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ASSEMBLÉE NATIONALE

COMMISSION DES FINANCES,

DE L'ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

COMPTE RENDU N° 5

(Application de l'article 46 du Règlement)

Mercredi 13 octobre 1999
(Séance de 9 heures 30)

Présidence de M. Augustin Bonrepaux, Président

SOMMAIRE

 

pages

- Suite de l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2000 (n° 1805) (M. Didier Migaud, Rapporteur général)


2

- Après l'art. 9

2

- Après l'art. 10

2

- Art. 11

7

- Après l'art. 11

8

- Art. 12

10

- Après l'art. 12

11

- Art. 13

13

La Commission des finances, de l'économie générale et du plan a poursuivi, sur le rapport de M. Didier Migaud, Rapporteur général, l'examen des articles de la première partie du projet de loi de finances pour 2000 (n° 1805).

Après l'article 9 :

La Commission a rejeté deux amendements identiques de MM. François d'Aubert et Michel Bouvard, ayant pour objet de créer un crédit d'impôt de 25 % sur les frais de dépôt et de maintenance des brevets engagés par les entreprises au cours d'un exercice en France et à l'étranger.

Elle a ensuite rejeté deux amendements présentés par MM. Jacques Barrot et Philippe Auberger, visant à créer un crédit d'impôt égal à 20% des dépenses de recherche exposées par les entreprises au cours d'une année et plafonné à 40 millions de francs.

Elle a ensuite examiné un amendement présenté par M. Christian Cuvilliez, ayant pour objet de remplacer l'actuel crédit d'impôt recherche par un impôt recherche libératoire, dénommé contribution annuelle au titre de la recherche.

Le Rapporteur général a rappelé que certaines dispositions en faveur de la recherche et de l'innovation avaient été déjà adoptées dans la précédente loi de finances et que de nouvelles figuraient dans le présent projet.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a rejeté un amendement de M. François d'Aubert, visant à instaurer, au bénéfice des sociétés, un crédit d'impôt égal à 25% des souscriptions en numéraire versées au capital des sociétés créées depuis moins de cinq ans, et plafonné à 1 million de francs.

Elle a ensuite réservé l'examen de trois amendements portant articles additionnels après l'article 9 ainsi que de l'article 10 et des amendements y afférents jusqu'après l'examen de l'article 35.

Après l'article 10 :

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Charles de Courson, ayant pour objet d'étendre aux entreprises individuelles le mécanisme actuel de la déduction pour investissement prévue par l'article 72 D du code général des impôts.

M. Charles de Courson a rappelé qu'actuellement, si la déduction pour investissement n'est pas utilisée dans un délai de cinq ans à l'acquisition d'une immobilisation amortissable ou à l'augmentation de la valeur des stocks à rotation lente, elle doit être réintégrée dans les résultats du cinquième exercice suivant la déduction. Il est proposé de maintenir cette réintégration, mais de soumettre les sommes réintégrées à une imposition proportionnelle de 19% à concurrence des sommes inscrites à une réserve spéciale d'autofinancement figurant au passif du bilan. L'assujettissement à l'impôt sur le revenu n'interviendrait que dans le cas où les capitaux seraient retirés de la réserve spéciale d'autofinancement.

Le Rapporteur général a rappelé que cet amendement avait déjà été présenté à maintes reprises. La question sera utilement abordée dans le cadre de la mission sur la fiscalité agricole confiée à Mme Béatrice Marre.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Jacques Jégou, proposant d'étendre à toutes les entreprises nouvelles l'exonération d'impôt sur les bénéfices réalisés dans les 23 premiers mois, déjà prévue pour les entreprises s'implantant dans des zones particulières d'aménagement du territoire.

M. Charles de Courson a estimé que les entreprises nouvelles avaient souvent du mal à faire face à toutes les charges, que ce soient les impôts directs dus à l'Etat ou aux collectivités locales, ou les charges sociales.

Le Rapporteur général a considéré que cette extension d'une mesure bénéficiant normalement à des zones clairement définies allait à l'encontre de la politique d'aménagement du territoire.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a examiné deux amendements de M. Jacques Barrot proposant de majorer, dans le premier cas, de 100.000 à 200.000 francs le plafond de la déduction du revenu global en cas de cessation de paiement de l'entreprise dans laquelle le particulier a investi et, dans le second cas, de porter ce plafond de 100.000 à 150.000 francs.

M. Charles de Courson a estimé qu'il convenait d'inciter les contribuables à prendre davantage de risques, afin de favoriser la création d'entreprises.

La Commission a rejeté ces deux amendements.

Elle a ensuite examiné deux amendements identiques, présentés par MM. Gilbert Gantier et Charles de Courson, tendant à étendre le mécanisme de l'article 151 octies du code général des impôts, visant à éviter le coût fiscal de la constitution d'une société, à tous les apports de biens affectés à l'exercice d'une activité professionnelle au profit d'une société soumise à un régime réel d'imposition.

Après que le Rapporteur général eut fait valoir un risque d'évasion fiscale, la Commission a rejeté ces deux amendements.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Jacques Jégou, présenté par M. Charles de Courson, et ayant pour objet d'exonérer d'impôt toute plus-value réinvestie dans un délai de six mois dans une entreprise de moins de cinq ans et pour une durée d'au moins cinq ans.

Le Rapporteur général a considéré que le régime actuel de sursis d'imposition était satisfaisant.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a examiné deux amendements présentés par M. Jean-Jacques Jégou ayant pour objet d'augmenter le pourcentage de la réduction d'impôt pour les sommes investies dans les entreprises nouvelles de 25 à 40%, et de relever les plafonds, dans le premier cas à 80.000 francs pour un célibataire et 160.000 francs pour un couple marié, et, dans le second cas, respectivement à 50.000 francs et à 100.000 francs.

M. Jean-Jacques Jégou a indiqué que ces amendements poursuivaient les réflexions présentées par M. Eric Besson dans son récent rapport sur la création d'entreprises, afin de développer une véritable culture d'investissement en faveur des entreprises nouvelles. L'augmentation des plafonds est en rapport avec les sommes nécessaires pour créer une entreprise bénéficiant dès le départ de capitaux propres suffisants. Le nombre des créations d'entreprises en France est trop faible et, dans certains secteurs comme le bâtiment, des projets déjà financés ne peuvent être réalisés faute d'entreprises disponibles.

Le Rapporteur général, tout en soulignant qu'il existait un réel problème s'agissant des créations d'entreprises, a rappelé que les plafonds actuels étaient rarement atteints. Des amendements résultant des travaux de M. Eric Besson pourront éventuellement être examinés après maturation.

M. Jean-Jacques Jégou a considéré que si les plafonds n'étaient pas atteints, c'était précisément parce que les incitations fiscales étaient insuffisantes. Lorsque des personnes physiques subissent des pertes, elles ne peuvent les imputer comme des déficits fiscaux. Il s'est interrogé sur la place laissée à l'opposition si aucune de ses propositions n'était retenue.

Le Président Augustin Bonrepaux a rappelé que tout amendement devait être mûrement réfléchi et que, lors de la précédente réunion de la Commission, les membres de l'opposition s'étaient ralliés aux mesures favorisant la transmission d'entreprise présentées par le Rapporteur général.

La Commission a rejeté ces deux amendements.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. François d'Aubert tendant à créer un dispositif de déduction dans le cadre de l'impôt sur le revenu, afin de favoriser l'épargne de proximité des personnes physiques qui investissent dans les PME innovantes.

M. Gilbert Gantier a précisé que cette déduction était soumise à deux conditions, d'une part, que les souscriptions en numéraire soient effectuées directement au profit des sociétés concernées et, d'autre part, que les personnes physiques prennent l'engagement de conserver les titres pendant cinq ans.

Le Rapporteur général a rappelé qu'il ne faisait, pour sa part, preuve d'aucun a priori lors de l'examen des amendements. Les dispositifs de déduction sont cependant nettement moins performants que les réductions d'impôt.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a examiné un amendement présenté par M. Philippe Auberger prévoyant de porter la réduction d'impôt sur le revenu à 50% des souscriptions en numéraire au capital de sociétés non cotées et de porter les plafonds à 50.000 francs pour les célibataires et à 100.000 francs pour les couples mariés.

M. Philippe Auberger a estimé que si les plafonds des dispositifs fiscaux en faveur de l'investissement dans de nouvelles sociétés étaient, comme l'indiquait le Rapporteur général, rarement atteints, cela confirmait précisément que les amendements présentés n'étaient pas coûteux. Il convient donc de majorer fortement ces plafonds afin de créer une véritable incitation à investir.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement de M. Jean-Jacques Jégou visant à encourager la création d'entreprise en rendant déductibles de l'assiette imposable à l'impôt de solidarité sur la fortune les sommes investies pendant une durée minimale de trois ans à condition que le redevable n'exerce pas de fonction dirigeante au sein de l'entreprise.

Selon M. Jean-Jacques Jégou, cet amendement devrait faire l'objet d'un consensus au sein de la Commission, puisqu'il a pour objet de « remuer l'argent qui dort ».

Le Rapporteur général s'est déclaré défavorable, car il ne saurait être question de rouvrir le débat sur l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. François d'Aubert, visant à la suppression des droits de mutation sur les cessions des titres de sociétés.

M. Gilbert Gantier a précisé que les cessions de titres de sociétés, constatées ou non par un acte, sont soumises à un droit de mutation de 1% ou 4,80% selon les cas. L'enregistrement obligatoire des cessions d'actions de sociétés non cotées pose de nombreux problèmes, c'est d'ailleurs pourquoi il n'existe pas dans de nombreux pays européens.

Le Rapporteur général a indiqué que l'amendement est contraire au dispositif adopté dans la précédente loi de finances et que l'abrogation proposée est beaucoup trop large. Il s'est déclaré défavorable à l'amendement.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné deux amendements, le premier de M. Gilbert Gantier, le deuxième de M. Charles de Courson, visant à harmoniser les droits d'enregistrement pour les cessions de part des sociétés agricoles en les soumettant à un droit fixe de 500 francs, quel que soit le type d'apport qu'elles représentent.

Le Rapporteur général et le Président Augustin Bonrepaux ont considéré que ces problèmes pourraient être pris en compte dans le cadre de la mission d'information confiée à Mme Béatrice Marre, le Rapporteur général s'est donc déclaré défavorable aux amendements.

La Commission a rejeté les deux amendements.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Christian Cuvilliez, dont l'objet est de proroger la contribution temporaire de 10% sur l'impôt sur les sociétés pour les entreprises qui, dans une stratégie de recherche de rentabilité financière maximum continuent à supprimer des emplois, ce qui entraîne un coût social et économique pour la collectivité.

Le Rapporteur général a considéré que la proposition était intéressante, mais qu'il faudrait revoir la rédaction de l'amendement.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné deux amendements :

- le premier de M. François d'Aubert, visant à instituer un système de tranches à taux réduit pour l'impôt sur les sociétés, ce qui permettrait de pénaliser moins fortement les premiers bénéfices réalisés par les jeunes entreprises et de consolider la constitution de leurs fonds propres ;

- le second de M. Jean-Jacques Jégou, proposant d'instituer un impôt sur les sociétés différencié, dont le taux augmenterait avec les bénéfices, tout en empêchant la filialisation pour bénéficier des taux réduits.

M. Gilbert Gantier a indiqué qu'il s'agissait de favoriser les jeunes entreprises, dont les bénéfices sont limités.

M. Jean-Jacques Jégou a ajouté que l'introduction d'un impôt progressif sur les sociétés en fonction du bénéfice serait une bonne chose pour les petites entreprises. Les bénéfices inférieurs à 1 million de francs seraient taxés à 19%. Les bénéfices compris entre 1 million de francs et 5 millions de francs seraient taxés à 26%. Enfin, pour les bénéfices supérieurs à 5 millions de francs, le taux serait de 33 1/3 %.

Le Rapporteur général s'est déclaré défavorable aux deux amendements, en indiquant qu'il existe déjà des mesures favorables aux petites entreprises, telles que la suppression de l'imposition forfaitaire annuelle pour celles dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500.000 francs, l'application du taux de 19% pour les bénéfices réinvestis et l'exonération accordée aux entreprises nouvelles créées dans le cadre de l'aménagement du territoire.

La Commission a rejeté ces deux amendements.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Pierre Brard, visant à porter le plafond de versement sur les livrets Codévi à 40.000 francs et à faciliter l'utilisation de cette épargne pour le financement des petites entreprises.

Le Rapporteur général s'est déclaré défavorable à l'amendement.

L'amendement a été rejeté par la Commission.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Philippe Auberger, tendant à supprimer la règle de l'assujettissement au précompte des distributions prélevées sur des bénéfices ayant supporté l'impôt sur les sociétés au taux de droit commun, réalisés depuis plus de cinq ans. L'auteur de l'amendement a précisé que la disposition qu'il souhaite voir supprimer est surannée et qu'il s'agit en fait d'une sanction, puisque les bénéfices distribués plus de cinq ans après leur réalisation supportent une double imposition : impôt sur les sociétés et précompte, un seul avoir fiscal étant transmis à l'actionnaire.

Le Rapporteur général s'y est déclaré défavorable, faisant valoir que l'amendement rendrait la gestion de l'impôt très difficile et créerait une situation de créance perpétuelle de la société sur le Trésor, par l'avoir fiscal.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement présenté par M. Gilbert Gantier, proposant, pour les titulaires de bénéfices non commerciaux (BNC), le relèvement de 45% du plafond d'exonération pour les plus-values des petites entreprises pour le porter à 437.500 francs de chiffre d'affaires, à compter de l'année 1999.

Le Rapporteur général a estimé que les plafonds actuels sont suffisants et qu'ils ont déjà été récemment relevés dans le cadre de la réforme des micro-entreprises, puisqu'ils s'appliquent maintenant, pour les entreprises relevant de ce régime, à des chiffres d'affaires en franchise de TVA.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Brard, visant à modifier le barème de l'imposition forfaitaire annuelle, en vue d'obtenir un rendement supplémentaire de l'ordre de 400 millions de francs.

Le Rapporteur général s'y est déclaré défavorable.

La Commission a rejeté cet amendement.

Article 11 : Suppression de l'imposition forfaitaire annuelle pour les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés dont le chiffre d'affaires est inférieur à 500.000 F :

La Commission a successivement examiné cinq amendements présentés respectivement par MM. Pierre Méhaignerie, Marc Laffineur, Philippe Auberger, Marc Laffineur et Jean-Jacques Jégou, visant à supprimer ou à réduire l'imposition forfaitaire annuelle pour les petites sociétés.

M. Jean-Jacques Jégou a indiqué que, s'il n'était pas possible de supprimer la taxe exigible pour les entreprises en difficulté, il faudrait au minimum la supprimer pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 50 millions de francs.

M. Marc Laffineur a souhaité que l'on aille plus loin que la proposition du Gouvernement, en supprimant le paiement de l'imposition forfaitaire annuelle pour les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel est compris entre 500.000 francs et 1 million de francs.

M. Philippe Auberger est allé dans le même sens.

Le Président Augustin Bonrepaux a considéré que ces amendements ne prenaient pas en compte l'avancée significative opérée par le Gouvernement dans le cadre de l'article 11.

Le Rapporteur général a considéré que les amendements supprimant l'imposition forfaitaire annuelle entraîneraient un coût de 7,5 milliards de francs. Ceux réduisant son champ d'application, bien que plus raisonnables, seraient néanmoins à l'origine d'un coût budgétaire inacceptable. Il a rappelé que la proposition du Gouvernement visant à exonérer les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 500.000 francs, constitue un premier pas dont le coût est évalué à 300 millions de francs.

La Commission a rejeté les cinq amendements.

La Commission a adopté l'article 11 sans modification.

Après l'article 11 :

La Commission a examiné un amendement de M. Gilbert Gantier, visant à assujettir l'ensemble des entreprises à responsabilité limitée (EARL) à l'impôt sur le revenu.

M. Gilbert Gantier a observé que, dans l'état actuel de la législation, les EARL constituées d'un seul membre ou de personnes d'une même famille relèvent de l'impôt sur le revenu, tandis que celles composées de plusieurs associés non parents sont assujetties de plein droit à l'impôt sur les sociétés. Son amendement vise donc à mettre fin à une discrimination tenant aux liens de parenté.

Le Rapporteur général a encore une fois considéré que ce sujet entrait dans le cadre de la mission confiée à Mme Béatrice Marre par le Gouvernement.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a également rejeté un amendement de M. Charles de Courson, après que le Rapporteur général eût observé qu'il était de même nature que le précédent.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. François d'Aubert, visant à supprimer la taxation de la quote-part pour frais et charges des sociétés soumises au régime des sociétés mères et filiales.

M. Marc Laffineur a jugé qu'il s'agissait d'une double imposition sur le bénéfice et qu'elle était, en outre, sélective, dans la mesure où seules les holdings, présentant un type particulier d'organisation étaient concernées.

Le Rapporteur général a réfuté l'existence d'une double taxation, tout en soulignant que le régime fiscal mère-fille peut se cumuler avec le régime d'intégration.

La Commission a rejeté cet amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Pierre Brard, tendant à limiter l'imputation des pertes sur les investissements passifs, aux éventuels bénéfices réalisés dans le cadre d'autres investissements passifs et à prévoir une imposition séparée pour les résultats bénéficiaires.

M. Jean-Pierre Brard a déclaré qu'il attachait beaucoup de prix à cet amendement, qui constitue l'une des propositions formulées dans son rapport d'information relatif à la lutte contre la fraude et l'évasion fiscales. En effet, certaines entreprises recourent aux sociétés de personnes, fiscalement semi-transparentes, pour bénéficier de l'imputation déficitaire de leurs filiales, situées en dehors du périmètre du groupe, sur leur propre résultat. Cette imputation des déficits peut se révéler contestable lorsque la société de personnes exerce une activité qui n'est pas directement liée à celle de la société-mère et qu'il s'agit d'un investissement passif, c'est à dire d'une activité de location ou d'une activité à la gestion de laquelle la société-mère ne prend pas une part active.

Le Rapporteur général a reconnu que cet amendement visait à porter remède à des difficultés réelles et que la proposition visant à établir des impositions séparées était intéressante. Mais, il existe un problème d'articulation avec la limitation de l'amortissement par les « GIE fiscaux » opérée par l'article 77 de la loi du 2 juillet 1998 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier. Il serait donc nécessaire d'améliorer la rédaction de l'amendement d'ici une prochaine réunion de la Commission.

Affirmant rechercher un consensus sur un tel sujet, M. Jean-Pierre Brard a retiré son amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Pierre Brard tendant à supprimer la déductibilité des intérêts des emprunts contractés pour l'acquisition de participation dans le cadre de sociétés holdings.

M. Jean-Pierre Brard a précisé que cet amendement participait du même esprit que le précédent.

Le Rapporteur Général a également jugé qu'il s'agissait d'un sujet réel, mais s'est montré réservé, compte tenu de la complexité de la matière et de la difficulté de cibler l'amendement sur le véritable objectif, à savoir la lutte contre les abus. D'une façon générale, cette disposition soulève le problème du régime fiscal des sociétés-holdings, qui ne pourra véritablement être réglé qu'au niveau de l'Union européenne. A cet égard, la prochaine présidence française, en 2000, devrait permettre des avancées sur ce dossier.

M. Jean-Pierre Brard a observé qu'il ne partageait pas tout à fait l'opinion du Rapporteur général, mais a retiré son amendement, afin d'en améliorer éventuellement la rédaction.

Article 12 : Augmentation du taux de la quote-part pour frais et charges à 5% du produit total des participations pour l'application du régime mère-fille :

La Commission a examiné deux amendements de M. François d'Aubert et de M. Jean-Jacques Jégou tendant à supprimer cet article.

M. Gilbert Gantier a observé que le doublement de la taxation de la quote-part pour frais et charges, dans le cadre du régime des sociétés mères et filiales, rapportera 4,2 milliards de francs. Cette disposition illustre bien la stratégie du Gouvernement, visant à reprendre d'une main ce qu'il donne de l'autre, puisque la suppression de la contribution temporaire de 10% sur l'impôt sur les sociétés est presque intégralement compensée par de nouveaux prélèvements. De plus, la mesure proposée risque d'aboutir à une accentuation des délocalisations d'entreprises.

M. Jean-Jacques Jégou s'est déclaré attristé par le caractère déraisonnable de la proposition du Gouvernement. En effet, même si les directives européennes autorisent un taux plafond de 5%, la France n'est pas tenue de l'appliquer, d'autant que le risque de délocalisation pèsera sur l'emploi.

Le Rapporteur général a rappelé que le dispositif modifié par le présent article résultait d'un amendement proposé l'an dernier par le groupe communiste. Il est important de souligner encore une fois qu'il ne s'agit pas d'une double imposition et que, même avec le doublement du taux, le régime mère-fille reste plus avantageux que le droit commun. Ce doublement est d'ailleurs conforme au droit communautaire et des pays tels que la Belgique, le Portugal ou l'Allemagne ont des taux supérieurs à celui actuellement en vigueur en France. A titre d'exemple, le taux de la quote-part est de 15% en Allemagne.

M. Charles de Courson a considéré que l'article allait à l'encontre de la politique menée depuis une dizaine d'années, visant à améliorer la fiscalité des groupes pour accroître leur efficacité économique. La mesure proposée n'aboutirait qu'à rendre plus attractif l'implantation de ces groupes aux Pays-Bas. On peut d'ailleurs émettre des doutes sérieux sur la fiabilité du chiffrage du produit attendu, qui résulte manifestement d'un calcul de comptable tablant sur la passivité des contribuables. Or, lorsque le taux de l'impôt sur les sociétés a été augmenté, le produit supplémentaire a été inférieur aux deux tiers de ce qui était attendu.

Il a ajouté que la suppression de la contribution temporaire sur l'impôt sur les sociétés s'accompagnait de prélèvements supplémentaires de 4,2 milliards de francs au titre du présent article et de 4,3 milliards de francs au titre de la contribution sur les bénéfices des sociétés prévue par le projet de loi de financement de la sécurité sociale, et concernant les sociétés dont le chiffre d'affaires est supérieur à 50 millions de francs. Cet accroissement de la charge fiscale pesant sur les entreprises va à l'encontre des politiques menées chez nos voisins européens et notamment en Allemagne.

M. Jean-Pierre Brard a reconnu une certaine véracité aux propos de M. Charles de Courson, mais il a constaté qu'il ne proposait pas le bon remède. Il convient plutôt de soutenir l'Union européenne dans ses efforts pour établir un code de bonne conduite entre les États et lutter contre les paradis fiscaux. Cette politique est payante, puisque les Pays-Bas ont déjà dû s'adapter, tout au moins au niveau du discours. En outre, il est absurde de décrire une situation apocalyptique, alors que des sociétés étrangères continuent de s'implanter en France.

M. Gérard Saumade a confirmé que la localisation d'une entreprise ne dépend pas uniquement des régimes fiscaux, mais qu'elle est également liée à la stratégie de l'entreprise, comme le prouve l'implantation d'Alcatel en Hongrie.

M. Jean-Jacques Jégou a estimé qu'il serait utile de confier à un député de la Commission le soin d'établir un rapport d'information, étudiant la fiscalité des sociétés holding au sein de l'Union européenne, afin de savoir si véritablement les entreprises françaises sont dans une situation défavorable.

M. Gérard Fuchs a précisé qu'un groupe de travail constitué au niveau de l'Union européenne s'était donné pour objectifs l'élaboration d'une directive sur l'épargne et l'adoption de règles permettant d'établir un code de bonne conduite en matière de fiscalité des entreprises.

M. Jean-Jacques Jégou a souhaité que les parlementaires puissent disposer des conclusions de ce groupe de travail.

Le Rapporteur général a rappelé que régime mère-fille est plus avantageux que le droit commun et a souligné que le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances démontrait que, depuis juin 1997 les entreprises avaient vu leur charge fiscale réduite de 1,7 milliard de francs;

La Commission a rejeté ces amendements.

La Commission a ensuite examiné deux amendements de M. Gilbert Gantier tendant à limiter l'augmentation de la quote-part pour frais et charges en portant son taux global à 3% ou 4% seulement, au lieu de 5% dans le projet de loi de finances.

La Commission a rejeté ces amendements.

Elle a ensuite adopté l'article 12 sans modification.

Après l'article 12 :

La Commission a examiné un amendement de M. Christian Cuvilliez tendant à réduire, de 45% à 40% des sommes nettes distribuées, l'avoir fiscal attaché aux dividendes reçus par les sociétés non mères et imputé ou restitué à compter du 1er janvier 2000.

Le Rapporteur général a jugé intéressante cette proposition, dont il a souligné que le champ d'application était circonscrit aux personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés.

M. Charles de Courson a fait valoir qu'elle contribuerait à accroître l'incohérence et le caractère socialement injuste des mécanismes d'imposition des dividendes distribués aux actionnaires. Il a rappelé, à cet égard, que jusqu'en 1995, la combinaison d'un impôt sur les sociétés fixé à 33 1/3% et d'un avoir fiscal de 50% avait permis aux actionnaires les plus modestes de ne pas supporter le poids de l'impôt sur les sociétés. L'augmentation du taux de l'impôt sur les sociétés, décidée par le Gouvernement en 1997, avait d'ores et déjà pénalisé les petits actionnaires. Une réduction supplémentaire de l'avoir fiscal, telle que prévue par l'amendement présenté, irait dans le même sens. Cette mesure, injuste socialement, devait donc être rejetée.

Reconnaissant la pertinence des propos du Rapporteur général, qui soulignait que l'amendement proposé ne concernait pas les personnes physiques, mais les seules personnes morales, M. Jean-Jacques Jégou s'est enquis du coût du dispositif envisagé pour les agents économiques. Il a rappelé que le rendement de la majoration de la quote-part de frais et charges était déjà évalué à 4,2 milliards de francs.

M. Jean-Pierre Brard s'est opposé aux conclusions de M. Charles de Courson.

Le Rapporteur général a fait valoir que les remarques de ce dernier ne distinguait pas l'imposition pesant sur les personnes physiques et celle pesant sur les personnes morales. En l'espèce, le dispositif envisagé ne concernera que les dividendes versés aux seules sociétés. Son rendement est estimé à 1,5 milliard de francs environ.

La Commission a adopté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Christian Cuvilliez tendant à plafonner le bénéfice du régime d'intégration des groupes de sociétés.

M. Christian Cuvilliez a déclaré qu'il souhaitait rendre public le coût fiscal de la mesure permettant aux sociétés mères de déduire de leurs propres bénéfices les déficits enregistrés au titre de leurs filiales, dans le cadre du régime d'intégration des articles 223 A à 223 U du code général des impôts.

La Commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Pierre Brard, visant à supprimer la déductibilité du résultat imposable des pénalités de recouvrement, qui sanctionnent le paiement tardif des impôts et taxes.

Faisant valoir que la rédaction de l'amendement pourrait être améliorée, le Rapporteur général a suggéré qu'il soit retiré.

Acceptant cette proposition, M. Jean-Pierre Brard a souhaité qu'un groupe informel de travail soit constitué, afin de présenter un ensemble cohérent d'amendements visant à lutter contre la fraude fiscale.

La Commission a ensuite examiné un amendement de M. Philippe Auberger, tendant à réduire le taux de l'intérêt de retard prévu en cas de défaut ou d'insuffisance dans le paiement des impôts ou dans l'hypothèse d'un versement tardif en prévoyant l'application du taux de l'intérêt légal.

M. Arthur Dehaine a souligné que le taux des intérêts de retard, de 9% par an, était excessif, notamment lorsque les assujettis sont de bonne foi.

Marquant son accord avec cette remarque, le Rapporteur général a relevé que le dispositif envisagé mettait en exergue un réel problème. Mais, devant le coût de la mesure, de l'ordre de 5 milliards de francs, il paraît plus souhaitable d'engager une réflexion susceptible de déboucher sur un dispositif moins coûteux.

M. Jean-Pierre Brard a souhaité que les membres de la Commission travaillent de concert sur cette question, dans le cadre d'un groupe de travail informel associant la majorité et l'opposition sur les mesures permettant d'abaisser le taux de l'intérêt de retard, afin de dégager un consensus.

La Commission a rejeté cet amendement.

Article 13 : Réduction du délai de conservation des titres prévu en cas d'opérations d'apports partiels d'actif et de scissions et maintien du sursis d'imposition attaché au régime de faveur des fusions :

La Commission a examiné trois amendements présentés par le Rapporteur général.

Le Rapporteur général a indiqué que le premier était de coordination et le deuxième destiné à améliorer la rédaction de l'article.

Il a indiqué que le dernier visait à préciser que, dans l'hypothèse d'un agrément ministériel, l'engagement de conservation de titres devait être de trois ans, comme dans le cadre du régime de droit commun sans agrément.

La Commission a adopté ces trois amendements.

Elle a ensuite adopté l'article 13 ainsi modifié.


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