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- - SOMMAIRE Pages Document mis en distribution le 10 décembre 1998 ![]() N° 1250 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 ONZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 8 décembre 1998. RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES(1) SUR LES PROPOSITIONS DE LOI : - (n° 1032), ADOPTÉE PAR LE SÉNAT, tendant à renforcer le contrôle de lobligation scolaire, - (n° 1136) de M. Jean-Pierre BRARD, tendant à renforcer le contrôle de lobligation scolaire, PAR M. Patrick LEROY, Député. (1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page. Voir les numéros : Sénat : 391 (1996-1997), 260, 504 et T.A. 161 (1997-1998) Enseignement La commission des affaires culturelles, familiales et sociales est composée de : M. Jean Le Garrec, président ; MM. René Couanau, Jean-Michel Dubernard, Jean-Paul Durieux, Maxime Gremetz, vice-présidents ; Mme Odette Grzegrzulka, MM. Denis Jacquat, Noël Mamère, Patrice Martin-Lalande, secrétaires ; MM. Yvon Abiven, Bernard Accoyer, Mme Sylvie Andrieux, MM. André Aschieri, Gautier Audinot, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Baeumler, Pierre-Christophe Baguet, Jean Bardet, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Mmes Huguette Bello, Yvette Benayoun-Nakache, MM. Patrick Bloche, Alain Bocquet, Mme Marie-Thérèse Boisseau, MM. Jean-Claude Boulard, Bruno Bourg-Broc, Mme Christine Boutin, MM. Jean-Paul Bret, Victor Brial, Yves Bur, Vincent Burroni, Alain Calmat, Pierre Carassus, Pierre Cardo, Roland Carraz, Mmes Véronique Carrion-Bastok, Odette Casanova, MM. Jean-Charles Cavaillé, Bernard Charles, Jean-Marc Chavanne, Jean-François Chossy, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Georges Colombier, François Cornut-Gentille, Mme Martine David, MM. Bernard Davoine, Lucien Degauchy, Marcel Dehoux, Jean Delobel, Jean-Jacques Denis, Franck Dhersin, Dominique Dord, Mme Brigitte Douay, MM. Guy Drut, Nicolas Dupont-Aignan, Yves Durand, René Dutin, Christian Estrosi, Claude Evin, Jean Falala, Jean-Pierre Foucher, Jean-Louis Fousseret, Michel Françaix, Mme Jacqueline Fraysse, MM. Yves Fromion, Germain Gengenwin, Mmes Catherine Génisson, Dominique Gillot, MM. Jean-Pierre Giran, Michel Giraud, Gaëtan Gorce, François Goulard, Jean-Claude Guibal, Mme Paulette Guinchard-Kunstler, M. Francis Hammel, Mme Cécile Helle, MM. Pierre Hellier, Michel Herbillon, Guy Hermier, Mmes Françoise Imbert, Muguette Jacquaint, MM. Maurice Janetti, Serge Janquin, Armand Jung, Bertrand Kern, Christian Kert, Jacques Kossowski, Mme Conchita Lacuey, MM. Jacques Lafleur, Robert Lamy, Edouard Landrain, Pierre Lasbordes, Mme Jacqueline Lazard, MM. Michel Lefait, Maurice Leroy, Patrick Leroy, Maurice Ligot, Gérard Lindeperg, Patrick Malavieille, Mme Gilberte Marin-Moskovitz, MM. Didier Mathus, Jean-François Mattei, Mme Hélène Mignon, MM. Jean-Claude Mignon, Renaud Muselier, Philippe Nauche, Henri Nayrou, Alain Néri, Yves Nicolin, Bernard Outin, Dominique Paillé, Michel Pajon, Michel Péricard, Mme Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Bernard Perrut, Pierre Petit, Mme Catherine Picard, MM. Jean Pontier, Jean-Luc Préel, Alfred Recours, Gilles de Robien, Mme Chantal Robin-Rodrigo, MM. François Rochebloine, Marcel Rogemont, Yves Rome, Jean Rouger, Rudy Salles, André Schneider, Patrick Sève, Michel Tamaya, Pascal Terrasse, Gérard Terrier, Mmes Marisol Touraine, Odette Trupin, MM. Anicet Turinay, Jean Ueberschlag, Jean Valleix, Philippe Vuilque, Jean-Jacques Weber, Mme Marie-Jo Zimmermann. INTRODUCTION 5 I.- LE DISPOSITIF ACTUEL DE CONTRÔLE DE LOBLIGATION SCOLAIRE EST INSUFFISANT 7 1. Les moyens de contrôle existants 7 2. Les difficultés rencontrées 8 II.- LA NÉCESSITÉ DE PRENDRE DES MESURES EFFICACES POUR LUTTER CONTRE LINFLUENCE DES SECTES SUR LÉDUCATION DES ENFANTS 11 1. Un contrôle renforcé 11 a) Dans les familles 11 b) Dans les établissements denseignement privés hors contrat 12 2. Une action de prévention en complément 13 TRAVAUX DE LA COMMISSION 15 I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 15 II.- EXAMEN DES ARTICLES 19 Article premier A : Définition de linstruction obligatoire 19 Article premier B (article 7 de la loi du 28 mars 1882) : Déclaration annuelle du choix dinstruction dans la famille 20 Article premier (article 16 de la loi du 28 mars 1882) : Modalités de contrôle des enfants instruits dans leur famille 21 Article 2 (article 2 de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 et articles 9 et 35 de la loi du 30 octobre 1886) : Modalités de contrôle des établissements denseignement privés hors contrat 23 Article 3 (articles 227-17-1 et 227-17-2 nouveaux du code pénal) : Sanction du non-respect du contrôle de linstruction obligatoire 25 Article 4 : Sanction de la non-déclaration du choix dinstruction et organisation du contrôle de la fréquentation scolaire 27 TABLEAU COMPARATIF 29 Six mille enfants de six à seize ans seraient aujourdhui soustraits à lécole de la République et soumis à lemprise de sectes pour leur éducation. Outre des menaces pour leur santé physique et mentale, ces enfants sont victimes de propagande sectaire et soumis à une manipulation dogmatique sous couvert de programmes éducatifs originaux. Leur avenir est en cause car ils risquent dêtre marginalisés et embrigadés sans disposer de lesprit critique leur permettant de conserver leur liberté de conscience. Il est indispensable de renforcer le contrôle de lenseignement dispensé à ces enfants, pour sassurer que les valeurs fondatrices de la République, la citoyenneté et la laïcité au premier chef, leur soient bien inculquées. Le principe constitutionnel de la liberté de lenseignement ne saurait justifier un trop grand laxisme dans le contrôle du droit de tous à linstruction. La Nation se doit en effet de garantir légal accès de lenfant à linstruction, ainsi que le proclame le treizième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. La France est également tenue dappliquer la Convention internationale relative aux droits de lenfant, signée à New-York le 20 novembre 1989. Celle-ci reconnaît, dans son article 28, le droit de lenfant à léducation et précise, dans son article 29, que léducation de lenfant doit viser à favoriser lépanouissement de la personnalité de lenfant et le développement de ses dons et de ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs potentialités . Cet article 29 prévoit par ailleurs explicitement que léducation dispensée dans les établissements denseignement privés doit être conforme aux normes minimales prescrites par lEtat. Ces normes apparaissent aujourdhui trop lâches car elles permettent à des sectes de dispenser un enseignement dangereux pour lavenir des enfants et leur insertion sociale. La commission denquête de lAssemblée nationale sur les droits de lenfant en France1 avait ainsi préconisé de renforcer le contrôle de lenseignement dispensé aux enfants non scolarisés, en instaurant un dispositif régulier dévaluation des connaissances de lenfant et en dotant à cette fin les inspecteurs de léducation nationale dun véritable pouvoir dinvestigation. Cest pourquoi M. Jean-Pierre Brard et les députés membres du groupe communiste et apparentés ont déposé sur le bureau de lAssemblée nationale, le 14 octobre 1998, une proposition de loi (n° 1136) tendant à renforcer le contrôle de lobligation scolaire. Il sagit en fait de la reprise, presque à lidentique2, du texte dune proposition de loi (n° 1032) adoptée à lunanimité par le Sénat le 29 juin 1998 sur la base des conclusions de sa commission des affaires culturelles et avec laccord du Gouvernement. Ladoption de ce texte marquera une étape importante dans la lutte contre les sectes. Certes, son dispositif pourrait être amélioré et lefficacité des contrôles encore renforcée. Le Sénat peut notamment paraître un peu timoré au nom de la liberté de lenseignement, sur le contenu de laquelle le Conseil constitutionnel ne sest dailleurs jamais prononcé. Pour autant, il sagit daller vite en adoptant ce texte sans modification, car lavenir de milliers denfants est en jeu. Pour promouvoir lautonomie de lenfant, lépanouissement de sa personnalité et son ouverture sur le monde extérieur, lécole de la République doit être privilégiée. Elle seule permet en effet de transmettre lesprit des Lumières face à lobscurantisme des sectes. De manière plus générale, il convient également de lutter contre les facteurs dexclusion qui amènent des enfants à déserter lécole. I.- LE DISPOSITIF ACTUEL DE CONTRÔLE DE LOBLIGATION SCOLAIRE EST INSUFFISANT 1. Les moyens de contrôle existants En vertu de lordonnance n° 59-45 du 6 janvier 1959 portant prolongation de la scolarité obligatoire, lenseignement est obligatoire pour tous les enfants de six à seize ans révolus. Lorsque lenfant atteint lâge de six ans, les parents, le tuteur ou ceux qui en ont la charge doivent donc, quinze jours au moins avant la rentrée des classes, soit le faire inscrire dans une école publique ou privée, soit déclarer au maire et à linspecteur dacadémie que lenfant sera instruit dans sa famille. Cette possibilité de choisir, prévue par larticle 4 de la loi du 28 mars 1882 sur lenseignement primaire, a été confirmée par larticle 3 de lordonnance n° 59-45 du 6 janvier 1959. Larticle 8 de la loi du 28 mars 1882 prévoit que le maire dresse chaque année, daprès les renseignements fournis par les personnes responsables des enfants, la liste de tous les enfants résidant dans sa commune et soumis à lobligation scolaire. Larticle 3 du décret n° 66-104 du 18 février 1966 relatif au contrôle de la fréquentation et de lassiduité scolaires précise les modalités de réalisation de cette liste. Ainsi, les directeurs des établissements scolaires publics ou privés doivent déclarer au maire, à la rentrée des classes, les enfants fréquentant leur établissement et lui fournir, chaque mois, un état des mutations. Ce même article précise que cette liste nominative, mise à jour tous les mois, est consultable (avec possibilité den obtenir une copie) par des personnes qualifiées comme les membres de lenseignement, linspecteur dacadémie ou son délégué. Selon larticle 4 du même décret, le maire et certaines personnes qualifiées (par exemple, les conseillers municipaux ou les enseignants) font connaître à linspecteur dacadémie les infractions à lobligation dinscription dans une école ou de déclaration dinstruction dans la famille. Le contrôle de linstruction donnée dans les familles demeure organisé par larticle 16 de la loi du 28 mars 1882, qui prévoit que les enfants concernés font lobjet dune enquête sommaire diligentée par le maire aux âges de huit, dix et douze ans. Ce dernier peut saisir linspecteur dacadémie, qui est en droit de faire examiner les connaissances des enfants sur les seules notions élémentaires de lecture, décriture et de calcul. Il faut toutefois noter quavant la loi du 11 août 1936 modifiant les lois du 28 mars 1882 et du 30 octobre 1886 quant aux sanctions de lobligation scolaire, cest-à-dire dans sa version initiale, ce contrôle portait sur le contenu des programmes scolaires. Des sanctions pénales spécifiques à lenseignement privé sont également prévues par larticle 7 du décret n° 66-104 du 18 février 1966. Tout instituteur privé et tout directeur décole privée qui, malgré un avertissement écrit de linspecteur dacadémie, ne respecte pas la réglementation sur lobligation scolaire doit être déféré au conseil académique de léducation nationale siégeant en formation contentieuse et disciplinaire pour se voir infliger une peine de suspension provisoire ou dinterdiction provisoire ou définitive denseigner. 2. Les difficultés rencontrées La mise en uvre dun contrôle effectif se heurte à plusieurs obstacles. En premier lieu, les maires sont confrontés à des difficultés sérieuses en pratique pour répertorier quels sont les enfants scolarisés à domicile, du fait que certains parents se soustraient à lobligation de déclaration qui leur est imposée par la loi du 28 mars 1882 et que les familles sont plus mobiles quavant. En deuxième lieu, les contrôles ne peuvent être assurés en application de la loi du 28 mars 1882, quà partir de lâge de huit ans et jusquà lâge de douze ans. De surcroît, au delà des notions élémentaires de lecture, décriture et de calcul visées par la loi, lobjet de ces contrôles demeure incertain, à défaut dune définition précise des savoirs fondamentaux devant composer linstruction obligatoire des enfants de six à seize ans. Par ailleurs, les autorités académiques manquent de moyens, notamment juridiques, pour mener une enquête éducative approfondie. En troisième lieu, les sanctions pénales à lencontre des parents négligeant linstruction de leurs enfants sont légères (1 000 F damende) et non appliquées. La suspension du versement des prestations familiales, prévue également dans ce cas par larticle L. 552-4 du code de la sécurité sociale, ne semble pas non plus dissuasive car certaines familles influencées par des sectes préférant y renoncer delles-mêmes pour échapper à tout contrôle. Enfin, aucun contrôle des connaissances élémentaires des enfants scolarisés dans des établissements privés hors contrat nest prévu par les lois en vigueur (loi du 15 mars 1850 dite loi Falloux , loi du 30 octobre 1886 dite loi Goblet et loi du 31 décembre 1959 dite loi Debré ) qui garantissent aux établissements privés hors contrat une totale liberté pédagogique au nom de la liberté de lenseignement. Les services dinspection du ministère de léducation nationale, de la recherche et de la technologie sont donc juridiquement tenus de limiter leur contrôle aux titres exigés des directeurs et des maîtres, à lobligation scolaire, au respect de lordre public et de la moralité, à la prévention sanitaire et sociale et à la conformité de lenseignement aux bonnes murs, aux lois et à la Constitution. Néanmoins, les contrôles qui ont pu être effectués en pratique révèlent que lenseignement dispensé ne permet pas toujours aux élèves de ces écoles daccéder à lensemble des connaissances prévues par les programmes et que, dans certains cas, le développement psychoaffectif et la socialisation de lenfant risquent dêtre compromis. II.- LA NÉCESSITÉ DE PRENDRE DES MESURES EFFICACES POUR LUTTER CONTRE LINFLUENCE DES SECTES SUR LÉDUCATION DES ENFANTS Les dispositions actuelles apparaissant inadaptées aux problèmes posés par les dérives sectaires, et plus généralement aux exigences de linstruction obligatoire définies dans lordonnance n° 59-65 du 6 janvier 1959 et des finalités du droit à léducation affirmées par la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 dorientation sur léducation, il est indispensable dinstaurer un contrôle annuel, par lautorité académique, de linstruction dispensée dans la famille et dans les écoles privées hors contrat. Ce contrôle doit porter sur le respect du droit de lenfant à linstruction, qui revêt un caractère obligatoire et a pour objet de lui assurer les connaissances de base et de culture générale nécessaires à sa formation, ainsi que les conditions de son épanouissement personnel, professionnel et social. 2 300 familles auraient choisi de donner elles-mêmes linstruction obligatoire à leurs enfants. Il sagit traditionnellement de pouvoir donner une éducation aux enfants gravement malades ou handicapés, ainsi que de tenir compte de la situation particulière des familles itinérantes. Certains parents, notamment issus de la génération de mai 1968, souhaitent aussi utiliser des méthodes denseignement spécifiques - ce phénomène pouvant bénéficier dune nouvelle impulsion avec le développement des nouvelles technologies de linformation et de la communication (NTIC). Sont toutefois également concernés par cette méthode déducation au moins un millier denfants dans des familles ayant une appartenance sectaire. Ce chiffre reste toutefois très approximatif car il est très difficile de cerner précisément les réseaux développés par les sectes. Selon le texte adopté par le Sénat, le contrôle de lobligation scolaire sera tout dabord renforcé au niveau de la déclaration que doivent effectuer les parents qui choisissent de faire donner linstruction à leur enfant dans la famille. Cette déclaration devra désormais être faite chaque année, lors de chaque changement de domicile et à la suite de tout changement de choix dinstruction par les parents, cest-à-dire lorsquun enfant est retiré dun établissement denseignement en cours dannée. Les enfants instruits dans la famille feront également lobjet, dès la première année et au moins une fois par an, dun contrôle de lautorité académique qui permettra de vérifier que le droit de lenfant à linstruction est respecté. Par ailleurs, les maires mèneront tous les deux ans une enquête sociale sur les conditions de linstruction dispensée dans la famille. En cas de contrôle négatif et au terme dune procédure contradictoire, les parents seront mis en demeure dinscrire leur enfant dans létablissement denseignement public ou privé de leur choix. Il est enfin apparu indispensable de relever, en les graduant, les sanctions relatives au manquement à lobligation scolaire et au défaut de déclaration dinstruction dans la famille (actuellement il sagit de simples contraventions de 2ème classe, soit 1 000 F). Le défaut de déclaration sera puni de 10 000 F damende et le refus dinscription dans un établissement en cas de contrôle négatif de linstruction donnée dans la famille de 50 000 F damendement et six mois demprisonnement. b) Dans les établissements denseignement privés hors contrat Les effectifs denfants échappant à lobligation scolaire nétant pas quantifiables, les seuls chiffres disponibles sont ceux des élèves fréquentant les établissements privés hors contrat. On peut tout au plus affirmer quau minimum un millier denfants sont scolarisés dans des écoles privées relevant de sectes, alors quil existe de fortes présomptions dappartenance sectaire pour dautres établissements faisant lobjet denquêtes en cours, accueillant trois à quatre milliers délèves. Lenseignement privé hors contrat est dispensé par des enseignants salariés de droit privé dans des établissements privés nayant pas contracté avec lEtat un contrat simple ou dassociation en application de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959, et de ce fait non soumis aux règles du service public. Dans le premier degré sont considérées comme étant hors contrat les classes où la rémunération des enseignants nest pas prise en charge par lEtat ; dans le second degré, tout établissement qui na aucune classe sous contrat est considéré comme étant hors contrat. Très peu détablissements et délèves sont concernés. Dans le premier degré, à la rentrée 1997, 13 700 enfants étaient scolarisés dans des classes hors contrat en France métropolitaine. Ils représentaient 0,2 % de lensemble des élèves scolarisés dans le premier degré privé et public. Dans le second degré, 25 400 collégiens et lycéens se trouvaient accueillis dans des établissements hors contrats. Ils représentaient 0,5 % de lensemble des élèves scolarisés dans les établissements privés et publics. Les données disponibles sur les résultats scolaires des établissements hors contrat concernent essentiellement les résultats au baccalauréat. Les taux de réussite sont nettement inférieurs à ceux observés dans les établissements denseignement publics et les établissements denseignement privés sous contrat, la différence étant moins marquée dans les séries technologiques et professionnelles. Pour renforcer le contrôle exercé par lEtat sur les établissements denseignement privés hors contrat, le texte adopté par le Sénat autorise lévaluation par les autorités académiques de lenseignement dispensé dans ces établissements et impose à cet enseignement de respecter lobjet de linstruction obligatoire. Ce contrôle, qui pourra avoir lieu une seule fois par an, sera laissé à la libre appréciation de linspecteur dacadémie. On peut regretter ce caractère facultatif, alors que le contrôle des enfants instruits dans leur famille est obligatoire et doit être effectué au moins une fois par an. Par ailleurs, il est institué une procédure contradictoire de vérification puis de mise en demeure de létablissement par les autorités académiques. Les parents des élèves pourront aussi être mis en demeure dinscrire leur enfant dans un autre établissement de leur choix en cas de contrôle négatif. Il ne faudrait cependant pas que les délais fixés soient trop longs, afin de ne pas retarder lenclenchement dune action judiciaire lorsquelle est nécessaire. Il est en effet également proposé de créer une nouvelle infraction délictuelle incriminant les directeurs détablissement privé qui ne respecteraient pas, dans les classes hors contrat, lobjet du droit de lenfant à linstruction, en prévoyant également la possibilité de mettre en cause la responsabilité pénale des personnes morales, cest-à-dire des organisations sectaires soutenant un tel enseignement. 2. Une action de prévention en complément Le ministère de léducation nationale, de la recherche et de la technologie se préoccupe depuis plusieurs années des problèmes de dérives sectaires rencontrées non seulement dans certaines écoles privées et dans des familles qui entendent instruire leurs enfants à domicile, mais également au sein même du système éducatif public. Il faut notamment veiller à ce que la vigilance ne sarrête pas à la porte des écoles mais concerne aussi les activités périscolaires et le soutien scolaire. A la suite du rapport de la commission denquête de lAssemblée nationale sur les sectes en France3 qui dénonçait notamment labsence dun dispositif général dinformation des élèves sur les sectes dans le cadre de léducation nationale, il a ainsi été créé en septembre 1996 une Cellule chargée des Relations avec lobservatoire Interministériel sur les Sectes4 (CRIS). La CRIS, qui est dirigée par M. Daniel Groscolas, inspecteur général de léducation nationale, a pour mission de recueillir et analyser les données disponibles sur les agissements des sectes et leur tentative dimplantation au sein du système scolaire et universitaire, de constituer pour les services académiques un centre de ressources susceptibles de fournir informations et conseils et de concevoir des actions de sensibilisation en direction des personnels. Elle a ainsi permis dempêcher la diffusion de 14 000 brochures émanant dorganisations sectaires. Le dispositif mis en place par cette structure sappuie sur la vigilance des personnels de léducation nationale attentifs au respect du principe de laïcité du système éducatif. Depuis 1996 également, lensemble des personnels dinspection bénéficient, dans le cadre de leur formation initiale, dune formation sur le traitement des tentatives dorganisation sectaire en direction du système éducatif. Ce type de formation devrait progressivement être organisé au profit de lensemble des personnels lors de leurs formations initiales et continues. Il sagirait notamment de permettre aux documentalistes affectés dans les centres de documentation et dinformation (CDI) de pouvoir repérer les brochures dorigine sectaire. La sensibilisation des élèves au phénomène sectaire est actuellement expérimentée dans un certain nombre de lycées, au travers de réunions dinformation notamment, et devrait être progressivement développée. Elle pourrait prendre place dans le cadre des programmes dinstruction civique, ainsi que le suggérait la commission denquête de lAssemblée nationale sur les sectes. Limportance donnée depuis lannée scolaire 1997-1998 à léducation à la citoyenneté, qui vise le développement du civisme, de lesprit critique et lapprentissage de la vie sociale, constitue la meilleure prévention contre les risques de prosélytismes sectaires et de manipulations mentales. Les comités déducation à la santé et à la citoyenneté, créés par la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 dorientation relative à la lutte contre les exclusions, pourraient également être un lieu déchange sur ce thème. En tout état de cause, il est indispensable de préserver à tous les niveaux la laïcité de lécole de la République. La commission a examiné les propositions de loi au cours de sa séance du mardi 8 décembre 1998. Un débat a suivi lexposé du rapporteur. M. Jean-Pierre Brard a considéré que le chiffre de 6 000 enfants cité par le rapporteur est une estimation minimale du nombre denfants soustraits aujourdhui au système scolaire. Très souvent en effet, les enfants éduqués dans leur famille ne sont pas déclarés, ce qui ne permet pas de procéder à une évaluation satisfaisante. La proposition de loi n° 1032 a été adoptée par le Sénat à lunanimité et, si ce texte aurait pu faire preuve dune plus grande ambition, il semble néanmoins nécessaire de ladopter sans modification afin dassurer son application dans les meilleurs délais. Il permettra en effet de répondre de façon immédiate et précise au problème spécifique des enfants soumis à lemprise des sectes et menacés, de ce fait, dans leur santé physique et mentale. LAssemblée nationale va par ailleurs continuer son travail sur les sectes avec la prochaine création dune commission denquête sur les circuits de financement de ces organisations. Mme Catherine Picard sest déclarée favorable à la proposition de loi adoptée par le Sénat et a considéré quil convenait de ladopter sans modification. Le texte présenté par M. Jean-Pierre Brard, sil reprend lessentiel du dispositif sénatorial, a linconvénient de comporter un article supplémentaire permettant aux associations qui défendent les droits des enfants de se porter partie civile dans les procès relatifs à lobligation scolaire, alors quune proposition de loi prochainement déposée devant lAssemblée nationale et traitant des droits des victimes reprendra cette question de manière plus générale et plus satisfaisante. Le président Jean Le Garrec a rappelé que seule la proposition de loi adoptée par le Sénat était soumise au vote de la commission et que celle-ci naurait donc pas à se prononcer sur cet article du texte de M. Jean-Pierre Brard. M. Bruno Bourg-Broc, après avoir approuvé le contenu de la proposition de loi adoptée par le Sénat ainsi que la nécessité de son application rapide, a fait trois observations : - On peut tout dabord se demander si, en termes daffichage, il est opportun de lier lobjet de la proposition de loi et la lutte contre les sectes. - Il nest pas certain que les maires disposent des compétences et des moyens nécessaires pour exercer le contrôle des conditions de linstruction dispensée aux enfants par leurs familles ; une telle responsabilité aurait peut-être dû être confiée aux autorités académiques. - Enfin, le texte impose aux familles en matière dinstruction une obligation de résultat qui nexistait pas auparavant et qui donnera lieu à un contrôle de linspection dacadémie, alors que 20 % des élèves scolarisés en sixième ne maîtrisent pas les connaissances de base. Mme Gilberte Marin-Moskovitz a regretté que ce texte soit adopté de façon aussi rapide car, même si on peut comprendre lintérêt dune application immédiate, des questions demeurent néanmoins en suspens, tout particulièrement en ce qui concerne la vérification par les autorités académiques de la qualité de lenseignement dispensé aux enfants non scolarisés ou scolarisés dans des établissements denseignement privés hors contrat, ainsi que la responsabilité conférée aux maires en matière de contrôle de linstruction des enfants par leurs familles. Sur ce dernier point, lexpérience montre que les municipalités sont bien souvent démunies pour intervenir auprès des familles enrôlées dans des sectes. La proposition de loi relève donc beaucoup dun vu pieux. En réponse aux intervenants, le rapporteur a apporté les éléments dinformation suivants : - La proposition de loi, dont lobjectif majeur est dassurer un meilleur contrôle sur les établissements denseignement privés hors contrat, permettra à la France dappliquer de façon plus satisfaisante la Convention internationale relative aux droits de lenfant. - Il est uniquement demandé aux maires de mener une enquête à caractère social sur les enfants instruits dans leur famille, ce qui entre tout à fait dans le cadre de leurs possibilités. - Lenquête pédagogique relèvera quant à elle des autorités académiques, qui disposent déjà de nombreux repères et critères pour évaluer la qualité et le niveau de lenseignement dispensé dans les familles en comparaison avec lenseignement dispensé dans les écoles et le niveau qui y est atteint par les élèves. M. Bruno Bourg-Broc a noté que le contrôle de lobligation scolaire repose sur lidée selon laquelle les mairies disposent toutes de services leur permettant dassumer un tel contrôle. Or les communes de petite taille en sont dépourvues pour la plupart dentre elles. M. Jean-Pierre Brard a estimé que le débat ne devait pas porter sur la question de lobligation scolaire en général car le texte examiné a bien pour objet de renforcer les moyens de protéger les enfants victimes de sectes et empêchés de recevoir une instruction normale. Il sagit dune question essentielle sur laquelle les clivages partisans doivent être dépassés. Le président Jean Le Garrec a considéré que ce sujet méritait effectivement de faire lobjet dun consensus au Parlement et quil était aujourdhui nécessaire dintervenir au plus vite. Voter conforme la proposition de loi déjà examinée par le Sénat favorisera une entrée en application rapide du texte. La commission est ensuite passée à lexamen des articles de la proposition de loi adoptée par le Sénat (n° 1032). Article premier A Définition de linstruction obligatoire Cet article résulte de ladoption par le Sénat dun amendement présenté par le Gouvernement. Il vise à rappeler solennellement le droit de lenfant à linstruction et à réaffirmer le rôle privilégié de lécole pour dispenser lenseignement. En effet, il convient de fonder le renforcement du contrôle de lobligation scolaire sur une définition précise de ce en quoi consiste linstruction obligatoire. Le premier alinéa de cet article reprend les dispositions législatives déjà existantes qui définissent la nature et lobjet du droit de lenfant à linstruction. Larticle 2 de lordonnance n° 59-45 du 6 janvier 1959 portant prolongation de la scolarité obligatoire précise que linstruction obligatoire a pour objet léducation et les connaissances de base, les éléments de la culture générale et, selon les choix, de la formation professionnelle et technique . Le deuxième alinéa de larticle premier de la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 dorientation sur léducation prévoit quant à lui que le droit à léducation est garanti à chacun afin de lui permettre de développer sa personnalité, délever son niveau de formation initiale et continue, de sinsérer dans la vie sociale et professionnelle, dexercer sa citoyenneté . Ces dispositions sont ici combinées en une seule phrase, sans apporter délément nouveau au droit existant. Le deuxième alinéa de cet article exprime plus explicitement un choix, en indiquant que linstruction obligatoire est assurée en premier lieu dans les établissements denseignement, quils soient publics ou privés. Un tel choix est déjà formulé au cinquième alinéa de larticle premier de la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 qui précise que les écoles, les collèges, les lycées et les établissements denseignement supérieur [ces deux dernières catégories détablissement nentrant toutefois pas dans le champ de linstruction obligatoire] sont chargés de transmettre et de faire acquérir connaissances et méthodes de travail . La préférence qui est ici explicitée doit sapprécier au regard de larticle 3 de lordonnance n°59-45 du 6 janvier 1959 qui offre une alternative, en indiquant que linstruction obligatoire peut être donné soit dans les établissements ou écoles publics ou libres, soit dans les familles par les parents, ou lun dentre eux, ou toute personne de leur choix. Sans remettre en cause limportance du rôle de la famille dans léducation des enfants, il faut en effet privilégier lenseignement à lécole, qui est un véritable lieu dintégration et de socialisation pour les élèves. * La commission a adopté cet article sans modification. Article premier B (article 7 de la loi du 28 mars 1882) Déclaration annuelle du choix dinstruction dans la famille Cet article résulte également de ladoption par le Sénat dun amendement du Gouvernement. Il propose une nouvelle rédaction du début de larticle 7 de la loi du 28 mars 1882 sur lenseignement primaire, à la fois pour en actualiser les dispositions et pour renforcer le caractère contraignant du contrôle de lobligation scolaire. Dans sa rédaction actuelle, larticle 7 de la loi du 28 mars 1882 prévoit que les personnes responsables de tout enfant ayant atteint lâge de six ans doivent, soit le faire inscrire dans une école publique ou privée, soit déclarer au maire et à linspecteur dacadémie que linstruction lui sera donnée dans la famille. Les mêmes formalités doivent être accomplies chaque fois que la famille change de résidence. Dans ce dernier cas, la nouvelle demande dinscription doit sappuyer sur le livret scolaire de lélève. Cette rédaction est modernisée sur trois points. Il est dabord fait référence à la période de scolarité obligatoire définie par larticle premier de lordonnance n° 59-45 du 6 janvier 1959, soit entre six et seize ans. Ensuite, la dénomination exacte de linspecteur dacadémie, qui est directeur des services départementaux de léducation nationale, est précisée. Enfin, la référence au livret scolaire est supprimée, compte tenu de son abrogation par le décret n° 66-104 du 18 février 1966 relatif au contrôle de la fréquentation et de lassiduité scolaires. Le contrôle de lobligation scolaire est renforcé au niveau de la déclaration que doivent effectuer les parents qui choisissent de faire donner linstruction à leur enfant dans la famille, dans un double sens. Cette déclaration devra désormais être faite annuellement, à chaque rentrée scolaire, et non plus seulement une fois à lâge de six ans et lors de chaque changement de domicile. De plus, cette déclaration sera exigée à la suite de tout changement de choix dinstruction par les parents, cest-à-dire lorsquun enfant est retiré dun établissement denseignement en cours dannée. Cette généralisation de lobligation déclarative des parents doit permettre un meilleur suivi de lensemble de la population scolaire. Son non-respect fait lobjet dune sanction pénale prévue au premier alinéa de larticle 4 de la présente proposition de loi. Elle peut également toujours entraîner la suspension du versement des prestations familiales; en application de larticle L. 552-4 du code de la sécurité sociale. * La commission a adopté cet article sans modification. Article premier (article 16 de la loi du 28 mars 1882) Modalités de contrôle des enfants instruits dans leur famille Cet article a pour objet de renforcer la contrôle de linstruction donnée aux enfants dans leur famille. Pour cela, il propose une nouvelle rédaction de larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 sur lenseignement primaire qui organise ce contrôle. Le premier alinéa de larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 prévoit la réalisation dune enquête à caractère social par la mairie. Cette enquête doit permettre de constater que les enfants instruits dans leur famille ne sont pas éduqués dans des conditions portant atteinte à leur santé et à leur développement, ainsi que de connaître les raisons invoquées par les parents pour avoir choisi ce mode dinstruction. Dans la rédaction actuelle de cet alinéa (qui résulte de la loi du 11 août 1936 modifiant les lois du 28 mars 1882 et du 30 octobre 1886 quant aux sanctions de lobligation scolaire), cette enquête na lieu que trois fois, à lâge de huit ans, de dix ans et de douze ans, compte tenu du fait que la scolarité obligatoire sarrêtait à quatorze ans à lépoque. Dans sa nouvelle rédaction, cette enquête pourra se dérouler dès la première année dinstruction dans la famille, puis tous les deux ans jusquà seize ans. Elle sera ainsi engagée le plus tôt possible et prolongée jusquau terme actuel de la scolarité obligatoire. Le deuxième alinéa nouveau de larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 prévoit lintervention du préfet en cas de carence du maire. Le représentant de lEtat dans le département pourra se substituer à lautorité municipale pour diligenter lenquête lorsque celle-ci na pas été effectuée, par oubli ou par omission volontaire. Il sagit dune garantie que le contrôle soit effectivement réalisé, notamment dans de petites communes où un élu peut avoir quelque appréhension à se rendre chez certains de ses administrés vivant de façon marginale. Le troisième alinéa nouveau de larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 met en place un contrôle annuel systématique des connaissances des enfants instruits dans leur famille. Ce contrôle se substitue à la simple faculté offerte, par lactuel deuxième alinéa de larticle 16 de la même loi, à linspecteur dacadémie de diligenter un examen intellectuel sommaire de lenfant. Linspecteur sera désormais tenu de faire vérifier, au moins une fois par an, que lenseignement assuré dans la famille est conforme au droit de lenfant à linstruction défini à larticle premier A de la présente proposition de loi. Ce contrôle doit sexercer à partir du troisième mois suivant la déclaration dinstruction par la famille, cest-à-dire au plus tôt pour permettre le cas échéant dintégrer sans retard lenfant dans le système scolaire, ainsi quà tout moment jugé utile par linspecteur dacadémie. Il sera notamment effectué sans délai en cas de défaut de déclaration dinstruction. Il pourra être exercé dans tous les lieux où des enseignements sont donnés à lenfant, au domicile des parents mais aussi chez un voisin ou dans une famille proche par exemple. Lantépénultième alinéa de larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 dans sa nouvelle rédaction prévoit que le contenu des connaissances requis des enfants au titre de linstruction obligatoire est défini par un décret simple. Celui-ci explicitera en fait le contenu du droit à linstruction rappelé à larticle premier A de la présente proposition de loi. Cette disposition est à rapprocher de lactuel deuxième alinéa de larticle 16, qui fait uniquement référence à des notions élémentaires de lecture, décriture et de calcul . Il faut toutefois rappeler quil nexiste plus de programmes officiels à lheure actuelle. Les orientations pédagogiques et la conception générale des enseignements pour chaque classe sont définies par arrêté du ministre chargé de léducation, après avis du Conseil national des programmes. Lavant-dernier alinéa de larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 dans sa nouvelle rédaction est la reprise, en des termes modernisés, du dernier alinéa de larticle 16 dans sa version actuelle. Il prévoit les modalités de la notification aux parents des résultats du contrôle des connaissances qui a été effectué. Les parents sont dès lors tenus, dans un délai fixé par linspecteur dacadémie, de fournir des explications ou daméliorer la situation éducative de leur enfant en cas de contrôle négatif. Enfin, le dernier alinéa nouveau de larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 institue une nouvelle procédure contradictoire de mise en demeure des parents dinscrire leur enfant dans létablissement denseignement public ou privé de leur choix. Cette procédure est engagée, à lexpiration dun nouveau délai, si les résultats du contrôle des connaissances réalisé et les explications fournies par la famille sont jugés insuffisants par linspecteur dacadémie. La collectivité est en effet garante du respect du droit à linstruction de chaque enfant et elle doit pouvoir se substituer à la famille si celle-ci est défaillante dans son rôle éducatif. Il ne sagit pas pour autant dune forme de mise sous tutelle des parents car ceux-ci conservent leur liberté de choix dun établissement scolaire. La sanction pénale de cette procédure est instituée à larticle 3 de la présente proposition de loi. * La commission a adopté cet article sans modification. Article 2 (article 2 de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 et Modalités de contrôle des établissements denseignement privés Cet article a pour objet de renforcer le contrôle exercé par lEtat sur les établissements denseignement privés qui ne lui sont pas liés par contrat en application de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 sur les rapports entre lEtat et les établissements denseignement privés. Il autorise lévaluation par les autorités académiques de lenseignement dispensé dans ces établissements et impose à cet enseignement de respecter lobjet de linstruction obligatoire. Le I de cet article complète larticle 2 de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959. Cet article limite le contrôle de lEtat sur les établissements denseignement privés hors contrat aux titres exigés des directeurs et des maîtres [pour ouvrir un tel établissement et y enseigner], à lobligation scolaire [cest-à-dire à lâge des élèves], au respect de lordre public et des bonnes moeurs et à la prévention sanitaire et sociale . Il est proposé que ce contrôle soit également étendu à linstruction obligatoire . En effet, la liste précédente est strictement limitative compte tenu du principe de la liberté de lenseignement. Il convient donc de prévoir explicitement la possibilité dun contrôle du droit de chaque enfant à linstruction, quel que soit létablissement où lenseignement est dispensé. Le II de cet article complète également larticle 2 de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 par cinq nouveaux alinéas, afin de définir les modalités du contrôle de linstruction obligatoire institué par le I. Ce contrôle effectué au sein même de létablissement peut avoir lieu une seule fois par an. Il est laissé à la libre appréciation de linspecteur dacadémie, qui décide en opportunité sil est nécessaire de contrôler tel ou tel établissement. On peut regretter que ce contrôle soit seulement facultatif, alors que le contrôle des enfants instruits dans leur famille est obligatoire et doit être effectué au moins une fois par an. Lobjet du contrôle est limité à la vérification du respect du droit de lenfant à linstruction par lenseignement dispensé dans létablissement. Les normes de référence sont constituées par larticle 2 de lordonnance n° 59-45 du 6 janvier 1959 portant prolongation de la scolarité obligatoire et par larticle premier de la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 dorientation sur léducation. Celles-ci ayant été rappelées et combinées à larticle premier A de la présente proposition de loi, il aurait été préférable de renvoyer directement à cet article, dautant plus quil est également fait référence à lobjet de linstruction obligatoire tel que défini par larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 sur lenseignement primaire, qui se contente lui-même de renvoyer à larticle premier A. Les résultats du contrôle sont notifiés au directeur de létablissement denseignement privé hors contrat. Celui-ci est dès lors tenu, dans un délai fixé par linspecteur dacadémie, de fournir des explications ou daméliorer la situation de lenseignement dispensé aux élèves en cas de contrôle négatif. A lexpiration de ce premier délai et si les manquements persistent, lautorité académique met en demeure le directeur de létablissement de faire dispenser un enseignement conforme à lobjet de linstruction obligatoire. Ce nest que si cette mise en demeure reste sans effet que linspecteur dacadémie saisit le procureur de la République de ces faits, qui constituent une infraction pénale en vertu de larticle 3 de la présente proposition de loi. Dans ce cas, les parents des élèves sont à leur tour mis en demeure dinscrire leur enfant dans un autre établissement de leur choix. Cette procédure contradictoire de contrôle puis de mise en demeure est similaire à celle mise en place pour les enfants instruits dans leur famille. Si elle permet de respecter le droit du directeur de létablissement denseignement privé hors contrat de faire connaître ses arguments, il ne faudrait pas que les délais fixés soient trop longs, afin de ne pas retarder lenclenchement dune action judiciaire lorsquelle est nécessaire. Léducation des enfants est en effet en jeu. Le III de cet article tire les conséquences de linstitution dun contrôle sur lenseignement dispensé dans les établissements denseignement privés. Seules les écoles élémentaires sont concernées par cette modification législative, les établissements du second degré relevant toujours de la loi du 15 mars 1850 sur lenseignement (dite loi Falloux ) qui nest pas modifiée. Dans son A, il modifie larticle 9 de la loi du 30 octobre 1886 sur lorganisation de lenseignement primaire qui définit le mode dinspection des écoles élémentaire, quelles soient publiques ou privées. Le onzième alinéa de cet article limite linspection des écoles privées à la moralité, à lhygiène et à la salubrité et au respect par lenseignement dispensé de la morale, de la Constitution et des lois. Il est proposé que linspection de lenseignement permette désormais de vérifier quil respecte en particulier le droit à linstruction obligatoire, tel quil est défini par les lois déjà rappelées. Dans son B, il modifie larticle 35 de la même loi qui pose le principe de la liberté de choix des méthodes des programmes et des livres par les directeurs des écoles élémentaires privées. De fait, cette liberté de choix ne concerne plus aujourdhui que les établissements hors contrat, puisque les établissements sous contrat simple ou dassociation, sont tenus de respecter les programmes pédagogiques fixés par lEtat en application de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959. Il est proposé dindiquer que cette liberté de choix est limitée par lobligation de respecter lobjet de linstruction obligatoire, tel quil est défini par larticle 16 de la loi du 28 mars 1882, qui renvoie lui-même - ainsi quil a déjà été indiqué - à larticle premier A de la présente proposition de loi. Par ailleurs, cette nouvelle rédaction permet dabroger des dispositions sur les livres scolaires qui sont obsolètes depuis 1946. * La commission a adopté cet article sans modification. Article 3 (articles 227-17-1 et 227-17-2 nouveaux du code pénal) Sanction du non-respect du contrôle de linstruction obligatoire Cet article prévoit des sanctions pénales en cas de manquement aux obligations résultant, pour les parents ou les établissements denseignement privés hors contrat, des articles premier et 2 de la présente proposition de loi. Pour cela, il insère deux nouveaux articles au sein de la section IV du chapitre VII du titre II du livre II du code pénal, qui concerne les délits en cas de mise en péril des mineurs. Le premier alinéa de larticle 227-17-1 nouveau du code pénal sanctionne le non-respect du dernier alinéa de larticle 16 de la loi du 28 mars 1882 sur lenseignement primaire, tel quil résulte de larticle premier de la présente proposition de loi. Toute personne responsable dun enfant instruit dans sa famille, quil sagisse des parents ou de toute autre personne exerçant à son égard lautorité parentale ou une autorité de fait de façon continue, sera punie de six mois demprisonnement et de 50 000 francs damende si elle ninscrit pas son enfant dans un établissement denseignement après mise en demeure de le faire effectuer par linspecteur dacadémie. Il sagit dune nouvelle incrimination correctionnelle spécifique, moins sévèrement réprimée que les manquements graves à la santé, à la sécurité, à la moralité ou à léducation dun mineur qui sont sanctionnés par larticle 227-17 du code pénal. Le deuxième alinéa de larticle 227-17-1 nouveau du code pénal sanctionne le non-respect de lavant-dernier alinéa de larticle 2 de la loi n° 59-1557 du 31 décembre 1959 sur les rapports entre lEtat et les établissements denseignement privés, tel quil résulte de larticle 2 de la présente proposition de loi. Tout directeur dun établissement hors contrat qui na pas pris les dispositions nécessaires pour que lenseignement qui y est dispensé soit reconnu conforme à lobjet de linstruction obligatoire ou, à défaut, na pas fermé les classes correspondantes après mise en demeure par linspecteur dacadémie, sera également puni de six mois demprisonnement et de 50 000 F damende. De surcroît, le tribunal peut interdire à cette personne denseigner ou de diriger un établissement à lavenir et prononcer la fermeture de létablissement concerné. La fermeture judiciaire dun établissement denseignement privé est déjà prévue dans de nombreux cas douvertures illégales ou dobstacles à inspection. Linterdiction de diriger ou denseigner en tant que sanction pénale complémentaire est quant à elle pleinement justifiée par les conditions très peu contraignantes qui sont requises pour ouvrir un établissement privé (une simple obligation déclarative suffit). Larticle 227-17-2 nouveau du code pénal prévoit la possibilité pour une personne morale dêtre déclarée pénalement responsable de linfraction de non-respect du contrôle de linstruction obligatoire dans un établissement denseignement privé hors contrat, définie au deuxième alinéa de larticle 227-17-1 du même code, qui aurait été commise pour son compte par un de ses représentants. Au-delà de la responsabilité individuelle du directeur de létablissement qui nest souvent quun simple exécutant, il importe en effet datteindre directement et de sanctionner lorganisation sectaire qui a fait dispenser un enseignement contraire à lobjet de linstruction obligatoire. Il faut surtout empêcher que les activités illégales dun établissement à ce titre puissent se poursuivre sur un autre site relevant de la même personne morale. Au sens de larticle 121-7 du code pénal, la personne morale peut être considérée comme complice du délit de dispenser un enseignement contraire à linstruction obligatoire par laide ou lassistance quelle a pu apporter, notamment par son organisation, à lexécution de linfraction. Les peines correctionnelles qui lui sont alors applicables sont les suivantes : - lamende, dont le taux maximum est de 250 000 F en application de larticle 131-38 du code pénal ; - la confiscation des moyens qui lui ont permis de commettre linfraction ou qui en sont le produit (par exemple, les rémunérations financières versées par les parents) ; - la fermeture définitive ou pour une durée de cinq ans au plus des établissements où a été commise linfraction ; - linterdiction définitive ou pour une durée de cinq ans au plus dexercer directement ou indirectement lactivité denseignement incriminée ou toute autre activité professionnelle ou sociale ; - la dissolution de la personne morale si elle a été créée pour dispenser un enseignement contraire à linstruction obligatoire ; - enfin, laffichage et la diffusion dans la presse écrite et audiovisuelle de la décision prononcée. * La commission a adopté cet article sans modification. Article 4 Sanction de la non-déclaration du choix dinstruction et organisation du contrôle de la fréquentation scolaire Le premier alinéa de cet article sanctionne le non-respect de larticle 7 de la loi du 28 mars 1882 sur lenseignement primaire, tel quil résulte de larticle premier B de la présente proposition de loi. Le défaut de déclaration du choix dinstruction dans la famille par la personne responsable de lenfant, quil sagisse de ses parents ou de toute personne exerçant à son égard lautorité parentale ou une autorité de fait de façon continue, sera désormais puni dune amende de 10 000 F. Il sagit en fait dune disposition de nature réglementaire qui relève du livre VI de la deuxième partie du code pénal. Une contravention de cinquième classe est ainsi substituée à lactuelle contravention de deuxième classe (1 000 F) prévue dans ce cas par larticle 16 du décret n° 66-104 du 18 février 1966 relatif au contrôle de la fréquentation et de lassiduité scolaires et aux sanctions que comportent, au regard du versement des prestations familiales et en matière pénale, les manquements à lobligation scolaire. Il est à noter que cet alinéa fait référence, de manière erronée, à une déclaration en mairie du choix dun établissement denseignement privé hors contrat, alors que larticle 7 de la loi du 28 mars 1882 ne prévoit quune inscription dans un établissement public ou privé, quel quil soit. Le deuxième alinéa de cet article se contente de renvoyer à un décret en Conseil dEtat la détermination des règles organisant le contrôle de la fréquentation et de lassiduité scolaires et des sanctions applicables en la matière, tant au niveau contraventionnel quen ce qui concerne le versement des prestations familiales. Ces règles sont toujours définies par le décret n° 66-104 du 18 février 1966 précité. Le Gouvernement sest engagé, devant le Sénat, à mettre à létude une éventuelle réforme de ses dispositions. * La commission a adopté cet article sans modification. La commission a ensuite adopté, à lunanimité, lensemble de la proposition de loi sans modification. * * * En conséquence, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales demande à lAssemblée nationale dadopter la proposition de loi n° 1032 sans modification. ___
N°1250. - Rapport de M. Patrick LEROY (au nom de la commission des affaires culturelles) sur : 1 Rapport n° 871 (XIème législature) de M. Jean-Paul Bret déposé le 5 mai 1998. 2 La proposition de loi n° 1136 comprend un article supplémentaire prévoyant la possibilité, pour les associations de défense des droits de lenfant, de se porter partie civile dans les procès concernant le non-respect de lobligation scolaire. 3 Rapport n° 2468 (Xème législature) de M. Jacques Guyard déposé le 22 décembre 1995. 4 LObservatoire interministériel sur les sectes a été transformé en Mission interministérielle sur les sectes en octobre 1998. |