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le 30 novembre 1998

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N° 1226

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 25 novembre 1998.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES(1) SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION DE M. CLAUDE GOASGUEN (n° 1140) visant à créer une commission d'enquête sur les modalités de gestion des personnels enseignants de l'enseignement secondaire

PAR M. Yves DURAND,

Député.

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Enseignement secondaire : personnel

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; MM. René Couanau, Jean-Michel Dubernard, Jean-Paul Durieux, Maxime Gremetz, vice-présidents ; Mme Odette Grzegrzulka, MM. Denis Jacquat, Noël Mamère, Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; MM. Yvon Abiven, Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux, MM. André Aschieri, Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Baeumler, Pierre-Christophe Baguet, Jean Bardet, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Mmes Huguette Bello, Yvette Benayoun-Nakache, MM. Patrick Bloche, Alain Bocquet, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Jean-Claude Boulard, Bruno Bourg-Broc, Mme Christine Boutin, MM. Jean-Paul Bret, Victor Brial, Yves Bur, Vincent Burroni, Alain Calmat, Pierre Carassus, Pierre Cardo, Roland Carraz, Mmes Véronique Carrion-Bastok, Odette Casanova, MM. Jean-Charles Cavaillé, Bernard Charles, Jean-Marc Chavanne, Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Georges Colombier, François Cornut-Gentille, Mme Martine David, MM. Bernard Davoine, Lucien Degauchy, Marcel Dehoux, Jean Delobel, Jean-Jacques Denis, Franck Dhersin, Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, MM. Guy Drut, Nicolas Dupont-Aignan, Yves Durand, René Dutin, Christian Estrosi, Claude Evin, Jean Falala, Jean-Pierre Foucher, Jean-Louis Fousseret, Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Yves Fromion, Germain Gengenwin, Mmes Catherine Génisson, Dominique Gillot, MM. Jean-Pierre Giran, Michel Giraud, Gaëtan Gorce, François Goulard, Jean-Claude Guibal, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M.  Francis Hammel, Mme Cécile Helle, MM. Pierre Hellier, Michel Herbillon, Guy Hermier, Mmes Françoise Imbert, Muguette Jacquaint, MM. Maurice Janetti, Serge Janquin, Armand Jung, Bertrand Kern, Christian Kert, Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, MM. Jacques Lafleur, Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lasbordes, Mme Jacqueline Lazard, MM. Michel Lefait, Maurice Leroy, Patrick Leroy, Maurice Ligot, Gérard Lindeperg, Patrick Malavieille, Mme Gilberte Marin-Moskovitz, MM. Didier Mathus, Jean-François Mattei, Mme Hélène Mignon, MM. Jean-Claude Mignon, Renaud Muselier, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Yves Nicolin, Bernard Outin, Dominique Paillé, Michel Pajon, Michel Péricard, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Bernard Perrut, Pierre Petit, Mme Catherine Picard, MM. Jean Pontier, Jean-Luc Préel, Alfred Recours, Gilles de Robien, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. François Rochebloine, Marcel Rogemont, Yves Rome, Jean Rouger, Rudy Salles, André Schneider, Patrick Sève, Michel Tamaya, Pascal Terrasse, Gérard Terrier, Mmes Marisol Touraine, Odette Trupin, MM. Anicet Turinay, Jean Ueberschlag, Jean Valleix, Philippe Vuilque, Jean-Jacques Weber, Mme Marie-Jo Zimmermann.

SOMMAIRE

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Pages

PRÉSENTATION GÉNÉRALE 5

TRAVAUX DE LA COMMISSION 13

PRÉSENTATION GÉNÉRALE

Le 19 octobre 1998, MM. Claude Goasguen, Alain Madelin et José Rossi ont déposé sur le bureau de l'Assemblée nationale une proposition de résolution (n° 1140) visant à créer une commission d'enquête sur les modes de gestion des personnels enseignants de l'enseignement secondaire.

Selon les auteurs de la proposition de résolution, la création d'une commission d'enquête est justifiée par le caractère " particulièrement obscur " de la situation des personnels enseignants dans les collèges et lycées et de leur gestion par le ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie. Le Parlement ne connaîtrait pas, au-delà des lignes budgétaires d'emplois, la répartition réelle des postes d'enseignants. Leurs affectations et mutations, ainsi que leurs éventuelles mises à disposition, seraient " laissées à la libre appréciation de l'administration " et " cogérées par un syndicat ".

I. - La recevabilité de cette proposition de résolution doit s'apprécier au regard des dispositions conjointes de l'article 6 de l'ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires et des articles 140 et 141 du Règlement de l'Assemblée nationale.

La première condition de recevabilité est relative à la définition précise, soit des faits qui donnent lieu à enquête, soit des services publics ou des entreprises nationales dont la commission doit examiner la gestion. La proposition de résolution visant à étudier les modes de gestion de certains personnels enseignants participant au service public de l'éducation, on peut considérer que cette condition est remplie.

La seconde condition, plus substantielle, concerne la mise en _uvre du principe de séparation des pouvoirs législatif et judiciaire et interdit à l'Assemblée nationale d'enquêter sur des faits ayant donné lieu à des poursuites judiciaires et aussi longtemps que ces poursuites sont en cours. La commission d'enquête envisagée devant examiner la gestion d'un service public et non enquêter sur certains faits, d'ailleurs peu susceptibles de caractériser une infraction pénale comme l'a confirmé le Garde des Sceaux, cette condition est remplie et la proposition de résolution est donc parfaitement recevable.

II. - L'opportunité de créer une commission d'enquête sur les modes de gestion des personnels enseignants n'est, en revanche, pas établie.

A.- Il est tout à fait inexact de prétendre que les effectifs d'enseignants du second degré ne sont pas connus précisément. Ainsi, la direction de la programmation et du développement du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie publie chaque année1 une présentation détaillée des personnels enseignants, en distinguant notamment par académie, par type d'établissement, par corps et par discipline.

Au 1er janvier 1997, il y avait 361 837 enseignants du second degré exerçant devant des élèves une activité d'enseignement à l'année dans les collèges, les lycées d'enseignement général ou technologique et les lycées professionnels publics de la métropole, à l'exclusion des personnels de remplacement et de documentation et hors disciplines religieuses. Il faut ajouter à ce chiffre 14 135 enseignants du second degré public dans les départements d'outre-mer et 93 281 enseignants exerçant dans les divisions sous contrat des établissements privés du second degré.

49 % des enseignants de la métropole effectuent leur service principal dans un collège, 36 % dans un lycée d'enseignements général et technologique et 15 % dans un lycée professionnel. On compte, à la même date, 13 627 maîtres-auxiliaires non titulaires, soit 3,9 % des effectifs totaux en moyenne avec une part particulièrement importante dans les académies d'Ile-de-France. Par ailleurs, les titulaires académiques, affectés provisoirement sur des postes vacants, s'élèvent à 39 490.

S'agissant des mises à disposition, 947,5 personnels en équivalent-temps plein (ETP) sont mis à disposition par l'administration centrale du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie en 1998. 289,5 ETP font l'objet d'un remboursement budgétaire et ne s'analysent donc pas comme des aides. Il s'agit pour l'essentiel de personnels mis à disposition de certaines collectivités territoriales et de mutuelles (MGEN, MAIF, CAMIF). 658 ETP ne font pas l'objet de remboursement et correspondent donc à des aides accordées par le ministère, soit aux associations complémentaires de l'enseignement public agréées conformément aux textes en vigueur (470 ETP), soit à d'autres administrations (94 ETP), soit enfin à des organismes divers présentant un intérêt pour l'enseignement ou la recherche comme la fondation Charles-de-Gaulle, l'association Georges-Pompidou ou le groupe permanent de lutte contre l'illettrisme (94 ETP).

Par ailleurs, le ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie applique les dispositions du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 régissant les décharges d'activités de service pour l'exercice d'un mandat syndical. En aucun cas, les mises à disposition et les décharges syndicales ne représentent des emplois fictifs et aucune mise à disposition n'a été effectuée au profit d'un parti politique.

B.- Il faut toutefois bien reconnaître qu'il existe un certain nombre de dysfonctionnements d'ordre administratif au sein du système éducatif, révélés notamment par le mouvement lycéen d'octobre 1998. M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, en est parfaitement convaincu et a décidé d'agir résolument pour moderniser l'administration de son ministère et améliorer la gestion des ressources humaines. Son action tranche avec l'immobilisme dont a fait preuve son prédécesseur et qui n'a pas été sans aggraver la situation.

Dès la rentrée scolaire 1997, des mesures ont été prises. Les heures supplémentaires2, qui constituent un élément de souplesse nécessaire à l'organisation pédagogique des établissements, ont été réduites pour permettre une meilleure adéquation entre les postes et les emplois. Les crédits budgétaires correspondant à 90 000 heures supplémentaires ont ainsi été transférés pour dégager des supports d'affectation dans les établissements, notamment en faveur du réemploi des maîtres-auxiliaires. De ce fait, l'emploi a été garanti à la totalité des maîtres-auxiliaires affectés au cours des trois années scolaires précédentes, sous réserve qu'ils aient donné satisfaction sur le plan pédagogique. Le projet de budget pour 1999 prolonge cette action en prévoyant la titularisation de 3 300 maîtres-auxiliaires ayant réussi les épreuves des concours réservés. Cette politique active de résorption de l'auxiliariat a déjà commencé à porter ses fruits puisque 5 634 maîtres-auxiliaires ont été titularisés en 1998, soit nettement plus que les années précédentes.

En ce qui concerne le mouvement national des enseignants du second degré - qui a porté sur 110 247 demandes et permis d'effectuer 50 030 mutations ou affectations au titre de la rentrée scolaire 1998 -, tous les acteurs conviennent que le système actuel est trop lourd. Deux décrets du 13 octobre 1998 (n° 98-915 et n° 98-916) ont concrétisé la volonté de M. Claude Allègre, ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, de poursuivre, à la rentrée scolaire 1999, la déconcentration du mouvement des personnels enseignants du second degré et des personnels d'information, d'orientation et d'éducation. Ces mesures s'insèrent dans un vaste processus de déconcentration des responsabilités au sein du système éducatif, concernant l'ensemble du domaine des ressources humaines. Elles participent indubitablement à la modernisation du service public de l'éducation.

L'objectif principal du nouveau dispositif réglementaire est d'apporter une amélioration qualitative de la gestion des personnels, et notamment une connaissance plus rapide des affectations des enseignants. Les nouvelles modalités mises en place permettront de rendre les procédures d'affectation plus conformes aux attentes des personnels, plus proches des usagers et, surtout, plus efficaces au regard de l'intérêt des élèves qui est d'avoir toujours un enseignant devant eux pour faire cours.

Ces nouvelles modalités offriront aux recteurs plus de souplesse dans la gestion des besoins des établissements scolaires qui relèvent de leur autorité et faciliteront une meilleure adéquation entre le profil des postes et la compétence des agents les plus qualifiés pour les pourvoir. Le mouvement déconcentré sera organisé selon le principe suivant : seules les mutations inter-académiques continueront à relever de la compétence ministérielle, à l'exception de certains mouvements particuliers ou spécifiques, essentiellement les affectations en classes préparatoires aux grandes écoles. Ce principe conduit à instaurer deux mouvements successifs : un mouvement inter-académique à l'échelon central et un mouvement intra-académique qui confiera aux recteurs l'affectation précise dans un établissement ou dans des fonctions de remplacement. Par ailleurs, un dispositif d'information et de conseil à destination des enseignants candidats au mouvement sera mis en place pour leur permettre de définir une stratégie de mutation et de formuler des voeux. Il s'agira d'un véritable outil d'aide à la décision individuelle.

Ce n'est en effet que par une gestion plus dynamique des emplois au niveau des académies que les problèmes d'affectation qui se présentent immanquablement lors de chaque rentrée scolaire pourront être au mieux évités, au pire réglés au plus vite sur le terrain.

S'agissant enfin des recrutements, le second degré ne connaît plus de difficulté, comme en témoignent l'afflux de candidats aux concours et l'amélioration croissante du rendement de ces derniers. Le ministère est à même de répondre aux besoins d'enseignement par l'emploi de titulaires en nombre suffisant. Dans cette perspective, il a été décidé de mettre en oeuvre une démarche de gestion prévisionnelle des personnels enseignants, tant au niveau national qu'à l'échelon académique, afin d'améliorer les prévisions nationales de recrutement en confrontant la demande d'enseignement des élèves, les évolutions pédagogiques et les projections des effectifs d'enseignants par corps et par discipline et de mieux ajuster au niveau des académies l'offre à la demande d'enseignement en fonction des situations locales de chaque discipline.

A cet égard, les disciplines présentant des besoins en personnels titulaires sont de moins en moins nombreuses. L'enseignement général, y compris dans les disciplines scientifiques qui ont longtemps connu des besoins, ne présente plus de déficit en personnels. Il en est de même dans l'enseignement technique. En revanche, l'enseignement professionnel présente encore des besoins en personnels titulaires dans certaines disciplines.

Ce contexte favorable devrait permettre de faire face aux départs massifs à la retraite d'ici 2006. Pour ce faire, une approche fine des besoins de recrutement futurs au niveau de chaque discipline est conduite par la direction de la programmation et du développement pour anticiper les départs massifs à la retraite des enseignants du second degré qui interviendront dans les prochaines années. En ce qui concerne les besoins globaux en personnels d'ici 2003, les études déjà menées montrent qu'en moyenne 12 390 nouveaux enseignants titulaires seront nécessaires chaque année pour assurer chacune des rentrées scolaires.

Sur cette base, le ministre a décidé, pour la publication de la liste des postes offerts aux différents concours de recrutement d'enseignants3, que les postes publiés doivent désormais correspondre à la réalité du recrutement. Un terme est ainsi mis au gonflement artificiel du nombre de postes offerts dans certaines disciplines qui ne les pourvoyaient jamais en intégralité. De ce fait, des rééquilibrages ont été effectués entre disciplines excédentaires (anglais, allemand ou philosophie) et disciplines déficitaires (espagnol ou sciences de la vie et de la terre par exemple). Par ailleurs, pour éviter que des postes ne soient pas pourvus du fait du désistement de certifiés en faveur de l'agrégation, les jurys du CAPES délibéreront après la publication des résultats de l'agrégation.

C.- Le Gouvernement actuel a donc bien entrepris une amélioration de la gestion des personnels enseignants du second degré. Le Parlement n'a pas à se désintéresser de cette question, qui ressort de son pouvoir de contrôle du Gouvernement. Pour autant, une commission d'enquête n'est pas l'instance appropriée pour remplir cette mission de contrôle. En effet, il s'agit d'informer les députés sur l'utilisation des crédits qu'ils ont votés en faveur de la politique éducative de la France, et non de jeter la suspicion sur un ensemble de personnels dévoués à leur tâche. Enquêter sur la gestion des enseignants du second degré reviendrait à mettre en doute, soit la réalité de l'utilisation des créations d'emploi sur le terrain, soit le travail devant les élèves des enseignants eux-mêmes.

Il ne fait par contre aucun doute que les services du ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie connaissent précisément les affectations réelles des personnels enseignants et les problèmes de gestion qui se posent. Il serait tout à fait opportun que le Parlement prenne connaissance de ces éléments d'information. Cette mission relève pleinement du contrôle budgétaire et ne nécessite pas l'utilisation de moyens d'enquête particuliers, tels que ceux qui sont dévolus à une commission d'enquête.

En effet, aux termes du dernier alinéa du IV de l'article 164 de l'ordonnance n° 58-1374 du 30 décembre 1958 portant loi de finances pour 1959, " les membres du Parlement qui ont la charge de présenter, au nom de la commission compétente4, le rapport sur le budget d'un département ministériel, suivent et contrôlent de façon permanente, sur pièces et sur place, l'emploi des crédits inscrits au budget de ce département. Tous les renseignements d'ordre financier et administratif de nature à faciliter leur mission doivent leur être fournis.[...] "

L'article 146 du Règlement de l'Assemblée nationale met en oeuvre ces dispositions :

" 1. Les documents et les renseignements destinés à permettre l'exercice du contrôle du budget des départements ministériels [...] sont communiqués par les autorités compétentes au rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du plan, chargé du budget du département ministériel dont il s'agit [...].

" 2. Le rapporteur spécial peut demander à la commission des finances, de l'économie générale et du plan de lui adjoindre un de ses membres pour l'exercice de ce contrôle. Il communique les documents dont il est saisi aux rapporteurs pour avis du même budget désignés par les autres commissions permanentes.

" 3. Les travaux des rapporteurs peuvent être utilisés pour les rapports faits par les commissions sur la loi de finances et la loi de règlement. Ils peuvent, en outre, faire l'objet de rapports d'information établis par les rapporteurs spéciaux de la commission des finances, de l'économie générale et du plan ".

Le rapporteur spécial des crédits de l'éducation nationale pour la commission des finances, de l'économie générale et du plan est donc parfaitement habilité à obtenir communication de toute information relative notamment à la répartition des moyens en personnel enseignant, par académie et par discipline. Sa mission s'inscrit par ailleurs dans le cadre de l'annualité budgétaire et elle n'est pas limitée par le délai de six mois imparti aux commissions d'enquête.

Enfin, il faut relever que le Sénat a déjà décidé, le 5 décembre 1998, la création d'une commission d'enquête sur l'ensemble des personnels enseignants et non enseignants du ministère de l'éducation nationale, à l'exception de l'enseignement supérieur. Il ne semble donc pas adéquat d'en créer une seconde sur un sujet quasiment identique à l'Assemblée nationale. Il n'existe qu'un seul précédent de situation dans laquelle deux commissions d'enquête portant sur un sujet semblable ont mené leurs travaux dans le même temps au sein des deux assemblées : il s'agit des commissions d'enquête qui firent suite aux événements étudiants de novembre et décembre 1986. En tout état de cause, chaque assemblée est autonome dans son fonctionnement et libre de sa propre appréciation de la manière de traiter un sujet.

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, le rapporteur conclut au rejet de la proposition de résolution n° 1140.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission a examiné la proposition de résolution au cours de sa séance du mercredi 25 novembre 1998.

Après l'exposé du rapporteur, M. Claude Goasguen a indiqué que la création d'une commission d'enquête sur ce thème répondait aux inquiétudes exprimées publiquement par le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, M. Claude Allègre lui-même. Ce dernier a en effet tenu des propos alarmistes qui ne pouvaient qu'inciter à la fois l'opinion publique et les parlementaires à demander que toute la lumière soit faite sur un certain nombre de dysfonctionnements apparus dans la gestion du corps enseignant. Cette commission d'enquête n'aurait nullement pour objet de mettre en doute les compétences ou les comportements des enseignants. D'ailleurs, les réformes nécessaires dans l'éducation nationale ne pourront se faire sans les enseignants eux-mêmes, qui ne sont pas en cause. A cet égard, le terme de " commission d'enquête ", qui peut donner le sentiment que des suspicions existent, n'est sans doute guère approprié.

Il n'en reste pas moins vrai que les chiffres sur les emplois effectifs, les mutations, affectations et mises à disposition restent difficiles à obtenir, y compris par le ministre qui s'est publiquement plaint de cette carence d'informations précises. On observe en effet une surabondance de chiffres globaux, fournis a posteriori par la direction de la programmation et du développement, et une absence quasi totale de données très précises sur la gestion effective des personnels.

S'agissant des mises à disposition syndicales, elles sont de droit ; il n'est nullement dans l'intention des auteurs de la proposition de la résolution de remettre ce droit en question. A ce sujet, le ministre n'hésite pas, pour sa part, à citer nommément un syndicat d'enseignants, voire son responsable, lorsqu'il conteste les modalités de gestion de certaines affectations de professeurs. En revanche, il faut s'interroger sur la pratique qui consiste à mettre des professeurs à la disposition d'associations, et plus généralement sur le problème des enseignants qui n'enseignent pas. Le chiffre de 1 200 enseignants dans ce dernier cas est ainsi avancé pour l'académie de Paris. Les informations contenues chaque année dans le fascicule budgétaire ne permettent pas d'avoir une vision exacte de la situation. Il convient de gérer de façon plus précise le stock de personnels qui, pour une raison ou une autre, n'exercent plus une activité d'enseignement.

En définitive, la proposition de résolution s'inscrit dans le sens de la volonté du ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie d'opérer des réformes dans la gestion des personnels enseignants de l'enseignement secondaire.

Le président Jean Le Garrec a constaté trois points d'accord entre le rapporteur et M. Claude Goasguen : la volonté de soutenir dans son action de réforme le ministre de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie, le souhait de voir le plus grand nombre d'enseignants enseigner et la nécessité d'avoir une information suffisante et fiable. En revanche, le recours à une commission d'enquête ne semble pas approprié dans la mesure où il s'agit d'une méthode d'investigation beaucoup trop lourde. De surcroît, trois commissions d'enquête devraient être bientôt créées par l'Assemblée nationale, sur le service d'ordre d'un parti politique, les pratiques des groupes industriels et le régime étudiant de sécurité sociale.

C'est pourquoi la méthode du rapport d'information est plus adéquate. Ce rapport, qui pourrait être établi par M. Jacques Guyard, rapporteur spécial des crédits de l'éducation nationale pour la commission des finances en liaison avec M. Yves Durand, traiterait de la gestion des effectifs et du problème particulier de la déconcentration du mouvement des enseignants. Si M. Jacques Guyard en était d'accord, il pourrait être publié au deuxième trimestre 1999, après examen par la commission des finances et présentation à la commission des affaires culturelles.

M. Jacques Guyard, après avoir souligné que le principal facteur d'opacité dans la gestion des effectifs de l'éducation nationale avait d'ores et déjà disparu avec la décision prise par M. Claude Allègre de titulariser les maîtres-auxiliaires, a donné son accord pour établir un rapport fournissant la répartition des moyens en personnel enseignant du second degré par académie, discipline, corps et type d'établissement. Toutefois, une présentation du nombre d'enseignants par établissement est encore impossible en raison de l'existence de nombreux postes à cheval sur plusieurs établissements. Par ailleurs, il est faux de dire que les 1 200 postes vacants à Paris correspondent à des enseignants capables d'enseigner mais payés à ne rien faire, un certain nombre de ces postes étant inoccupés pour des raisons médicales.

M. André Schneider a observé que la volonté d'obtenir une information suffisante en ce qui concerne la gestion des enseignants ne répondait pas à un souci de suspicion mais bien plutôt à un souci d'efficacité. Cet état des lieux des effectifs est d'autant plus nécessaire que des années difficiles en terme de gestion prévisionnelle sont à venir, en raison des départs massifs à la retraite après 2003.

M. René Couanau a précisé que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ne pouvait se borner à un état des lieux mais devait s'intéresser à la mise en place d'une gestion déconcentrée au niveau régional de l'éducation nationale. La gestion des personnels enseignants n'est pas seulement un problème financier mais aussi un problème d'éducation qui concerne au premier chef la commission. Par contre, la création d'une commission d'enquête sur ce sujet ne semble pas très appropriée.

Mme Marie-Thérèse Boisseau a insisté sur la nécessité d'une information fiable sur la gestion des enseignants. A défaut de commission d'enquête, la mise en place d'une mission d'information de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales serait par contre judicieuse pour garantir la transparence et le pluralisme de l'information.

MM. Pierre Hellier et Edouard Landrain ont soutenu la demande de création d'une mission d'information faite par Mme Marie-Thérèse Boisseau.

M. Jean Delobel a fait observer qu'une réflexion était indispensable sur la réorganisation générale de l'enseignement scolaire, dans la perspective de la fin du moratoire sur la fermeture des classes, et que ce travail devait se faire en liaison avec le ministère de l'éducation nationale, de la recherche et de la technologie.

M. Claude Goasguen, après avoir constaté que les problèmes scolaires pouvaient désormais être abordés en des termes non conflictuels, a rappelé sa préférence pour une commission d'enquête. Le fait de ne pas connaître le nombre d'enseignants par établissement et de ne pas pouvoir disposer d'un état récapitulatif exhaustif des effectifs est une situation aberrante. La mise en place de la déconcentration du système éducatif, qui est une impérieuse nécessité, doit pouvoir s'appuyer sur des données fiables. Cependant, si le choix de la commission d'enquête n'était pas retenu, il faudrait tenir compte de la proposition très pertinente de Mme Marie-Thérèse Boisseau de mettre en place une mission d'information à caractère pluraliste.

M. Yves Durand, rapporteur, après s'être félicité qu'un accord général se soit dégagé contre toute suspicion portant sur les enseignants eux-mêmes et sur la politique de déconcentration engagée par le ministre, a fait remarquer que les pouvoirs d'investigation des rapporteurs budgétaires sont identiques à ceux d'une commission d'enquête et donc plus importants que ceux d'une mission d'information. La pluralité sera garantie par l'examen du rapport et des informations recueillies lors d'un débat en commission des finances et en commission des affaires culturelles.

Le président Jean Le Garrec a considéré que la création d'une commission d'enquête n'était pas opportune. Quant à la demande de création d'une mission d'information, elle sera examinée par le bureau de la commission, compte tenu de la charge de travail de la commission.

Puis, conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a rejeté la proposition de résolution.

N°1226.- Rapport de M. Yves Durand (au nom de la commission des affaires culturelles), sur la proposition de résolution de M. Claude Goasguen (n°1140), visant à créer une commission d'enquête sur les modalités de gestion des personnels enseignants de l'enseignement secondaire.

1 In : Repères et références statistiques sur les enseignements et la formation.

2 En 1997, les heures supplémentaires utilisées se sont élevées à 717 000.

3 Cf. JO Lois et décrets du 17 novembre 1998.

4 A savoir la commission des finances.