Bioéthique : une approche historique
Découvertes scientifiques, évolutions de la société, travaux législatifs
(Juillet 2000)

Ces textes sont publiés sur le CD-Rom "L'Assemblée nationale au coeur de la démocratie,
dans le cadre d'une présentation multimédia (textes, images et audiovisuels)

CD-ROM de l'Assemblée nationale

"Grands Débats, Grandes Lois : Santé et bioéthique (1930-2000)"

Le progrès scientifique

Les dangers

Prise de conscience

La réponse législative

La brevetabilité

Le progrès médical

Le progrès médical

La réponse éthique

La révolution thérapeutique

La révolution biologique

La révolution génétique

 

 

 

 

 

Les dangers de l'eugénisme

Le droit à la vie et à la sauvegarde de la dignité de la personne humaine

 

 

 

 

Naissance de la bioéthique

Internationalisation des principes généraux de la bioéthique

Création du Comité national d'éthique

 

 

 

 

 

Adoption des lois bioéthiques

Interdiction de toute pratique eugénique collective

Principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine

Révision des lois bioéthiques

Protection des résultats des recherches

 

 

 

 

 

 

 

 


Les greffes d'organe et de tissus

Les risques et les difficultés

Les réponses juridiques aux progrès de la médecine

 

 

 

L'insémination artificielle

Le premier bébé éprouvette

La fécondation in vitro

Le diagnostic pré-implantatoire

Les mères porteuses

La réponse législative

 

La médecine prédictive

Le clonage

L'étude génétique de la personne

L'identification de la personne

L'avis du comité national d'éthique sur le clonage

 

 

Thèmes Dates Repères

Découvertes & travaux législatifs

1.- Le progrès scientifique

Années 30

 

 

 

 

 

 

 

Années 50

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1973

 

 

 

1982

 

 

 

 

 

 

Juin 2000

La révolution
thérapeutique

 

 

 

 

 

 

 

La révolution
biologique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La révolution
génétique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le début du
décodage du génome
humain

 

 

 

 

L’Etat et la recherche
sur le génome

Découverte de la valeur anti-microbienne des sulfamides et de nouveaux médicaments anti-infectieux

La valeur anti-microbienne des sulfamides est découverte dans les années trente. De nouveaux médicaments efficaces pour lutter contre les germes pathogènes peuvent être mis au point. La chimiothérapie anti-infectieuse est née. De même, un progrès considérable a été accompli avec la préparation industrielle du premier antibiotique, la pénicilline, dont le principe a été découvert par Alexander Fleming en 1928. Ces découvertes, avec celles de la streptomycine et de la cortisone, constituent une " révolution thérapeutique ".

Les progrès de la recherche sur la reproduction et l’hérédité
En 1865 Gregor Mendel présente ses travaux sur l’hybridation des plantes et fixe les principes fondateurs de la génétique formelle. Le mot " gène " est utilisé par le Danois Wilhelm Ludwig Johannsen en 1909. En 1933, le prix Nobel de médecine est décerné à Thomas H. Morgan pour ses découvertes concernant la fonction des chromosomes dans la transmission de l’hérédité.

1953 : découverte de l’acide désoxyribonucléique (ADN), clef de la transmission héréditaire de l’information génétique

James Watson et Francis Crick, après avoir compris que les gènes sont faits d’acide désoxyribonucléique (ADN), découvrent la structure de l’ADN et sa fonction de transmission héréditaire de l’information génétique. Le monde vivant (micro-organismes, végétaux, animaux, êtres humains) est constitué de cellules. Le noyau de chacune des cellules, estimées à 100 milliards chez l’être humain, contient 23 paires de chromosomes, constitués de l’ADN. L’ADN lui-même peut être décrit comme un long ruban, en forme de double hélice, lové dans les chromosomes enfermés dans le noyau des cellules. La longue chaîne d’acide désoxyribonucléique (ADN), constituée de 4 bases ou lettres (G, guanine, C, cytosine, A, adénine et T, thymine), contient toutes les informations pour " piloter " le fonctionnement des cellules. Le génome humain est formé par une suite de 3 milliards de paires de bases de l’ADN. La succession des 4 bases associées par paires détermine la séquence des gènes. Un gène fabrique une ou plusieurs protéines grâce à l’acide ribonucléique (ARN).

Les mécanismes génétiques d’abord mis en évidence sur les bactéries sont aussi présents chez les animaux, les plantes et les êtres humains. Des découvertes fondamentales ont ensuite rapidement permis d’appréhender des génomes complexes. Ainsi le génome regroupe l’ensemble des gènes des chromosomes qui contiennent les informations génétiques fondant les caractères héréditaires de chaque individu permettant de différencier la morphologie et le comportement de milliards d’espèces différentes.

Le génie génétique

En 1973, des généticiens parviennent à greffer un gène supplémentaire sur une bactérie ; le génie génétique est né. Cette discipline permet de modifier l’hérédité d’un être vivant, sa " programmation innée ". Le génie génétique permet aujourd’hui de caractériser les gènes, de les transférer d’un organisme à un autre et de les utiliser dans le but de produire des protéines recombinantes.

En 1982 est produit le premier animal transgénique, une nouvelle race de souris géante par injection d’un gène d’origine humaine dans des embryons de souris. En 1983 sont produites en laboratoire les premières plantes transgéniques, des plants de tabac et en 1987 sont réalisés des essais en plein champ de plantes transgéniques.

La possibilité d’introduire un gène normal ou muté dans un organisme étranger a des implications considérables, car les techniques de transfert de gènes permettent notamment d’améliorer les espèces végétales ou animales (végétaux et animaux transgéniques) et de produire des molécules à finalité thérapeutique. Il devient possible de décoder, d’identifier et de localiser des gènes à l’origine de maladies héréditaires, par exemple, les myopathies ou l’hémophilie, et de repérer les anomalies par des tests génétiques sur l’embryon. L’espoir naît ainsi de réguler les gènes déficients à l’origine de maladies héréditaires ou acquises. Le premier essai de thérapie génique est autorisé en 1990, sur deux petites filles atteintes d’une maladie héréditaire.

Le 26 juin 2000, à Paris, Tokyo, Washington, Londres et Pékin est annoncé le décryptage presque complet du génome humain par le consortium public " Projet du génome humain " (HGP) regroupant depuis 1990 des centres universitaires de 18 pays. Ce consortium a pour mission de mettre gratuitement ses découvertes sur le code génétique à la disposition du public. Le séquençage du code génétique ouvre la voie à l’identification des gènes et de leurs fonctions. La connaissance des gènes s’améliorera de plus en plus grâce aux programmes de décryptage de tous les fragments génétiques et d’analyse des génomes de différentes espèces ayant pour objet de comprendre et d’étudier leur structure et leur fonction dans les mécanismes de la reproduction, du développement, de la maladie et de la mort. Après avoir répertorié la totalité des différents gènes chez l’homme, dont le nombre est estimé entre 30.000 et 100.000, il conviendra de déterminer l’enchaînement des 3 milliards de bases de chacun des génomes hérités par chaque individu et de décoder la signification des gènes.

Le programme génomique en France

L’Etat soutient le développement des recherches sur les génomes : séquençage (procédé permettant de déterminer l’ordre des acides aminés dans les protéines et des nucléotides dans les acides nucléiques), génomique fonctionnelle, bio-informatique. Le Centre national de séquençage, appelé Génoscope, a pour mission de répondre aux besoins de séquençage et le Centre national de génotypage vise à permettre l’identification des gènes morbides impliqués dans les maladies héréditaires et à favoriser l’application des résultats de la recherche sur le génome en médecine, en santé publique et dans l’industrie pharmaceutique. Le réseau de recherche Gen-Homme doit favoriser la mise en œuvre de projets communs entre laboratoires publics, associations caritatives et industriels. 

2. Les dangers

1904

 

 

 

 

 

 

 

 

1945

Les dangers de
l’eugénisme

 

 

 

 

 

 

 

Droit à la vie, sauvegarde de la dignité de la personne humaine

  • L’idée de la sélection par les gènes apparaît dès la fin du XIXème siècle.

Dès la fin du XIXe siècle, des scientifiques évoquent la possibilité de choix de nos descendants et d’une élimination des " tares " de l’humanité. En 1904 le physiologiste Francis Galton définit l’eugénique : "l’étude des facteurs socialement contrôlables qui peuvent élever ou abaisser les qualités raciales des générations futures aussi bien physiquement que mentalement ". Dans les années 20 et 30 des idéologues annoncent un avenir "radieux" promis par la génétique, grâce à la sélection de couples dotés des meilleurs gènes. De très graves dérives apparaissent : certains préconisent la stérilisation des personnes considérées comme déficientes ; d'autres suggèrent d'agir pour améliorer l’espèce humaine et tendre vers une " race supérieure ". Dans l’Allemagne nazie, les SS cherchent à prouver les hypothèses racistes du siècle précédent en pratiquant, dans les camps de concentration, d'ignobles expériences médicales à visées pseudo-scientifiques. Aujourd’hui encore, certains sont tentés par un détournement des travaux de la génétique. Si les perspectives de traitement de maladies induites par des gènes déficients sont considérables, les dangers d’un profil génétique idéal et d’une " fabrication de bébés sur mesure " ne doivent pas être ignorés.

  • 1945-46 : Procès de Nuremberg

Après la seconde guerre mondiale, les criminels de guerre à l’origine de l’horreur des camps d’extermination, sont jugés au procès de Nuremberg par le Tribunal militaire international siégeant du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946. Le 19 juillet 1947 un tribunal militaire jugeant des médecins nazis dans le cadre d’une délégation du Tribunal de Nuremberg condamne l’utilisation comme "cobayes" des déportés et internés et adopte un code concernant les expérimentations cliniques sur l’homme. Le jugement déclare solennellement l’exigence du consentement informé de toute personne soumise à des essais dans un but de recherche et énonce le droit de retrait du sujet à tout moment..:. Le serment de Genève, adopté en 1948 par l’Association médicale mondiale, propose une version actualisée du serment d’Hippocrate : " Même sous la menace je ne mettrai pas mes connaissances médicales au service de ceux qui violent les lois de l’humanité ".

3.- Prise de conscience

Années 70

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1964

 

 

1966

 

1990

 

 

 

 

 

 

1983

Naissance de la bioéthique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’internationalisation des principes généraux de la bioéthique

 

Création du Comité national d’éthique

L’éthique (du grec êthikos " qui concerne les moeurs, moral ") est la science de la morale. Elle désigne l’ensemble des principes moraux à la base de la conduite d’une personne. La bioéthique naît d’une réflexion sur les conséquences de la révolution biologique et génétique sur l’homme et du choc provoqué par la révélation des expériences nazies. La bioéthique pose la question de la responsabilité morale des médecins et des scientifiques dans la recherche et ses applications. Les progrès rapides de la recherche permettent de lutter contre les maladies et les handicaps ; mais chacun de ces progrès est susceptible d’avoir des implications nouvelles sur les personnes. La révolution thérapeutique et biologique s’annonce riche de bienfaits, mais elle est aussi susceptible d’entraîner des dérives. Les médecins, les malades et leur famille, les organisations internationales, les comités d’éthique et le législateur sont conduits à s’interroger sur les risques ou les incidences des progrès réalisés pour les générations futures. Certains grands principes guident la bioéthique : droit au respect de la vie, sauvegarde de la dignité humaine et la responsabilité individuelle et sociale.

- 1985 : l’éthique entre dans les disciplines enseignées à l’Université

De nombreuses formations en " éthique médicale " sont dispensées : dès 1985 à Lille, puis à Paris avec un DEA en 1992. L’enseignement de l’éthique est entré dans le cursus obligatoire de la formation des infirmières en 1991, des pharmaciens et des biologistes en 1994. Les étudiants en médecine abordent certains sujets dans le cadre du module obligatoire de culture générale.

-1964 : La Déclaration d’Helsinki de l’Association médicale mondiale est le premier texte international de bioéthique. Applicable au médecin et actualisée depuis 1964, elle énonce plusieurs principes : la compétence du chercheur, le respect du principe de précaution, l’obligation de soumettre préalablement tout protocole expérimental à un comité indépendant, le respect de la dignité de la personne dans le cadre de toute recherche biomédicale, le consentement libre et éclairé du sujet sur lequel est pratiquée une expérimentation

-1966 : le Pacte international sur les droits civils et politiques énonce les principes de non-discrimination du droit à la vie, d’interdiction des traitements cruels, inhumains ou dégradants, du respect de la vie privée et de la vie familiale

- 1990 :La Déclaration du Conseil des organisations internationales des sciences médicales (CIOMS) met l'accent sur la prévention des risques de dérives eugéniques et sur la protection de la confidentialité des informations nominatives recueillies au cours des recherches

- La Convention du Conseil de l’Europe sur les droits de l’homme et la biomédecine vise à établir un équilibre entre les personnes, la science et la société.

- 1997 : La Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l’Homme adoptée dans le cadre de l’UNESCO vise à protéger l’individu vis-à-vis des conséquences des recherches sur le génome humain et déclare que " dans un sens symbolique " le génome humain " est le patrimoine de l’humanité ".

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- 1983 : Création du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé

Créé par décret du président de la République du 23 février 1983, sous l’impulsion du Professeur Jean Bernard, le Comité national d’éthique, est composé de chercheurs, biologistes, médecins, représentants des principaux courants de pensée philosophique et des principales familles spirituelles. Ce groupe d’experts a pour mission de donner son avis sur les problèmes moraux soulevés par les progrès de la recherche dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé. Le Comité peut être saisi par le Président de l’Assemblée nationale, le Président du Sénat, un membre du gouvernement, un établissement public ou une fondation reconnue d’utilité publique ayant pour activité principale la recherche ou le développement technologique, un établissement d’enseignement supérieur. La loi du 30 juillet 1994 consacre le comité auquel elle donne pour mission d’émettre des recommandations et non plus des avis. De 1983 à 1993, le Comité a rendu 33 avis contribuant, avec le rapport de 1988 du Conseil d’Etat " De l’éthique au droit ", à la préparation d’un ensemble de lois destinées à répondre aux questions alors les plus pressantes posées par les progrès de la biologie et de la médecine.

4.- La réponse législative

1994

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2000

Adoption des lois bioéthiques

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’interdiction par la loi de toute pratique eugénique collective

 

 

 

 

Le principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine

 

 

 

 

La révision des " lois bioéthique " de 1994

Les " lois bioéthiques " de 1994

D'autres travaux ont préparé les bases des lois dites " bioéthiques " : ceux du Conseil d’Etat (rapport au Premier ministre de Mme Noëlle Lenoir " Aux frontières de la vie –Une éthique biomédicale à la française ; paroles d’éthique"), ceux de la mission d’information de l’Assemblée nationale sur les problèmes de bioéthique (rapport d’information n°2565 du 18 février 1992 de M. Bernard Bioulac), et ceux de l’office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (rapport n°2588 du 28 février 1992 de M. Jean-Yves Le Déaut " Les sciences de la vie et les droits de l’homme : bouleversement sans contrôle ou législation à la française ") .

Trois lois garantissent le respect de la personne humaine sans freiner les progrès de la science :

  • la loi n° 94-548 du 1er juillet 1994 relative au traitement de données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ;

  • la loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain ;

  • loi n°94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal.

(rapport n°2871 de M. Bernard Bioulac au nom de la commission spéciale et n° 1057 de M. Jean-François Mattéi)

L’article 16-4 du code civil introduit par la loi relative au respect du corps humain dispose : " Nul ne peut porter atteinte à l’intégrité de l’espèce humaine. Toute pratique eugénique tendant à l’organisation de la sélection des personnes est interdite. Sans préjudice des recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques, aucune transformation ne peut être apportée aux caractères génétiques dans le but de modifier la descendance de la personne. "

En outre la loi du 20 décembre 1988 sur la protection des personnes se prêtant à l’expérimentation a été modifiée. Les travaux préparatoires de l’Assemblée nationale relatifs aux " lois bioéthiques ", commencés sous la IXème législature, ont été poursuivis sous la Xème.

Saisi par le Président de l’Assemblée nationale, le Conseil constitutionnel a considéré, dans une décision du 27 juillet 1994, que la primauté de la personne humaine, le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie, l’inviolabilité, l’intégrité et l’absence de caractère patrimonial du corps humain ainsi que l’intégrité de l’espèce humaine tendent à assurer le respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine.

Compte tenu de la rapidité des progrès scientifiques et technologiques en jeu, les " lois bioéthiques " ne fixent pas des règles définitives, hormis des grands principes éthiques reconnus par le Conseil constitutionnel. L’article 21 de la loi relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humains a prévu que cette loi fera l’objet, après évaluation de son application par l’office parlementaire des choix scientifiques et technologiques, d’un nouvel examen dans un délai de cinq ans après son entrée en vigueur.

Mai 2000 : Création de la mission d’information commune préparatoire au projet de loi de révision des " lois bioéthiques " de juillet 1994.

Comme le souligne le rapport n°1407 de l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques (rapport de M. Alain Claeys, député sur l’application de la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal), l’évaluation de la loi conduit " à replacer les normes juridiques dans l’évolution des connaissances et des techniques afin de mesurer leur capacité d’adaptation à cette dernière et les risques d’obsolescence, puisque cette préoccupation fondait en grande partie la démarche adoptée par le législateur en 1994. L’ampleur des bouleversements scientifiques qui se sont produits depuis cinq ans montre que cette préoccupation était sage et incitera sans doute à pérenniser le principe d’une révision périodique dont le rythme reste à déterminer. " Après la remise par le Conseil d’Etat d’un rapport au Premier ministre intitulé " Les lois bioéthiques : cinq ans après ", la mission d’information commune préparatoire au projet de loi de révision des " lois bioéthiques " de juillet 1994, présidée par M. Bernard Charles et dont le rapporteur est M. Alain Claeys, procède à un examen des sujets nouveaux, des demandes récentes et des réflexions en cours. Parmi les problèmes abordés, elle examine une modification des lois de 1994 en ce qui concerne le clonage, la recherche sur l’embryon et les cellules détenant la clé de la différenciation cellulaire ainsi que leur contrôle par une autorité indépendante, le droit des brevets, l’élargissement des conditions de recours à l’assistance médicale à la procréation. Le gouvernement doit déposer, à l'automne 2000, un projet de loi de révision des " lois bioéthiques " de 1994 examiné par une commission spéciale.

5.- La brevetabilité

1993

 

 

 

 

 

1994

 

 

 

1998

Protection des résultats des recherches en bio-technologie.

Les perspectives financières internationales ouvertes par la recherche biotechnologique posent la question de la protection des résultats des recherches menées en ce domaine. Il est clair que la possibilité ou non de déposer un brevet sur une invention dans un domaine conditionne largement la recherche dans ce champ particulier. En droit français, le brevet est un titre délivré par l’autorité administrative constatant la déclaration de l’auteur d’une invention, ayant un caractère de nouveauté et lui conférant un droit d’exploitation. L’obtention d’un brevet suppose l’existence préalable d’une invention et non d’une découverte afin d’assurer à son inventeur un monopole d’exploitation commerciale pendant une durée de 20 ans. En 1993, l’Académie des sciences a estimé que le génome humain faisant partie du patrimoine commun de l’humanité ne peut pas être brevetable, même sur une séquence partielle.

La loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain a retenu pour principe l’absence de caractère commercial du corps humain. Elle dispose à l’article L. 611-17 du code de la propriété industrielle : " Ne sont pas brevetables : a) les inventions dont la publication ou la mise en œuvre serait contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs, la mise en œuvre d’une telle invention ne pouvant être considérée comme telle du seul fait qu’elle est interdite par une disposition législative ou réglementaire ; à ce titre le corps humain, ses éléments et ses produits ainsi que la connaissance de la structure totale ou partielle d’un gène humain ne peuvent, en tant que tels, faire l’objet de brevets. "

Or la directive européenne n° 98/44/CE du 6 juillet 1998 précise à l’article 5 :

" 1. Le corps humain, aux différents stades de sa constitution et de son développement, ainsi que la simple découverte de l’un de ses éléments, y compris la séquence ou la séquence partielle d’un gène ne peuvent constituer des inventions brevetables.

2. Un élément isolé du corps humain ou autrement produit par un procédé technique, y compris la séquence ou la séquence partielle d’un gène, peut constituer une invention brevetable, même si la structure de cet élément est identique à celle d’un élément naturel.

3. L’application industrielle d’une séquence ou d’une séquence partielle d’un gène doit être concrètement exposée à la demande de brevet. "

Le dernier paragraphe de cet article pourrait donc ouvrir la voie au dépôt de brevets sur des séquences génétiques obtenues par clonage et identiques à une séquence génétique humaine.

L’article 6 de la même directive dispose que " les inventions dont l’exploitation commerciale serait contraire à l’ordre public ou aux bonnes mœurs sont exclues de la brevetabilité, l’exploitation ne pouvant être considérée comme telle du seul fait qu’elle est interdite par une disposition légale ou réglementaire ". Ne sont pas brevetables les procédés de clonage de l’être humain, de modification de l’identité génétique germinale de l’être humain, les utilisations d’embryons humains à des fins industrielles ou commerciales et les procédés de modification de l’identité génétique des animaux de nature à provoquer chez eux des souffrances sans utilité substantielle pour l’homme ou l’animal, ainsi que les animaux issus de ces procédés. L’adoption de la directive, qui permet de breveter des séquences et des fonctions de l’ADN, nécessite une modification de l’article 7 de la loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain compte tenu de l’incompatibilité des principes posés par les deux textes.

En tout état de cause la question est de rendre conciliable les principes de bioéthique et le droit des brevets, de faciliter la diffusion des inventions utilisant les gènes et leurs applications, sans compromettre le libre avoir accès au savoir génétique des chercheurs et de l’ensemble de l’humanité.

6.- Le progrès scientifique

 

 

 

 

 

 

 

Risques & difficultés

 

 

 

 

 

 

 

 

La réponse législative

1950

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1949

 

 

 

 

 

 

 

1994

Les greffes d’organes et de tissus

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les premières réponses juridiques spécifiques aux progrès de la médecine

 

 

 

 

 

Les principes généraux de protection du corps humain

Les greffes d’organes et de tissus permettent d’offrir une solution vitale à des pathologies qui ne peuvent être traitées.

- Les greffes d’organes prélevés sur d’autres personnes : en 1950, réussite de la première greffe de rein ; 1963 : première greffe du foie ; 1967 : première greffe du cœur ; 1968. : première greffe du poumon ; 1998 : première greffe de la main ; janvier 2000 : première double allogreffe des mains par l’équipe dirigée par le Professeur Jean-Michel Dubernard.

- Les greffes de tissus : Les greffes de moëlle osseuse sont pratiquées depuis 1970 pour le traitement des leucémies. Jean Dausset, prix Nobel de médecine en 1980, découvre les groupes tissulaires : les questions de compatibilité sont élucidées. Il découvre notamment le plus important des groupes tissulaires, le HLA (Human Leukocyte Antigens) conditionnant la compatibilité entre donneur et receveur


Le prélèvement d’organe se fait très rapidement après la mort encéphalique du donneur. Les donneurs sont notamment des victimes d’accidents cardio-vasculaires, d’accidents de la route et d’autres traumatismes. De nombreux patients attendent de pouvoir recevoir un organe. Ainsi le délai moyen d’attente est de 23 mois pour un rein, 15 mois pour un cœur, 14 mois pour un bloc cœur-poumon. Chaque année meurent des personnes en attente de greffe. A l’initiative du Professeur Jean Dausset ont été créées la Fédération française des donneurs d’organes et de tissus humains et l’Association France-Transplant.

Le prélèvement d’organes suppose que l’on soit certain du consentement préalable du donneur. Mais peut-on prélever un organe sans l’accord du donneur ? Certaines croyances empêchent les prélèvements d’organes en raison de l’intangibilité du corps ou de son caractère sacré. Du côté des receveurs, il peut être difficile d’accepter, du point de vue psychologique ou moral, de vivre grâce à l’organe étranger transplanté. Le consentement est nécessaire et le médecin doit informer le patient des conséquences de la greffe et du choix de cette opération par rapport à d’autres traitements. Les xénogreffes, c’est à dire la transplantation sur l’homme de tissus ou de greffons d’origine animale afin de pallier les pénuries d’organes humains sont encore incertaines, en raison des risques de transmission à l’espèce humaine de maladies infectieuses dont certains animaux pourraient être les porteurs sains.


La loi du 7 juillet 1949 permet la pratique de la greffe de la cornée grâce à l’aide de donneurs d’yeux volontaires. La loi Caillavet du 22 décembre 1976 autorise le prélèvement d’un organe en l’absence de consentement, selon l’idée que " qui ne dit mot consent ". En fait, les prélèvements sont pratiqués après consultation de la famille, ce qui aboutit à 50% de refus. Depuis la loi du 29 juillet 1994, ce refus peut être exprimé sur un registre automatisé. La loi du 18 janvier 1994 relative à la santé publique et à la protection sociale crée l’Etablissement français des greffes, établissement public national se substituant à France-Transplant et ayant pour mission de fixer les règles pratiques applicables au prélèvement, à la conservation, au transport et à la transformation des parties et des produits du corps humain. L’établissement français des greffes établit une liste nationale de patients en attente de greffe. Il attribue les greffons disponibles conformément à des règles de répartition et d’attribution ayant fait l’objet d’une homologation ministérielle. Le patient auquel il est envisagé de greffer un organe doit être préalablement inscrit sur la liste.

Les lois du 29 juillet 1994 relatives au respect du corps humain, au don et à l’utilisation du corps humain, à l’assistance médicale, à la procréation et au diagnostic prénatal, abrogeant la loi Caillavet, fixent les principes généraux applicables au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain et des règles visant à protéger le donneur d’organe.

Issu de la loi relative au respect du corps humain, l’article 16 du Code civil dispose : " La loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. "

Chacun a droit au respect de son corps et l’atteinte à l’intégrité de celui-ci peut seulement être justifié par la nécessité médicale et avec le consentement préalable de l’intéressé.

Le principe d’absence de commercialisation des prélèvements et de non patrimonialité du corps humain

Les prélèvements ne peuvent donner lieu à paiement et les "éléments et produits du corps humain ne peuvent faire l’objet d’un droit patrimonial". Toute publicité relative au don d’éléments ou de produits du corps humain est interdite sans qu’il soit fait obstacle à l’information du public. L’anonymat entre donneur et receveur est assuré sauf en cas de nécessité thérapeutique.

La nécessité thérapeutique pour la personne, exception au principe de l’intégrité du corps humain, et le principe du consentement préalable

- En ce qui concerne les prélèvements d’organes sur une personne vivante, l’article 16-3 du code civil issu de la loi précise "qu’il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité médicale pour la personne. (…) Le consentement de l’intéressé doit être recueilli préalablement lorsque le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n’est pas à même de consentir. " Le consentement d’un don d’organe, révocable à tout moment, doit être exprimé devant le Président du Tribunal de grande instance. Les mineurs ne peuvent faire don de leurs organes. En revanche, la moëlle osseuse peut être prélevée sur un mineur au bénéfice de son frère ou de sa sœur selon une procédure de contrôle spécifique.

- En ce qui concerne les personnes décédées, le prélèvement peut être pratiqué si la personne décédée n’a pas fait connaître de son vivant son refus pouvant être consigné dans un registre national automatisé. Le médecin n’ayant pas connaissance de la volonté du défunt doit s’efforcer de recueillir le témoignage de sa famille.

Les prélèvements d’organes ne peuvent être effectués que dans des établissements de santé autorisés à cet effet.

L’anonymat du don d’éléments ou de produits du corps humain

Le donneur ne peut connaître l’identité du receveur ni le receveur celui du donneur. Aucune information permettant d ‘identifier à la fois celui qui a fait le don d’un élément ou d’un produit de son corps et celui qui l’a reçu ne peut être divulguée. Il ne peut être dérogé à ce principe d’anonymat qu’en cas de nécessité thérapeutique.

Le principe de sécurité sanitaire

Le prélèvement d’éléments et la collecte de produits du corps humain à des fins thérapeutiques sont soumis à des règles de sécurité sanitaire comportant notamment les tests de dépistage des maladies transmissibles.

6.- Le progrès (suite)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Premières réponses éthiques

1885

 

 

 

 

 

 

1959

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1984

 

 

 

 

 

 

 

1988

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1994

L’expérimentation sur l’homme.

 

 


Les essais thérapeutiques

 

 

 

 

 

 

 

Les 4 phases de l’essai thérapeutique

 

 

 

 

 

Les recommandations

 

 

 

 

 

 

La loi Huriet et le consentement éclairé

 

 

 

Le contrôle éthique des expérimentations

En 1885 Pasteur expérimente avec succès sur des chiens un vaccin antirabique préparé à partir de moëlle épinière de lapin. Le 6 juillet 1885 Joseph Meistre, jeune Alsacien de neuf ans, est mordu par son chien enragé. Pasteur et les Professeurs de médecine Joseph Granger et Alfred Vulpian décident d’expérimenter le vaccin : l’enfant n’aura pas la rage. Après des expériences concluantes sur plusieurs patients, une souscription nationale et internationale est ouverte pour créer un Institut vaccinal contre la rage. L’Institut Pasteur est inauguré le 14 novembre 1888.

Les premiers essais thérapeutiques organisés de manière scientifique sont réalisés en Grande Bretagne de manière scientifique : des malades atteints de méningite tuberculeuse, alors toujours mortelle, ont été répartis en deux groupes par tirage au sort. La moitié de ceux ayant reçu de la streptomicyne ont été sauvés. La moitié de ceux ayant reçu un traitement classique pour cette époque sont morts.

En France, la méthodologie des essais thérapeutiques a été introduite par le Professeur Daniel Schwartz et son équipe en 1959 et le premier essai thérapeutique mené selon une méthodologie scientifique est entrepris à l’Institut Gustave-Roussy de Villejuif sur le traitement des angiomes cutanés : un tirage au sort a permis de répartir les patients entre ceux pour lesquels était attendue une résolution spontanée et ceux traités par radiothérapie locale. Il existe deux catégories d’essais : les essais explicatifs, effectués à l’aveugle, visent à vérifier une hypothèse biologique sur des malades qui ont le plus de chances de répondre au traitement ; les essais pragmatiques ou de management visent à établir un bilan des avantages et inconvénients d’un traitement sur n’importe quel malade susceptible de le recevoir.

On distingue quatre phases de l’essai thérapeutique d’un nouveau médicament :

  • la phase I des premières administrations à l’homme d’un nouveau traitement étudié longuement au préalable en laboratoire : la tolérance du médicament est testée

  • la phase II d’administration du traitement à des patients malades : l’efficacité du traitement est testée.

  • la phase III de comparaison d’un groupe de malades de gravité égale répartis au hasard ou par tirage au sort entre ceux recevant le traitement par le nouveau médicament et ceux ne le recevant pas, suivie de la procédure d’autorisation de mise sur le marché (essai thérapeutique contrôlé) : l’efficacité comparative est testée.

  • la phase IV des études suivant la mise sur le marché requérant un dispositif de pharmacovigilance : les effets indésirables après mise sur le marché sont surveillés.


Compte tenu des risques liés à l'administration de substances nouvelles, dont par hypothèse, l'inocuité n'est pas avérée, à des patients sélectionnés selon des critères aléatoires, cinq recommandations ont été formulées en 1984 par le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé, pour mettre en place une méthodologie des essais thérapeutiques:

  • La nécessité d’un pré-requis suffisant (expérimentation pharmacologique et toxicologique en laboratoire),

  • La valeur scientifique du projet (aspects pharmacologiques et statistiques),

  • Un bon équilibre risques-bénéfices,

  • le consentement libre et éclairé du patient (acceptation du patient ou de ses parents si celui-ci est mineur ou incapable),

  • L’avis d’un comité d’éthique.

Environ un demi-million de personnes se prêtent chaque année à des expérimentations médicales. La loi du 20 décembre 1988, dite loi Huriet, relative à la protection des personnes qui se prêtent à des recherches biomédicales reconnaît le bien fondé des essais thérapeutiques. Elle définit la recherche biomédicale comme celle recouvrant " les essais ou expérimentations organisés et pratiqués sur l’être humain en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales ". Il s’agit de recherches dont on attend un bénéfice direct pour la personne qui s’y prête (recherches " avec bénéfice individuel direct ") et de toutes les autres recherches portant sur des personnes malades ou non " sans bénéfice individuel direct ".

La loi établit une protection des personnes sur lesquelles ces expériences sont pratiquées grâce à un contrôle des expérimentations. La loi oblige tout organisateur de recherche à recueillir préalablement à la mise en œuvre d’un projet le consentement libre, éclairé et exprès de la personne qui s’y prête. Celle-ci doit être informée de l’objectif de la recherche, sa méthodologie et sa durée, les bénéfices attendus, les contraintes et les risques prévisibles, ainsi que de son droit de refuser de participer à la recherche et de sa faculté de retirer son consentement à tout moment sans encourir aucune responsabilité. La loi crée des comités consultatifs pour la protection des personnes dans la recherche biomédicale (CCPPRB) chargés d’évaluer les projets de recherche avant leur mise en œuvre. Elle organise une protection renforcée pour les personnes qui se prêtent à une recherche sans en attendre de bénéfices individuels directs. Ces dispositions font l’objet de sanctions pénales.

Modifiée en 1990 et 1994, la loi Huriet établit des contrôles de nature médicale, éthique et administrative. Du point de vue éthique, la recherche médicale ne doit pas être effectuée :

- si elle ne se fonde pas sur le dernier état des connaissances scientifiques et sur une expérimentation clinique suffisante ;

- si le risque prévisible encouru par les personnes se prêtant à la recherche est hors de proportion avec le bénéfice escompté pour ces personnes ou l’intérêt de cette recherche ;

- si elle ne vise pas à étendre la connaissance scientifique de l’être humain et des moyens susceptibles d’améliorer sa condition.

En janvier 1994 M. Jean-François Mattéi, député, a remis au Premier ministre un rapport intitulé " La vie en questions : pour une éthique biomédicale " établissant un bilan de l’application de la loi Huriet. Le rapport souligne notamment les difficultés résultant des procédures introduites par la loi et l’absence de statut des CCPPRB. L’une des lois du 25 juillet 1994 reconnaît ainsi la personnalité juridique des comités de protection des personnes dans la recherche biomédicale.

7.- Le progrès médical

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La problématique

1973

 

 

 

 

 


1978

1982

L’insémination artificielle

 

 

 

 

 

Le premier bébé éprouvette

 

La fécondation in vitro

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


Le diagnostic préimplantatoire

Depuis vingt ans, la biologie et la médecine ont permis un net recul de la stérilité. Les progrès réalisés de la médecine fœtale permettent aujourd’hui de donner la vie en dehors des processus naturels.

En 1973 est créé le premier CECOS (Centre d’études et de conservation des œufs et du sperme humain)

L’insémination artificielle consiste à recueillir, traiter et conserver le sperme, puis à l’introduire dans les voies génitales féminines. Elle permet de lutter contre certains cas de stérilité. On distingue l’insémination avec sperme du conjoint (IAC) et l’insémination avec sperme de donneur anonyme (IAD). Depuis la création du premier CECOS en 1973 on dénombre 30 000 naissances par IAD.

  • 1978 : naissance, en Angleterre, de Louisa Brown, premier enfant conçu par fécondation in vitro (FIV) réalisée par Robert G Edwards.

  • 1982 : naissance d’Amandine, en France mise au monde grâce à une FIV réalisée par le Professeur Testart.

La fécondation in vitro et le transfert d’embryon (FIVETE).

Le processus de fécondation in vitro consiste à prélever des ovocytes d’une femme au cours d’une intervention chirurgicale et à les mettre in vitro en présence de spermatozoïdes après quelques heures de culture. L’œuf fécondé est cultivé pendant 48 ou 72 heures, puis transféré dans l’utérus de la future mère. Dans un avis de 1986 relatif aux recherches sur les embryons humains in vitro et leur utilisation à des fins médicales et scientifiques, le comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé définit l’" embryon pour désigner le stade de développement qui marque le passage d’une cellule unique, l’œuf, à un ensemble complexe de cellules, le fœtus ". En 1990, en France, sur 800.000 naissances, 2.500 enfants ont été conçus par FIV. En 2000, 1% des nouveaux nés ont été conçus par FIV. Les progrès de la science ayant permis le développement des pratiques de procréation médicalement assistée ont rendu nécessaire l’élaboration d’une législation spécifique.


  • Les liens de parenté deviennent beaucoup plus complexes.

Avec les nouveaux modes de procréation, il faut désormais distinguer la parenté génétique, biologique, légale, affective (cas naturel) et adoptive (pas de lien d'hérédité). Dans le cas d’une insémination artificielle avec un donneur anonyme, la femme est fécondée par le sperme d’un inconnu. Son conjoint, alors qualifié de " père adoptif ", reconnaît sa paternité légale en signant l’accord d’insémination. Mais la loi française refuse à tout enfant ainsi conçu de connaître son " père biologique ". Son identité ne lui sera jamais révélée, ce qui pose la question du droit de l’enfant à connaître ses origines .

- La fécondation in vitro après le décès du père (ou transfert post-mortem)

La loi exige que les interventions médicales pour permettre la procréation soient limitées aux couples infertiles en âge de procréer (en 1994 une Italienne de 63 ans était devenue mère par fécondation in vitro) et inscrits dans une relation stable (avec preuve d’une vie commune d’au moins deux ans pour les concubins et d’un an pour les personnes mariées). En principe, un enfant doit naître du projet parental d’un couple vivant. Mais, en 1984, une veuve obtient du Tribunal de Grande Instance de Créteil le droit de se faire inséminer par le sperme congelé de son mari décédé. En 1989, une autre veuve se voit refuser le même droit par le Tribunal de Grande Instance de Toulouse, car une convention écrite conclue de son vivant entre son mari et le Cecos stipulait que le sperme conservé ne pouvait être réutilisé qu’au cas où le dépositaire serait présent.

  • En 1994 pour la première fois au monde, une équipe anglaise fait la sélection du " bon embryon non malade " lors d’une fécondation in vitro.

L’usage du diagnostic préimplantatoire (DPI) est controversé : il consiste à analyser les gènes des œufs humains fécondés in vitro avant leur réimplantation chez la femme. Cette démarche, qui peut être justifiée pour des pathologies graves, risque de s’étendre au choix du sexe ou de l’embryon le mieux doté génétiquement.

7.- Le progrès médical 1987

Les " mères porteuses "

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les embryons surnuméraires

  • En 1987 : 66 enfants étaient nés en France de mères porteuses

Dans les années 80, des couples sollicitent des femmes, parfois contre rémunération, à être inséminées par le sperme du père ou à accueillir les embryons du couple. A la naissance, l’enfant est remis au couple demandeur pour adoption. La maternité de substitution a été déclarée illicite par l’Assemblée plénière de la Cour de cassation, le 31 mai 1991, car ce processus porte " atteinte aux principes de l’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes " et constitue " un détournement de l’institution de l’adoption ". Dans un avis du 23 octobre 1984 relatif aux problèmes éthiques nés des techniques de reproduction artificielle, le Comité consultatif national d’éthique des sciences de la vie et de la santé estime que : " Le recours à cette pratique est, en l’état actuel du droit, illicite. Elle réalise la cession d’un enfant. Un tel contrat ou engagement est nul par son objet, et est contracté en fraude à la loi relative à l’adoption : celle-ci suppose, en effet, une décision d’un juge, qui se prononce en fonction de l’intérêt de l’enfant et qui apprécie l’opportunité de l’adoption après enquête, sous sa pleine responsabilité. Il ne serait donc pas tenu de faire droit à la demande d’adoption d’une femme qui souhaiterait élever un enfant conçu et porté par une autre femme. De plus, l’intermédiaire, médical ou non, de l’opération pourrait, pour avoir provoqué l’abandon d’enfant, être jugé coupable du délit prévu par l’article 353-1 du code pénal. "

Ces principes ont largement inspiré le législateur qui, en 1994, a introduit l’article 16-7 du code civil déclarant nulle " toute convention portant sur la gestation ou la procréation pour le compte d’autrui ". Cependant la pratique des maternités de substitution est autorisée dans certains pays occidentaux tels que les Etats-Unis et la Grande Bretagne.

Les progrès de la fécondation in vitro et du transfert d’embryons permettent de réduire le nombre moyen d’embryons transférés. La loi du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal n’a pas fixé de limitation en nombre d’embryons transférés laissant ce choix aux praticiens en fonction des situations concrètes, de l’état des connaissances des risques de grossesses multiples, de la demande des couples et de l’âge de la femme. Dans un avis de 1986 sur les recherches sur les embryons in vitro et leur utilisation à des fins médicales et scientifiques, le Comité national d’éthique observe : " On utilise le terme d’embryon pour désigner le stade de développement qui marque le passage d’une cellule unique, l’œuf, à un ensemble complexe de cellules, le fœtus. Au cours de cette période l’œuf commence par se diviser, puis les cellules obtenues se différencient les unes des autres et s’organisent pour définir progressivement les caractéristiques propres du fœtus. " Dans un autre avis de 1984 sur les prélèvements de tissus d’embryons ou de fœtus humains morts à des fins thérapeutiques, diagnostiques et scientifiques le Comité national d’éthique considère que : " L’embryon ou le fœtus doit être reconnu comme une personne humaine potentielle qui est ou a été vivante et dont le respect s’impose à tous. "

La réponse législative

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le progrès médical

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La réponse législative

1994

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1994

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1996

1998

 

 

 

 

 

 

 

 

1998

Une législation spécifique de l’assistance médicale à la procréation

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La médecine
prédictive

 

 

 

 

 

 

Le clonage

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’étude génétique de la personne

 

 

 

 

L’identification de la personne

La généralisation des pratiques de procréation médicalement assistées et les hésitations de la jurisprudence appelaient une législation dans ce domaine : deux des trois " lois bioéthiques " de 1994, déjà évoquées, réglementent la procréation médicalement assistée : la loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain, au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain ; la loi n° 94-654 du 29 juillet 1994 relative à l’assistance médicale, à la procréation et au diagnostic prénatal.

Définition légale de l’assistance médicale à la procréation

L’article L.152-1 du code de la santé publique définit l’assistance médicale à la procréation : " […] des pratiques cliniques et biologiques permettant la conception in vitro, le transfert d’embryons et l’insémination artificielle, ainsi que de toute technique d’effet équivalent permettant la procréation en dehors du processus naturel ". En vertu de l’article L.152-2 du code de la santé publique, l’assistance médicale à la procréation a pour but de remédier à l’infertilité, dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué, d’un couple formé d’un homme et d’une femme, vivants et en âge de procréer ou d’éviter de transmettre à l’enfant une maladie d’une particulière gravité. Conformément à l’article L. 152-3 du code précité, le couple peut décider par écrit que : " […] sera tentée la fécondation d’un nombre d’ovocytes pouvant rendre nécessaire la conservation d’embryons, dans l’intention de réaliser leur demande parentale dans un délai de cinq ans. Les deux membres du couple sont consultés chaque année pendant cinq ans sur le point de savoir s’ils maintiennent leur demande parentale. "

Les principes de l’assistance médicale à la procréation

- l indisponibilité du corps humain :

" Les conventions ayant pour effet de conférer une valeur patrimoniale au corps humain, à ses éléments ou à ses produits sont nulles " (article 16-5 du code civil) ; " Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle. " (article 16-7 du code civil).

- le caractère exceptionnel du don de gamètes et d’embryons :

Le recours à un tiers donneur reste exceptionnel et limité aux cas où l’assistance à la procréation se révèle sans succès. " Le don de gamètes consiste en l’apport par un tiers de spermatozoïdes ou d’ovocytes en vue d’une assistance médicale à la procréation. " (article L. 673-1 du code de la santé publique) Le donneur doit faire partie d’un couple ayant procréé. Le consentement des deux membres du couple donneur et celui des deux membres du couple receveur doit être recueilli par écrit. Chaque membre du couple peut revenir sur son consentement avant toute intervention. A titre exceptionnel, si l’assistance médicale à la procréation sans tiers donneur ne peut aboutir, un couple peut " accueillir " un embryon conçu in vitro qu’un autre couple, à titre exceptionnel, aura accepté de conserver en vue d’être accueilli (article L. 152-4 e 152-5 du code de la santé publique).

- le contrôle du juge sur le consentement écrit du couple et sur le fait que l’assistance médicale à la procréation a pour but de remédier à l’infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué.

- le consentement préalable du donneur;

- l’anonymat du don : le donneur ne peut connaître l’identité du receveur, ni le receveur celle du donneur.

- la gratuité du don;

- la sécurité sanitaire du don.

La situation juridique de l’embryon

La loi ne fixe pas de statut de l’embryon mais en limite l’utilisation. Ainsi la conservation d’embryons doit être décidée par écrit, par le couple, en vue de réaliser leur demande parentale dans un délai de 5 ans. Les deux membres du couple sont consultés chaque année pendant 5 ans sur leur souhait d’arrêter la conservation de leurs embryons surnuméraires. Les législations étrangères relatives aux recherches sur l’embryon divergent selon que l’embryon est ou n’est pas considéré comme un être humain. La loi française du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal a interdit l’expérimentation sur les embryons conçus in vitro. Mais à titre exceptionnel le couple peut accepter par écrit que des études soient menées sur leurs embryons sous plusieurs conditions : une finalité médicale, pas d’atteinte à l’embryon et l’avis conforme de la Commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction et du diagnostic prénatal. Compte tenu des incertitudes relatives au potentiel des embryons, il apparaît nécessaire de transférer des embryons en excès. La loi du 29 juillet 1994 a autorisé la conservation des embryons mais la question des embryons surnuméraires reste posée.

Le rapport n°1407 de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques sur l’application de la loi du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal (rapporteur M. Alain Claeys) distingue deux types de situation :

- celle de la conservation et des chances d’implantation des embryons encore inscrits dans un projet parental ;

- celle des embryons " orphelins " au sujet desquels plusieurs interrogations restent en suspens : aucune évaluation précise de leur nombre ne peut actuellement être fournie ; il existe des embryons conçus avant 1994 dont la loi autorise la destruction sans préciser à qui incombe la décision.

Le diagnostic prénatal

Selon l’article L. 162-16 du code de la santé publique, le diagnostic prénatal vise " des pratiques médicales ayant pour but de détecter in utero chez l’embryon ou le fœtus une affection d’une particulière gravité . Ces pratiques suscitent de grands espoirs en matière de médecine préventive, mais toute la difficulté réside dans le fait que les progrès thérapeutiques pour soigner ou supprimer les malformations ou pathologies découvertes sont moins rapides que les progrès des techniques de diagnostic prénatal. Faute de traitement, la détection de la maladie ou de la malformation "d’une particulière gravité" conduit ainsi le plus souvent à une interruption de grossesse pour motif thérapeutique.

Les problèmes de filiation consécutifs à une procréation médicale assistée

  • Selon la loi du 29 juillet 1994 relative au don et à l’utilisation des éléments et produits du corps humain, à l’assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, les époux et concubins ayant recours à une procréation médicalement assistée nécessitant l’intervention d’un tiers donneur doivent exprimer leur consentement préalable devant le juge ou le notaire les informant de leur acte au regard de la filiation. " Le consentement donné à une procréation médicalement assistée interdit toute action en contestation de filiation ou en réclamation d’état à moins qu’il ne soit soutenu que l’enfant n’est pas issu de la procréation médicalement assistée ou que le consentement a été privé d’effet".


-La médecine prédictive ou de prévision

La médecine prédictive ou de prévision permet, grâce à l’examen génétique d’une personne, de connaître ses prédispositions à développer une maladie et d’étudier les modes de transmission de cette maladie dans une famille.

Les techniques de la médecine prédictive pourraient bouleverser les relations entre les malades et leurs médecins, le monde du travail – le recrutement et le licenciement en particulier – et le secteur des assurances, car les conditions du calcul actuariel seront remises en cause par la précision atteinte dans la connaissance de l’avenir. Savoir, grâce à un test génétique, qu’une personne pourrait à terme développer une maladie pourrait conduire les sociétés d’assurances à augmenter la prime de cette personne voire à lui refuser le bénéfice de l’assurance. Afin d’éviter toute dérive, ces études sont limitées par la loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain aux seules fins médicales et de recherche scientifique et sous condition du consentement de l’intéressé préalablement à la réalisation de l’étude.

Le clonage est une technique de reproduction d’organismes vivants génétiquement identiques. De nombreuses méthodes de multiplication cellulaire in vitro aboutissent par reproduction asexuée à la formation de clones. Les recherches peuvent aussi être réalisées in vivo. Il existe des clones cellulaires, bactériens et moléculaires.

- juillet 1996 : naissance de la brebis Dolly, premier mammifère cloné grâce à l’équipe de Ian Wilmut du Roslin Institute (annonce en février 1997) ;

- mars 1998 : naissance en France de la génisse Marguerite à l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA)

Le clonage a pu être réalisé grâce à la technique complexe du transfert nucléaire : on utilise une cellule destinée à donner son noyau et un ovocyte receveur. Après avoir procédé à une biopsie de peau de glande mammaire d’une brebis adulte âgée de 6 ans, il a été procédé à une culture des cellules in vitro puis à leur transfert dans des ovocytes énucléés, à une activation électrique, afin, d’une part, de provoquer la fusion de deux cellules, sans que l’ovocyte perde son enveloppe cellulaire lors de la fusion, et, d’autre part, de reconstituer des embryons. La cellule donneuse fusionne avec l’ovocyte et subit de nouveau une impulsion électrique. Pour rendre le noyau donneur compatible avec le cytoplasme de l’ovocyte receveur, le cycle cellulaire a été arrêté afin de mettre les cellules embryonnaires donneuses en hibernation ce qui permet de multiplier les cellules. Un embryon ainsi conçu est implanté dans l’utérus d’une brebis receveuse. 21 semaines de gestation sont nécessaires pour produire le clone de la brebis donneuse de glande mammaire. Mais il aura fallu en fait 277 embryons formés à partir de glandes mammaires pour donner naissance à un agneau viable.

En 1998 ont eu lieu des clonages de souris, de veaux et de chèvres à partir de cellules fœtales ou de cellules adultes.

Le clonage reproductif vise à permettre une amélioration des cheptels. Un clonage à visée thérapeutique, en vue de l’éradication de certaines maladies infectieuses et de défauts génétiques, est également envisageable, de même que la production par ce biais de médicaments contenus dans le lait de vache ou de mouton, cette méthode s’avérant beaucoup moins coûteuse que les pratiques actuelles. Mais la viabilité des clones est encore incertaine. L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques considère dans un rapport de février 2000 sur Le clonage, la thérapie cellulaire et l’utilisation thérapeutique des cellules embryonnaires (rapport n°2198 de M. Alain Claeys, député) " qu’en dépit de progrès spectaculaires, le clonage par transfert nucléaire constitue à l’heure actuelle une technique aléatoire, de faible rendement et dont les résultats sont hypothéqués par des incertitudes qu’une pratique plus prolongée permettra seule de dissiper. "

L’expérience ouvre cependant un nouveau champ de recherche. Les animaux pourront ainsi être utilisés en moins grand nombre comme sujets d’expériences thérapeutiques. Chez l’homme les techniques de clonage permettent d’envisager des perspectives pour la thérapie génique et la thérapie cellulaire. Mais le progrès de la science paraissant sans limite, pouvant s’abstraire des principes éthiques et conférant le pouvoir de manipuler les espèces suscite une émotion considérable et des appréhensions réelles. Dans le roman de science fiction Le Meilleur des mondes, Aldous Huxley ne décrivait-il pas en 1932 une société totalitaire dirigée par quelques individus biologiquement déterminés et dans laquelle une entreprise d’Etat clonait les individus afin de les rendre satisfaits de leur sort, en dépit des inégalités sociales, et de maintenir ainsi une hiérarchie sociale sans faille ?


L’étude génétique des caractéristiques d’une personne

Les caractéristiques d’un génome sont propres à chaque individu. La loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain établit une protection du patrimoine génétique. Elle interdit les manipulations génétiques risquant d’affecter les caractéristiques de l’espèce humaine. Elle prohibe également la transformation des caractères génétiques dans le but de modifier la descendance de la personne. L’article 511-1 du code pénal rend punissable de vingt ans de réclusion criminelle " le fait de mettre en œuvre une pratique eugénique tendant à l’organisation de la sélection des personnes ". Ces dispositions n’interdisent pas cependant les recherches tendant à la prévention et au traitement des maladies génétiques.

- L’identification d’une personne par ses empreintes génétiques

Les tests d’identification génétique permettent l’identification d’un individu à partir d’éléments prélevés sur le corps de celui-ci (sang, cheveux, peau, etc.). La loi du 29 juillet 1994 relative au respect du corps humain limite la recherche de l’identification d’une personne par ses empreintes génétiques aux mesures d’enquête ou d’instruction diligentées lors d’une procédure judiciaire ou à des fins médicales ou de recherche scientifique et, dans ce dernier cas, à condition de recueillir le consentement préalable de l’intéressé. La loi du 8 janvier 1993 modifiant le code civil relatif à l’état civil, à la famille et aux droits de l’enfant et instituant le juge aux affaires familiales donne aux tribunaux un large pouvoir d’appréciation pour décider de faire procéder à une expertise biologique. Ainsi les tests d’identification génétique peuvent constituer une preuve de non-paternité. Des sanctions pénales permettent d’assurer le respect de ces dispositions.

Le traitement des données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé. 
Le traitement des données nominatives est une méthode essentielle pour la recherche épidémiologique dans l’identification des maladies, l’étude des causes de morbidité, de la fréquence des maladies, de leurs facteurs de risque et de l’efficacité de leurs traitements. En France les premiers registres sont apparus dans les années 70. L’informatisation des données médicales permet aussi de mesurer l’évolution des dépenses de l’assurance-maladie et des hôpitaux. En France le secret médical est général et absolu quoiqu’étant susceptible de dérogations limitées.

Les fichiers de recherche et les registres épidémiologiques étaient parfois utilisés de façon illicite. La loi du 1er juillet 1994 relative au traitement de données nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé, modifiant la loi du 6 janvier 1978 relative à l’informatique et aux libertés introduit une dérogation au secret professionnel après l’intervention d’un comité consultatif sur le traitement de l’information en matière de recherche dans le domaine de la santé ; elle établit une procédure d’autorisation de la recherche par la Commission de l’Informatique et des libertés (CNIL) et crée des droits spécifiques des personnes : le droit d’opposition sans restriction à l’utilisation des données les concernant et le droit à l’information individuelle.

Dans ce cadre, les professionnels de la santé ont l’autorisation de s’échanger et communiquer des données nominatives. Le codage des données permet l’identification des personnes. Les données transmises sont reçues par le " responsable de la recherche ". Il est possible de déroger au codage des données médicales visant à assurer leur anonymat en ce qui concerne le suivi des études de pharmacovigilance et les protocoles réalisés dans le cas de recherches nationales et internationales à condition de respecter la procédure d’autorisation motivée de la CNIL après l’avis du Comité consultatif national.

8.- La réponse éthique

1997

 

 

 

 

 

1997

 

 

1998

 

2000

L'avis du Comité national d'éthique sur le clonage
  • 22 avril 1997 : Avis du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé saisi par le Président de la République :

Le Comité national " réaffirme la distinction fondamentale qui doit être établie entre le clonage non reproductif de cellules humaines incapables d’engendrer par elles-mêmes des êtres humains, de pratiques courantes et anciennes en recherche et analyse biomédicales, et le clonage reproductif destiné à aboutir à la naissance d’un enfant. " Le Comité estime qu’il y a lieu de s’opposer de toutes les manières possibles au développement de pratiques tendant à la reproduction à l’identique d’un être humain ainsi qu’aux recherches pouvant mener à cette fin. Ce qui est en jeu touche aux droits et à la dignité de l’homme en ce que ces principes ont d’universel "

  • 14 mai 1997 : Résolution de l’OMS condamnant le clonage reproductif chez l’homme.

  • Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l’Homme de l’UNESCO, du 11 novembre 1997, article 11 : " des pratiques qui sont contraires à la dignité humaine, telles que le clonage à des fins de reproduction d’êtres humains ne doivent pas être permises ";

  • 12 janvier 1998, adoption d’un protocole additionnel à la Convention d’Oviedo du Conseil de l’Europe : "Est interdite toute intervention ayant pour but de créer un être humain vivant ou mort".

  • 24 février 2000 : le rapport n°2198 précité de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques entend éclairer et dédramatiser le débat : il s’agit " non de parvenir au développement d’un être humain mais d’obtenir, à partir des cellules somatiques d’un patient, les cellules souches dont la différenciation contrôlée permettrait de traiter l’affection dont il est porteur sans provoquer de phénomène de rejet. La technique est bien la même dans les deux hypothèses : reproduction non sexuée d’entités génétiquement identiques. La finalité diffère : création, dans le premier cas, d’un organisme complet, dans le second, de lignées cellulaires, le passage obligé étant, en l’état actuel de la science, le développement préalable d’un embryon in vitro. "

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