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le 5 octobre 1998

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N° 1104

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 1er octobre 1998.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE (1) SUR LE PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE MODIFIÉ PAR LE SÉNAT relatif au Conseil supérieur de la magistrature,

PAR M. JACQUES FLOCH,

Député.

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(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1re lecture : 835, 930 et T.A. 142.

2e lecture : 1017.

Sénat : 1re lecture : 476, 511, et T.A. 156 (1997-1998).

Justice.

La commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République est composée de : Mme Catherine Tasca, présidente ; MM. Pierre Albertini, Gérard Gouzes, Mme Christine Lazerges, vice-présidents ; MM. Richard Cazenave, André Gerin, Arnaud Montebourg, secrétaires ; MM.  Léo Andy, Léon Bertrand, Emile Blessig, Jean-Louis Borloo, Patrick Braouezec, Mme Frédérique Bredin, MM. Jacques Brunhes, Michel Buillard, Dominique Bussereau, Christophe Caresche, Patrice Carvalho, Mme Nicole Catala, MM. Olivier de Chazeaux, Pascal Clément, Jean Codognès, François Colcombet, Michel Crépeau, François Cuillandre, Henri Cuq, Jacky Darne, Camille Darsières, Jean-Claude Decagny, Bernard Derosier, Marc Dolez, Renaud Donnedieu de Vabres, René Dosière, Julien Dray, Renaud Dutreil, Mme Nicole Feidt, MM. Jacques Floch, Raymond Forni, Pierre Frogier, Claude Goasguen, Louis Guédon, Guy Hascoët, Philippe Houillon, Michel Hunault, Henry Jean-Baptiste, Jérôme Lambert, Mme Claudine Ledoux, MM. Jean-Antoine Léonetti, Bruno Le Roux, Mme Raymonde Le Texier, MM. Jacques Limouzy, Thierry Mariani, Louis Mermaz, Jean-Pierre Michel, Ernest Moutoussamy, Henri Nallet, Mme Véronique Neiertz, MM. Robert Pandraud, Christian Paul, Vincent Peillon, Dominique Perben, Henri Plagnol, Didier Quentin, Bernard Roman, Gilbert Roseau, José Rossi, Frantz Taittinger, André Thien Ah Koon, Jean Tiberi, Alain Tourret, André Vallini, Alain Vidalies, Jean-Luc Warsmann.

INTRODUCTION 5

1. Les points d'accord 5

2. Des points de désaccord secondaires 6

3. Un point de désaccord persistant 6

DISCUSSION GÉNÉRALE 7

EXAMEN DES ARTICLES 11

Article premier A (nouveau) (art. 19 de la Constitution) : Actes du Président de la République non soumis à contreseing 11

Article premier (art. 65 de la Constitution) : Composition et attributions du Conseil supérieur de la magistrature 11

Article 2 (art. 90 de la Constitution) : Dispositions transitoires 14

TABLEAU COMPARATIF 15

MESDAMES, MESSIEURS,

Le projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la magistrature nous revient du Sénat dans une rédaction sensiblement différente de celle que nous avions adoptée le 3 juin dernier. Pour que la révision constitutionnelle engagée par le président de la République et le Premier ministre aille à son terme, ce projet doit être voté en termes identiques par les deux assemblées, le Gouvernement n'ayant pas la faculté d'interrompre la navette par la convocation d'une commission mixte paritaire.

Dans ce contexte, il vous est proposé d'accepter les modifications introduites par le Sénat à l'initiative de sa commission des Lois, mais de ne pas entériner l'exclusion des procureurs généraux du champ des compétences du Conseil supérieur de la magistrature résultant de l'adoption par le Sénat d'un sous-amendement de M. Charles Ceccaldi-Raynaud.

1. Les points d'accord

Les deux chambres n'ont pas souhaité modifier le premier alinéa de l'article 65 de la Constitution, qui confie la présidence du Conseil supérieur de la magistrature au Président de la République et la vice-présidence au ministre de la justice.

Mais surtout, une proposition centrale de la réforme, touchant à la composition du Conseil supérieur de la magistrature, a d'emblée rencontré l'accord des deux chambres : toutes deux ont souhaité que les membres extérieurs au corps judiciaire soient majoritaires par rapport aux magistrats. En outre, le Sénat a adhéré à la volonté de consacrer l'unité de la magistrature par l'institution d'une formation plénière du Conseil supérieur de la magistrature, même s'il a maintenu en son sein deux formations spécifiques. Les sénateurs ont également accepté que la nomination des magistrats du parquet soit subordonnée à un avis conforme du C.S.M., en exceptant toutefois les procureurs généraux de cette procédure. Enfin, le Sénat s'est déclaré favorable à ce que le Conseil supérieur de la magistrature devienne le conseil de discipline de l'ensemble des magistrats.

2. Des points de désaccord secondaires

Afin de favoriser un accord entre les deux chambres, il vous est proposé de retenir la plupart des modifications introduites par le Sénat.

A l'article premier A (nouveau), le Sénat a jugé utile de compléter l'article 19 de la Constitution relatif aux actes du chef de l'Etat dispensés de contreseing, afin que la nomination des membres du Conseil supérieur de la magistrature entre explicitement dans cette catégorie.

A l'article premier, le Sénat a apporté des modifications à la composition, au fonctionnement et aux compétences du Conseil supérieur de la magistrature tels qu'ils résultaient du texte voté par l'Assemblée.

Concernant la composition du C.S.M., le Sénat a précisé que les dix magistrats émaneront pour moitié du siège et pour moitié du parquet et que les dix personnalités ne pourront pas appartenir à l'ordre administratif. Par ailleurs, il a supprimé la désignation de deux de ces personnalités par le président du Conseil économique et social.

Sur les compétences du C.S.M., les sénateurs ont précisé que celui-ci fait également des propositions pour les nominations des présidents des tribunaux supérieurs d'appel et des tribunaux de première instance.

Quant au fonctionnement du C.S.M., le Sénat a souhaité maintenir, au sein d'une formation plénière, deux formations distinctes respectivement compétentes à l'égard des magistrats du siège et des magistrats du parquet.

A l'article 2, le Sénat a préféré introduire dans la Constitution même les dispositions transitoires, nécessaires jusqu'à la première réunion du Conseil supérieur de la magistrature dans la composition issue de la présente réforme.

3. Un point de désaccord persistant

Seule une modification apportée par le Sénat au texte issu des travaux de l'Assemblée nationale n'a pas été entérinée par votre commission des Lois, car elle remet en cause l'esprit même de la réforme de la justice engagée par le chef de l'Etat et le Gouvernement. En effet, il apparaît incompatible avec le but poursuivi - lever les soupçons pesant sur l'indépendance de la magistrature - de ne pas faire bénéficier le procureur général près la Cour de cassation et les trente-trois procureurs généraux des mêmes garanties d'indépendance que les cent quatre-vingt-un procureurs de la République.

*

* *

Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

Relevant les grandes qualités de conciliateur que le rapporteur déployait à l'égard de la seconde chambre, M. Louis Mermaz a considéré que les amendements adoptés par le Sénat avaient rompu l'équilibre du projet de loi constitutionnelle. Il a rappelé que la réforme visait à assurer l'indépendance des magistrats, les deux corollaires à ce principe étant la légitimité des juges et leur responsabilité, en l'absence de laquelle on est inéluctablement confronté à des dérives. Après avoir souligné que la majorité des membres du Conseil supérieur de la magistrature seraient désormais choisis en dehors des magistrats de l'ordre judiciaire, il a rappelé que, sous la IVème République, ses membres étaient désignés par l'Assemblée nationale et le Sénat, ce qu'il a jugé la solution la plus démocratique. Il a, par ailleurs, estimé qu'on ne pouvait laisser les procureurs et les procureurs généraux livrés à eux-mêmes, faute de quoi l'Etat républicain serait mis à mal. Enfin, considérant que cette réforme était un signe donné pour l'avenir, il a conclu qu'elle serait sans nul doute suivie d'autres projets.

M. Robert Pandraud s'est interrogé sur l'autorité qui détiendrait le pouvoir de révoquer, le cas échéant, les magistrats du parquet. Rappelant la nécessité de telles révocations dans certaines situations, notamment en période de crise, et observant les dérives que l'indépendance des procureurs a pu engendrer aux Etats-Unis dans un passé très récent, il a considéré que conférer ce pouvoir de révocation à une autorité collégiale conduirait à une situation aberrante. Il a estimé que si ce pouvoir de révocation n'était pas attribué au garde des sceaux, des problèmes apparaîtraient tôt ou tard.

Rappelant le principe selon lequel la justice est rendue au nom du peuple français, M. Philippe Houillon a appelé l'attention des commissaires sur la nécessité d'éviter la confusion des genres, des rôles et des fonctions. Se référant à une déclaration récente des premiers présidents de cours d'appel, il a considéré que le lien entre le peuple français et le parquet devait être préservé. Insistant sur la responsabilité des magistrats qui est le pendant de leur indépendance, il a regretté que le texte soumis à la Commission ne traite pas cette question. Il a ensuite demandé que soient fournis les chiffres relatifs aux procédures disciplinaires intentées contre les magistrats du parquet et du siège. Rappelant les outrances du procureur indépendant Kenneth Starr outre-atlantique et évoquant des risques similaires en France, il a souhaité que l'on s'en tienne au texte adopté par le Sénat.

Indiquant qu'il n'accepterait jamais le démantèlement de l'Etat républicain, M. Michel Crépeau a considéré que les procureurs devaient rester liés au pouvoir politique. Il s'est interrogé sur la responsabilité de ces magistrats et a estimé que le projet de loi, en supprimant le lien entre le parquet et le ministère de la justice, remettait en cause les fondements républicains du droit public.

M. François Colcombet a rappelé qu'avant guerre tous les magistrats étaient nommés par le pouvoir politique, le Conseil supérieur de la magistrature n'ayant été institué qu'en 1946. Il a évoqué les circonstances difficiles dans lesquelles il avait dû évoluer, notamment à cause de conflits récurrents avec le garde des sceaux, le Président de la République, M. Vincent Auriol, jouant le rôle de médiateur dans ces conflits. Il a indiqué qu'en 1958 les pouvoirs attribués douze ans auparavant au Conseil supérieur de la magistrature lui avaient été retirés au profit du Président de la République. Regrettant cette évolution du droit, il a considéré qu'une désignation des membres du Conseil supérieur de la magistrature par le Parlement, tel que cela existait en 1946, était une solution intéressante. Il a, en effet, exprimé la crainte que les nominations effectuées par le Conseil n'écartent les personnalités les plus originales et récompensent plutôt les magistrats formés strictement dans le moule de l'institution. Il a cependant observé que, quelle que soit la procédure retenue, le vivier restait le même et considéré qu'en définitive, le système permettrait d'éviter les excès de conformisme. Pour ce qui concerne la discipline du parquet, en réponse aux interrogations exprimées par M. Robert Pandraud, il a rappelé que l'ordonnance de 1958 reconnaissait au garde des sceaux le pouvoir de suspendre un membre du parquet jusqu'à ce que le conseil de discipline statue. Il a noté que cette procédure avait été mise en _uvre par le passé à l'égard de substituts. En conclusion, il a estimé que le texte proposé par le Gouvernement constituait un progrès indéniable ainsi qu'une étape vers d'autres réformes qui interviendraient nécessairement.

La Présidente a remarqué que les observations formulées sur le manque d'originalité des hauts magistrats pouvaient être aisément transposées à la haute fonction publique.

M. Renaud Donnedieu de Vabres s'est interrogé sur la logique de la chronologie retenue pour la discussion des projets de loi soumis au Parlement, qui donne priorité à la réforme constitutionnelle du Conseil supérieur de la magistrature sur le projet de loi relatif aux relations entre le parquet et la chancellerie. Il a exprimé la crainte que l'adoption du projet de loi constitutionnel, en instituant une procédure symétrique de nominations des magistrats du siège et des magistrats du parquet, ne lie ensuite le législateur pour le reste de la réforme de la justice. Considérant qu'il aurait été souhaitable de choisir entre une réelle séparation du parquet et du siège ou, au contraire, la suppression de toute séparation, il a constaté qu'actuellement certaines affaires mettaient en lumière l'existence d'une symbiose totale entre le parquet, le juge d'instruction et la presse, qui fait peu de cas de la présomption d'innocence.

Convenant de la difficulté de ce débat, M. Henri Nallet a regretté qu'une confusion s'installe dans les esprits entre l'institution américaine du procureur indépendant et celle du parquet français. Il a rappelé que le procureur indépendant américain, désigné par l'attorney général, disposait à la fois des pouvoirs du parquet et d'un juge d'instruction français. Considérant qu'il était nécessaire que le garde des sceaux puisse adresser au parquet des instructions générales pour définir la politique pénale, il a précisé que ce qui était contestable c'était les instructions portant sur des affaires individuelles, soulignant d'ailleurs que, d'ores et déjà, le procureur de la République avait toute liberté pour faire valoir oralement ses réserves par rapport à son réquisitoire écrit. S'agissant de l'ordre des textes, il a déclaré souscrire au choix opéré par la Garde des sceaux, estimant qu'il convenait d'avancer précautionneusement. Jugeant qu'il ne fallait pas entretenir de faux débat sur le rôle du parquet et son indépendance, il a souligné que le vrai problème à l'heure actuelle touchait beaucoup plus aux pouvoirs du juge d'instruction, à ses rapports avec les médias et aux limites de la présomption d'innocence, les réformes à introduire dans ce domaine supposant l'institution d'un véritable habeas corpus.

En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les précisions suivantes :

-  La réforme constitutionnelle ne modifie pas les compétences disciplinaires du Conseil supérieur de la magistrature. A cet égard, il convient de rappeler qu'entre 1991 et 1997, quarante-trois procédures disciplinaires ont été engagées contre des magistrats ; en outre, entre 1994 et 1996, vingt-quatre d'entre eux ont fait l'objet de procédures judiciaires dont cinq ont donné lieu à condamnation.

-  Le Parlement est appelé à examiner en premier lieu la réforme constitutionnelle parce que le Conseil d'Etat refuse de se prononcer sur une loi organique tant que la Constitution n'a pas été préalablement révisée.

-  On peut regretter que le débat d'orientation sur la justice n'ait pas été l'occasion pour les parlementaires de faire connaître leur vision globale concernant la réforme des relations entre le parquet et la chancellerie.

-  Le vécu d'une procédure pénale confirme que le débat essentiel est celui de la présomption d'innocence et notamment celui de la divulgation des informations préalablement à tout jugement.

*

* *

EXAMEN DES ARTICLES

Article premier A (nouveau)

(art. 19 de la Constitution)

Actes du Président de la République
non soumis à contreseing

Le Sénat a adopté un article premier A ayant pour objet de compléter l'article 19 de la Constitution, lequel dresse la liste des actes du Président de la République qui, par exception, ne sont pas contresignés par le Premier ministre et les ministres responsables.

Dans cette liste, qui est constituée de renvois à différents articles de la Constitution, ne figure pas l'article 65 qui prévoit que le chef de l'Etat désigne un membre du membre du Conseil supérieur de la magistrature, et même deux à l'avenir. Or, à l'évidence, il s'agit là, d'un pouvoir propre du Président de la République, tout comme la nomination de trois des membres du Conseil constitutionnel prévue par l'article 56 de la Constitution qui, lui, est explicitement mentionné dans l'article 19 relatif aux actes dispensés de contreseing.

La Commission a adopté l'article premier A (nouveau) sans modification.

Article premier

(art. 65 de la Constitution)

Composition et attributions
du Conseil supérieur de la magistrature

Tout en étant favorable à une présence majoritaire de membres étrangers au corps judiciaire et à l'institution d'une formation plénière, le Sénat a apporté des modifications à la composition, au fonctionnement et aux compétences du Conseil supérieur de la magistrature tels qu'ils résultaient du texte voté par l'Assemblée nationale.

- Sur la composition du C.S.M., le Sénat a précisé que les dix magistrats appartiendraient pour moitié au siège et pour moitié au parquet. Cette disposition est la conséquence nécessaire du rétablissement de deux formations au sein du Conseil et non la traduction d'une plus exacte représentation du corps judiciaire, les magistrats du parquet étant, approximativement, deux fois moins nombreux que ceux du siège.

Concernant les dix personnalités extérieures au corps judiciaire, le Sénat a introduit deux changements. D'une part, il a supprimé la désignation de deux d'entre elles par le président du Conseil économique et social et, en compensation, a porté de deux à quatre le nombre des personnalités désignées par le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes. D'autre part, il a prévu que ces personnalités, qui sont choisies en dehors de l'ordre judiciaire pour ne pas fausser le rapport entre magistrats et non magistrats, ne pourront pas appartenir à l'ordre administratif : cela exclut donc la désignation de membres des juridictions administratives et financières, dont les modalités de nomination échappent pourtant totalement au Conseil supérieur de la magistrature. Au demeurant, un conseiller d'Etat, désigné par le Conseil d'Etat, siégera au Conseil supérieur de la magistrature.

- S'agissant du fonctionnement du C.S.M., le Sénat a souhaité maintenir, au sein d'une formation plénière, deux formations spécifiques compétentes pour les nominations et la discipline, l'une, des magistrats du siège et, l'autre, des magistrats du parquet. Il est vrai que la seconde chambre est à l'origine de cette dichotomie, introduite par la révision constitutionnelle du 27 juillet 1993. Son rapporteur a tenu à souligner à nouveau que " les métiers de magistrats du siège et de magistrats du parquet sont profondément différents et le resteront à l'issue de la réforme ". Quant à la formation plénière, il lui appartiendrait d'émettre des avis sur des questions générales intéressant le statut de la magistrature.

- Sur le plan des compétences, les sénateurs ont précisé que le C.S.M. fait des propositions pour les nominations des présidents des tribunaux supérieurs d'appel et des tribunaux de première instance. Dans les territoires d'outre-mer (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis-et-Futuna) ainsi que dans les collectivités territoriales de Saint-Pierre-et-Miquelon et Mayotte, les tribunaux de première instance se substituent aux tribunaux de grande instance, de même que les tribunaux supérieurs d'appel remplacent les cours d'appel dans les deux collectivités territoriales précitées.

Comme l'a souligné la garde des sceaux lors du débat au Sénat, il n'est pas indispensable de modifier sur ce point l'article 65 de la Constitution, compte tenu de la coutume constitutionnelle incluant les emplois de président de tribunal de première instance et de président de tribunal supérieur d'appel dans le champ du pouvoir de proposition du Conseil supérieur de la magistrature. En outre, la " constitutionnalisation " de ces juridictions rendra plus lourdes d'éventuelles modifications de l'organisation judiciaire propre aux territoires d'outre-mer, à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette précision sur le champ du pouvoir de proposition du C.S.M. aurait pu être apportée par la future loi organique.

La Commission a donc adopté un amendement présenté par le rapporteur tendant à supprimer la référence à la nomination de présidents des tribunaux supérieurs d'appel et des tribunaux de première instance introduite par le Sénat (amendement n° 1).

Par ailleurs, et c'est là une modification de fond, le Sénat a maintenu la nomination des procureurs généraux hors champ de compétences du Conseil supérieur de la magistrature, souhaitant ainsi que leur désignation continue de relever du Conseil des ministres. Cette disposition rompt la cohérence de la réforme qui veut soumettre la nomination de tous les procureurs à un avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, afin d'écarter tout soupçon d'intervention du pouvoir politique. Le Gouvernement souhaitant que les procureurs généraux jouent un rôle plus important dans l'application des directives de politique générale, il est particulièrement important de leur donner des garanties égales à celles dont bénéficieront les autres magistrats du parquet.

C'est pourquoi la Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à revenir sur ce point au texte initial du projet de loi constitutionnelle (amendement n° 2).

- Enfin, le Sénat a souhaité encadrer la possibilité pour le Conseil supérieur de la magistrature de donner des avis, d'une part, en la subordonnant à une demande du Président de la République, d'autre part, en la limitant à des questions d'ordre général intéressant le statut des magistrats. Cela revient à priver le C.S.M. de la possibilité de faire connaître son avis au chef de l'Etat en dehors de toute demande expresse et sur des affaires particulières.

La Commission a adopté l'article premier ainsi modifié.

Article 2

(art. 90 de la Constitution)

Dispositions transitoires

Le Sénat a estimé préférable d'introduire les dispositions transitoires dans le corps même de la Constitution, tout en prévoyant leur abrogation à la date de la première réunion du Conseil supérieur de la magistrature dans la composition issue de la présente réforme.

La Commission a adopté l'article 2 sans modification.

La Commission a ensuite adopté l'ensemble du projet de loi constitutionnelle ainsi modifié.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter le projet de loi constitutionnelle, modifié par le Sénat, relatif au Conseil supérieur de la magistrature (n° 1017).

TABLEAU COMPARATIF

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Texte adopté par l'Assemblée nationale
en première lecture

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Texte adopté par le Sénat
en première lecture

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Propositions de la Commission

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Article 1er A (nouveau)

Dans l'article 19 de la Constitution, les mots : " et 61 " sont remplacés par les mots : " , 61 et 65 ".

Article 1er A

(Sans modification).

Article 1er

L'article 65 de la Constitution est ainsi rédigé :

Article 1er

(Alinéa sans modification).

Article 1er

(Alinéa sans modification).

Art. 65. -  Le Conseil supérieur de la magistrature est présidé par le Président de la République. Le ministre de la justice en est le vice-président de droit. Il peut suppléer le Président de la République.

Art. 65. -  (Alinéa sans modification).

Art. 65. -  (Alinéa sans modification).

" Le Conseil supérieur de la magistrature comprend, outre le Président de la République et le ministre de la justice, dix magistrats du siège et du parquet élus, un conseiller d'Etat désigné par le Conseil d'Etat et dix personnalités n'appartenant ni à l'ordre judiciaire ni au Parlement. Le Président de la République, le Président de l'Assemblée nationale, le Président du Sénat désignent chacun deux personnalités. Deux personnalités sont désignées par le président du Conseil économique et social en dehors de celui-ci. Le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes désignent conjointement deux personnalités.

... justice, cinq magistrats du siège et cinq magistrats du parquet élus, ...

... n'appartenant ni au Parlement ni à l'ordre judiciaire ni à l'ordre administratif. Le Président de la République, le Président de l'Assemblée nationale et le Président du ... ... personnalités. Le vice-président ...

... conjointement quatre personnalités.

(Alinéa sans modification).

 

" La formation compétente à l'égard des magistrats du siège est composée, outre le Président de la République et le ministre de la justice, des cinq magistrats du siège et de l'un des magistrats du parquet, du conseiller d'Etat et de six des personnalités.

(Alinéa sans modification).

 

" La formation compétente à l'égard des magistrats du parquet est composée, outre le Président de la République et le ministre de la justice, des cinq magistrats du parquet et de l'un des magistrats du siège, du conseiller d'Etat et de six des personnalités.

(Alinéa sans modification).

" Le Conseil supérieur de la magistrature fait des propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation, des premiers présidents des cours d'appel et des présidents des tribunaux de grande instance. Les autres magistrats du siège et les magistrats du parquet sont nommés sur son avis conforme.

" La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du siège fait ...

... ins-

tance, des tribunaux supérieurs d'appel et des tribunaux de première instance. Les autres magistrats du siège sont nommés sur son avis conforme.

... ins-

tance. Les ...

(amendement n° 1)

 

" Les magistrats du parquet sont nommés sur l'avis conforme de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du parquet, à l'exception des procureurs généraux.

... parquet.

(amendement n° 2)

" Le Conseil supérieur de la magistrature statue comme conseil de discipline des magistrats. Il est alors présidé par le premier président de la Cour de cassation ou par le procureur général près ladite Cour, selon qu'il statue à l'égard d'un magistrat du siège ou d'un magistrat du parquet.

" La formation compétente à l'égard des magistrats du siège et la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet statuent respectivement comme conseil de discipline des magistrats du siège et des magistrats du parquet. Elles sont alors présidées respectivement par le premier président de la Cour de cassation et par le procureur général près ladite Cour.

(Alinéa sans modification).

 

" Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d'avis formulées par le Président de la République.

(Alinéa sans modification).

" Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article. "

(Alinéa sans modification).

(Alinéa sans modification).

Article 2

Article 2

I. -  L'article 90 de la Constitution est rétabli dans la rédaction suivante :

Article 2

(Sans modification).

Jusqu'à sa première réunion dans la composition issue de la présente loi constitutionnelle, le Conseil supérieur de la magistrature exerce les compétences qui lui sont conférées par l'article 65 de la Constitution dans sa rédaction antérieure à la présente loi constitutionnelle.

Art. 90. -  Jusqu'à ...
... issue de la loi constitu-
tionnelle n°  du , le Conseil ...

... rédaction is-

sue de la loi constitutionnelle n° 93-952 du 27 juillet 1993. "

 
 

II. -  L'article 90 de la Constitution est abrogé à la date de la première réunion du Conseil supérieur de la magistrature dans la composition issue de la présente loi.

 

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N° 1104.- Rapport de M. Jacques Floch (au nom de la commission des lois), sur le projet de loi constitutionnelle, modifié par le Sénat, relatif au Conseil supérieur de la magistrature.


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