
Mardi 1er avril 2025, l’Assemblée nationale a adopté :
- la proposition de loi, adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, visant à sortir la France du piège du narcotrafic ;
- la proposition de loi organique, adoptée par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, fixant le statut du procureur de la République national anti-criminalité organisée.
L'Assemblée nationale avait examiné les propositions de loi, en séance publique, du lundi 17 au jeudi 27 mars 2025.
Les rapporteurs des deux propositions de loi sont Vincent Caure (Ensemble pour la République, Paris), Eric Pauget (Droite Républicaine, Alpes-Maritimes) et Roger Vicot (Socialistes et apparentés, Nord).
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Version adoptée par la commission des lois
La commission des lois a examiné la proposition de loi du mercredi 5 mars au matin au vendredi 7 mars dans l’après-midi.
Parmi les 190 amendements qu’elle a adoptés au cours de ses vingt-cinq heures de débats, la commission a notamment procédé aux modifications suivantes :
- À l’article 1er, elle a prévu la présence de deux magistrats judiciaires au sein du service visé par l’article, afin d’assurer la présence de l’ensemble des représentants de la chaîne pénale [CL1 d'Antoine Léaument (LFI-NFP)] ;
- À l’article 2, elle a intégré dans le champ de compétence du PNACO les crimes de meurtre en bande organisée et d’actes de torture et de barbarie en bande organisée [CL542 de M. Caure, rapporteur, et CL441 de Mme Moutchou (Hor) et CL473 de M. Huyghe (EPR), identiques], et fixé la date d’entrée en fonctions de ce nouveau parquet au 1er juillet 2026 [CL555 de M. Caure, rapporteur].
- À l’article 3, la commission a élargi la possibilité d’ordonner une fermeture administrative non seulement pour prévenir mais aussi pour faire cesser des infractions de trafic de stupéfiants, de blanchiment et d’association de malfaiteurs [CL629 de M. Pauget, rapporteur] ;
- À l’article 3 bis, la commission a étendu la durée de conservation des données transmises aux douanes par les opérateurs de transport à deux ans, et prévu une amende pour les opérateurs qui fourniraient des données inexploitables ou incomplètes [CL641 de M. Pauget, rapporteur].
- À l’article 8, la commission a restreint le champ du recours au renseignement algorithmique par l’article à la criminalité organisée concernant le trafic de stupéfiants, le trafic d’armes et au blanchiment des produits qui sont issus de ces infractions [CL668 de M. Vicot, rapporteur].
- Par un nouvel article 11 bis, la commission a introduit une circonstance aggravante lorsque les trafiquants exploitent des personnes vulnérables, communément appelées « mules » [CL162 de M. Blanchet (Dem)] ;
- À l’article 13, la commission a prévu l’application aux mineurs âgés de plus de 16 ans, y compris lorsque la cour d’assises décide d’écarter l’excuse de minorité, des dispositions tendant à la professionnalisation des cours d’assises pour juger des crimes commis en bande organisée et du crime d’association de malfaiteurs en vue de commettre de tels crimes [CL644 de M. Pauget, rapporteur].
- À l’article 14, la commission a harmonisé les conditions d’octroi des exemptions et réductions de peine, en prévoyant notamment pour l’ensemble des réductions de peine des conditions alternatives et non cumulatives [CL510 de M. Pauget, rapporteur, sous-amendé par CL673 de M. Colombani (LIOT), afin d’inclure également dans le dispositif les cas de meurtre en bande organisée].
- À l’article 14 bis, la commission a procédé à un ajustement des mesures de de protection dont peuvent bénéficier les témoins menacés, afin de renforcer cette protection et la rendre plus pertinente [CL637 de M. Pauget, rapporteur].
- À l’article 15 bis A, la commission a introduit des sanctions pénales en cas de révélation de l’identité d’un interprète ayant bénéficié d’une anonymisation [CL179 de Mme Regol (EcoS)] ;
- À l’article 19, la commission a supprimé les dispositions relatives à l’infiltration civile, jugées insuffisamment abouties et ne répondant pas à un besoin opérationnel [CL605 de M. Vicot, rapporteur] ;
- À l’article 22, la commission a supprimé la procédure de signalement par l’intermédiaire d’un point de contact unique, jugée redondante avec celle applicable aux lanceurs d’alerte [CL606 de M. Caure, rapporteur] ;
- À l’article 23, la commission a procédé à des ajustements concernant l’incarcération des narcotrafiquants, à la détention provisoire et à la procédure applicables aux demandes de mise en liberté. Elle est notamment revenue sur la possibilité laissée à la chambre de l’instruction de refuser la mise en liberté d’office d’un individu lorsque les délais dans lesquels il doit être statué sur sa demande de mise en liberté ont été dépassés, du fait de difficultés opérationnelles et afin de garantir le respect des droits de la personne détenue [CL565 de M. Caure, rapporteur, et identique CL423 de M. Amirshahi (EcoS)].
- À l’initiative du Gouvernement, la commission a institué un régime particulier de détention stricte pour des personnes jugées comme particulièrement dangereuses (article 23 quinquies nouveau).
La commission a par ailleurs supprimé les dispositions prévoyant :
- Le gel judiciaire des avoirs des personnes soupçonnées de trafic de stupéfiants ou d’autres infractions liées à la criminalité organisée (article 5 bis) ([CL642 de M. Pauget, rapporteur, et CL444 de Mme Moutchou (Hor), identique].
- L’obligation de déchiffrement des communications sécurisées par les opérateurs et fournisseurs de services sur internet (article 8 ter), en raison de l’atteinte excessive à la vie privée que représenterait l’installation de « portes dérobées » [CL44 de M. Léaument (LFI-NFP) et CL176 de Mme Regol, CL205 de M. Delaporte, CL282 de M. Molac, CL312 de M. Lopez-Liguori et CL335 de Mme Faucillon].
- La possibilité pour les enquêteurs d’activer à distance, afin d’enregistrer de l’image et du son, un appareil électronique fixe (article 15 ter [CL52 de M. Bernalicis (LFI-NFP), et CL213 de Mme Capdevielle (Soc), CL317 de Mme K/Bidi (GDR), CL349 de M. Houlié (NI) et CL495 de M. Amirshahi (EcoS), identiques]) ou mobile (article 15 quater [CL54 de M. Léaument (LFI-NFP), et CL188 de Mme Regol (EcoS), CL214 de Mme Capdevielle (Soc) et CL318 de Mme Faucillon (GDR), identiques]), jugée attentatoire au droit à la vie privée ;
- La possibilité pour les enquêteurs de recourir à un procès-verbal distinct, également appelé « dossier-coffre », qui n’est pas versé dans le dossier de la procédure (article 16), du fait de l’atteinte excessive que ce dossier porterait aux droits de la défense et au principe du contradictoire [CL57 de M. Bernalicis (LFI-NFP), et CL120 de M. Iordanoff (EcoS), CL215 de Mme Capdevielle (Soc), CL319 de Mme K/Bidi (GDR) et CL469 de Mme Moutchou (Hor), identiques] ;
- L’extension de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité aux crimes prévus en matière de trafic de stupéfiants (article 20 ter), afin que ne soient pas recherchées, en matière criminelle, une procédure et des audiences allégées [CL70 de M. Bernalicis (LFI-NFP), et CL121 de M. Iordanoff (EcoS), CL218 de Mme Capdevielle (Soc), CL252 de Mme K/Bidi (GDR) et CL459 de Mme Moutchou (Hor), identiques].
Version adoptée par la commission des loi de la proposition de loi organique fixant le statut du procureur de la République national anti-criminalité organisée
L’article unique de la proposition de loi organique adoptée par le Sénat prévoit de limiter à sept ans la durée d’exercice de la fonction de procureur de la République national anti-criminalité organisée. Cette durée est ainsi alignée sur la durée maximale d’exercice au sein d’un même tribunal judiciaire pour tout président ou procureur de la République, de même que pour le Procureur de la République antiterroriste.
Lors de l’examen de la proposition de loi organique, la commission des lois de l’Assemblée nationale a décidé de fixer la date d’entrée en fonctions de ce nouveau procureur de la République au 1er juillet 2026 [CL5 de M. Caure, rapporteur].
Version adoptée par le Sénat de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic
Le texte adopté par le Sénat prévoit notamment :
- L’institution, par voie réglementaire, d’un service chef de file en matière de lutte contre la criminalité organisée, chargé d’impulser, animer, piloter et coordonner l’action des services de l’État qui y concourent (article 1er) ;
- La création d’un parquet national anti-stupéfiants (PNACO), chef de file de la lutte contre le trafic au niveau judiciaire et chargé de traiter le « haut du spectre » grâce à une compétence d’attribution en matière correctionnelle et à un monopole sur l’ensemble des crimes liés au narcotrafic (article 2) ;
- Le renforcement des dispositifs de lutte contre le blanchiment, notamment grâce à un dispositif de fermeture administrative des commerces soupçonnés de blanchiment (article 3), l’accès direct des douanes aux données des opérateurs de transport et de logistique (article 3 bis) et l’interdiction des « mixeurs » de crypto-actifs (article 4 bis) ;
- Le renforcement des moyens à disposition du renseignement administratif, par le partage d’information entre les juridictions et les services de renseignement (article 6), le recours au renseignement algorithmique en matière de criminalité organisée (article 8) et l’obligation de déchiffrement des communications sécurisées par les opérateurs, en leur imposant de mettre directement à disposition des données intelligibles dans le cadre de la mise en œuvre de techniques d’enquête numérique judiciaire et des techniques de recueil de renseignement (article 8 ter) ;
- Des mesures de lutte contre le trafic de stupéfiants par passeurs (article 11), et le trafic de stupéfiants en ligne (article 12) ;
- La réforme du dispositif des collaborateurs de justice (« repentis ») (article 14) et le renforcement du régime de protection des témoins (article 14 bis) ;
- L’élargissement du champ des techniques d’enquête permises par la loi, pour inclure l’activation à distance d’un appareil électronique fixe (article 15 ter) ou mobile (article 15 quater) aux fins d’enregistrement de l’image et du son, la possibilité d’utiliser des procédés de transformation de la voix et de l’apparence des enquêteurs dans le cadre de l’enquête sous pseudonyme et de l’infiltration (article 15 bis), et l’élargissement des formes que peuvent prendre les infiltrations (article 17 bis) et les coups d’achat (article 18) ;
- La possibilité pour les enquêteurs de recourir à un procès-verbal distinct, également appelé « dossier-coffre », qui n’est pas versé dans le dossier de la procédure (article 16) ;
- Le renforcement des pouvoirs d’enquête des agents des douanes, ce qui inclut l’extension des perquisitions et visites douanières de nuit (article 21 ter) et l’utilisation des techniques spéciales d’enquêtes (article 21 quinquies) ;
- Diverses mesures de renforcement des dispositifs de lutte contre la corruption (article 22) et de la répression pénale en la matière (article 22 bis).