailleurs, la question de la place des parents, comme vient de l’indiquer mon collègue Frédéric Reiss, est également essentielle. Nous entendons évidemment l’argument de M. le rapporteur, qui a insisté sur le fait que l’école de la République devait pleinement exercer sa mission et que les choix très personnels des parents n’avaient pas à interférer avec ce qui se passe au sein même de l’école. Mais il est extrêmement important que l’on puisse discuter de la place respective des uns et des autres pour que les parents puissent également jouer leur rôle.

M. Luc Belot. Ce n’est pas du tout l’objet de cet amendement !

M. Patrick Hetzel. Je vous rappelle que, très longtemps, le ministre de l’éducation nationale était le ministre de l’instruction, ce qui avait évidemment tout son sens.

L’évolution que nous connaissons peut se justifier, mais nous devons nous assurer que les parents puissent prendre toute leur part à cette dimension liée à l’éducation.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. L’objection soulevée par notre rapporteur est intéressante. Il s’interroge effectivement sur le point de savoir si l’on ne sera pas conduit à renoncer à certains enseignements au motif que cela pourrait heurter les convictions ou les traditions religieuses de la famille. Ce sera une question fondamentale à poser si la commission chargée de réfléchir au rôle des parents est mise en place.

Aujourd’hui déjà, et c’est assez terrible, des professeurs sont mis en difficulté lorsqu’ils enseignent certaines matières. Ainsi, il y a quelques mois, l’un d’entre eux a été agressé par un de ses élèves, qui n’avait posé jusqu’alors aucun problème, parce que, d’origine marocaine, il s’était senti agressé parce que son professeur d’histoire avait amené ses élèves à réfléchir sur la nature du régime politique au Maroc.

Le livre Les territoires perdus de la République fait état de témoignages de professeurs d’histoire qui n’osent plus aborder certains sujets, parce que ceux-ci sont vécus par les élèves comme attentatoires à leur propre culture.

Cette question mérite vraiment que l’on s’y intéresse et que l’on en débatte. Il faut protéger la liberté des professeurs dans l’enseignement de leur discipline.

M. Yves Durand, rapporteur. Vous devriez retirer cet amendement !

M. le président. La parole est à M. Luc Belot.

M. Luc Belot. J’ai du mal à comprendre que vous défendiez un tel amendement alors que tous vos arguments plaident en faveur de son retrait. C’est totalement incohérent. Votre amendement tend à introduire le respect des choix éducatifs des parents alors que vous venez d’expliquer qu’il est extrêmement compliqué pour un enseignant de faire la classe à des élèves lorsque les choix éducatifs de leurs parents sont différents.

J’ai comme référence le débat qui commence à arriver dans nos écoles, venant d’outre-Atlantique, et qui oppose darwinisme et le créationnisme. Aujourd’hui, certains parents voudraient que le darwinisme ne soit plus enseigné à l’école. Nous avons eu de longs échanges tout à l’heure sur la culture scientifique et technique. Remettre en cause ces questions est particulièrement dangereux.

À partir du moment où l’enseignement doit être le même pour tous les enseignants, on ne peut pas accepter un amendement qui parle des choix éducatifs des parents. Ces choix concernent l’éducation de leurs enfants d’un point de vue global ; nous sommes en train de parler des choix d’enseignement. Il faut faire la différence. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Mme Annie Genevard. C’est le rapporteur qui en a parlé !

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. La discussion mérite d’être poursuivie dans d’autres lieux. Il est évident qu’on peut imaginer ce qui pourrait se passer dans les écoles et que nous devons mettre des garde-fous. Mais, en rédigeant mon amendement, je pensais à la différence entre l’enseignement public et l’enseignement privé. C’est un autre choix, qui n’a rien à voir avec le contenu des enseignements, nous sommes bien d’accord.

Je retire donc mon amendement.

M. Vincent Peillon, ministre. Merci beaucoup !

(L’amendement n° 673 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Vous avez raison, monsieur Belot, le risque que vous avez évoqué est réel ; nous commençons à nous en apercevoir en France. Sur ce point, je suis sur la même ligne que vous. Toutefois, faisons attention, car il y a d’autres théories qui ne reposent sur aucune preuve scientifique – je pense à celle du genre – et qui peuvent, elles aussi, créer des difficultés.

Cela dit, le débat que nous venons d’avoir montre bien que de tels amendements ne doivent pas être soumis au vote ; je retire donc le mien également. Ce sont des sujets qui méritent de faire l’objet d’une discussion dans d’autres lieux – M. le président de la commission des affaires culturelles a d’ailleurs fait hier un certain nombre de propositions. Ils pourraient, par exemple – ce n’est qu’une suggestion – donner lieu à une mission d’information à un moment ou à un autre.

(L’amendement n° 78 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 1482.

M. Vincent Peillon, ministre. J’ai présenté cet amendement, tout à l’heure.

Je salue le fait que les amendements aient été retirés, et je veux vous dire quel est notre état d’esprit à ce sujet.

J’ai reçu le professeur de Bordeaux auquel il a été fait allusion. Il m’a expliqué que la réalité était assez différente du traitement médiatique qui en a été fait. Il est allé dire lui-même dans quelques médias que les faits n’étaient pas aussi simples que ceux qui s’en sont emparés le faisaient croire. Je le dis ici parce que je sais qu’il le souhaite ; je reste en contact avec lui.

Sa préoccupation était la pédagogie de la laïcité. Nos enseignants rencontrent en effet de très grandes difficultés, sur le plan théorique – vous savez que je tiens beaucoup à ce que le sujet soit traité dans les écoles supérieures –, mais également sur le plan pratique : comment enseigner cette notion ?

Mon prédécesseur avait demandé qu’un travail soit conduit sur ce sujet – il l’a été sous la responsabilité du philosophe M. Bidar – et nous l’avons poursuivi. Un ouvrage, Pour une pédagogie de la laïcité, a récemment été publié, ce qui est une bonne chose. Nous devons en effet donner aux professeurs des instruments pour qu’ils soient capables de défendre ces valeurs dont nous avons parlé à plusieurs reprises et qui sont celles de l’instruction obligatoire.

Ce qui relève de notre mission, c’est l’instruction obligatoire. Mais l’instruction en elle-même porte un projet éducatif. Nous devons faire attention à ce qu’il ne soit pas atteint par les uns et par les autres et je suis heureux de ce consensus de l’Assemblée.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. La commission avait retiré du texte « le sens moral », mais c’est un débat qui mériterait d’être approfondi.

Compte tenu des explications du ministre sur la conception qu’il a du sens moral et sur la manière dont il veut l’inscrire dans le texte, je donne, à titre personnel, un avis favorable à cet amendement.

M. Vincent Peillon, ministre. Je vous en remercie, monsieur le rapporteur.

(L’amendement n° 1482 est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1252 est défendu.

(L’amendement n° 1252, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l’amendement n° 1546.

Mme Marianne Dubois. Cet amendement tend à favoriser la sensibilisation à la langue des signes, qui, je vous le rappelle, est considérée comme une langue à part entière depuis février 2005.

Cette sensibilisation doit s’adresser à tous les élèves scolarisés dans l’école de la République. Il me paraît donc logique qu’elle s’intègre dans le socle des connaissances de base.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. La commission a pris en compte vos préoccupations, madame Dubois, mais cela ne doit pas figurer expressément partie du projet de loi. Si nous allions dans ce sens, la loi ne serait pas bavarde, car ce sont des sujets importants, mais elle se réduirait à une liste de sensibilisations.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Nous avons déjà évoqué la question hier, lors de l’examen de l’article 1er. La nuit portant conseil, même si elle a été très courte, le Gouvernement aurait pu préparer une réponse. Nous avons passé du temps, lors des séances précédentes, sur des sujets évoqués par les députés de la majorité, comme les professeurs principaux ou les COPSI. Là, nous parlons d’un élément nouveau, qui n’est pas dans le projet de loi. J’aurais donc souhaité connaître l’avis du Gouvernement sur cette question.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Je comprends parfaitement votre demande. J’ai d’ailleurs hésité, hier, à vous donner les éléments d’information dont nous disposons au ministère de l’éducation nationale.

La sensibilisation à la langue des signes s’est développée et est pratiquée dans un certain nombre d’écoles, mais nous n’avons aucune évaluation précise du nombre d’enfants, y compris des enfants directement concernés, car il aurait fallu avoir à la fois un diagnostic et une comptabilité, qui n’a pas été faite. Notre volonté en tout cas, est que cela se développe.

Ensuite, le débat est toujours le même – nous venons de l’avoir à propos du socle –, y compris avec ma propre majorité : devons-nous nous recentrer ou devons-nous tenir compte, dans la loi, des préoccupations des uns et des autres, que nous pourrions d’ailleurs introduire dans chaque article ?

L’initiation et la sensibilisation des enfants sont profitables, de même que la pratique – je l’ai constaté dans plusieurs endroits, en particulier à Poitiers, par exemple, où un travail exceptionnel est accompli. Nous sommes évidemment favorables à ce que de telles pratiques se développent, mais elles ne me semblent pas relever de la loi pour l’instant.

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois.

Mme Marianne Dubois. Monsieur le ministre, j’insiste sur le fait que, depuis le 11 février 2005, la langue des signes est reconnue comme une langue à part entière.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Guedj.

M. Jérôme Guedj. Mme Dubois et moi avons le privilège de coprésider le groupe d’études de l’Assemblée nationale sur la langue des signes et la réponse que vient de nous fournir le ministre appuie le plan de travail qui sera le nôtre.

Tout ne relève pas de dispositions législatives. Nous devons conduire un travail pour éclairer la représentation nationale et aider l’éducation nationale à développer la langue des signes à l’école, notamment en promouvant les classes bilingues, qui ne sont que huit dans les écoles primaires et cinq dans les collèges.

Il est important qu’à l’occasion de ce débat sur l’école de la République et après l’adoption à l’article 1er de l’amendement sur l’école inclusive, que vous avez vous-même proposé, monsieur le ministre, nous puissions travailler spécifiquement, avec vos services, sur le développement et la promotion de la LSF à l’école. Je pense à la promotion de classes bilingues au primaire et au collège, à la formation des enseignants, et – peut-être pas par le biais législatif mais par circulaire ou par instruction – à une sensibilisation à la LSF dans le cadre d’initiatives menées dès le plus jeune âge, car cela permettrait, j’en suis convaincu, une vulgarisation, une banalisation de cette langue, donc une intégration pleine et entière conforme à l’esprit de la loi du 11 février 2005 que Mme Dubois a fort justement rappelée.

C’est pourquoi, avec Élisabeth Pochon et Michel Pouzol, j’ai déposé plusieurs amendements d’appel afin que, à l’occasion de ce débat sur l’école de la République, la LSF puisse trouver toute sa place. Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes sensible à cette préoccupation.

(L’amendement n° 1546 n’est pas adopté.)

(L’article 9, amendé, est adopté.)

Article 10

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, inscrite sur l’article 10.

Mme Annie Genevard. L’article 10 est extrêmement important, car il crée un service public du numérique éducatif et de l’enseignement à distance.

Monsieur le ministre, la rédaction de cet article est fort peu rassurante, car elle suscite des interrogations sur la place que vous entendez faire aux éditeurs privés, qui proposent aujourd’hui des produits numériques scolaires et ont investi massivement – plus de 20 millions d’euros – dans ce domaine, depuis des années. La plupart des manuels ont les deux supports. Dans l’étude d’impact, vous précisez que le CNDP et le CNED sont désignés comme producteurs ; ils seraient des sortes d’éditeurs d’État. Quelle place a, selon vous, une filière numérique privée ?

Je voudrais rappeler les grands principes de la concurrence et de la liberté pédagogique : l’enseignant doit pouvoir choisir ses ressources pédagogiques. Du reste, Lionel Jospin, alors ministre de l’éducation nationale, avait publié une circulaire rappelant les rôles respectifs du public et du privé.

Cette question a trait plusieurs domaines fondamentaux.

S’agissant, tout d’abord, de la liberté pédagogique, l’enseignant, je le répète, doit pouvoir choisir les supports à partir desquels il bâtit son enseignement.

Ensuite, se pose la question de la pérennité d’une grande filière économique, dans laquelle la France a un savoir-faire reconnu. Une décision prise à la hâte, sans mesurer les conséquences qu’elle pourrait avoir sur cette filière, serait périlleuse, et nous devrions par la suite dépenser des trésors d’imagination et probablement beaucoup de moyens pour la restaurer, si elle était fragilisée. Il y a là un enjeu en termes d’emploi et d’innovation. Je rappelle la magnifique aventure, dans l’édition privée, de la littérature pour la jeunesse ; nos éditeurs ont un talent fou. Il ne faut pas fragiliser cette filière économique.

M. le président. La parole est à M. Pierre Léautey.

M. Pierre Léautey. Comme cela a été souligné, l’article 10 est particulièrement important, parce qu’il marque une ambition nouvelle pour l’école, celle de la faire entrer dans l’ère de la généralisation du numérique. C’est une ambition politique forte de la refondation.

Le numérique est aujourd’hui omniprésent dans la société. Il transforme en profondeur notre quotidien. L’école ne doit ni ignorer les changements ni y être hermétique. Elle doit impérativement apprendre, intégrer et transmettre le numérique. Elle doit être ouverte sur la réalité du numérique, que vivent à la fois les enseignants, les élèves et les parents d’élèves. Ces outils offrent en effet des perspectives nouvelles dans la communication entre l’ensemble de ces acteurs, ainsi que dans les pratiques pédagogiques, qui doivent inévitablement évoluer.

Pour ce faire, les pratiques numériques doivent être à la fois acceptées et comprises par les enseignants – cela se fera dans le cadre de la formation –, mais ceux-ci doivent également avoir les moyens de mettre en œuvre ces méthodes nouvelles. C’est là toute l’ambition de l’article 10, qui crée un service public du numérique éducatif. Cet article assure la mise à disposition pour les écoles et les établissements des ressources numériques – ordinateurs, tablettes, contenus en ligne – qui prolongent l’offre aux enseignants.

Surtout, par l’alinéa 4, issu d’un amendement que nous avons défendu en commission, il favorise les projets innovants. Innovation et progrès sont en effet au cœur des pratiques numériques, par nature en constant renouvellement. Nous tenions à encourager l’intégration des nouvelles techniques dans le cycle pédagogique. C’est le sens de cet alinéa supplémentaire, qui permettra de créer un terreau fertile aux expérimentations susceptibles d’ouvrir la voie à une généralisation des pratiques les plus pertinentes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Comme l’a indiqué Annie Genevard, nous sommes à un point clé de notre discussion. Le service public du numérique éducatif est un sujet important : nous connaissons en effet les évolutions actuelles de notre société. Je voudrais toutefois alerter sur deux points qui méritent une attention particulière.

Nous avons parlé de la liberté pédagogique. Pour nous, celle-ci est l’un des fondements de l’action éducative des enseignants. Elle doit s’accompagner de la liberté pour le professeur du choix des ressources d’enseignement. Son corollaire est donc la diversité éditoriale, qui permet à l’enseignant de disposer d’une réelle liberté de choix. C’est la raison pour laquelle il faut être très prudent quant à la manière dont nous formulerons les choses.

Par ailleurs, je salue les engagements du ministre sur l’enseignement privé. Je ne crois pas trahir ses propos en disant qu’il souhaite respecter scrupuleusement la loi Debré. Or, en ce qui concerne le numérique, il ne faut pas oublier un point très pratique. Si nous n’y prêtons pas attention, nous risquons de développer une école à deux vitesses, avec, d’un côté, les écoles publiques avec des ressources d’État gratuites et, de l’autre, un secteur privé, des écoles relevant de la loi Debré sans accès à ces ressources, qui seraient contraintes d’avoir recours à des ressources onéreuses offertes par le secteur privé. Cette situation serait en contradiction avec les grandes lignes qui nous ont été indiquées.

Je souhaitais souligner ces deux points, sur lesquels notre discussion apportera sans doute des clarifications.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout. L’article 10 vise à créer un service public de l’enseignement numérique, conformément à l’un des quatre axes structurant le projet de loi. Ancrer notre système éducatif de bout en bout sur toute la chaîne : voilà un objectif que l’on peut partager, tant notre retard est important.

Avec un certain nombre de mes collègues, nous sommes attachés à rappeler que ce projet de loi doit aussi répondre aux problématiques auxquelles sont confrontés les territoires ruraux. Je suis convaincu que le numérique peut être un outil efficace et utile dans la réduction des inégalités qui persistent entre élèves, mais aussi et surtout entre territoires. Dans les territoires enclavés, où les moyens d’accès à la ville-centre et donc à des ressources culturelles ne sont pas toujours évidents du fait du coût élevé du transport, le numérique à l’école, c’est, en somme, le champ des possibles qui s’ouvre, et c’est heureux.

Ce droit à l’éducation par le numérique sera d’autant plus effectif que nous y consacrons réellement les moyens en termes de formation des enseignants à ces nouveaux outils, comme en témoigne l’article 26 du présent projet de loi.

J’en termine en ajoutant que cette mesure sera bénéfique à l’aménagement du territoire. En effet, l’implantation du numérique dans les écoles permettra de déployer d’autant plus rapidement le haut débit sur l’ensemble du territoire, parce que, oui, il est des territoires où les zones blanches sont encore une réalité.

M. le président. La parole est à M. Jacques Cresta.

M. Jacques Cresta. Il serait inconséquent de nier l’importance qu’a prise le numérique dans notre environnement tant personnel que professionnel. Si, aujourd’hui, de très nombreux jeunes sont parfaitement familiers avec ces nouveaux outils ou moyens de communication, ils se sont souvent formés seuls. La France a accumulé un lourd retard. Elle est aujourd’hui seulement le vingt-neuvième pays pour la formation des enfants et adolescents à l’utilisation des outils numériques.

Le rapport rappelle utilement que, si des initiatives sont prises par l’État, ce sont aujourd’hui essentiellement les collectivités qui se sont engagées dans cette démarche. Dans ma région, le Languedoc-Roussillon, le problème a été pris à bras-le-corps avec le dispositif Lordi, qui met à disposition de tous les élèves de seconde un ordinateur portable qu’ils peuvent utiliser aussi bien durant le temps scolaire que pendant leur temps de travail personnel. Couplé à un environnement numérique de travail disposant de nombreuses ressources pédagogiques, ce dispositif nous a paru être une première étape déterminante, menée en concertation étroite avec les services du rectorat.

Avec la création du service public de l’enseignement numérique, nous allons encore plus loin en inscrivant dans le code de l’éducation un élément à mon sens déterminant : la formation initiale et continue des enseignants dans ce domaine. Inscrire le numérique dans la loi constitue une véritable avancée vers l’égalité républicaine des chances, et je crois que nous pouvons tous nous en réjouir.

M. le président. Nous en venons aux amendements sur l’article.

Je précise que, depuis le début de la séance, nous avons examiné quatre-vingt-dix-huit amendements et qu’il en reste 629. À ce rythme, il nous faudra poursuivre nos travaux pendant dix-huit heures et quatre minutes exactement. J’invite donc les uns et les autres à faire preuve de concision. La concision, c’est aussi quelque chose que l’on apprend à l’école de la République. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Avant que nous en venions aux amendements, monsieur le président, je souhaite, tout en respectant vos consignes de concision, dire un mot du service public de l’enseignement numérique.

Cet article très important marque bien la dimension refondatrice de cette loi. J’ai entendu deux inquiétudes s’exprimer. La première concerne la diversité des ressources et donc notre filière industrielle. J’ai déjà eu l’occasion de souligner que c’est l’une de nos préoccupations principales. Nous avons décidé d’allouer à nos industriels, dans le cadre des investissements d’avenir, des fonds pour qu’ils puissent développer cette filière française. J’ai demandé, avec le ministre des finances et le ministre du redressement productif, des missions d’inspection sur le développement de la filière française du numérique éducatif. De même, nous avons veillé, à l’écoute de la sagesse de la commission, à écrire dans le projet de loi que ces ressources devaient être diversifiées.

Comme vous le savez, à l’instar de ce qui prévaut pour l’audiovisuel ou encore l’enseignement à distance, le fait de créer un service public n’interdit pas d’autres offres à côté. Cela me permet de répondre à la seconde interrogation, sur l’enseignement privé. Tout ce que l’État a mis en place comme ressources et services numériques a toujours été ouvert à l’enseignement privé.

M. Luc Belot. C’est vrai !

M. Vincent Peillon, ministre. Nous continuerons bien entendu à le faire. Ces services doivent être accessibles à tous.

Si nous en gardons la maîtrise pédagogique – c’est l’enjeu fondamental, à côté du développement économique –, cet outil permet d’inscrire l’égalité des territoires, l’égalité des élèves, la diversité des excellences et des réussites, et c’est donc un grand projet républicain. Le Président de la République nous avait demandé d’inscrire la devise de la République dans les territoires numériques du XXIe siècle : c’est l’objet de cet article.

M. le président. Nous en venons donc aux amendements.

La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 876.

Mme Annie Genevard. Je ne le défendrai pas, monsieur le président. Je souhaite répondre à M. le ministre.

Vous avez dit, monsieur le ministre, ce qui précisément nous pose problème : « garder la maîtrise pédagogique ». Je ne sais pas exactement ce que vous entendez par là, mais il faut en tout cas que cela demeure compatible avec la diversité de la production éditoriale.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Mon propos était de rassurer, face à l’illusion techniciste, ceux qui à juste titre s’inquiéteraient du développement d’une approche purement instrumentale du numérique. Ce dont nous parlons, c’est précisément d’une filière du numérique pédagogique. J’ai insisté sur cette modification introduite par la commission : la diversité de l’offre et son utilisation, cela signifie qu’il n’est pas imposé un modèle unique. Cela n’existe pas pour le papier et cela n’existera pas pour le numérique.

Le grand reproche adressé aux différents plans numériques de ces dernières années, c’est qu’ils n’ont pas été accompagnés de la formation des enseignants aux usages pédagogiques du numérique. Ne me faites pas un procès d’intention quand je réponds à cette inquiétude et quand j’explique que nous voulons au contraire assurer la diversité et le pluralisme des ressources pédagogiques.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 815.

M. Philippe Gomes. Je considère que l’initiative traduite par cet article est tout à fait essentielle. Selon les rapports que nous avons pu examiner, la France est en retard aussi bien en termes de formation des enfants et adolescents à l’utilisation des outils numériques qu’en termes d’investissements dans nos établissements, ce qui est encore plus grave : notre niveau d’investissement nous place entre la septième et la neuvième place en Europe. Il était indispensable d’inscrire l’école de la République dans son temps. Nous rencontrons déjà des problèmes pour répondre aux difficultés scolaires ; si, en plus, notre école est anachronique, les jeunes de notre pays n’en seront que davantage handicapés. Même si des observations peuvent être faites sur certains choix, la création d’un service public numérique, l’affectation des moyens nécessaires, l’ouverture du numérique à la fois aux élèves et à la communauté éducative, sont indispensables.

(L’amendement n° 815, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 814.

M. Philippe Gomes. Il est défendu.

(L’amendement n° 814, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 121 et 912.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 121.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu, pour soutenir l’amendement n° 912.

M. Benoist Apparu. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 121 et 912, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 299.

M. Patrick Hetzel. Je propose de modifier l’alinéa 3. En matière d’équipements numériques, nous ne partons heureusement pas de zéro. L’objectif assigné au service public du numérique éducatif est plutôt de compléter l’offre existante, comme tendaient à le signifier les propos du ministre. Il faudrait donc être cohérent et prolonger…

M. Luc Belot. « Compléter ».

M. Patrick Hetzel. Non. Prolonger plutôt que compléter,…

M. Luc Belot. Vous inversez l’amendement !

M. Patrick Hetzel. …car nous ne partons pas de nulle part.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. C’est étrange : vous semblez dire le contraire de votre amendement.

M. Vincent Peillon, ministre. En fait, nous sommes d’accord. (Rires.)

M. Yves Durand, rapporteur. Compte tenu de ces remarques, je suppose que vous le retirez.

M. Patrick Hetzel. Je retire mon amendement.

(L’amendement n° 299 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 168.

Mme Barbara Pompili. Nous voudrions faire figurer à l’alinéa 3 l’expression « expérimentations pédagogiques ». La notion d’expérimentation pédagogique existe déjà dans le code de l’éducation, à l’article L. 401-1. Néanmoins, l’insérer à cet endroit précis revêt une importance particulière, car le service public du numérique doit devenir un outil en faveur des apprentissages et de la pédagogie.

La loi doit donc reconnaître un potentiel d’expérimentations, sans que l’on puisse faire figurer ce point ailleurs. Il ne s’agit pas tant d’ajouter un outil à tous les autres, mais de s’en servir pour repenser la pédagogie et l’adapter au XXIe siècle. Des perspectives extraordinaires s’ouvrent à nous ; en ce sens, il est important d’intégrer la notion d’expérimentation à cet endroit.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Votre amendement est satisfait par deux amendements votés par la commission. Nous avons ainsi ajouté, à l’alinéa 3, « diversifier les modalités d’enseignement » et, à l’alinéa 6, « favoriser les projets innovants visant à développer progressivement le numérique à l’école ». Je vous propose donc de retirer votre amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis. Dans les ESPE, le numérique sera au service de la rénovation des pratiques pédagogiques. Nous partageons donc l’objectif de Mme Pompili.

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili.

Mme Barbara Pompili. Je retire cet amendement.

(L’amendement n° 168 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 364 et 377.

La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 364.

Mme Barbara Pompili. Loin de moi l’idée d’une loi bavarde, mais nous souhaitons ajouter à cet endroit précis du texte une mention relative aux élèves en situation de handicap.

Même si la notion de handicap figure désormais dans le code de l’éducation, ce dont je me félicite une fois encore, le service public de l’enseignement numérique doit être au service de tous les élèves : il faut donc préciser la nécessité d’investir dans des outils adaptés et personnalisés, car les élèves handicapés ont des besoins spécifiques.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n° 377.

Mme Isabelle Attard. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 364 et 377, acceptés par la commission et le Gouvernement, sont adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 301.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu.

(L’amendement n° 301, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 303.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu.

(L’amendement n° 303, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 17 rectifié et 1263.

La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l’amendement n° 17 rectifié.

Mme Marianne Dubois. Il est défendu.

M. le président. L’amendement n° 1263 l’est également, monsieur Gomes ?

M. Philippe Gomes. Oui.

(Les amendements identiques nos 17 rectifié et 1263, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 464 et 913.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 464.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 913.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 464 et 913, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois, pour soutenir l’amendement n° 16.

Mme Marianne Dubois. Il est défendu.

(L’amendement n° 16, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Guedj, pour soutenir l’amendement n° 661.

M. Jérôme Guedj. Je vais retirer cet amendement que j’ai cosigné avec Mme Pochon et M. Pouzol, puisque l’amendement de Mme Pompili, que nous venons d’adopter, permet de répondre à notre objectif : assurer une cohérence avec l’amendement à l’article 1er sur l’école inclusive.

Puisque nous débattons de l’adaptation des ressources pédagogiques pour les élèves en situation de handicap, je veux aborder, pour la dernière fois, la question particulière de la LSF à l’école. Le service public numérique et ses outils seront en effet particulièrement adaptés à la promotion de cette langue et au développement des classes bilingues.

Sans douter de votre intérêt pour cette question, monsieur le ministre, je vous redis notre disponibilité ainsi que la nécessité de travailler sur ce sujet particulier, comme l’attendent l’ensemble des familles concernées.

Voyez plutôt les chiffres : il n’existe que huit classes bilingues en primaire sur l’ensemble du territoire français. La dernière a ouvert dans ma ville de Massy, après un véritable parcours du combattant. Il a d’abord fallu que les collectivités locales, le conseil général et la commune, prouvent la pertinence d’une telle classe pour que deux ans plus tard, l’éducation nationale l’intègre dans le droit commun.

Afin de ne plus revivre une telle situation, nous avons besoin d’une impulsion ministérielle. Pourrez-vous nous confirmer ce développement de la LSF à l’école ? Je suis par ailleurs certain que ma collègue, Mme Dubois, partage ma préoccupation.

(L’amendement n° 661 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 1264.

M. Philippe Gomes. Il est défendu.

(L’amendement n° 1264, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 10, amendé, est adopté.)

Après l’article 10

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 10.

La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 1401.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

(L’amendement n° 1401, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 914, 120, 1166 et 674, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 120 et 1166 sont identiques.

L’amendement n° 914 est défendu.

L’amendement n° 120 l’est-il également, monsieur Hetzel ?

M. Patrick Hetzel. Oui.

M. le président. De même que l’amendement n° 1166, madame Genevard,…

Mme Annie Genevard. Oui, monsieur le président.

M. le président. …et que l’amendement n° 674, monsieur Reiss ?

M. Frédéric Reiss. Absolument.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements soumis à une discussion commune ?

M. Yves Durand, rapporteur. Ils concernent des rapports. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

(L’amendement n° 914 n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 120 et 1166 ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n° 674 n’est pas adopté.)

Avant l’article 11

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels avant l’article 11.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 1247 rectifié.

M. Patrick Hetzel. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai les amendements 1249 rectifié, 1246 rectifié et 1248 rectifié en même temps, afin d’être le plus clair possible.

M. le président. Volontiers, mon cher collègue. Poursuivez.

M. Patrick Hetzel. Il me semble important de revenir sur un sujet essentiel : la responsabilisation des familles. Nous avons constaté que le Gouvernement, par souci idéologique, a supprimé un dispositif sans avoir procédé à une quelconque évaluation ou étude d’impact.

M. Patrick Bloche, président de la commission des affaires culturelles. Il s’agit d’une proposition de loi : le Gouvernement n’y est pour rien !

M. Patrick Hetzel. Nous avons d’ailleurs pu constater ces lacunes en commission.

Ce dispositif, proposé par M. Ciotti, cherchait à responsabiliser les familles ; mais, parce qu’il concernait peu de familles – moins de 500 – il n’aurait pas été efficace, nous dit-on. Or, l’objectif était précisément de créer un effet dissuasif afin d’impliquer les familles dans l’éducation de leurs enfants. C’est pourquoi nous proposons, par ces amendements, de rétablir le dispositif Ciotti tel qu’il existait il y a quelques semaines encore.

M. Pierre Léautey. C’est la troisième fois !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces quatre amendements ?

M. Yves Durand, rapporteur. On tente de rentrer par la fenêtre, alors qu’on est sorti par la porte : nous sommes défavorables à cette effraction. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée. Nous devons rejeter ces amendements. Si les parlementaires, dans leur grande sagesse, ont décidé d’abroger la loi Ciotti, c’est parce qu’ils avaient le sentiment et la conviction que cette loi, en sus d’être inefficace, était injuste dans son principe, en pénalisant les familles pauvres.

Comme à chaque fois, vous nous dites que nous n’avons pas fait d’étude d’impact ; mais la proposition de loi de M. Ciotti ne comportait pas non plus d’étude d’impact, puisqu’il ne s’agissait pas d’un projet de loi.

M. Ciotti n’a jamais prouvé que ce contrat de responsabilité et cette pénalisation, qui portait sur les allocations familiales, avaient en quoi que ce soit permis d’aider à régler la question de l’absentéisme scolaire. Nous avons même pu remarquer, au moment d’abroger cette loi, que l’UMP elle-même était divisée. De fait, alors que M. Ciotti présentait une proposition visant à pénaliser les parents dont les enfants étaient absentéistes, la circulaire de M. Chatel relative à la lutte contre l’absentéisme ne faisait aucune mention de la question des allocations, mais venait rappeler, au contraire, que l’éducation nationale se trouvait en première ligne dans ce combat.

Ce dispositif était donc inefficace et les parlementaires ont bien fait de l’abroger. Nous travaillons à un nouveau dispositif afin de favoriser une intervention bien en amont, de sorte que, dès les premières alertes, la DGESCO et l’établissement puissent entrer en relation avec les parents, pour les aider à remédier aux difficultés que rencontre l’enfant.

Si des parents enfreignent leurs obligations, en se montrant particulièrement insoucieux du sort de leurs enfants, des dispositifs de nature pénale, qui permettent de sanctionner ces parents, existent déjà.

Mais sanctionner administrativement, sur le terrain des allocations familiales, est injuste et inefficace. Il n’y a donc pas lieu d’essayer, comme M. Ciotti le souhaite, de revenir à ce dispositif qui fait le tri entre les parents dignes d’intérêt parce qu’ils ne bénéficient pas des allocations familiales et ceux qu’il faut sanctionner parce qu’ils en ont besoin. Nous ne saurions accepter une telle situation.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Madame la ministre, il existe une véritable contradiction dans vos propos. Vous dites en effet que le dispositif est inefficace, alors que vous avez reconnu qu’aucune étude d’impact n’a été faite, ni avant la mise en place du dispositif, ni après. Je ne sais donc pas sur quels éléments vous vous fondez pour affirmer cette inefficacité.

De plus, votre second argument relève, comme vous le dites vous-même, du registre du sentiment, qui est hors de propos. Vous avancez qu’il existe un arsenal pénal, alors que nous vous proposons précisément d’éviter ce terrain-là, pour favoriser une approche proportionnée et graduée, permettant aux familles d’instaurer un dialogue avec l’institution scolaire.

Si peu de familles ont été sanctionnées, c’est parce que, à y regarder de plus près, ce dispositif a permis à un certain nombre d’entre elles d’instaurer un dialogue avec l’institution scolaire, suivant l’objectif recherché.

Pour terminer, je tiens à préciser que ces amendements ne sont pas seulement ceux de M. Ciotti. Nous sommes un nombre significatif de députés de l’opposition à en être co-signataires.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Nous savons tous qu’un climat serein à l’école est une condition indispensable pour la réussite des élèves. Le dispositif Ciotti avait le mérite d’exister. Il était encore jeune et son originalité consistait à prévoir un mécanisme d’avertissement préalable et de dialogue avec les parents des enfants qui commettaient des violences à l’école, ce qui était tout à fait intéressant.

Je rappelle aussi que le ministre de l’éducation d’alors, Luc Chatel, avait fait de la lutte contre la violence scolaire, sujet très difficile, une des priorités de son ministère.

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée. Il ne s’agit pas ici de violence mais d’absentéisme.

M. Frédéric Reiss. Que vous le vouliez ou non, madame la ministre, il y a eu des états généraux sur la sécurité à l’école en 2010 et des assises nationales sur le harcèlement à l’école en mai 2011.

Il est évident qu’il faut ensuite mettre en place des outils et qu’on a besoin d’un peu de temps pour cela. Là encore, ce n’est pas d’un claquement de doigt qu’on aura immédiatement des résultats. Nous sommes face à des problèmes extrêmement difficiles et très préjudiciables à la réussite des élèves. C’est pourquoi le travail que vous menez avec M. Debarbieux, que nous avons auditionné en commission, me semble intéressant, mais nous proposons aussi de réintroduire le dispositif Ciotti.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Je soutiens ces amendements, considérant que les mots « responsabilité parentale » ne sont pas des gros mots. On a parlé tout au long de cette discussion de coéducation, de statut de parents d’élèves délégués, et l’idée est bien en effet de parvenir à ce que les parents soient associés le plus étroitement possible à l’éducation et à l’instruction de leurs enfants au sein des écoles de la République. Un certain nombre de parents sont en difficulté. L’objectif n’est pas d’arriver avec une massue pour leur donner un coup sur la tête : il s’agit de les accompagner. Le contrat de responsabilité parentale visait à remplir cet objectif. En partenariat avec le conseil général, on était dans une logique de signalement préalable pour accompagner, soutenir et aider les familles qui rencontraient des difficultés.

Le dispositif, quoiqu’on en dise, a fourni des résultats positifs, même s’ils n’ont pas été évalués comme ils auraient dû l’être : 80 000 signalements, dont 75 % ont donné lieu à un premier avertissement, 21 % à un second, et il y a eu au bout du compte 1 500 suspensions d’allocations familiales. On voit donc bien que ce dispositif d’alerte a produit quelques fruits. Bien évidemment, il n’était pas parfait et il aurait probablement dû être plus rapide dans sa mise en œuvre pour être véritablement efficace car les délais, hélas, ne permettaient pas d’intervenir en temps réel alors qu’il faut être très réactif dans ce type de situations. Nous aurions intérêt à réfléchir ensemble sur la manière d’introduire la responsabilité parentale dans notre système éducatif.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Blazy.

M. Jean-Pierre Blazy. Il ne faut pas laisser nos collègues de l’opposition s’arroger, en voulant rétablir la loi Ciotti, le droit d’être les seuls défenseurs de l’action contre l’absentéisme scolaire. Madame la ministre, il est extrêmement important qu’à travers la refondation de l’école nous mettions en œuvre, dans les meilleurs délais, de nouvelles actions efficaces pour prévenir l’absentéisme et, au-delà, le décrochage scolaire. Ce sera évidemment une contribution essentielle à cette refondation. La solution n’est pas la suspension des allocations familiales, mais la capacité de prévenir, le plus en amont possible, un absentéisme, trop souvent précoce, qui conduit au décrochage. C’est là-dessus que nous devons travailler ensemble, et si possible de façon consensuelle, mais pas en cultivant l’illusion que par la sanction, par la suspension des allocations familiales, on va régler le problème. Il a été démontré qu’une telle mesure était totalement inefficace.

(Les amendements nos 1247 rectifié, 1249 rectifié, 1246 rectifié et 1248 rectifié, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 1265.

M. Philippe Gomes. Défendu !

(L’amendement n° 1265, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 11

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 436 et 1167, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 436.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu, monsieur le president.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 1167.

Mme Annie Genevard. S’agissant de la question de la carte des formations initiales, je tiens à rappeler que les différentes circulaires n’ont jamais levé un hiatus que le législateur aurait pu clarifier, mais il ne l’a pas fait. Si un schéma prévisionnel des formations est bel et bien adopté par le conseil régional, il n’a pas de caractère prescriptif pour imposer des décisions d’ouverture ou de fermeture de sections, ces dernières relevant toujours de la responsabilité exclusive des recteurs puisqu’ils attribuent les moyens en personnels. Ce projet de loi ne clarifie pas les zones d’ombres dans la répartition des compétences entre les prérogatives respectives de l’État et des régions, et je le regrette.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Je soutiens l’amendement de Mme Genevard parce que le conseil économique, social et environnemental et le Parlement ayant des représentants au Conseil supérieur des programmes et au Conseil national d’évaluation du système éducatif, il serait justifié que les avis autorisés du conseil économique, social et environnemental régional soient pris en compte s’agissant de la formation professionnelle dans les régions. Cette instance ne fait pas partie de l’exécutif du conseil régional, mais ses avis sont d’une grande importance.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Il n’y a pas de désaccord entre nous sur ce point mais une incompréhension. Le conseil économique et social régional a un rôle consultatif auprès des régions sur les questions relatives aux schémas des formations. Ce mécanisme relève de la responsabilité de la région en tant que collectivité territoriale compétente en matière de formation professionnelle, et non d’un de ses organes. C’est à chaque région, bien entendu, de travailler avec son comité économique et social, dont je rappelle qu’il a bien un rôle consultatif auprès d’elle sur ces questions. Ces amendements seraient donc redondants.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Non, monsieur le ministre, ce ne serait pas redondant parce que, en l’inscrivant ainsi dans l’article, on rendrait obligatoire la consultation du conseil économique, social et environnemental régional. Nous souhaitons insister sur ce point car il y a une diversité de représentants du monde socio-économique dans un CESER, ce qui n’est pas le cas d’un conseil régional. Il serait extrêmement important de le formaliser de telle sorte que celui-ci ne puisse s’abstraire de cette consultation. Nous sommes d’accord avec ce que vous dites, mais nous voulons institutionnaliser cette consultation : c’est très important pour obtenir une bonne adéquation avec le terrain et une bonne administration.

M. Vincent Peillon, ministre. Il faut respecter le principe de la libre administration des régions !

(Les amendements nos 436 et 1167, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

(L’article 11 est adopté.)

Après l’article 11

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois.

Mme Marianne Dubois. La scolarisation des élèves handicapés constitue une exigence depuis la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, qui a donné la priorité à leur intégration en milieu ordinaire. Il est donc souhaitable que les parlementaires disposent d’une information détaillée et concrète sur les moyens financiers et les personnels de l’éducation nationale consacrés à la scolarisation des élèves handicapés. À cette fin, l’amendement propose que le Gouvernement transmette au Parlement avant le 31 décembre 2013 un rapport sur lesdits moyens consacrés à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves handicapés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Cette préoccupation, juste par ailleurs, est satisfaite par le comité de suivi que nous allons instituer à l’article 60. De plus, la conférence nationale du handicap traitera de cette question et rendra un rapport. Je vous invite donc à retirer votre amendement, madame la députée. À défaut, l’avis serait défavorable.

Mme Marie-George Buffet. Il va y avoir du travail pour assurer le suivi !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée. M. le ministre et moi-même partageons tout à fait les préoccupations exprimées dans cet amendement quant à la nécessité de donner les moyens adéquats pour la scolarisation en milieu ordinaire des élèves en situation de handicap. Nous menons donc, avec Mme Carlotti, un travail sur cette question, notamment sur la professionnalisation des accompagnants de vie scolaire concernés. L’article 60 va instituer un comité de suivi. J’ajoute que le Conseil national du handicap remet lui-même régulièrement un rapport. La précision supplémentaire proposée par cet amendement ne me semble par conséquent pas indispensable.

(L’amendement n° 256 n’est pas adopté.)

Article 12

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, inscrit sur l’article.

M. Patrick Hetzel. Dans le contexte actuel, l’État doit agir en concertation avec les collectivités territoriales et les établissements pour ouvrir à l’ensemble des élèves du territoire national un égal accès à des ressources numériques pédagogiques innovantes de qualité. L’effort doit porter sur une meilleure péréquation des moyens sur l’ensemble du territoire, ce que ne permet pas l’article 12 dans sa rédaction actuelle.

L’imprécision quant à la nature des ressources pédagogiques dont la dépense incombe à l’État en ce domaine est également à corriger. En effet, tel qu’il est rédigé, cet article n’assure pas l’équité entre les élèves, comporte un risque de paupérisation de l’école publique, et n’est pas de nature à encourager le développement d’une filière du numérique scolaire de qualité.

Enfin, la question des moyens alloués à l’école primaire est absente – alors que M. le ministre nous dit très souvent que c’est véritablement la priorité –, ce qui limite les ambitions initialement affichées en matière de numérique pour l’école primaire. J’y vois une vraie contradiction.

Dans le contexte budgétaire actuel, le Gouvernement et le législateur doivent prendre les mesures les plus appropriées pour garantir à tous les élèves du territoire une réelle équité vis-à-vis de l’accès à des ressources pédagogiques de qualité.

M. le président. La parole est à Mme Martine Faure, pour soutenir l’amendement n° 1387.

Mme Martine Faure. Il s’agit d’un amendement rédactionnel à l’alinéa 2, visant à substituer aux mots : « services et ressources numériques », les mots : « ressources, contenus et services numériques ». Il y aura ainsi une cohérence de dénomination entre les différents articles de la loi.

(L’amendement n° 1387, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 12, amendé, est adopté.)

Après l’article 12

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1072 et 4, pouvant être soumis à une discussion commune.

M. le président. La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement n° 1072.

M. Paul Molac. Il est proposé d’insérer un nouvel alinéa après le huitième alinéa de l’article L. 212-8 du code de l’éducation. Il était auparavant prévu dans le code des collectivités que, les classes bilingues étant des classes intercommunales, il y avait perception du forfait scolaire même lorsqu’un enfant d’une commune était inscrit dans une autre. Mais à partir de 2005 l’interprétation a été revue : on nous a dit qu’il n’y avait pas de quatrième cas dans l’article L. 212-8 portant sur les classes bilingues, que ce n’était plus une dérogation et que les maires devaient s’arranger entre eux. Cela a posé des problèmes car certains maires ont refusé que des enfants de leur territoire aillent s’inscrire dans l’école voisine et de participer aux frais de scolarité.

En conséquence, les parents n’ont pas accès à l’enseignement bilingue comme ils le voudraient car on ne peut pas créer des classes bilingues dans toutes les communes, à l’heure actuelle en tout cas. La seule solution reste de poursuivre devant le tribunal administratif le maire qui refuse d’inscrire un enfant, parce que l’inscription est obligatoire dès lors que l’enfant a au moins trois ans.

Cet amendement vise donc à faciliter les choses pour les parents et il répond à une demande de toutes les associations de parents d’élèves de l’enseignement public, sachant que l’enseignement privé n’est pas soumis aux mêmes règles. À partir de ce moment-là, l’inscription dans une classe bilingue est possible, mais dans un établissement privé, où c’est le directeur qui inscrit et non pas le maire comme dans l’enseignement public. Il y a là une autre inégalité de traitement.

C’est pourquoi je propose de créer ce quatrième cas de dérogation qui pacifiera, d’une part, les relations entre les maires, et, d’autre part, les relations entre les parents et les maires.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour défendre l’amendement n° 4.

M. Frédéric Reiss. Pour compléter les propos de M. Molac, je rappelle que la reconnaissance constitutionnelle des langues régionales a été opérée par la récente révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 et qu’elle concerne toutes les communes de notre territoire.

C’est une avancée très importante, mais certaines familles qui souhaitent s’engager dans cette voie ne trouvent pas satisfaction dans leur commune de résidence. Cet amendement propose donc de clarifier les choses.

Nous voudrions aussi que, dans le cadre du service public de l’enseignement, les langues régionales de France soient traitées de la même façon que les langues étrangères, ce qui est apparu dans le rapport annexé puisque nous avons modifié plusieurs alinéas sur le sujet. C’est pourquoi nous proposons cette modification à l’article L. 212-8.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Je suis très surpris car, depuis lundi, de nombreux parlementaires ont eu l’occasion de manifester leur attachement aux langues régionales, que d’ailleurs la Constitution reconnaît désormais comme un élément de notre patrimoine national.

À ces amendements qui nous semblent être d’intérêt général, vous répondez par un simple « défavorable ». Ce n’est pas ce que nous attendions. Nous aimerions à tout le moins que ce refus soit motivé.

C’est assez révélateur de la nécessité de poursuivre ce combat en faveur des langues régionales. De toute évidence, certains de nos collègues sont imperméables à cette question. Je voulais le relever ici, en toute sérénité.

M. le président. La parole est à M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Je déplore ces avis donnés à un amendement qui vise à rendre l’accès aux classes bilingues plus simple. Si la Constitution dit que l’on « peut » inscrire un enfant dans une classe bilingue, dans certains cas on ne peut pas, en raison de divers obstacles, et cela ne va pas sans poser des problèmes localement.

Cet amendement vise à pacifier les relations entre les maires, qui se déclarent prêts à régler ces problèmes quand les choses seront claires. S’il faut encombrer les tribunaux administratifs avec des recours, on peut aussi le faire, mais ce serait dommage quand la loi pourrait simplifier le quotidien des citoyens.

(L’amendement n° 1072 n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 4 n’est pas adopté.)

Article 13

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 437 et 1169.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour défendre l’amendement n° 437.

M. Patrick Hetzel. Défendu !

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour défendre l’amendement n° 1169.

Mme Annie Genevard. Cet amendement est relatif à l’article 13 qui expose la répartition des charges entre l’État et les collectivités territoriales. Il me donne l’occasion de rapporter l’inquiétude des départements de France qui sont particulièrement préoccupés par les implications financières qu’aura cette loi sur deux points : l’organisation des transports scolaires ; la répartition en matière de maintenance des équipements informatiques.

Si la loi dispose que l’État a à sa charge les ressources et les services numériques à caractère pédagogique, il faut aussi pouvoir laisser aux collectivités territoriales une certaine forme de liberté en la matière. Si elles veulent conduire des politiques volontaristes, il faut qu’on puisse le leur permettre.

(Les amendements identiques nos 437 et 1169, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement n° 656.

M. Paul Molac. À la défense de cet amendement, j’associe mes collègues du Morbihan, Hervé Pellois, Philippe Noguès et Jean-Pierre Le Roch.

Compte tenu du manque de collèges publics dans certains secteurs, les parents sont obligés, pour des raisons pratiques, de s’orienter vers des établissements privés.

Dans le Morbihan, la plupart des collèges ont été construits il y a plusieurs décennies et le choix de leur localisation ne correspond plus aux communes les plus peuplées.

Les conseils généraux doivent constamment veiller à équilibrer les effectifs en fonction de la capacité d’accueil des collèges et favoriser la mixité sociale au sein des établissements.

L’éducation est un service public national mais, dans certains départements comme le Morbihan, les familles n’ont pas accès à l’enseignement public comme elles le devraient, en raison du manque de collèges.

Si la loi prévoit déjà que chaque commune soit pourvue d’une école élémentaire publique pour quinze enfants d’âge scolaire, aucune disposition similaire n’existe pour les collèges, alors que l’instruction est obligatoire jusqu’à seize ans.

Le présent amendement vise à pointer les dysfonctionnements territoriaux par le biais d’un recensement des communes de plus de 10 000 habitants ou comptant plus de 500 enfants en âge d’aller au collège et qui ne disposent pas déjà d’un collège public, dans le respect du principe de la libre administration des collectivités territoriales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Il convient de rappeler qu’en application de l’article L. 213-1 du code de l’éducation, l’implantation des collèges est prévue dans le cadre d’un programme prévisionnel des investissements relatifs aux collèges qu’établit le conseil général, après accord de chacune des communes concernées et en fonction du schéma prévisionnel des formations des collèges, des lycées et des établissements d’éducation spécialisée.

Un tel amendement aurait pour effet de mettre à la charge des départements une obligation de construction d’un collège dans toute commune d’au moins 10 000 habitants ou comptant au moins 500 enfants en âge d’être scolarisés en collège, que l’État serait ensuite tenu de doter des moyens en personnels nécessaires à son fonctionnement.

De plus, cette règle ne correspondrait pas à une réalité locale, l’implantation d’un collège s’effectuant dans le cadre d’un dialogue avec les communes concernées et après avis du Conseil départemental de l’éducation nationale.

Avis défavorable.

(L’amendement n° 656, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Paul Molac, pour soutenir l’amendement n° 655.

M. Paul Molac. La libre administration des collectivités est quelque chose d’important mais il existe aussi certains principes. Les collectivités locales disposent de pouvoirs de décision propres, indépendants du pouvoir central, dans le respect des lois et des règlements qui les définissent, en vertu de l’article 72 de la Constitution.

Autrement dit, le législateur est compétent pour créer des normes s’imposant aux collectivités territoriales. La libre administration des collectivités territoriales ne saurait remettre en cause l’utilité de l’ordre juridique. C’est d’autant plus vrai lorsqu’il s’agit d’un principe fondamental de l’article 34 de la Constitution. Et je pense que l’égalité des territoires et la continuité du service public peuvent sans ambiguïté être considérés comme des principes fondamentaux.

Rappelons que le Conseil constitutionnel a pour l’instant adopté une interprétation très restrictive du principe de libre administration des collectivités. Seulement deux dispositions très particulières ont été censurées à ce jour, concernant le règlement de l’Assemblée de Corse et la modulation des subventions au service public de l’eau dans le département des Landes.

(L’amendement n° 655, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 13 est adopté.)

Article 14

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 438.

M. Patrick Hetzel. Défendu.

(L’amendement n° 438, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 14 est adopté.)

Article 14 bis

(L’article 14 bis est adopté.)

Article 15

(L’article 15 est adopté.)

Article 16

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 439.

M. Patrick Hetzel. Cet amendement concerne les conseils économiques, sociaux et environnementaux régionaux, déjà évoqués tout à l’heure. Si l’on veut que ces conseils puissent pleinement exercer leur rôle, cette proposition y contribuerait. Les échanges que nous avons pu avoir avec eux vont dans ce sens. En tout cas, je me permettrai d’indiquer que le Gouvernement est défavorable à une formalisation de leur consultation.

(L’amendement n° 439, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 675.

M. Frédéric Reiss. Défendu.

(L’amendement n° 675, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement n° 493.

Mme Marie-George Buffet. Défendu.

(L’amendement n° 493, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 16 est adopté.)

Article 17

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 92 rectifié.

M. Patrick Hetzel. Défendu.

(L’amendement n° 92 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 17 est adopté.)

Article 18

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 1392.

M. Vincent Peillon, ministre. Il me semble parfaitement légitime de mentionner le rôle, dans la concertation conduisant à l’établissement de la carte des formations, des organisations syndicales représentatives des employeurs et des salariés dans les branches professionnelles, comme l’a proposé le rapporteur et comme l’a accepté la commission. Toutefois, cette mention ne peut, seule, être suffisante car toutes les branches professionnelles ne sont pas organisées en syndicats. Cet amendement propose donc de modifier la rédaction, en mentionnant les « branches professionnelles et les organisations syndicales ».

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Après ces explications lumineuses du Gouvernement, avis favorable.

(L’amendement n° 1392 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 94.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu.

(L’amendement n° 94, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 18, amendé, est adopté.)

Après l’article 18

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement n° 494.

Mme Marie-George Buffet. Il vise à revenir sur l’abaissement de l’âge d’entrée des élèves au sein des écoles de la deuxième chance, qui avait été introduit par la loi du 24 novembre 2009 relative à l’orientation et à la formation professionnelle tout au long de la vie. Cet amendement s’inscrit dans l’esprit que vous portez, qui est de faire en sorte que l’école accompagne y compris les élèves en difficulté le plus longtemps possible.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Les écoles de la deuxième chance ont un rôle éminent, même si elles ne doivent évidemment pas remplacer la scolarité obligatoire. Restreindre les conditions d’accès ne me semble pas souhaitable. Avis défavorable.

(L’amendement n° 494, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 18 bis

(L’article 18 bis est adopté.)

Article 19

(L’article 19 est adopté.)

Article 20

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois.

Mme Marianne Dubois. L’article 20 est relatif au Conseil supérieur des programmes, et précise notamment sa composition. Il vous incombe, monsieur le ministre, de nommer dix personnalités qualifiées. Il serait souhaitable, sans vouloir peser sur votre pouvoir de nomination, que vous choisissiez parmi ces spécialistes, selon le terme du rapporteur en commission, une personnalité impliquée dans le monde des sourds et personnes malentendantes, afin de donner à ce handicap de la communication et de l’accès au savoir et à la culture toute l’importance qu’il mérite.

M. le président. Les amendements de suppression nos 440 de M. Hetzel et 1266 de M. Gomes sont défendus.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Cet avis n’est pas surprenant, mais je reste sur ma faim quant à la question que nous vous avions posée plus tôt : pourquoi ne pas garder un seul Haut conseil, avec plusieurs missions ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Le débat a eu lieu, monsieur Hetzel, et longuement. Je vous ai expliqué à plusieurs reprises notre point de vue, qui est d’ailleurs partagé y compris par l’ancien président du Haut conseil et beaucoup de ses membres : c’est qu’il n’est pas bon de mélanger la prescription et l’évaluation. C’est pourtant facile à comprendre ! Et avec une culture aussi démocratique et libérale que la vôtre, on devrait mesurer à quel point il s’agit d’un progrès.

Nous avons donc décidé, après consultation, de distinguer ces deux missions. Par ailleurs, à plusieurs reprises dans ce débat parlementaire et encore aujourd’hui à propos du socle commun de compétences, de connaissances et de culture, nous avons pu mesurer le travail qui nous attend concernant l’articulation entre le socle, les programmes, l’évaluation des élèves et la formation des professeurs, car tout cela a un lien… C’est un travail considérable. Le Conseil supérieur des programmes mobilisera d’ailleurs, vous vous étiez interrogé hier et je n’ai pas eu l’occasion de vous donner cette précision, évidemment aussi les compétences de notre Inspection générale.

La deuxième mission, c’est l’évaluation du système éducatif, qui suppose indépendance, professionnalisme et moyens. Vous savez d’ailleurs qu’il ne s’agit pas du même type d’évaluation que celui de l’Inspection générale. D’où un second conseil.

Pour ce qui est du Conseil supérieur des programmes, chacun doit mesurer, je vous l’ai dit hier, la responsabilité des ministres – du ministère, de cette institution qui va très au-delà des hommes qui la dirigent pour un temps donné, souvent d’ailleurs un peu bref dans ce pays. Il y a toutefois une certaine continuité de vision entre eux – et il leur arrive de commettre des erreurs, comme de supprimer le Conseil supérieur des programmes : tout le monde aujourd’hui considère qu’il faut en remettre un en place.

Ce Conseil supérieur des programmes, placé auprès du ministre, doit comprendre un maximum de personnalités qualifiées, à la fois des praticiens et des universitaires. Imaginez le travail que nous aurons ! Il était tout à l’heure question de Ferdinand Buisson : c’est le modèle de la grande époque où l’on faisait collaborer les meilleurs producteurs du savoir dans le pays, les professeurs au Collège de France, les membres de l’Institut, les grands universitaires et les praticiens de terrain. Cela a permis de constituer, parfois de sanctuariser des programmes qui ont duré, dans l’intérêt des élèves. C’est ce que nous allons tenter de refaire.

Il m’a semblé utile, du fait même de l’idée de socle, de cette idée que la nation doit partager une vision commune de ce qu’elle donne à chacun de ses enfants, que les parlementaires, qui représentent l’intérêt général, soient présents dans cette instance. Mais pour le reste, elle est affaire de compétences spécifiques. Je regrette la confusion qui est introduite dans ce débat : on voudrait intégrer au Conseil supérieur des programmes le Conseil supérieur de l’éducation ! Chaque syndicat, chaque association, les parents d’élèves viendraient écrire les programmes ! Non, je pense que nous avons raison de faire que le Conseil supérieur des programmes – sous le regard bien entendu des parlementaires, qui représentent la volonté générale, la souveraineté populaire – soit l’affaire de gens qui se consacrent d’abord au sujet : constituer les progressions, les programmes, les cycles, être capables d’organiser les évaluations, définir le socle… Évitons des surenchères permanentes.

Sur ce point, je vous demande un peu de sagesse. Nous sommes au nœud de ce que nous partageons, c’est-à-dire la volonté de faire du socle, des cycles, de la réussite des élèves une réalité. Vous avez voulu, à partir de l’une de mes maladresses coutumières, faire un incident mais sur ce sujet, nous sommes très au-delà des visions partisanes ! Il s’agit de nos conceptions, qui doivent redevenir tout à fait rigoureuses, des compétences, des savoirs et de la culture que nous voulons donner aux élèves.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss.

M. Frédéric Reiss. Effectivement, nous avons déjà abordé le sujet à l’occasion de l’article 1er sur le rapport annexé. À titre personnel, je l’ai dit, j’aurais préféré que le débat de fond ait lieu au moment de l’examen du présent article. C’est maintenant que nous faisons vraiment la loi, alors que dans le cadre du rapport annexé, il a été question de beaucoup de choses, certaines importantes et d’autres beaucoup moins. Vous avez souhaité mettre le rapport annexé à l’article 1er, comme si c’était l’essentiel de la loi. Je trouve que l’essentiel de la loi, c’est ici.

Nous ne pouvons que regretter la suppression du Haut conseil. Nous estimons que nombre de ses rapports, sur l’enseignement professionnel, la mise en œuvre du socle ou les expérimentations au collège par exemple, étaient d’un grand intérêt et d’ailleurs complémentaires avec les rapports de la Cour des comptes. Mais nous entendons votre volonté de séparer les choses.

Reste un point à discuter : vous insistez sur l’indépendance de ce Conseil supérieur des programmes, mais sur ses seize membres, dix sont tout de même, Marianne Dubois l’a relevé tout à l’heure, nommés par le ministre de l’éducation nationale ! Nous espérons que le Conseil pourra remplir l’ensemble des missions inscrites à l’article 20, qui sont d’une grande importance. Mais encore une fois, je regrette que la discussion de fond ait été quelque peu escamotée.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Cette question de l’indépendance nous paraît centrale, nous avons eu l’occasion de le développer. Mais il y a encore un autre élément sur lequel nos points de vue divergent : selon l’article L.230-3 du code de l’éducation, l’actuel Haut conseil de l’éducation remet chaque année au Président de la République un bilan, rendu public, des résultats obtenus par le système éducatif. Mais dans votre projet de loi, il n’est pas prévu que le rapport du Conseil supérieur des programmes soit transmis au Président de la République ! C’est la marque d’une forme de désintérêt pour la question scolaire qui nous pose question. Et c’est encore un exemple du décalage qui existe entre vos intentions affichées et la réalité. Si le sujet est aussi important, essentiel, pourquoi ne pas aller jusqu’au Président de la République ? C’est le cas aujourd’hui, mais demain ce ne le sera plus ! Il y a comme toujours un décalage entre votre discours et vos actes.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. La distinction entre Conseil supérieur des programmes et Conseil national d’évaluation paraît effectivement opportune. C’est une bonne initiative.

Les compétences du Conseil supérieur des programmes seront colossales. Rendez-vous compte : conception générale des enseignements des écoles, des collèges et des lycées, contenu du socle commun, programmes, nature et contenu des épreuves des examens conduisant aux diplômes nationaux, nature et contenu des épreuves de concours de recrutement d’enseignants… C’est énorme !

Certes, le pouvoir en l’espèce appartient au Gouvernement, et plus particulièrement au ministre de l’éducation nationale. Le Conseil supérieur des programmes émet un avis, formule des propositions, mais la capacité décisionnelle reste dans les mains du ministre. C’est pour cela qu’il est important que le Conseil soit véritablement indépendant, et reconnu comme tel. Le Conseil ne va pas dépouiller le ministère de sa compétence, il va éclairer l’exercice par le ministère de cette compétence. Et cet éclairage, il faut que l’ensemble de la représentation nationale et l’ensemble des Français le considèrent comme totalement indépendant.

La nomination des membres du Conseil est bien évidemment un élément clef de cette indépendance. Avec dix membres nommés par le ministre, il lui sera difficile d’être considéré comme tel, même si chacune des personnalités nommées par le ministre est susceptible d’être reconnue comme expérimentée et de qualité. Nous gagnerions, dans l’intérêt de l’école de la République, à trouver collectivement un processus de nomination qui d’une manière ou d’une autre contribue à garantir cette indépendance.

(Les amendements identiques nos 440 et 1266 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements, nos 1116 rectifié, 79 rectifié, 1173 rectifié et 691, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 79 rectifié et 1173 rectifié sont identiques.

L’amendement n° 1116 rectifié de M. Reiss est défendu.

L’amendement n° 79 rectifié de M. Hetzel est défendu.

L’amendement n° 1173 rectifié de Mme Genevard est défendu.

L’amendement n° 691 de M. Reiss est défendu.

(L’amendement n° 1116 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 79 rectifié et 1173 rectifié, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n° 691, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n°1460.

M. Vincent Peillon, ministre. C’est un amendement rédactionnel.

(L’amendement n° 1460, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 1029 est défendu.

(L’amendement n° 1029, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 170.

Mme Barbara Pompili. Cet amendement a pour objet de préciser la composition du collège des personnalités qualifiées.

Évidemment, nous avons déjà apporté notre soutien à la création du Conseil supérieur des programmes. Il faut cependant que la composition de celui-ci soit précisée. Nous suggérons qu’il soit composé pour moitié d’enseignants en activité, pour qu’un point de vue émanant du terrain puisse nourrir la réflexion, et pour moitié de personnalités de la société civile et des milieux artistiques et culturels, qui apporteront un regard extérieur et permettront d’intégrer des aspects extra-scolaires à la réflexion.

(L’amendement n° 170, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Les amendements identiques, nos 365, de Mme Barbara Pompili, et 378, de Mme Isabelle Attard, sont défendus.

(Les amendements identiques nos 365 et 378, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 169 et 1267.

La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 169.

Mme Barbara Pompili. Si le Conseil supérieur des programmes doit pouvoir – nous l’avons acté – travailler en toute indépendance, il faut aussi que sa composition ne prête à pas à polémique. Évitons donc à tout prix tout ce qui pourrait ressembler à un fait du prince.

Afin que cet organe ne soit pas accusé de partialité dans ses réflexions, sa composition doit être plurielle et transparente. Un débat ouvert s’impose, qui ne doit pas se limiter au choix des membres issus du Parlement. Bien sûr, la décision finale revient au ministre – la question ne se pose pas – mais elle ne doit intervenir qu’après un débat ouvert.

Nous proposons donc qu’elle ne soit prise qu’après un débat dans les deux commissions concernées du Parlement.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 1267.

M. Philippe Gomes. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Nous avons déjà eu ce débat hier. La commission émet un avis défavorable.

(Les amendements identiques nos 169 et 1267, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 818 de M. Philippe Gomes est défendu.

(L’amendement n° 818, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement n° 495.

Mme Marie-George Buffet. Lorsque nous avons discuté en commission, monsieur le rapporteur, de la composition du Conseil supérieur des programmes, et que nous avons exprimé le souhait qu’y siègent un certain nombre de personnes, telles que les représentants des personnels de l’enseignement public ou des parents, vous nous avez suggéré une solution alternative : la mise en place d’un conseil consultatif dont ces personnes seraient membres. C’est précisément l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Si la création d’une telle instance consultative est pertinente, madame Buffet, elle ne ressort pas du domaine de la loi. La commission a donc émis un avis défavorable.

Cependant, compte tenu de l’importance, sur le fond, de votre proposition, je pense que M. le ministre pourra vous donner un certain nombre de précisions.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Cette question est assez liée aux autres, et au souci de l’indépendance du Conseil supérieur des programmes que les membres du Parlement expriment, à juste titre. Nous essaierons de le respecter, tout en élaborant les programmes.

J’ai l’expérience du Conseil supérieur de l’éducation, qui est l’instance légitime où siègent non seulement les organisations représentatives mais aussi l’ensemble des grandes associations. J’ai souhaité en faire un parlement, et il donne souvent des arguments à la droite, car j’y suis souvent mis en minorité. Je crois, pour avoir conversé avec eux, que les nombreux membres du Conseil supérieur de l’éducation ne voudraient pas qu’on les dépossédât de leurs prérogatives, d’autant qu’ils sont eux-mêmes élus. Nous devons donc articuler le travail du Conseil supérieur des programmes avec celui du Conseil supérieur de l’éducation.

Pour l’instant, leurs relations relèvent plutôt d’un genre de coutume. Par exemple, nous présentons au Conseil supérieur de l’éducation l’ensemble de nos réflexions, de nos circulaires, etc., et nous en discutons avec lui. De même la mission sur la morale laïque a-t-elle rencontré les membres de ce Conseil. Peut-être faut-il songer à un lien plus institutionnel entre le Conseil supérieur des programmes et le Conseil supérieur de l’éducation.

Je pense donc, tout d’abord, qu’il ne faut pas revenir sur l’existence du Conseil supérieur de l’éducation. Il existe, il est légitime, et les représentants des associations que vous évoquez y siègent. Ne revenons pas là-dessus, même s’il faut sans doute trouver les termes d’une articulation entre les deux instances qui ne repose pas uniquement sur la bonne volonté ou sur la coutume. Nous allons donc y réfléchir.

Sur le fond, je ne suis pas défavorable à votre suggestion, madame la députée. Simplement, établissons un lien entre les deux instances qui existent.

(L’amendement n° 495 est retiré.)

(L’article 20, amendé, est adopté.)

Article 21

M. le président. Je suis saisi de trois amendements de suppression, nos 441, 1174 et 1268.

L’amendement n° 441 de M. Patrick Hetzel est défendu.

L’amendement n° 1174 de Mme Annie Genevard est défendu.

L’amendement n° 1268 de M. Philippe Gomes est défendu.

(Les amendements identiques nos 441, 1174 et 1268, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 80, 1180 et 1117 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements nos 80 et 1180 sont identiques.

L’amendement n° 80 de M. Patrick Hetzel est défendu.

L’amendement n° 1180 de Mme Annie Genevard est défendu.

L’amendement n° 1117 rectifié de M. Reiss est défendu.

(Les amendements identiques nos 80 et 1180, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

(L’amendement n° 1117 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 320.

M. Patrick Hetzel. Le Conseil national d’évaluation du système éducatif doit par nature être indépendant. C’est pourquoi nous avons déposé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable : nous sommes pour l’indépendance ! (Sourires.)

M. Patrick Hetzel. Alors mettez-la en œuvre !

(L’amendement n° 320, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 118 et 1175.

L’amendement n° 118 de M. Patrick Hetzel est défendu.

L’amendement n° 1175 de Mme Annie Genevard est défendu.

(Les amendements identiques nos 118 et 1175, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 442 et 1176.

L’amendement n° 442 de M. Patrick Hetzel est défendu.

L’amendement n° 1176 de Mme Annie Genevard est défendu.

(Les amendements identiques nos 442 et 1176, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 1269 de M. Philippe Gomes est défendu.

(L’amendement n° 1269, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 97 rectifié de M. Patrick Hetzel est défendu.

(L’amendement n° 97 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 98, 1177 et 1271.

L’amendement n° 98 de M. Patrick Hetzel est défendu.

L’amendement n° 1177 de Mme Annie Genevard est défendu.

L’amendement n° 1271 de M. Philippe Gomes est défendu.

(Les amendements identiques nos 98, 1177 et 1271, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n° 171.

Mme Isabelle Attard. Nous souhaitons que le Conseil national d’évaluation du système éducatif évalue aussi les évaluations nationales pédagogiques demandées aux élèves.

Nous estimons notamment que le livret personnel de compétences n’a pas été établi correctement. Il doit donc faire l’objet d’un bilan approfondi de nature à permettre son évolution. Il faut également réexaminer la question de la confidentialité des informations dans le cadre de ces évaluations ; ce point doit être précisé.

Nous sommes tout à fait favorables à la création du Conseil national d’évaluation du système éducatif, mais l’amélioration que nous proposons nous paraît possible.

(L’amendement n° 171, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 319.

M. Patrick Hetzel. Pour pouvoir porter ses efforts sur les territoires les plus fragiles, l’État doit évidemment se doter d’un véritable outil de pilotage national d’évaluation des besoins en matière de ressources pédagogiques. Le Conseil national d’évaluation doit donc pouvoir assister le ministre chargé de l’éducation nationale dans sa mission de garant de l’égalité d’accès aux ressources pédagogiques des élèves sur l’ensemble du territoire, et, bien entendu, dans l’ensemble des établissements concourant au service public d’éducation nationale.

Tel est le sens du présent amendement.

(L’amendement n° 319, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 1272.

M. Philippe Gomes. Je le retire, monsieur le président.

(L’amendement n° 1272 est retiré.)

M. le président. L’amendement n° 693 de M. Frédéric Reiss est défendu.

(L’amendement n° 693, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 1461.

M. Vincent Peillon, ministre. C’est une contribution importante : il s’agit de substituer aux mots « , selon le principe de parité entre les femmes et les hommes » les mots « à parité de femmes et d’hommes ». (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Après réflexion, la commission émet un avis favorable. (Sourires.)

(L’amendement n° 1461 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 321.

M. Patrick Hetzel. L’éducation est évidemment une priorité nationale. Nous proposons donc que le nombre de membres du Conseil national d’évaluation du système éducatif passe de quatorze à dix-sept, pour que les collectivités territoriales y soient représentées. C’est d’autant plus important que l’on voit, même si je ne veux pas insister, quelle bronca suscite du côté des collectivités la question des rythmes scolaires. Une vraie concertation suppose que l’on fasse appel à un certain nombre de représentants.

Grâce à cet amendement, siègeraient dans le Conseil un représentant des communes, un représentant des départements et un représentant des régions. Cela évitera au ministre de mener une politique de gribouille, comme sur la question des rythmes scolaires. Il se heurte à une bronca alors qu’il crée dans le même temps 60 000 postes ; et que son ministère est le seul qui soit aussi bien doté : c’est un comble ! Notre démarche vise évidemment à venir en aide à M. le ministre. (Sourires.)

(L’amendement n° 321, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 99 et 1178, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 99.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 1178.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

(Les amendements nos 99 et 1178, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 172.

Mme Barbara Pompili. Il est défendu.

(L’amendement n° 172, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 322 et 173, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 322.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 173.

Mme Barbara Pompili. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

(Les amendements nos 322 et 173, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Corre, pour soutenir l’amendement n° 1333.

Mme Valérie Corre. Il s’agit d’assurer la représentation des parents délégués au sein du nouveau Conseil national d’évaluation du système éducatif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. À l’initiative du président Bloche, une mission sur le rôle des parents a été mise en place. Il me paraît donc judicieux que ce problème soit évoqué dans le cadre de cette mission. Aussi, je demande à l’auteure de cet amendement de le retirer, ce qui permettrait de prendre le temps de la réflexion.

Mme Valérie Corre. Je le retire !

(L’amendement n° 1333 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 367 et 379.

La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 367.

Mme Barbara Pompili. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n° 379.

Mme Isabelle Attard. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 367 et 379, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 1033 est défendu.

(L’amendement n° 1033, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 1179.

Mme Annie Genevard. Il s’agit de proposer, outre huit personnalités choisies pour leurs compétences en matière d’évaluation ou dans le domaine éducatif, trois personnalités représentant les parents d’élèves, le monde étudiant ainsi que le monde économique.

Ces trois personnalités seraient en fait trois « usagers » du système éducatif. Comme l’a dit Claude Thélot, l’école est un sanctuaire ouvert : il faut à la fois la protéger et lui donner tous les moyens d’être ouverte sur le monde. Cet amendement permettrait d’intégrer dans ce Conseil national d’évaluation du système éducatif ceux-là mêmes pour lesquels notre éducation nationale est faite, c’est-à-dire les étudiants, les familles, et secondairement le monde économique, afin qu’ils puissent apporter leur contribution à l’évaluation de notre système éducatif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

(L’amendement n° 1179 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement n° 496.

Mme Marie-George Buffet. Avant de retirer cet amendement, je souhaite rappeler, puisqu’il est identique à celui que j’ai défendu puis retiré tout à l’heure, que je serai très attentive aux efforts qui seront faits pour établir un lien plus important entre le Conseil supérieur de l’éducation et le Conseil supérieur des programmes.

(L’amendement n° 496 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Jérôme Guedj, pour soutenir l’amendement n° 662.

M. Jérôme Guedj. Je vais retirer cet amendement, le Gouvernement ayant précisé que le Conseil procèdera également à une évaluation du caractère inclusif de l’école.

(L’amendement n° 662 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Gisèle Biémouret, pour soutenir l’amendement n° 1350.

Mme Gisèle Biémouret. Cet amendement vise à faire évaluer par le Conseil national d’évaluation du système éducatif les mesures prises pour lutter contre l’illettrisme.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Le comité de suivi de l’application de la loi devrait pouvoir aussi s’occuper de ce problème.

M. Patrick Hetzel. Je ne vous dis pas quel travail il va avoir !

M. Yves Durand, rapporteur. L’illettrisme est toutefois une grande cause nationale. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Sagesse.

(L’amendement n° 1350 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 101 et 1273.

La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 101.

M. Patrick Hetzel. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes, pour soutenir l’amendement n° 1273.

M. Philippe Gomes. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 101 et 1273 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 1457.

M. Vincent Peillon, ministre. La commission des affaires culturelles et de l’éducation a inséré un dix-septième alinéa à l’article 21 précisant que les expérimentations pédagogiques réalisées en application de l’article L. 401-1 du code de l’éducation doivent être évaluées.

Cette intention cohérente cadre bien avec le Conseil national d’évaluation. Cependant, elle est déjà satisfaite par l’alinéa suivant du même article qui prévoit précisément que le Conseil national d’évaluation établira chaque année un bilan des expérimentations.

Comme nous sommes attachés à l’esprit d’initiative et aux libertés pédagogiques, il nous semble que le suivi ex post est plus adapté, eu égard au nombre d’expérimentations en cours, qu’une autorisation préalable. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’alinéa 17.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Je suis favorable à cet amendement qui reprend l’esprit du texte qui a été adopté par la commission.

(L’amendement n° 1457 est adopté.)

(L’article 21, amendé, est adopté.)

Après l’article 21

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 174.

Mme Barbara Pompili. Cet amendement est dans la lignée de ceux que nous présentons sur l’expérimentation pédagogique. Nous proposons que les innovations soient favorisées dans les inspections.

La rédaction actuelle de l’article L. 241-1 précise que les expériences pédagogiques innovantes doivent être prises en compte afin de faire connaître les pratiques innovantes. Il faut aller plus loin, renforcer la prise en compte des expérimentations en les valorisant dans les évaluations des équipes et des enseignants. Faire connaître des pratiques innovantes et accompagner des volontaires afin de faciliter des expériences doit être l’une des missions de l’Inspection générale. Je parle bien de volontaires puisqu’il s’agit d’expériences sur la base du volontariat ; on ne veut pas forcer qui que ce soit.

Les inspecteurs généraux sentent que leur rôle est un peu confus en ce moment et qu’il faudrait favoriser les innovations. Ils n’ont pas fait de proposition particulière, mais pour notre part nous en faisons une.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Madame Pompili, je pense que vous faites une confusion sur le terme d’évaluation, puisqu’il ne s’agit pas ici de l’évaluation des enseignants. L’avis de l’Inspection générale est fort intéressant, mais hors sujet sur l’évaluation des politiques.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Le problème soulevé par l’amendement de Mme Pompili est considérable. C’est tout le problème de l’évaluation de nos enseignants, de la mise en œuvre d’un certain nombre d’objectifs pédagogiques ainsi que de l’évolution du métier, sujet qui préoccupe l’opposition comme nous-mêmes.

Ce sujet, qui me passionne d’ailleurs, nous ne le traiterons pas à propos du Conseil national d’évaluation dont ce n’est pas la mission, puisque celle-ci consiste en une évaluation globale du système et de ses performances. Mais nous aurons rapidement l’occasion de débattre de l’évaluation des professeurs et des missions de l’Inspection générale, si votre commission veut bien m’inviter.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. S’agissant de la question passionnante du rôle de l’inspection, il faudrait sans doute envisager une évolution des missions de l’inspection qui s’attacherait moins aux méthodes d’enseignement qu’aux résultats, et qui concentrerait tous ses efforts sur les progrès de l’élève.

M. le président. La parole est à Mme Barbara Pompili.

Mme Barbara Pompili. J’avais bien pris soin de ne pas déposer cet amendement sur l’article concernant le Conseil national d’évaluation !

Je pense qu’il s’agit là d’un débat très important. Je suis heureuse qu’il ait pu être abordé ici et de savoir que le ministre souhaite en débattre avec nous à d’autres moments. Aussi, je retire l’amendement.

(L’amendement n° 174 est retiré.)

Article 22

M. le président. L’article 22 ne fait l’objet d’aucun amendement.

Je le mets aux voix.

(L’article 22 est adopté.)

Article 23

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l’amendement n° 497.

Mme Marie-George Buffet. Il est défendu.

(L’amendement n° 497, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 694 rectifié.

M. Frédéric Reiss. Les cycles issus de la loi d’orientation de 1989, dite loi Jospin, sont remis en cause. L’article 23 précise en effet que le nombre des cycles et leur durée seront fixés par décret. On ne sait donc pas comment les choses vont se passer, même après les discussions que nous avons eues lors de l’examen du rapport annexé.

Je suis favorable au développement des liaisons entre le CM2 et la sixième. Ces liaisons ne sont pas nouvelles puisqu’elles sont issues de la loi Haby de 1975. On souhaite leur donner une nouvelle impulsion. Soit.

Par contre, c’est une erreur que de vouloir refermer l’école maternelle sur elle-même. J’entends bien l’argumentation selon laquelle cela lui permettrait de retrouver toute sa dimension, mais actuellement l’école maternelle fonctionne bien, même si elle est encore perfectible, et le cycle des apprentissages fondamentaux qui comprend la grande section de maternelle et le CP est tout à fait pertinent.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Un long débat sur les cycles a déjà eu lieu hier. Aussi, je n’y reviendrai pas. La spécificité de l’école maternelle a été complétée hier par un amendement qui demande aux enseignants de grande section de maternelle et du CP de travailler ensemble. Du reste, je crois que vous aviez voté cet amendement.

La commission a donné un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Monsieur le rapporteur, l’amendement de M. Reiss, qui vise à supprimer les alinéas 3 et 4 de l’article 23, permet de revenir à la loi Jospin qui a instauré ce continuum entre la grande section de maternelle et le CP.

Au cours du débat, un point a fait consensus : la grande section de maternelle joue un rôle décisif dans l’acquisition des connaissances et la préparation à l’école primaire. De ce point de vue, la loi Jospin est bien plus satisfaisante que ce que l’on nous prépare aujourd’hui. Nous proposons donc d’en rester à la loi Jospin.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Je ne suis pas sûr que la réponse qui consiste à créer un cycle qui ne concerne que l’école maternelle soit une bonne réponse face au problème de l’évolution de l’enseignement en grande section, qui s’apparentait trop à un mini-CP. On aurait pu conserver les cycles existants tout en modifiant le contenu des enseignements en grande section et la manière dont ce contenu est mis en œuvre par les enseignants. Cela nous aurait permis de parvenir à un résultat tout à fait pertinent.

En ce qui concerne l’autre modification de cycle qui nous est annoncée, c’est-à-dire la liaison entre le CM2 et la sixième, il est indispensable de renforcer les liens mis en place depuis de nombreuses années. Je crains, hélas, que le cycle qui a vocation à être instauré dans le cadre de la loi et des décrets qui suivront ne conserve un caractère strictement administratif et ne reste sans effets concrets dans nos écoles.

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Sur cette affaire des cycles, qui n’étaient pas dans la loi de 1989 mais dans les textes d’application, nous assumons parfaitement notre volonté, non pas de faire de la maternelle une école à part – les personnels seront formés ensemble et ils échangeront au plan pédagogique –, mais d’éviter sur le plan des apprentissages les dérives que nous avons pu connaître et la pression qui s’exerce aujourd’hui sur l’école maternelle.

Est-ce que cette volonté sera figée dans le marbre pour l’éternité ? Franchement, la démarche que nous avons adoptée, que je n’appellerai pas un tâtonnement expérimental de peur d’inquiéter, consistera à essayer de tirer les leçons d’un certain nombre d’évolutions. Nous verrons bien.

En revanche, s’agissant de la liaison entre le CM2 et la sixième, nous connaissons tous les débats qui se cachent derrière, sur la structuration de l’école française. Nous connaissons les difficultés à constituer cette « école du socle » que certains appellent de leurs vœux, qui existe dans d’autres pays et qui a ses vertus ; mais je pense qu’avec le conseil pédagogique CM2-sixième, la modification des obligations de service des enseignants du primaire et la mise en place des écoles supérieures, où les différents publics pourront travailler ensemble, nous avançons.

Nous avons pris une entrée qui paraîtra peut-être insatisfaisante à certains, en termes de structures, mais qui nous permettra de continuer dans la bonne direction. Autant sur la maternelle nous compensons, nous rectifions, autant sur l’articulation entre le CM2 et la sixième nous pouvons avancer avec une certaine sérénité.

(L’amendement n° 694 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n° 177.

Mme Isabelle Attard. Monsieur le ministre, nous vous écoutons lorsque vous décidez de revaloriser la notion de cycle en maternelle. Vous en proposez un seul pour la maternelle, puis un pour la liaison entre le CM2 et la sixième. Pourquoi ne pas aller encore plus loin ? Puisque vous avez le courage de les remettre au goût du jour, pourquoi ne pas inscrire les cycles dans la loi, au lieu de les laisser dans l’annexe ?

Cela mettrait en valeur votre travail, ferait évoluer les missions de la maternelle et renforcerait la transition entre le primaire et le collège.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Le ministre, dans la réponse qu’il vient de faire à l’amendement précédent, a bien montré la philosophie de ce projet de loi : à savoir, la transition douce, l’absence de rupture entre la classe de CM2 et la sixième. Il y a en plus le conseil CM2-sixième et l’encouragement à mettre en place des enseignements communs. On voit bien quelle est la tendance.

De là à créer dans la loi un cycle commun, non : ce serait, une fois de plus, figer les choses. Laissons aux décrets la possibilité de l’établir, mais avec la souplesse nécessaire pour être efficaces. Quand on fige tout dans la loi, les réformes ne se réalisent pas pour autant dans les écoles. La loi de 1989 est d’ailleurs un bon exemple, si j’ose dire.

Parce que la question relève plutôt du décret que de la loi, et qu’il ne faut pas figer les choses mais impulser une dynamique, la commission a émis un avis défavorable. Elle ne conteste pas le fond de la politique proposée, mais la méthode. Je suggère donc à Mme Attard, voyant vers où nous voulons aller, de retirer son amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Vincent Peillon, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Monsieur le rapporteur, on impulse encore mieux quand on inscrit dans le marbre… Mais je retire cet amendement.

(L’amendement n° 177 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Gomes.

M. Philippe Gomes. Nous sommes dans l’incertitude la plus complète. Si je comprends bien, les cycles ne sont pas inscrits dans la loi, mais dans l’annexe on nous dit comment les cycles actuels vont être corrigés. En ce qui concerne le socle, l’annexe n’en dit rien et la loi ne comporte qu’un titre. Qu’est-ce qui nous empêchait d’indiquer dans l’annexe, à l’instar de ce qui a été fait pour les cycles, sur quels piliers nous pouvions le construire ?

C’est le vice originel de ce texte : une annexe qui ressemble à un exposé des motifs sans en être un, irriguant le champ réglementaire sans véritablement l’irriguer, ou en fonction des circonstances… On voit combien le choix qui a été fait n’était pas pertinent.

Le rapporteur nous dit que nous risquions de « figer les choses ». Si en vingt-cinq ans nous n’avons pas réussi à mettre les cycles en œuvre, ce n’est pas en les changeant toutes les cinq minutes qu’on va y parvenir.

La question n’est pas de figer, mais de déterminer par un vote de la représentation nationale la manière dont doivent s’organiser le socle et les cycles. Sur les bases ainsi édictées, il reviendrait alors au pouvoir réglementaire de mettre les choses en musique. C’est à mon avis la meilleure manière de procéder ; ce n’est pas celle qui a été choisie par le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu.

M. Benoist Apparu. Juste une question sur la hiérarchie des normes : monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, quelle est la portée normative du rapport annexé ? Zéro !

En revanche, il a une portée législative. Le rapporteur nous dit que nous risquons de trop figer les choses en inscrivant les cycles dans la loi : mais les cycles sont dans la loi, puisqu’ils sont dans le rapport annexé.

Demain, me semble-t-il, un décret ne pourrait pas modifier la composition des cycles, puisque ceux-ci sont inscrits dans ce rapport qui certes n’a pas de portée normative, mais qui a une valeur législative.

Y a-t-il une réponse à cette question ou pas ?

M. le président. La parole est à M. le ministre.

M. Vincent Peillon, ministre. Je suis très sensible aux remarques que vous faites, les uns et les autres, sur cette question et j’assume parfaitement la méthode qui est la mienne : cheminer là où nous pouvons avancer ensemble, comme je le dis depuis le début de cette discussion. Cela peut parfois vous contrarier, même si vous êtes souvent à double fond… Je reprends beaucoup de choses, que ce soit l’enseignement moral, la lutte contre le harcèlement, la pédagogie de la laïcité, le socle… Je ne suis donc pas dans la posture qui vous arrangerait, qui serait une posture sectaire. Car je pense profondément que notre mission va au-delà.

Sur la question du socle, vous avez fort bien parlé dans votre première intervention. Nous ne nous connaissions pas, j’ai vraiment partagé votre analyse. Pourquoi les choses n’ont-elles pas fonctionné comme nous le souhaitions, quels ont été les obstacles ? Qu’il s’agisse de la priorité au primaire, des écoles supérieures, de l’ambition numérique – car il y a quand même des choses dans ce projet de loi ! – notre réponse a été de dire : nous allons essayer d’avancer là où nous le pouvons.

Sur les cycles – qui sont d’ordre normatif, je vous réponds –, nous pouvons aller plus loin qu’on ne l’a fait jusqu’à présent dans l’articulation entre le CM2 et la sixième, et franchement vous pouvez vous en réjouir. Quant à l’école maternelle, les dérives des dernières années sont un problème majeur pour nous, comme pour les enseignants. Je ne parle pas ici de la question des moyens, mais de la question pédagogique.

Après avoir beaucoup consulté, y compris l’association des enseignants de maternelle et l’Inspection générale, je suis convaincu que nous devons faire cet effort.

Que savez-vous de la réalité ? C’est que nous allons avoir une discussion sur ce qui se passe entre ce cycle de la maternelle et le passage du CM2 à la sixième. Là, tous les spécialistes ne sont pas encore convaincus. Le Conseil supérieur des programmes pourra sans doute nous éclairer sur la meilleure façon de procéder.

M. le président. La parole est à M. Benoist Apparu.

M. Benoist Apparu. J’ai posé une pure question de hiérarchie des normes. Est-ce qu’un décret peut modifier les cycles qui sont inscrit dans le rapport annexé d’une loi, lequel a une valeur législative ?

M. Patrick Hetzel. Non !

Mme Marie-Françoise Bechtel. Non.

M. Benoist Apparu. Ma question est purement juridique.

M. le président. Mes chers collègues, l’amendement n° 177 ayant été retiré, notre débat est tout à fait « hors sol »… Reprenons le cours normal de nos travaux.

La parole est à Mme Barbara Pompili, pour soutenir l’amendement n° 176.

Mme Barbara Pompili. Cet amendement concerne le problème de la notation. Nous avons déjà eu ce débat hier, je ne veux donc pas le relancer juste avant le dîner : cela dit, il est vrai qu’il y a une petite interrogation sur la portée normative de l’annexe.

M. Patrick Hetzel. La majorité se fissure !

Mme Barbara Pompili. Nous avons décidé hier qu’il ne fallait pas interdire la notation. J’en ai pris acte et c’est un choix qui est tout à fait concevable. Cela dit, dans la mesure où la valeur juridique de l’annexe peut être contestée, il est important d’inscrire dans la loi les éléments qu’on a mis dans l’annexe sur la notation : non son interdiction, mais l’idée de l’éviter au profit d’une évaluation positive de la progression de chaque élève, logique qui devra être encouragée aussi dans le secondaire. Je pense que cela respecte l’esprit de ce qui est rédigé dans l’annexe, mais prendrait ici une réelle valeur normative.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Yves Durand, rapporteur. Comme vous venez de le rappeler, madame Pompili, nous avons eu ce débat hier, je ne le reprendrai donc pas au fond. Nous n’avons pas inscrit cela dans le rapport annexé…

Mme Barbara Pompili. Si !

M. Yves Durand, rapporteur. A fortiori, nous n’allons pas l’inscrire dans la loi.

(L’amendement n° 176, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 23 est adopté.)

3

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite du projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures.)