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N° 1956

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 novembre 1999.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES (1) SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle en matière douanière entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République hongroise,

PAR M. RENÉ ANDRÉ,

Député

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros :

Sénat : 34, 107 et T.A. 51 (1998-1999)

Assemblée nationale : 1306

Traités et conventions

La Commission des Affaires étrangères est composée de : M. Jack Lang, président ; MM. Georges Hage, Jean-Bernard Raimond, Roger-Gérard Schwartzenberg, vice-présidents ; M. Roland Blum, Mme Monique Collange, François Loncle, secrétaires ; Mmes Michèle Alliot-Marie, Nicole Ameline, M. René André, Mmes Marie-Hélène Aubert, Martine Aurillac, MM. Edouard Balladur, Raymond Barre, Dominique Baudis, François Bayrou, Henri Bertholet, Jean-Louis Bianco, André Billardon, André Borel, Bernard Bosson, Pierre Brana, Jean-Christophe Cambadélis, Hervé de Charette, Yves Dauge, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Xavier Deniau, Paul Dhaille, Mme Laurence Dumont, MM. Jean-Paul Dupré, Charles Ehrmann, Laurent Fabius, Jean-Michel Ferrand, Georges Frêche, Jean-Yves Gateaud, Jean Gaubert, Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Godfrain, Pierre Goldberg, François Guillaume, Robert Hue, Mme Bernadette Isaac-Sibille, MM. Didier Julia, Alain Juppé, André Labarrère, Gilbert Le Bris, Jean-Claude Lefort, Guy Lengagne, François Léotard, Pierre Lequiller, Bernard Madrelle, René Mangin, Jean-Paul Mariot, Gilbert Maurer, Charles Millon, Mme Louise Moreau, M. Jacques Myard, Mme Françoise de Panafieu, MM. Etienne Pinte, Marc Reymann, Gilbert Roseau, Mme Yvette Roudy, MM. René Rouquet, Georges Sarre, Henri Sicre, Mme Christiane Taubira-Delannon, M. Michel Terrot, Mme Odette Trupin, MM. Joseph Tyrode, Michel Vauzelle, Philippe de Villiers

Mesdames, Messieurs,

Au moment où l'on fête le dixième anniversaire de la chute du Mur de Berlin, nous sommes saisis d'un projet de loi ayant pour objet l'autorisation de ratification de la convention d'assistance administrative douanière signée le 26 février 1998 entre la France et la Hongrie.

Or comme chacun sait, la Hongrie a été le pionnier des réformes qui ont bouleversé l'Europe de l'Est depuis cet événement. En outre, elle occupe une place à part au sein des PECOs, essentiellement parce qu'elle est depuis plus longtemps acquise à la démocratie et à l'économie de marché, mais également parce qu'elle surpasse ses voisins dans la mise aux normes européennes de ses institutions.

L'accroissement des flux commerciaux qui en est l'une des résultantes se verra sans aucun doute renforcé par l'adhésion à l'Union européenne et les différents trafics seront susceptibles d'augmenter. La signature d'une convention d'assistance administrative douanière prend alors tout son sens.

C'est pourquoi votre Rapporteur s'attachera tout d'abord à présenter une analyse de la présente convention avant de s'attarder sur les efforts fournis par la Hongrie en matière de lutte contre les fraudes.

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UNE CONVENTION TYPE AVEC TROIS PARTICULARITÉS

· L'objectif de la présente convention est de donner une base juridique à la coopération entre les administrations douanières des deux pays afin de favoriser la prévention, la recherche et la répression des fraudes douanières.

Une telle base est utile afin que les renseignements réunis à l'occasion de ces échanges puissent servir de preuves devant les tribunaux et afin de mieux garantir la confidentialité des informations transmises.

En effet, le code des douanes françaises autorise l'administration française des douanes à fournir, sous réserve de réciprocité, des renseignements aux autorités douanières étrangères. Mais cette disposition n'offre qu'une sécurité juridique faible, notamment s'agissant de la protection de la confidentialité.

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· Les dispositions prévues par la présente convention s'inscrivent dans le cadre général de coopération administrative qui sert de base à la trentaine de conventions déjà signées par la France.

Le champ de la convention se limite à l'assistance administrative dans le domaine de la lutte contre les infractions à la législation douanière. Au-delà, les arrestations par exemple, la coopération relève de l'entraide judiciaire. Elle ne s'étend pas à la perception par l'administration douanière d'une partie des droits de douane, impôts, taxes, amendes et autres sommes pour le compte de l'administration de l'autre partie (article 2).

La convention prévoit en premier lieu que les administrations peuvent échanger des renseignements, spontanément ou sur demande. Ces renseignements peuvent concerner toutes les opérations constatées ou suspectées présentant un caractère frauduleux, les nouveaux moyens de fraude, les catégories de marchandises connues comme faisant l'objet de trafics, les personnes et les moyens de transports suspects, les nouvelles techniques de lutte contre la fraude. Lorsqu'ils prennent la forme de documents de douane pouvant servir à détecter des infractions, les renseignements ne peuvent être transmis qu'en réponse à une demande écrite (article 3).

La convention prévoit également qu'une partie peut demander à l'autre d'exercer une surveillance spéciale sur des déplacements de personnes, des mouvements de marchandises, des lieux, des moyens de transport, des actes liés au trafic des stupéfiants, quand ceux-ci paraissent suspects (article 4).

La convention autorise par ailleurs le recours d'un commun accord à la méthode des livraisons surveillées. L'article 67 bis du code des douanes français permet aux agents des douanes habilités à cet effet par le ministre à pratiquer des expéditions illicites dans le but d'identifier les personnes impliquées dans les infractions douanières. La Hongrie dispose également d'une législation analogue (articles 1.5 et 5).

Une partie peut demander à l'autre de procéder à des enquêtes sur des opérations en présence, éventuellement, de ses propres agents à la condition que ces derniers ne soient ni armés, ni en uniforme (article 7).

La convention établit des relations directes entre les administrations (article 8).

Elle donne valeur de preuves aux renseignements transmis par une partie devant les tribunaux de l'autre partie et permet aux agents d'une partie de comparaître en qualité de témoins ou d'experts (articles 10 et 11).

Les limites de l'assistance administrative tiennent à la possibilité pour une partie de refuser son assistance lorsque celle-ci serait de nature à porter atteinte aux intérêts essentiels de l'Etat ou impliquerait la violation d'un secret industriel, commercial ou professionnel. Tout refus doit être motivé (article 6).

Par ailleurs, la convention stipule que les informations obtenues dans son cadre ne doivent être utilisées qu'aux fins de la convention, sauf consentement exprès de la partie qui les a transmises. Ces informations bénéficient des mêmes garanties que celles accordées par la législation de l'Etat à ses propres informations de même nature (article 9).

Les articles 12, 13, 14 et 15 n'appellent aucun commentaire particulier.

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· Ces dispositions sont certes similaires à celles qui figurent dans les diverses conventions de même objet conclues par la France avec d'autres pays d'Europe centrale et orientale (République tchèque, Pologne, Ukraine, Russie, République slovaque...). Cependant, trois particularités doivent être soulignées.

En premier lieu, l'article 9.3 prévoit l'obligation pour l'administration qui reçoit l'information de la corriger ou de la détruire si l'administration qui l'a fournie constate qu'elle est inexacte ou qu'elle doit être supprimée. Les autorités hongroises ont souhaité reprendre une disposition identique prévue dans l'accord intérimaire sur le commerce et les mesures d'accompagnement entre la Communauté européenne et la Hongrie.

En deuxième lieu, l'article 10.2 prévoit que les documents originaux peuvent être transmis à l'administration requérante lorsque des copies ne suffisent pas. Ils sont restitués dans les plus brefs délais.

Enfin, l'article 11.3 mentionne expressément que l'application de la convention n'affecte pas les règles d'entraide judiciaire définies par l'accord bilatéral signé en 1980 par la France et la Hongrie. Cette précision allait de soi dans la mesure où la convention est un accord d'assistance administrative.

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UNE CONVENTION QUI VIENT COMPLÉTER LES EFFORTS
DÉJÁ IMPORTANTS DE LA HONGRIE
EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LA FRAUDE

· La fraude revêt différents aspects.

Les fraudes les plus courantes portent sur les exportations vers la Hongrie qui font l'objet de minoration de valeur afin de diminuer le montant des droits de douane payés. Ces pratiques concernent principalement les véhicules d'occasion et l'alcool. L'origine des produits peut aussi faire l'objet de fraudes et de fréquents contrôles a posteriori de documents d'origine sont réalisés par les douanes française et hongroise.

La Hongrie est également devenue un pays à risque s'agissant du trafic de drogue. Elle est un pays consommateur, de transit et de dépôt. Elle produit du cannabis et des amphétamines et sert de pays de transit (aéroport de Budapest notamment) pour la cocaïne en provenance d'Amérique du Sud et à destination de l'Europe occidentale. Elle est aussi un pays de transit et de dépôt pour l'héroïne en provenance de Turquie.

La France est dores et déjà directement concernée par ces trafics. Deux saisies importantes d'héroïne (50 kg et 33 kg), en provenance de Budapest, ont été réalisées en 1998 en France. Pour 1999, si l'on n'a pas constaté de saisies de stupéfiants faites en France en provenance de Hongrie, plusieurs ciblages de contrebande de stupéfiants par voie aérienne ont été effectués. Par exemple, 5 kg de cocaïne compressée dans des bouteilles ont été saisis sur un vol Bogota-Paris-Budapest. En outre, la douane de Lille a saisi 2 tonnes de cigarettes sur un camion hongrois à destination de la Grande-Bretagne.

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· Les efforts fournis par la Hongrie pour renforcer l'efficacité de la lutte contre la fraude et, plus particulièrement, de la lutte contre les stupéfiants sont importants.

Sur le plan législatif, un nouveau code des douanes est entré en vigueur et la Hongrie dispose aujourd'hui d'une des douanes les plus modernes et performantes en Europe centrale.

Un arsenal de lois prises récemment a renforcé le dispositif de lutte contre le blanchiment. Par exemple, on peut citer une loi de 1991 sur le secret bancaire, des amendements apportés au code pénal et relatifs aux crimes économiques, une loi de 1994 relative à la prévention et à la lutte contre le blanchiment. La Hongrie dispose également d'une législation sur les livraisons surveillées.

Par ailleurs des amendements apportés au code pénal en 1993 ont dépénalisé l'usage des stupéfiants mais renforcé la répression du trafic, de la production, de la vente de drogue et des activités de criminalité organisée.

Sur le plan des structures, une nouvelle unité de coordination de la lutte contre la drogue a été mise en place en mars 1998 au sein des services du Premier ministre. Des unités de recherche sont plus particulièrement compétentes en matière de lutte contre les stupéfiants au niveau de la direction générale des douanes hongroises. Une unité de renseignements en matière financière a été mise en place au sein du ministère de l'Intérieur (loi anti-blanchiment de 1994).

De nombreux projets devraient conduire au renforcement de l'efficacité globale du dispositif douanier hongrois de lutte contre la fraude. Un service central du renseignement et des enquêtes douanières devrait être inauguré prochainement. Un centre de formation d'équipes cynophiles à vocation régionale a été ouvert le 30 septembre 1999. Des unités mobiles de surveillance opérant sur la totalité du territoire devraient être mises en place. La création d'un réseau d'unités motocyclistes est également annoncée.

Par ailleurs, il est à noter que la Hongrie a d'ores et déjà ratifié la présente convention et fait parvenir sa notification à la France en mai 1999.

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· D'une manière générale, les efforts d'adaptation des douanes hongroises s'inscrivent dans le cadre de la stratégie d'adhésion à l'Union européenne.

La Hongrie joue ainsi le jeu de la coopération internationale en participant fréquemment à des opérations de contrôles conjoints avec d'autres douanes européennes sur la route des Balkans.

S'agissant de la coopération bilatérale, un accord administratif a été conclu en 1998 entre les aéroports de Budapest et de Roissy. Ces efforts ont été récompensés par de bons résultats en termes de saisies. En 1999, de nombreuses actions de coopération ont été menées au bénéfice de la Hongrie qui se sont traduites par 18 visites et missions. Elles ont concerné, entre autres, la lutte contre la fraude en matière aéroportuaire, l'organisation et les méthodes de travail relatives aux contrôles mobiles des services de surveillance dans le domaine de la lutte contre le trafic de stupéfiants, la formation des équipes cynophiles, etc.

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CONCLUSION

Au bénéfice de ces observations, votre Rapporteur vous recommande l'adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 24 novembre 1999.

Après l'exposé du Rapporteur et suivant ses conclusions, la Commission a adopté le projet de loi (n1306).

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La Commission vous demande donc d'adopter, dans les conditions prévues à l'article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 1306).

1956. - RAPPORT de M. René ANDRÉ (commission des affaires étrangères) sur le projet de loi autorisant l'approbation de la convention d'assistance administrative mutuelle en matière douanière entre le Gouvernement français et le Gouvernement de la République hongroise


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