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le 15 février 2000

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N° 2159

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 9 février 2000.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES (1) SUR LE PROJET DE LOI (n° 2067), relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile,

PAR M. ANDRÉ CAPET,

Député.

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Transports aériens.

La commission de la production et des échanges est composée de : M. André Lajoinie, président ; MM. Jean-Paul Charié, Jean-Pierre Defontaine, Pierre Ducout, Jean Proriol, vice-présidents ; MM. Léonce Deprez, Christian Jacob, Daniel Paul, Patrick Rimbert, secrétaires ; MM. Yvon Abiven, Jean-Claude Abrioux, Stéphane Alaize, Damien Alary, André Angot, André Aschieri, François Asensi, Jean-Marie Aubron, Pierre Aubry, Jean Auclair, Jean-Pierre Balduyck, Jacques Bascou, Mme Sylvia Bassot, MM. Christian Bataille, Jean Besson, Gilbert Biessy, Claude Billard, Claude Birraux, Jean-Pierre Blazy, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Franck Borotra, Christian Bourquin, Mme Danièle Bousquet, MM. François Brottes, Vincent Burroni, Alain Cacheux, Dominique Caillaud, André Capet, Jean-Paul Chanteguet, Jean Charroppin, Philippe Chaulet, Jean-Claude Chazal, Daniel Chevallier, Pierre Cohen, Charles de Courson, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Jean-Claude Daniel, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Decaudin, Mme Monique Denise, MM. Jacques Desallangre, Eric Doligé, François Dosé, Jean-Pierre Dufau, Marc Dumoulin, Dominique Dupilet, Philippe Duron, Jean-Claude Etienne, Michel Etiévant, Alain Fabre-Pujol, Albert Facon, Alain Ferry, Jean-Jacques Filleul, Jacques Fleury, Nicolas Forissier, Roland Francisci, Claude Gaillard, Robert Galley, Claude Gatignol, André Godin, Alain Gouriou, Michel Grégoire, Gérard Grignon, Hubert Grimault, Lucien Guichon, Gérard Hamel, Patrick Herr, Claude Hoarau, Robert Honde, Claude Jacquot, Mme Janine Jambu, MM. Aimé Kergueris, Jean Launay, Thierry Lazaro, Jean-Yves Le Déaut, Patrick Lemasle, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Arnaud Lepercq, René Leroux, Roger Lestas, Alain Le Vern, Félix Leyzour, Michel Liebgott, Lionnel Luca, Jean-Michel Marchand, Daniel Marcovitch, Alain Marleix, Daniel Marsin, Philippe Martin, Jacques Masdeu-Arus, Marius Masse, Roger Meï, Roland Metzinger, Pierre Micaux, Yvon Montané, Gabriel Montcharmont, Jean-Marie Morisset, Bernard Nayral, Jean-Marc Nudant, Jean-Paul Nunzi, Patrick Ollier, Joseph Parrenin, Paul Patriarche, François Patriat, Germinal Peiro, Jacques Pélissard, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Annette Peulvast-Bergeal, MM. Serge Poignant, Bernard Pons, Jacques Rebillard, Jean-Luc Reitzer, Gérard Revol, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean Rigaud, Mme Michèle Rivasi, MM. Jean Roatta, André Santini, Joël Sarlot, Mme Odile Saugues, MM. François Sauvadet, Jean-Claude Thomas, Léon Vachet, Daniel Vachez, François Vannson, Michel Vaxès, Michel Vergnier, Gérard Voisin, Roland Vuillaume.

INTRODUCTION 5

1. Une entreprise exemplaire sur le plan social 9

2. Une entreprise publique 10

3. Une entreprise rentable 11

EXAMEN EN COMMISSION 15

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 15

II.- EXAMEN DES ARTICLES 21

Article 1er (article L. 341-1 du code de l'aviation civile) : Allègement de la tutelle de l'Etat sur la société Air France et prise en compte de dispositions communautaires 21

Article 2 (article L. 342-2 du code de l'aviation civile) : Suppression des dispositions relatives à la contrainte d'équilibre financier de la société Air France et prise en compte des obligations de service public 24

Article 3 (article L. 342-3 du code de l'aviation civile) : Élargissement du conseil d'administration de la société Air France 28

TABLEAU COMPARATIF 35

MESDAMES, MESSIEURS,

La société Air France est aujourd'hui entrée dans une période de mutations. L'ouverture de son capital à des actionnaires privés, le renouveau du dialogue social et la mise en _uvre d'une stratégie globale d'alliances s'inscrivent dans un contexte concurrentiel affirmé, lié notamment à la libéralisation du transport aérien en Europe.

Entre 1987 et 1992, trois paquets de libéralisation ont profondément modifié les règles applicables au transport aérien en Europe et ont permis la réalisation d'un marché intérieur des transports. Les conséquences en ont été importantes, notamment en matière tarifaire, en matière de concurrence et en matière d'accès au marché.

Le système d'homologation des tarifs a été supprimé et ces derniers ont été complètement libérés. Les transporteurs aériens sont désormais soumis aux règles de concurrence communautaires (prohibition des ententes et des abus de position dominante) ; néanmoins, des exemptions ont été prévues pour tenir compte de leur contribution au bon fonctionnement du transport aérien, notamment en matière de coordination des horaires, d'exploitation en commun d'un service aérien régulier sur une desserte nouvelle ou moins fréquentée, de répartition des créneaux horaires ou encore de systèmes informatiques de réservation. Enfin, l'évolution la plus radicale concerne l'accès au marché : aux autorisations de droits de trafic a été substitué un régime de liberté totale. Ainsi, les transporteurs communautaires ont la possibilité, depuis février 1997, de desservir deux points à l'intérieur d'un même Etat membre à la suite d'un vol en provenance d'un autre Etat membre.

Au-delà de ces bouleversements, l'institution d'un espace aérien européen de libre concurrence a donné lieu à un contrôle strict des aides accordées par les Etats aux transporteurs aériens (articles 92, 93 et 94 du Traité instituant la Communauté économique européenne). Alors que les compagnies aériennes, fortement liées à la puissance étatique, étaient considérées dans la plupart des cas, comme des éléments de la souveraineté nationale, la réglementation du versement d'aides d'Etat aux compagnies aériennes nationales a donné lieu à de nombreuses décisions de la Commission européenne, en vertu de l'article 93 du Traité instituant la Communauté économique européenne. Celui-ci prévoit en effet que la Commission procède avec les Etats membres à l'examen permanent des régimes d'aides existant dans ces Etats. La Commission doit donc être informée des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si, après avoir mis les intéressés en demeure de présenter leurs observations, la Commission constate qu'une aide accordée par un Etat n'est pas compatible avec le marché commun, ou que cette aide est appliquée de façon abusive, elle décide que l'Etat intéressé doit la supprimer ou la modifier dans le délai qu'elle détermine.

Le cas d'Air France est à cet égard éclairant, car il montre bien que la société est désormais inscrite dans un environnement concurrentiel.

En 1994, dans le cadre du Projet pour l'entreprise, l'Etat en tant qu'actionnaire a décidé de procéder à la recapitalisation en trois tranches d'Air France, pour un montant de 20 milliards de francs, la société cumulant depuis 1989 des résultats fortement déficitaires. Le 27 juillet 1994, la Commission a rendu sa décision et a autorisé le versement de cette aide, sous réserve de la mise en place d'un plan de restructuration d'Air France, selon les points suivants :

- attribution de la totalité de l'aide à Air France à l'exclusion de ses filiales ;

- nécessité d'engager le processus de privatisation d'Air France ;

- objectif précis en matière de gains de productivité ;

- engagement de l'Etat français à adopter un comportement d'actionnaire normal vis-à-vis d'Air France ;

- principe de la dernière aide ;

- utilisation de l'aide uniquement pour la restructuration et non pour acquérir des participations nouvelles ;

- gel du nombre d'avions pendant la durée du plan ;

- engagement de ne pas accroître l'offre en sièges sur les liaisons intra-communautaires ;

- mise sous surveillance des tarifs qui ne doivent pas être inférieurs à ceux des concurrents ;

- pas de traitement préférentiel pour Air France concernant les droits de trafic ;

- gel du nombre de lignes exploitées dans l'espace économique européen ;

- limitation des sièges offerts sur la filiale Air Charter ;

- engagement d'opérer toute cession de biens et de services au profit d'Air Charter dans les conditions de marché ;

- engagement de cession des hôtels Méridiens ;

- modification, en liaison avec Aéroport de Paris, des règles de distribution du trafic au sein du système aéroportuaire parisien ;

- optimisation de l'utilisation des aérogares d'Orly.

La diversité et l'importance de ces engagements soulignent la place de la compagnie nationale dans le monde aérien, tant en termes de réglementation que de tourisme ou d'infrastructures.

Dans ce contexte de libéralisation de l'espace aérien communautaire, Air France a dû engager des réformes, tant juridiques qu'opérationnelles. Si l'élargissement du champ d'activités d'Air France n'est pas nouveau, on constate, sur les dix dernières années, une accélération des réformes mises en _uvre.

Évolution de la structure juridique et opérationnelle
d'Air France

· 1933 : Création d'Air France à la suite du regroupement des grandes compagnies aériennes françaises : Air Union, Air Orient, la Société Générale de Transports Aériens, la Compagnie Internationale de Navigation Aérienne et l'Aéropostale.

· 1945 : Nationalisation.

· 16 juin 1948 : Création de la Compagnie nationale Air France, société anonyme à conseil d'administration, à qui est transféré l'ensemble des biens, droits et obligations de l'ancienne société anonyme Air France.

· 29 janvier 1990 : Acquisition d'UTA (Union des transports aériens), à la suite de laquelle Air France détient environ 72 % d'Air Inter.

· 29 décembre 1992 : Fusion-absorption de la Compagnie par UTA, société anonyme à participation ouvrière. UTA prend alors la dénomination « Compagnie nationale Air France ».

· 25 juillet 1994 : Constitution de la société holding Groupe Air France S.A., détenue à 100 % par l'Etat et ayant pour objet la détention majoritaire du capital social de la Compagnie, d'une part, d'Air Inter, d'autre part.

· du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1997 :

Mise en _uvre d'un actionnariat volontaire, en vertu duquel 12 000 salariés de la Compagnie se sont vu attribuer des actions Air France par l'Etat en contrepartie d'une réduction volontaire de leur salaire pendant trois ans. Cette participation représente 2 millions d'actions, soit environ 1 % du capital.

· 25 janvier 1995 : Abandon du statut de société anonyme à participation ouvrière et retour au statut de société anonyme. Les ayants droit de la société coopérative de main-d'_uvre se sont vu attribuer, à titre d'indemnisation, 2,3 millions d'actions (soit 1,2 % du capital) créées par incorporation de réserves.

· 1er janvier 1996 : Air Inter prend la dénomination sociale « Compagnie Air France Europe » et exploite son activité sous la marque « Air Inter Europe ».

· 1er avril 1997 : La Compagnie prend en location-gérance les activités d'Air France Europe.

· 12 septembre 1997 : Fusion-absorption du Groupe Air France S.A. et d'Air France Europe par la Compagnie, avec effet rétroactif au 1er avril 1997.

· 2 juillet 1998 : L'article 51 de la loi n° 98-546 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier remplace la dénomination « Compagnie nationale Air France » par la dénomination « société Air France » dans les dispositions législatives et réglementaires en vigueur et autorise l'Etat à céder gratuitement, dans la limite de 12 % du capital, des actions d'Air France aux salariés de la société consentant à des réductions de salaire dans le cadre d'un accord collectif passé entre la direction de l'entreprise et les organisations syndicales représentatives.

· 29 octobre 1998 : Le Syndicat national des pilotes de ligne conclut avec la direction d'Air France un accord portant sur l'échange salaires-actions.

· 9 décembre 1998 : Ouverture minoritaire du capital d'Air France.

· 22 février 1999 : Air France est cotée au règlement mensuel.

Au terme des opérations d'ouverture de son capital aux salariés et à des actionnaires autres que l'Etat, la structure de l'actionnariat d'Air France est la suivante, la société ayant été valorisée à 20,5 milliards de francs :

BILAN DE L'ACTIONNARIAT

en  % du capital

31/03/1998

31/03/1999

31/03/1999
(en anticipant les livraisons aux salariés)

31/12/1999
(estimation)

Etat

94,2

73,4

62,8

57,0 %

Salariés et anciens salariés

2,1

0,8

11,4

13,5 %

SNCF

1,6

-

-

-

CDC Participations

0,6

-

-

-

CDR Participations

0,5

-

-

-

Autres

1,0

25,8

25,8

29,5 %

Source : Air France

A ce jour, Air France est donc une entreprise totalement transformée.

1. Une entreprise exemplaire sur le plan social

L'opération d'échange « salaires contre actions » a été un succès. L'accord du 29 octobre 1998, certes difficilement atteint après une grève du personnel navigant technique qui a duré du 1er au 10 juin 1998, prévoyait que cet échange serait mis en _uvre sur une base volontaire et qu'il serait conditionné par la cotation du titre Air France sur le premier marché.

Après avoir été consultés par l'entreprise, les pilotes d'Air France ont choisi, pour 78,8 % d'entre eux, de réduire leurs salaires, afin de recevoir des actions de leur entreprise pour un montant d'environ 1,4 milliard de francs. Leur participation s'élève donc à environ 6,8 % du capital dilué de l'entreprise.

Deux accords ont également été signés, l'un avec le personnel au sol et l'autre avec le personnel navigant commercial, qui détiennent désormais plus de 6 % du capital social de la société. Au total, plus de 72 % des salariés d'Air France et plus du quart des anciens salariés de la société ont acheté des actions dans le cadre de l'ouverture de son capital. Air France est ainsi devenue l'entreprise française cotée dont l'actionnariat salarié est le plus important.

La distribution de « stock-options » au personnel navigant technique devrait être accompagnée de la possibilité pour les autres salariés de souscrire à nouveau au capital de la société.

Dans le même esprit, dans le cadre du « gouvernement d'entreprise », il serait souhaitable que les salariés non pilotes soient davantage associés au comité stratégique et au comité d'audit d'Air France.

Par ailleurs, l'ouverture minoritaire du capital de la société à des actionnaires autres que l'Etat et les salariés peut, elle aussi, être considérée comme un succès : lors de sa première cotation sur le marché à règlement mensuel, la société comptait 2,4 millions d'actionnaires particuliers. Le succès de cette ouverture s'est confirmé auprès des investisseurs institutionnels dont la demande de titres a été quarante fois supérieure à l'offre.

2. Une entreprise publique

Quant à l'Etat, il est resté actionnaire majoritaire de la société. Sa part devrait cependant se réduire dans les années à venir, sans pour autant descendre en-dessous du seuil de 53 % du capital d'Air France. En effet, l'établissement de sa part à 62,8 % ne constitue qu'une étape transitoire, une dilution supplémentaire devant intervenir lors du dénouement de deux opérations : les obligations remboursables en actions prises par la BNP à hauteur de 1,3 milliard de francs et les bons de souscription d'actions accordés aux salariés en 1994 jusqu'à 1,7 milliard de francs pouvaient être exercés jusqu'au 1er janvier 2000. A l'heure où le présent rapport est rédigé, le résultat de ces deux opérations n'est pas encore connu. Si elles étaient conduites à leur terme, la part de l'Etat tomberait alors à moins de 57 %. Enfin, il est prévu que des actions gratuites seront distribuées au plus tard jusqu'en 2003 aux employés et notamment aux pilotes d'Air France ainsi qu'aux particuliers ayant souscrit à l'occasion de l'ouverture du capital de la société, en février 1999 ; à l'issue de cette distribution, la part de l'Etat serait alors réduite à 53 % du capital de la société.

Conformément à l'engagement du Premier ministre lors de son discours d'investiture en juin 1997, l'entreprise a vocation à rester dans le secteur public, compte tenu des engagements de l'Etat en matière de recapitalisation en 1995 et 1996. L'exemple de France Télécom, dont l'Etat contrôle plus de 60  % du capital, confirme que ce caractère public n'est un frein ni à l'appréciation de la société en bourse, ni à son développement international.

3. Une entreprise rentable

La structure de l'actionnariat d'Air France s'est donc ouverte à de nouveaux investisseurs ; cette évolution est allée de pair avec un redressement financier de la société qui avait connu des années de fort déficit. A l'issue d'un plan de redressement, notamment axé sur la baisse des coûts de l'entreprise, on constate une nette progression des résultats d'Air France qui a renoué avec les bénéfices. Ainsi, au premier semestre de l'exercice 1999-2000 (avril-septembre 1999), le résultat net du groupe a progressé de 52 % par rapport au premier semestre de l'exercice précédent ; le résultat d'exploitation a, quant à lui, augmenté de près de 85 % sur la même période.

RÉSULTATS D'AIR FRANCE

 

Avril-septembre 1999 (en millions de francs)

Avril-septembre 1998 (en millions de francs)

Variation
(en %)

Chiffre d'affaires

33 765

29 908

12,9

dont passage régulier

25 092

21 705

15,6

dont fret

3 339

3 273

2,0

Excédent brut d'exploitation

4 903

3 599

36,2

Résultat d'exploitation

2 317

1 255

84,6

Résultat net part du groupe

2 035

1 336

52,3

Source : Air France

La société Air France est donc aujourd'hui bien éloignée de l'entreprise créée le 16 juin 1948. L'évolution de son environnement et l'ouverture de son capital nécessitent de moderniser ses structures.

*

* *

Le Gouvernement a pris acte de cette nécessité ; déjà, en octobre 1997, dans la lettre de mission adressée à M. Jean-Cyril Spinetta, nouveau président du conseil d'administration d'Air France, l'autorité de tutelle avait accepté de supprimer le contrôle préalable des investissements d'Air France, tout en envisageant d'accroître l'autonomie de gestion et de procéder à des adaptations institutionnelles de la société.

C'est le sens du présent projet de loi, qui a pour objectif de mettre en conformité le droit avec la réalité. Air France étant désormais introduite sur le marché du règlement mensuel, il convient d'alléger la tutelle étatique afin de transférer son pouvoir de contrôle vers le conseil d'administration, dont la composition devrait être élargie afin de prendre en compte les nouveaux salariés actionnaires ainsi que les actionnaires autres que l'Etat et les salariés. Le projet de loi prévoit de porter de 18 à 21 le nombre d'administrateurs.

Sur ce point, votre rapporteur tient vivement à souligner au Gouvernement qu'il conviendra que ce dernier, lorsqu'il prendra les dispositions réglementaires d'application du projet de loi, assure une bonne représentation des salariés au sein du conseil d'administration de la société, qu'ils soient actionnaires d'Air France ou pas. Il est en effet indispensable que les premiers intéressés à la bonne marche de l'entreprise bénéficient d'une présence suffisante et représentative de l'ensemble de leurs compétences au sein du conseil. Dans le même esprit, il apparaît souhaitable que la représentation des salariés actionnaires soit assurée par au moins deux administrateurs issus de « catégories » différentes.

La politique commerciale et financière de l'entreprise, qui sera probablement modifiée du fait de la présence de ces nouveaux administrateurs, ne devra notamment pas sacrifier le dialogue social. De nouvelles élections auront lieu au sein d'Air France dans les prochains mois afin de renouveler le conseil d'administration ; il apparaît souhaitable à votre rapporteur que la composition de ce conseil soit stabilisée, quatre élections ayant eu lieu au cours des dix dernières années.

Concernant l'allégement de la tutelle administrative pesant sur Air France, le projet de loi soumis à votre examen vise essentiellement à supprimer les procédures d'autorisation préalable en matière de création, gestion ou prise de participation par Air France dans des entreprises présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale. Il s'agit également de prendre acte de la place croissante du droit communautaire en matière de transport aérien et de supprimer les dispositions du code de l'aviation civile qui sont redondantes avec ces dispositions communautaires.

Votre rapporteur se félicite d'une telle initiative, dont il estime qu'elle devrait permettre à Air France de conforter sa position stratégique dans notre économie, en lui octroyant la marge de man_uvre nécessaire pour s'imposer dans un contexte désormais pleinement concurrentiel.

Il tient toutefois à souligner que cette réforme, si elle va dans le bon sens, doit être menée en tenant compte des intérêts des différentes catégories de salariés. En outre, votre rapporteur estime indispensable que la mise en _uvre des dispositions du projet de loi puisse être contrôlée et évaluée par le Parlement, le travail de ce dernier ne devant pas s'arrêter dès la promulgation de la loi. Notamment, il conviendra de suivre l'impact économique et les conséquences de ces dispositions concernant tant la situation des salariés d'Air France que la situation financière de la société, sa politique commerciale ou sa stratégie sur le territoire français et européen, ainsi que l'impact sur le développement du transport aérien et ses infrastructures.

EXAMEN EN COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du 9 février 2000, la commission a examiné, sur le rapport de M. André Capet, le projet de loi relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile (n° 2067).

M. André Capet, rapporteur, a tout d'abord rappelé la situation actuelle de la société Air France. Son chiffre d'affaires pour l'exercice 1998-1999 s'est élevé à 60 milliards de francs et son résultat net consolidé à 1,6 milliard de francs. Air France compte 55 000 salariés, dont 3 500 appartiennent à la catégorie du personnel navigant technique, 10 000 à la catégorie du personnel navigant commercial et 41 500 à la catégorie du personnel au sol. La société enregistre 37 millions de passagers par an qui effectuent en moyenne un trajet de 2 000 kilomètres ; elle détient donc le troisième rang mondial en matière de trafic de passagers et le quatrième pour le fret. Sa flotte est composée de 213 appareils dont 11 cargos, âgés de 9 ans en moyenne. Cette flotte effectue 1 300 vols par jour et le coefficient d'occupation des appareils est de 76 %. Concernant les évolutions attendues pour l'exercice 1999-2000, le trafic de passagers devrait augmenter de 13 % et celui du fret de 7 %. Enfin, il est prévu d'investir 8 milliards de francs sur cette période.

Concernant les caractéristiques de la société, le rapporteur a rappelé qu'il s'agissait d'une entreprise publique. L'Etat détenait 95 % de son capital en 1998 et cette part s'est établie à 56 % en 2000. La société est soumise à la tutelle conjointe du ministre chargé de l'économie et du ministre chargé des transports. L'Etat a recapitalisé l'entreprise à hauteur de 20 milliards de francs sur la période 1994-1996 en accord avec l'Union européenne, ce qui a permis d'assurer son redressement financier.

Air France est devenue une compagnie rentable. Il s'agit enfin d'une société qui a su rétablir le climat social puisqu'aujourd'hui 13 à 14 % de son capital sont détenus par les salariés dont 7 % par le personnel navigant technique. La part de l'Etat s'élève à 56 % et celle des actionnaires autres que l'Etat et les salariés à environ 30 %. En outre, la société a mis en place un véritable gouvernement d'entreprise : sur les 8 membres de son comité stratégique, 4 sont des salariés ; les 5 membres du comité d'audit comptent 2 salariés. Air France est ainsi la première entreprise française en termes d'actionnariat de salariés puisque 71 % d'entre eux détiennent une part du capital social. En outre, les projets d'épargne salariale sont très prometteurs.

Concernant le projet de loi soumis à l'examen de la commission de la production et des échanges, M. André Capet, rapporteur, a indiqué qu'il visait à réformer deux points. En premier lieu, les relations entre l'Etat et Air France sont modifiées : la tutelle est allégée du fait de la suppression du régime de l'autorisation préalable pour les participations prises par la société. En outre, le projet de loi prend en compte les obligations de service public définies par l'Union européenne. En second lieu, le conseil d'administration voit sa composition modifiée. Il est élargi de 18 à 21 membres et la répartition des sièges entre catégories de membres, qui sera fixée par voie réglementaire, est également modifiée. Le conseil devrait compter un représentant de l'Etat supplémentaire, nommé par décret sur le rapport du ministre chargé du tourisme, deux représentants des actionnaires autres que l'Etat et les salariés, qui n'étaient pour l'instant pas représentés et un administrateur supplémentaire représentant les salariés ; il perdra une personnalité qualifiée. Ainsi, la composition finale du conseil d'administration devrait compter 6 représentants de l'Etat, 6 représentants des salariés, 2 représentants des salariés actionnaires dont 1 représentant du personnel navigant technique, 2 représentants des autres actionnaires et 5 personnalités qualifiées.

Les salariés actionnaires devraient être élus au sein de deux collèges réunissant respectivement le personnel navigant technique actionnaire et les autres salariés actionnaires afin d'assurer la représentation de chacune de ces deux catégories. En outre, la subordination de la représentation des salariés actionnaires à la détention d'une part minimale du capital de la société ne devrait pas constituer une contrainte trop lourde, puisque ce seuil devrait être fixé à 2 %.

Puis, le rapporteur a souligné qu'il avait pu constater, lors d'auditions d'organisations syndicales représentatives d'Air France, une nette amélioration du climat social de l'entreprise puisque ces dernières ont accueilli favorablement le projet de loi. Il a estimé que le renforcement du rôle du conseil d'administration ne serait pas neutre et modifierait probablement la stratégie commerciale d'Air France. Si le développement d'alliances avec d'autres compagnies aériennes est évidemment nécessaire, il convient d'examiner avec vigilance les conséquences du développement de la société en termes d'infrastructures aéroportuaires, notamment à Paris-Charles-de-Gaulle qui risque de parvenir rapidement à saturation. Il a enfin souhaité que l'ensemble des salariés puissent participer activement au conseil d'administration, notamment les catégories autres que le personnel navigant technique qui y est déjà bien représenté.

M. Paul Patriarche a souligné que le projet prévoyait de supprimer une disposition du code de l'aviation civile selon laquelle aucune subvention ne peut être allouée à Air France pour les lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aérien, au motif que ce cas de figure est désormais régi par les règles communautaires. Il s'est inquiété des conséquences de cette suppression, notamment en termes de continuité territoriale. Ainsi un appel d'offres ayant dû être annulé pour des lignes desservant la Corse, des subventions pourront-elles néanmoins être allouées à la compagnie sélectionnée lors du prochain appel d'offres si plusieurs compagnies françaises exploitent cette même ligne ?

M. Paul Patriarche a précisé que compte-tenu des dispositions de la loi dite « Sapin » et des directives européennes intervenant en matière de transport aérien, il convenait de se battre pour garder un service public, tant en matière de transport maritime qu'aérien. Dans le respect de ces textes, le problème particulier de la Corse est celui de la continuité territoriale. Il s'est donc inquiété de la disparition éventuelle de subventions qui étaient destinées à l'assurer.

Le rapporteur a reconnu que ce problème était important. Il a rappelé qu'une ligne non exploitée par plusieurs candidats et dont le maintien relevait de l'intérêt général pouvait donner lieu à subventions.

M. Paul Patriarche a indiqué que le problème qu'il évoquait ne pouvait pas être assimilé à celui d'une ligne déficitaire. Afin d'assurer des liaisons bord à bord ainsi qu'une liaison Paris-Corse, les compagnies Air Liberté, Air Littoral, Air Corse ainsi que la compagnie Corse-Méditerranée ont soumissionné. La région de Corse, du fait de son statut particulier, bénéficie d'une enveloppe de continuité territoriale qui lui permet de subventionner les compagnies aériennes à laquelle le marché est attribué, cette dernière devant alors réduire ses tarifs en conséquence. Le problème posé est donc celui de l'avenir de cette aide. Il a souhaité obtenir des réponses précises sur ce point et a déclaré qu'il serait amené à déposer un amendement lors de l'examen du projet de loi en séance publique.

M. Eric Doligé a estimé que la suppression de la disposition relative aux subventions allouées à Air France en cas d'exploitation de lignes en concurrence avec d'autres compagnies françaises méritait des explications supplémentaires. Il a donc demandé des précisions sur les possibilités que laisse le droit communautaire pour l'octroi de subventions à des compagnies aériennes. Il a également demandé des éléments d'information sur la réalisation éventuelle d'un troisième aéroport en région parisienne ainsi que sur les schémas de services collectifs.

M. André Capet, rapporteur, a estimé que l'évolution du conseil d'administration d'Air France ne serait pas neutre, puisqu'elle aura des conséquences sur la politique commerciale de la société ; ces conséquences se répercuteront probablement sur les flux que l'aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle aura à accueillir. Il a précisé qu'il étudierait plus largement cette question dans le cadre du rapport qu'il ferait sur l'évaluation de l'application du projet de loi.

M. André Lajoinie, président, a rappelé que M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, du logement et des transports s'était engagé à ce que le Gouvernement se prononce d'ici la fin de l'année, sur l'opportunité de construire un troisième aéroport international dans le grand bassin parisien.

M. Léonce Deprez ayant constaté que le projet de loi visait à adapter la législation relative à Air France, M. André Lajoinie, président, a précisé qu'il s'agissait, d'une part, d'adapter cette législation au droit communautaire et, d'autre part, de réformer la composition du conseil d'administration d'Air France. Puis M. Léonce Deprez s'est déclaré frappé par le contraste qu'il constatait entre l'enjeu crucial que constitue le développement de la compagnie Air France et la modestie du projet de loi. Il s'est demandé s'il ne convenait pas d'aller plus loin dans l'ouverture du capital de la société. Enfin, il a déploré l'emploi du verbe « pouvoir » concernant la représentation des salariés actionnaires au sein du conseil d'administration, cette formule laissant à penser que leur présence est facultative alors qu'elle doit au contraire être effective.

M. André Capet, rapporteur, a déclaré que l'importance que le Gouvernement donnait à la société Air France ne devait pas se mesurer au nombre de pages du projet de loi. L'ambition du Gouvernement est claire : la recapitalisation d'Air France à hauteur de 20 milliards de francs, ainsi que l'opération d'échange « salaires contre actions » ont permis à la compagnie de renouer avec les bénéfices et ses résultats sont aujourd'hui remarquables (60 milliards de francs pour le chiffre d'affaires, 1,6 milliard de francs pour le résultat net consolidé).

Concernant l'ouverture du capital, l'Etat détenait 95 % du capital social d'Air France en 1998, contre 56 % en 2000 et 53 % en 2003. En outre, les organisations syndicales se sont déclarées très satisfaites par le projet de loi dont elles ont estimé qu'il constituait un véritable pas en avant pour l'entreprise. L'Etat a certes « toiletté » les textes applicables à Air France mais cette opération devrait être le gage d'une plus grande souplesse de gestion de la société qui se situe parmi les premières compagnies aériennes européennes.

M. André Lajoinie, président, a noté qu'Air France était aujourd'hui rentable, grâce à la fois au redressement du secteur du transport aérien et aux efforts particuliers qu'elle a consentis. Si les problèmes de tarification ou de desserte d'aéroports sont certes importants, l'objet du projet de loi est par nature limité. Concernant la représentation des salariés, l'emploi du terme « pouvoir » n'est qu'une précaution de langage ; le rapporteur a d'ailleurs obtenu des assurances quant à la représentation effective des salariés, de telles précisions relevant du domaine réglementaire.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

(article L. 341-1 du code de l'aviation civile)

Allègement de la tutelle de l'Etat sur la société Air France
et prise en compte de dispositions communautaires

Le I de cet article propose une nouvelle rédaction du deuxième alinéa de l'article L. 341-1 du code de l'aviation civile, qui, dans sa rédaction actuelle, dispose en premier lieu que la société Air France a pour objet d'assurer l'exploitation des transports aériens dans les conditions fixées par le ministre chargé de l'aviation civile après accord, s'il y a lieu, des autres ministres intéressés. Les conditions ainsi visées sont multiples et tant d'ordre technique ou financier que relatives au statut réglementaire du personnel, au fonctionnement du conseil d'administration et de la société elle-même.

S'il fut un temps où ces dispositions étaient justifiées, l'institution d'un espace aérien européen a changé la donne. Désormais, les compagnies aériennes sont soumises à une situation réglementaire homogène au sein de cet espace de libre concurrence. Le transport aérien est régi de manière croissante par le droit communautaire, qui aborde, outre la concurrence (règlement [CEE] n° 3975/87 du Conseil du 14 décembre 1987 déterminant les modalités d'application des règles de concurrence applicables aux entreprises de transport aérien, règlement [CEE] n° 3976/87 du Conseil du 14 décembre 1987 concernant l'application de l'article 85, paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords et de pratiques concertées dans le domaine des transports aériens), des domaines aussi divers que :

- le bruit (directives n° 80/51 [CEE] du Conseil du 20 décembre 1979 et n° 89/629/CEE du Conseil du 4 décembre 1989, relatives à la limitation des émissions sonores de certains avions) ;

- les systèmes informatisés de gestion (règlement [CEE] n° 2299/89 du Conseil du 24 juillet 1989 instaurant un code de conduite pour l'utilisation de systèmes informatisés de réservation) ;

- les tarifs (règlement [CEE] n° 2409/92 du Conseil du 23 juillet 1992 sur les tarifs des passagers et de fret des services aériens) ;

- l'accès aux marchés (règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires) ;

- les règles techniques (règlement [CEE] n° 3922/91 du Conseil du 16 décembre 1991 relatif à l'harmonisation des règles techniques et de procédures administratives dans le domaine de l'aviation civile) ;

- les licences des transporteurs aériens (règlement [CEE] n° 2407/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant les licences des transporteurs aériens) ;

- l'assistance à escale (directive 96/97/CE du Conseil du 15 octobre 1996 relative à l'accès au marché de l'assistance en escale dans les aéroports de la Communauté) ;

- le personnel navigant (directive [CEE] n° 91/670 du Conseil du 16 décembre 1991 sur l'acceptation mutuelle des licences du personnel pour exercer des fonctions dans l'aviation civile).

Comme on le constate, la marge de man_uvre des Etats pour élaborer une réglementation nationale autonome en matière de transport aérien est largement contrainte par l'extension du droit communautaire dans ce domaine. Aussi le I de l'article 1er du projet de loi supprime-t-il la référence à une intervention ministérielle concernant la fixation des conditions de l'exploitation de transports aériens par Air France. Par cet allègement de la tutelle, la société voit ainsi confortée son autonomie de gestion, ce qui va dans le sens de l'évolution récente d'une ouverture de son capital à des actionnaires autres que l'Etat, ce dernier devant désormais intervenir principalement par le biais de ses représentants au sein du conseil d'administration. Notons que cet allégement de la tutelle, destiné à doter Air France d'une gestion similaire à celle de ses concurrents, ne constitue pas pour autant un désengagement total de l'Etat vis-à-vis d'une société stratégique pour notre économie nationale, puisqu'aux termes de l'article L. 342-1 du code de l'aviation civile, la société Air France est soumise au contrôle général du ministre chargé de l'aviation civile et à un contrôle économique et financier. Cette disposition reste d'actualité, puisque l'Etat détenait, au 31 mars 1999, 62,8  % du capital social de la société.

Par ailleurs, le I de l'article 1er du projet de loi supprime également, dans le deuxième alinéa de l'actuel article L. 341-1 du code de l'aviation civile, les dispositions aux termes desquelles aucune subvention ne peut être allouée à Air France pour les lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aérien. En effet, ce domaine est, lui aussi, désormais régi par des règles communautaires applicables à tous les transporteurs aériens communautaires. Notamment, l'article 4 du règlement [CEE] n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intra-communautaires, dispose que sur les liaisons intracommunautaires, ne peuvent donner lieu à subventions que les services aériens sur lesquels sont imposées des obligations de service public et pour lesquels, en l'absence de candidature de transporteur aérien, une compagnie peut être sélectionnée sur appel d'offres.

Le transporteur aérien exploite alors la liaison en exclusivité, pour une période maximale de trois ans et la subvention qui lui est versée est considérée comme une compensation du déficit constaté supporté du fait de l'exploitation de cette liaison.

Cette procédure permet ainsi de sortir du régime des aides d'Etat proscrites par le Traité de Rome, pour s'inscrire dans un régime contractuel de remboursement de services. Du fait de cette disposition communautaire, l'actuelle rédaction de l'article L. 341-1 du code de l'aviation civile n'a plus lieu d'être, puisqu'elle ne vise qu'un cas particulier parmi les liaisons visées par le dispositif européen.

Votre rapporteur souhaiterait cependant obtenir des précisions sur l'avenir des aides octroyées aux compagnies aériennes exploitant des liaisons vers la Corse de manière concurrentielle ; leur pérennité est en effet nécessaire pour assurer une continuité territoriale, comme l'a fait remarquer M. Paul Patriarche.

L'objectif étant par ailleurs d'alléger la tutelle pesant sur Air France, le II de cet article supprime la procédure d'autorisation préalable dans le cas où Air France souhaite créer, gérer ou prendre des participations dans des entreprises présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale d'exploitation de transports aériens.

Aux termes de l'article L. 310-1 du code de l'aviation civile, le transport aérien consiste à acheminer par aéronef d'un point d'origine à un point de destination des passagers, des marchandises ou de la poste. Constituent donc, par exemple, des activités annexes par rapport à l'activité principale d'Air France, la maintenance aéronautique et les activités industrielles, exercées au sein de la branche logistique industrielle par la société Construction et réparation de matériel aéronautique (CRMA), le système informatique de distribution avec le pôle Amadeus, récemment introduit en bourse et la restauration avec Servair.

L'exercice de telles activités annexes, par création, gestion ou prise de participation dans une entreprise était donc soumis à autorisation préalable, donnée par arrêté conjoint du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé des finances. Air France ayant ouvert son capital et la société se trouvant désormais inscrite dans un environnement concurrentiel, l'objet du présent projet de loi est d'accroître son autonomie de gestion afin que celle-ci soit analogue à celle de ses principaux concurrents. De ce fait, il convient de reporter le contrôle aujourd'hui exercé par l'Etat sur la société vers le conseil d'administration et l'assemblée générale de cette dernière. L'Etat, dans tous les cas, restera informé de la gestion d'Air France et pourra la contrôler par l'intermédiaire de ses représentants au sein du conseil d'administration, dont la composition sera d'ailleurs fixée par décret en Conseil d'Etat, en application de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 modifiée relative à la démocratisation du secteur public. Il est en outre probable que, pour les opérations stratégiques, le conseil d'administration (et donc les représentants de l'Etat) sera consulté. Par le II de cet article, il convient donc de supprimer une disposition aujourd'hui inadaptée compte tenu de l'évolution récente de la structure du capital d'Air France et de son environnement.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 2

(article L. 342-2 du code de l'aviation civile)

Suppression des dispositions relatives à la contrainte
d'équilibre financier de la société Air France et prise en compte des obligations de service public

L'article L. 342-2 actuel du code de l'aviation civile impose à Air France, dans son premier alinéa, de respecter une contrainte d'équilibre financier ; de ce fait, la société est tenue de couvrir par ses ressources propres l'ensemble de ses charges, à savoir ses dépenses d'exploitation, l'intérêt et l'amortissement des emprunts, l'amortissement du matériel et des installations et les provisions à constituer pour couvrir les risques de tous ordres.

Ainsi que le précise le Gouvernement dans l'exposé des motifs du projet de loi, cette contrainte d'équilibre financier n'a plus lieu d'être : l'environnement de la société étant pleinement concurrentiel et le capital de cette dernière étant désormais ouvert à des actionnaires tiers, elle n'a pas à rechercher l'équilibre financier mais la réalisation de bénéfices. Il convient donc de supprimer ces dispositions devenues obsolètes.

Par ailleurs, le projet de loi propose une nouvelle rédaction des dispositions contenues dans le deuxième alinéa de l'article L. 342-2 du code de l'aviation civile. Dans sa rédaction actuelle, cet alinéa précise que les obligations imposées à Air France dans l'intérêt général font l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges, passés entre la société, d'une part, l'Etat et les collectivités publiques de la métropole et d'outre-mer, d'autre part. Ces dispositions doivent aujourd'hui être modifiées, afin de tenir compte de la législation européenne (1).

L'article 2 prévoit une nouvelle rédaction de l'article L. 342-2 du code de l'aviation civile, afin de prendre en compte, dans le cadre des obligations devant faire l'objet de contrats préalables et qui sont imposées à Air France dans l'intérêt général, le cas spécifique des obligations de service public, définies par l'article 4 du règlement (CEE) n° 2408/92 du Conseil du 23 juillet 1992 concernant l'accès des transporteurs aériens communautaires aux liaisons aériennes intracommunautaires.

Ce règlement, dans son onzième considérant, dispose « qu'il est nécessaire, dans des cas limités, de prendre des dispositions spéciales pour les obligations de service public nécessaires au maintien de services aériens adéquats desservant les zones nationales ». Aux termes de l'article 2 du même règlement, les obligations de service public consistent en « obligations imposées à un transporteur aérien en vue de prendre, à l'égard de toute liaison qu'il peut exploiter en vertu d'une licence qui lui a été délivrée par un Etat membre, toutes les mesures propres à assurer la prestation d'un service répondant à des normes fixes en matière de continuité, de régularité, de capacité et de prix, normes auxquelles le transporteur ne satisferait pas s'il ne devait considérer que son seul intérêt commercial ».

La procédure concernant l'imposition d'obligations de service public est sensiblement plus lourde que celle relative aux obligations imposées dans l'intérêt général. Ces dernières font simplement l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges entre la puissance publique et Air France. L'article 4 du règlement précité du 23 juillet 1992 impose, dans le cas d'obligations de service public, une procédure constituée de plusieurs étapes :

- consultation par l'Etat des autres Etats membres concernés, c'est-à-dire ceux entre lesquels ou à l'intérieur desquels est exploitée la liaison aérienne visée par l'obligation de service public ;

- information préalable de la Commission et des transporteurs aériens qui exploitent la liaison ;

- imposition des obligations de service public à la compagnie aérienne ;

- publication de ces obligations par la Commission au Journal officiel des communautés européennes.

En outre, alors que la formule retenue par l'article L. 342-2 actuel du code de l'aviation civile est vague quant aux conditions qui doivent être remplies pour imposer des obligations à Air France (elles sont imposées dans « l'intérêt général », notion au contenu très évolutif et qui laisse un grand pouvoir d'appréciation en opportunité à l'Etat), les dispositions communautaires sont extrêmement précises.

Les obligations de service public constituent un cas particulier des obligations imposées dans l'intérêt général, puisqu'elles ne concernent que les liaisons intracommunautaires. Les autres liaisons assurées par Air France peuvent donc, le cas échéant, faire l'objet d'obligations imposées dans l'intérêt général. Cela n'est actuellement pas le cas. Néanmoins, on trouve dans le passé des exemples d'obligations imposées par l'Etat dans l'intérêt général. C'était le cas des liaisons assurées par Air Inter, avant que ne soit adopté le règlement [CEE] n° 2408/92 : les liaisons que cette compagnie assurait donnaient lieu à un cahier des charges et à une approbation des tarifs ; pour autant, ces obligations n'étaient pas assorties d'une subvention d'exploitation, excepté pour les liaisons vers la Corse. De même, dans les années 1980, la desserte des départements d'outre-mer, exclusivité d'Air France et activité fortement déficitaire, a donné lieu à l'imposition d'obligations dans l'intérêt général, assorties d'une subvention destinée à compenser le déficit d'exploitation ainsi supporté. Ce même type de contrat a été conclu pour compenser le déficit encouru du fait de l'utilisation d'un aéronef spécifique par une compagnie, comme Concorde pour Air France et les avions Mercure pour Air Inter.

Actuellement, le champ des obligations d'intérêt général se limite à celui des liaisons intracommunautaires, et recoupe donc celui des obligations de service public, qui donnent lieu à une procédure lourde et détaillée.

Les obligations de service public peuvent être imposées sur deux types de liaisons intracommunautaires :

- les services aériens réguliers vers un aéroport desservant une zone périphérique ou de développement, située sur le territoire de l'Etat imposant ces obligations ;

- les liaisons à faible trafic à destination d'un aéroport régional situé sur le territoire de cet Etat.

Dans les deux cas, ces liaisons doivent être considérées comme « vitales pour le développement économique de la région dans laquelle est situé l'aéroport ». Surtout, les obligations de service public ne peuvent être imposées que dans la mesure nécessaire pour assurer sur ces liaisons « une prestation de service adéquate » répondant à des normes de continuité, de régularité, de capacité et de prix auxquelles le transporteur ne satisferait pas s'il ne devait considérer que son seul intérêt commercial.

Pour être valablement imposées, les obligations de service public doivent donc se révéler nécessaires pour assurer des services de transport aérien « adéquats ». Cette adéquation est évaluée par les Etats membres, selon les critères suivants :

- l'intérêt public ;

- la possibilité de recourir à d'autres formes de transport et la capacité de ces formes de transport à répondre aux besoins considérés ;

- les tarifs et les conditions de transport aérien qui peuvent être proposés aux usagers ;

- l'effet de l'exploitation de la liaison par tous les transporteurs aériens l'exploitant ou comptant l'exploiter.

En outre, si d'autres formes de transport ne permettent pas d'assurer un service adéquat et continu, les Etats membres peuvent prévoir, dans le cadre des obligations de service public, que « tout transporteur qui compte exploiter la liaison doit garantir qu'il l'exploitera pendant une certaine période ». Si une liaison n'est exploitée par aucun transporteur aérien, l'Etat peut alors en limiter l'accès à une seule compagnie, pour une durée maximale de trois ans. Le droit d'exploitation est concédé après appel d'offres publié au journal officiel des Communautés européennes.

Enfin, l'Etat peut verser une compensation au transporteur aérien ainsi sélectionné, afin qu'il satisfasse aux normes précédemment citées et découlant des obligations de service public ; il est précisé que cette compensation doit tenir compte des dépenses et recettes engendrées par le service.

Les obligations de service public donnent donc lieu à une procédure plus lourde que celles imposées dans l'intérêt général. Surtout, elles sont soumises à des conditions bien plus rigoureuses et détaillées. C'est pourquoi, ainsi que le dispose le présent projet de loi, la nouvelle rédaction de l'article L. 342-2 du code de l'aviation civile les présente-t-elle comme des cas spécifiques, au sein des obligation imposées dans l'intérêt général, pour lesquelles l'administration dispose d'une marge de man_uvre plus importante.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 3

(article L. 342-3 du code de l'aviation civile)

Élargissement du conseil d'administration de la société Air France

Cet article remplace l'actuelle rédaction de l'article L. 342-3 du code de l'aviation civile par de nouvelles dispositions.

L'article L. 342-3 actuellement en vigueur dispose qu'en vue de financer ses immobilisations et d'augmenter son fonds de roulement, la société Air France est habilitée à émettre dans le public des emprunts qui peuvent bénéficier de la garantie de l'Etat. Cette disposition entre clairement en contradiction avec les règles européennes proscrivant les aides d'Etat, et notamment avec l'article 92 du Traité instituant la Communauté européenne. En outre, l'Etat n'a pas apporté sa garantie à un emprunt émis par Air France depuis près de 25 ans et il est clair que ce genre de mesure est désormais exclu des pratiques du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie. Il convient de supprimer ces dispositions en conséquence.

L'article 3 les remplace par une nouvelle rédaction de l'article L. 342-3 du code de l'aviation civile et précisant la composition du conseil d'administration d'Air France.

La société Air France est une société anonyme à conseil d'administration, régie par le code de l'aviation civile et, dans tout ce qui n'est pas contraire à celui-ci, par la législation française sur les sociétés anonymes ainsi que par les dispositions applicables de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 modifiée relative à la démocratisation du secteur public.

L'article 4 de cette loi prévoit des dispositions dérogatoires pour les sociétés énumérées à son annexe II, dont Air France, qui est ainsi exclue du champ d'application des dispositions relatives à la composition et au fonctionnement des conseils d'administration. Pour autant, il est précisé que les conseils d'administration des sociétés figurant à l'annexe II comprennent des représentants des salariés, élus dans des conditions prévues par la loi (voir infra). Un décret en Conseil d'Etat fixe leur nombre, s'il n'a pas été déterminé par la loi, et peut, « si les spécificités de l'entreprise le justifient, organiser la représentation de catégories particulières de salariés au moyen de collèges électoraux distincts ». Or, l'inscription d'Air France dans l'annexe II de la loi relative à la démocratisation du secteur public a été motivée par ses spécificités, et notamment la prise en compte, au sein de son conseil d'administration, de représentants du personnel navigant technique qui y siégeaient depuis 1948.

La composition du conseil d'administration d'Air France est détaillée dans les statuts de la société. Ce conseil comprend dix-huit membres, en application du troisième alinéa de l'article 4 de la loi n° 83-675 relative à la démocratisation du secteur public, qui dispose que le conseil d'administration des sociétés visées à l'annexe II de ladite loi, dont Air France, compte de neuf à dix-huit membres. Ces dix-huit membres étaient répartis comme suit, au 26 mars 1999 :

- cinq représentants de l'Etat, nommés par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile, dont :

_  un sur proposition du Premier ministre ;

_  deux sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

_  un sur proposition du ministre chargé de l'économie ;

_  un sur proposition du ministre chargé du budget ;

- six personnalités qualifiées, nommées par décret sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile et choisies soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou technologique, soit en raison de leur connaissance du transport aérien, soit en raison de leur qualité de représentant des usagers ;

- un représentant des salariés actionnaires désigné, parmi ceux-ci, par l'assemblée générale sur proposition d'une section de l'assemblée générale composée de ces seuls actionnaires. Aux termes des statuts d'Air France, il peut être procédé, en vue de la nomination de ce représentant, à la désignation des candidats par une consultation écrite des salariés actionnaires. Les trois salariés actionnaires ayant recueilli le plus grand nombre de voix à l'issue de cette consultation sont seuls autorisés à présenter leur candidature à la section de l'assemblée générale ;

- six représentants des salariés, élus par les salariés d'Air France et de ses filiales, dans le cadre de trois collèges électoraux distincts, à raison de :

_  un élu par le personnel navigant technique,

_  un élu par le personnel navigant commercial ;

_  quatre élus, dont un représentant des cadres, par les autres salariés.

En outre, assistent au conseil d'administration, avec voix consultative, deux censeurs nommés par décret respectivement sur le rapport du ministre chargé du tourisme et sur le rapport du ministre chargé de la défense.

L'ouverture du capital d'Air France à des actionnaires tiers autres que l'Etat et les salariés, ainsi que l'opération d'échange « salaire contre actions », qui a conduit à ce que les salariés actionnaires détiennent 11,4  % du capital social d'Air France au 31 mars 1999, ont rendu nécessaire de modifier la composition du conseil d'administration de la société, afin de tenir compte de la nouvelle structure de son actionnariat.

C'est l'objet du présent article, aux termes duquel le conseil d'administration d'Air France compte désormais vingt-et-un membres. Cette disposition déroge donc au troisième alinéa de l'article 4 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 modifiée relative à la démocratisation du secteur public, selon lequel ce nombre doit être compris entre neuf et dix-huit membres.

Le projet de loi soumis à votre examen reste elliptique quant à la répartition des sièges entre les membres et quant aux modalités de leur nomination ou révocation. En effet, ces précisions relèvent d'un décret en Conseil d'Etat et non de la loi. Toutefois, compte tenu des informations qui lui ont été communiquées, votre rapporteur est en mesure de vous faire part de ce que devrait être la structure du nouveau conseil d'administration d'Air France :

- six représentants de l'Etat nommés par décret, dont :

· un sur proposition du Premier ministre ;

· deux sur proposition du ministre chargé de l'aviation civile ;

· un sur proposition du ministre chargé de l'économie ;

· un sur proposition du ministre chargé du budget ;

· un sur proposition du ministre chargé du tourisme ;

- cinq personnalités qualifiées nommées par décret pris sur le rapport du ministre chargé de l'aviation civile et du ministre chargé de l'économie ;

- deux représentants d'actionnaires autres que l'Etat et les salariés, nommés par l'assemblée générale ;

- deux représentants des salariés actionnaires : au terme d'un premier tour d'élection au sein de deux sections de l'assemblée générale composées respectivement du personnel navigant technique actionnaire et des autres salariés actionnaires, les candidats détenant le plus grand nombre de voix au sein de chaque section seront proposés à l'assemblée générale à laquelle il reviendra de désigner les deux représentants. Ce système, similaire à la procédure actuellement en vigueur, a pour objectif de prendre en compte le personnel navigant technique. En effet, lors de l'opération d'échange « salaire contre actions », qui reposait sur le volontariat, les engagements réciproques souscrits par la direction et la catégorie du personnel navigant technique ont garanti la présence d'un membre de cette catégorie et actionnaire. Cela devait avoir pour conséquence d'assurer la représentation d'un salarié actionnaire supplémentaire au sein du conseil d'administration, autre que celui résultant de l'application de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, pour autant que les pilotes aient répondu en nombre suffisant à l'offre d'échange. Compte tenu du succès de cette opération (près de 80 % des pilotes y ont souscrit et détiennent entre 6 et 7 % du capital d'Air France), le mode de désignation des représentants des salariés actionnaires devrait prendre en compte la catégorie spécifique du personnel navigant technique ;

- six représentants des salariés, nommés selon les dispositions du chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public. Sont donc éligibles au conseil d'administration les électeurs âgés de dix-huit ans accomplis, et ayant travaillé dans l'entreprise ou l'une de ses filiales pendant au moins deux ans au cours des cinq dernières années. L'élection a lieu au scrutin secret, de liste, avec représentation proportionnelle à la plus forte moyenne et sans panachage selon trois collèges. Les mandats seront répartis comme suit :

- un représentant du personnel navigant technique ;

- un représentant du personnel navigant commercial ;

- quatre représentants du personnel au sol, dont un cadre.

Tout représentant des salariés peut être révoqué pour faute grave dans son mandat d'administrateur par décision du président du tribunal de grande instance, rendue en la forme des référés à la demande de la majorité des membres du conseil dont il est membre.

La composition du conseil d'administration d'Air France est donc loin d'être bouleversée ; il ne s'agit que de mettre le droit en conformité avec la réalité, à savoir la modification de la structure de l'actionnariat d'Air France. On peut néanmoins noter que, concernant les personnalités qualifiées membres du conseil, le projet de loi apporte quelques modifications. Parmi les critères présidant à leur choix, on retrouve ceux de leur compétence technique ou scientifique, ainsi que celui de leur connaissance du transport aérien. Par contre, le critère de compétence technologique a été remplacé par celui de compétence économique. Cette modification a été motivée par le rôle même des administrateurs, qui est d'assurer un contrôle de la gestion de la société ; la qualité de représentant des usagers a été supprimée de la liste de ces critères. Concernant ce dernier point, le Gouvernement estime que le terme d' « usagers » était archaïque, compte tenu de l'évolution d'Air France vers le statut d'entreprise concurrentielle ; cette dernière a en effet désormais des clients. Votre rapporteur s'interroge néanmoins sur cette suppression et souhaiterait obtenir des éléments d'explication plus convaincants sur les moyens envisagés pour renforcer le dialogue avec la clientèle, tant dans le domaine du transport des passagers que du fret.

D'après les informations fournies, des dispositions transitoires seront prévues par les décrets d'application du projet de loi. L'ensemble du conseil d'administration devrait être renouvelé une fois le présent projet de loi adopté et promulgué et dès lors qu'il aura été procédé à la nouvelle élection des représentants des salariés, selon la procédure fixée par la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

Il convient de préciser qu'aujourd'hui, le représentant des salariés actionnaires siège avec voix consultative et non délibérative, son mandat ayant expiré depuis le 31 décembre 1998. Depuis lors, il n'a pas été procédé à une nouvelle élection, ce processus étant lourd, comme nous l'avons vu plus haut ; en outre, le projet de loi ici examiné était déjà, à l'époque, en cours d'élaboration.

Le projet de loi dispose que la représentation des salariés actionnaires peut se faire par catégories et qu'elle peut être subordonnée à la détention par l'ensemble des salariés actionnaires ou par chaque catégorie d'entre eux d'une part minimale du capital social. Ces dispositions sont donc facultatives et non obligatoires. Pour autant, selon les informations transmises à votre rapporteur, les décrets d'application du projet de loi devraient prévoir que la représentation des salariés actionnaires sera subordonnée à la détention, respectivement par la catégorie des pilotes et par celle des autres salariés, de 2  % au moins du capital social de la société. Il s'agit, là encore, de faire coïncider la réalité et le droit, les pilotes détenant aujourd'hui environ 7  % du capital, les autres salariés environ 6 %, selon les dernières estimations.

Votre rapporteur tient à rappeler son attachement à une représentation suffisante des salariés au sein du conseil d'administration. En effet, l'apparition de deux nouveaux administrateurs représentant les actionnaires autres que l'Etat et les salariés ne doit en aucun cas réduire la prise en compte des intérêts des salariés, qu'ils soient actionnaires d'Air France ou pas. Il conviendrait d'ailleurs que le Gouvernement prenne des engagements en ce sens, le projet de loi ne faisant pas état de précisions quant au nombre de représentants des salariés au sein du conseil, puisque de telles dispositions sont du domaine réglementaire.

La commission a adopté cet article sans modification.

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* *

La commission a adopté l'ensemble du projet de loi sans modification.

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En conséquence, la commission de la production et des échanges vous demande d'adopter sans modification le projet de loi (n° 2067) relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations de cette société avec l'Etat, et portant modification du code de l'aviation civile.

TABLEAU COMPARATIF

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Texte en vigueur

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Texte du projet de loi

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Propositions de la Commission

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Projet de loi relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations
de cette société avec l'Etat,
et portant modification du code
de l'aviation civile

Projet de loi relatif à l'élargissement du conseil d'administration de la société Air France et aux relations
de cette société avec l'Etat,
et portant modification du code
de l'aviation civile

Code de l'aviation civile

Article 1er

Article 1er

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(Sans modification)

« Art. L. 341-1.- La société dite société Air France est régie par le présent code et, dans tout ce qu'elles n'ont pas de contraire à celui-ci, par les lois sur les sociétés anonymes.

   

Elle a pour objet d'assurer l'exploitation de transports aériens dans les conditions fixées par le ministre chargé de l'aviation civile après accord, s'il y a lieu, des autres ministres intéressés. Aucune subvention ne peut lui être allouée pour les lignes exploitées en concurrence avec d'autres sociétés françaises de transport aérien.

I.- Le deuxième alinéa de l'article L. 341-1 du code de l'aviation civile est remplacé par les dispositions suivantes : « Elle a pour objet d'assurer l'exploitation de transports aériens ».

 

Elle peut créer ou gérer des entreprises présentant un caractère annexe par rapport à son activité principale ou prendre des participations dans des entreprises de ce genre, après autorisation. Toutefois elle ne peut créer ou gérer des entreprises de fabrication de matériel aéronautique, ni prendre de participation dans de telles entreprises.

II.- Au troisième alinéa du même article, les mots : « après autorisation » sont supprimés.

 

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Article 2

Article 2

 

L'article L. 342-2 du code de l'aviation civile est remplacé par les dispositions suivantes :

(Sans modification)

« Art. L. 342-2.- La société Air France doit couvrir par ses ressources propres l'ensemble de ses dépenses d'exploitation, l'intérêt et l'amortissement des emprunts, l'amortissement du matériel et des installations et les provisions à constituer pour couvrir les risques de tout ordre.

   

Toutefois, les obligations qui lui sont imposées dans l'intérêt général font l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges, passés entre la société, d'une part, l'Etat, les collectivités publiques de la métropole et d'outre-mer, d'autre part.

« Art. L. 342-2.- Sous réserve des dispositions applicables aux obligations de service public imposées sur les services aériens réguliers intracommunautaires, les obligations qui sont imposées à la société Air France dans l'intérêt général font l'objet de contrats préalables assortis de cahiers des charges, passés entre la société, d'une part, l'Etat, les collectivités publiques de la métropole et d'outre-mer, d'autre part. »

 
 

Article 3

Article 3

 

L'article L. 342-3 du code de l'aviation civile est remplacé par les dispositions suivantes :

(Sans modification)

« Art. L. 342-3.- En vue de financer ses immobilisations et d'augmenter son fonds de roulement, la société Air France est habilitée à émettre dans le public des emprunts qui peuvent bénéficier de la garantie de l'Etat.

« Art. L. 342-3.- Par dérogation à l'article 4 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 modifiée relative à la démocratisation du secteur public, le conseil d'administration de la société Air France compte vingt-et-un membres. Indépendamment des représentants de l'Etat, des salariés, des salariés actionnaires ainsi que des actionnaires autres que l'Etat et les salariés, le conseil peut comprendre des personnalités choisies soit en raison de leur compétence technique, scientifique ou économique, soit en raison de leur connaissance du transport aérien. La représentation des salariés actionnaires peut se faire par catégories. Elle peut être subordonnée à la détention par l'ensemble des salariés actionnaires ou par chaque catégorie d'une part minimale du capital social. »

 

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() Rappelons qu'aux termes de l'article 89 du traité de Rome, « le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout Etat membre ».


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