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N° 996

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 18 juin 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES (1) , SUR LE PROJET DE LOI (n° 33), portant règlement définitif du budget de 1995,

PAR M. François LAMY,

Député.

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros : 33, 933.

Lois de règlement.

La commission de la défense nationale et des forces armées est composée de :

M. Paul Quilès, président ; MM. Didier Boulaud, Arthur Paecht, Jean-Claude Sandrier, vice-présidents ; MM. Robert Gaïa, Pierre Lellouche, Mme Martine Lignières-Cassou, secrétaires ; MM. Jean-Marc Ayrault, Jacques Baumel, François Bayrou, Jean-Louis Bernard, André Berthol, Jean-Yves Besselat, Eric Besson, Bernard Birsinger, Jean-Marie Bockel, Loïc Bouvard, Jean-Pierre Braine, Philippe Briand, Jean Briane, Antoine Carré, Bernard Cazeneuve, Gérard Charasse, Hervé de Charette, Guy-Michel Chauveau, Alain Clary, Charles Cova, Michel Dasseux, Jean-Louis Debré, François Deluga, Claude Desbons, Jean-Pierre Dupont, François Fillon, Christian Franqueville, Roger Franzoni, Yann Galut, René Galy-Dejean, Roland Garrigues, Henri de Gastines, Bernard Grasset, François Hollande, François Huwart, Jean-Noël Kerdraon, François Lamy, Pierre-Claude Lanfranca, Jean-Yves Le Drian, Georges Lemoine, François Liberti, Jean-Pierre Marché, Franck Marlin, Jean Marsaudon, Christian Martin, Marius Masse, Gilbert Meyer, Michel Meylan, Jean Michel, Charles Miossec, Alain Moyne-Bressand, Jacques Peyrat, Robert Poujade, Gilles de Robien, Michel Sainte-Marie, Bernard Seux, Guy Teissier, André Vauchez, Jean-Claude Viollet, Michel Voisin, Pierre-André Wiltzer, Kofi Yamgnane.

S O M M A I R E

Pages

INTRODUCTION 5

I. —  LE FINANCEMENT DE LA DÉFENSE EN 1995 : UN EFFORT

BUDGÉTAIRE EN NETTE DIMINUTION 7

A. —  LA BAISSE DES DÉPENSES MILITAIRES S’EST ACCÉLÉRÉE EN 19958

1. — Une baisse en valeur absolue 8

2. — La part relative du budget de la Défense dans le budget de

l’Etat diminue 9

B. —  L’ÉVOLUTION CONTRASTÉE DES DÉPENSES ORDINAIRES ET DES

DÉPENSES D’ÉQUIPEMENT 9

1. — Un déséquilibre croissant entre dépenses ordinaires

et dépenses d’équipement 10

2. — La stagnation des dépenses ordinaires 11

3. — La chute des dépenses d’équipement 13

II. —  LA GESTION DES AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES : UNE CONTRI-

BUTION MAJEURE DU BUDGET DE LA DÉFENSE À LA MAÎTRISE

DES FINANCES PUBLIQUES 17

A. —  LES ANNULATIONS ET LES REPORTS DE CRÉDITS TÉMOIGNENT

DU CARACTÈRE EXTRÊMEMENT HEURTÉ DE LA GESTION 1995 18

1. — Les annulations de crédits en 1995 19

a —  Approche globale 19

b —  Approche par armée 22

2. — Les reports de crédits 24

3. — Les différentes approches du budget 27

B. —  LES AUTRES MOUVEMENTS DE CRÉDITS 27

1. — Les modifications législatives 27

2. — Les modifications règlementaires 30

a —  Les mouvements modifiant le montant des dotations 30

b —  Les mouvements modifiant la répartition des dotations 36

III. —  LES AJUSTEMENTS AU PROJET DE LOI DE RÈGLEMENT 39

CONCLUSION 41

EXAMEN EN COMMISSION 43

Mesdames, Messieurs,

Pour la cinquième année consécutive, la Commission de la Défense est appelée à se prononcer sur le projet de loi de règlement. Cette initiative née du constat d’un écart croissant entre les lois de finances initiales et le budget effectivement exécuté par le ministère de la Défense apparaît, en ce qui concerne l’exécution du budget 1995, particulièrement nécessaire. Les dépenses effectives du ministère de la Défense, telles qu’elles apparaissent dans le projet de loi de règlement, se révèlent en effet très éloignées des prévisions consignées dans la loi de finances initiale.

Différents facteurs se sont conjugués pour donner à l’exécution du budget 1995 un profil tout à fait spécifique.

Tout d’abord, le ministère de la Défense a apporté une contribution sans équivalent à l’objectif de maîtrise des finances publiques, qui s’est traduite par une politique économique extrêmement rigoureuse dont le ministère de la Défense a, comme de nombreux autres postes budgétaires, subi les conséquences. Certes, la conjoncture économique qui, en dépit des prévisions, s’est dégradée au cours de l’année 1995 a perturbé l’exécution budgétaire. Tant l’exposé des motifs du présent projet de loi que le rapport annuel sur les comptes de la Nation soulignent cette dégradation au plan international et au niveau national.

Mais surtout, il faut souligner que le budget de la Défense pour 1995 s’est, pour une large part, trouvé dépourvu de cadre de référence. En effet, la protection que représente la loi de programmation pour le budget de la Défense, n’a pu jouer son rôle puisque, dès l’été 1995, était abandonnée la mise en oeuvre de la loi de programmation 1995-2000, largement inadaptée au contexte stratégique comme à l’environnement économique.

Ce faisceau de circonstances confère à l’exécution du budget 1995 un caractère particulièrement heurté : le titre V du budget de la Défense s’est ainsi trouvé amputé par rapport aux prévisions initiales de 15,5 % de ses crédits.

Il est à souhaiter qu’une telle exécution reste exceptionnelle. La loi de programmation militaire 1997-2002 et la revue des programmes qu’a menée le Ministre de la Défense en 1997 et 1998 constituent à cet égard un gage de sécurité pour la protection des crédits alloués à la Défense ainsi que de nécessaires cadres de référence susceptibles d’améliorer la gestion annuelle de ce budget.

*

Dans ce contexte, le financement de la Défense en 1995 subit une forte baisse et voit sa part diminuer dans le budget de l’Etat. L’exécution particulièrement perturbée des crédits de la Défense a fortement remis en cause les dotations votées par le Parlement.

Le projet de loi portant règlement définitif de ce budget fournit l’occasion d’examiner le résultat définitif de l’exécution des dépenses. Il permet de mettre en lumière les différents mouvements de crédits qui ont pu affecter le budget de la Défense. Il est enfin une occasion privilégiée pour votre rapporteur de proposer des solutions qui permettent au contrôle parlementaire de s’exercer en toute efficacité.

I. —  LE FINANCEMENT DE LA DÉFENSE EN 1995 : UN EFFORT BUDGÉTAIRE EN NETTE DIMINUTION

Les changements stratégiques survenus depuis la fin de la guerre froide se sont traduits, dans la plupart des pays industrialisés, par une forte baisse des dépenses militaires. La France, cependant, a suivi une évolution spécifique dans ce domaine comme le montre le tableau ci-dessous.

ÉVOLUTION DE L’EFFORT BUDGÉTAIRE EN FAVEUR

DE LA DÉFENSE PAR LES PRINCIPAUX PAYS INDUSTRIALISÉS

(en % du PIB)

Pays

1987

1996

Etats-Unis

6,41

3,67

Allemagne

3,08

1,68

Royaume-Uni

4,51

2,99

France

3,99

3,00

Nonobstant les limites méthodologiques inhérentes aux comparaisons internationales en matière de défense, il est certain que la France a ajusté de manière moins brutale mais également moins prononcée son effort de défense aux nouvelles données internationales. La France se situe ainsi, parmi les grands pays industrialisés, à un niveau de dépenses militaires relativement élevé malgré la baisse constatée en 1995. Cette baisse illustre cependant que, désormais, la situation de la France dans ce domaine tend à s’aligner sur celle de ses principaux partenaires.

Il semble en effet que l’exécution du budget 1995 ait mis fin à cette “ exception ” française : les dépenses militaires effectives accusent une baisse conséquente de 6,4 %, soit 179,965 milliards de francs consacrés par la France à son effort de défense. Une deuxième spécificité française est également remise en cause par l’exécution du budget 1995 : la prééminence affichée des dépenses en capital, battue en brèche dès 1993, appartient désormais au passé. A l’issue de l’exécution 1995, le budget de la Défense est à 58,48 % constitué par des dépenses ordinaires.

PART RELATIVE DES DÉPENSES ORDINAIRES

ET DES DÉPENSES EN CAPITAL

(en pourcentages)

 

Budget initial

Budget exécuté

 

DO

DC

DO

DC

1989

46,26

53,74

50,75

49,24

1990

46,11

53,89

48,68

51,31

1991

46,98

53,02

50,55

49,44

1992

46,98

53,02

50,54

49,45

1993

47,99

52,01

53,10

46,90

1994

51,10

48,90

53,97

46,03

1995

51,13

48,87

58,48

41,52

(Hors pensions)

A. —  LA BAISSE DES DÉPENSES MILITAIRES S’EST ACCÉLÉRÉE EN 1995

1. — Une baisse en valeur absolue

En 1995, les dépenses militaires effectives se sont élevées à 179,965 milliards de francs, soit 105,236 milliards pour le titre III (+ 1,5 %), et 74,729 milliards de francs pour les dépenses en capital (- 15,5 %).

ÉVOLUTION DES DÉPENSES MILITAIRES EFFECTIVES

(au sens de la loi de règlement)

(en milliards de francs courants)

 

Dépenses ordinaires

Dépenses en capital

Total

 

Montant

Évolution

Montant

Évolution

Montant

Évolution

1989

87,74

+ 2 %

85,1

+ 0,4 %

172,8

+ 1,2 %

1990

90,64

+ 3,3 %

95,5

+ 12,2 %

186,11

+ 7,7 %

1991

95,49

+ 5,35 %

93,39

- 2,2 %

188,88

+ 1,49 %

1992

95,946

+ 0,48 %

93,885

+ 0,5 %

189,831

+ 0,5 %

1993

100,401

+ 4,6 %

88,666

- 5,6 %

189,067

- 0,4 %

1994

103,705

+ 3,29 %

88,476

- 0,2 %

192,181

+ 1,6 %

1995

105,236

+ 1,5 %

74,729

- 15,5 %

179,965

- 6,4 %

 Hors pensions

D’emblée, il convient de remarquer que la comparaison directe avec le montant de 243 milliards de francs inscrit en loi de finances initiale est peu pertinente, en grande partie parce que celui-ci inclut la participation aux charges de pensions ; or, celle-ci fait traditionnellement l’objet d’un transfert au budget des charges communes en début d’année.

Il n’en reste pas moins que les dépenses effectives du budget de la Défense ont, en 1995, subi une forte baisse en valeur absolue de 6,4 % par rapport à 1994, baisse d’autant plus importante que l’ensemble des dépenses de l’Etat ont, pour leur part, progressé de 2,1 % durant cette même année. La plupart des indicateurs incite à penser que cette déconnexion entre l’évolution des dépenses civiles et celle des dépenses militaires ne résulte pas seulement d’une régulation défavorable au budget militaire mais reflète aussi la prise en compte, trop longtemps différée, des évolutions stratégiques internationales.

2. — La part relative du budget de la Défense dans le budget de l’Etat diminue

Si l’on examine maintenant la part du budget de la Défense dans l’ensemble des dépenses de l’Etat, l’évolution à la baisse apparaît plus nettement encore, d’autant qu’a été franchie en 1995 à la baisse la barre des 10 %. Ainsi, en 1995, les dépenses militaires (hors pensions) ont représenté 9,88 % de l’ensemble des dépenses de l’Etat alors qu’elles en représentaient encore 12,65 % en 1990.

Si l’on inclut les pensions -ce qui correspond d’ailleurs à la norme internationale choisie par l’OTAN et l’ONU- la Défense contribue pour 18 % du total des dépenses de l’Etat. C’est sur cette assiette qu’est assise la contribution du ministère de la Défense à la régulation budgétaire.

B. —  L’ÉVOLUTION CONTRASTÉE DES DÉPENSES ORDINAIRES ET DES DÉPENSES D’ÉQUIPEMENT

La baisse des dépenses militaires effectives est essentiellement imputable aux dépenses en capital, les dépenses ordinaires progressant quant à elles de 1,5 %.

1. — Un déséquilibre croissant entre dépenses ordinaires et dépenses d’équipement

L’évolution contrastée des deux types de dépenses était déjà nettement perceptible dans le budget initial qui prévoyait que 51,13 % du budget de la Défense seraient consacrés au financement des dépenses ordinaires. Tout comme en 1994, l’exécution du budget a renforcé la part du titre III ; valable en terme de tendance, la comparaison entre les deux années trouve néanmoins ses limites dès lors que l’on examine les résultats de l’exécution. Alors que l’écart entre la prévision et l’exécution fut de 2,87 points en 1994, il a atteint plus de 7 points en 1995, les dépenses ordinaires représentant 58,48 % des dépenses militaires à la fin de l’année 1995.

Cette évolution contrastée entre les titres s’explique en partie par les annulations qui, en 1995, ont exclusivement touché le titre V. Il faut préciser cependant que la répartition des crédits entre le titre III d’un côté et les titres V et VI de l’autre ne recouvre pas strictement la distinction entre dépenses ordinaires et dépenses d’équipement : ainsi, parmi les 48,97 % de dépenses rattachées aux titres V et VI en loi de finances initiale, figurent des crédits qui sont en réalité des dépenses ordinaires.

Cet effet d’optique dans la présentation trouve son origine dans l’importante latitude que laisse, en matière de présentation budgétaire, l’ordonnance organique du 2 janvier 1959. Aux termes de l’article 7 de ladite ordonnance, il existe deux critères de classement des dépenses budgétaires, l’un relatif à leur nature, l’autre à leur destination, ce qui laisse une importante marge de manoeuvre aux ministères dans la présentation de leurs dépenses.

En ce qui concerne le ministère de la Défense, cette latitude a longtemps permis, toute proportion gardée, d’afficher un budget d’équipement plus favorable qu’il ne l’est en réalité.

L’exemple des dépenses d’informatique et de bureautique est à cet égard révélateur. En la matière, le ministère de la Défense a largement usé de la faculté dérogatoire qui lui était conférée : si la règle générale est l’imputation de ces dépenses sur un chapitre unique du titre III, le ministère de la Défense peut imputer sur le titre V des dépenses de fonctionnement “ affectées à des activités techniques, scientifiques, industrielles et opérationnelles ”.

Une affectation plus rigoureuse des crédits dès la loi de finances initiale permettrait sans nul doute de mieux évaluer l’effort d’équipement des armées.

2. — La stagnation des dépenses ordinaires

Sur l’ensemble de l’année 1995, les dépenses ordinaires s’établissent à 105,236 milliards de francs, soit une hausse, en francs courants, de 1,48 %.

L’augmentation des dépenses ordinaires marque ainsi un net fléchissement, tant en comparaison avec l’année précédente que par rapport à l’ensemble des dépenses ordinaires.

La totalité de la progression de ces dépenses est due aux dépenses de rémunérations regroupées dans la partie 31 (+ 3,68 %) qui a rassemblé 66,7 % des dépenses militaires ordinaires.

Comme le souligne la Cour des comptes, c’est essentiellement en raison des opérations extérieures que ce poste de dépenses progresse. Les surcoûts liés aux opérations extérieures sont en effet évalués pour l’année 1995 à 4 178,85 millions de francs dont 2 543,13 millions de francs pour l’ex-Yougoslavie.

La sixième partie progresse elle aussi (+ 2,28 %) ; cependant, cette partie ne comprenant que moins de 1 % du total des dépenses, elle ne saurait influer sur l’évolution globale du titre III. Au contraire, tous les autres postes de dépenses du titre III, que ce soit les charges sociales, les dépenses de fonctionnement des services et de matériel ou les dépenses diverses, enregistrent une baisse plus ou moins forte, sans qu’il soit d’ailleurs toujours possible de déterminer l’origine de cette évolution. En particulier, la stagnation des dépenses liées aux charges sociales demeure inexpliquée, tout comme l’est d’ailleurs leur forte progression de 1992 à 1994 (+ 7 %).

Si l’on analyse maintenant l’évolution des dépenses nettes du titre III par armée, il apparaît que la Marine voit ses dépenses ordinaires baisser de 1,91 %, alors que celles-ci progressent pour toutes les autres armées, et en particulier pour l’Armée de terre (+ 3,29 %). Il faut sans doute voir dans cette évolution à nouveau l’impact des opérations extérieures.

DÉPENSES NETTES DU TITRE III

(en millions de francs)

 

Partie 31 “ Personnel - Rémunérations d’activité ”

Partie 33 “ Charges sociales ”

Partie 34 “ Matériel et fonctionnement des services ”

Partie 36 “ Subventions de fonctionnement ”

Partie 37 “ Dépenses diverses ”

Total dépenses nettes 1995

Total dépenses nettes 1994

Évolution 1995/1994 (en %)

Services communs

13 709,215

1 649,386

5 546,252

899,715

1 864,270

23 668,838

23 328,053

1,46 %

Air

10 896,257

1 010,581

4 765,181

27,709

0,000

16 699,728

16 442,897

1,56 %

Forces terrestres

22 251,436

1 932,015

7 882,582

5,019

0,000

32 071,052

31 050,128

3,29 %

Marine

8 854,319

963,599

3 874,094

10,967

0,000

13 702,979

13 956,143

- 1,81 %

Gendarmerie

14 430,048

1 400,953

3 262,227

0,000

0,000

19 093,228

18 928,261

0,87 %

Total

70 141,275

6 956,534

25 330,336

943,410

1 864,270

105 235,825

103 705,482

1,48 %

Évolution 1995/1994

(en %)

3,68 %

- 0,03 %

- 3,54 %

2,25 %

- 2,42 %

- 1,48 %

   

3. — La chute des dépenses d’équipement

Le phénomène le plus caractéristique de la gestion 1995 concerne la baisse spectaculaire des dépenses d’équipement des services militaires qui atteignent, en 1995, 74,729 milliards de francs, soit une baisse de 15,5 % par rapport à 1994.

Il est vrai que l’ensemble des dépenses d’équipement de l’Etat a connu, en 1995, un net fléchissement : l’effort d’investissement de l’Etat a, pour la première fois depuis de nombreuses années, représenté moins de 10 % des dépenses totales (9,7 %). Depuis 1992, ce sont ainsi plus de 2 % des dépenses totales de l’Etat qui ont été soustraites à l’investissement.

La baisse des dépenses militaires en capital contribue pour la plus grande partie à expliquer cette évolution défavorable, ainsi que l’illustre le tableau suivant.

DÉPENSES EN CAPITAL DE 1992 à 1995

(en % des dépenses totales)

 

1992

1993

1994

1995

Dépenses en capital des services civils

6,2

6,4

6,0

5,6

Dépenses en capital des services militaires

5,7

5,1

5,0

4,1

Total

11,9

11,5

11,0

9,7

L’érosion continue des dépenses en capital des services militaires, qui s’est brusquement accélérée en 1995, a conduit l’effort d’investissement de l’Etat en faveur de la Défense à s’établir à moins de 5 % des dépenses totales.

Les dépenses en capital s’établissent en définitive à 74,729 milliards de francs pour 1995, soit 73,907 milliards de francs pour le titre V et 0,822 milliard de francs pour le titre VI. Ceci représente une chute de 15,5 % par rapport à 1994, chute imputable en totalité au titre V, la hausse de 13 % enregistrée par les dépenses du titre VI n’ayant qu’un effet marginal du fait de la contribution minime de ce titre aux dépenses d’équipement.

Certes, l’érosion des dépenses en capital n’est pas un phénomène nouveau mais constitue une constante depuis 1992.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES EN CAPITAL DEPUIS 1992

(en milliards de francs)

 

1992

1993

Evolution

1993/1992

1994

Evolution

1994/1993

1995

Evolution

1995/1994

Titre V

93,3961

88,1651

- 5,6 %

87,7481

- 0,5 %

73,907

- 15,8 %

Titre VI

0,4885

0,5009

+ 2,5 %

0,7276

+ 45,3 %

0,8225

+ 13,0 %

Total

93,8846

88,666

- 5,6 %

88,4757

- 0,2 %

74,729

- 15,5 %

Cependant, l’ampleur de la chute des dépenses d’équipement des armées observée en 1995 suggère qu’au-delà de l’évolution structurelle des dépenses militaires en capital, le budget d’équipement de la Défense a, en 1995, joué un rôle majeur dans la maîtrise des finances publiques mise en oeuvre par le Parlement et le Gouvernement.

On peut considérer rétrospectivement que cette baisse spectaculaire a contribué à aligner la position de la France sur celle de ses principaux partenaires puisque le budget de la Défense semble avoir pris acte des bouleversements stratégiques survenus depuis 1989. Ainsi, la brutalité de la baisse des dépenses d’équipement serait, selon certaines analyses, à la mesure du retard pris, en termes budgétaires, par la France pour s’adapter au nouvel “ ordre ” mondial. L’exécution du budget 1995, très brutale en matière de dépenses d’équipement, aurait en quelque sorte permis une remise à plat de la situation, revêtant donc un caractère exceptionnel. L’exécution 1996 tendrait d’ailleurs à confirmer cette analyse puisque les dépenses d’équipement ont augmenté en 1996 de 4,4 %.

Il convient cependant de ne pas négliger le fait que cette évolution, loin d’être anticipée ou souhaitée, a été, avant tout, subie.

Si l’on examine à présent l’incidence de la baisse des crédits d’équipement sur chaque armée, d’importants contrastes apparaissent.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES MILITAIRES EN CAPITAL PAR ARMÉE ET PAR TITRE

(en milliards de francs)

 

Dépenses 1994

Taux d’utilisation 1994 en %

Dépenses 1995

Evolution 1995/1994 en %

Taux d’utilisation 1995 en %

Titre V

I - Section commune

II - Air

III - Forces terrestres

IV - Marine

V - Gendarmerie

19,235

23,250

22,392

20,555

2,315

77,91

94,67

91,80

91,64

89,08

15,057

19,436

17,243

19,877

2,295

- 21,72

- 16,40

- 22,99

- 3,30

- 0,87

74,48

94,94

86,47

90,67

94,16

Sous-total titre V

87,748

88,93

73,907

- 15,77

86,96

Titre VI

0,727

61,68

0,8225

+ 13,03

76,04

Total

88,475

88,61

74,729

- 15,53

86,82

Alors qu’en 1994, la Marine avait supporté le plus grand poids de la baisse, l’Armée de terre ainsi que la Gendarmerie voyant au contraire leurs dépenses augmenter, toutes les armées sont, en 1995, concernées par la baisse des crédits d’équipement, à des degrés divers cependant. Ainsi, l’Armée de terre et l’Armée de l’air ont été particulièrement sollicitées, ce qui ne manque pas de susciter des interrogations concernant le devenir des programmes d’armement en cours.

Une approche horizontale, par chapitre, des dépenses fait apparaître une diminution considérable (- 31,15 %) des dépenses consacrées aux études, déjà fortement affectées par l’exécution du budget 1994 (- 13,8 %) ; à nouveau, ce sont les crédits d’études consacrées au nucléaire qui sont fortement sollicités. La baisse se poursuit également pour les investissements techniques et industriels qui subissent une diminution de 8,37 %. La quatrième partie, consacrée aux infrastructures, n’échappe pas au mouvement puisqu’elle voit ses dépenses baisser de 9,85 %. Enfin, la troisième partie, partie essentielle qui rassemble plus de 30 % du total des crédits de la Défense et environ 60 % des crédits d’équipement, diminue de 9,25 %. Il est cependant difficile d’analyser ce chiffre du fait de l’extrême globalité du chapitre 53-80. Sur ce point, votre Rapporteur souhaiterait mettre l’accent sur la nécessité d’un respect plus strict du principe de spécialité budgétaire, condition nécessaire à l’efficacité du contrôle parlementaire.

Ainsi, quel que soit l’angle d’analyse, la diminution des crédits du titre V en 1995 est particulièrement brutale : il n’est pas d’investissement, il n’est pas d’armée qui n’aient, en 1995, été concernés par la chute des crédits.

La régulation budgétaire très forte subie par le ministère de la Défense en 1995 se traduit également par un net fléchissement du taux de consommation des crédits du fait de l’écart entre les crédits initiaux et les dépenses effectives. En baisse constante depuis 1993, le taux de consommation des crédits s’établit au niveau le plus faible enregistré depuis quinze ans : de 90,28 % en 1993, il tombe à 88,61 % en 1994 pour s’établir à 86,82 % en 1995.

ÉVOLUTION DES TAUX DE CONSOMMATION DE CRÉDITS

(en pourcentages)

 

1992

1993

1994

1995

Titre III

99,09

98,69

98,37

97,40

Titre V

90,97

90,45

88,93

86,96

Titre VI

79,44

68,14

61,68

76,04

Sous-total V et VI

90,91

90,28

88,61

86,82

Total

94,87

94,56

93,62

92,71

(en pourcentages)

 

1992

1993

1994

1995

Titre V

       

I - Section commune

81,14

81,25

77,91

74,48

II - Air

93,14

97,71

94,67

94,94

III - Forces terrestres

89,89

87,10

91,80

86,47

IV - Marine

97,40

97,01

91,64

90,67

VI - Gendarmerie

91,89

84,85

89,08

94,16

Total

90,97

90,45

88,93

86,96

Si l’on peut lire en creux dans cette évolution la participation majeure du ministère de la Défense à la régulation budgétaire, on ne peut également exclure l’hypothèse de procédures administratives parfois trop lourdes au sein même du ministère de la Défense. Cependant, les réformes actuellement en cours, visant à doter ce ministère d’un contrôle de gestion, que la Commission de la Défense avait proposé dès 1993, devraient conduire à un allégement important des circuits de la dépense et, par là-même, à une efficacité accrue de celle-ci.

II. —  LA GESTION DES AUTORISATIONS BUDGÉTAIRES : UNE CONTRIBUTION MAJEURE DU BUDGET DE LA DÉFENSE À LA MAÎTRISE DES FINANCES PUBLIQUES

Le budget de la Défense a subi, en 1995, des mouvements de crédits d’une très grande ampleur qui en ont affecté tant la répartition que le montant. L’écart entre les crédits votés en loi de finances initiale et les dépenses nettes de l’exercice s’établit au total à 63,491 milliards de francs, soit 43,281 milliards de francs pour le titre III et 20,210 milliards pour les titres V et VI.

CRÉDITS VOTÉS, CRÉDITS OUVERTS

ET DÉPENSES NETTES DE L’EXERCICE

(en millions de francs)

   

Moyens des armes et services

 

Dépenses en capital

 

Total

Crédits votés en loi de finances initiale

 

148 517

 

94 939

 

243 456

Crédits ouverts ou annulés en cours d’exercice

- Ouverture de crédits

- Décrets d’avances

- Annulations

 

4 900

 

- 11 892

 

4 900

- 11 892

Solde des mouvements

 

+ 4 900

 

- 11 892

 

- 6 992

Crédits votés

(après loi de finances rectificative)

 

153 417

 

83 047

 

236 464

Mouvements de crédits en cours d’exercice

- Reports de l’exercice précédent

- Fonds de concours

- Virements (solde)

- Transferts (solde)

- Répartitions (solde)

}

934

2 727

- 49 033

}

11 370

1 554

- 9 901

}

12 304

4 281

- 58 934

Solde des crédits ouverts

 

108 045

 

86 069

 

194 113

Reports à la gestion suivante

 

- 1 529

 

- 11 340

 

- 12 868

Situation avant loi de règlement

 

106 516

 

74 729

 

181 244

Ajustement du projet de loi de règlement

 

- 1 280

 

 

- 1 280

DÉPENSES NETTES

 

105 236

 

74 729

 

179 965

L’importance des mouvements enregistrés par le titre III s’explique par le transfert traditionnel vers le budget des charges communes des crédits correspondant aux frais de pension.

C’est donc essentiellement sur les mouvements opérés sur les titres V et VI qu’il convient de se pencher. Ils témoignent en effet d’une contribution majeure du budget d’investissement de la Défense à la maîtrise des finances publiques.

Il est légitime de s’interroger sur les conséquences matérielles, économiques et financières de la régulation subie par les crédits d’équipement militaires. Plus particulièrement, la Commission de la Défense s’inquiète des conséquences négatives de tels aléas budgétaires vis-à-vis des petites et moyennes entreprises qui interviennent dans l’industrie de la défense. A cet égard, la hausse des intérêts moratoires enregistrée en 1995 constitue un phénomène préoccupant, qui n’a fait que s’amplifier en 1996.

A. —  LES ANNULATIONS ET LES REPORTS DE CRÉDITS TÉMOIGNENT DU CARACTÈRE EXTRÊMEMENT HEURTÉ DE LA GESTION 1995

Il ne saurait être question de remettre en cause la participation du ministère de la Défense à la régulation budgétaire : comme tous les ministères, il doit participer à l’effort général de maîtrise des finances publiques.

Ainsi, en 1993, les annulations, hors titre I1, avaient porté sur 29 milliards de francs dont 9 milliards de francs sur les crédits d’équipement de la Défense ; en 1995, les mêmes annulations se sont élevées à 28,6 milliards de francs dont 11,9 milliards de francs sur le budget d’équipement de la Défense. Dans son rapport annexé au présent projet de loi, la Cour des comptes n’hésite pas à évoquer à ce propos le “ caractère anormal des annulations opérées ” sur le budget de la Défense.

PARTICIPATION DU BUDGET DE LA DÉFENSE AUX ANNULATIONS

DEPUIS 1990

(en milliards de francs)

 

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Services civils (hors titre I)

8,83

16,70

10,69

19,20

8,92

16,74

Services militaires

dont titre III

dont titres V et VI

2,72

0,24

2,48

1,91

0,82

1,09

5,31

0,11

5,20

9,76

0,75

9,01

1,12

1,12

11,89

11,89

Total budget général hors titre I

11,55

18,61

16,00

28,96

10,04

28,63

Participation des services militaires en %

23,54

10,26

33,18

33,70

11,15

41,52

Source : rapport de la Cour des comptes

En 1995, le ministère de la Défense a donc contribué à la régulation budgétaire pour une part nettement plus que proportionnelle à sa part dans le budget de l’Etat (18 %, pensions incluses). Tel est en effet ce qui apparaît au regard de l’ampleur des annulations de crédits subies par ce ministère. De même, le recours croissant à la pratique des reports de crédits témoigne d’une régulation très défavorable au ministère de la Défense. Il n’est pas excessif de parler, avec la Cour des comptes, d’un véritable “ cycle régulation-annulation-report ”.

1. — Les annulations de crédits en 1995

La pratique des annulations de crédits trouve son fondement juridique dans l’article 13 de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances. Celui-ci dispose en effet que “ tout crédit qui devient sans objet en cours d’année peut être annulé par arrêté du Ministre des Finances après accord du Ministre intéressé ”.

a) Approche globale

Les annulations de crédits ont, en 1995, porté sur 11,892 milliards de francs, ce qui traduit une forte progression du recours à cette pratique budgétaire. Elles représentent ainsi plus de dix fois les annulations intervenues en 1994, année qui vit le budget de la Défense relativement épargné par cette pratique récurrente. Plus pertinente sans doute est la comparaison avec l’année 1993, également perturbée en termes budgétaires. Celle-ci fait apparaître une fois encore la spécificité de l’exécution 1995 puisque les annulations de crédits sont supérieures de 20 % environ à celles, pourtant importantes, qui avaient eu lieu en 1993.

Les annulations de crédits sont intervenues par deux fois en 1995. Un premier arrêté, en date du 28 juin 1995, a annulé 8,392 milliards de francs dont 8,298 sur le seul titre V. Le second, intervenu le 15 novembre 1995, a porté sur 3,467 milliards de francs, également quasi exclusivement sur le titre V.

ANNULATIONS BUDGÉTAIRES SUR LES TITRES V ET VI

Arrêté du 28 juin 1995

(en millions de francs)

 

Libellé

Chapitre

Crédits de paiement

 

Espace

51-60

824

 

Nucléaire

51-70

729

 

Autres études

51-80

2 090

 

Investissements techniques et industriels

52-70

235

Titre V

Fabrications - Services communs - Gendarmerie

53-70

320

 

Fabrications - Air - Terre - Mer

53-80

3 865

 

Infrastructure

54-40

235

 

Total titre V

8 298

Titre VI

Participation à des travaux d’équipement civil et subvention d’équipement social intéressant la collectivité militaire

66-50

52

 

Subventions aux organismes sous tutelle

67-10

42,33

 

Total titre VI

94,33

Total pour la Défense

8 392,33

ANNULATIONS BUDGÉTAIRES SUR LES TITRES V ET VI

Arrêté du 15 novembre 1995

(en millions de francs)

 

Libellé

Chapitre

Crédits de paiement

 

Espace

51-60

486,8

 

Nucléaire

51-70

139

 

Autres études

51-80

1 078,5

 

Investissements techniques et industriels

52-70

134

Titre V

Fabrications - Services communs - Gendarmerie

53-70

441

 

Fabrications - Air - Terre - Mer

53-80

994

 

Infrastructure

54-40

193

 

Total titre V

3 467

Titre VI

Participation à des travaux d’équipement civil et subvention d’équipement social intéressant la collectivité militaire

66-50

13

 

Subventions aux organismes sous tutelle

67-10

20

 

Total titre VI

33

Total pour la Défense

3 500

ANNULATIONS BUDGÉTAIRES EN 1995

(en millions de francs)

 

Autorisations de programme

Crédits de paiement

Titre V

21 632,5

11 765

Chapitre 51-60

920

1 310,8

51-70

2 268

868

51-80

5 088,5

3 168,5

52-70

1 327

369

53-70

601

761

53-80

10 652

4 859,7

54-40

776

428

Titre VI

159,8

127,3

Chapitre 66-50

11

65

67-10

148,8

62,3

L’examen du tableau précédent fait apparaître une forte contribution des chapitres 51-80 et 53-80 ; pour ce dernier, ceci s’explique aisément du fait de son extrême globalité qui participe à l’opacité des dépenses consacrées à la fabrication des équipements.

En pratique, les annulations ont été précédées de gels de crédits intervenus de manière très précoce.

En effet, dès le mois de février 1995, le ministère des Finances a demandé une mise en réserve de 10 % des dotations en dépenses ordinaires (hors personnel et crédits évaluatifs), et de 25 % pour les dépenses d’équipement (autorisations de programme et crédits de paiement destinés à financer des mesures nouvelles). A la demande du ministère de la Défense, la totalité du gel, soit 7,089 milliards de francs en crédits de paiement, a été imputée sur le titre V. En l’occurrence, ce gel s’est révélé être la préfiguration d’une annulation ultérieure au mois de juin 1995, d’ailleurs supérieure au montant du gel. Au même moment, s’est ajouté un gel supplémentaire de 8,410 milliards de francs en autorisations de programme.

En novembre 1995, le ministère des Finances a procédé à une deuxième annulation de 3,5 milliards de francs de crédits de paiement et de 13,4 milliards de francs d’autorisations de programme, montant qui incluait le gel de juin 1995.

Ce rapide aperçu sur la chronologie des gels et annulations souligne la précocité de l’intervention des mesures de régulation et conduit à s’interroger sur la portée réelle de l’autorisation parlementaire ainsi que sur la pertinence des modalités de présentation des crédits en loi de finances initiale. Ne serait-il pas de meilleure gestion de réduire, dès la loi de finances initiale, le montant des crédits inscrits dans des chapitres dont il est d’ores et déjà décidé qu’ils feront l’objet de gels, voire d’annulations ? Ainsi, à l’évidence, les crédits en question ne sont pas, contrairement à la condition requise par l’ordonnance de 1959, des crédits sans objet.

b) Approche par armée

Les armées ont été diversement touchées par les annulations de crédits, même si, globalement, aucune n’a échappé à la régulation.

ANNULATIONS DE CRÉDITS

 

En millions de francs

En % des crédits votés

En % des dépenses nettes

 

AP

CP

AP

CP

CP

Services communs

6 919,070

3 927,330

25,80

14,64

24,89

Air

5 561,000

2 418,000

24,60

10,64

12,42

Terre

4 210,260

2 665,000

20,51

13,18

15,43

Marine

4 821,328

2 600,328

21,41

11,33

13,08

Gendarmerie

281,000

282,000

11,39

12,72

12,09

Total

21 792,658

11 892,658

22,95

12,53

15,91

L’Armée de terre a vu ses dépenses nettes amputées de 15,43 %, ce qui représente à l’évidence une contribution majeure à l’effort de régulation. Les autres armées subissent également une forte baisse de leurs dotations.

Les conséquences des annulations ont été de deux types, selon que l’on considère les autorisations de programme ou les crédits de paiement.

D’une part, les 21,792 milliards de francs d’autorisations de programme annulées ont réduit les marges de manoeuvre sur la gestion des autorisations de programme sans entraîner cependant de conséquences difficiles à court et moyen terme. En effet, elles ont été absorbées par un “ matelas ” d’autorisations de programme excédentaires ou “ dormantes2 ”, dont le montant dépassait depuis 1993, selon le ministère des Finances, le seuil des 30 milliards de francs. Elles ont, par conséquent, ramené à 13 milliards de francs le niveau des autorisations de programme inemployées à la fin de l’exercice 1995, laissant au ministère une marge de manoeuvre acceptable pour la continuité des affaires en cours, aux dires même du ministère.

SITUATION DES AUTORISATIONS DE PROGRAMME PAR CHAPITRES

(en millions de francs)

Chapitre

AP

affectées

avant

année N

AP

non

affectées

année N

LFI

Modifications

au cours

année N

Total

ressources

Affectations

cumulées

année N

Disponible

51-60

23 031

1 299

4 189

- 1 772

3 716

2 359

1 356

51-70

119 400

2 758

13 078

- 9 633

6 203

5 280

923

51-80

213 131

7 770

14 608

- 4 989

17 389

12 915

4 473

52-70

23 255

1 987

1 604

- 1 296

2 295

1 577

717

53-70

26 705

2 047

3 718

- 591

5 173

3 413

1 760

53-80

604 883

20 496

48 976

- 10 237

59 235

48 749

10 485

54-40

43 036

1 511

8 032

- 603

8 940

7 586

1 353

66-50

999

84

123

- 14

193

167

25

67-10

1 679

299

610

- 148

761

616

144

Total défense

1 056 122

38 256

94 939

- 29 286

103 908

82 667

21 241

D’autre part, en ce qui concerne les crédits de paiement, les conséquences des annulations ont été d’ordre financier puisqu’elles ont contribué à une dégradation temporaire de la situation de trésorerie du titre V. Les annulations expliquent en grande partie les quelque 8 milliards de francs de reports de paiement3 de 1995 sur 1996. En effet, cette annulation étant intervenue alors que plus de 80 % des crédits avaient déjà été consommés, les gestionnaires du ministère ont été contraints de suspendre temporairement les paiements jusqu’à l’ouverture des crédits de la loi de finances pour 1996. Elles sont également responsables, pour une large part, du maintien à un niveau élevé des intérêts moratoires versés par le ministère de la Défense (316 millions de francs en 1995).

2. — Les reports de crédits

Du fait du principe d’annualité, toutes les autorisations budgétaires qui n’ont pas été utilisées sont annulées, sans possibilité de reports. L’ordonnance organique du 2 janvier 1959 aménage cependant quelques exceptions à ce principe rigoureux. D’une part, le report est de droit pour les “ crédits de paiement disponibles sur opérations en capital ”. D’autre part, il existe certaines possibilités de reporter les crédits “ ordinaires ”.

Depuis quelques années, le ministère de la Défense recourt de manière massive à la technique des reports de crédits, ce qui ne facilite pas la lisibilité de ce budget.

ÉVOLUTION DES REPORTS DE CRÉDITS EN CAPITAL

(en millions de francs)

Budget de la Défense (1)

1991

1992

1993

1994

1995

Reports de la gestion précédente

7 793,838

10 797,927

9 392,327

9 543,088

11 370

Reports à la gestion suivante

10 797,927

9 393,327

9 543,088

11 370,000

11 340

Évolution des reports

+ 3 004,089

- 1 405,600

+ 150,711

+ 1 826,617

- 30

(1) Hors compte de commerce

L’évolution du montant des reports de crédits conduit à s’interroger sur le rôle de cette pratique dans la régulation budgétaire. Deux phénomènes se conjuguent, qui contribuent à accroître la masse des crédits reportés.

D’une part, les crédits reportés au titre de l’exécution précédente ne sont pas toujours mis à disposition des services dès le début de l’année, tant s’en faut. En la matière, une distinction très nette s’impose entre crédits civils et crédits militaires : alors que les crédits d’équipement civils ont fait l’objet de reports jusqu’au 5 mai 1995 pour les plus tardifs, les retards s’aggravent pour les crédits d’équipement militaires. En 1995, les crédits reportés de l’année 1994 n’ont été mis à disposition des ordonnateurs que le 6 novembre 1995. D’où la récurrence des “ reports de reports ”, les reports de l’année précédente étant de facto gelés du fait de l’impossibilité matérielle pour les services de consommer tous les reports débloqués avant la fin de l’année et également du fait, en 1995, du blocage complet des ordonnancements en fin d’année imposé par le ministère du Budget.

D’autre part, l’objectif de réduction des reports présenté par le Gouvernement en début d’année au titre des moyens disponibles a fortement varié en 1995. Ainsi, le 22 novembre 1995, la direction du Budget a fixé à 10,8 milliards de francs l’objectif de reports à la gestion suivante, soit une réduction des reports de 1,5 milliard de francs par rapport à 1994. Non seulement la réduction des reports s’est trouvée fortement minorée par rapport à celle qui avait été annoncée en début d’année (7 milliards de francs), mais l’exécution 1995 se clôt en définitive par une augmentation des reports de 0,5 milliard de francs par rapport à 1994.

L’examen des reports de crédits en capital par section fait apparaître une fois encore la participation majeure des services communs et de l’Armée de terre.

REPORTS DE CRÉDITS EN CAPITAL PAR SECTION

 

Reports de 1994 à 1995

Reports de 1995 à 1996

Évolution

 

En millions de francs

En % des crédits

En millions de francs

En % des crédits

En millions de francs

I - Services communs

5 903,280

22,87

5 397,935

25,48

- 505,345*

II - Air

1 309,136

5,33

1 036,215

5,06

- 272,921

III - Forces terrestres

1 999,234

8,19

2 700,747

13,52

701,513

IV - Marine

1 874,175

8,36

2 046,461

9,33

172,286

V - Gendarmerie

283,880

10,92

158,354

6,38

- 125,526

Total des crédits militaires

11 369,705

11,58

11 339,712

11,55

- 29,993*

* Y compris les 250 millions de francs ouverts en gestion 1996 au ministère de l’Equipement (aviation civile)

Alors qu’en 1994, la Gendarmerie avait été principalement concernée par les reports (10,92 % des crédits globaux), elle est relativement épargnée cette année, tout comme l’Armée de l’air. Au contraire, les reports de crédits sont, pour la Marine et l’Armée de terre, supérieurs à ceux de l’année précédente.

L’évolution des reports de crédits au sein du ministère de la Défense n’est pas satisfaisante. En effet, elle concourt à obscurcir la perception globale de la situation des crédits effectivement mis à disposition du ministère : ainsi, les 102,4 milliards de francs présentés en début d’année 1995 au titre des moyens disponibles se sont avérés largement supérieurs aux crédits effectivement disponibles, ce chiffre incluant les 7 milliards de francs de réduction de reports qui n’ont finalement pas été respectés. A cet égard, on ne peut que se féliciter de l’abandon de la notion de moyens disponibles qui obscurcit plus qu’elle ne facilite la présentation budgétaire.

3. — Les différentes approches du budget

L’ampleur prise depuis quelques années par les annulations et les reports de crédits soulève de nombreuses interrogations quant à la portée réelle de l’autorisation parlementaire.

Sans doute, l’exécution 1995 revêt un caractère largement exceptionnel. Elle témoigne cependant d’une évolution préjudiciable à la lisibilité du budget de la Défense. L’importance des mouvements enregistrés en cours d’année, la masse des crédits reportés, les pratiques officielles et officieuses de régulation (gels, mise en réserve des crédits, double visa...) rendent inefficace et sans portée toute tentative de comparaison entre les crédits initialement votés en loi de finances et les dépenses effectivement exécutées.

Le cas spécifique de la gestion 1995 souligne la nécessité d’un cadre qui, sans être facteur de rigidité, facilite la lecture et la compréhension d’un budget fragile du fait de la part importante des dépenses d’équipement, dépenses d’avenir qui entrent parfois en conflit avec la myopie inhérente au budget du fait du principe d’annualité.

A cet égard, la voie réaliste tracée par la loi de programmation 1997-2002 et la revue de programme devraient garantir une meilleure exécution du budget voté. Parallèlement, la mise en place au sein du ministère de la Défense d’un contrôle de gestion, véritable traduction financière de la participation de ce ministère à la réforme de l’Etat, va, en dotant celui-ci des moyens de mieux évaluer la pertinence des dépenses, permettre une dotation et une répartition plus optimales des crédits.

B —  LES AUTRES MOUVEMENTS DE CRÉDITS

1. — Les modifications législatives

Deux lois de finances rectificatives sont intervenues au cours de l’année 1995, au titre desquelles 4,9 milliards de francs de dotations supplémentaires ont été ouverts au titre III du budget du ministère de la Défense.

La loi de finances rectificative du 4 août 1995 a ouvert 2,8 milliards

de francs en crédits de paiement :

— 2,05 milliards de francs au titre des rémunérations d’activité des personnels militaires (chapitres 31-02 et 31-03) ;

— 0,75 milliard de francs pour le fonctionnement des armes et des services (chapitres 34-03, 34-04 et 34-06).

La loi de finances rectificative intervenue en fin d’année a ouvert 2,1 milliards de francs, soit :

— 1,75 milliard de francs au titre des rémunérations d’activité des personnels militaires (chapitre 31-03) ;

— 0,27 milliard de francs pour le fonctionnement des armes et services (chapitres 34-03, 34-04 et 34-06) ;

— 0,08 milliard de francs pour l’alimentation des personnels.

L’objet principal des ouvertures de crédits en cours d’exécution reste le financement des surcoûts liés aux opérations extérieures qui ont atteint 4 178,85 millions de francs en 1995, dont 3 060,26 millions de francs pour le titre III.

L’analyse du tableau ci-après révèle la part prépondérante des opérations menées dans l’ex-Yougoslavie. Les surcoûts liés au mandat confié aux troupes françaises s’élèvent à 2 543,73 millions de francs, majoritairement imputés sur le titre III. Les opérations menées dans le cadre de la coopération avec l’Afrique au Tchad et en Centrafrique représentent, en coût, le deuxième poste de dépenses supplémentaires avec 847,68 millions de francs.

Les surcoûts liés aux opérations extérieures, en progression constante, reflètent la pérennité de l’engagement international de la France en faveur du maintien et du rétablissement de la paix. L’Armée de terre y apporte une contribution majeure, ainsi que l’Armée de l’air.

Il est à noter cependant que les ouvertures obtenues en loi de finances rectificative ayant excédé de 1,8 milliard de francs les surcoûts des opérations extérieures, certaines insuffisances structurelles ont pu être partiellement apurées. C’est notamment le cas des dépenses liées au glissement vieillesse-technicité (GVT), aux sureffectifs et aux loyers de la Gendarmerie. De même, ont pu être contenus les reports de charge de 1995 sur 1996.

SURCOÛTS DES OPÉRATIONS EXTÉRIEURES EN 1995

(en millions de francs)

Théâtres

Section

Titre III

Titre V

Total

 

Air

239,54

350,51

590,05

 

Terre

1 198,98

282,30

1 481,28

“ Ex-Yougoslavie ”

Marine

216,19

152,09

368,28

 

Gendarmerie

32,81

2,51

35,33

 

Commune

57,29

11,50

68,79

 

Total

1 744,82

798,91

2 543,73

 

Air

257,11

39,44

296,55

 

Terre

458,51

61,39

519,90

Tchad et

Marine

0,00

0,00

0,00

Centrafrique

Gendarmerie

2,84

0,00

2,84

 

Commune

23,86

4,53

28,38

 

Total

742,32

105,36

847,68

 

Air

5,10

0,74

5,84

 

Terre

67,07

2,31

69,38

Liban

Marine

0,29

0,00

0,29

 

Gendarmerie

13,97

0,00

13,97

 

Commune

1,46

0,00

1,46

 

Total

87,90

3,05

90,95

 

Air

106,97

196,90

303,87

 

Terre

116,94

8,44

125,38

Autres

Marine

23,25

1,23

24,48

 

Gendarmerie

235,59

4,70

240,30

 

Commune

2,47

0,00

2,47

 

Total

485,23

211,27

696,49

 

Air

608,72

587,59

1 196,31

 

Terre

1 841,51

354,44

2 195,95

Total

Marine

239,73

153,32

393,05

 

Gendarmerie

285,22

7,22

292,44

 

Commune

85,08

16,02

101,11

 

Total

3 060,26

1 118,59

4 178,85

2. — Les modifications réglementaires

La gestion des crédits budgétaires par les différents ministères conduit à modifier tant le montant que la répartition des dotations ouvertes par la loi.

a) Les mouvements modifiant le montant des dotations

Cinq types de mouvements d’origine réglementaire sont susceptibles d’affecter le montant des dotations votées :

— les reports de crédits ;

— les décrets d’avance ;

— les gels et annulations de crédits ;

— les rattachements de fonds de concours ;

— les rétablissements de crédits.

Les reports, gels et annulations ayant fait l’objet d’une analyse spécifique, d’une part, et le budget de la Défense n’ayant pas été concerné par l’unique décret d’avance intervenu en 1995, d’autre part, l’analyse portera sur les deux dernières modifications.

MODIFICATIONS APPORTÉES PAR VOIE RÉGLEMENTAIRE AU MONTANT ET À LA RÉPARTITION DES CRÉDITS EN 1995

A.- PAR TITRE

(en millions de francs)

 

Reports de 1994 à 1995

Reports de 1995 à 1996

Ouvertures

Arrêtés d’annulation

Fonds de concours rattachés

Rétablissements de crédits

Solde des modifications

Titre III

934,105

- 1 528,624

4 900,000

2 726,741

8 533,308

15 565,530

Titre V

10 917,661

- 11 080,554

- 11 765,328

1 554,712

3 336,743

- 7 036,766

Titre VI

452,044

- 259,158

- 127,330

65,556

Sous-total dépenses en capital

11 369,705

- 11 339,712

- 11 892,658

1 554,712

3 336,743

- 6 971,210

Total des crédits militaires

12 303,810

- 12 868,336

4 900,000

- 11 892,658

4 281,453

11 870,051

8 594,320

B.- PAR ARMÉE

(en millions de francs)

 

Reports de 1994

Reports de 1995

Arrêtés d’annulation

Fonds de concours

Rétablis-sements

Répartition

Transferts

Virements

Solde net des

 

à 1995

à 1996

 

rattachés

de crédits

Ouverture

Annulation

Ouverture

Annulation

Ouverture

Annulation

modifications

I.- Commune

7 273,873

- 6 354,962

- 3 927,330

2 978,279

 

4,212

- 33,585

41,737

- 58 591,456

50,000

- 179,000

 

II.- Air

1 335,537

- 1 108,242

- 2 418,000

287,380

 

50,717

0,000

152,400

- 0,065

35,000

0,000

 

III.- Terre

1 480,369

- 2 863,089

- 2 665,000

300,364

 

87,591

0,000

0,000

- 19,250

0,000

0,000

 

IV.- Marine

1 896,580

- 2 085,357

- 2 600,328

187,646

 

0,000

- 47,530

3,600

- 535,788

11,000

0,000

 

V.- Gendarmerie

317,451

- 456,686

- 282,000

527,784

 

10,150

- 57,193

0,000

- 0,762

83,000

0,000

 

Total des crédits militaires

12 303,810

- 12 868,336

- 11 892,658

4 281,453

11 870,051

152,670

- 138,308

197,737

- 59 147,321

179,000

- 179,000

- 55 240,902

• Les fonds de concours

Prévue à l’article 19 de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959, la procédure des fonds de concours constitue une exception au principe de non-affectation des recettes. Elle permet en effet d’affecter à un budget, en cours d’exercice, des crédits “ à partir de fonds versés par des personnes morales ou physiques pour concourir avec ceux de l’Etat à des dépenses d’intérêt public ”. Cette procédure est soumise cependant à une condition précise, à savoir le respect de l’intention de la partie versante dans l’emploi des fonds. En réalité, ces fonds de concours par nature ne représentent qu’une minorité (30,05 % en 1995) de la masse des fonds de concours, dont la plupart sont des fonds de concours par assimilation, autorisés par le second alinéa de l’article 19.

Procédure souple, le rattachement des fonds de concours pose néanmoins deux problèmes au regard de l’efficacité du contrôle parlementaire. D’une part, l’évaluation en loi de finances initiale des produits de fonds de concours ne peut être qu’indicative ; d’autre part, le contrôle parlementaire en la matière est nécessairement un contrôle a posteriori.

En 1995, les produits des fonds de concours ont représenté 4 281,45 millions de francs, en baisse de 17,62 % par rapport à 1994.

FONDS DE CONCOURS

(en millions de francs)

 

Titre III

Titre V

Total

Services communs

2 119,767

858,512

2 978,279

Air

24,915

262,465

287,380

Terre

55,921

244,443

300,364

Mer

19,649

167,997

187,646

Gendarmerie

506,489

21,295

527,784

Total

2 726,741

1 554,712

4 281,453

L’ensemble des fonds de concours rattachés au budget général ayant au contraire progressé de 3 %, la part des produits de fonds de concours consacrée au budget de la Défense s’est donc réduite, passant de 8,20 % à 6,55 % du total des produits rattachés au budget général.

Sur cette somme, 2 726,74 millions de francs ont été rattachés au titre III qui proviennent à 65,24 % du remboursement des soins assurés par le Service de Santé des Armées (61 % en 1994). Les participations des sociétés autoroutières aux frais de fonctionnement des effectifs de Gendarmerie en service sur les réseaux autoroutiers constituent la deuxième source de fonds de concours (18,02 % des fonds rattachés). Sur ce point, il est à noter que, depuis un arrêt du Conseil d’Etat4 ayant annulé le décret central de ce dispositif de rattachement de fonds de concours, les crédits liés à ces frais sont, depuis la loi de finances initiale pour 1998, rattachés au budget général.

Les autres fonds de concours sont d’origines diverses : recettes provenant d’essais effectués par le ministère de la Défense au profit de tiers (163,956 millions de francs), produits de cession de matériels divers (54,877 millions de francs), etc.

ORIGINE DES FONDS RATTACHÉS AU TITRE III

 

En francs

En %

Produits provenant d’aliénations de biens meubles

60 784 992

2,17

Cessions directes de matériels à des tiers

23 513 107

0,84

Rémunérations de services divers

271 742 222

9,72

Prestations SHOM* et contributions autoroutières

505 346 355

18,07

Produits divers (taxes apprentissage, oeuvres sociales, legs)

71 877 465

2,57

Redevances de contrôle sur matériels d’exportation

38 886 730

1,39

Recettes provenant de soins dispensés par le Service de Santé

1 824 590 701

65,24

Total

2 726 741 572

100,00

* Services d’honneur et d’ordre assurés par les militaires de la Garde républicaine de Paris.

ORIGINE DES FONDS RATTACHÉS AU TITRE V

 

En francs

En %

Produits provenant d’aliénations de biens meubles

66 483 302

4,27

Cessions directes de matériels à des tiers

212 979 249

13,70

Produits provenant d’aliénations d’immeubles

134 732 200

8,66

Recettes provenant d’essais dans les établissements Défense

16 295 210

1,05

Infrastructures, contrats d’achats de matériels

65 751 827

4,23

Coopération internationale

887 045 406

57,06

Redevances d’études et concession de licences

111 883 830

7,20

Produits divers

59 540 763

3,83

Total

1 554 711 787

100,00

Le titre V s’est, pour sa part, vu allouer 1 554,711 millions de francs au titre de cette procédure. Ceci traduit une forte baisse par rapport à l’année précédente (- 43,2 %), durant laquelle le gonflement des produits de fonds de concours rattachés au titre V trouvait sa source dans la suppression du compte de commerce “ fabrication d’armements gérée par la Direction des armements terrestres ”. En revanche, en ce qui concerne la structure des produits elle-même, peu de changements apparaissent : les participations étrangères aux frais d’études et de fabrications relatifs aux programmes en coopération représentent toujours plus de la moitié des produits de fonds de concours rattachés au titre V. Il est à noter que ces recettes ne font que transiter par le budget du ministère de la Défense qui, en la matière, a un simple rôle de caissier.

Il est probable qu’en vertu de la réorganisation engagée des armées, qui conduit celles-ci à se défaire d’une partie de leur patrimoine immobilier, les produits de fonds de concours rattachés au titre V seront appelés à progresser d’autant qu’un décret du 26 février 1997 dispose qu’à compter de 1998, 100 % -et non plus seulement 40 % comme c’était le cas depuis 1983- du montant des cessions seront rattachés au budget du ministère de la Défense au titre de la procédure des fonds de concours.

• Les rétablissements de crédits

Egalement prévue à l’article 19 de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959, la procédure de rétablissement de crédits constitue une autre exception au principe de non-affectation des recettes.

Les rétablissements de crédits résultent en grande partie des reversements des trop-perçus sur rémunérations qui traduisent la lenteur des services gestionnaires à enregistrer les mouvements des personnels. Ils témoignent également de la complexité du fonctionnement des comptes de commerce.

Selon la Cour des comptes, 15,143 milliards de francs ont été rétablis au budget général en 1995, dont l’essentiel, soit 12,116 milliards de francs, en faveur de la Défense.

Selon le ministère de la Défense, les atténuations de dépenses, terme comptable qui recouvre la même notion, s’élèvent en 1995 à 11,870 milliards de francs, soit 8,533 milliards de francs pour le titre III et 3,336 milliards de francs pour le titre V. L’écart d’évaluation entre la Cour des comptes et le ministère de la Défense tient aux rétablissements de crédits locaux, la Direction des Services financiers du ministère de la Défense ne comptabilisant pas les rétablissements de crédits effectués au plan local par certains services (outre-mer, Allemagne, certains établissements aéronautiques). La part prépondérante du titre III tient au remboursement de la DGA par les comptes de commerce pour les dépenses de personnels mis à leur service. En effet, les rémunérations et charges sociales des personnels employés par les comptes de commerce (DCN et DCAé) sont directement imputées sur le budget de la Défense (chapitres 31-01, 31-05, 31-96, 33-90 et 33-91) et remboursées par les comptes de commerce à partir des crédits délégués du titre V. Il est certain que les gels appliqués à ce dernier ne simplifient pas la gestion de la trésorerie des comptes de commerce et se sont traduits par des retards importants dans les remboursements qui leur incombent.

ATTÉNUATION DE DÉPENSES DE LA GESTION 1995

(en millions de francs)

 

Gestion 1995

Cessions :

— comptes de commerce de la DGA

— essences

— autres services

6 246,557

100,896

675,475

Sous-total cessions

7 022,928

Reversements de fonds

2 056,593

Changements d’imputation

2 790,530

Total

11 870,051

ATTÉNUATION DE DÉPENSES DE LA GESTION 1995 PAR TITRE

(en millions de francs)

 

Titre III

Titre V

Total

Règlement des cessions consenties

6 771,902

251,026

7 022,928

Reversements de fonds (trop perçus)

902,452

1 154,141

2 056,593

Changements d’imputation

858,954

1 931,576

2 790,530

Total atténuations de dépenses

8 533,308

3 336,743

11 870,051

b) Les mouvements modifiant la répartition des dotations

Trois mouvements sont susceptibles de modifier la répartition des dotations :

— les transferts de crédits ;

— les virements de crédits ;

— les arrêtés de répartition de crédits globaux.

• Les transferts de crédits

Les transferts de crédits permettent d’assouplir la règle de la spécialité par chapitre budgétaire. Ils ont pour objectif de modifier, non la nature de la dépense, mais le service responsable de la dépense. Il s’agit donc d’une modification qui justifie une procédure par simple arrêté.

En 1995, le solde des transferts de crédits s’établit à - 58,950 millions de francs. Ainsi, 198 millions de francs ont été ouverts au titre de cette procédure tandis que le montant des annulations par transfert s’établissait à 59,148 millions de francs. Ce solde s’explique aisément par le transfert traditionnel au budget des charges communes des crédits correspondant à la participation aux charges de pensions (chapitre 32-97) et à la participation du ministère de la Défense aux charges du fonds spécial des ouvriers de l’Etat (chapitre 32-92).

Les transferts ont également concerné les dépenses d’entretien programmé des matériels qui, petit à petit, basculent du titre III vers le titre V. Il s’agit là d’une rationalisation bienvenue mais encore inachevée dans la répartition de crédits jusqu’alors éclatés, sans aucune logique.

Votre rapporteur tient également à souligner l’absence de pertinence de certains transferts dont la récurrence, d’année en année, fausse l’appréciation des moyens dont dispose effectivement le budget de la Défense. C’est le cas du transfert du ministère de la Défense vers le ministère de l’Industrie de la dotation destinée au Commissariat à l’Energie atomique. A ce sujet, on peut s’interroger sur la pertinence de la nomenclature actuelle du budget de la Défense : ne serait-il pas plus logique d’affecter, dès la loi de finances initiale, les crédits au chapitre du budget dont on sait qu’il supportera finalement la dépense ?

La nomenclature budgétaire actuelle présente en effet un double inconvénient. D’un côté, elle fausse la comparaison entre les dépenses effectuées et les crédits initiaux ; d’un autre côté, elle enlève toute pertinence à l’analyse des taux de consommation de crédits, les crédits transférés ne faisant que transiter temporairement par le budget du ministère de la Défense, réduit au rôle de caissier.

• Les virements de crédits

A la différence des transferts de crédits, les virements affectent la nature même de la dépense, constituant ainsi une importante exception au principe de spécialité des crédits.

Leur solde, pour 1995, est nul puisque 179 millions de francs ont été ouverts d’un côté et annulés de l’autre.

• Les arrêtés de répartition de crédits globaux

Trois catégories de crédits sont susceptibles d’être réparties :

— les crédits “ ouverts pour des dépenses dont la répartition par chapitre ne peut être déterminée au moment où ils sont votés ” (article 7 de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959) ;

— les crédits pour “ dépenses éventuelles ” (article 10) ;

— les crédits pour “ dépenses accidentelles ” (article 11).

Leur solde s’établit en 1995, pour le budget de la Défense, à 14,362 millions de francs.

La Cour des comptes évoque en particulier le cas des 7,3 millions de francs en provenance du titre IV, qui viennent alimenter le titre V (chapitre 53-70 “ matériel ”) du budget de la Défense, en contradiction avec l’article de l’ordonnance organique du 2 janvier 1959 qui interdit expressément cette pratique d’un titre à l’autre.

III. —  LES AJUSTEMENTS AU PROJET DE LOI DE RÈGLEMENT

Les articles 5 et 6 du projet de loi de règlement arrêtent le montant définitif des dépenses militaires.

Deux types d’ajustement interviennent :

— les ouvertures de crédits complémentaires ;

— les annulations de crédits non consommés.

Ces deux mouvements modifient le montant des dotations ainsi qu’il est indiqué dans le tableau ci-après.

(en millions de francs)

 

Situation

avant la loi

Ajustements finaux

Dépenses

effectives

 

de règlement

Ouvertures

Annulations

en 1995

Titre III

106 515,60

14,178

1 293,96

105 235,818

Titre V

73 907,14

73 907,140

Titre VI

822,50

822,500

Sous-total titres V et VI

74 729,64

74 729,640

Total

181 245,24

14,178

1 293,96

179 965,458

Les ouvertures de crédits complémentaires s’élèvent à 14,178 millions de francs et viennent abonder, comme il est traditionnel, le chapitre 37-91 “ frais de contentieux - règlement des dommages et accidents du travail ” doté de crédits évaluatifs.

Les annulations de crédits non consommés portent sur un montant de 1 293,96 millions de francs. Elles concernent essentiellement :

— la rémunération des personnels en activité (chapitres 31-01, 31-02, 31-05, 31-94 et 31-96) à hauteur de 478,47 millions de francs ;

— les charges sociales (chapitres 33-90, 33-91 et 33-92), systématiquement surévaluées, pour un montant de 325,53 millions de francs ;

— le fonctionnement des services et du matériel pour 435,37 millions de francs.

SITUATION EN FIN DE GESTION DES CRÉDITS DU TITRE III

(en francs)

Chapitres

Crédits disponibles en fin de gestion

Affermissements obtenus

Reports de crédits obtenus

Crédits perdus

31-01

85 001 362

85 001 362

31-02

29 744 239

29 744 239

31-03

- 33 584 958

33 584 958

31-05

31 964 413

0

31 964 413

31-94

356 411 000

- 33 584 958

322 826 042

31-96

8 934 540

8 934 540

33-90

78 660 475

78 660 475

33-91

227 892 468

227 892 468

33-92

18 983 901

18 983 901

34-01

323 075 586

142 643 115

180 432 471

34-02

849 308 508

797 534 803

51 773 705

34-03

56 131 773

45 640 090

10 491 683

34-04

175 239 885

120 142 552

55 097 333

34-05

77 887 440

33 038 499

44 848 941

34-06

334 994 513

286 078 257

48 916 256

34-10

80 352 164

36 535 679

43 816 485

34-20

50 161 691

50 161 691

36-01

70 006 064

16 849 598

53 156 466

37-31

1 406 338

1 406 338

37-91

- 14 178 584

37-94

6 000

6 000

Total

2 808 398 818

1 528 624 284

1 293 953 118

CONCLUSION

L’exécution du budget de la Défense pour 1995, telle qu’elle ressort de l’examen du projet de loi de règlement, est loin d’être satisfaisante : elle est symptomatique d’une régulation budgétaire souvent aveugle, de méthodes de gestion lourdes et d’une absence de dialogue regrettable entre les ministères du Budget et de la Défense.

La régulation budgétaire a, en 1995, atteint ses limites. Il convient de prendre conscience de l’incompatibilité qui existe entre le caractère aléatoire, imprévisible et souvent brutal des mesures de régulation imposées par le ministère des Finances et la nécessaire stabilité que requiert la mise en oeuvre par le ministère de la Défense d’une action cohérente. La modernisation des procédures financières qu’il entreprend actuellement ne saurait se satisfaire d’un cadre de référence mouvant, reflet de la myopie inhérente à la régulation budgétaire.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné, pour avis, sur le rapport de M. François Lamy, les projets de loi portant règlement définitif des budgets de 1995 (n° 33) et de 1996 (n° 587) le jeudi 18 juin 1998.

M. François Lamy, rapporteur pour avis, a tout d’abord regretté le caractère largement formel de la procédure d’examen des lois de règlement, faisant observer que celles-ci constituent, pour le budget de la Défense, la seule occasion de mener une analyse pertinente sur l’adéquation entre les crédits effectivement ouverts et les orientations fixées par la loi de programmation, eu égard à l’écart très important entre la loi de finances initiale et le budget exécuté. Il a indiqué que l’examen de la partie des lois de règlement relative aux crédits militaires permettait en outre de porter un regard sur les méthodes de gestion du ministère de la Défense, ce qui dépasse les simples enjeux de technique financière pour poser la question de l’effectivité du pouvoir de contrôle du Parlement sur un budget souvent peu transparent et permet de s’interroger sur le lien entre l’évolution des dotations et celle de leur contenu physique.

Il a ensuite présenté conjointement les deux avis sur les lois de règlement pour les budgets de 1995 et 1996, soulignant leur caractère indissociable tant dans leurs modalités que dans les enseignements qu’ils livrent. Il a souligné l’absence de correspondance stricte entre les crédits votés en début d’année et les dépenses nettes du ministère de la Défense en 1995 et 1996, dont l’évolution avait même été inverse de celle présentée en loi de finances initiale, et fait observer que ce décalage tenait exclusivement aux dépenses d’équipement. Il a rappelé qu’alors qu’en loi de finances initiale, le budget de la Défense pour 1996 affichait par rapport à 1995 une baisse de 2,4 % de son montant global et de 6,3 % pour les dépenses d’équipement, les dépenses nettes s’étaient révélées en exécution supérieures à celles de 1995 de 3 % pour l’ensemble des crédits militaires, et de 4,4% pour les dépenses d’équipement. Il a fait observer que la raison essentielle de cette déconnexion entre la loi de finances initiale et le budget exécuté tenait à la très forte régulation appliquée, à l’époque, au budget de la Défense, en conséquence d’une politique budgétaire et fiscale particulièrement rigoureuse. Il a relevé que cette régulation s’était traduite essentiellement par un niveau élevé d’annulations de crédits d’équipement (12 milliards de francs en 1995 et 8,5 milliards de francs en 1996) et par une masse très importante de reports de crédits qui avaient permis au budget de la Défense de jouer le rôle de variable d’ajustement du déficit de l’Etat.

Sans prétendre jeter l’anathème sur le principe même de la régulation budgétaire, M. François Lamy a toutefois déploré ses modalités, mentionnant notamment le caractère verbal des instructions reçues du ministère du Budget par le contrôleur financier sans que, par définition, les gestionnaires du ministère en soient informés. Il a estimé que cette procédure paraissait peu compatible avec les engagements du ministère de la Défense à l’égard de ses fournisseurs et, après avoir rappelé que le paiement de plus de 12 milliards de francs de charges avait été reporté en 1995 sur l’exercice 1996, il a précisé que sur ces 12 milliards de francs 8 milliards avaient entraîné le versement d’intérêts moratoires pour une somme de 812 millions de francs en 1996, soit une augmentation de 157 % par rapport à 1995.

Le rapporteur pour avis a en conséquence souligné que l’exercice 1995 apparaissait catastrophique puisqu’il s’était traduit par une baisse de 15,5 % des crédits d’équipement entre la loi de finances initiale et le budget exécuté, y compris toutefois les transferts vers le budget civil de la recherche. Il a ajouté que l’exercice 1996 s’était révélé tout aussi délicat en raison de trois contraintes : la contrainte financière héritée de l’exercice 1995, la contrainte budgétaire très forte de 1996 et la nécessité de ne pas hypothéquer d’entrée de jeu la loi de programmation 1997-2002.

M. François Lamy, soulignant la rupture introduite par la crise financière issue des exercices 1995 et 1996, a relevé que deux enseignements pouvaient en être tirés.

Il a insisté sur la nécessité de faire évoluer le budget de la Défense dans un cadre pluriannuel clair et réaliste, soulignant que l’exercice 1996 en avait été dépourvu, ce qui avait donné lieu à des errements chaotiques. Il a d’ailleurs fait observer que c’est précisément ce constat, nourri des enseignements tirés de l’échec de la loi de programmation 1995-2000, qui avait présidé à la revue de programmes permettant d’actualiser les données retenues par la loi de programmation militaire 1997-2002.

Il a souligné en outre que la lourdeur des processus de gestion internes au ministère de la Défense avait contribué à amplifier les effets de la régulation et les carences de la programmation, tout en indiquant que des améliorations étaient récemment intervenues sur ce point, notamment à la suite de la signature d’une instruction interministérielle commune aux ministères du Budget et de la Défense. Il a rappelé, à ce propos, que le ministère de la Défense avait, depuis le 1er janvier 1998, adopté la comptabilité spéciale des investissements, en vigueur dans les ministères civils depuis quinze ans déjà. Il a également indiqué qu’était actuellement envisagée une réforme de la nomenclature budgétaire susceptible de permettre un suivi plus fin de l’affectation des crédits d’équipement, et articulée autour de la notion d’“ opération budgétaire d’investissement ”, qui se situerait à un niveau intermédiaire entre l’extrême globalité de certains chapitres du titre V et les quelques 8 000 opérations budgétaires existant actuellement. Il a enfin souligné que les signes de dysfonctionnements les plus flagrants tels que les intérêts moratoires semblaient partiellement résorbés (environ 300 millions de francs en 1997), des mesures ayant par ailleurs été prises pour limiter leurs effets négatifs sur les petites et moyennes entreprises partenaires du ministère de la Défense.

M. François Lamy a estimé que s’il fallait se féliciter de cette évolution des pratiques gestionnaires et budgétaires, il restait néanmoins à espérer qu’elles se traduiraient rapidement dans la présentation des documents budgétaires, notamment à l’occasion de la loi de finances pour 1999.

Suivant les conclusions de son rapporteur pour avis, la Commission a donné un avis favorable à l’adoption des projets de loi portant règlement définitif des budgets de 1995 et de 1996.

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N° 996.– Avis de M. François Lamy (au nom de la commission de la défense), sur le projet de loi (n° 33), portant règlement définitif du budget de 1995.

1 Le titre I est doté de crédits, non pas limitatifs, mais évaluatifs.

2 Ce terme désigne les autorisations de programme auxquelles ne correspondent plus de crédits de paiement identifiés. L’importance de ce phénomène paraît propre au ministère de la Défense.

3 Le total des reports de paiement de 1995 à 1996 s’élève à 12 milliards de francs. 4 milliards de francs correspondent à des factures non encore payées à la clôture de l’exercice 1995 mais ne faisant pas encore courir d’intérêts moratoires du fait du délai légal dont dispose l’administration pour payer ses créanciers.

4 CE, 31 octobre 1996, Mme Wajs et M. Monnier.