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le 22 janvier 2002

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N° 3538

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 janvier 2002.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1) SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation du protocole relatif aux zones et à la vie sauvage spécialement protégées à la convention pour la protection et la mise en valeur du milieu marin de la région des Caraïbes (ensemble trois annexes),

PAR M. CHARLES EHRMANN,

Député

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros :

Sénat : 19, 161 et T.A. 108 (2000-2001)

Assemblée nationale : 3155

Traités et conventions

La Commission des affaires étrangères est composée de : M. François Loncle, président ; M. Gérard Charasse, M. Georges Hage, M. Jean-Bernard Raimond, vice-présidents ; M. Roland Blum, M. Pierre Brana, Mme Monique Collange, secrétaires ; Mme Michèle Alliot-Marie, Mme Nicole Ameline, M. René André, Mme Martine Aurillac, M. Édouard Balladur, M. Raymond Barre, M. Henri Bertholet, M. Jean-Louis Bianco, M. André Billardon, M. André Borel, M. Bernard Bosson, M. Philippe Briand, M. Bernard Brochand, M. Jean-Christophe Cambadélis, M. Hervé de Charette, M. Jean-Claude Decagny, M. Patrick Delnatte, M. Jean-Marie Demange, M. Xavier Deniau, M. Paul Dhaille, M. Jean-Paul Dupré, M. Charles Ehrmann, M. Jean-Michel Ferrand, M. Raymond Forni, M. Georges Frêche, M. Michel Fromet, M. Jean-Yves Gateaud, M. Jean Gaubert, M. Valéry Giscard d'Estaing, M. Jacques Godfrain, M. Pierre Goldberg, M. Michel Grégoire, M. François Guillaume, M. Jean-Jacques Guillet, M. Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, M. Didier Julia, M. Alain Juppé, M. Gilbert Le Bris, M. Jean-Claude Lefort, M. Guy Lengagne, M. Pierre Lequiller, M. Alain Le Vern, M. Bernard Madrelle, M. René Mangin, M. Jean-Paul Mariot, M. Gilbert Maurer, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, M. Étienne Pinte, M. Marc Reymann, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. François Rochebloine, M. Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, M. René Rouquet, M. Georges Sarre, M. Henri Sicre, M. Dominique Strauss-Kahn, Mme Christiane Taubira-Delannon, M. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, M. Joseph Tyrode, M. Michel Vauzelle.

SOMMAIRE

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INTRODUCTION 5

I - OBJECTIFS DU PROTOCOLE 7

A - OBJECTIFS ÉCOLOGIQUES 7

B - OBJECTIFS ÉCONOMIQUES 7

C - OBJECTIFS POLITIQUES ET SOCIAUX 8

II - PRINCIPES ET IMPLICATIONS 9

A - PRINCIPES ET DISPOSITIONS GÉNÉRALES 9

1) Champ d'application 9

2) Création de zones protégées 9

3) Protection de la biodiversité des espèces animales et végétales 10

B - IMPLICATIONS TECHNIQUES ET ORGANISATIONNELLES
DU PROTOCOLE SPAW
11

1) Le comité scientifique et technique 11

2) Le Centre des Activités Régionales Antilles Guyane (CARAG) 12

III - INTERÊT POUR LA FRANCE 13

A - BÉNÉFICES APPORTÉS PAR LE PROTOCOLE 13

B - LES DEUX NUANCES D'INTERPRÉTATION DE LA FRANCE 13

C - LA MISE EN PRATIQUE DU PROTOCOLE DANS LES TROIS
DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER
14

CONCLUSION 15

EXAMEN EN COMMISSION 17

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi soumis aujourd'hui à notre approbation vise à autoriser la ratification du protocole du 18 janvier 1990 relatif aux zones et à la vie sauvage spécialement protégées de la région des Caraïbes, signé à Kingston (Jamaïque), par la France et treize autres pays de la région des Caraïbes. A ce protocole ont été adjointes le 11 juin 1991 trois annexes énonçant la liste des espèces animales et végétales à protéger. Ce protocole fait suite à la convention pour la protection et le développement de l'environnement marin - convention dite de Carthagène - du 24 mars 1983, qui constituait jusqu'à présent le seul traité international à but environnemental liant les Etats de la région. L'article 10 de cette convention dispose en effet que les Parties doivent prendre toutes les mesures appropriées pour protéger et préserver les écosystèmes rares et fragiles et établir à cette fin des zones spécialement protégées.

La Convention de Carthagène s'inscrivait elle-même dans le cadre du Programme des Nations unies pour l'environnement qui a également entrepris des plans d'actions pour la préservation de l'environnement marin en Méditerranée (convention de Barcelone de 1976) et en Afrique orientale (convention de Nairobi de 1985).

Plus que la préservation de certaines espèces, le protocole vise à protéger des écosystèmes complets c'est-à-dire non seulement les espèces mais aussi leurs habitats, d'où la création de zones protégées. Il s'inscrit dans une perspective de développement durable renvoyant à une prise de conscience de l'épuisement des ressources naturelles et de l'urgente nécessité de poursuivre le développement économique tout en préservant l'équilibre naturel.

Nous présenterons d'abord les objectifs du protocole puis ses principales dispositions avant d'examiner au final l'intérêt pour la France de ratifier ce protocole.

I - LES OBJECTIFS DU PROTOCOLE

La démarche poursuivie dans les Caraïbes, comme dans le cadre des autres mers régionales, vise à permettre l'organisation d'échanges où les élus et les citoyens peuvent convenir, dans le cadre d'une coopération régionale, de mesures concertées pour mettre en valeur le littoral, assurer sa promotion et sa conservation dans la respect des équilibres naturels.

Même si les objectifs du protocole sont avant tout de nature écologique, cette démarche s'inscrit également dans une perspective de développement durable tout en cherchant à apporter un certain bien-être social à la population.

A - Objectifs écologiques

Les objectifs écologiques sont les plus importants. Par sa conception transversale, le protocole vise à améliorer la coordination des pays de la région des Caraïbes dans des domaines très variés, avec comme objectif commun de permettre une meilleure protection du littoral et des espèces animales et végétales. Ainsi, l'augmentation du nombre de zones protégées et leur meilleure gestion sont des objectifs concrets que le protocole se propose d'atteindre tout en assurant le développement de réserve de biosphère. En effet, si dans les îles des Caraïbes, environ 300 zones ont été crées, principalement depuis une vingtaine d'années, selon une étude du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), seul un tiers de ces zones sont convenablement gérées.

Le protocole vise aussi à venir en appui aux pays membres en leur fournissant des informations par l'intermédiaire de réseaux d'échanges mais aussi avec l'aide d'institutions qu'il créée comme le Comité scientifique et technique et le Centre des activités régionales Antilles Guyane (CARAG) qui apportent une dimension scientifique indispensable au débat et à la prise de décision.

B - Objectifs économiques

Mais la démarche du protocole s'inscrit également dans une perspective de développement durable, c'est-à-dire une prise de conscience de l'épuisement des ressources naturelles et de la nécessité de protéger et de préserver le patrimoine naturel dans le but d'aboutir à une exploitation des ressources en équilibre avec la nature. Cette démarche pousse à envisager une économie en harmonie avec le milieu écologique. Sous l'influence du protocole, les nouveaux projets industriels devraient être pensés différemment, en tenant compte de la variable écologique. En effet, il est prévu que chaque pays n'approuve un nouveau projet industriel que si l'étude d'impact sur l'environnement menée en amont ne révèle pas de conséquences négatives (article 13). De plus, les pays membres disposent d'un pouvoir réglementaire en ce qui concerne l'activité industrielle en zone protégée (article 6). Cette évolution devrait permettre une avancée dans la démarche de développement durable.

D'autre part, les efforts faits en matière de protection de l'environnement ont aussi pour objectif de favoriser l'économie en mettant en valeur le littoral. Les actions entreprises vont avoir des effets directs sur le tourisme, secteur économique non négligeable de la région des Caraïbes. La sauvegarde du capital naturel permettra de mettre en valeur les atouts touristiques et économiques ainsi conservés. On espère donc un impact positif sur l'emploi dans les secteurs liés au tourisme. Par ailleurs, de nouveaux postes pourront être crées pour la gestion des espaces protégés : ils concerneront des emplois de gestionnaires, de spécialistes scientifiques ou de gardes.

C - Objectifs politiques et sociaux

En matière politique, la création du Comité scientifique et technique va permettre d'offrir aux gouvernements, aux ONG et aux experts un lieu pour adopter des positions de consensus sur les questions de biodiversité dans la région. Les pays de la région étant extrêmement dépendants, le Comité pourrait ainsi apparaître comme un moyen de coordonner les décisions des différents gouvernements et pourrait aussi, à moyen terme, permettre une prise de décision commune en matière d'environnement.

En matière sociale, les efforts entrepris pour améliorer la protection du littoral de la région des Caraïbes ont également pour but d'une part d'embellir l'image de la région et d'autre part, d'augmenter le bien-être de la population locale. La création de zones protégées et la conservation d'écosystèmes complets sont susceptibles d'y contribuer.

II - PRINCIPES ET IMPLICATIONS

Le 18 janvier 1990, les Etats de la région des Caraïbes ont signé un protocole visant à protéger certaines espèces animales et végétales ainsi que certaines zones côtières et marines. En 1991, il a été complété par les annexes énumérant les espèces à protéger : une liste des espèces de flore (annexe 1) et de faune (annexe 2) dont l'exploitation est rigoureusement interdite. En annexe 3 figurent les espèces de flore et de faune dont l'exploitation est autorisée mais soumise à réglementation.

L'objectif des pays de la région des Caraïbes passe par l'adoption de mesures permettant la préservation de ces écosystèmes à savoir la protection des espèces mais aussi celle de leurs habitats.

A - Principes et dispositions générales

Le présent protocole cherche à protéger les zones d'habitation des espèces figurant sur la liste afin de mieux les préserver. Il insiste aussi sur l'étroite coordination dont doivent faire preuve les pays de la région des Caraïbes dans leur lutte pour la protection de l'environnement.

1) Champ d'application

Comme la convention de Carthagène, le protocole est applicable (article 1) au milieu marin de la zone Caraïbe au sud d'une limite constituée par la ligne des 30° de latitude nord dans un rayon de 200 milles marins à partir des côtes atlantiques des Etats parties à la convention. De plus, la zone géographique comprend également les eaux en deçà de la ligne de base à partir de laquelle est mesurée la largeur de la mer territoriale et qui s'étendent, dans le cas des cours d'eaux, jusqu'à la limite des eaux douces. Le protocole comprend également les zones terrestres associées, y compris les bassins versants, désignées par chacune des parties ayant la souveraineté et la juridiction sur ces zones.

En revanche, le protocole ne s'applique pas, de manière classique, aux navires de guerre ni aux navires appartenant à un Etat ou qui sont exploités à des fins non commerciales même s'ils doivent, s'ils le peuvent, tenter de se conformer au maximum au protocole.

2) Création de zones protégées

La création de zones protégées intervient avec l'objectif de « préserver les ressources naturelles et encourager une approche écologiquement saine et appropriée pour l'utilisation, la connaissance et la jouissance de ces zones » (article 4). Chaque partie peut créer selon ses besoins des sites en vue de préserver, de maintenir et de restaurer des types d'écosystèmes côtiers et marins représentatifs, de taille suffisante, pour assurer leur viabilité à long terme et maintenir leur diversité génétique et biologique. Le protocole vise également à protéger l'habitat associé nécessaire à la survie et à la restauration des espèces animales et végétales en danger, menacées ou vivant dans un milieu particulier et limité. De même, il sera possible de créer des zones là où la productivité des écosystèmes et des ressources naturelles, qui fournissent des avantages économiques et sociaux et dont dépend le bien-être de la population locale, sont prédominants. Enfin, le protocole précise que les zones présentant un intérêt biologique, écologique, éducatif, scientifique, historique, culturel, récréatif, archéologique, esthétique ou économique, y compris en particulier les zones dont les processus écologiques et biologiques sont indispensables au fonctionnement des écosystèmes de la région des Caraïbes.

On constate ainsi que le protocole dresse un éventail particulièrement large de possibilités de zones, envisageant toutes les caractéristiques qui pourraient contribuer au développement durable.

Les mesures de protection que peuvent prendre les parties varient selon les caractéristiques de la zone protégée. L'article 5 énumère les différentes mesures qui, selon le degré de protection et selon la nature de la zone, visent à réglementer ou à interdire par exemple le déversement de déchets ou de produits polluants dans les milieux marins, la navigation du passage des navires, la pêche, l'introduction d'espèces non indigènes, l'activité archéologique ou encore les activités touristiques...

Les zones protégées peuvent figurer sur une liste commune à toutes les Parties contractantes dans le but d'établir un réseau de zones protégées au sein d'un programme de coopération. (article 7)

D'autre part, la création de zones tampons faisant le lien entre zones protégées et zones non protégées est prévue (article 8) : les activités seront moins sévèrement limitées dans ces zones.

3) Protection de la biodiversité des espèces animales et végétales

Le protocole distingue deux types de mesures susceptibles d'être adoptées : les mesures nationales et les mesures concertées.

En ce qui concerne les mesures nationales, l'article 10 exprime l'engagement de chaque Etat à identifier les espèces animales et végétales menacées ou en voie d'extinction . Pour ces espèces, chaque partie s'engage à contrôler voire à interdire toute destruction ou capture. La faune devra être particulièrement protégée pendant les périodes biologiques critiques comme, par exemple, l'incubation ou la reproduction. D'autre part, la coopération et la coordination entre Etats membres mais aussi entre pays voisins non membres est recommandée en particulier pour la préservation des espèces migratrices dont l'habitat varie selon les saisons.

Pour les mesures concertées, les Etats membres s'engagent à prendre des mesures spécifiques en vue de protéger et préserver les espèces animales et végétales dont la liste établie en 1991 figure dans les annexes I, II et III. Ces annexes peuvent être modifiées, après avis du Comité scientifique et technique, si possible par consensus des pays membres, sinon par la majorité des trois quarts.

Les annexes I et II font figurer respectivement les espèces de faune et de flore pour lesquelles le plus haut degré de protection est requis : toute forme de destruction ou de perturbation de même que la possession et le commerce de ces espèces et de leurs semences ou produits sont interdits.

L'annexe III établit la liste des espèces animales et végétales dont l'exploitation est autorisée mais réglementée dans le but de maintenir les populations à un niveau optimal. La réglementation aura souvent pour objectif de déterminer les moyens sélectifs de capture comme, par exemple, la taille minimale de la capture pour les espèces animales.

Dans le cadre de la protection de la biodiversité, chaque pays s'engage également à tenir compte de l'impact des projets industriels sur les zones spéciales. Par ailleurs, certaines dérogations sont possibles pour les activités traditionnelles tant qu'elles ne compromettent pas le processus écologique mis en place dans les zones protégées (article 14).

B - Implications techniques et organisationnelles du protocole

L'impact de la technologie et de la recherche scientifique n'est pas négligé dans la lutte pour la protection de l'environnement ; ainsi les Parties s'engagent à intensifier leurs recherches, à coopérer et à s'entraider pour le choix des zones protégées afin de progresser le plus vite possible.

1) Le comité scientifique et technique

L'article 20 prévoit la création d'un Comité scientifique et technique dont la fonction est consultative. Il peut émettre des avis en matière scientifique et technique. Il est composé d'experts scientifiques nommés par chaque pays membre. Il se concentre spécialement sur les listes de zones et d'espèces protégées mais aussi sur les études d'impact sur l'environnement, la formation, la gestion, l'élaboration de critères communs de gestion des zones protégées. Le comité s'est déjà réuni plusieurs fois depuis l'adoption du protocole.

2) Le Centre des Activités Régionales Antilles Guyane (CARAG)

Le CARAG est un centre relatif à la biodiversité et aux aires protégées qui a pour objet de venir en appui à l'unité de coordination régionale du PNUE de Kingston dans la mise en _uvre du protocole. L'organisme, dont le fonctionnement a été confié à la France et qui est établi depuis le 1er janvier 2000 dans le parc national de la Guadeloupe, est doté d'un statut d'association selon la loi de 1901 lui conférant une autonomie administrative et financière, la gestion courante étant confiée à un directeur. Il travaille en coopération avec l'université Antilles-Guyane qui, disposant d'un pôle biologie marine, sera prestataire de certains programmes.

Outre la protection de l'environnement dans la zone Caraïbes, le rôle du CARAG est de coordonner les efforts des pays membres en valorisant les expériences et les réseaux mais aussi de mettre à disposition des pays membres l'expérience française en matière d'environnement. Ses principales actions concernent notamment la définition de critères pour la sélection des espaces marins et côtiers et la rédaction de bulletins d'information sur les thèmes et événements importants dans la région.

Enfin, les fonctions de secrétariat du protocole sont confiées au secrétariat de la convention de Carthagène. Ce secrétariat a pour tâche de suivre l'ensemble des objectifs du Protocole.

III - INTERÊT POUR LA FRANCE

Il est légitime de se demander dans quelle mesure la ratification du protocole présente un intérêt pour la France, ce qu'elle peut apporter aux trois départements français d'outre-mer concernés (Martinique, Guyane, Guadeloupe), et sur les difficultés de mise en _uvre.

A - Bénéfices apportés par le protocole

En premier lieu, le protocole tient compte de la situation des pays membres et de leur extrême dépendance du fait du cadre insulaire fragmenté de la région. Cette dépendance peut nuire à un pays comme la France car tout ce qu'elle entreprend peut être ruiné par une action contraire d'un pays voisin et ce à quelque niveau que ce soit. C'est le cas en matière de protection de l'environnement. La France a tout intérêt à se coordonner avec ses voisins pour l'efficacité de sa politique environnementale sans quoi ses efforts seraient vains. La préservation ne peut être menée que de concert étant donné l'interdépendance des activités humaines et de leurs impacts ; le protocole en fournit un bon moyen.

D'autre part, le protocole va permettre l'organisation d'échanges d'information, et la création de réseaux dont la France pourra bénéficier en qualité de Partie. Les avis du Comité scientifique et technique et du CARAG pourront aussi aider le gouvernement français à la prise de décision en matière de protection de l'environnement.

Par ailleurs, le protocole peut permettre à la France d'insérer davantage sa politique nationale dans une politique régionale, ce qui peut avoir pour effet d'améliorer les conditions de la prise de décision. La France, dont l'action en matière d'environnement est déjà très bien perçue dans la région, s'est portée volontaire pour la gestion du CARAG. Ceci aura pour effet de renforcer son rôle dans la politique environnementale régionale.

B - Les deux nuances d'interprétation de la France

La France a toutefois jugé utile de formuler deux réserves d'interprétation : l'une concerne la réglementation de la navigation et l'autre les fouilles archéologiques.

La première vise à éviter que les Parties au Protocole instituent des interdictions de passage ou des procédures de notification préalable qui seraient contestées par la France et vis-à-vis desquelles l'Organisation maritime internationale serait mise devant le fait accompli. Selon cette réserve, « la France considère que les mesures prises par les Parties contractantes en matière de navigation maritime en application de l'article5-2-c du protocole doivent être conformes aux règles et aux normes applicables établies par l'organisation internationale compétente visée à l'article 5 de la convention sur la protection et la mise en valeur du milieu marin des Caraïbes ».

La seconde réserve vise à éviter une extension de juridiction non reconnue par le droit de la mer en matière de fouille archéologique. L'article 303 de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer ne donne compétence à l'Etat côtier en matière de réglementation sur les objets archéologiques que dans les espaces maritimes correspondant à la mer territoriale et à la zone contiguë (24 milles à partir des lignes de base). Le texte du protocole prévoit une extension de juridiction puisqu'il reconnaît aux parties un pouvoir réglementaire dans ce que l'on appelle la zone économique exclusive, plus large. La France a précisé qu'elle considérait que « l'article 5-2-i comme une application de l'article 303 de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et en particulier que les mesures éventuellement décidées par les Parties contractantes n'auront aucune conséquence sur la propriété des objets archéologiques ».

C - La mise en pratique du protocole dans les trois départements d'outre-mer

Les départements français d'outre-mer concernés par le protocole sont déjà très avancés en ce qui concerne la protection de l'environnement. La mise en pratique du protocole ne devrait donc poser aucune difficulté et ne devrait avoir que peu d'impact sur les activités de pêche. Les seules espèces exploitées et concernées par les annexes du Protocole sont le lambi et la langouste des Caraïbes, qui apparaissent dans l'annexe III. Mais cela ne devrait pas avoir d'impact important étant donné que la pêche des deux espèces fait déjà l'objet d'une réglementation dans les trois départements.

Une nuance peut toutefois être apportée à ce jugement. Certains craignent que la multiplication des zones protégées dans les zones territoriales n'aient des répercussions dommageables sur la pérennité de l'activité de pêche en Martinique et en Guadeloupe, dont la flotte est constituée de petites unités fortement dépendantes du maintien d'une activité dans la bande côtière. Une réflexion doit donc être menée dans ce domaine.

CONCLUSION

Le présent protocole est déjà entré en vigueur puisque les neuf premières ratifications exigées à cet effet ont été atteintes le 18 juin 2000.

La dépendance des Etats de la région des Caraïbes en matière écologique et la nécessité de s'orienter vers une nouvelle forme de développement soulignent tout l'intérêt pour la France de sa ratification. La protection de l'environnement constitue par ailleurs un facteur clé de développement des départements d'outre-mer. La France s'est ainsi déjà beaucoup impliquée dans la politique environnementale régionale et son action va encore s'intensifier avec son rôle au sein du CARAG. La ratification du protocole apparaît donc comme une étape importante dans la politique de protection de l'environnement engagée dans la région des Caraïbes.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 16 janvier 2002.

Après l'exposé du Rapporteur, M. Pierre Brana a déploré que douze années se soient écoulées entre la signature et la ratification de ce protocole.

M. Charles Ehrmann a déclaré partager ce sentiment et noté que ce délai contrastait avec la rapidité dont le Ministère des Affaires étrangères sait parfois faire preuve pour d'autres conventions.

Le Président François Loncle a estimé qu'il fallait faire la part de la pression des événements internationaux et se garder de comparaisons aventureuses. Il a précisé qu'un poste d'ambassadeur pour la coopération dans les Caraïbes venait d'être créé et qu'il avait été confié à M. Alain Briottet.

Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission a adopté le projet de loi (no 3155).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte du protocole figure en annexe au projet de loi (n° 3155).

3538 - Rapport de M. Charles Ehrmann : protocole relatif à la protection et la mise en valeur du milieu marin dans les Caraïbles -adopté Sénat- (commission des affaires étrangères)


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