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mis en distribution
le 26 mars 2001

N° 2940

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 21 mars 2001.

PROJET DE LOI

relatif à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport et aux enquêtes techniques après événement de mer, accident
ou incident de transport terrestre,

(Renvoyé à la commission de la production et des échanges, à défaut de constitution
d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

PRÉSENTÉ

AU NOM DE M. LIONEL JOSPIN,
Premier ministre,

PAR M. JEAN-CLAUDE GAYSSOT,
ministre de l'équipement, des transports et du logement.

Transports.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La sécurité d'une infrastructure ou d'un système de transport est le résultat combiné de sa conception et de son exploitation, cette dernière étant comprise au sens large allant de la façon dont cette infrastructure ou ce système est utilisé jusqu'à sa maintenance, en passant par l'importance et l'organisation des moyens de secours permanents ou susceptibles d'être mobilisés en cas d'accident.
Sa définition et son évaluation imposent donc une approche systémique nécessitant elle-même que soient connues, grâce à l'analyse de l'accidentologie ainsi que des circonstances et des causes des accidents ou incidents significatifs survenus, les corrélations existant entre les différents facteurs à prendre en compte.
Le présent projet de loi a ainsi pour objet, d'une part, de définir un corps de règles permettant de vérifier, aux étapes clés de la vie des ouvrages ou systèmes de transport terrestre présentant des risques particuliers, que l'ensemble des dispositions envisagées aboutit à un niveau de sécurité acceptable et, d'autre part, de renforcer les moyens dont dispose l'autorité administrative pour analyser de manière détaillée et aussi rapide que possible les causes des accidents de transport terrestre ou événements de mer afin d'éviter leur reproduction. En effet, même s'ils sont d'une occurrence très faible, les accidents susceptibles de se produire dans ce type d'infrastructure peuvent prendre une telle ampleur et entraîner de telles conséquences que la mise en place d'une politique volontariste en termes de prévention s'avère indispensable.
Le présent projet de loi a également pour but de soumettre aux mêmes règles les infrastructures ou systèmes de transport publics appartenant à une même catégorie, quel que soit leur maître d'ouvrage. Rien ne justifie, en effet, que de tels équipements, lorsqu'ils sont semblables, offrent à leurs utilisateurs des niveaux de sécurité différents.
Le titre Ier concerne la sécurité des infrastructures et systèmes de transport. Le titre II est relatif à l'organisation des enquêtes techniques après accident de transport terrestre ou événement de mer.

Titre Ier - Sécurité des infrastructures et systèmes de transport.
La sécurité des infrastructures et systèmes de transport ne repose pas uniquement sur le respect de normes techniques, au demeurant très différentes selon les modes de transport voire à l'intérieur d'un même mode, mais sur la prise en compte d'un ensemble de facteurs souvent interdépendants.
C'est ainsi, par exemple, qu'au sein du mode routier, et l'accident survenu dans le tunnel sous le Mont Blanc l'a rappelé, certains ouvrages présentent des risques particuliers du fait principalement de leur nature, de leur configuration et des difficultés d'intervention des services de secours ou d'évacuation des personnes en cas d'accident.
De la même façon, pour ce qui concerne le mode ferroviaire, les mesures à prendre en matière de sécurité ne sont pas les mêmes selon qu'il s'agit par exemple d'un train à grande vitesse circulant sur une voie spécialisée ou d'un tramway mêlé à la circulation urbaine.
L'approche retenue ne consiste donc pas à prescrire au moyen de la loi l'ensemble des dispositions techniques à respecter, lesquelles doivent rester du domaine du règlement ou de la norme, mais à fixer les règles générales, essentiellement de procédure, permettant de s'assurer que la sécurité des ouvrages ou systèmes de transport présentant des risques particuliers fait l'objet de toutes les diligences nécessaires aux trois étapes clés que sont la conception, la mise en service et l'exploitation de ces ouvrages ou systèmes.
Le présent titre Ier en pose les principes. Il renvoie à des décrets d'application différents suivant la nature des ouvrages et les modes de transport concernés. Cette réglementation s'inscrit, le cas échéant, dans les codes existants.
L'article 1er concerne tous les modes de transport. Il a pour objet de compléter le premier alinéa de l'article 9 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (LOTI) afin de préciser que l'organisation des secours, au même titre que la réglementation sociale, et la définition des règles de sécurité et de contrôles techniques applicables aux transports, est une compétence de l'Etat.
L'article 2 concerne la voirie routière, quel qu'en soit le maître d'ouvrage.
Il crée un chapitre spécifique nouveau dans le code de la voirie routière concernant la sécurité des ouvrages du réseau routier dont l'exploitation présente des risques particuliers, comprenant quatre articles L. 118-1, L. 118-2, L. 118-3 et L. 118-4 .
Les nouvelles dispositions du code de la voirie routière renvoient à un décret la définition des catégories d'ouvrage dont l'exploitation présente des risques particuliers pour la sécurité des personnes.
La procédure envisagée s'articule en deux temps.
Dans un premier temps, le maître de l'ouvrage adresse au préfet un dossier descriptif du projet complété par l'avis d'un tiers expert afin que celui-ci fournisse un avis dont la notification conditionne le début des travaux.
A la réception de ce dossier, l'Etat doit donner un avis avant le début des travaux.
Le maître de l'ouvrage peut commencer les travaux dès réception de l'avis de l'Etat ou, à défaut, à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la réception du dossier.
Cette première phase de la procédure, à l'amont des études de détail, est destinée à vérifier que les caractéristiques techniques et les mesures d'exploitation envisagées permettront d'obtenir un niveau de sécurité satisfaisant.
Il ne s'agit à ce stade, ni de délivrer une autorisation, ni de connaître les caractéristiques techniques précises, mais de s'assurer que, dès le début des études, le maître de l'ouvrage a bénéficié d'une vision globale des problèmes de sécurité pour, d'une part, limiter les risques d'accidents et, d'autre part, faciliter les secours.
L'innovation principale est apportée par le nouvel article L. 118-2 du code de la voirie routière qui institue le second temps de la procédure.
Cet article prévoit en effet que la mise en service de l'ouvrage est subordonnée à une autorisation délivrée par l'Etat après avis d'une commission administrative instituée par décret. La loi prescrit que cette commission assure, notamment, la représentation des collectivités territoriales. Il s'agit là d'une garantie importante de transparence de la prise de décision, apportée aux collectivités locales.
Les prescriptions d'exploitation définies par le maître d'ouvrage sont, dans ce cadre, approuvées par l'Etat. Elles comprennent au moins l'obligation d'effectuer un examen périodique par un expert ou un organisme qualifié agréé en matière de sécurité.
Il s'agit d'harmoniser et d'inscrire dans la durée des pratiques administratives qui existaient pour les ouvrages de l'Etat et, dans une moindre mesure, pour les ouvrages des collectivités territoriales, notamment dans le cadre de la procédure d'instruction mixte.
En outre, le texte donne à l'Etat, pour les ouvrages en service, la possibilité de prescrire des mesures restrictives d'exploitation ou la fermeture de l'ouvrage, en cas de danger immédiat.
Les tunnels importants seront concernés par ces dispositions après l'entrée en vigueur de la loi, dans les conditions prévues à l'article 19. Il est envisagé d'y soumettre ultérieurement certains ouvrages exposés à des risques d'origine naturelle ou technologique, ou pour lesquels l'intervention des secours risquerait d'être gênée par des problèmes spécifiques.
L'article L. 118-3 complète le dispositif ; il habilite le Gouvernement à fixer par décret des règles applicables aux ouvrages du réseau routier présentant un risque particulier pour la sécurité des personnes. Il ne fait pas double emploi avec les dispositions existantes des articles L. 131-2 et L. 141-7 du code de la voirie routière, ces dernières permettant simplement d'imposer des caractéristiques techniques.
La rédaction du décret devra tenir compte des contraintes des différents maîtres d'ouvrages. C'est pourquoi, les règles applicables dans l'immédiat au réseau routier national ne seront pas nécessairement transposées à l'ensemble des ouvrages des collectivités locales.
Enfin, l'article L. 118-4 du code de la voirie routière traite des ouvrages dont les conditions de construction et d'exploitation sont déterminés par des conventions internationales. En l'absence de convention internationale les règles de droit commun prévalent.
Il faut noter que la rédaction de l'article 2 de la loi garantit que les prescriptions nouvelles ne concernent pas le réseau routier dans son ensemble mais uniquement les types spécifiques d'ouvrages définis à l'article L. 118-1.
L'article 3 concerne les systèmes de transports ferroviaires ou d'un autre type de transport guidé.
Il prévoit des prescriptions équivalentes qui s'inscrivent dans les dispositions existantes. En effet, les dispositions de l'article 9 de la loi du 30 décembre 1982 précitée et celles de l'article 50 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne soumettent les systèmes de transport public guidé au contrôle technique et de sécurité de l'Etat. Toutefois, à l'exception des remontées mécaniques à vocation touristique ou sportive, ces textes n'instituent pas de procédures spécifiques d'autorisation formalisant le contrôle technique et de sécurité de l'Etat.
Une telle procédure unique prenant en compte la sécurité dans son ensemble a été instituée récemment pour le réseau ferré national par le décret n° 2000-286 du 30 mars 2000 applicable au Réseau ferré de France et à la Société nationale des chemins de fer français (SNCF).
Le présent article 3 institue une procédure analogue pour les autres systèmes de transport guidé dont l'organisation relève des collectivités territoriales et de leurs groupements. La réalisation de tout nouveau système, ou la modification substantielle d'un système existant, est désormais soumise à l'approbation par l'Etat d'un dossier préliminaire de sécurité avant tout début de réalisation d'une part, et à une autorisation de l'Etat au vu d'un dossier de sécurité avant la mise en service d'autre part. A la différence des dispositions de l'article 2, les dispositions de l'article 3 ne concernent pas uniquement les « ouvrages », mais l'ensemble d'un système de transport, c'est-à-dire l'infrastructure, le matériel roulant, les équipements d'exploitation et les règles d'exploitation.
Un décret en Conseil d'Etat précise les systèmes dont l'autorisation de réalisation, de modification substantielle ou de mise en exploitation commerciale est délivrée après avis d'une commission administrative. La loi pose également le principe d'une représentation des collectivités territoriales au sein de cette commission. Seuls les systèmes présentant des risques significatifs seront donc concernés.
L'article 4 vise à supprimer une incohérence du texte de la loi du 3 janvier 1985 précitée.
Les articles 44 et 45 de la loi « montagne » opèrent en effet une distinction entre, d'une part, les remontées mécaniques « situées dans un périmètre de transports urbains et assurant un transport régulier de transport qui ne soit pas uniquement touristique ou sportif », d'autre part, les autres remontées mécaniques. L'objet de cette distinction est de permettre que les mécanismes d'autorisation applicables à la première catégorie soient les mêmes que dans le cas des autres transports guidés urbains de personnes : l'article 44 précise donc que les remontées mécaniques « situées dans un périmètre de transports urbains et assurant un transport régulier de transport qui ne soit pas uniquement touristique ou sportif » relèvent des dispositions de la loi d'orientation des transports intérieurs.
Cependant la rédaction de l'article 44 précité conduit à des incohérences en Ile-de-France, où n'existe pas de périmètre de transports urbains au sens de la loi d'orientation des transports intérieurs.
La nouvelle rédaction introduite par l'article 4 du présent projet de loi vise donc à faire disparaître cette incohérence, en rendant l'article 44 de la loi « montagne » conforme à la volonté du législateur, lequel n'a jamais entendu soumettre les appareils à câble implantés en Ile-de-France aux dispositions applicables aux remontées mécaniques des stations de sport d'hiver.
L'article 5 concerne les remontées mécaniques. Ces dernières sont régies par le chapitre V du code de l'urbanisme. L'article L. 445-1, dans sa rédaction actuelle, soumet à autorisation préalable la construction puis la mise en exploitation des remontées mécaniques. Le projet de loi y soumet également les modifications substantielles, par analogie avec ce qui est prévu pour les autres modes de transport. Il précise que, lorsque les travaux portent sur une remontée mécanique empruntant un tunnel, posant donc des problèmes particuliers de sécurité, il est joint à la demande d'autorisation un dossier descriptif accompagné d'un rapport sur la sécurité émis par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
L'article L. 445-4 du code de l'urbanisme est complété par une disposition prévoyant qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les remontées mécaniques pour lesquelles l'avis conforme du représentant de l'Etat dans le département, préalable à ces autorisations ne peuvent être délivrées qu'après un avis d'une commission administrative assurant notamment la représentation des collectivités territoriales. Ces dispositions permettront de soumettre la construction ou l'exploitation des remontées mécaniques, soumises à d'autres dangers spécifiques, à un examen par un organisme spécialement compétent.
Les articles 6 et 7, dans le même esprit que les articles 2 et 3, organisent les procédures en matière de sécurité respectivement pour les ouvrages maritimes portuaires et pour les ouvrages de navigation intérieure.
S'agissant de ports maritimes, les modalités de contrôle de l'Etat en matière de sécurité sont prévues, dans le code des ports maritimes, lors de la prise en considération des avant-projets des travaux de construction par les articles R* 115-4 pour les ports autonomes, R* 122-4 pour les ports d'intérêt national et R* 611-2 pour les ports décentralisés. Ce dispositif sera complété par une autorisation de l'Etat, préalable à la mise en service de l'ouvrage, après avis d'une commission administrative assurant notamment la représentation des collectivités territoriales, et en fonction des garanties de sécurité offertes par les caractéristiques et les modalités d'exploitation de l'ouvrage. A l'instar des autres infrastructures, un régime d'exploitation pour ces ouvrages sera ainsi approuvé par le préfet. Tel est l'objet de l'article 6 de la loi qui ajoute un nouvel article L. 155-1 au code des ports maritimes.
S'agissant des ouvrages de navigation intérieure présentant des risques spécifiques, le projet de loi reprend, dans le même esprit et en leur apportant les adaptations nécessaires, les dispositions retenues pour les ports maritimes. Est en particulier exigé un examen périodique par un expert ou par un organisme qualifié en matière de sécurité. Tel est l'objet de l'article 7 de la loi qui ajoute un article 30 au code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure.
L'article 8, en complétant la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 relative à l'organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l'incendie et à la prévention des risques majeurs, ouvre la possibilité de soumettre, en cas de nécessité, les systèmes de transport qui ne sont pas concernés par les articles précédents, à des dispositions du même type. Il s'agit notamment de systèmes qui ne font pas l'objet de réglementation spécifique, soit parce qu'ils font appel à des technologies nouvelles soit parce qu'ils comportent des installations multimodales mêlant étroitement voies ferrées, voiries routières, plates-formes aériennes ou maritimes etc.
L'article 9 prévoit que les conditions d'application des procédures nouvellement instituées aux ouvrages ou systèmes en projet ou en cours de réalisation à la date d'entrée en vigueur de la présente loi seront précisées par décret en Conseil d'Etat.

Titre II - Enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident de transport terrestre.
La présente loi a également pour objet de faciliter l'analyse détaillée des causes des incidents et accidents de transport terrestre ou événements de mer dans l'unique but d'en tirer rapidement les enseignements et ainsi éviter leur reproduction.
L'étude des incidents et accidents pour en tirer des enseignements utiles à la prévention est une pratique classique dans bien des domaines connue sous le nom de «  retour d'expérience ». C'est en effet par l'analyse détaillée des causes des incidents ou accidents que des enquêteurs indépendants des constructeurs d'engins de transports, de leurs exploitants et des administrations chargées de la définition et du contrôle des normes de sécurité, peuvent, de manière crédible préconiser les mesures destinées à éviter la reproduction des événements étudiés.
Cette démarche est très développée dans le domaine de l'aviation civile. Ainsi, en France une loi a été adoptée pour créer le bureau enquête accident et organiser les relations entre l'enquête technique et les éventuelles enquêtes judiciaires.
Dans les autres secteurs, des enquêtes sont régulièrement diligentées, dans le domaine maritime par le bureau enquête accident en mer créé par arrêté du ministre des transports, pour les transports terrestres par une commission créée pour chaque événement. Par ailleurs, les exploitants de transports guidés, tels la SNCF, ont naturellement organisé un système interne d'audit.
En matière maritime, ce besoin répond d'ailleurs aux prescriptions de la résolution A 849/20 du 27 novembre 1997 de l'Organisation maritime internationale, ainsi que de la directive européenne 1999/35 qui s'y réfère explicitement.
La prise en compte des prescriptions de la résolution du 27 novembre 1997 conduit aussi, d'une part à attribuer aux enquêteurs des compétences ratione materiae et ratione loci larges puisqu'elles englobent les risques d'atteinte à l'environnement et, en matière maritime, dépassent les frontières.
C'est pourquoi, à l'instar de ce qui a été fait dans le domaine aérien, la présente loi se propose de consolider le cadre juridique dans lequel s'organisent ces enquêtes.
Dans leurs formes comme dans leurs fins, les enquêtes techniques n'ont pas pour objet de concurrencer ou de se substituer aux procédures judiciaires. Ces dernières ont pour vocation de rechercher et sanctionner les responsabilités pénales des individus ; elles sont par nature lentes et soumises à des procédures strictes.
Les premières visent à analyser les circonstances et à préconiser les mesures destinées à ce que des accidents analogues ne se reproduisent pas ; elles ont pour but d'enrichir les connaissances qui permettent de perfectionner les mesures de prévention propres à réduire les risques ; leurs conclusions doivent être connues rapidement.
Les nécessités découlant du caractère inquisitoire et de l'indépendance absolue des procédures pénales par lesquelles sont recherchées et sanctionnées les responsabilités individuelles doivent pouvoir être conciliées avec la conduite parallèle d'enquêtes techniques, dont les conclusions et préconisations peuvent présenter un intérêt collectif également majeur. Le présent projet de loi confère un statut aux enquêtes techniques en donnant une base légale aux pouvoirs d'investigation auprès des tiers extérieurs à l'administration et en aménageant les rapports entre les enquêtes techniques, d'une part, et les procédures judiciaires, d'autre part. Lorsque ces dernières ne sont pas entreprises il est cependant prévu que les autorités judiciaires sont tenues informées de l'ouverture et des conclusions des enquêtes techniques.
La procédure est décrite dans les articles 10 à 19 du projet de loi.
Ce dernier article précise les conditions dans lesquelles peuvent être préconisées des recommandations de sécurité en s'appuyant sur les premiers éléments du rapport technique. Cette possibilité est assortie de celle de publier des informations découlant de l'enquête technique, dès lors qu'aucun nom de personne n'est divulgué et que le rapport ne prend pas position sur la responsabilité mais vise à faciliter ou à justifier la mise en _uvre rapide des recommandations de sécurité.
L'article 19 punit d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende le fait d'entraver l'action des enquêteurs techniques.
L'article 20 rend applicables les dispositions du titre II dans les territoires d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie et à Mayotte, en ce qui concerne les enquêtes techniques relatives aux événements de mer, sous réserve, bien entendu, des compétences propres détenues le cas échéant par ces collectivités et territoires.

PROJET DE LOI

Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de l'équipement, des transports et du logement,

Vu l'article 39 de la Constitution,

Décrète :

Le présent projet de loi relatif à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport et aux enquêtes techniques après événement de mer, accident ou incident de transport terrestre, délibéré en Conseil des ministres après avis du Conseil d'Etat sera présenté à l'Assemblée nationale par le ministre de l'équipement, des transports et du logement qui est chargé d'en exposer les motifs et d'en soutenir la discussion.

TITRE Ier
SÉCURITÉ DES INFRASTRUCTURES ET DES SYSTÈMES DE TRANSPORT

Article 1er

Le premier alinéa de l'article 9 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs est remplacé par les deux alinéas suivants :
« L'Etat définit la réglementation sociale et veille à l'harmonisation des conditions de travail et d'emploi, ainsi qu'à la mise en _uvre de la réglementation correspondante. Il en contrôle l'application. »
« L'Etat définit les règles de sécurité, d'organisation des secours et de contrôle technique applicables aux transports. Il veille à leur mise en _uvre et en contrôle l'application. »

Article 2

Il est ajouté, au titre Ier du code de la voirie routière, un chapitre VIII ainsi rédigé :

« CHAPITRE VIII
« Sécurité des ouvrages du réseau routier dont l'exploitation
présente des risques particuliers pour la sécurité des personnes

« Art. L. 118-1.- Les travaux de construction ou de modification substantielle des ouvrages du réseau routier dont l'exploitation présente des risques particuliers pour la sécurité des personnes font l'objet, avant tout commencement, d'un dossier descriptif, accompagné d'un rapport sur la sécurité établi par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
« Les travaux ne peuvent être entrepris qu'à la réception de l'avis du représentant de l'Etat sur ce dossier ou, à défaut, à l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de son dépôt.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article et, notamment, les catégories d'ouvrages auxquelles s'appliquent ses dispositions.
« Art. L. 118-2.- La mise en service des ouvrages du réseau routier mentionnés au deuxième alinéa de l'article L.118-1 et appartenant aux catégories fixées par le décret prévu au dernier alinéa de ce même article est subordonnée à une autorisation. Celle-ci est délivrée par l'Etat, en fonction des garanties de sécurité offertes par les caractéristiques et les modalités d'exploitation de l'ouvrage, après avis d'une commission administrative assurant notamment la représentation des collectivités territoriales. Elle peut être assortie de conditions restrictives d'utilisation.
« Cette autorisation vaut approbation des prescriptions d'exploitation établies par le maître d'ouvrage et applicables à chaque ouvrage, lesquelles comportent au moins un examen périodique de sécurité par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
« Pour les ouvrages en service, dont l'exploitation présente des risques particuliers pour la sécurité des personnes, le représentant de l'Etat peut prescrire l'établissement d'un diagnostic, des mesures restrictives d'exploitation ou, en cas de danger immédiat, ordonner la fermeture de l'ouvrage au public.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat.
« Art. L. 118-3.- Des décrets peuvent fixer des caractéristiques techniques de sécurité en matière de conception ou d'exploitation, applicables à des ouvrages du réseau routier mentionnés à l'article L. 118-1.
« Art. L. 118-4.- Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables aux ouvrages dont les conditions de construction et d'exploitation sont déterminées par des conventions internationales. »

Article 3

Après l'article 15 de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, il est ajouté un article 15-1 ainsi rédigé :
« Art. 15-1.- La réalisation d'un nouveau système de transport public guidé ou ferroviaire ou la modification substantielle d'un système existant, ne peuvent être engagées avant que l'Etat ait approuvé un dossier préliminaire de sécurité.
« Leur mise en exploitation commerciale est subordonnée à une autorisation. Celle-ci est délivrée par l'Etat, au vu d'un dossier de sécurité, en fonction des garanties de sécurité offertes par les caractéristiques et les modalités d'exploitation de l'ouvrage. Elle peut être assortie de conditions restrictives d'utilisation. Elle vaut approbation du règlement de sécurité de l'exploitation ou sa modification.
« Pour ces systèmes déjà en service, l'autorité de l'Etat compétente peut prescrire l'établissement d'un diagnostic, des mesures restrictives d'exploitation ou, en cas de danger immédiat, ordonner son interruption.
« Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat. Celui-ci précise notamment les systèmes dont l'autorisation de réalisation, de modification substantielle ou de mise en exploitation commerciale est délivrée après avis d'une commission administrative assurant notamment la représentation des collectivités territoriales. »

Article 4

La loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne est modifiée comme suit :
A l'article 44, les mots : « situées dans un périmètre de transports urbains et » sont supprimés.

Article 5

I.- L'article L. 445-1 du code de l'urbanisme est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est remplacé par les dispositions suivantes :
« Les travaux de construction ou de modification substantielle des remontées mécaniques visées à l'article 43 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 sont soumis à autorisation, d'une part, avant l'exécution des travaux et, d'autre part, avant la mise en exploitation. » ;
2° Il est inséré, après le quatrième alinéa, un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les travaux portent sur une remontée mécanique empruntant un tunnel, il doit être joint à la demande d'autorisation un dossier descriptif accompagné de l'avis sur la sécurité émis par un expert ou un organisme qualifié, agréé. »
II.- L'article L. 445-4 du code de l'urbanisme est complété par la phrase suivante : « Ce décret précise en outre les remontées mécaniques pour lesquelles l'avis conforme du représentant de l'Etat dans le département, préalable à ces autorisations, ne peut être délivré qu'après consultation d'une commission administrative, assurant notamment la représentation des collectivités territoriales. »

Article 6

Au titre V du livre Ier du code des ports maritimes, il est ajouté un chapitre V ainsi rédigé :

« CHAPITRE V
« Sécurité des ouvrages maritimes portuaires

« Art. L. 155-1.- Les travaux de réalisation ou de modification substantielle des ouvrages d'infrastructure portuaire dont l'exploitation présente des risques particuliers pour la sécurité des personnes font l'objet, avant tout commencement, d'un dossier descriptif adressé au représentant de l'Etat, accompagné d'un rapport sur la sécurité établi par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
« Le commencement des travaux est subordonné à la notification de l'avis du représentant de l'Etat sur ce dossier ou l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de son dépôt.
« La mise en service de ces ouvrages portuaires est subordonnée à une autorisation. Celle-ci est délivrée par l'Etat, en fonction des garanties de sécurité offertes par les caractéristiques et les modalités d'exploitation de l'ouvrage, après avis d'une commission administrative assurant notamment la représentation des collectivités territoriales. Elle peut être assortie de conditions restrictives d'utilisation. Cette autorisation vaut approbation des prescriptions d'exploitation, établies par le maître d'ouvrage et applicables à chaque ouvrage, lesquelles comportent au moins un examen périodique par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
« Pour les ouvrages en service dont l'exploitation présente des risques particuliers pour la sécurité des personnes, l'autorité compétente peut prescrire l'établissement d'un diagnostic, des mesures restrictives d'exploitation ou, en cas de danger immédiat, ordonner la fermeture de l'ouvrage au public.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article et, notamment, les catégories d'ouvrages auxquelles s'appliquent ses dispositions. »

Article 7

Il est créé, dans la section 1 du chapitre II du titre III du livre Ier du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure, un article 30 ainsi rédigé :
« Art. 30.- Les travaux de réalisation ou de modification substantielle des ouvrages d'infrastructure de navigation intérieure dont l'exploitation présente des risques particuliers pour la sécurité des personnes font l'objet, avant tout commencement, d'un dossier descriptif adressé au représentant de l'Etat, accompagné d'un rapport sur la sécurité établi par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
« Le commencement des travaux est subordonné à la notification de l'avis du représentant de l'Etat sur ce dossier ou l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de la date de son dépôt.
« La mise en service de ces ouvrages de navigation intérieure est subordonnée à une autorisation. Celle-ci est délivrée par l'Etat, en fonction des garanties de sécurité offertes par les caractéristiques et les modalités d'exploitation de l'ouvrage, après avis d'une commission administrative assurant notamment la représentation des collectivités territoriales. Elle peut être assortie de conditions restrictives d'utilisation.
« Cette autorisation vaut approbation des prescriptions d'exploitation, établies par le maître d'ouvrages et applicables à chaque ouvrage, lesquelles comportent au moins un examen périodique par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
« Pour les ouvrages en service dont l'exploitation présente des risques particuliers pour la sécurité des personnes, l'autorité compétente peut prescrire l'établissement d'un diagnostic, des mesures restrictives d'exploitation ou, en cas de danger immédiat, ordonner la fermeture au public de l'ouvrage.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article, et, notamment, les catégories d'ouvrages auxquelles s'appliquent ses dispositions. »

Article 8

Il est inséré, dans la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 relative à l'organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l'incendie et à la prévention des risques majeurs, un article 46-1 ainsi rédigé :
« Art. 46-1.- Les systèmes de transport faisant appel à des technologies nouvelles ou comportant des installations multimodales et qui présentent des risques particuliers pour la sécurité des personnes font l'objet, avant tout commencement de réalisation, d'un dossier descriptif adressé au représentant de l'Etat, accompagné d'un rapport sur la sécurité établi par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
« Le commencement des travaux est subordonné à la notification de l'avis du représentant de l'Etat sur ce dossier ou l'expiration d'un délai de quatre mois à compter de son dépôt.
« La mise en service de ces systèmes est subordonnée à une autorisation. Celle-ci est délivrée par l'Etat, en fonction des garanties de sécurité offertes par les caractéristiques et les modalités d'exploitation de ces systèmes, après avis d'une commission administrative assurant notamment la représentation des collectivités territoriales. Elle peut être assortie de conditions restrictives d'utilisation.
« Cette autorisation vaut approbation des prescriptions d'exploitation établies par le maître d'ouvrage et applicables à chaque système, lesquelles comportent au moins un examen périodique par un expert ou un organisme qualifié, agréé.
« Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application du présent article et, notamment, les catégories de systèmes auxquels s'appliquent ses dispositions. »

Article 9

Un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions d'application des procédures préalables au commencement des travaux ou à la mise en service, prévues par les articles 2 à 7 ci-dessus, aux infrastructures et systèmes de transport en projet, en cours de réalisation ou achevés à la date d'entrée en vigueur des dispositions desdits articles.

TITRE II
ENQUÊTES TECHNIQUES APRÈS ÉVÉNEMENT DE MER, ACCIDENT OU INCIDENT DE TRANSPORT TERRESTRE

Article 10

I.- A la suite d'un événement de mer, d'un accident ou d'un incident de transport terrestre, le ministre chargé des transports peut décider une enquête technique dont le seul objet est de prévenir de futurs événements, accidents ou incidents. Sans préjudice, le cas échéant, de l'enquête judiciaire, elle consiste à collecter et analyser les informations utiles afin de déterminer les circonstances et les causes certaines ou possibles de l'événement, de l'accident ou de l'incident et, s'il y a lieu, d'établir des recommandations de sécurité.
II.- L'enquête technique sur les événements de mer peut porter sur les navires civils battant pavillon français où qu'ils se trouvent, ainsi que sur les navires civils battant un autre pavillon lorsque l'événement de mer s'est produit dans les eaux intérieures ou dans la mer territoriale française. Une enquête peut également être menée lorsque l'événement de mer, où qu'il se soit produit, a coûté la vie ou infligé des blessures graves à des ressortissants français, ou causé ou menacé de causer un grave préjudice au territoire français, à l'environnement, aux installations ou ouvrages sur lesquels la France exerce sa juridiction. Ces enquêtes sont effectuées dans le respect des règles du droit maritime international.
L'enquête technique sur les accidents ou incidents de transport terrestre peut porter sur les systèmes de transports ferroviaires ou les autres systèmes de transports guidés, sur les transports routiers, sur les transports fluviaux, dès lors que l'accident ou l'incident est survenu sur le territoire national.
III.- L'enquête technique est faite par un organisme permanent spécialisé qui peut faire appel à des membres des corps d'inspection et de contrôle ou, le cas échéant, demander au ministre chargé des transports la constitution d'une commission d'enquête.
Dans le cadre de l'enquête, l'organisme ou les personnes chargés de l'enquête agissent en toute indépendance et ne reçoivent ni ne sollicitent d'instructions d'aucune autorité ni d'aucun organisme dont les intérêts pourraient entrer en conflit avec la mission qui leur est confiée.
Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de commissionnement des personnes chargées des enquêtes et de nomination des membres des commissions d'enquête.

Article 11

Les enquêteurs techniques peuvent immédiatement accéder au lieu de l'événement de mer, de l'accident ou de l'incident de transport terrestre pour procéder sur place à toute constatation utile. En cas d'événement de mer ou d'accident de transport terrestre, le procureur de la République, ainsi que, s'il y a lieu, l'administrateur des affaires maritimes chargé de l'enquête prévue à l'article 86 du code disciplinaire et pénal de la marine marchande, sont préalablement informés des modalités de leur intervention.
Si nécessaire, les enquêteurs techniques prennent toute mesure de nature à assurer la préservation des indices.

Article 12

Les enquêteurs techniques ont accès sans retard au contenu des dispositifs techniques enregistrant les paramètres utiles à la compréhension des causes et circonstances de l'événement de mer, de l'accident ou de l'incident de transport terrestre, et peuvent procéder à leur exploitation dans les conditions suivantes :
1° Lorsqu'il y a ouverture d'une enquête ou d'une information judiciaire, les appareils enregistreurs, préalablement saisis par l'autorité judiciaire selon les modalités prévues aux articles 97 et 163 du code de procédure pénale, sont mis, à leur demande, à la disposition des enquêteurs techniques qui prennent copie, sous le contrôle d'un officier de police judiciaire, des éléments qu'ils renferment ;
2° Lorsqu'il n'y a pas ouverture d'une enquête ou d'une information judiciaire, les appareils enregistreurs et leur contenu peuvent être prélevés par les enquêteurs techniques, en présence d'un officier de police judiciaire. En cas d'événement de mer ou d'accident de transport terrestre, le concours de l'officier de police judiciaire est sollicité par l'intermédiaire du procureur de la République.

Article 13

S'il n'a pas été procédé à l'ouverture d'une enquête ou d'une information judiciaire, les enquêteurs techniques peuvent, en présence d'un officier de police judiciaire, prélever, aux fins d'examen ou d'analyse, les débris, fluides, pièces, organes, ensembles ou mécanismes qu'ils estiment propres à contribuer à la détermination des circonstances et des causes de l'événement de mer, de l'accident ou de l'incident de transport terrestre. Le concours de l'officier de police judiciaire est sollicité par l'intermédiaire du procureur de la République.
Les objets ou les documents retenus par les enquêteurs techniques sont restitués dès lors que leur conservation n'apparaît plus nécessaire à la détermination des circonstances et des causes de l'événement de mer, de l'accident ou de l'incident de transport terrestre. La rétention et, le cas échéant, l'altération ou la destruction, pour les besoins de l'enquête, des objets ou des documents soumis à examen ou à l'analyse n'entraînent aucun droit à indemnité.

Article 14

Lorsqu'une enquête ou une information judiciaire a été ouverte, les enquêteurs techniques peuvent procéder, avec l'accord, selon le cas, du procureur de la République ou du juge d'instruction, au prélèvement, aux fins d'examen ou d'analyse, de débris, fluides, pièces, organes, ensembles ou mécanismes qu'ils estiment propres à contribuer à la détermination des circonstances et des causes de l'événement de mer, de l'accident ou de l'incident de transport terrestre.
Les enquêteurs techniques ne peuvent soumettre les débris, fluides, pièces, organes, ensembles et mécanismes qui ont fait l'objet d'une saisie à des examens ou analyses susceptibles de les modifier, altérer ou détruire qu'avec l'accord de l'autorité judiciaire.
Ils sont informés des opérations d'expertise diligentées par l'autorité judiciaire compétente. Ils ont droit d'y assister et d'exploiter les constatations faites dans le cadre de ces opérations pour les besoins de l'enquête technique.

Article 15

Les enquêteurs techniques peuvent rencontrer toute personne concernée et obtenir, sans que puisse leur être opposé le secret professionnel, communication de toute information ou de tout document concernant les circonstances, organismes et matériels en relation avec l'événement de mer, l'accident ou l'incident de transport terrestre et concernant notamment la construction, la certification, l'entretien, l'exploitation des matériels, la préparation du transport, la conduite et le contrôle du ou des véhicules impliqués.
Dans les mêmes conditions, les enquêteurs techniques peuvent également demander communication de toute information ou de tout document à caractère personnel concernant la formation, la qualification, l'aptitude à la conduite, ou le contrôle des véhicules. Toutefois, celles de ces informations qui ont un caractère médical ne peuvent être communiquées qu'aux médecins rattachés à l'organisme permanent ou désignés pour assister ces enquêteurs, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
Les informations ou documents relevant du secret de l'enquête ou de l'instruction peuvent être communiqués aux enquêteurs techniques avec l'accord du procureur de la République. S'il s'agit de documents placés sous scellés par l'autorité judiciaire, il en est alors établi une copie à leur intention.

Article 16

Lorsqu'une procédure judiciaire est ouverte, une copie du rapport d'enquête technique est adressée au procureur de la République.

Article 17

I.- Les personnes chargées de l'enquête et les experts auxquels ils font éventuellement appel sont tenus au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal.
II.- Par dérogation aux dispositions du I, le responsable de l'organisme permanent est habilité à transmettre des informations résultant de l'enquête technique, s'il estime qu'elles sont de nature à prévenir un événement de mer, un accident ou un incident de transport terrestre, aux autorités administratives chargées de la sécurité, aux dirigeants des entreprises de construction ou d'entretien des infrastructures, des matériels de transports ou de leurs équipements, aux personnes physiques et morales chargées de l'exploitation des infrastructures ou des matériels de transports, ou chargées de la formation des personnels.
A cette même fin, le responsable de l'organisme permanent et, le cas échéant, les présidents des commissions d'enquête sont habilités, dans le cadre de leur mission, à rendre publiques des informations à caractère technique sur les constatations faites par les enquêteurs, le déroulement de l'enquête technique et, éventuellement, ses conclusions provisoires.

Article 18

En cours d'enquête, l'organisme permanent peut émettre des recommandations de sécurité s'il estime que leur mise en _uvre immédiate est de nature à prévenir un événement de mer, un accident ou un incident de transport terrestre.
Il rend public, au terme de l'enquête technique, un rapport sous une forme appropriée au type et à la gravité de l'événement. Ce rapport n'indique pas le nom des personnes. Il ne fait état que des informations résultant de l'enquête nécessaires à la détermination des circonstances et des causes de l'accident ou de l'incident, et à la compréhension des recommandations de sécurité.
Avant la remise du rapport, les enquêteurs techniques peuvent recueillir les observations des autorités, entreprises et personnels intéressés qui sont tenus au secret professionnel en ce qui concerne les éléments de cette consultation.

Article 19

I.- Est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende le fait d'entraver l'action des enquêteurs techniques :
1° Soit en s'opposant à l'exercice des fonctions dont ils sont chargés ;
2° Soit en refusant de leur communiquer les matériels, les informations et les documents utiles, en les dissimulant, en les altérant ou en les faisant disparaître.
II.- Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues à l'article 121-2 du code pénal, des infractions définies au I.
Les peines encourues par les personnes morales sont :
1° L'amende selon les modalités prévues à l'article 131-38 du code pénal ;
2° Les peines mentionnées à l'article 131-39 du même code.
L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise.

Article 20

Les dispositions du titre II de la présente loi sont applicables, en tant qu'elles concernent des événements de mer, à Mayotte, aux territoires d'outre-mer et à la Nouvelle-Calédonie, sans préjudice des compétences dévolues à ces collectivités.
Fait à Paris, le 21 mars 2001.

Signé : LIONEL JOSPIN

Par le Premier ministre :

Le ministre de l'équipement, des transports et du logement,
Signé : JEAN-CLAUDE GAYSSOT

2940 - Projet de loi relatif à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport et aux enquêtes techniques après événement de mer, accident
ou incident de transport terrestre, (commission de la production)


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