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le 19 mars 1999

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1471

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 17 mars 1999.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE (1) SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION (n° 1337) DE M. JACQUES MYARD visant à la création d'une commission d'enquête tendant à établir une analyse des phénomènes de la délinquance juvénile, un bilan de l'application de l'ordonnance de 1945 et à proposer des mesures de nature à répondre et corriger cette dérive dangereuse pour notre société,

PAR M. RAYMOND FORNI,

Député.

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Ordre public.

La commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République est composée de : Mme Catherine Tasca, présidente ; MM. Pierre Albertini, Gérard Gouzes, Mme Christine Lazerges, vice-présidents ; MM. Richard Cazenave, André Gerin, Arnaud Montebourg, secrétaires ; MM. Léo Andy, Léon Bertrand, Emile Blessig, Jean-Louis Borloo, Patrick Braouezec, Mme Frédérique Bredin, MM. Jacques Brunhes, Michel Buillard, Dominique Bussereau, Pierre Cardo, Christophe Caresche, Patrice Carvalho, Mme Nicole Catala, MM. Olivier de Chazeaux, Pascal Clément, Jean Codognès, François Colcombet, Michel Crépeau, François Cuillandre, Henri Cuq, Jacky Darne, Camille Darsières, Bernard Derosier, Franck Dhersin, Marc Dolez, Renaud Donnedieu de Vabres, René Dosière, Julien Dray, Renaud Dutreil, Jean Espilondo, Mme Nicole Feidt, MM. Jacques Floch, Raymond Forni, Pierre Frogier, Claude Goasguen, Louis Guédon, Guy Hascoët, Philippe Houillon, Michel Hunault, Henry Jean-Baptiste, Jérôme Lambert, Mme Claudine Ledoux, MM. Jean-Antoine Léonetti, Bruno Le Roux, Mme Raymonde Le Texier, MM. Jacques Limouzy, Thierry Mariani, Louis Mermaz, Jean-Pierre Michel, Ernest Moutoussamy, Mme Véronique Neiertz, MM. Robert Pandraud, Christian Paul, Vincent Peillon, Dominique Perben, Henri Plagnol, Didier Quentin, Bernard Roman, Frantz Taittinger, André Thien Ah Koon, Jean Tiberi, Alain Tourret, André Vallini, Alain Vidalies, Jean-Luc Warsmann.

MESDAMES, MESSIEURS,

Compte tenu de la prégnance des questions relatives à la sécurité publique, en particulier en ce qui concerne la délinquance des mineurs, alimentée par des statistiques récentes mal orientées, quelques événements graves mais aussi un traitement médiatique souvent peu nuancé, il n'est guère surprenant que nous soyons aujourd'hui saisis d'une demande de constitution d'une commission d'enquête chargée de faire le point sur ce dossier.

De fait, le 22 janvier dernier, MM. Jacques Myard, Jean-Louis Debré et les membres du groupe R.P.R. et apparentés ont déposé une proposition de résolution " visant à la création d'une commission d'enquête tendant à établir une analyse des phénomènes de la délinquance juvénile, un bilan de l'application de l'ordonnance de 1945 et à proposer des mesures de nature à répondre et corriger cette dérive dangereuse pour notre société. "

Comme de coutume, en application des articles 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, 140 et 141 de notre règlement, nous sommes invités à examiner d'abord la recevabilité de cette proposition de résolution avant de se prononcer sur son éventuelle opportunité.

La recevabilité de la proposition peut être admise sans difficulté.

Tout d'abord, celle-ci détermine avec un degré de précision suffisant les faits donnant lieu à enquête, du moins si l'on se conforme à la jurisprudence traditionnellement compréhensive de votre commission des Lois en la matière. Certes, la rédaction retenue par nos collègues ne vise pas spécifiquement telle ou telle situation clairement identifiée, mais force est de constater que la délinquance des mineurs correspond à un ensemble de faits et de comportements quotidiens et que l'ordonnance 45-174 du 2 février 1945 donne lieu à une application, hélas, trop fréquente.

Ensuite, comme l'a fait savoir la Garde des Sceaux dans sa lettre adressée au président de l'Assemblée nationale le 22 février dernier, les faits donnant lieu à enquête ne font l'objet d'aucune procédure judiciaire en cours. Bien entendu, beaucoup d'actes de délinquance juvénile entraînent le déclenchement de poursuites, mais dans la mesure ou les rédacteurs de la proposition s'intéressent au phénomène dans son ensemble, la position de la Chancellerie est, sur le plan formel, parfaitement justifiée.

L'opportunité de la proposition de résolution est, en revanche, nettement plus sujette à caution.

D'emblée, indiquons qu'il n'est pas question de nier que l'évolution récente de la délinquance de mineurs représente un défi majeur pour notre société à l'aube du vingt et unième siècle, même si les chiffres brandis ici et là méritent d'être resitués dans leur contexte.

Entre 1973 et 1998, le nombre de mineurs mis en cause pour crime ou délit par la police et la gendarmerie est passé de 72.742 à 171.787. Corrélativement, leur proportion au sein de la population délinquante globale s'est spectaculairement accrue au cours de la même période, passant de 9,7 % à 21,7 %.

Cependant, l'analyse sur longue période conduit à nuancer ce constat. Comme l'ont rappelée nos collègues Mme Christine Lazerges et M. Jean-Pierre Balduyck dans leur rapport remis au premier ministre (Réponses à la délinquance des mineurs), les statistiques de la police et de la gendarmerie montrent qu'on ne peut pas parler d'explosion continue de la délinquance des mineurs.

PERSONNES MISES EN CAUSE - MINEURS POUR L'ENSEMBLE DES CRIMES ET DÉLITS

Années

Mineurs
mis en cause

Evolution
%

Part des mineurs dans le total
des mis en cause

1978

81.765

- 0,5 %

14,2 %

1980

104.292

11,3 %

15,2 %

1982

104.749

3,1 %

13,1 %

1984

105.027

- 2,6 %

11,4 %

1986

90.501

- 12,6 %

11,2 %

1988

92.143

- 1,4 %

12,0 %

1990

98.284

4,2 %

13,0 %

1992

98.864

- 2,7 %

13,9 %

1994

109.338

17,7 %

14,1 %

1996

143.824

13,9 %

17,8 %

1997

154.437

7,4 %

19,4 %

1998

171.787

11,23%

21,77%

On observe ainsi une alternance de hausses, de stagnations, mais aussi de baisses du nombre des mineurs impliqués, même si, depuis 1976, la part de ceux-ci dans le total des mis en cause s'établit à un niveau élevé, toujours supérieur à 10 %, se maintenant même pendant de longues périodes au-dessus de la barre des 13 % (1).

Toutefois, les statistiques publiées par le ministère de l'intérieur comportent un biais car elles ne neutralisent pas la dépénalisation des chèques volés, ce qui conduit à majorer d'autant la représentation des mineurs à partir de 1993. Si l'on effectuait cette correction, celle-ci serait, en définitive, comparable en 1997 et en 1980.

A l'évidence, ces observations incitent donc à manier les statistiques usuelles avec prudence. Néanmoins, sous réserve de ces observations méthodologiques, celles-ci font clairement ressortir trois tendances récentes significatives :

-  une croissance continue et forte de la part des mineurs mis en cause depuis 1994, le nombre des moins de dix-huit ans impliqués ayant augmenté de 57 % depuis cette dernière année. Dans le même temps, à structure constante, leur part dans le total des mis en cause est passée de 14,1 % à 21,77 %. Sans surprise, la proportion des mineurs dans la délinquance de voie publique - celle qui est la plus mal ressentie par nos concitoyens - a augmenté au même rythme : elle représentait 31,66 % en 1996, 33,5 % en 1997 et 35,9 % en 1998 ;

-  un rajeunissement des mineurs incriminés, difficilement étayé par les statistiques, mais couramment mis en exergue par l'ensemble des observateurs sur le terrain ;

-  une délinquance plus violente, le nombre des mineurs auteurs de vols à main armée et de vols avec violences augmentant de manière très alarmante au cours de ces deux dernières décennies (43,4 % des vols avec violence sans arme à feu constatés en 1997 sont imputables à un mineur contre 30 % à la fin des années soixante-dix).

Ces tendances lourdes soulignent l'acuité du problème, en particulier dans quelques uns de nos quartiers qui concentrent toutes les difficultés. En outre, rappelons que les statistiques officielles ne mesurent pas toute une série de comportements déviants infra-pénaux, plus connus sous le vocable " d'incivilités " qui vont des dégradations légères aux manifestations d'irrespect et d'agressivité en passant par les insultes et qui affectent profondément la vie quotidienne, nourrissant à due concurrence le sentiment d'insécurité.

Chacun s'accorde à reconnaître que les problèmes les plus graves sont largement imputables à un petit groupe d'individus souvent récidivistes, dont la mise à l'écart contribuerait sans doute à ramener le calme.

Cela étant, l'évolution de la délinquance des mineurs exprime aussi, notamment dans sa composante la plus dure, les difficultés de l'intégration qui se traduisent par une culture du rejet des normes et de la loi républicaine. Dans ces conditions, le traitement pénal des meneurs est indispensable, mais insuffisant. C'est essentiellement à la prévention qu'il incombe, en effet, d'assurer le traitement durable du cas de trop nombreux jeunes qui, sans être les délinquants les plus radicaux, sont confrontés aux aléas de l'insertion scolaire et professionnelle, à l'absence de structures familiales et de responsabilité parentale, et qui s'installent dans un parcours personnel où la délinquance, le plus souvent heureusement occasionnelle, permet de répondre artificiellement à une situation de détresse.

Dans ce contexte, la constitution d'une commission d'enquête ne semble pas être la procédure la plus appropriée.

Tout d'abord, l'analyse du phénomène et la nature des réponses à y apporter ont fait - et feront sans doute encore - l'objet d'une multitude de travaux, études et rapports, dont celui déjà évoqué, récemment rédigé par Mme Christine Lazerges et M. Jean-Pierre Balduyck. Chaque année, les statistiques officielles donnent, aussi finement que possible, la mesure des comportements délictueux imputables aux mineurs. Mois après mois, se succèdent réunions et colloques réunissant les acteurs de terrain, les professionnels et les élus où chacun fait état de son expérience et avance des pistes de réflexion. A cet égard, on évoquera la journée organisée le 24 février dernier par l'association des maires des grandes villes sur le thème de la sécurité dans les villes, ou les Rencontres nationales des acteurs de la prévention de la délinquance qui se tiennent ces jours-ci à Montpellier. Pour mémoire, rappelons aussi l'abondance des articles de presse consacrés à cette question depuis le début de l'année, attestant de l'intensité du débat public. Dans ces conditions, on peut légitimement douter de l'intérêt informatif d'une commission d'enquête parlementaire.

Ensuite, le Parlement a déjà, en son sein, l'occasion de débattre fréquemment de cette question. Tel est notamment le cas à l'occasion du débat budgétaire sur les crédits de la police ou de la justice. L'Assemblée nationale va, par ailleurs, examiner très prochainement une proposition de loi tendant à modifier l'ordonnance de 1945, présentée par notre collègue Pierre Cardo.

Enfin, le Gouvernement, quoi qu'en disent certains plus prompts à manier la caricature que l'objectivité, a évidemment pris la mesure du problème, adoptant rapidement un certain nombre de mesures, regroupées dans un plan d'action gouvernemental arrêté par le conseil de sécurité intérieur le 8 juin 1998, puis précisé le 12 octobre 1998.

Dans ce cadre, le 15 juillet 1998, la Garde des Sceaux a signé une circulaire adressée aux procureurs généraux et procureurs de la République sur la politique pénale en matière de délinquance juvénile (N° NOR JUS F 98-500 88 C). Ce document, peu connu du grand public mais très complet et essentiel, repose sur des principes pratiques : apporter une réponse aux premiers faits de délinquance commis par les mineurs, réagir rapidement à tous les faits de délinquance et assurer une continuité de l'intervention des pouvoirs publics, associer les familles et les acteurs sociaux concernés et améliorer la lisibilité. Ces guides d'actions sont déclinés en une série de mesures très concrètes, notamment en ce qui concerne le traitement en temps réel des procédures et les réponses immédiates aux actes de primo-délinquance grâce à la systématisation des rappels à la loi, des classements sans suite sous conditions ou des mesures de réparation.

De son côté, le Premier ministre a publié, le 6 novembre dernier, une circulaire de mise en oeuvre des décisions prises par le Conseil de sécurité intérieur précité, qui insiste, sans négliger la protection de l'enfance, sur la responsabilité du mineur dans la violation de la loi que constitue l'acte délictueux ainsi que sur celle des parents. Ce texte fondateur a été accompagné d'une circulaire signée le même jour par l'ensemble des ministres concernés et qui confirme les orientations suivantes : agir sur l'environnement des jeunes (responsabilisation des parents, prévention à l'école, ...) et apporter une réponse systématique, rapide et lisible à chaque acte de délinquance, quel qu'il soit.

Inscrivant l'action du Gouvernement dans la durée, le conseil de sécurité intérieur du 27 janvier dernier a complété cet arsenal déjà important, en arrêtant un certain nombre de décisions supplémentaires. Outre plusieurs mesures concernant la sécurité publique en général (affectation de 7.000 policiers et gendarmes dans les quartiers sensibles sur trois ans, création de 30 nouvelles maisons de justice et du droit, renforcement de la présence policière dans les gares de l'Ile-de-France, lancement d'expérimentations globales de police de proximité dans 30 sites au sein des départements sensibles), plusieurs dispositifs intéressant spécifiquement les mineurs ont été retenus. En particulier, pour les mineurs multirécidivistes auteurs des faits les plus graves, on évoquera :

-  le renforcement de l'action éducative au sein du dispositif carcéral propre aux mineurs ;

-  la création, d'ici 2001, de 50 centres de placement immédiat, dont 15 en 1999, destinés à assurer l'éloignement immédiat de délinquants difficiles pour une période brève, avec prise en charge éducative renforcée jour et nuit, représentant une capacité de 900 places ;

-  le développement des centres éducatifs renforcés pour la mise en place de séjours " de rupture " de plusieurs mois, conduisant à un total de 100 unités pour la fin de l'année 2000, soit 77 de plus que ce qui était prévu par la programmation initiale.

Le conseil de sécurité intérieur a également mis l'accent sur la violence à l'école (développement des classes relais ; création d'internats urbains ; recrutement de 10.000 aides-éducateurs) et sur les actions en direction des jeunes. A cet égard, on notera la mise en place d'un réseau d'écoute et d'appui aux parents, l'institution de 40.000 parcours " TRACE " pour prévenir la marginalisation et l'exclusion ou l'amélioration de la place des jeunes originaires des quartiers en difficulté dans le cadre du programme emplois-jeunes.

Comme on le constate, il faut faire preuve d'une singulière mauvaise foi pour prétendre que le Gouvernement reste inactif face au défi lancé à notre société par la délinquance des mineurs. De surcroît, le rapide survol des actions initiées montre que celui-ci ne se contente ni d'une approche sécuritaire ni d'une vision angélique du problème. Loin des incantations stériles et quelque peu démagogiques en faveur de modèles anglo-saxons plus ou moins bien compris, le Gouvernement déploie une politique vraiment globale, visant à donner leur plein effet aux mesures législatives existantes et à apporter des réponses qui, au-delà de l'action de la justice et de la police ou de la gendarmerie, visent à favoriser l'intégration, la citoyenneté et, d'une manière générale, à agir sur l'ensemble des paramètres qui peuvent concourir à résorber la violence qu'exprime une partie de notre jeunesse.

Dans ces conditions, il faut laisser le temps à ces mesures concrètes - dont beaucoup rejoignent des propositions formulées ici et là par des élus de toutes tendances politiques - de produire leurs effets. L'exemple de la cité des Tarterêts, à Corbeil-Essonnes, cité par le journal Libération le 8 mars dernier, montre qu'une adaptation des méthodes de travail de la police privilégiant l'îlotage à une stratégie uniquement réactive, une prise de conscience des jeunes eux-mêmes et une réimplication des parents peut produire des résultats très encourageants, voire spectaculaires.

Au total, il apparaît clairement que la constitution d'une commission d'enquête parlementaire ne serait de nature ni à alimenter utilement le débat, ni à faire émerger des orientations réalistes et viables. Votre rapporteur ne peut donc que vous inviter à rejeter la proposition de résolution qui vous est soumise.

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* *

Plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

Approuvant le constat dressé par le rapporteur, M. Thierry Mariani a néanmoins indiqué qu'il ne formulait pas les mêmes conclusions, insistant sur le rajeunissement de la délinquance juvénile et sur sa diffusion croissante sur l'ensemble du territoire. Après avoir fait observer que les mesures prises par le gouvernement ne produisaient pas d'effets sur le terrain, il a évoqué la révolution intellectuelle opérée en Grande-Bretagne vis à vis de la délinquance juvénile et a jugé que la mise en place d'une commission d'enquête permettrait de porter un regard neuf sur ce phénomène.

M. Bruno Le Roux a insisté sur le fait que le traitement de la délinquance des mineurs appelait davantage des actes concrets que la création d'une commission d'enquête. Evoquant les rencontres nationales des acteurs de la prévention de la délinquance se tenant à Montpellier, il a mis l'accent sur la nécessité de mettre en oeuvre des politiques transversales.

M. Pierre Cardo, s'exprimant à titre personnel, a déploré le décalage entre le nombre important d'acteurs intervenant sur le terrain et l'impact limité des interventions. A cet égard, il a estimé qu'une enquête parlementaire permettrait de procéder à une évaluation des institutions en prise avec l'enfance en danger et la délinquance juvénile et, dont le mode de fonctionnement apparaît largement inadapté, qu'il s'agisse de la police, de la justice, de l'éducation nationale ou des services sociaux. Evoquant la mise en _uvre des procédures de médiation pénale, il a, par ailleurs, observé que de nombreuses décisions n'étaient pas appliquées du fait de l'inadaptation ou de la mauvaise volonté des acteurs concernés.

M. Jérôme Lambert a souligné l'impact désastreux de la violence à la télévision sur les jeunes, estimant que beaucoup trop de mineurs n'étaient plus en état de se référer à un bon exemple.

Mme Nicole Feidt a considéré que la plupart des réponses aux questions posées figuraient dans le rapport de Mme Christine Lazerges et M. Jean-Pierre Balduick, ce qui rendait inutile la constitution d'une commission d'enquête. Elle a, en outre, précisé que les premières évaluations des mesures mises en _uvre par le gouvernement faisaient état d'effets positifs.

M. Jean-Antoine Léonetti a estimé nécessaire de procéder à une évaluation des interventions des différents acteurs de terrain, trop souvent axées sur la déresponsabilisation et l'éducation, soulignant qu'elles avaient conduit à une situation d'échec patent. Il a considéré que les mesures préconisées par le gouvernement n'étaient pas à la hauteur de l'enjeu et qu'elles n'avaient aucun impact.

M. Pascal Clément a indiqué qu'une commission d'enquête serait opportune dès lors qu'elle permettrait de dépasser un certain nombre de faux débats et de gagner du temps pour mettre en oeuvre des réponses novatrices.

Approuvant ces propos, M. Michel Hunault a fait valoir qu'en réalité, le phénomène de la délinquance juvénile était mal connu et qu'une évaluation sérieuse des dispositifs existants permettrait de déboucher sur des réponses adaptées.

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Conformément aux conclusions du rapporteur, la Commission a rejeté la proposition de résolution.

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N°1471. - RAPPORT de M. Raymond FORNI (au nom de la commission des lois) sur la proposition de résolution (n° 1337) de M. Jacques Myard visant à la création d'une commission d'enquête tendant à établir une analyse des phénomènes de la délinquance juvénile, un bilan de l'application de l'ordonnance de 1945 et à proposer des mesures de nature à répondre et corriger cette dérive dangereuse pour notre société.

1 ) Pour restituer ces tendances dans leur contexte, il convient de préciser que selon les statistiques de l'I.N.S.E.E., la population globale des mineurs de 13 à 18 ans a connu en France une progression de 10 % environ entre 1975 et 1993, passant de 4.180.700 à 4.580.900. Dans le même temps, leur représentation à l'intérieur de l'ensemble de la population française ne s'est que très faiblement accrue. Elle est passée de 7,93 % en 1975 à 7,96 % en 1993 alors qu'au cours de la période considérée, la part de mineurs dans la population délinquante est passée, elle, de 10,7 à 13,5 %.