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le 2 juin 2000

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N° 2417

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 24 mai 2000.

RAPPORT

TOME I
(sommaire)

(TOME II)

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES (1) SUR LE PROJET DE LOI (n° 2332), d'orientation sur la forêt,

PAR M. FRANÇOIS BROTTES,

Député.

--

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Bois et Forêts.

La commission de la production et des échanges est composée de : M. André Lajoinie, président ; MM. Jean-Paul Charié, Jean-Pierre Defontaine, Pierre Ducout, Jean Proriol, vice-présidents ; MM. Léonce Deprez, Christian Jacob, Daniel Paul, Patrick Rimbert, secrétaires ; MM. Jean-Pierre Abelin, Yvon Abiven, Jean-Claude Abrioux, Stéphane Alaize, Damien Alary, André Angot, François Asensi, Jean-Marie Aubron, Pierre Aubry, Jean Auclair, Jean-Pierre Balduyck, Jacques Bascou, Mme Sylvia Bassot, MM. Christian Bataille, Jean Besson, Gilbert Biessy, Claude Billard, Claude Birraux, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Franck Borotra, Christian Bourquin, Mme Danièle Bousquet, MM. François Brottes, Vincent Burroni, Alain Cacheux, Dominique Caillaud, André Capet, Patrick Carvalho, Jean-Paul Chanteguet, Jean Charroppin, Jean-Claude Chazal, Daniel Chevallier, Jean Codognes, Pierre Cohen, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Jean-Claude Daniel, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Decaudin, Mme Monique Denise, MM. Jacques Desallangre, Eric Doligé, François Dosé, Marc Dumoulin, Dominique Dupilet, Philippe Duron, Jean-Claude Etienne, Alain Fabre-Pujol, Albert Facon, Alain Ferry, Jean-Jacques Filleul, Nicolas Forissier, Jean-Louis Fousseret, Roland Francisci, Pierre Frogier, Claude Gaillard, Robert Galley, Claude Gatignol, André Godin, Alain Gouriou, Michel Grégoire, Gérard Grignon, Hubert Grimault, Lucien Guichon, Gérard Hamel, Patrick Herr, Claude Hoarau, Robert Honde, Claude Jacquot, Mme Janine Jambu, MM. Aimé Kergueris, Jean Launay, Thierry Lazaro, Jean-Yves Le Déaut, Patrick Lemasle, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Arnaud Lepercq, René Leroux, Jean-Claude Leroy, Roger Lestas, Félix Leyzour, Michel Liebgott, Lionnel Luca, Guy Malandain, Jean-Michel Marchand, Daniel Marcovitch, Didier Marie, Alfred Marie-Jeanne, Alain Marleix, Daniel Marsin, Philippe Martin, Jacques Masdeu-Arus, Marius Masse, Roland Metzinger, Pierre Micaux, Yvon Montané, Gabriel Montcharmont, Jean-Marie Morisset, Bernard Nayral, Jean-Marc Nudant, Jean-Paul Nunzi, Patrick Ollier, Joseph Parrenin, Paul Patriarche, François Patriat, Vincent Peillon, Germinal Peiro, Jacques Pélissard, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Annette Peulvast-Bergeal, MM. Serge Poignant, Bernard Pons, Jacques Rebillard, Jean-Luc Reitzer, Gérard Revol, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean Rigaud, Mme Michèle Rivasi, MM. Jean Roatta, André Santini, Joël Sarlot, Mme Odile Saugues, MM. François Sauvadet, Jean-Claude Thomas, Léon Vachet, Daniel Vachez, François Vannson, Michel Vaxès, Michel Vergnier, Gérard Voisin, Roland Vuillaume.

INTRODUCTION 9

TRAVAUX DE LA COMMISSION 13

I. - AUDITION de m. jean glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche 13

II. - DISCUSSION GÉNÉRALE 31

III.- EXAMEN DES ARTICLES 39

TITRE IER - DÉVELOPPER UNE POLITIQUE DE GESTION DURABLE ET MULTIFONCTIONNELLE 39

CHAPITRE 1ER :  LES OBJECTIFS ET LES MOYENS DE LA POLITIQUE FORESTIÈRE 39

Article 1er  (articles L. 1 à L. 14 du code forestier) : Principes fondamentaux de la politique forestière 39

- article L.  1 du code forestier : Philosophie générale de la politique forestière 41

- article L.  2 du code forestier : Rôle de l'Etat et des collectivités locales 45

- article L.  3 du code forestier : Conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers 46

- article L.  4 du code forestier : Architecture régionale de la politique forestière 49

- article L.  5 du code forestier : Rôle des propriétaires forestiers 52

- article L.  6 du code forestier : Documents de gestion des forêts 53

- après l'article L. 6 du code forestier 56

- article L.  7 du code forestier : Aides publiques aux forêts 56

- article L.  8 du code forestier : Garanties de gestion durable 58

- article L.  9 du code forestier : Obligation de reconstitution des peuplements forestiers 61

- article L. 10 du code forestier : Contrôle des coupes 63

- article L. 11 du code forestier : Fusion de procédures 64

- article L. 12 du code forestier : Chartes de territoire forestier 66

- article L. 13 du code forestier : Certification du bois 69

- article L. 14 du code forestier : Décrets en Conseil d'Etat 72

Article additionnel après l'article 1er : Accès des produits forestiers à l'appellation d'origine contrôlée 72

CHAPITRE II : LES DOCUMENTS DE GESTION DURABLE DES FORÊTS 73

Article 2 : Contenu des documents de gestion 73

CHAPITRE III : L'ACCUEIL DU PUBLIC EN FORÊT 78

Article 3 : Accueil du public 78

CHAPITRE IV : LES RÉGÉNÉRATIONS NATURELLES ET LES FUTAIES JARDINÉES 82

Article 4 (articles 1395 et 76 du code général des impôts) : Encouragements fiscaux à la régénération des forêts 82

TITRE II - FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT ET LA COMPÉTITIVITÉ DE LA FILIÈRE FORÊT-BOIS 87

CHAPITRE 1ER :  LES MODES DE VENTE DE L'OFFICE NATIONAL DES FORÊTS 87

Article additionnel avant l'article 5 : Adhésion des entrepreneurs de travaux forestiers à des coopératives d'utilisation de matériel agricole 87

Article additionnel avant l'article 5 : Révision des dispositions défavorables à l'utilisation du bois-énergie 87

Article additionnel avant l'article 5 : Obligations des acquéreurs de certains bois et forêts 87

Article additionnel avant l'article 5 : Plan d'épargne-forêt 88

Avant l'article 5  89

Article 5 : Ventes de l'Office national des forêts 89

CHAPITRE II :  DISPOSITIONS RELATIVES A LA QUALIFICATION PROFESSIONNELLE REQUISE POUR LES TRAVAUX D'EXPLOITATION DE BOIS 95

Article 6 (articles L. 371-1, 371-2 et 371-3 du code forestier) : Qualification professionnelle requise pour les personnes intervenant en milieu forestier 95

- article L. 371-1 du code forestier : Définition des travaux d'exploitation de bois 97

- article L. 371-2 du code forestier : Exigence de qualification professionnelle 98

- article L. 371-3 du code forestier : Sanctions en cas d'emploi de personnes non qualifiées 100

- après l'article L. 371-3 du code forestier : Information des donneurs d'ordres sur la qualification professionnelle des personnels employés 101

Article additionnel après l'article 6 : Modification de l'article 1144 du code rural 101

Article additionnel après l'article 6 : Accord collectif ou de branche 102

Après l'article 6  102

CHAPITRE III :  L'EMPLOI ET LA LUTTE CONTRE LE TRAVAIL DISSIMULÉ 102

Article 7 : Exonération de cotisations sociales des jeunes chefs d'entreprise agricole 102

Article 8 : Groupements d'employeurs pour le remplacement des entrepreneurs de travaux forestiers 103

Après l'article 8  104

Article 9 (article 1263 bis du code rural) : Statut des ouvriers forestiers d'Alsace-Moselle 104

Article 10  (article L. 324-11-3 du code du travail) : Déclaration des chantiers de coupes et de débardage 106

Article additionnel après l'article 10 : Pouvoirs de l'inspecteur du travail sur les chantiers de coupes ou de débardage 107

Après l'article 10 107

CHAPITRE IV : L'ORGANISATION INTERPROFESSIONNELLE 107

Article 11 : Statut des organisations interprofessionnelles sylvicoles 109

Après l'article 11  116

TITRE III - INSCRIRE LA POLITIQUE FORESTIÈRE DANS LA GESTION DES TERRITOIRES 117

CHAPITRE 1ER :  DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉFRICHEMENTS 117

Article additionnel avant l'article 12 : Maintien de la taxe sur les défrichements 117

Article 12 : Régime des défrichements 117

Article additionnel après l'article 12 : Lutte contre l'enfrichement et la déprise agricole 135

Article additionnel après l'article 12 : Modification de conséquence du code général des impôts 136

Article additionnel après l'article 12 : Coordination de l'article L. 121-1 du code rural 136

Article 13 : Coordination et adaptation du code de l'urbanisme et du code rural  136

CHAPITRE II : DISPOSITIONS RELATIVES A L'AMÉNAGEMENT AGRICOLE
ET FORESTIER 138

Article 14 : Réglementation des boisements 138

Article additionnel après l'article 14 : Possibilité de créer une association syndicale pour créer ou entretenir des chemins forestiers 140

Article additionnel après l'article 14 : Associations foncières forestières 141

Après l'article 14  141

CHAPITRE III :  DISPOSITIONS RELATIVES A LA PRÉVENTION DES INCENDIES DE FORÊTS 141

Article 15 : Prévention des incendies de forêt  143

CHAPITRE IV :  DISPOSITIONS RELATIVES A LA PRÉVENTION DES RISQUES NATURELS EN MONTAGNE 167

Article 16 (article L. 423-1 du code forestier) : Aides de l'Etat pour prévenir les risques naturels en montagne 167

Article 17 (article L. 425-1 du code forestier) : Règles de gestion et d'exploitation forestière imposées par les plans de prévention des risques naturels prévisibles 169

Après l'article 17 170

TITRE IV - RENFORCER LA PROTECTION DES ÉCOSYSTÈMES FORESTIERS OU NATURELS 171

CHAPITRE 1ER :  CONTRÔLE DES COUPES ET DES OBLIGATIONS DE RECONSTITUTION DE L'ÉTAT BOISÉ 171

Article 18 : Réforme du régime spécial d'autorisation administrative 171

Article 19 : (article L. 223-1 du code forestier) : Sanctions dissuasives à l'encontre des personnes coupables de coupes abusives 173

Article 20 : Sanctions liées au non-respect de la réglementation des coupes 175

Article 21 : Sanctions des coupes illicites 177

Article additionnel après l'article 21 :  Relèvement du montant des amendes pour coupes illicites 179

Article additionnel après l'article 21 : Sanctions contre les enlèvements de liège 179

Après l'article 21  180

CHAPITRE II :  LA PROTECTION ET LA STABILITÉ DES DUNES 180

Article 22 : Régimes de contrôle applicables aux dunes côtières et aux dunes de mer du Pas-de-Calais 180

CHAPITRE III :  DISPOSITIONS RELATIVES A LA POLICE DES FORÊTS 184

Article 23 : Adaptation de la police des forêts 184

CHAPITRE IV :  DISPOSITIONS PARTICULIÈRES AUX DÉPARTEMENTS
D'OUTRE MER 186

Article 24 : Dispositions applicables à la Guadeloupe, à la Martinique et à la Réunion 186

TITRE V -  MIEUX ORGANISER LES INSTITUTIONS ET LES PROFESSIONS RELATIVES A LA FORÊT 188

CHAPITRE 1ER :  L'OFFICE NATIONAL DES FORÊTS 188

Article additionnel avant l'article 25 : Substitution de l'expression «relèvent du régime forestier» à l'expression «soumis au régime forestier» 189

Article additionnel avant l'article 25 : Coordination 189

Article additionnel avant l'article 25 : Contrat de plan pluriannuel de l'ONF 190

Avant l'article 25  190

Article 25 (article L. 121-4 du code forestier) : Opérations confiées à l'ONF par convention 190

Article 26 : Élargissement du conseil d'administration de l'ONF 192

Article 27 : Constatation par les agents assermentés de l'ONF des contraventions
à certains arrêtés de police du maire 194

Article 28 (article L. 123-2 du code forestier) : Répartition du bénéfice net de l'ONF 195

Article 29 : Suppression de la possibilité pour l'ONF de conclure des conventions d'une durée de moins de dix ans avec des particuliers   196

Article additionnel après l'article 29 : Droit de pêche sur le domaine privé de l'Etat 196

Après l'article 29  196

CHAPITRE II :  LE RÔLE DES CENTRES RÉGIONAUX DE LA PROPRIÉTÉ FORESTIÈRE ET DES CHAMBRES D'AGRICULTURE 197

Article 30 : Centres régionaux de la propriété forestière 197

Après l'article 30  199

Article 31 : Rôle des chambres d'agriculture 200

Article 32 : Modalités de financement des centres régionaux de la propriété forestière et du centre national professionnel de la propriété forestière et programme pluriannuel d'actions en matière forestière des chambres d'agriculture   200

CHAPITRE III :  LE CENTRE NATIONAL PROFESSIONNEL DE LA PROPRIÉTÉ FORESTIÈRE 201

Article 33 : Centre national professionnel de la propriété forestière 201

CHAPITRE IV :  ORGANISATION DE LA PROFESSION D'EXPERT FONCIER ET AGRICOLE ET D'EXPERT FORESTIER 204

Article 34 (article L. 171-1 (nouveau) du code rural) : Organisation de la profession d'expert foncier et agricole et d'expert forestier 204

CHAPITRE V :  DISPOSITIONS RELATIVES A LA RECHERCHE FORESTIÈRE 207

Article 35 (article L. 521-3 (nouveau) du code forestier) : Principes et missions de la recherche en matière forestière 208

Après l'article 35  212

TITRE VI - DISPOSITIONS DIVERSES 213

Article additionnel avant l'article 36 : Perception des aides publiques pour le compte des propriétaires par les organismes agréés de maîtrise d'ouvrage 213

Article 36 : Modifications 213

Article 37 : Abrogations 216

TABLEAU COMPARATIF 223

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 383

AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 409

ORGANISMES AUDITIONNÉS PAR LE RAPPORTEUR 439

GLOSSAIRE DES TERMES FORESTIERS 441

MESDAMES, MESSIEURS,

L'Assemblée nationale peut enfin débattre de l'avenir de la politique forestière française.

En présentant ce projet de loi, le Gouvernement, éclairé en cela par les orientations du rapport présenté en août 1998 par M. Jean-Louis Bianco, orientations qui avaient rencontré un très large écho auprès de l'ensemble des acteurs forestiers, le Gouvernement donc fait preuve d'un volontarisme salutaire.

Il y a urgence, en effet, à agir. Parce que la forêt française, le bois français sont de plus en plus confrontés au choc d'un marché qui tend à se mondialiser. Et, parce que depuis la tempête de décembre 1999, la forêt française souffre.

Il faut agir aussi, parce qu'il est peu de domaines qui voient se croiser autant les exigences environnementales (préserver la forêt, c'est maintenir la biodiversité), les contraintes économiques (la « filière bois » qui représente 500 000 emplois reste déficitaire) et les demandes sociales (la forêt est de plus en plus vécue comme espace de loisirs et de bien-être). Comme il est peu de domaines où le long terme, le souci des générations futures constituent autant le cadre obligé de la réflexion et de l'action.

A l'image de l'agriculture, le secteur forestier et c'est heureux, se voit de plus en plus appliquer les principes de multifonctionnalité et de gestion durable. Et notre forêt reste riche, riche de sa diversité, riche des savoir-faire de tous ces hommes qui y consacrent leurs efforts et leur travail.

Votre rapporteur a pu mesurer toutes ces données au travers notamment d'auditions des nombreuses parties prenantes au secteur forêt-bois qu'il a pu effectuer dans le cadre de la préparation de ce rapport.

Il a pu percevoir alors les freins importants qui s'opposent au développement harmonieux de l'activité sylvicole dans notre pays.

Il existe ainsi sûrement chez nos concitoyens d'importants freins culturels et affectifs. Les Français, notamment les citadins, sensibilisés entre autres par la déforestation de l'Amazonie et les conséquences des récentes tempêtes, considèrent trop souvent l'activité sylvicole comme conduisant à une dévastation des forêts, ce qui les empêche d'appréhender correctement les différentes fonctions de la forêt, les réalités de la filière et les perspectives d'emplois qu'elle représente.

Le morcellement croissant de la propriété forestière privée, qui constitue une spécificité française, rend ensuite sa gestion particulièrement délicate. La filière n'offre qu'une rentabilité à long terme, ce qui bloque l'entrée des capitaux dans cette activité, alors que l'actualité relate régulièrement les gains considérables réalisés par certains investisseurs en quelques jours à la suite d'investissements dans la nouvelle économie.

Constitue un autre élément marquant la fragilité de la « filière bois » française et de son organisation interprofessionnelle, avec la présence de nombreuses petites entreprises familiales, la faiblesse des intégrations verticales ou encore une valorisation trop inégale de nos ressources forestières ; une fragilité qui se traduit par un déséquilibre structurel de notre balance commerciale dans ce secteur.

Il faut mentionner enfin l'extrême dureté des métiers de la sylviculture, cause de douze morts depuis le début de cette année et la diversité de nos massifs (Vosges, Landes, Bourgogne, Méditerranée, Alpes, Massif central...), des essences et des pratiques sylvicoles, qui représente paradoxalement une faiblesse en matière de compétitivité, par rapport à la monoactivité de nos principaux concurrents internationaux.

Mais, le projet de loi, c'est la conviction profonde de votre rapporteur, vient apporter des réponses significatives à ces multiples difficultés.

Il faut tout d'abord en souligner les vertus pédagogiques pour le grand public. Ce texte vient reconnaître la multiplicité des fonctions de la forêt et répond à des engagements internationaux auxquels notre pays a souscrit, notamment aux décisions prises à Helsinki lors de la conférence ministérielle de 1993, qui a défini les conditions d'une gestion durable des forêts. Ces accords conduisent ainsi à la reconnaissance de l'importance des futaies irrégulières et de la régénération naturelle, qui bénéficieront désormais de mesures fiscales d'encouragement.

Le projet de loi permet ensuite une mobilisation des acteurs de la filière, par la définition de nouvelles règles sociales, la création de dispositifs incitant au regroupement des propriétés morcelées, la modernisation des modes de vente des bois, notamment par la mise en place d'un système de certification de la qualité des produits et la reconnaissance d'une organisation interprofessionnelle plus volontariste. Le projet de loi assure également une meilleure mobilisation des territoires, tenant compte de la diversité de nos massifs, grâce aux chartes de territoires, à une prévention accrue des risques naturels et des risques d'incendie ou encore à l'amélioration de l'accueil du public dans les forêts soumises à forte fréquentation du public.

Le projet de loi doit permettre aussi de clarifier les rôles respectifs des différents acteurs de la filière ; les pouvoirs publics ont clairement la volonté de préciser, en effet, la fonction de chacun dans la gestion durable de la forêt.

Ce texte doit nous donner l'occasion d'impulser un nouveau souffle à tout un secteur d'activité et la contribution du Parlement devrait permettre à cette loi d'orientation d'être aussi une « loi d'appropriation » par tous les acteurs d'une forêt et d'une filière bois qui prennent leur source dans l'histoire de l'humanité et dont la destinée, à l'aune de ce projet de loi, s'inscrit dans une dynamique mondiale.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DE M. JEAN GLAVANY, MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE

La commission a entendu M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche au cours de sa réunion du 3 mai 2000.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche, a fait observer en préambule que son audition avait lieu un an, jour pour jour, après le colloque sur la forêt organisé par M. François Brottes et le groupe d'études sur la forêt qu'il préside, à l'Assemblée nationale.

Il a ensuite indiqué qu'héritière d'une longue histoire juridique, la législation forestière française était le reflet de siècles d'interactions entre l'homme et le patrimoine naturel.

Il appartient à la politique forestière d'accompagner l'évolution de notre environnement écologique, économique et social, dont les frontières s'étendent aujourd'hui à l'ensemble de la planète. La forêt, qui incarne le long terme et le cycle des générations, apparaît souvent anachronique et fragile, dans un monde dominé par le court terme. Elle recèle pourtant des atouts et porte en elle des valeurs qui sont indispensables pour l'équilibre de notre société actuelle et future. Le travail législatif, qui s'inscrit par définition dans la durée, trouve là un domaine d'application fondamental : les parlementaires contribueront à bâtir aujourd'hui les forêts, le cadre de vie et les matériaux que connaîtront nos arrière-petits-enfants.

Le ministre a indiqué que trois objectifs principaux avaient présidé aux travaux d'élaboration du projet de loi.

Le premier résulte du positionnement de la loi française dans le cadre juridique international, en pleine évolution après le Sommet de la Terre de Rio (1992), avec les conventions des Nations-Unies sur la biodiversité, les changements climatiques... et la nécessité de relier le droit français à un droit international de l'environnement émergeant.

Le deuxième objectif principal tient à une ouverture accrue à la société, dont les demandes, explicites ou implicites, sont de plus en plus complexes : fonctions économiques (avec par exemple l'enjeu de la certification de l'éco-matériau bois), fonctions environnementales (avec par exemple l'impact d'un bassin versant forestier sur la qualité d'une eau minérale), fonctions sociales (avec, bien au-delà des seuls loisirs en forêt, toute une dimension paysagère et culturelle). La loi doit se donner les moyens de rapports rénovés entre forêt et société.

En dernier lieu, le projet de loi vise à valoriser l'atout économique que représente le patrimoine forestier français en croissance continue depuis plusieurs dizaines d'années, dans un monde où la demande en bois augmente.

Le ministre a ensuite rappelé que la dernière loi sur la forêt datait de 1985. Le présent projet de loi s'inscrit dans une dynamique renouvelée entre tous les acteurs et partenaires de la politique forestière qui s'est traduite ces dernières années par trois évolutions majeures :

- tout d'abord, l'adhésion de tous les partenaires du secteur aux constats et aux recommandations du rapport établi pour le Premier ministre en 1998 par M. Jean-Louis Bianco. Intitulé « La forêt, une chance pour la France », ce rapport soulignait notamment l'opportunité d'un engagement résolu en faveur de la promotion de la gestion durable multifonctionnelle des forêts, du renforcement de la compétitivité économique de la filière forêt-bois, de la consolidation des emplois actuels et de la création de nouveaux emplois, essentiellement dans le monde rural ;

- la négociation d'une stratégie forestière nationale pour quinze ans a été la première manifestation de cette volonté de rénovation. Issue d'une très large concertation menée en liaison avec les acteurs économiques et de nombreux partenaires institutionnels et associatifs _uvrant dans l'aménagement du territoire, le cadre de vie, le tourisme et les loisirs et la protection de l'environnement, cette stratégie a pour objectif d'apporter une vision prospective et un plan d'action à moyen terme ;

- une réforme des financements forestiers a été conduite par le Gouvernement à travers la budgétisation, par la loi de finances pour 2000, des dépenses du fonds forestier national antérieurement assumées par un prélèvement sur la filière économique au titre d'une taxe parafiscale. Cette mesure a été saluée unanimement par les acteurs de la filière.

Le ministre a ensuite rappelé que le projet de loi avait été finalisé après les intempéries de décembre 1999 qui ont durement touché une grande partie du territoire. Un plan national pour la forêt a été mis en place rapidement par le Gouvernement pour faire face aux dégâts sans précédent subis par le patrimoine forestier et en préparer la reconstitution. Sa mise en _uvre ne fait que conforter le choix politique d'un cadre juridique renouvelé, favorisant une mobilisation solidaire des acteurs de la forêt et du bois.

Le ministre a indiqué que ses services travaillaient à l'élaboration du projet de loi depuis deux ans. Il aurait été débattu devant le Parlement cette année, même s'il n'y avait pas eu les deux tempêtes de décembre 1999. Il a jugé que cet événement nous servait car il donne un écho au projet de loi dans l'opinion, mais nous desservait également car il rend difficile la mise en _uvre d'une politique de très long terme lorsque tous les propriétaires consacrent leur énergie à gérer les dégâts et à souhaiter une indemnisation.

Le ministre a ensuite fait valoir que le projet de loi d'orientation sur la forêt s'articulait autour de quatre points forts.

Le premier de ces points est d'inscrire la gestion des forêts françaises, héritage d'une longue histoire, dans le cadre international de gestion durable des forêts, notamment le cadre des conférences ministérielles du processus paneuropéen d'Helsinki sur la protection et la valorisation des forêts en Europe.

C'est à ce souci que répond en particulier l'introduction d'un livre préliminaire dans le code forestier, qui permet de regrouper les lignes directrices qui fondent la gestion forestière, pour les présenter de manière structurée et cohérente. Ce nouveau titre assurera la lisibilité des engagements de la France en matière de gestion durable. Notre pays rejoindra ainsi les autres grands pays forestiers qui ont rénové leur loi forestière selon les principes de gestion durable.

Le deuxième point fort du projet de loi tient aux réponses qu'il propose aux nouvelles attentes de la société vis-à-vis des forêts : cadre de vie, accueil et loisirs, environnement, protection de l'air et de l'eau, production et utilisation d'éco-matériaux à base de bois. A cet effet, plusieurs principes et mesures se dégagent :

- l'affirmation de la vocation multifonctionnelle de la forêt ;

- la diversification de la palette des documents de gestion durable des forêts capables de motiver et de répondre aux besoins d'un plus grand nombre de propriétaires (avec en particulier l'instauration de deux nouveaux outils : le règlement type de gestion et le code de bonnes pratiques sylvicoles) ;

- la création de chartes de territoires forestiers, outils de formalisation de projets multifonctionnels ancrés dans les réalités de terrain. Celles-ci s'apparentent aux contrats territoriaux d'exploitation mis en place par la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 ;

- la recherche d'une meilleure protection de la forêt contre les menaces de dégradation, notamment les incendies contre lesquels une meilleure prise en compte des interfaces entre zones urbaines et zones rurales permettra une lutte plus efficace ;

- la diversification des modes de financement de la gestion forestière par la reconnaissance des fonctions actuellement non marchandes ;

- l'extension de certains avantages fiscaux (exonération temporaire de taxe foncière non bâtie) à des techniques de gestion basées sur la régénération naturelle, favorisant la diversité des peuplements forestiers ;

- l'introduction de la possibilité de la dation.

Le troisième point fort du projet de loi est de confirmer l'importance économique de la forêt avec la production d'une ressource renouvelable - le bois - créatrice de valeur ajoutée et d'emplois. De nouveaux degrés de liberté permettront aux acteurs de la filière de s'adapter à un marché mondial très concurrentiel.

Trois mesures importantes correspondant à cette orientation sont inscrites dans le projet de loi :

- un assouplissement des relations commerciales entre l'Office national des forêts (ONF) et ses clients, pour augmenter la sécurité et la fluidité des approvisionnements des entreprises ;

- des dispositions en faveur de l'élévation de la qualification professionnelle dans le secteur des travaux forestiers (cette qualification pouvant résulter d'une expérience validée), de l'amélioration des conditions de sécurité, de la lutte contre le travail dissimulé, de la stabilité des entreprises et du développement des emplois en milieu rural ;

- des facilités pour développer la solidarité de filière et structurer les organisations interprofessionnelles, assorties d'un cadrage du processus d'écocertification de la gestion durable.

Le quatrième point fort du projet de loi est d'engager les acteurs de la filière forêt-bois à structurer ensemble, et avec leurs partenaires d'autres secteurs, des projets intégrés de développement local et de gestion des territoires. Le projet de loi introduit à cet égard :

- des espaces renouvelés de concertation et de négociation, dont les chartes de territoire forestier ;

- une modulation des pouvoirs de police en matière de défrichement en fonction de l'importance de l'occupation de la forêt dans l'espace rural ;

- une mise en cohérence des actions de développement forestier avec les objectifs de gestion durable multifonctionnelle, en vue d'une meilleure articulation entre les centres régionaux de la propriété forestière, les chambres d'agriculture et l'ONF ;

- le regroupement dans un établissement public nouveau de deux structures nationales de la forêt privée : la commission nationale de la propriété forestière et l'association nationale des centres régionaux de la propriété forestière ;

- la création d'un Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière ;

- le souci d'une meilleure coordination des actions de recherche.

S'ajoutent à ces points forts un renforcement de la police forestière, notamment en matière de contrôle des coupes et d'infractions aux principes de gestion durable, et de nombreuses dispositions de toilettage et de mise en cohérence du code forestier.

Le ministre a conclu en indiquant que le projet de loi affirmait le rôle de l'Etat dans la politique forestière et ouvrait largement la voie à la contractualisation avec les collectivités territoriales et les acteurs locaux.

De même, le succès de la politique forestière réclame la participation active des autres départements ministériels ; le secteur forêt-bois concourt à la réalisation de leurs objectifs et est tributaire de leurs décisions. Le ministre chargé de la forêt attend d'eux une attention particulière pour concrétiser ces synergies chaque fois que nécessaire. Ce projet de loi d'orientation sur la forêt s'applique à la forêt dans sa globalité et sa diversité. Il a pour objectif de garantir à la collectivité une gestion durable du patrimoine forestier, tant public que privé. Il s'attache à satisfaire les demandes exprimées aujourd'hui par la société et d'assurer la transmission d'un patrimoine non dégradé et plus riche, dont les potentialités permettront aux générations futures d'assurer leurs propres besoins avec les priorités de demain.

C'est la définition même de la gestion durable des forêts, dont le texte qui est soumis au Parlement a pour ambition de préciser le cadre.

M. François Brottes, rapporteur du projet de loi d'orientation sur la forêt, a estimé que le texte présenté par le ministre de l'agriculture et de la pêche est particulièrement important, car il exprime avant tout une stratégie politique ; ce texte a aussi une dimension technique marquée, supprimant d'ailleurs plus d'articles du code forestier, qu'il n'en propose de nouveaux.

La discussion du projet de loi d'orientation sur la forêt, a poursuivi M. François Brottes, s'inscrit dans un contexte multiforme ; celui, tout d'abord, d'un bon budget de la forêt pour 2000, qui prévoyait tout à la fois une augmentation de 45  % des crédits et une suppression des taxes qui alimentaient le fonds forestier national (FFN), suppression qui a été très positive pour les entreprises de première transformation et les scieurs.

Autre élément du contexte dans lequel prend place la discussion du projet de loi, l'intervention d'un « plan national » à la suite des intempéries de décembre 1999, lesquelles ont confirmé certaines fragilités de la filière : des approvisionnements trop étroits, la difficile mutualisation des risques, les « diktats » des acheteurs sur les vendeurs, la difficulté à organiser une cohérence interprofessionnelle, la vulnérabilité des petits propriétaires forestiers, des communes forestières et de l'Office national des forêts (ONF) lui-même.

Le projet de loi s'inscrit dans le contexte aussi d'une loi de finances rectificative qui n'a pas entendu oublier la forêt, prévoyant des dotations complémentaires pour l'ONF, le passage à un taux de 5,5  % pour la TVA applicable aux travaux forestiers et la suppression des droits de mutation pour les petites parcelles. Il est souhaitable d'ailleurs que le taux de 5,5  % s'applique aussi dans l'avenir à la TVA sur la fourniture de bois de chauffage collectif, comme il est souhaitable que soit prévue la déduction des charges liées à la tempête du revenu professionnel des propriétaires forestiers.

Dernier élément du contexte, la « charte bois construction environnement » dont la mise en _uvre doit être reliée au décret d'application de « la loi sur l'air », afin d'inciter à l'utilisation de bois dans les constructions, qui est évidemment d'intérêt général.

M. François Brottes a souhaité avoir des précisions sur la date de signature de cette charte ainsi que sur celle de publication dudit décret.

Analysant ensuite le contenu même du projet de loi d'orientation sur la forêt, M. François Brottes a estimé que ce texte avait un caractère « refondateur », les fondements de la politique forestière française étant en toute hypothèse très anciens, la première ordonnance sur la forêt remontant à 1346 et le code actuel puisant sa source dans le code forestier de 1827.

Le caractère « refondateur » du projet de loi se manifeste sous quatre aspects. Ce texte, tout d'abord, n'est pas seulement « franco-français », la définition de la « gestion durable » faisant écho, par exemple, aux orientations retenues par les conférences d'Helsinki ou de Rio. Le projet de loi marque ainsi, tout particulièrement, dans son article premier, une prise de conscience irréversible du fait que la forêt française a désormais une responsabilité planétaire pour la survie des hommes et de la biodiversité.

Le projet de loi d'orientation sur la forêt, c'est le deuxième point, ne s'adresse pas seulement aux forestiers. La reconnaissance qu'il opère de la « multifonctionnalité » montre bien que la dimension économique du secteur forêt-bois n'est pas seule concernée, que les aspects environnementaux (la lutte contre l'effet de serre, le maintien de la biodiversité, la préservation des paysages, la protection contre les risques naturels) et les aspects sociaux (l'accueil du public, la découverte de la nature, l'encouragement à la promenade) sont également concernés. Ces dernières dimensions visent ainsi directement l'ensemble de la population, qui a du reste trop souvent des « idées fausses » sur l'exploitation des forêts, ce texte pouvant être le moyen d'aller vers plus de transparence et de compréhension. Le projet de loi veille de la même façon à la protection des écosystèmes, en traitant du défrichement, des coupes, des activités de protection ou de prévention.

Autre orientation du projet de loi, il permet une plus grande implication des territoires. A partir de la mise en _uvre de « chartes de territoires », il devrait rendre possible ainsi une valorisation différenciée des différents massifs, tant il est vrai que la forêt recouvre des réalités très différentes d'est en ouest et du nord au sud.

Enfin et, c'est son dernier aspect « refondateur », le projet de loi redynamise la « filière bois ». Le bois y apparaît comme un matériau « renouvelable », qui a des qualités intrinsèques incomparables ; encore faut-il qu'il ne s'enferme pas dans le ghetto de la construction bois. Encore faut-il que, maillon après maillon, la filière organise la traçabilité du produit et donne des garanties d'origine à l'utilisateur final.

La forêt française demeure à cet égard abondante, puisque la tempête n'a concerné qu'un volume correspondant à deux fois la production biologique annuelle de bois. D'autres mesures devraient permettre d'ailleurs de redynamiser la filière : la révision des modes de vente, le regroupement des propriétaires forestiers, la moralisation du travail des entreprises de travaux forestiers, la consolidation de l'interprofession, la clarification du rôle des différentes institutions.

Soulignant l'importance de ce grand « chantier législatif », qui concerne 30 % du territoire national et 100 % de nos concitoyens, M. François Brottes a demandé au ministre de l'agriculture et de la pêche d'apporter des précisions sur plusieurs points :

- les dispositions fiscales applicables aux régénérations naturelles seront-elles identiques à celles dont bénéficient les plantations artificielles ?

- de quels financements bénéficieront les « chartes de territoires » ainsi que les fonctions non marchandes de la forêt ?

- les modalités d'attribution de l'écocertification seront-elles précisées ?

- est-il raisonnable de considérer que 30 à 40  % de la forêt échappent aux exigences de la « gestion durable » ?

- l'effort mené pour le regroupement des petites parcelles est-il suffisant ?

- un dispositif sera-t-il retenu pour créer un « fonds d'épargne forestier » ?

M. Pierre Ducout a relevé plusieurs points positifs dans le projet de loi d'orientation sur la forêt :

- l'accent y est mis sur le rôle économique, environnemental et social de la forêt, tout en présentant comme majeure sa fonction économique, ce qui est cohérent compte tenu de l'accroissement des superficies boisées ;

- la spécificité des massifs est reconnue ; sur ce point, il n'y a pas une, mais des forêts en France ;

- les chartes de territoires forestiers constituent une réelle avancée ;

- les spécificités des forêts périurbaines sont reconnues, ce qui va dans le sens d'un encouragement à la prise en compte du rôle social de la forêt ;

- les moyens relatifs à la prévention des incendies sont confortés ;

- l'organisation interprofessionnelle est encouragée, ce qui constitue une évolution positive compte tenu des insuffisances actuelles ;

- en matière de recherche, il convient de disposer de moyens suffisants pour assurer l'adaptation de la forêt aux nouveaux enjeux économiques ;

- les dispositions relatives au centre national professionnel de la propriété forestière vont dans le bon sens.

Puis, M. Pierre Ducout a émis certaines observations. Concernant les conséquences de la tempête, qui a d'ailleurs pris la forme d'une tornade en Gironde et en Dordogne, les propriétaires doivent maintenant dégager les chablis (arbres tombés), ce qui se révèle impossible dans les endroits les plus touchés. Ces tornades posent, plus généralement, la question de la pérennité de la filière bois en Aquitaine, où le problème de la définition de la forêt en tant que patrimoine ou culture se pose de manière cruciale. M. Pierre Ducout a en outre estimé qu'il convenait d'aller plus loin en matière d'incitations à l'organisation de la sylviculture privée, notamment grâce à une réorganisation des structures et à des encouragements financiers au remembrement.

Pour conclure son propos, il a attiré l'attention sur les besoins de financement importants pour réparer les dégâts liés à la tempête : les chablis doivent être stockés puis transportés, et il convient que les crédits nécessaires à ces opérations ne soient pas bloqués par la direction du budget. En outre, d'ici la fin de l'année, il sera nécessaire de mener une réflexion sur les conditions d'indemnisation des petits sylviculteurs aux revenus les plus faibles, comme certains retraités agricoles, pour lesquels l'exploitation forestière constitue un complément de revenu indispensable.

M. Pierre Micaux a estimé que le projet de loi était un texte sérieux et complexe, compte tenu du nombre de ses articles et de ses références à de nombreux codes, ce qui ne simplifiait ni la tâche du Gouvernement, ni celle des parlementaires. Il a noté que le projet de loi s'appuyait sur une démarche volontariste. Néanmoins, il a regretté la trop grande place qu'il accordait à l'Etat par rapport aux propriétaires privés, voire même à l'Office national des forêts. Il a insisté sur les efforts à faire vis-à-vis de la propriété privée, qui constitue le mode prédominant de détention de la forêt et qui est pourtant mal gérée. En particulier, le rôle économique de la forêt privée n'a pas donné lieu à un traitement adéquat alors que son rendement est actuellement deux à trois fois inférieur à celui des forêts domaniales en futaie. C'est pourquoi il convient de regrouper au maximum les parcelles tout en respectant la propriété privée.

M. Pierre Micaux a par ailleurs noté que le fonds forestier national était supprimé et s'est inquiété en conséquence de l'avenir des crédits qui l'abondaient et de la satisfaction des besoins pour une gestion durable de la forêt.

Il a en outre regretté que le projet de loi n'aborde pas la question de la formation professionnelle et, plus largement, celle de l'enseignement dans l'ensemble de la filière bois, afin d'inscrire dans la durée la réflexion menée à l'occasion de l'examen du projet de loi. Il a notamment cité les exemples de l'école supérieure du bois et de l'école nationale du génie rural, des eaux et des forêts.

Concernant les mesures prises par le Gouvernement à la suite des deux tempêtes, M. Pierre Micaux a estimé que si les crédits affectés étaient peut-être suffisants, ils n'étaient « débloqués » que lentement, alors que certaines essences forestières ne peuvent attendre. C'est notamment le cas du pin ou du hêtre. Les questions de transport n'ont en outre pas été traitées de manière appropriée. Il est pourtant urgent de résoudre l'ensemble de ces problèmes, compte tenu des difficultés rencontrées à l'exportation avec la chute des cours. Il a enfin demandé quelle serait la date d'examen du projet de loi en séance publique.

M. André Lajoinie, président, a répondu que l'examen du texte devrait avoir lieu en juin prochain.

M. Jean-Michel Marchand s'est félicité en préambule que ce texte s'inscrive dans l'esprit du sommet de Rio et de la Conférence ministérielle pour la protection des forêts en Europe d'Helsinki comme en atteste la prise en compte de la nécessaire protection de la biodiversité et des biosystèmes.

Après avoir rappelé que les tempêtes de décembre avaient montré l'attachement des Français à leurs forêts, il s'est demandé de quels moyens bénéficieront les fonctions forestières non marchandes, suggérant de les financer par la fiscalité écologique.

S'agissant des plans de gestion, il a craint que le dispositif ne conduise à encourager les projets les moins ambitieux au regard de la protection de l'environnement.

Dans le même esprit, le « toilettage » du code forestier ne doit pas conduire à réduire les mesures de protection et à limiter les pouvoirs de la police des forêts.

Il a enfin rappelé l'urgence qu'il y avait à indemniser les petits exploitants forestiers victimes de la tempête et qui ne peuvent trouver de débouchés pour les bois tombés.

M. Eric Doligé a insisté sur l'importance de la formation. Il a ainsi regretté qu'après les tempêtes de décembre, les autorités du département du Loiret avaient constaté qu'il manquait, dans ce département, des bûcherons pour remettre les forêts en état. Des chômeurs et des bénéficiaires du RMI ont donc suivi des formations. Ils se sont heurtés à une première difficulté car ils devaient eux-mêmes fournir leur matériel. Puis, une fois leur formation achevée, ils n'ont pu trouver de débouchés sur place, alors que la forêt domaniale d'Orléans était loin d'être déblayée, car l'ONF prétendait ne pas pouvoir embaucher directement ces personnes. Ils ont fini par être employés dans la forêt vosgienne, l'Etat prenant en charge leurs frais de déplacement. Au contraire, dans les forêts privées, le bruit des tronçonneuses était ininterrompu, les propriétaires ayant eu recours à des bûcherons belges, anglais ou allemands dont les employeurs supportaient des charges moindres.

Aujourd'hui, dans l'Orléanais, la forêt publique est à terre et la forêt privée est totalement nettoyée de ses chablis.

M. Claude Jacquot a jugé ce projet de loi équilibré et a estimé qu'il ouvrait les grands chantiers attendus. Tout en respectant les engagements internationaux, il apporte des réponses fiscales et simplifie l'appareil législatif par un « toilettage » du code forestier. Il a toutefois regretté que l'ensemble des problèmes de la filière bois - de la sylviculture à la deuxième transformation du bois - et que la question du bois-énergie ne soient pas abordés dans le texte. La réforme de la vente des coupes est à cet égard une proposition intéressante, mais insuffisante pour tirer l'ensemble de la filière vers le haut.

Quant aux chartes de territoires forestiers, elles permettront d'affirmer la diversité des massifs forestiers. Leur spécificité doit conduire à mettre en place des outils adaptés.

Il a également souhaité l'instauration d'un dispositif plus coercitif en matière de distance d'implantation des forêts par rapport à certaines infrastructures et a appelé de ses v_ux un regroupement et une meilleure coordination de la recherche dans le domaine forestier.

Enfin, bien que les aides des centres régionaux de la propriété forestière soient importantes, il importe d'offrir des outils efficaces de gestion aux petits propriétaires forestiers.

M. Léonce Deprez a souhaité insister sur le caractère plurifonctionnel de la forêt, qui constitue un outil important dans le développement de l'économie touristique. La forêt représente en effet un atout attractif, qui favorise en retour la plurisaisonnalité de cette activité.

Il a souligné à ce propos l'importance pour les communes touristiques et leurs structures de coopération de développer leurs forêts pour mieux valoriser leur territoire. En outre, la plantation d'arbres sur de grandes superficies abandonnées par les cultures agricoles constitue un moyen pour contrôler l'extension géographique des agglomérations.

Il a considéré que les communes touristiques devraient s'attacher à développer et favoriser l'utilisation du bois pour la construction ce qui contribuerait à leur valorisation.

Il a regretté que la France doive importer massivement du papier, parce que la filière nationale du bois ne permet pas de répondre aux besoins. Le développement de ce débouché doit être favorisé, notamment par une clarification du régime de taxation applicable. A ce titre, il a craint que la mise en place de la taxe générale sur les activités polluantes ne freine la croissance de l'activité sylvicole.

En conclusion, il a estimé qu'une meilleure reconnaissance de l'activité forestière contribuerait à mieux développer l'emploi dans ce secteur.

M. Jean-Pierre Dufau a insisté sur l'importance du projet de loi, dont l'actualité est renforcée par les tornades de décembre dernier. Il a considéré à ce sujet, qu'après les décisions rapides d'aide financière aux victimes qui ont été prises, il était urgent de procéder désormais au versement d'avances.

Il a considéré que les conséquences de ce phénomène météorologique pourraient être mises à profit pour diversifier les essences plantées, moderniser les techniques d'exploitation et accroître les débouchés de la filière.

Il a souligné la volonté du Gouvernement de prendre en compte la multiplicité des aspects de la forêt où l'Etat doit occuper toute sa place. Il a estimé que les problèmes liés au morcellement de la propriété sylvicole et à la dimension des parcelles pourraient être résolus par l'élaboration de stratégies adaptées. A ce titre, les difficultés dues à la multiplicité des petites parcelles doivent conduire à unifier leur système de gestion.

Il a souhaité qu'un système de préemption foncière soit mis en place pour intégrer des parcelles privées dans des espaces plus vastes d'intérêt public.

Abordant le financement de la lutte contre les incendies, il s'est réjoui que l'Etat se soit engagé à compenser les pertes de recettes liées à la disparition du fonds forestier national, tout en demandant des précisions sur les modalités qui étaient envisagées.

Il a insisté sur la nécessité d'améliorer la formation aux différents métiers du bois, au-delà du manque conjoncturel de bûcherons dû aux conséquences des tornades. Il conviendrait également de sensibiliser les élèves des écoles d'architecture aux possibilités d'utilisation du bois dans les constructions et à l'importance de ce matériau.

Il a enfin souhaité que la recherche dans la filière soit renforcée par une meilleure coordination entre les chercheurs, afin de renforcer la compétitivité du secteur et d'améliorer la valorisation des différentes essences.

M. Robert Galley s'est interrogé sur les causes des tempêtes de décembre 1999 dont le fait qu'elles aient arraché, notamment à Versailles, des arbres plantés au 18ème siècle, illustre le caractère exceptionnel. Il a estimé essentiel pour l'avenir de nos forêts de déterminer si de tels phénomènes météorologiques étaient susceptibles de se reproduire et à quelle échéance.

M. Robert Galley a rappelé que ces tempêtes résultaient du déplacement de masses d'air chaud en provenance de l'Atlantique et qu'il conviendrait donc de déterminer si les changements climatiques, peut-être liés à l'effet de serre, expliquaient ces événements. Il a souhaité que cette réflexion puisse être conduite au plus haut niveau, par exemple par l'Académie des sciences, et a souhaité que l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ou le Gouvernement, qui dispose de davantage de moyens, se saisisse de cette question.

M. Robert Galley a conclu en jugeant qu'une telle étude constituerait le plus utile des prologues à la mise en _uvre d'un projet de loi qu'il a, à titre personnel, estimé convenable.

M. Joseph Parrenin a estimé que les accidents liés aux tempêtes illustraient la nécessité de maîtriser l'ouverture des forêts. Il a ainsi indiqué que dans sa circonscription, malgré toutes les consignes de prudence, deux décès et le cas d'un jeune homme de vingt-trois ans devenu paraplégique, mettaient en évidence le fait que les métiers de la forêt demandent une véritable qualification et présentent des risques.

M. Joseph Parrenin a ensuite souhaité que l'application des bonnes décisions, bien perçues dans l'opinion, tirant les conséquences des tempêtes soit plus rapide. Il a toutefois jugé que le dispositif commençait à se mettre en place et, qu'au regard de l'ampleur de ces catastrophes, il était évident que du temps serait nécessaire pour réagir. Il a également espéré que cette expérience permette aux pouvoirs publics d'être, à l'avenir, prêts.

Rappelant qu'il était l'élu d'un des départements les plus boisés de France, le Doubs, M. Joseph Parrenin s'est ensuite étonné de ne pas trouver dans ce projet de loi davantage de dispositions relatives à la réglementation des boisements. Il a estimé que celle-ci ne prenait en compte jusqu'à présent que les intérêts agricoles et non la préoccupation paysagère, ce qui a abouti notamment à la fermeture complète de vallées, parce que des résineux sont plantés partout.

M. Jean Proriol a indiqué qu'il avait beaucoup apprécié, d'une part, le rapport de M. Jean-Louis Bianco et, d'autre part, le travail conduit dans le cadre du groupe d'études sur la forêt présidé par M. François Brottes.

Parmi les documents communiqués par le Gouvernement, l'étude d'impact du projet de loi lui a semblé intéressante et relativement claire. En ce qui concerne le projet de loi proprement dit, M. Jean Proriol a indiqué partager l'opinion de M. Pierre Ducout : la première fonction de la forêt est une fonction économique, même s'il en existe d'autres, comme on le répète d'ailleurs depuis près de trente ans.

Il a ensuite évoqué les mesures prises pour faire face aux dégâts entraînés par les tempêtes dont il a noté que si elles avaient sûrement été fort appréciées par les scieurs et l'ensemble de ceux qui, dans la filière, bénéficient de ces aides à l'abattage , au transport et au stockage, il n'en était pas de même pour les petits propriétaires. M. Jean Proriol a ainsi évoqué le cas d'un petit propriétaire du canton de La Chaise-Dieu en Haute-Loire qui, ayant subi plus de 600 000 francs de dégâts ne se voit proposer qu'une exonération fiscale de 1 400 francs. Il a alerté le ministre sur la nécessité de faire davantage en faveur des victimes.

M. Jean Proriol a ensuite regretté que nos forêts, y compris les forêts domaniales compte tenu des habitudes de l'ONF, soient sous-exploitées. Il a jugé que des éclaircies étaient nécessaires au développement harmonieux de la forêt et qu'elles étaient insuffisantes faute d'incitations de l'aval de la filière. De ce point de vue, le projet de loi qui n'incite pas à l'utilisation de bois lui est apparu insuffisant, en particulier en regard des expériences de primes à l'utilisation du bois conduites par certains conseils régionaux notamment en Auvergne.

En ce qui concerne la gestion de la forêt privée, M. Jean Proriol a estimé que l'abaissement du seuil de superficie au-delà duquel les forêts sont soumises à un plan de simple gestion était une bonne mesure mais que sa mise en _uvre risquait d'être difficile compte tenu du manque de moyens des centres régionaux de la propriété forestière actuellement sollicités de toute part et qui ont dû recruter sous contrat à durée déterminée des personnels supplémentaires.

Il a également évoqué l'article 34 du projet de loi organisant la profession d'expert foncier et agricole et d'expert forestier, question sur laquelle il a indiqué avoir eu l'occasion de travailler dans le cadre du groupe d'études sur la forêt. M. Jean Proriol s'est étonné de constater que cet article dans sa rédaction issue du Conseil d'Etat propose l'institution d'un Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière présidé par un membre de cette juridiction. Il a rappelé que cela était tout à fait inhabituel, une étude réalisée à sa demande sur cette question par les services de l'Assemblée mettant en évidence qu'une telle disposition n'est pas prévue pour l'ordre des sages-femmes, ni pour celui des médecins, ni pour celui des masseurs-kinésithérapeutes, ni pour celui des dentistes - bien que dans ce cas un conseiller d'Etat puisse siéger avec voix délibérative au Conseil de l'Ordre sans le présider -, non plus que pour ceux des pharmaciens, des vétérinaires ou des architectes. M. Jean Proriol a donc souhaité savoir si le ministre serait prêt à accepter un amendement supprimant cette disposition.

Enfin, M. Jean Proriol a rappelé que la profession d'exploitant forestier ainsi que l'avaient illustré les récentes tempêtes, était parmi les plus difficiles exercées dans notre pays en particulier par sa pénibilité, par ses horaires, par les risques qu'elle entraîne et par sa rémunération compte tenu de la fréquente dépendance vis-à-vis de donneurs d'ordre. Il a jugé nécessaire d'encourager l'exercice de cette activité par des exonérations fiscales ou sociales spécifiques.

M. Jean-Claude Daniel a regretté que la technique du contrat territorial d'exploitation n'ait pu être utilisée à l'occasion de la tempête de décembre 1999 ; il a souhaité qu'une réflexion soit menée sur ce point dans l'éventualité d'une nouvelle crise.

M. Jean-Claude Daniel a souhaité également que l'on étudie concrètement les conditions de transport du bois en grumes et il a regretté que ce transport ait pu se révéler impossible, parce que des wagons n'avaient pas été fournis. Il a demandé également pourquoi l'on ne favorisait pas le transport du bois par voie d'eau et souhaité que l'on réduise le système de « maquignonnage ».

M. Marc Dumoulin a indiqué que la discussion du projet de loi d'orientation sur la forêt était particulièrement attendue. Il a souhaité que le statut des bûcherons des départements alsaciens et mosellan soit pris en compte et souligné que le problème du stockage du bois n'était pas correctement réglé. Il a demandé que soit prévue une véritable régulation du marché du bois.

En réponse aux intervenants, le ministre a apporté les précisions suivantes :

- s'agissant de l'exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties applicable aux régénérations naturelles, le projet de loi prévoit l'existence d'un délai techniquement nécessaire pour permettre de constater la réalité de ces régénérations ;

- le choix de la formule des chartes de territoires forestiers prouve que l'Etat n'est pas seul concerné par les questions forestières ; il s'agit là d'un outil nouveau, à caractère contractuel, qui se distingue de la technique du « contrat territorial d'exploitation », puisqu'on est en présence d'une démarche collective ; ces chartes mobiliseront des financements d'origines diverses ;

- les dispositions retenues en matière de certification sont dérivées de la politique de gestion de la qualité ; différents systèmes sont à cet égard possibles ; quant à la question de l'institution d'un « plan épargne forêt », elle pourrait recevoir une solution à l'occasion du débat parlementaire ;

- le passage à un taux de TVA de 5,5 % sur la fourniture de bois de chaleur produite à partir de chauffage collectif est effectivement souhaitable, mais suppose la modification d'une directive communautaire ;

- le projet de loi n'oblige pas au dégagement des arbres tombés (les chablis) ; il prévoit simplement la possibilité d'y obliger en cas de risques avérés ;

- les propriétaires forestiers sont tous éligibles aux aides ; mais il est vrai que les centres régionaux de la propriété foncière n'ont pas la possibilité d'identifier les plus petits d'entre eux ;

- la mise en place du plan pour la forêt consécutif aux tempêtes de décembre 1999 s'est révélée complexe, s'agissant d'une situation inédite, pour laquelle l'on ne disposait pas d'une sorte de « mémoire » d'un plan précédent ; l'exemple de l'Allemagne, qui a défini un programme d'action complexe au bout de plusieurs mois en 1990 est à cet égard révélateur de la difficulté de l'exercice ;

- l'indemnisation des petits propriétaires est apparue elle aussi difficile, compte tenu du fait qu'il s'agissait d'indemniser des pertes de biens assurables non assurés et qu'il fallait éviter les risques de généralisation à d'autres situations ;

- l'Office national des forêts et ses agents ont joué un rôle remarquable à l'occasion de la tempête de décembre 1999, y compris en matière économique, en s'opposant aux tentatives de spéculations ;

- le fonds forestier national n'est pas supprimé, mais intégralement budgété et 190 millions de francs ont été ajoutés à cette ligne de crédits. Cette mesure marque donc un réengagement de l'Etat dans la politique forestière ;

- concernant les mesures prises après la tempête et notamment l'appel à des bûcherons professionnels, le Gouvernement a eu à prendre en compte plusieurs contraintes. En premier lieu, il a souhaité respecter l'impératif de sécurité, en prohibant le recours à des non professionnels. Cela a permis d'éviter des situations dangereuses, comme cela a été le cas en Allemagne où l'on a dénombré plus de cent décès dans les deux mois qui ont suivi la tempête. En second lieu, le Gouvernement a pris l'initiative de solliciter 4 500 chômeurs inscrits à l'Agence nationale pour l'emploi et ayant une expérience du travail forestier. Bien évidemment, les solidarités nationale et internationale ont également joué, ce qui a permis à la France de bénéficier, entre autres, du concours de Guyanais, de Belges ou de Canadiens. Tout recours au travail clandestin a été exclu. Si le Gouvernement a tenté de réagir au mieux, il a été conscient que la totalité des chablis ne pourrait être récupérée ;

- en matière d'utilisation du bois comme source d'énergie, l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie et le ministère de l'aménagement du territoire travaillent actuellement à un programme, dont une partie figure déjà dans les contrats de plan Etat-régions. S'agissant de la recherche l'article 35 du projet de loi y est consacré. Un groupe de travail réunissant l'Institut national de la recherche agronomique et le Centre national du machinisme agricole, du génie rural et des eaux et forêts a également été mis en place pour tirer les leçons de la tempête ;

- s'agissant de la politique touristique, le chapitre III du titre Ier du projet de loi traite de l'accueil du public en forêt, en mettant l'accent sur le rôle des collectivités locales et notamment des communes ;

- la taxe parafiscale qui alimentait le fonds forestier national a été supprimée. La création d'éventuelles autres taxes n'a donné lieu, pour l'instant, à aucun arbitrage ;

- le statut des personnes intervenant en milieu forestier est traité à l'article 6 du projet de loi et en constitue un élément important ;

- l'orientation de l'enseignement en écoles d'architecture vers le matériau bois constitue un réel problème auquel travaille le Gouvernement ;

- concernant la tempête elle-même, on constate que les parcelles ont été touchées de manière très différente les unes des autres, l'ampleur des dégâts dépendant à la fois des essences, de l'âge des arbres et des couloirs de vent, les tornades ayant été très localisées. La tempête a constitué un phénomène exceptionnel, qui n'avait pas été observé depuis au moins un siècle. Le ministre a déclaré, à titre personnel, qu'il ne croyait pas à la thèse d'un réchauffement de la planète, mais plutôt au dérèglement du système climatique de l'hémisphère nord, en raison des activités humaines. C'est pourquoi, une accélération des phénomènes atypiques ne peut être exclue. Il convient donc de tirer les leçons de la tempête en matière de prévisions météorologiques ;

- la réglementation des boisements pour prendre en compte les aspects paysagers est traitée à l'article 14 du projet de loi. Cette mesure y a été insérée après la tempête. Pour autant, il faut éviter tout jugement « à l'emporte-pièce » selon lequel il y aurait les « bons feuillus » et les « mauvais résineux ». La France est d'ailleurs boisée en majorité de feuillus ;

- les fonctions économique, sociale et environnementale de la forêt sont liées. Il est bénéfique à l'environnement d'exploiter une forêt, d'y couper des arbres âgés pour les remplacer par des arbres jeunes. Il n'y a donc pas lieu d'opposer l'exploitation forestière, activité économique et les préoccupations environnementales ;

- l'organisation de la profession d'expert forestier est prévue à l'article 34 du projet de loi. Il ne s'agit pas d'un ordre, d'une part, parce que le Conseil d'Etat a estimé que la démographie de cette profession n'était pas suffisante, d'autre part, parce que le Gouvernement n'était pas attaché à une telle forme juridique. La réflexion menée au sein du Conseil d'Etat a conclu à un système inspiré de celui qui existe dans le secteur automobile. Le Gouvernement reste ouvert à toute proposition d'amendements sur ce point ;

- les contrats territoriaux d'exploitation peuvent contenir des volets forestiers. Ils n'ont pas été facilement utilisés pour l'instant, mais les contrats territoriaux sont encore des instruments récents ;

- les premières aires de stockage bien équipées et largement subventionnées ont été inaugurées récemment.

M. André Lajoinie, président, s'est félicité en conclusion de la qualité des interventions des commissaires et des réponses de M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche ; il a estimé que cela augurait bien du travail que l'Assemblée nationale mènerait sur le projet de loi.

II.- DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de ses réunions des 23 et 24 mai 2000, la commission a examiné, sur le rapport de M. François Brottes, le projet de loi d'orientation sur la forêt (n° 2332).

M. François Brottes, rapporteur, a tout d'abord souligné que ce projet de loi, qui était le résultat d'une longue maturation, répondait en même temps à l'actualité du fait des tempêtes de décembre dernier. Il a observé que malgré l'accélération du calendrier de son examen due au retard pris par le Sénat dans la discussion du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains, l'ensemble des acteurs de la filière du bois avaient pu être auditionnés dans le cadre de la préparation du rapport.

Le rapporteur a ensuite indiqué que la forêt recouvre en France environ 27 % du territoire métropolitain ; un tiers de cet espace, dont la superficie a doublé au cours des 150 dernières années, appartient au domaine de l'Etat et des collectivités territoriales, tandis que les deux tiers restants sont répartis entre près de 4 millions de propriétaires privés. La filière forêt-bois représente 500 000 emplois en France et le territoire forestier concerne l'ensemble de nos concitoyens, compte tenu de sa répartition géographique sur tout le pays. Il a précisé que le projet de loi ne comportait pas de dispositions spécifiquement dédiées à la Guyane, dont l'importance des forêts justifie qu'un texte législatif particulier lui soit prochainement consacré.

Considérant que le projet de loi constituait un texte refondateur nécessaire, il a évoqué cinq éléments qui représentent autant de freins au développement de l'activité sylvicole dans notre pays :

- un frein culturel et affectif. Les Français, notamment les citadins, sensibilisés par la déforestation de l'Amazonie et les conséquences des récentes tempêtes dans notre pays, considèrent encore souvent l'activité sylvicole comme une dévastation des forêts, ce qui les empêche d'appréhender correctement la réalité de la filière et les perspectives d'emploi qu'elle représente ;

- le morcellement croissant de la propriété forestière privée, qui constitue une spécificité française, rend particulièrement délicate sa gestion. En outre, la filière n'offre qu'une rentabilité à long terme ; cet élément est un frein à l'entrée des capitaux dans cette activité, alors que l'actualité relate régulièrement les gains considérables réalisés par certains investisseurs en quelques jours à la suite de leurs investissements dans la nouvelle économie ;

- la fragilité de la filière bois en France, avec de nombreuses petites entreprises familiales, la faiblesse des intégrations verticales et de son organisation interprofessionnelle, constituant un élément du déséquilibre structurel de la balance commerciale du secteur dans notre pays ;

- l'extrême dureté des métiers de la sylviculture, qui a été la cause de douze morts depuis le début de cette année ;

- la diversité de nos massifs (Vosges, Landes, Bourgogne, Méditerranée, Alpes, Massif central...), des essences et des pratiques sylvicoles, qui représente paradoxalement une faiblesse en matière de compétitivité, par rapport à la monoactivité de nos principaux concurrents.

Face à ce diagnostic, le rapporteur a exposé les réponses qu'apporte le projet de loi pour relancer l'activité sylvicole.

Il a tout d'abord souligné les vertus pédagogiques de ce texte, qui reconnaît la multiplicité des fonctions de la forêt. Il a ensuite précisé qu'il répondait à des engagements internationaux auxquels notre pays a souscrit, notamment aux décisions prises à Helsinki lors de la conférence ministérielle de 1993 qui a défini les conditions d'une gestion durable de la forêt. Ces accords conduisent à la reconnaissance de l'importance des futaies irrégulières et de la régénération naturelle, qui bénéficieront désormais de mesures fiscales d'encouragement.

Il a indiqué que le projet de loi permettrait de favoriser la mobilisation des acteurs de la filière, en définissant des règles sociales, en créant des dispositifs incitant au regroupement des propriétés morcelées, en modernisant les modes de vente des bois, notamment par la mise en place d'un système de certification de la qualité des produits et la reconnaissance d'une véritable organisation interprofessionnelle. Ce texte assurera également une meilleure mobilisation des territoires, tenant compte de la diversité de nos massifs, grâce aux chartes de territoire, à une prévention accrue des risques naturels, ou encore à l'amélioration de l'accueil du public dans les forêts situées en milieu périurbain.

Il a enfin considéré que le projet de loi permettrait de clarifier les rôles respectifs des différents acteurs de la filière ; les pouvoirs publics ont en effet la volonté de préciser la fonction de chacun dans la gestion durable de la forêt.

En conclusion, il a estimé que ce texte donnerait un nouveau souffle à l'activité sylvicole et considéré qu'il convenait désormais de passer de la définition des orientations à une nouvelle appropriation des enjeux de la filière du bois par tous les acteurs de ce secteur.

M. Pierre Micaux a jugé le projet de loi trop compliqué notamment au regard de la multitude des textes de loi et de codes auxquels ses dispositions se réfèrent. Le projet de loi ignore, par ailleurs, trop les conséquences des tornades de décembre 1999 : même si les efforts des différents ministères ont été importants, il convient d'alléger les procédures d'intervention car, comme M. Christian Pierret l'a lui-même regretté publiquement, les lenteurs administratives sont importantes et les propriétaires privés n'ont toujours bénéficié d'aucune indemnisation.

M. Pierre Micaux a également estimé que le projet de loi ne prenait pas assez en considération les propriétaires privés de forêts, qui sont au nombre de 3,5 millions de personnes et représentent deux tiers de la forêt française avec des superficies de propriété pouvant être égales à dix, voire un are. Il a dénoncé les excès d'étatisme du projet de loi qui impose trop de mesures coercitives aux propriétaires privés et peu à l'ONF et aux collectivités locales. Il s'est notamment indigné de la fixation d'amendes calculées au mètre carré de forêt qui peuvent atteindre le taux de 300 F, ce qui correspondrait plutôt à une infraction sur un terrain à bâtir. Il a rappelé que le rendement annuel maximal d'une forêt était de 4, voire 5 %, au maximum et qu'une fois déduits les impôts et charges, son rendement net annuel était de 0,82 % en moyenne.

Par ailleurs, il a fait observer que la propriété privée était particulièrement mal représentée au conseil d'administration de l'ONF, qui sur 25 membres compte 20 hauts fonctionnaires et seulement 5 représentants de la propriété privée.

Il a conclu que le projet de loi était également silencieux sur la formation professionnelle et la recherche et qu'afin de préparer des initiatives en ces matières, il avait pris contact avec les écoles de Nantes et de Nancy.

M. Jean Charroppin a rappelé que le rapport d'orientation sur la forêt remis par M. Jean-Louis Bianco avait été accueilli positivement par les professionnels et les parlementaires de tous les groupes politiques. Ces derniers attendaient le présent projet de loi d'orientation depuis un an et finalement il est discuté « au pas de charge » à l'Assemblée nationale en fin de session. Pour cette raison, il a craint que la loi ne soit pas à la hauteur du rapport de M. Jean-Louis Bianco et que beaucoup de sujets abordés par ce dernier ne soient pas discutés.

Il a conclu que l'accélération de la discussion du projet de loi évoquée par le rapporteur lui-même n'était pas adaptée aux enjeux de la forêt qu'avait très bien définis le rapport de M. Jean-Louis Bianco.

M. Eric Doligé a jugé qu'il existait une grande différence entre la teneur des propos de présentation du rapporteur et le contenu du texte du projet de loi, ce dernier ne proposant aucun dispositif sur la formation, renforçant les contraintes et accroissant la répression pénale. Il a conclu en notant que sur les 450 amendements devant être examinés par la commission, peu venaient des députés de la majorité.

M. Claude Jacquot a fait valoir que le projet de loi était attendu avec impatience. Les tempêtes de décembre 1999 ne doivent cependant pas déformer le débat sur le projet de loi d'orientation ; des mesures d'urgence ont été prises et donnent des moyens d'intervention importants. On peut certes regretter la précipitation due à l'avancement de l'examen du projet de loi de deux semaines.

Il a ensuite estimé que ce projet de loi reflétait la volonté du Gouvernement de renforcer l'aménagement du territoire. Les chartes prévues à l'article premier permettront en particulier de respecter les spécificités de chaque territoire.

Il a conclu qu'une question restait en suspens, à savoir comment attirer les investisseurs vers la forêt ? Dans ce but, il convient de ne pas dissocier les problèmes de la forêt de la question du traitement des matériaux ; il faut rester fidèle à l'approche du rapport de M. Jean-Louis Bianco qui s'intéressait autant au bois qu'à la forêt.

M. François Sauvadet a reconnu que le projet de loi était attendu mais a jugé nécessaire de tirer également les leçons des tempêtes de décembre dernier et des mesures d'urgence qui ont été prises pour l'exploitation des chablis. Il a notamment regretté l'inadaptation des plans de stockage mis en place.

Il a ensuite fait valoir que le projet de loi prenait peu en compte la dimension des forêts privées françaises qui sont morcelées. Des incitations plus fortes sont nécessaires.

Puis, il s'est demandé si les grandes lignes du rapport de M. Jean-Louis Bianco pouvaient être retrouvées dans le projet de loi. Au plan économique et financier, il a jugé que le projet de loi ne comportait pas de réponse satisfaisante de ce point de vue. Il ne contient aucune mesure relative à la budgétisation du fonds forestier national et M. François Sauvadet a invité ses collègues à adopter l'amendement de M. Pierre Micaux proposant d'instaurer un plan d'épargne forêt. Au plan de la formation et de la recherche, le projet de loi est également très en retrait au regard du rapport de M. Jean-Louis Bianco. Au plan de la gestion de la forêt privée, M. Jean-Louis Bianco proposait un moratoire sur l'application de la réglementation qui lui est opposable et qui comporte notamment 73 textes différents ; le projet de loi ne contient aucune mesure de ce type.

Il a conclu que l'opposition avait déposé des amendements afin que le projet de loi d'orientation sur la forêt puisse effectivement marquer une orientation forte en faveur de la forêt française.

M. François Vannson a rappelé que le rapport de M. Jean-Louis Bianco contenait des objectifs en termes de créations d'emplois. Il a fait savoir que les professionnels qu'il avait contactés insistaient sur la nécessité de développer les exportations et de lutter contre la concurrence accrue des pays scandinaves pour parvenir à créer des emplois. Si les professionnels ont aujourd'hui beaucoup de travail, cela est dû aux tempêtes de décembre dernier, mais le projet de loi propose peu de mesures et n'aborde aucunement les problèmes de la formation.

M. Patrice Carvalho a insisté sur la nécessité de développer les filières de transformation du bois. Actuellement les meilleurs arbres des forêts françaises, notamment celle de Compiègne, sont achetés par des entreprises étrangères pour être transformés dans des unités à l'étranger.

Il a ensuite regretté le manque de formation dans les métiers du bois, qui sont pourtant souvent des métiers à risques.

Il a également invité à adopter une gestion plus lisible et plus responsable du patrimoine forestier national ; il a considéré que certains ingénieurs de l'ONF jouaient parfois aux apprentis sorciers par certaines de leurs initiatives. Il a jugé nécessaire de prévoir des aides aux collectivités pour acquérir et entretenir des massifs forestiers, qui s'étendent chaque année de plus de 20 000 hectares en France.

Il a conclu en dénonçant l'effritement continu et considérable des effectifs des agents de l'ONF, notamment ceux affectés en forêt de Compiègne.

M. Joseph Parrenin a estimé que le projet de loi abordait les problèmes de la propriété privée notamment dans son article 1er qui y fait référence à de multiples reprises. Quant aux tempêtes de décembre 1999, le projet de loi ne peut pas prévoir des dispositions exceptionnelles qui, en raison des circonstances mêmes, sont difficilement prévisibles et peuvent se révéler inadaptées. Les réponses qui ont été données aux tempêtes de décembre dernier ne pourront être évaluées que dans les mois à venir.

Il a reconnu que les filières françaises du bois ne sont pas très performantes, surtout à partir de la deuxième transformation et dans les filières du bois résineux. Cette situation résulte en partie du fait que les donneurs d'ordre dans le bâtiment ont privilégié depuis la dernière guerre le béton et l'acier au détriment du bois. On peut s'interroger sur l'adaptation d'une mesure législative qui tendrait à revenir sur cette situation.

Il a conclu qu'il convenait de parler davantage du prélèvement en matière de gestion des forêts car c'est un élément vital pour elles ; en effet sans abattage d'arbres la forêt meurt.

M. Léonce Deprez, rappelant que diverses lois adoptées au cours de la précédente législature visaient les espaces territoriaux, a insisté sur la nécessité d'établir une cohérence entre elles et notamment entre, d'une part, les chartes de territoire forestier prévues par le projet de loi et, d'autre part, les contrats territoriaux d'exploitation créés par la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole. Il a par ailleurs considéré que le faible rendement de la forêt privée devrait conduire les collectivités locales, et notamment les structures de coopération intercommunale, à prendre en charge la responsabilité de la gestion des forêts, afin de préserver et développer leur utilité touristique.

M. Jean-Michel Marchand s'est réjoui de la volonté, affichée dans le projet de loi, d'inscrire la forêt dans une perspective de développement durable, qu'il s'agisse des forêts publiques ou privées et que ces dernières soient ou non dotées d'un plan simple de gestion. Une autre approche aurait conduit sinon à inciter à opter systématiquement pour le « moins disant environnemental ».

Il a également souligné l'importance qu'il attachait à la mutifonctionnalité de la forêt, qui permet une large ouverture de ses espaces à l'ensemble des citoyens alors qu'elle est actuellement essentiellement tournée vers une activité marchande. Il a estimé que des aides, financées à partir de plusieurs taxes affectées, et notamment de l'écotaxe, devraient contribuer à affirmer cette orientation nouvelle.

Il a également souhaité que des moyens soient mobilisés en faveur du développement de la filière et que le volet du projet de loi consacré à la recherche et à la formation soit amélioré. S'agissant enfin de l'Office national des forêts, il a souhaité que cet établissement soit désormais placé sous la double tutelle du ministre chargé de la forêt et du ministre de l'environnement.

En réponse aux intervenants, M. François Brottes, rapporteur, a apporté les précisions suivantes :

- certes, ce texte est quelque peu compliqué, il aurait cependant été difficile de faire plus simple sans affaiblir la portée juridique des propositions qu'il contient. Certaines contraintes rédactionnelles étaient inévitables, dès lors que l'on entend à la fois modifier des dispositions datant de 1827 et répondre aux exigences d'un contexte international en évolution ;

- les inquiétudes exprimées au cours de la discussion générale à propos de l'avenir de la forêt privée oublient le fait que le projet de loi harmonise considérablement les modes de gestion de cette dernière et celles des forêts publiques. Dans bien des domaines désormais, les forêts, quel que soit leur régime de propriété, seront soumises aux mêmes exigences ;

- l'examen « au pas de charge » du projet est dû aux bouleversements du calendrier de cette fin de session parlementaire liés au retard pris par le Sénat dans la discussion du projet de loi relatif à la solidarité et au renouvellement urbains. La « fenêtre » législative qui s'est ainsi ouverte a avancé sensiblement la date du passage du présent projet en séance publique ; en revanche cette occasion a permis d'assurer que la première lecture de ce texte serait menée à son terme devant l'Assemblée nationale avant la fin du mois de juin. Ne pas la saisir aurait pu conduire à retarder de six mois l'examen d'un texte qui est très attendu. S'il n'y a pas de procédure d'urgence sur ce texte, son étude pourra être menée sans précipitation ;

- le rapporteur a déposé environ 150 amendements qui traduisent sa volonté d'améliorer le projet de loi sur de nombreux points dont celui de la formation ;

- l'omniprésence de dispositions pénales au sein du texte est un effet d'optique. Les articles consacrés à cette matière sont nécessairement longs car il faut définir précisément les infractions à sanctionner. Par ailleurs, il convenait de procéder à un toilettage important de dispositions qui étaient, soit détournées, soit devenues obsolètes ou d'application difficile. Ce toilettage était indispensable et relève du domaine législatif ;

- s'il est vrai que le projet de loi ne reprend qu'une partie des propositions contenues dans le rapport de M. Jean-Louis Bianco, c'est d'abord parce que nombre des éléments que celui-ci contient ne relèvent pas du cadre de ce projet de loi. Certaines dispositions ont déjà été adoptées par ailleurs, telles que l'augmentation des dotations consacrées à la forêt, dans la loi de finances pour 2000, ou sont en cours d'élaboration, par exemple une charte sur l'incitation à l'utilisation du bois dans la construction des bâtiments publics, certains décrets d'application de la loi n° 96-1236 du 30 décembre 1996 sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie, ou encore la suppression, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2000, actuellement en cours de discussion, des droits de mutation sur les forêts pendant deux ans ainsi que la diminution du taux de la TVA sur les travaux forestiers. Il reste néanmoins que certaines dispositions du rapport Bianco ne sont pas encore inscrites dans ce texte, mais sa discussion pourra donner l'occasion d'y remédier ;

- le projet de loi doit permettre de dynamiser l'ensemble de la filière du bois, de l'amont à l'aval ;

- la concurrence des pays de Scandinavie est très forte en matière de production de bois, s'il existe dans certains cas un abus de la notion de certification technique, il n'en demeure pas moins que, dans certains domaines de la filière, les entreprises françaises sont moins performantes que leurs homologues d'Europe du Nord. Le projet de loi a pour objectif de dynamiser notre industrie et de favoriser le développement de la deuxième transformation. Il faudra notamment dans cette perspective renforcer l'interprofession de la filière ;

- le projet de loi fournira des instruments juridiques, mais la loi ne peut pas se substituer aux hommes. De leur volonté dépend l'avenir de nos massifs forestiers ;

- le projet de loi intègre pleinement la logique de territoire et de développement durable. S'agissant des contrats territoriaux d'exploitation et des chartes de territoire forestier, même si certains points peuvent être similaires, il n'est pas possible de confondre les deux démarches : le premier est signé avec un exploitant agricole, tandis que la seconde vise un territoire plus large et porte aussi sur l'utilisation de la forêt pour le développement d'activités non marchandes ;

- il convient de conserver un bon usage de l'écotaxe, qui est bien adaptée à la forêt. En revanche, la politique visant à intégrer les petits propriétaires dans la logique de la gestion durable et de l'écocertification doit être bâtie sur une démarche pédagogique. L'adhésion à un code de bonne conduite sera utile car la formation est préférable à la coercition.

La commission est ensuite passée à l'examen des articles.

III.- EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER

DÉVELOPPER UNE POLITIQUE DE GESTION
DURABLE ET MULTIFONCTIONNELLE

Le titre premier du projet de loi d'orientation qui reflète clairement la vision actuelle de la politique forestière comprend quatre articles correspondant à autant de chapitres et traitant :

- des objectifs et des moyens de la politique forestière ;

- des documents de gestion durable des forêts ;

- de l'accueil du public en forêt ;

- de l'encouragement des régénérations naturelles et des futaies  jardinées.

Chapitre 1er

Les objectifs et les moyens de la politique forestière

Article 1er

(articles L. 1 à L. 14 du code forestier)

Principes fondamentaux de la politique forestière

L'article 1er du projet de loi d'orientation crée dans le code forestier un livre préliminaire intitulé « Principes fondamentaux de la politique forestière » comprenant quatorze articles.

La nécessité d'un livre préliminaire exposant les principes qui guident la politique forestière découle de la complexité relative de cette politique et de son absence de lisibilité aux yeux des acteurs forestiers eux-mêmes, mais aussi de ceux de l'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et, en définitive, de tous nos concitoyens.

Notre code forestier paraît de surcroît peu intelligible aux étrangers, alors même que la compétition commerciale s'opère aussi autour des politiques forestières comparées et, qu'au début des années 1990, la plupart des grands pays forestiers ont remanié leurs lois forestières fondamentales pour donner une cohérence au concept de gestion durable.

L'exposé des grands principes de la politique forestière qu'opère le projet de loi est un signe aussi des temps et traduit clairement les engagements internationaux pris par la France pour la protection et la gestion durable des forêts ainsi que pour la conservation de la biodiversité, dans le cadre de la conférence des Nations Unies pour l'environnement et le développement (CNUED-Rio de Janeiro, 1992) et dans celui des conférences ministérielles pour la protection des forêts en Europe (tenues à Strasbourg en 1990, à Helsinki en 1993 puis à Lisbonne en 1998).

Il est essentiel de noter que les 14 articles inscrits dans un livre préliminaire constituent un corpus de règles et de principes s'appliquant à toutes les forêts, publiques aussi bien que privées. Ces articles n'auraient pu figurer, en effet, dans le livre premier intitulé « Régime forestier » qui ne s'applique qu'aux forêts publiques.

Le livre préliminaire du code forestier créé par l'article 1er du projet de loi définit donc les objectifs, les principes et le cadre de la politique forestière. Il précise :

- la philosophie générale de cette politique, qui s'ordonne autour des logiques de multifonctionnalité et de développement durable (article L. 1) ;

- le rôle dévolu aux différents acteurs : Etat et collectivités locales (article L. 2), conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers (article L. 3), échelons régionaux (article L. 4), propriétaires eux-mêmes (article L. 5) ;

- l'organisation des différents types de forêts autour du concept de « gestion durable », dont le respect justifie l'existence d'aides publiques au secteur forestier (articles L. 6, L. 7 et L. 8) ;

- les principes applicables en matière de coupes de forêts (articles L. 9 et L. 10) ;

- une simplification des procédures applicables au profit des propriétaires forestiers (article L. 11), la mise en place de « chartes de territoire forestier » réunissant les diverses parties prenantes à la valorisation des forêts (article L. 12) et enfin, l'esquisse d'un régime de certification du bois (article L. 13).

Article L. 1 du code forestier

Philosophie générale de la politique forestière

Cet article s'inspire des articles 1 et 2 de la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 « relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt », dispositions qui ont été codifiées à l'article 101 du code forestier ainsi que de l'article 1er de la loi n° 99-574 d'orientation agricole du 9 juillet 1999.

_  Le premier alinéa de l'article met clairement l'accent sur la multifonctionnalité de la forêt. Si la mise en valeur des forêts (la production, les services rendus) et leur protection (par exemple, lutte contre les incendies, police du défrichement, classement en forêts de protection) sont, comme dans la loi du 4 décembre 1985, « reconnues d'intérêt général », il est précisé que la politique forestière prend en compte la trifonctionnalité des forêts (fonctions économique, environnementale et sociale) et « participe à l'aménagement du territoire, en vue d'un développement durable » (formulation directement issue de l'article 1er de la loi du 9 juillet 1999 d'orientation agricole).

Le premier alinéa précise que la politique forestière a pour objet d'assurer la gestion durable des forêts ainsi que de leurs ressources naturelles (optique environnementale), de renforcer la compétitivité des différents maillons de la filière, production, récolte, puis valorisation des produits forestiers (aspect économique) et enfin de satisfaire les demandes sociales relatives à la forêt (fonction sociale).

Sur les dispositions de cet alinéa, la commission a rejeté l'amendement n° 37 présenté par M. Pierre Micaux indiquant que le renouvellement régulier et équilibré de la forêt était d'intérêt général. Elle a ensuite rejeté l'amendement n° 38 de M. François Vannson faisant référence aux fonctions de loisirs et de tourisme assumées par la forêt, le rapporteur ayant indiqué que ces activités étaient prises en compte dans les fonctions sociales de la forêt dont il était question par ailleurs.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Patrice Carvalho indiquant que la multifonctionnalité concernait non seulement les forêts, mais l'ensemble de la filière bois. Le rapporteur ayant estimé que cette préoccupation était prise en compte par un amendement qu'il présentait au même article, M. Patrice Carvalho a retiré son amendement. La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur auquel se sont associés M. Pierre Micaux et M. Patrice Carvalho retenant le développement de la qualification des emplois au nombre des objets de la politique forestière (amendement n° 186), puis elle a examiné un amendement de M. Jean Proriol défendu par M. Claude Gatignol prévoyant que la politique forestière doit veiller au maintien des forêts dans les territoires particulièrement exposés à l'érosion et aux risques naturels, notamment dans les zones de montagne. Le rapporteur ayant indiqué qu'un amendement qu'il présenterait ultérieurement sur le même article faisait droit à cette demande, M. Claude Gatignol a retiré l'amendement.

Puis la commission a adopté deux amendements du rapporteur, le premier faisant référence à la production forestière, le second, auquel s'est associé M. Patrice Carvalho, à la valorisation du bois et des autres produits forestiers. (amendements nos 187 et 188)

_  Le deuxième alinéa de l'article L. 1 définit la notion de gestion durable, en se référant explicitement à la résolution H 1 adoptée par la conférence ministérielle pour la protection des forêts en Europe d'Helsinki de juin 1993.

La gestion durable des forêts est ainsi définie comme une gestion qui maintient leur diversité biologique, leur productivité, leur capacité de régénération (l'orme, par exemple, se régénère très bien), leur vitalité (autrement dit, leur santé) et leur aptitude à satisfaire, actuellement et dans l'avenir, aux trois fonctions, économique, écologique et sociale pertinentes, aux trois niveaux, local, national et international, sans causer de préjudices à d'autres écosystèmes.

La prise en compte par le projet de loi d'une définition opérée au niveau international révèle clairement la dimension mondiale qu'ont désormais les questions forestières ; elle montre aussi que notre pays mesure sa responsabilité vis-à-vis de la planète pour aujourd'hui et pour l'avenir.

Sur cet alinéa, la commission a rejeté l'amendement n° 8 de M. Pierre Micaux indiquant que la gestion durable des forêts n'a pas seulement pour objet de maintenir, mais d'améliorer diverses données, telles que la régénération ou la vitalité des forêts, le rapporteur ayant indiqué que, sur ce point, le dispositif de l'article L. 1 correspondait au libellé retenu à la conférence paneuropéenne d'Helsinki en juin 1993 et donc à un engagement pris par la France.

La commission a ensuite examiné un amendement présenté par le rapporteur prévoyant que le développement durable des forêts ne devait pas compromettre l'équilibre des exploitations ainsi que le maintien d'un équilibre sylvo-cynégétique harmonieux permettant la régénération naturelle des peuplements forestiers.

Un débat dans lequel sont intervenus MM. François Sauvadet, François Patriat, François Vannson, Robert Galley, Félix Leyzour, Joseph Parrenin, Jean Charroppin et Mme Marie-Hélène Aubert, celle-ci usant de la faculté que l'article 38 du Règlement confère aux députés d'assister aux réunions des commissions dont ils ne sont pas membres, a permis de souligner la complexité de cet amendement et la difficulté de parvenir à un équilibre sylvo-cynégétique. Le rapporteur a suggéré de retenir une nouvelle formulation pour cet amendement, précisant que le développement durable des forêts implique un équilibre général des exploitations qui nécessite un équilibre sylvo-cynégétique harmonieux permettant la régénération naturelle des peuplements forestiers sans protection spéciale. Cet amendement a été adopté par la commission, MM. Jean Charroppin, Robert Galley, Claude Gatignol, Claude Jacquot, Félix Leyzour, Pierre Micaux, François Patriat, François Sauvadet et François Vannson exprimant leur volonté d'en être cosignataires (amendement n° 189).

_  Le troisième alinéa de l'article L. 1 traite du caractère interministériel de la politique forestière. Il est précisé que celle-ci prend sa part dans plusieurs politiques essentielles à objet économique (politiques de développement rural, de défense et de promotion de l'emploi) ou environnemental (politiques de lutte contre l'effet de serre par la fixation de carbone, de préservation de la biodiversité, de protection des eaux et des sols et enfin, de prévention des risques naturels).

La politique forestière peut aider ainsi à répondre aux grands défis qui nous sont lancés aujourd'hui et surtout dans l'avenir.

Sur cet alinéa, M. Patrice Carvalho a retiré un amendement faisant référence à la nécessité d'une politique de l'emploi « pérenne et qualifié », après que le rapporteur eut rappelé qu'un amendement avait été précédemment adopté par la commission sur le développement de la qualification des emplois.

_  Le quatrième alinéa de l'article L. 1 reprend une formule de la loi du 4 décembre 1985 codifiée à l'article 101 du code forestier, en précisant que la politique forestière tient compte des spécificités des forêts relevant du régime forestier (forêts appartenant au domaine de l'Etat et d'autres collectivités, principalement des communes, relevant du livre premier du code) et des forêts appartenant aux particuliers (qui représentent 70 % de l'ensemble et sont régies par le livre II du code forestier). La politique forestière enfin, précise le projet de loi, encourage le regroupement de gestion, permettant à la propriété forestière de disposer d'une taille critique suffisante ainsi que l'organisation des acteurs de la forêt en interprofession (dont il sera question à l'article 11 du projet de loi).

La commission a adopté, conformément à l'avis du rapporteur, un amendement de M. Claude Jacquot précisant que la politique forestière prend en considération les modifications et les phénomènes climatiques, M. Robert Galley ayant estimé qu'il fallait tenir compte en la matière des observations scientifiques prouvées (amendement n° 190). La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur faisant allusion à une « forêt relevant du régime forestier », plutôt qu'à une « forêt soumise » à ce régime, le rapporteur, approuvé par M. François Sauvadet, ayant souligné la modernité d'une telle formulation (amendement n° 191).

La commission a ensuite examiné un amendement du rapporteur et l'amendement n° 137 de contenu similaire de M. Pierre Micaux prévoyant que la politique forestière développe activement les conditions du regroupement technique et économique des propriétaires forestiers. M. Pierre Micaux a annoncé qu'il retirerait l'amendement n° 137 et s'est allié à l'amendement du rapporteur, qui a été adopté par la commission (amendement n° 192).

_  Le dernier alinéa de l'article L. 1 précise que la politique forestière a vocation à être adaptée aux niveaux régional et local, une importance différente pouvant être accordée aux fonctions précédemment analysées, suivant les enjeux identifiés localement et les objectifs prioritaires poursuivis par les propriétaires. Cette souplesse, cette modulation possibles permettent de tenir compte aussi des spécificités présentées par trois types de nos forêts : les forêts des zones de montagne, des zones méditerranéennes et enfin les forêts soumises à une forte fréquentation du public (forêts périurbaines essentiellement).

Sur ce dernier alinéa, la commission a examiné un amendement de M. Paul Patriarche indiquant que la politique forestière favorise les politiques de massifs par la mise en place de schémas directeurs d'aménagement forestier. M. Pierre Micaux a estimé indispensable de promouvoir la politique de massifs, mais le rapporteur a estimé que cet amendement alourdissait la rédaction du projet de loi et, qu'en toute hypothèse, les orientations régionales forestières intégraient déjà ces préoccupations. La commission a rejeté l'amendement.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Claude Jacquot faisant référence d'une manière générale aux objectifs de la politique forestière. Le rapporteur ayant estimé que cet amendement était significativement pris en compte dans le projet de loi. M. Claude Jacquot a retiré son amendement. Puis, la commission a adopté un amendement du rapporteur faisant référence aux contraintes naturelles d'exploitation supportées par les forêts méditerranéennes et de montagne, MM. Claude Gatignol, s'exprimant également au nom de M. Jean Proriol, Robert Honde, Claude Jacquot, Pierre Micaux et François Vannson ayant fait part de leur volonté de cosigner cet amendement (amendement n° 193).

La commission a ensuite examiné deux amendements de contenu similaire, l'un du rapporteur, l'autre n° 139 de M. Pierre Micaux précisant que la politique forestière prend en compte le long terme indispensable aux actions forestières par ses orientations, ses investissements et ses institutions. M. Pierre Micaux a annoncé qu'il retirerait l'amendement n° 139 ; la commission a ensuite adopté l'amendement du rapporteur, cosigné par MM. Pierre Micaux et Claude Jacquot (amendement n° 194).

Article L. 2 du code forestier

Rôle de l'Etat et des collectivités locales

Cet article précise que la politique forestière relève de la compétence de l'Etat et que les collectivités locales et leurs groupements sont habilités à conclure des contrats avec l'Etat pour concourir à la mise en _uvre de cette politique.

La reconnaissance du rôle spécifique de l'Etat figure déjà au nombre des principes de la politique forestière posés à l'article L. 101 du code forestier, dont les dispositions sur ce point sont issues de l'article 2 de la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 « relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt ». Il y est précisé que : « la politique de mise en valeur économique, écologique et sociale relève de la compétence de l'Etat. »

Cette situation est due au fait que la politique forestière s'attache par excellence à des objectifs de long terme, lequel constitue le domaine d'élection de l'action de l'Etat ; les acteurs professionnels tiennent d'ailleurs tout particulièrement à la conduite d'une politique nationale qui soit lisible au plan international. Ceci est apparu clairement dans les réflexions des groupes de travail préparatoires, où l'existence d'une politique forestière d'Etat a été considérée comme un atout réel pour faire face à une compétition internationale de plus en plus vive et à des exigences environnementales de plus en plus fortes.

L'innovation apportée par l'article L. 2 réside dans la possibilité explicitement reconnue aux collectivités territoriales et à leurs groupements de conclure des contrats avec l'Etat pour la mise en _uvre de la politique forestière.

Lors de son examen de l'article L. 2, après avoir rejeté un amendement de M. Jean Proriol présenté par M. Claude Gatignol précisant que l'Etat supporte les coûts de la politique forestière, la commission a examiné un amendement présenté par M. Patrice Carvalho prévoyant que le concours des collectivités territoriales à la mise en _uvre de la politique forestière doit respecter la cohérence nationale de celle-ci. Le rapporteur s'étant déclaré favorable à cet amendement, MM. François Vannson et François Sauvadet se sont interrogés sur l'intérêt d'une telle mention. Le rapporteur a fait valoir que cette précision lui semblait opportune car, compte tenu de la diversité des stratégies de gestion reflétant la variété des massifs forestiers, cette cohérence ne lui semblait pas assurée. M. Pierre Ducout a proposé de modifier cet amendement pour préciser que c'est l'Etat, compétent en matière de politique forestière, qui assure la cohérence nationale de celle-ci. M. François Sauvadet a déclaré partager pleinement cette analyse et a ajouté que les contrats passés par l'Etat avec des collectivités territoriales constituaient au contraire le moyen de prendre en compte la diversité des situations locales. M. Félix Leyour ayant accepté cette modification en précisant que l'important était que l'idée soit reprise, la commission a adopté l'amendement de M. Patrice Carvalho ainsi rectifié (amendement n° 195).

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean Proriol présenté par M. Claude Gatignol disposant que les crédits du Fonds forestier national doivent être affectés à la mise en _uvre de la politique forestière. M. Claude Gatignol a indiqué qu'il lui paraissait naturel que ce fonds contribue à assurer le coût, négligé, de la gestion durable des forêts et MM. Pierre Micaux et François Sauvadet ont déclaré soutenir cet amendement. Le rapporteur a indiqué qu'il partageait la préoccupation que traduit cet amendement mais que sa recevabilité financière lui semblait incertaine. Il a ensuite précisé qu'il déposerait un amendement à l'article L. 3 mentionnant le Fonds forestier national afin d'assurer sa pérennité et il a invité M. Claude Gatignol à retirer son amendement, ce que celui-ci a accepté de faire.

Article L. 3 du code forestier

Conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers

L'article L. 3 fixe la composition et les attributions du conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers (CSFPF), organisme consultatif placé auprès du ministre chargé des forêts jouant un rôle « transversal », de coordination des politiques suivies en matière forestière.

Il s'agit là d'un organisme déjà existant régi par le décret n° 78-1234 du 26 décembre 1978, dont, en réalité, seule la commission permanente régie par ce même texte se réunit aujourd'hui régulièrement.

L'article L. 3 s'inspire des dispositions de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole qui a redéfini dans son article 72 la composition et les missions du Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et agro-alimentaire (CSO), ces dispositions ayant été intégrées à l'article L. 611-1 du code rural.

L'article L. 3 prévoit que le conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers est composé de représentants de l'Etat, des collectivités locales et de leurs groupements, des organisations professionnelles représentatives ainsi que d'usagers de la forêt. Comme pour le CSO, la composition du conseil supérieur de la forêt fait ainsi une place particulière aux représentants des professionnels et de la société civile.

Cet organisme a pour missions, selon les dispositions du projet de loi et, l'on retrouve là le libellé même retenu par la loi d'orientation agricole pour le CSO, de participer à la définition, à la coordination, à la mise en _uvre et à l'évaluation de la politique forestière, mais aussi de ses modulations régionales, la politique conduite localement ayant aussi toute son importance.

Un décret en Conseil d'Etat, prévu à l'article L. 14 du code forestier précise les modalités de mise en _uvre de ces dispositions.

L'article L. 3 a ainsi pour objet de revivifier une instance, qui a connu d'ailleurs une légère activité au cours des deux dernières années, la « réactivation » du Conseil supérieur d'orientation (CSO) en matière agricole pouvant, à cet égard, servir d'exemple au CSFPF.

L'intérêt d'une telle instance ne paraît pas discutable, en effet, puisque celle-ci est susceptible de réunir des représentants du Parlement, des ministres intéressés (agriculture et forêt, industrie, intérieur, environnement, départements et territoires d'outre-mer, aménagement du territoire), mais aussi des professionnels des différents maillons de la filière, des communes forestières ou encore d'associations de protection de l'environnement, instances qui sont toutes parties prenantes d'une politique forestière novatrice et équilibrée.

Rappelons que l'article L. 611-1 du code rural qui comporte des dispositions sur le CSO prévoit que celui-ci délègue normalement ses compétences en matière de forêt et de transformation du bois au conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers et que, lorsque les problèmes de la forêt et de la transformation du bois sont évoqués au sein du CSO, le conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers y est représenté.

Lors de son examen du rapport, la commission a examiné un amendement du rapporteur proposant une rédaction globale de l'article L. 3 du code forestier relatif au Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois. Son auteur a indiqué que cet amendement avait pour objet de mettre l'accent sur la nécessaire prise en compte de l'aval de la filière par une nouvelle dénomination de cette instance et de prévoir l'association de celle-ci au suivi des actions du Fonds forestier national et à l'élaboration de la stratégie de recherche en matière forestière. Il a ajouté que cet amendement proposait également de modifier la composition de ce conseil pour l'ouvrir aux représentants des organisations syndicales du personnel, des associations d'usagers de la forêt ainsi que celles d'usagers de la nature et d'instituer une instance restreinte, le Comité de politique forestière, composé de vingt membres désignés parmi les membres du Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois, susceptible de se réunir plus souvent que celui-ci, pour conseiller le ministre chargé des forêts dans le suivi de la mise en _uvre de la stratégie forestière française ainsi que dans la mise en _uvre des textes législatifs et réglementaires et du budget de la forêt dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État.

En réponse à MM. Pierre Ducout et Pierre Micaux qui s'interrogeaient sur l'absence parmi les membres de conseil, pour le premier, de parlementaires et, pour le second, de représentants de la propriété forestière privée, le rapporteur a indiqué qu'il était envisageable qu'un parlementaire siège dans le conseil en qualité de représentant de l'État et que la propriété forestière privée serait représentée par une ou plusieurs organisations professionnelles.

M. François Sauvadet a estimé qu'il aurait été préférable de préciser plus clairement que des parlementaires et des représentants de la propriété forestière privée siégeraient au sein de ce conseil. Il a ensuite demandé des précisions sur les modalités de désignation des membres du comité de politique forestière et sur les missions de celui-ci. Cette instance sera-t-elle chargée de conseiller le ministre sur le suivi de la mise en _uvre de la politique forestière, donc a posteriori, ou sur la mise en _uvre et le suivi de celle-ci et donc également a priori ?

M. Pierre Ducout a indiqué que l'amendement prévoyait que les modalités de désignation des membres du comité de politique forestière seraient précisées par décret en Conseil d'État. M. François Brottes, rapporteur, a estimé que ces modalités lui semblaient en effet d'ordre réglementaire. Évoquant les missions du comité de politique forestière, il a jugé que l'élaboration et le suivi de la politique forestière seraient, dans les faits, étroitement liés, les orientations pour l'avenir étant définies à partir des résultats du passé.

M. François Sauvadet a proposé de sous-amender l'amendement du rapporteur pour que le comité de politique forestière conseille le ministre sur la mise en _uvre et le suivi de la politique forestière et non sur le suivi de la mise en _uvre de celle-ci.

Après avoir rejeté ce sous-amendement, la commission a adopté l'amendement du rapporteur auquel se sont associés MM. Patrice Carvalho et Claude Jacquot (amendement n° 196).

En conséquence, un amendement de M. Patrice Carvalho, trois amendements de M. Claude Jacquot, l'amendement n° 40 de M. Pierre Micaux et un amendement de M. Jean Proriol sont devenus sans objet.

Article L. 4 du code forestier

Architecture régionale de la politique forestière

Après l'article L. 1 qui définit la philosophie générale de la politique forestière et les articles L. 2 et L. 3 qui précisent l'organisation nationale de cette politique, l'article L. 4 du projet de loi en décrit l'architecture régionale.

Si la politique de mise en valeur économique, écologique et sociale de la forêt relève de la compétence de l'Etat, son application doit de fait être adaptée aux réalités locales.

L'article L. 4 reprend donc la technique des orientations régionales forestières apparue avec la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 « relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt » et codifiée à l'article L. 101 du code forestier. Ces orientations régionales forestières (ORF), qui ont toujours concerné les forêts publiques aussi bien que privées sont élaborées par les commissions régionales de la forêt et des produits forestiers (créées par le décret n° 86-483 du 14 mars 1986 et qui réunissent, sous la présidence du préfet de région, des représentants du conseil régional, d'établissements publics et d'organismes socio-professionnels) puis arrêtées par le ministre chargé des forêts après avis des conseils régionaux concernés. Elles constituent un cadre cohérent de priorités et d'actions à mener pour le développement de la forêt et de la filière bois.

A un échelon inférieur à celui des orientations régionales forestières, figurent des instruments de gestion diversifiés selon les types de forêts et qui sont eux-mêmes un reflet de la diversité de nos espaces forestiers :

- les directives régionales d'aménagement pour les forêts domaniales ;

- les schémas régionaux d'aménagement pour les autres forêts relevant du régime forestier ;

- les schémas régionaux de gestion sylvicole des forêts privées, pour lesquels l'avis du centre national professionnel de la propriété forestière est requis.

Ces directives et schémas qui s'inscrivent dans le cadre défini par les ORF sont opposables aux documents de gestion qui constituent le dernier échelon, l'échelon individuel, applicable à chaque forêt.

L'article L. 4 énumère précisément ces différents documents de gestion, dont l'analyse plus détaillée est effectuée à l'article L. 6 :

- les documents d'aménagement pour les forêts relevant du régime forestier ;

- les plans simples de gestion applicables à certaines forêts privées.

Deux nouveaux outils reposant sur une adhésion volontaire des propriétaires, qui doivent permettre de développer une gestion durable active dans un plus grand nombre de forêts, sont par ailleurs retenus par le projet de loi :

- les règlements types de gestion ;

- les codes des bonnes pratiques sylvicoles.

Lors de son examen de l'article L. 4, la commission a tout d'abord adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 197).

Puis M. Claude Jacquot a présenté un amendement visant à renommer les commissions régionales de la forêt et des produits forestiers afin de les appeler « commissions régionales de la forêt, des produits forestiers et du bois » et que soit ainsi pris en compte l'ensemble de la filière. Le rapporteur ayant fait remarquer que le bois en tant que matériau était évoqué par ailleurs dans le projet de loi, M. Claude Jacquot a retiré son amendement. La commission a ensuite examiné un amendement du rapporteur précisant que des représentants des conseils généraux sont membres des commissions régionales de la forêt et des produits forestiers. Le rapporteur a indiqué, d'une part, que cette disposition devait permettre d'assurer la représentation et la participation des départements au sein de commissions qui ont un rôle primordial, puisqu'elles élaborent des orientations régionales forestières et que, d'autre part, les conseils généraux ayant vocation à être partenaires des chartes de territoire prévues à l'article L. 12, il était normal de les associer le plus en amont possible. Après que M. Félix Leyzour eut signalé que certains conseils généraux étaient propriétaires de forêts et qu'il convenait donc d'assurer leur participation, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 198).

Puis M. Claude Jacquot a retiré un amendement.

La commission a ensuite examiné l'amendement n° 41 de M. Pierre Micaux prévoyant que sont consultés pour avis, lors de la définition des orientations régionales forestières (ORF), les représentants des départements et des communes intéressées et les représentants des organisations professionnelles représentatives et des usagers de la forêt. Le rapporteur a estimé que cet amendement était satisfait par ailleurs, les commissions régionales assurant déjà une bonne représentation des divers intervenants du secteur forestier ; M. Pierre Micaux a alors annoncé qu'il retirerait cet amendement.

Il a ensuite présenté l'amendement n° 135 précisant que les orientations régionales forestières portent sur la politique de mise en valeur économique, écologique et sociale des forêts ainsi que sur le développement du secteur économique qui en exploite et transforme les produits. M. François Brottes, rapporteur, a souligné que cet amendement était satisfait par les autres dispositions de l'article 1er du projet de loi qui traitent de la filière et notamment de sa compétitivité. La commission a en conséquence rejeté cet amendement ainsi que l'amendement n° 141 du même auteur et un amendement similaire de M. Jean Proriol visant à substituer l'appellation de « référentiels » à celle de « schémas » contenue dans le projet de loi pour les orientations administratives visant les forêts publiques et privées.

La commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 199).

Puis Mme Marie-Hélène Aubert a défendu un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à supprimer la référence aux codes de bonnes pratiques sylvicoles. Elle a expliqué que ce dispositif était dangereux, car il conduisait à octroyer un label de gestion durable à un simple engagement moral ; elle a estimé qu'il convenait au contraire de s'engager sur des documents précis. Le rapporteur a souligné qu'il fallait convaincre les propriétaires d'adopter une logique de gestion durable et que le dispositif devrait donc être attractif. Il a par ailleurs indiqué que la commission aurait à examiner ultérieurement un amendement dont il est l'auteur visant à accompagner le code de bonne conduite d'une adhésion des propriétaires à un organisme de gestion en commun pour assurer une meilleure exploitation de la forêt, dans la perspective de l'élaboration ultérieure d'un plan simple de gestion. Il a également signalé que les codes de bonne conduite étaient mentionnés par l'accord d'Helsinki. La commission a alors rejeté l'amendement de M. Jean-Pierre Marchand.

Puis, elle a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 200).

Article L. 5 du code forestier

Rôle des propriétaires forestiers

Cet article dispose que tout propriétaire exerce tous les droits de la propriété sur ses bois, forêts et terrains à boiser, dans la limite toutefois des dispositions du code forestier et de la loi et ce, afin de contribuer, par une gestion durable, à l'équilibre biologique du pays (objectif environnemental) ainsi qu'à la satisfaction des besoins en bois et autres produits forestiers (objectif économique).

L'article L. 5 prévoit également que le propriétaire doit réaliser le boisement, l'aménagement et l'entretien de ces espaces conformément à une sage gestion économique.

Les dispositions de cet article, qui modifient celles de l'article L. 211-1 du code forestier appellent deux remarques.

_  Jusqu'à maintenant applicables aux seuls propriétaires forestiers privés, puisqu'elles figurent au livre II du code forestier, qui traite des « bois et forêts des particuliers », ces dispositions concernent désormais, du fait qu'elles sont inscrites dans le livre préliminaire du code, aussi bien les propriétaires de forêts relevant du régime forestier que les propriétaires de forêts privées. Tous sont astreints par le projet de loi notamment à l'obligation de sage gestion économique de leurs forêts.

_  Le libellé même de l'article L. 5 est très proche de celui de l'article L. 211-1 traitant du rôle reconnu aux propriétaires ; il introduit simplement une référence à la notion de « gestion durable » des forêts, en cohérence avec l'esprit et la lettre du projet de loi d'orientation. Par ailleurs, l'article L. 5 ne prévoit plus, comme le fait l'article L. 211-1 du code forestier, que le propriétaire a pour but d'assurer la rentabilité économique de sa forêt, les auteurs du projet de loi ayant voulu envisager aussi le cas des propriétaires forestiers recherchant, au-delà de la seule rentabilité, l'aménagement prioritaire de leurs forêts ou poursuivant des objectifs d'accueil du public.

Sur cet article, la commission a adopté un amendement du rapporteur substituant à la notion de « sage gestion économique » celle de « valorisation économique » (amendement n° 201), rendant sans objet l'amendement n° 134 de M. François Vannson.

Article L. 6 du code forestier

Documents de gestion des forêts

Cet article, dont il faut rapprocher le contenu de celui des articles L. 7 (sur les aides publiques à la forêt) et L. 8 (sur la définition des forêts présentant des garanties de gestion durable) contient des dispositions sur les documents de gestion des forêts, lesquels constituent des outils fondamentaux d'application de la politique forestière.

·  Le paragraphe I prévoit que les forêts mentionnées à l'article L. 111-1 du code forestier, soit celles qui relèvent du régime forestier (forêts du domaine de l'Etat, forêts appartenant aux régions, aux départements, aux communes, aux sections de communes, aux établissements publics, aux établissements d'utilité publique, aux sociétés mutualistes, aux caisses d'épargne) doivent être gérées conformément à un document d'aménagement agréé. Cette gestion leur permet d'être considérées comme présentant des garanties de gestion durable, comme on le verra à l'article L. 8, ce qui leur ouvre la possibilité de bénéficier d'aides publiques dans les conditions retenues par l'article L. 7.

A l'inverse des forêts relevant du régime forestier qui doivent toutes être gérées conformément à un document d'aménagement, seules certaines forêts privées doivent être gérées conformément à un document, en l'espèce à un plan simple de gestion agréé (dont le contenu sera précisé à l'article 2 du projet de loi d'orientation). Il s'agit :

1° des forêts privées d'une surface d'un seul tenant, égale ou supérieure à un seuil fixé par département entre 10 et 25 hectares par le ministre chargé des forêts, sur proposition du centre régional de la propriété forestière et après consultation du centre national professionnel de la propriété forestière ; l'article L. 6 « encadre » le choix qu'opérera le ministre, en précisant que celui-ci doit tenir compte « des potentialités de production, de l'intérêt écologique et social identifié par les orientations régionales forestières dont relèvent les forêts en question et enfin, de la structure foncière et forestière du département » ;

2° des forêts privées de plus de dix hectares, là aussi d'un seul tenant, dès lors qu'elles bénéficient d'une aide publique.

L'article L. 6 du projet de loi d'orientation étend ainsi à de nouvelles catégories de forêts privées l'obligation d'être gérées conformément à un document de gestion, de nouveaux seuils étant fixés par département et les forêts de plus de 10 hectares, dès lors qu'elles bénéficient d'aides publiques, étant désormais concernées. On verra à l'article 2, de la même façon, que le projet de loi augmente les ambitions des plans simples de gestion, en en étoffant le contenu.

Un décret en Conseil d'Etat, précise le dernier alinéa du I de l'article 6, prévoit la possibilité de lever ou d'adapter l'obligation de documents de gestion des forêts, pour celles d'entre elles « qui présentent de faibles potentialités d'exploitation économique et des intérêts écologiques limités ». Cette disposition nouvelle pourrait concerner en particulier la forêt méditerranéenne.

Sur les dispositions de ce paragraphe, la commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 202 et 203).

· Dans son paragraphe II, l'article L. 6 prévoit, pour les forêts non mentionnées au I, la possibilité, sur demande du propriétaire ou de son mandataire, d'un document de gestion facultatif pour les unités de plus de 10 hectares d'un seul tenant. Cette possibilité est d'ailleurs actuellement prévue, mais pour les seuls propriétaires privés à l'article L. 222-1 du code forestier.

En outre, l'article L. 6 ouvre la possibilité de documents de gestion associant plusieurs propriétaires ; il est nécessaire que les parcelles forment là aussi un ensemble d'une surface d'au moins 10 hectares.

Cette disposition innovante devrait inciter à développer une approche plus intégrée de la gestion de certains massifs forestiers ; elle est susceptible de s'appliquer d'ailleurs aux forêts domaniales contiguës à des forêts communales.

Sur le II, la commission a tout d'abord adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 204) et deux amendements identiques de précision et de conséquence (amendements nos 142 de M. François Vannson et 205).

Puis, la commission a examiné l'amendement n° 42 de M. François Vannson visant à réduire de 10 à 5 hectares la surface totale des ensembles de parcelles forestières pour laquelle un document de gestion peut être approuvé.

M. François Brottes, rapporteur, a indiqué que le projet de loi abaissait déjà le seuil de 25 à 10 hectares et que cette disposition était perçue comme une contrainte lourde par les propriétaires forestiers. Il a déclaré qu'il valait donc mieux regrouper les terrains au sein d'un même document de gestion plutôt que d'élaborer des « mini plans simples de gestion » ; réduire le seuil conduirait en outre à administrer encore plus la forêt privée. M. François Vannson ayant souligné que réduire le seuil à cinq hectares était particulièrement adéquat pour certaines zones de montagne, le rapporteur a répondu qu'un plan simple de gestion avait vocation à correspondre non pas à un seul propriétaire, mais à un territoire pertinent, ce qui nécessitait de favoriser le regroupement. M. Patrice Carvalho a alors signalé que le dispositif proposé par l'amendement pouvait se révéler utile, notamment en bordure de forêt domaniale. Le rapporteur a alerté les commissaires sur le risque de multiplication des documents de gestion que comporterait l'abaissement du seuil. M. François Sauvadet a estimé que le regroupement n'avait pas à être systématique ; en outre, l'approbation des documents de gestion ne constitue qu'une faculté, ce qui garantit une certaine souplesse et permet d'éviter tout effet de seuil. Il a également souligné que les documents de gestion n'avaient pas à être contraignants et qu'ils constituaient des outils pour une meilleure valorisation de la forêt.

Au terme de ce débat, la commission a rejeté l'amendement n° 42 de M. François Vannson tendant à abaisser de 10 à 5 hectares la surface minimale de parcelles concernées par un document de gestion après de nouvelles interventions de MM. Patrice Carvalho, François Sauvadet et Pierre Micaux. Elle a ensuite rejeté l'amendement n° 43 de conséquence de M. Pierre Micaux.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur précisant que la gestion coordonnée, dans le cadre d'un document de gestion, est réalisée par un gestionnaire commun (amendement n° 206).

L'amendement n° 146 de M. François Vannson est en conséquence devenu sans objet.

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand défendu par Mme Marie-Hélène Aubert tendant à favoriser la transparence en rendant consultables par le public les documents de gestion des forêts. Le rapporteur, ayant indiqué que les modalités de consultation de ces informations ne devaient pas figurer dans la loi, a proposé un sous-amendement supprimant ces dispositions. La commission a adopté ce sous-amendement puis l'amendement ainsi modifié (amendement n° 207).

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol relatif au fonds forestier national.

Après l'article L. 6 du code forestier

La commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol visant à assurer le financement par l'Etat des actions en matière de politique forestière.

Article L. 7 du code forestier

Aides publiques aux forêts

L'article L. 7 réserve le bénéfice des aides publiques allouées pour la mise en valeur et la protection des bois et forêts aux demandeurs qui offrent des garanties ou des présomptions de gestion durable dans les conditions prévues à l'article L. 8 et qui, par ailleurs, s'engagent à ne pas démembrer pendant une période de quinze années les unités élémentaires de gestion concernées par les travaux donnant lieu à ces aides en deçà d'un seuil minimal de surface fixé par décret.

Il s'agit là d'une disposition essentielle permettant de concrétiser l'orientation vers la notion de gestion durable des forêts, qui traverse l'ensemble du projet de loi d'orientation. Le lien établi par l'article L. 7 du projet de loi entre le bénéfice des aides publiques et les garanties de gestion durable décrites à l'article L. 8 apparaît particulièrement fort.

L'article L. 101 du code forestier aujourd'hui applicable prévoit, en effet, dans son deuxième alinéa que « le bénéfice des aides publiques attachées aux bois, forêts et terrains est accordé prioritairement aux propriétaires de biens présentant des garanties de bonne gestion et qui souscrivent l'engagement de ne pas démembrer volontairement l'unité de gestion forestière que constitue leur propriété ou dont elle fait partie ».

L'esprit, voire la lettre même de l'article L. 101 du code forestier sont proches certes de ceux de l'article L. 7, puisque le bénéfice des aides publiques y est subordonné au respect de certaines garanties par le propriétaire, qui doit s'engager à ne pas démembrer sa propriété.

Cependant, les garanties présentées par le propriétaire ne concernent plus la « bonne gestion », mais « la gestion durable » et surtout l'octroi des aides publiques n'est plus « accordé prioritairement », mais « réservé » aux propriétaires présentant les garanties nécessaires. En outre, l'engagement de non-démembrement du propriétaire porte non pas sur trente, mais sur quinze ans.

Comme dans le texte de l'article L. 101 du code forestier, l'article L. 7 ouvre à l'autorité administrative la possibilité de lever l'engagement pris par le propriétaire, les dispositions devant en être précisées par un décret en Conseil d'Etat ; il faut réserver, en effet, l'hypothèse où le démembrement permettrait une amélioration de la gestion forestière.

L'article L. 7 prévoit ensuite, c'est là une disposition nouvelle, que le bénéfice des aides publiques accordées à la desserte forestière de propriétés (par des chemins suffisamment stables permettant l'accès aux massifs) est réservé aux projets satisfaisant à des conditions précisées par décret.

Enfin, le dispositif de conditionnalité des aides précédemment analysé ne s'applique pas, précise l'article L. 7, aux aides concernant l'élaboration d'un premier plan simple de gestion, car elles visent alors précisément à doter la forêt concernée d'une des garanties de gestion durable ou la prévention des risques naturels et d'incendie.

Lors de son examen de l'article L. 7, la commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol tendant à prévoir que les aides publiques aux propriétaires étaient non pas « exclusivement », mais « prioritairement » réservées aux propriétaires présentant des garanties de gestion durable de leurs forêts.

Elle a rejeté un amendement de M. Patrice Carvalho tendant à considérer la création d'emploi comme critère d'attribution des aides publiques.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand portant à 30 ans, au lieu de 15, l'interdiction de démembrer des parcelles. Le rapporteur a indiqué qu'il partageait cette préoccupation et qu'il sous-amenderait en ce sens un amendement ultérieur. En conséquence, l'amendement a été retiré par Mme Marie-Hélène Aubert.

La commission a ensuite rejeté deux amendements identiques, l'un de M. Jean Proriol, l'autre, n° 143 de M. Pierre Micaux tendant à simplifier les termes utilisés pour définir les unités élémentaires de gestion.

Elle a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur sous-amendé sur proposition de Mme Marie-Hélène Aubert afin de porter à 30 ans l'interdiction de démembrer des parcelles éligibles à certaines aides publiques (amendement n° 208).

Elle a examiné un amendement de M. Claude Jacquot, tendant à préciser la notion de desserte forestière. Le rapporteur ayant indiqué que cet amendement risquait de restreindre le champ d'application du dispositif, l'amendement a été retiré par son auteur.

La commission a adopté un amendement de M. Jean-Michel Marchand tendant à ce que les aides publiques favorisent la prévention contre les risques naturels (amendement n° 209).

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol tendant à attribuer des aides spécifiques aux opérations qui favorisent le regroupement de l'investissement et de la gestion.

Article L. 8 du code forestier

Garanties de gestion durable

Cet article assez complexe qui comporte cinq paragraphes a notamment pour objet d'identifier les forêts offrant des garanties de gestion durable ou faisant présumer une gestion durable, cette notion étant au c_ur du projet de loi d'orientation et ouvrant droit en toute hypothèse au bénéfice des aides publiques destinées à la mise en valeur et à la protection des bois et forêts, comme on l'a vu précédemment à l'article L. 7. Les conditions à remplir pour bénéficier de cette garantie ou présomption de garantie se trouvent ainsi précisées par l'article L. 8, qui intègre également les nouveaux outils de gestion, règlements types et codes de bonnes pratiques sylvicoles.

·  Le paragraphe I précise que « sont considérées comme présentant des garanties de gestion durable » :

- les forêts publiques, relevant du régime forestier, mentionnées à l'article L. 111-1 du code forestier, qui doivent être gérées conformément à un document d'aménagement établi dans les conditions prévues par les articles L. 133-1 (cas des forêts domaniales) et L. 143-1 (cas des autres forêts) ;

- les forêts des particuliers, mentionnées à l'article L. 222-1 du code forestier, dès lors qu'elles sont gérées conformément à un plan simple de gestion agréé dans les conditions prévues aux articles L. 222-1 à L. 222-4 du code forestier.

Les dispositions du I de l'article L. 8 du projet de loi reprennent en réalité une approche qui figurait déjà dans la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985, codifiée à l'article L. 101 du code forestier, mais qui se trouve remaniée. Le concept de « gestion durable » se substitue ainsi à celui de « bonne gestion ».

L'on peut remarquer également que c'est la présence d'un document d'aménagement ou d'un plan simple de gestion agréé qui fait présumer une gestion durable des forêts concernées.

·  Le paragraphe II traite précisément des bois et forêts qui ne sont pas sous document d'aménagement (forêts soumises au régime forestier) ou sous plan simple de gestion agréé (bois et forêts des particuliers). Ces bois et forêts peuvent eux aussi « être considérés comme présentant des garanties de gestion durable ». Le II de l'article L. 8 en établit ainsi une énumération :

1°) les bois et forêts des particuliers gérés conformément à un règlement type de gestion approuvé dans les conditions prévues par l'article L. 222-6 du code forestier (dont-il sera question au IV de l'article 2 du projet de loi que l'on analysera ci-après) et dont le propriétaire :

- adhère à un organisme agréé comme organisme de gestion en commun (coopérative, par exemple) ;

- ou recourt dans le cadre d'un contrat d'une durée d'au moins dix ans, aux conseils de gestion d'un expert forestier agréé (du ministère chargé des forêts, par exemple) ou de l'Office national des forêts pour les forêts que gère cet établissement ;

2°) Les bois et forêts relevant, cette fois, du régime forestier qui sont de faible taille ou présentent des enjeux économiques ou écologiques réduits et sont gérés par l'Office national des forêts, là aussi conformément à un règlement type de gestion agréé ;

3°) Les bois et forêts des collectivités publiques qui ne relèvent pas du régime forestier, du fait notamment de leur petite taille et qui sont gérés par l'Office national des forêts selon un règlement type de gestion agréé, dès lors que leurs propriétaires se sont engagés par contrat avec l'Office national des forêts à appliquer à leur forêt pendant une durée d'au moins dix ans les dispositions de ce règlement type.

4°) Les bois et forêts qui sont :

- soit inclus dans la zone centrale d'un parc national ou dans une réserve naturelle ;

- soit classés comme forêts de protection ;

- soit gérés principalement en vue de la préservation d'espèces ou de milieux forestiers.

Ces bois et forêts, pour lesquels les préoccupations sont donc principalement environnementales sont considérés eux aussi comme présentant des garanties de gestion durable, s'ils font l'objet d'un document de gestion agréé établi conformément aux directives et schémas mentionnés à l'article L. 4 du projet de loi (directives régionales d'aménagement pour les forêts domaniales, schémas régionaux d'aménagement des forêts pour les autres forêts relevant du régime forestier, schémas régionaux de gestion sylvicole des forêts privées).

Il s'agit là donc de bois et forêts pour lesquels la loi prévoit par ailleurs la nécessité d'un document de gestion agréé par l'Etat.

·  Le paragraphe III de l'article L. 8 envisage le cas des autres forêts non retenues par les deux paragraphes précédents.

Celles-ci (forêts publiques ou privées) sont présumées présenter des garanties de gestion durable, dès lors que leur propriétaire adhère pour une durée d'au moins dix années au code des bonnes pratiques sylvicoles localement applicable.

Cette disposition vise, il faut le noter, à faciliter la prise en compte de la propriété forestière morcelée dans d'éventuels mécanismes d'éco-certification.

Lors de l'examen de l'article L. 8, la commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand défendu par Mme Marie-Hélène Aubert supprimant la référence à des codes des bonnes pratiques sylvicoles. Le rapporteur ayant indiqué qu'il souhaitait préciser que des modalités de gestion en commun devaient accompagner les codes des bonnes pratiques sylvicoles, Mme Marie-Hélène Aubert a retiré cet amendement.

La commission a ensuite adopté deux amendements du rapporteur, le premier prévoyant l'adhésion des propriétaires à des organismes de gestion en commun (amendement n° 210), le second à caractère rédactionnel (amendement n° 211).

·  Le paragraphe IV retient un nouveau cas de figure, celui des forêts situées dans une zone de protection spéciale ou dans une zone spéciale de conservation délimitée pour répondre aux objectifs de la directive du Conseil du 2 avril 1979 « concernant la conservation des oiseaux sauvages » ou de la directive du Conseil du 21 mai 1992 « concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ».

Ces forêts sont considérées comme présentant des garanties ou de simples présomptions de gestion durable, dès lors qu'elles répondent aux conditions prévues aux paragraphes I, II et III et donc, que leurs propriétaires adhèrent par contrat aux orientations des plans de gestion spécifiques à ces zones ou encore gèrent les forêts en cause en conformité avec un document de gestion établi selon les dispositions de l'article L. 11, que l'on étudiera ci-après.

·  Le paragraphe V prévoit que les manquements aux engagements prévus à l'article L. 8 ne peuvent être retenus contre le propriétaire, lorsque ces éléments résultent d'éléments qui ne sont pas de son fait.

Il s'agit là de l'hypothèse du cas de force majeure, déjà prévue dans l'article L. 101 du code forestier.

Article L. 9 du code forestier

Obligation de reconstitution des peuplements forestiers

Cet article, en cohérence là encore avec les objectifs de gestion durable posés à l'article L. 1, renforce le contrôle des coupes ; il prévoit à la charge des propriétaires publics aussi bien que privés une obligation de reconstitution des peuplements forestiers après toute coupe rase. Rappelons que celle-ci se distingue du défrichement, en ce qu'elle ne vise pas, comme ce dernier, un changement d'affectation du sol après l'opération de coupe.

L'article L. 9 dispose, qu'après toute coupe rase d'une certaine importance (soit d'une surface supérieure à un seuil arrêté par le préfet après consultation du centre régional de la propriété forestière et de l'Office national des forêts) intervenue dans tout massif lui aussi d'une certaine importance (présentant une étendue supérieure à un seuil arrêté par le préfet dans les mêmes conditions que précédemment), le propriétaire du sol est tenu, sauf dans l'hypothèse d'une régénération ou d'une reconstitution naturelle satisfaisante, donc facilement observable, de prendre, dans les cinq années suivant la date de fin d'exécution de la coupe rase, les mesures nécessaires à la reconstitution de peuplements forestiers.

Il s'agit donc là d'une obligation claire, concrétisant le souci de gestion durable des forêts et destiné à ne s'appliquer qu'aux opérations de coupe rase et aux massifs forestiers les plus importants.

Il faut remarquer que l'obligation de reconstituer des peuplements dans un délai de cinq ans après une coupe rase est actuellement prévue à l'article L. 223-1 du code forestier pour les seuls propriétaires privés. Le massif concerné doit avoir une étendue d'au moins quatre hectares d'un seul tenant ; les coupes rases concernées sont exclusivement celles de résineux ; la reconstitution opérée doit donner une production au moins équivalente à celle du peuplement exploité.

L'innovation principale apportée par l'article L. 9 réside donc dans le fait que ce sont tous les propriétaires, publics et privés qui sont désormais concernés, du fait de l'incorporation de la mesure dans un livre préliminaire du code forestier.

Les mesures de reconstitution des peuplements qui incombent aux propriétaires privés ou publics, poursuit l'article L. 9, doivent s'insérer dans le cadre de mécanismes techniques ou juridiques préexistants et donc être conformes :

- soit aux dispositions retenues par un document de gestion des forêts (document d'aménagement, plan simple de gestion, règlement type de gestion ou code des bonnes pratiques sylvicoles) ;

- soit à l'autorisation de coupe donnée en application du code forestier ou d'une autre législation ;

- soit encore aux prescriptions imposées par l'administration à l'occasion d'une autorisation administrative (qui ne serait pas une autorisation de coupe) ou par une décision judiciaire par suite d'une infraction (hypothèse de la peine complémentaire).

L'énumération de ces différents cas de figure a clairement pour objet de donner un cadre à l'administration, lorsqu'elle opérera son contrôle.

L'article L. 9 prévoit enfin que les coupes résultant de défrichements autorisés (avec un changement donc de la destination du sol) ou de certaines décisions administratives (par exemple, débroussaillements pour lutter contre les incendies) n'entraînent logiquement pas pour les propriétaires l'obligation de renouvellement des peuplements forestiers précédemment analysée.

Lors de son examen de l'article L. 9, la commission a rejeté un amendement n° 49 de M. Pierre Micaux visant la consultation des organisations représentatives du monde sylvicole par le préfet avant d'arrêter un seuil pour l'application des coupes rases.

La commission a ensuite examiné l'amendement n° 63 de M. François Vannson tendant à appliquer à la personne pour le compte de laquelle la coupe a été réalisée les obligations prévues pour le propriétaire. Le rapporteur a alors proposé une rectification rédactionnelle. L'amendement a été adopté sous réserve de sa rectification (amendement n° 63 rectifié de M. François Vannson).

Un amendement similaire de M. Jean Proriol est en conséquence devenu sans objet.

La commission a rejeté l'amendement n° 50 de M. François Vannson abaissant à deux ans le délai au-delà duquel, si la régénération naturelle n'a pas abouti, le propriétaire est tenu de reconstituer les peuplements forestiers.

Elle a ensuite examiné un amendement du rapporteur visant à prendre pour référence le début de la coupe définitive, qui est la dernière étape d'une coupe rase. M. François Sauvadet a proposé un sous-amendement précisant que cette coupe peut être prévue, le cas échéant, au cahier des charges. La commission a adopté le sous-amendement puis l'amendement ainsi modifié (amendement n° 212).

Après avoir adopté un amendement du rapporteur substituant la notion de renouvellement des peuplements à celle de reconstitution plus restrictive (amendement n° 213), la commission a rejeté un amendement n° 51 de M. Pierre Micaux, satisfait par le précédent.

Elle a ensuite rejeté l'amendement n° 52 de M. François Vannson obligeant les propriétaires à respecter l'écosystème local, le rapporteur ayant estimé qu'un de ses amendements répondait à cette préoccupation.

Après avoir adopté un amendement du rapporteur, sur la notion de renouvellement des peuplements (amendement n° 214), de cohérence avec un amendement précédemment adopté, la commission a rejeté l'amendement n° 53 de M. Pierre Micaux visant la préservation de l'écosystème local en cas de défrichement, le rapporteur ayant souligné que cette préoccupation était elle aussi satisfaite par ailleurs.

Article L. 10 du code forestier

Contrôle des coupes

Cet article organise le régime des coupes dans les forêts publiques ou privées qui ne sont pas considérées comme présentant des garanties de gestion durable, suivant le schéma retenu à l'article L. 8 que l'on a précédemment analysé.

Avec le dispositif prévu à l'article L. 9, il apparaît que les différentes hypothèses de coupes d'arbres sont ainsi envisagées. Les coupes doivent en ce cas être autorisées par le préfet, après consultation, pour des forêts privées, du centre régional de la propriété forestière compétent, dès lors qu'elles :

- portent sur plus de cinq hectares d'un seul tenant, à l'exception de celles effectuées dans les peupleraies ;

- enlèvent plus de la moitié du volume des arbres de futaie, les plus précieux ;

- ne sont en toute hypothèse pas déjà autorisées au titre d'une disposition du code forestier ou de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme (qui traite des espèces boisées classées).

Seules les coupes les plus significatives requièrent donc une autorisation du préfet. Celle-ci peut être d'ailleurs assortie de certaines conditions touchant à la réalisation même des coupes ou à d'éventuels travaux complémentaires ; elle doit s'inscrire dans le cadre des directives et schémas régionaux applicables aux différents types de forêts et qui sont mentionnés à l'article L. 4 (directives régionales d'aménagement des forêts domaniales, schémas régionaux d'aménagement des autres forêts relevant du régime forestier et schémas régionaux de gestion sylvicole des forêts privées), directives et schémas qui doivent respecter eux-mêmes les orientations régionales forestières, qui sont la « déclinaison » régionale de la politique forestière définie par l'Etat.

Sur cet article, après avoir rejeté un amendement de M. Jean Proriol, la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 215).

Puis elle a rejeté l'amendement n° 54 de M. François Vannson, M. François Sauvadet l'ayant défendu en insistant sur la nécessité pour le préfet de demander l'avis de l'Office national des forêts pour toute coupe de plus de 5 hectares.

Article L. 11 du code forestier

Fusion de procédures

Cet article a pour objet d'éviter une multiplicité de procédures aux propriétaires forestiers dont les terrains sont visés, par une ou par plusieurs législations de classement ou de protection dont l'application relève de la compétence de l'Etat.

Les propriétaires se voient reconnaître alors la possibilité de demander que le document de gestion de leur propriété soit soumis à l'approbation de l'autorité compétente pour la mise en _uvre de la législation en question. Et l'accord de cette autorité permet au propriétaire de réaliser les exploitations et les travaux prévus dans le document, sans qu'il ait à solliciter les autorisations préalables prévues dans lesdites législations.

Un dispositif similaire est retenu pour les documents d'orientation des forêts publiques ou privées, lorsque ceux-ci intègrent des prescriptions spécifiques aux forêts visées par ces législations de protection et que les documents de gestion individuels sont reconnus conformes aux documents ainsi complétés.

L'article L. 11 témoigne ainsi d'un souci de simplification des procédures au profit des propriétaires forestiers. Il est considéré que le citoyen n'a pas à assumer les conséquences de procédures différentes s'appliquant au territoire forestier, dès lors que la procédure d'approbation du document de gestion prévoit une possibilité de fusion des procédures pour les différentes législations ou réglementations s'appliquant à une forêt.

Sont ainsi concernées plusieurs législations spécifiques et, notamment :

- la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques ;

- la loi du 2 mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque ;

- l'article 1er de la loi n° 93-24 du 8 janvier 1993 sur la protection et la mise en valeur des paysages ;

- les textes à intervenir pour la transposition des directives du Conseil n° 79/409 du 2 avril 1979 « concernant la conservation des oiseaux sauvages » et n° 92/43 du 21 mai 1992 « concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ».

Lors de son examen de l'article L. 11, la commission a d'abord adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 216 et 217).

Elle a ensuite adopté un amendement du même auteur confiant aux commissions régionales de la forêt et des produits forestiers le soin de recenser les forêts, les habitats faunistiques ou floristiques, les monuments et les sites pour lesquels sont applicables les procédures énumérées au présent article (amendement n° 218).

Article L. 12 du code forestier

Chartes de territoire forestier

L'article L. 12 apporte une innovation intéressante en prévoyant des chartes de territoire forestier, qui appliquent au secteur des bois et forêts la technique contractuelle et de la concertation entre les divers acteurs locaux, technique déjà largement utilisée dans d'autres secteurs et notamment l'agriculture.

Cette formule des chartes de territoire forestier apparaît en effet comme un moyen d'assurer la gestion durable des forêts, en ce qu'elle fait intervenir pour des objectifs concrets l'ensemble des partenaires concernés, y compris l'Etat, sur un territoire donné.

Elle offre aussi l'avantage de la souplesse, car il faut remarquer que les problématiques forestières sont en définitive très diverses : elles peuvent relever de nombreux domaines (aménagement rural, tourisme et loisirs, environnement) et elles doivent être prises en compte sur des territoires variables suivant les problèmes posés (massifs d'approvisionnement des industries, bassins versants pour la qualité de l'eau, ou pays, communes ou groupements de communes pour l'accueil du public).

L'article L. 12 prévoit ainsi que des chartes de territoire forestier peuvent être établies « sur un territoire identifié » et « pour une durée déterminée ».

Le libellé de l'article L. 12 est délibérément « ouvert » tant pour la définition du contenu des actions concertées qui seront conduites que pour celle des partenaires concernés. Les actions menées pourront viser ainsi, indique l'article L. 12 :

- à garantir la satisfaction de demandes environnementales ou sociales particulières concernant la gestion des forêts et des espaces naturels connexes ;

- à favoriser le regroupement des propriétaires forestiers sur le plan technique ou économique, la restructuration foncière ou encore la gestion groupée au niveau d'un massif forestier ;

- à renforcer la compétitivité de la filière bois.

Les chartes donnent lieu à des conventions intervenant entre les propriétaires, leurs mandataires ou leurs organisations représentatives, d'une part et, d'autre part, l'Etat, les collectivités territoriales, les divers opérateurs économiques, les établissements publics ou encore les associations d'usagers de la forêt ou de protection de l'environnement.

Il est essentiel de noter que lesdites conventions peuvent avoir des incidences financières et donner lieu à des aides de collectivités publiques « en contrepartie », indique l'article L. 12, « des services environnementaux et sociaux rendus par la forêt, lorsqu'ils induisent des contraintes particulières ou des surcoûts d'investissement et de gestion ».

La mise en place d'actions concertées sur les territoires forestiers a constitué un axe important du rapport « La forêt : une chance pour la France » présenté le 25 août 1998 par M. Jean-Louis Bianco. Elle permet tout à la fois d'ancrer l'orientation en faveur de la gestion durable des forêts dans une démarche de contractualisation et d'associer le monde associatif aux actions menées. Elle sert en outre de support à des conventions rémunérant les services sociaux et environnementaux rendus par la forêt.

La technique des chartes de territoire forestier offre surtout l'avantage de la souplesse, permettant de tenir compte ainsi de la diversité des problématiques et des situations locales. Elle pourra conduire, par exemple, à l'introduction d'un volet forestier dans des chartes ou des contrats existants (chartes de parcs naturels régionaux, contrats de pays).

Lors de son examen de l'article L. 12, la commission a d'abord examiné un amendement du rapporteur précisant le contenu et la portée des chartes de territoire forestier.

Celles-ci doivent concerner des territoires identifiés et pertinents pour élaborer un programme d'action pluriannuel, intégrer le caractère multifonctionnel des forêts et prendre en compte la diversité des marchés des produits forestiers. M. Pierre Micaux a ouvert la discussion sur cet amendement en s'interrogeant sur la compatibilité entre les chartes et les divers documents de gestion. M. François Sauvadet a poursuivi en demandant quel sens pouvait être donné à la notion de « territoire pertinent » et si un petit propriétaire pouvait passer seul une convention s'inscrivant dans une charte. Pour M. Jean Charroppin, la réponse à cette dernière question se trouve dans le projet de loi puisque celui-ci précise que les chartes donnent lieu à des conventions dont l'une des parties peut être un ou plusieurs propriétaires.

Après que M. Félix Leyzour eut insisté sur l'importance de l'identification du territoire, le rapporteur a rappelé que les chartes reposaient sur un principe de volontariat et qu'elles n'étaient pas obligatoirement liées à l'existence d'éventuels documents de gestion. S'appuyant sur l'exemple de la région grenobloise, il a indiqué ce que pouvait être un territoire pertinent, la ville de Grenoble et les quatre massifs l'entourant présentant de ce point de vue un ensemble homogène sur lequel peuvent être recherchés des débouchés pour le bois énergie, améliorées les conditions de transport des grumes ou de gestion des chemins de randonnée. Mais il n'est pas nécessaire de donner une définition précise du territoire pertinent. Il a conclu, en indiquant que rien n'interdisait à un propriétaire unique d'une forêt couvrant une surface importante d'être la seule personne concernée par une charte .

La commission a ensuite adopté cet amendement du rapporteur (amendement n° 219).

En conséquence, trois amendements sont devenus sans objet : deux respectivement déposés par M. Jean Proriol et M. Patrice Carvalho et l'amendement n° 55 de M. Pierre Micaux.

La commission a ensuite examiné un amendement du rapporteur précisant que les chartes de territoire forestier peuvent également contribuer à l'aménagement rural. Elle a adopté un sous-amendement de M. Patrice Carvalho faisant en outre référence à l'emploi puis l'amendement ainsi modifié (amendement n° 220).

Puis elle a adopté deux amendements du rapporteur : un amendement de précision (amendement n° 221) et un amendement indiquant que les chartes peuvent être élaborées à l'initiative d'élus des collectivités concernées, M. Joseph Parrenin s'étant montré réticent sur une rédaction qu'il jugeait trop restrictive car elle risquait d'exclure d'autres partenaires de la forêt et le rapporteur lui ayant répondu que les élus locaux étaient les seuls à disposer d'une réelle légitimité et que la rédaction du texte ne présentait pas de caractère directif (amendement no 222).

Après avoir rejeté un amendement de M. Jean Proriol, la commission a adopté, sous réserve d'une rectification rédactionnelle ultérieure, l'amendement n° 2 de M. Pierre Micaux précisant que les parcs nationaux et les parcs naturels régionaux font partie des établissements publics susceptibles de conclure des conventions aboutissant à la mise en place d'une charte (amendement n° 2 rect.).

La commission a ensuite rejeté deux amendements de M. Jean Proriol et l'amendement n° 56 de M. François Vannson.

Après avoir adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 223), elle a rejeté un amendement de M. Jean Proriol.

Article L. 13 du code forestier

Certification du bois

L'article L. 13 prévoit des dispositions très générales sur la certification, tenant compte ainsi du souci de plus en plus marqué de l'opinion de disposer de garanties réelles sur la bonne gestion des forêts et l'origine des produits forestiers. Rappelons que la certification est le processus par lequel un organisme tiers indépendant assure qu'un produit ou un processus répond bien à des normes spécifiées.

L'article L. 13 se limite à cet égard à donner une orientation générale aux différents systèmes de certification qui se mettent en place, afin que ceux-ci s'insèrent dans la politique forestière.

Il reprend aussi pratiquement à l'identique le texte de l'article 75 de la loi n° 99-574 d'orientation agricole du 9 juillet 1999, qui définit les grands objectifs de « la politique conduite dans le domaine de la qualité et de l'origine des produits agricoles, de la mer ou alimentaires ».

La politique conduite dans le but de promouvoir la qualité des produits forestiers et de garantir leur origine doit ainsi, précise l'article L. 13, répondre de façon globale et équilibrée à plusieurs objectifs :

- promouvoir la diversité des produits, l'identification de leurs caractéristiques et les garanties de gestion durable des forêts, afin de renforcer l'information du consommateur et de satisfaire ses attentes ;

- renforcer le développement de la filière bois et accroître l'adaptation des produits à la demande ;

- fixer sur le territoire les capacités de transformation des produits forestiers et assurer le maintien de l'activité économique, notamment en zone rurale défavorisée.

Tout en prenant acte des préoccupations de l'opinion, l'Etat considère ainsi que les procédures de certification ne relèvent pas d'abord de son action et que la puissance publique n'a pas à prendre parti entre les initiatives privées existantes, qui sont en toute hypothèse appelées à régir le domaine de la certification de la gestion durable des forêts.

Plusieurs procédures coexistent à cet égard : le système FSC (Forest stewardship council, Conseil de bonne gestion des forêts) mis en place par les organisations mondiales de protection de la nature et le système PEFC (Pan european forest certification) système applicable à 17 pays qui tient davantage compte de la situation particulière des forêts européennes et de la fréquence de la petite propriété, mis en place le 30 juin 1999.

En toute hypothèse, précise l'article L. 13, le dispositif retenu en matière d'écocertification ne remet pas en cause l'utilisation des procédures habituelles, de certification de conformité, en l'espèce des articles L. 115-27 et suivants du code de la consommation.

Si le projet de loi contient ces dispositions volontairement générales sur l'écocertification, il est essentiel de mesurer l'importance de cette technique dans l'avenir. L'écocertification doit permettre de communiquer sur les qualités environnementales du matériau bois et ainsi de développer les débouchés du bois : la certification de la gestion durable des forêts apparaît ainsi comme un préalable à l'éco-étiquetage, qui pourrait aider à terme à conserver et à développer les marchés existants.

Lors de son examen de l'article L. 13, la commission a rejeté les amendements nos 5 et 7 de M. François Vannson, puis l'amendement n° 6 de M. Pierre Micaux. Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol complétant l'objectif défini au 2° de l'article par une référence à l'adaptation des produits aux normes européennes.

Après que le rapporteur eut fait remarquer que l'amendement était mal placé à l'article L. 13, M. Pierre Micaux a annoncé que son amendement n° 57 serait retiré.

Le rapporteur a ensuite présenté un amendement visant à réserver le bénéfice de la certification de conformité environnementale (« écocertification ») aux seuls produits forestiers fabriqués à partir de bois produits et récoltés dans le cadre d'un document de gestion visé à l'article L. 4. Il a fait valoir que cette disposition permettrait de valoriser encore plus les productions couvertes par un de ces documents de gestion et que l'écocertification permettrait de mieux informer l'utilisateur final et de valoriser l'image de la forêt française.

M. Pierre Micaux s'est déclaré opposé à l'amendement, dans la mesure où les petites parcelles seraient exclues du dispositif, puisqu'elles sont écartées du champ d'application des documents de gestion des forêts. M. Joseph Parrenin s'est inquiété de la possible mise à l'écart des 50 000 propriétaires privés qui possèdent des parcelles de 4 hectares en moyenne dans son département du Doubs. Il a également jugé impossible de mettre en place une traçabilité des bois récoltés. Il a conclu que l'écocertification proposée serait impraticable dans la mesure où le respect des critères de qualité des produits forestiers est apprécié à la scierie et non à la production ou à la récolte du bois. M. François Sauvadet s'est inquiété de la référence à l'article L. 4 aux termes duquel la mise en _uvre des plans simples de gestion est conditionnée par le respect d'un seuil de 10 hectares de forêt. Des parcelles risquent donc d'être exclues du dispositif. M. Félix Leyzour s'est demandé si le but de l'amendement était de protéger les filières françaises de l'importation de bois étrangers ou de donner un signe de qualité au bois français.

Le rapporteur a fait observer que son amendement portait sur la seule écocertification qui est une attestation de conformité aux valeurs de la gestion durable de la forêt ; elle ne garantit pas l'excellence de la qualité du bois. Il faut en effet rappeler que trois signes peuvent permettre d'identifier un produit forestier :

- tout d'abord l'indication de son origine, mais celle-ci est difficile à mettre en place même si certains pays y sont arrivés ;

- ensuite la garantie du respect des principes de gestion durable, qui donne l'assurance que le produit forestier n'a pas été fabriqué à partir de bois issus de la déforestation, par exemple ;

- enfin la certification de la qualité du produit même, qui relève d'une certification de conformité d'un produit industriel classique. Ce signe garantit que le produit a été fabriqué selon un cahier des charges dont le respect est contrôlé par des organismes indépendants agréés.

De plus en plus les transformateurs et les distributeurs mettent en valeur l'écocertification et le rapporteur s'est déclaré convaincu que, dans quelques années, le consommateur sera préoccupé d'écocertification comme il est actuellement soucieux d'acheter des denrées sans organismes génétiquement modifiés. Dès lors que l'écocertification est valorisée par certains distributeurs et transformateurs, il convient que la forêt française puisse faire la preuve qu'elle est gérée selon les principes de la gestion durable.

M. François Sauvadet a réitéré ses inquiétudes quant à la faisabilité de l'écocertification proposée par le rapporteur et quant à l'exclusion des plus petites parcelles. Il conviendrait qu'une production dans le cadre d'un code de bonnes pratiques sylvicoles, qui est accessible aux petits propriétaires, donne accès à l'écocertification.

Le rapporteur a accepté de rectifier son amendement, afin de préciser que les bois produits et récoltés doivent l'être dans le cadre de l'un des documents de gestion visés à l'article L. 4. M. Pierre Ducout a souligné que ce dispositif permettrait à tout propriétaire qui veut vendre des bois, quelle que soit la superficie de ses terrains, d'établir une déclaration aux termes de laquelle il respecte un code de bonnes pratiques et peut ainsi bénéficier de l'écocertification. M. Pierre Micaux a indiqué qu'il voterait contre l'amendement qui lui semble trop compliqué et incertain.

A l'issue du débat, la commission a rejeté l'amendement du rapporteur.

Puis elle a rejeté l'amendement n° 88 de M. François Vannson et l'amendement n° 39 de M. Pierre Micaux.

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol insérant un article additionnel après l'article L. 13 demandant au Gouvernement de remettre dans un délai de six mois un rapport sur la protection de la forêt contre les risques notamment de tempête et sur la mise en place d'une meilleure assurance et d'une meilleure indemnisation en cas de sinistre grave.

Article L. 14 du code forestier

Décrets en Conseil d'Etat

L'article L. 14 prévoit l'intervention de décrets en Conseil d'Etat nécessaires à la mise en _uvre des dispositions du livre préliminaire du code forestier.

La commission a adopté l'article 1er ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 1er

Accès des produits forestiers à l'appellation d'origine contrôlée

Le rapporteur a présenté un amendement portant article additionnel afin d'étendre le bénéfice du régime de l'appellation d'origine contrôlée aux produits forestiers. Il a fait valoir que, comme pour la certification de conformité, il s'agissait d'anticiper sur les évolutions qui se dessinent d'ores et déjà à l'échelon international. Il faut donner la possibilité aux producteurs et aux pépiniéristes qui sont en mesure de satisfaire aux conditions d'accès au signe d'appellation d'origine contrôlée la possibilité de valoriser de manière très forte leurs produits. Il a indiqué que le régime de l'appellation d'origine contrôlée sylvicole s'insérerait dans le dispositif applicable aux produits agricoles et donc que l'Institut national des appellations d'origine serait chargé de sa mise en _uvre.

M. François Sauvadet a jugé que c'était une bonne idée mais, qu'il fallait étudier sa faisabilité auprès de l'Institut national des appellations d'origine. M. Joseph Parrenin a estimé l'idée intéressante et a demandé d'étudier la possibilité d'insérer le dispositif dans le code forestier.

A l'issue du débat, la commission a adopté l'amendement du rapporteur portant article additionnel, M. François Sauvadet indiquant qu'il s'abstenait et M. Pierre Micaux qu'il votait pour l'amendement (amendement n° 224).

Chapitre II

Les documents de gestion durable des forêts

Article 2

Contenu des documents de gestion

Cet article comporte quatre paragraphes concrétisant, pour les différents outils de la politique forestière, les principes de « gestion durable » posés plus particulièrement à l'article L. 1.

·  Dans son paragraphe I, l'article 2 modifie l'article L. 133-1 du code forestier relatif à l'aménagement des bois et forêts du domaine de l'Etat. L'article 2 du projet de loi complète l'actuel article L. 133-1, qui fait simplement référence pour les bois et forêts domaniaux à l'existence d'un aménagement réglé par arrêté ministériel, en prévoyant des dispositions explicites et novatrices sur le contenu et les modalités d'élaboration du document d'aménagement.

Celui-ci, précise l'article 2, doit prendre en compte les orientations de gestion du territoire dans lequel se situe la forêt concernée ainsi que les objectifs d'intérêt général relatifs à la gestion durable, et particulièrement, la contribution que peut apporter aujourd'hui et dans l'avenir ladite forêt à l'équilibre des fonctions écologiques, économiques et sociales de ce territoire ; le document d'aménagement doit prendre en compte aussi les caractéristiques des bassins d'approvisionnement des industries du bois.

Dans les forêts soumises à une forte fréquentation du public (forêts périurbaines ou de zones touristiques littorales), ce sont la préservation et l'amélioration du cadre de vie des populations qui sont prioritaires, là encore, dans le respect des objectifs de la gestion durable.

Lors de l'examen de l'article 2, la commission a rejeté l'amendement n° 58 de M. François Vannson prévoyant que les documents d'aménagement des forêts domaniales doivent s'attacher à « l'entretien régulier des forêts » soumises à une forte fréquentation du public et l'amendement n° 59 de M. Pierre Micaux prévoyant que les documents d'aménagement doivent prendre en compte la spécificité de chaque massif forestier.

Cette longue énumération traduit le souci des auteurs du projet de loi d'inscrire le dispositif des documents d'aménagement des forêts domaniales dans la philosophie d'ensemble de la politique forestière définie à l'article premier, l'accent étant évidemment mis tout particulièrement sur la notion de gestion durable. Il s'agit de devoirs éminents que doivent appliquer les gestionnaires de la forêt domaniale, qui doivent rester à l'écoute de la société : appliquer donc les principes de la gestion durable, rechercher une meilleure intégration des forêts dans les orientations de gestion du territoire ou elles se situent, veiller à améliorer le cadre de vie des populations, faire prévaloir des objectifs d'intérêt général sur une approche patrimoniale. On retrouve, d'ailleurs là, un aspect de la multifonctionnalité de la politique forestière.

L'article 2 du projet de loi prévoit ensuite et, c'est un autre élément d'innovation, que la commune où se trouve la forêt est consultée lors de l'élaboration du document d'aménagement. Mais, l'article 2 ouvre également la possibilité, selon les conditions précisées par décret, de recueillir l'avis d'autres collectivités locales. Il peut s'agir en ce cas, par exemple, de communes éloignées du site de la forêt en question, mais qui cherchent à répondre à la demande de leurs habitants en lieux de nature et de loisirs.

La commission a, sur ce point, rejeté l'amendement n° 60 de M. François Vannson retenant la consultation des organisations professionnelles et des représentants des usagers de la forêt lors de l'élaboration des documents d'aménagement.

Dans un but de simplification, l'article 2 du projet de loi prévoit également qu'un même document d'aménagement peut être élaboré pour une forêt domaniale et une ou plusieurs autres forêts appartenant aux collectivités autres que l'Etat. Dans ce cas, qui correspond plus particulièrement à l'hypothèse de forêts enclavées en forêt domaniale, le document d'aménagement est arrêté par le ministre chargé des forêts.

Les forêts domaniales ou privées de petite taille à faibles enjeux économiques ou écologiques, telles qu'elles sont définies au I de l'article L. 6 (« les forêts présentant de faibles potentialités d'exploitation économique et des intérêts écologiques limités »), ne sont par ailleurs pas oubliées : pour elles, c'est un règlement type de gestion, qui est arrêté à la demande de l'Office national des forêts par le ministre chargé des forêts.

Enfin, s'agissant du paragraphe I de l'article 2, la commission a rejeté l'amendement n° 89 de M. François Vannson sur la fréquentation des forêts par le public ainsi que l'amendement n° 90 de M. Pierre Micaux sur ce même thème, le rapporteur ayant jugé la rédaction de ces deux amendements imprécise.

·  Dans son paragraphe II, l'article 2 s'applique aux aménagements des bois et forêts appartenant aux collectivités autres que l'Etat réglés par l'article L. 143-1 du code forestier. L'arrêté ou les arrêtés conjoints du ou des représentants de l'Etat dans la ou les régions intéressées (libellé de l'article L. 143-1) ne peut intervenir, précise l'article 2 du projet de loi, qu'après accord explicite de la collectivité ou de la personne morale propriétaire.

Il apparaît que la modification prévue sur ce point intègre une évolution résultant de la pratique.

L'hypothèse des bois et forêts de petite taille et à faibles enjeux économiques et écologiques n'est là aussi pas oubliée : il est considéré que de tels espaces ne justifient pas la lourdeur d'un document d'aménagement et un simple règlement type de gestion est alors arrêté par le préfet de région à la demande de l'Office national des forêts.

·  Dans son paragraphe III, l'article 2 du projet de loi modifie l'article L. 222-1 du code forestier, en fixant le contenu des plans simples de gestion.

Il est précisé que le propriétaire de forêts privées tenu d'élaborer un plan simple de gestion en application des dispositions de l'article L. 6 présente ce plan à l'agrément du centre régional de la propriété forestière (CRPF), ce qui correspond à la règle aujourd'hui prévue à l'article L. 222-1 du code forestier.

L'article 2 du projet de loi détaille ensuite le contenu des plans simples de gestion ; comme l'actuel article L. 222-1 du code forestier, le plan doit comprendre un programme d'exploitation des coupes ainsi, le cas échéant, que des travaux d'amélioration. Mais, il est prévu également que le plan simple de gestion « comporte une brève analyse des enjeux économiques, environnementaux et sociaux de la forêt et, en cas de renouvellement du plan, une brève analyse de l'application du plan précédent. ».

Cet ajout a pour but d'inciter les propriétaires à inscrire leur gestion dans un cadre global prenant en compte la multifonctionnalité forestière ; il leur est demandé simplement d'opérer une « brève analyse » de ces données, le plan de gestion devant garder un caractère de simplicité.

Il est prévu aussi, et cet élément est également nouveau, que le plan simple de gestion comprend un programme des travaux de reconstitution des parcelles parcourues par les coupes.

Le propriétaire de la forêt sous plan de gestion doit préciser en outre sa stratégie de gestion des populations de cervidés en conformité avec les choix qu'il effectue en matière de gestion sylvicole.

Cette dernière disposition vise là aussi à inciter les propriétaires à la cohérence dans leurs stratégies de gestion, à harmoniser en l'espèce leurs politiques sylvicole et cynégétique.

Enfin, il est prévu que, lorsque le centre régional de la propriété forestière refuse d'agréer un plan simple de gestion, l'autorité administrative compétente statue, après avis du centre national professionnel de la propriété forestière, sur le recours formé par le propriétaire.

Sur les dispositions du III, la commission a examiné un amendement de M. Claude Jacquot ayant pour objet de renvoyer à un décret en Conseil d'Etat la fixation du contenu du plan simple de gestion. Le rapporteur ayant fait remarquer que les dispositions du projet de loi demeuraient suffisamment souples sur ce point, M. Claude Jacquot a retiré son amendement.

La commission a ensuite rejeté les amendements nos 61 et 93 de M. Pierre Micaux et n° 144 de M. François Vannson, visant à prévoir que le plan simple de gestion comporte un inventaire du matériel ligneux ou un bilan chiffré, le rapporteur ayant fait remarquer à nouveau qu'il fallait conserver au plan de gestion son caractère de simplicité.

La commission a ensuite adopté un amendement de M. Jean Proriol prévoyant que la stratégie de gestion des populations animales proposée par le propriétaire dans son plan de gestion devait concerner « le gibier » et non les seuls « cervidés » mentionnés dans le projet de loi, après que MM. Patrice Carvalho et François Sauvadet eurent insisté sur l'importance des dégâts de gibier dans nos forêts (amendement n° 225). L'amendement n° 62 de M. Pierre Micaux est en conséquence devenu sans objet.

·  Dans son paragraphe IV, l'article 2 du projet de loi crée une nouvelle section dans le chapitre II du titre II du livre II du code forestier. Il s'agit de définir les deux nouvelles techniques de gestion des forêts mentionnées aux articles L. 6 et L. 8 reposant sur une base volontaire : le règlement type de gestion et le code des bonnes pratiques sylvicoles.

L'article L. 222-6 du code forestier se trouve ainsi modifié. Le I de cet article définit le règlement type de gestion comme un document qui comporte un ensemble de règles définissant, d'une manière générale, les modalités d'exploitation des forêts suivant les grands types de peuplement forestiers régionalement identifiés.

Ce document, qui représente une sorte de corpus de règles minimales, est élaboré par un organisme de gestion en commun agréé ou par un expert forestier agréé ou encore par l'Office national des forêts, puis il est soumis à l'agrément du centre régional de la propriété forestière compétent.

Afin de simplifier les règles applicables, le projet de loi prévoit qu'un même règlement type de gestion peut être élaboré et présenté à l'agrément par plusieurs organismes de gestion en commun ou par plusieurs experts forestiers agréés.

L'article L. 222-6 traite ensuite dans son II de la formule des codes des bonnes pratiques sylvicoles, dont il a été question aux articles L. 6 et L. 8. Ces codes comprennent, par région naturelle ou groupe de régions naturelles, des recommandations là encore en matière de peuplement forestier. Ils doivent être conformes à une gestion durable et prennent en compte les usages locaux.

Les codes sont élaborés par chaque centre régional de la propriété forestière puis approuvés par le préfet de région, après avis de la commission régionale de la forêt et des produits forestiers.

Les codes des bonnes pratiques sylvicoles, qui sont encore inconnus de la réglementation forestière française, s'ils existent dans d'autres pays européens, constituent ainsi une sorte de « noyau basique » du message essentiel de la gestion durable des forêts.

A ce paragraphe, la commission a rejeté les amendements n° 91 de M. Pierre Micaux et n° 92 de M. François Vannson visant à modifier l'article L. 222-1 du code forestier de façon à abaisser de 10 à 5 hectares le seuil d'application habituel de la technique du plan de gestion, ce seuil étant abaissé de 5 à 2 hectares pour les peupleraies. La commission a de la même façon rejeté l'amendement n° 9 de M. François Vannson modifiant la rédaction du dispositif retenu par l'article 2 pour le règlement type de gestion et l'amendement n° 10 de M. Pierre Micaux prévoyant que le règlement type de gestion est élaboré par un expert forestier agréé « et » (et non pas « ou » comme dans le projet de loi) par l'Office national des forêts.

La commission a ensuite adopté l'article 2 ainsi modifié.

Chapitre III

L'accueil du public en forêt

Article 3

Accueil du public

L'intérêt du public pour les forêts est un phénomène souvent analysé et en tout cas croissant. Assumant en cela une part importante de cette « fonction sociale » retenue à l'article 1er (L.1) du projet de loi, la forêt, surtout quand elle est périurbaine, est de plus en plus un espace de promenade, d'activités sportives et de découverte de la nature. Chaque année, nos forêts domaniales, particulièrement équipées pour l'accueil du public, reçoivent ainsi 200 millions de visites.

L'article 1er de la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 « relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt », a prévu que « la mise en valeur de la forêt française... doit tendre... à faciliter l'accueil du public dans le respect des peuplements forestiers et en tenant compte des droits des propriétaires. »

Le projet de loi d'orientation ne reprend pas cette disposition, mais il consacre un article, l'article 3, à « l'accueil du public en forêt » et crée un titre supplémentaire dans le livre III du code forestier consacré à ce thème, actuellement absent du code.

Il apparaît de fait que le développement des loisirs comme l'augmentation de la population urbaine entraînent une fréquentation accrue des forêts, qui exerce une pression excessive sur les écosystèmes, ce qui impose de rechercher une diversification des espaces accessibles.

Il apparaît aussi que l'ouverture des bois et forêts est susceptible de générer des problèmes tout à fait classiques, tels que des risques accrus d'incendies, de dégradation de la végétation ou de tassement des sols, comme de poser des questions complexes et inédites relatives, par exemple, à la mise en jeu de la responsabilité du propriétaire en cas de dommage subi par un usager de la forêt ou aux difficultés de coexistence entre les différentes catégories d'usagers des espaces forestiers (randonneurs, chasseurs, adeptes du VTT).

L'article 3 du projet de loi comporte trois paragraphes consacrés à l'accueil du public en forêt, modifiant trois de nos codes (forestier, de l'urbanisme et des impôts).

·  Dans son paragraphe I, l'article 3 crée, comme on l'a vu ci-dessus, un titre VII dans le livre III du code forestier comportant un seul article, L. 370-1.

Celui-ci prévoit que, pour les espaces boisés et forestiers qui sont ouverts au public, le document d'aménagement arrêté dans les conditions prévues aux articles L. 133-1 (forêts du domaine de l'Etat) ou L. 143-1 (forêts des collectivités) ou le plan simple de gestion approuvé en application de l'article L. 222-1 (forêts des particuliers) « intègre les objectifs d'accueil du public ».

Cet article fait donc peser une obligation sur les auteurs des documents de gestion des forêts, que celles-ci soient publiques ou privées. Mais, cette obligation ne concerne clairement, aux termes de l'article L. 370-1 du code forestier, que « les espaces boisés et forestiers ouverts au public ». Il faut rappeler sur ce point que, si dans les pays du Nord de l'Europe ou d'Europe centrale, les forêts sont considérées par la loi comme étant ouvertes à tous, si, dans les pays du sud de l'Europe, s'impose, en revanche, un régime d'interdiction assorti de quelques exceptions, il existe en France une règle de base de tolérance en matière d'accès aux espaces boisés et forestiers, faute d'une interdiction expresse au public.

Lors de son examen de l'article 3, la commission a examiné un amendement du rapporteur prévoyant que, dans les forêts relevant du régime forestier, principalement dans les forêts domaniales, l'ouverture des forêts doit être recherchée le plus largement possible, ce qui implique l'intervention de mesures en matière de protection des espaces forestiers et de sécurité du public. M. François Sauvadet a souligné les difficultés d'une telle formulation, d'autant plus qu'elle concernait pour l'essentiel les forêts domaniales, où les activités de chasse offrent des apports financiers non négligeables. Après les interventions de MM. Pierre Ducout et Patrice Carvalho, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 226).

La commission a ensuite adopté deux amendements nos129 et 130 de M. Pierre Micaux concernant la prise en compte de l'objectif d'accueil du public par les plans simples de gestion. Ceux-ci intégreront l'objectif en question, lorsqu'ils s'appliqueront à des espaces boisés déjà ouverts au public par une convention avec une collectivité publique, notamment dans le cadre de l'application de l'article L. 130-5 du code de l'urbanisme (amendements nos 129 et 130 de M. Pierre Micaux).

·  Dans son paragraphe II, l'article 3 du projet de loi modifie deux articles du code de l'urbanisme, les articles L. 142-2 et L. 130-5.

L'article L. 142-2 du code de l'urbanisme ouvre aux conseils généraux la possibilité d'instituer une « taxe départementale des espaces naturels sensibles », qu'ils peuvent consacrer notamment au financement d'actions d'accueil du public en forêt. Cette possibilité n'étant retenue actuellement que pour les forêts appartenant « aux collectivités locales », le projet de loi vise à l'appliquer pour l'avenir aux forêts appartenant « aux collectivités publiques » et donc, aussi bien à l'Etat qu'aux collectivités territoriales. Les forêts domaniales seront ainsi concernées aussi bien que les forêts communales, départementales ou régionales, ce qui permettra la conduite par les conseils généraux de politiques cohérentes en matière de protection des espaces naturels sensibles.

Quant à l'article L. 130-5 du code de l'urbanisme, c'est sa première phrase qui se trouve modifiée par l'article 3 du projet de loi.

Il est prévu ainsi que les collectivités publiques (Etat donc et collectivités locales) peuvent passer avec les propriétaires de bois, parcs et espaces naturels (landes, clairières) des conventions tendant à l'ouverture au public de ces bois, parcs et espaces naturels. Dans le cas où ceux-ci sont situés dans des territoires excédant les limites territoriales de la collectivité publique contractante, le projet est soumis à la ou aux collectivités intéressées pour avis, lequel est réputé favorable si un refus n'est pas intervenu dans un délai de trois mois.

Ce dispositif modifie le début de l'article L. 130-5 du code de l'urbanisme, qui ouvre cette possibilité de contractualiser pour l'accueil du public en forêt aux seules collectivités territoriales et à leurs groupements, les bois, parcs et espaces naturels concernés par les conventions conclues étant, par ailleurs, nécessairement situés sur le territoire des collectivités contractantes. Désormais, celles-ci seront autorisées à conclure des conventions pour des zones situées en dehors de leur territoire de compétence, sous réserve de solliciter l'avis des communes d'implantation des forêts. C'est l'hypothèse des forêts situées à proximité de grandes agglomérations ou de zones touristiques où la population est inévitablement nombreuse et où s'exprime une demande particulièrement forte d'accueil et d'activité.

Notons que les dispositions de la deuxième phrase de l'article L. 130-5 du code de l'urbanisme ne sont pas remises en cause par le projet de loi, dispositions qui prévoient que les collectivités ayant passé convention peuvent allouer des subventions d'entretien aux propriétaires et assumer des prestations en nature telles que des travaux d'entretien et de gardiennage.

Sur le paragraphe II, la commission a adopté un amendement du rapporteur ayant pour objet de corriger une erreur de décompte d'alinéas (amendement n° 227), puis plusieurs amendements, prévoyant que les mesures prévues au II de l'article 3, visant à favoriser l'accueil du public, pouvaient s'appliquer également aux groupements des collectivités publiques (amendements nos 11, 13 et 14 de M. François Vannson et n° 12 de M. Pierre Micaux).

·  Dans son paragraphe III, l'article 3 du projet de loi prévoit l'extension de la technique de la dation en paiement des droits de succession aux « immeubles en nature de bois, forêts ou espaces naturels pouvant être incorporés au domaine forestier de l'Etat. »

Cette disposition modifie ainsi l'article 1716 bis du code général des impôts, qui réserve actuellement la dation en paiement aux _uvres d'art, aux livres, aux objets de collection, aux documents de haute valeur artistique ou historique, ainsi qu'aux espaces naturels littoraux remis au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres.

Cette mesure a notamment pour but de permettre la résorption d'enclaves privées existant dans des forêts domaniales, faisant bénéficier ainsi de la protection du régime forestier des forêts privées pouvant être difficilement acquises par voie amiable. La procédure serait en toute hypothèse limitée aux bois et forêts offrant une valeur patrimoniale réelle, étant donné leur intérêt écologique ou social ou n'induisant pas de charges de gestion importantes du fait de leur localisation. La mise en _uvre de cette nouvelle mesure nécessite la mise en place d'une commission interministérielle délibérant sur les suites à donner aux offres de dation sur la base des évaluations effectuées par les services fiscaux.

On peut estimer que l'application de la formule de la dation en paiement aux propriétés de bois, forêts et espaces naturels n'aura, au moins pour la première année, qu'une incidence financière réduite, compte tenu de la faiblesse de l'offre potentielle des espaces répondant aux conditions mises à l'incorporation au domaine forestier de l'Etat. Le rendement annuel escompté pourrait s'élever, pour la première année donc d'application de la mesure, à moins d'un million de francs.

La commission a créé un paragraphe IV et adopté un amendement du rapporteur prévoyant que tout bail portant sur l'utilisation par le public de bois et de forêts peut retenir la responsabilité du preneur pour l'entretien de ceux-ci (amendement n° 228).

Elle a ensuite adopté l'article 3 ainsi modifié.

Chapitre IV

Les régénérations naturelles et les futaies jardinées

Article 4

(articles 1395 et 76 du code général des impôts)

Encouragements fiscaux à la régénération des forêts

Le présent article vise à permettre la modulation des durées d'exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, aujourd'hui uniquement trentenaire et à étendre ce dispositif d'exonération aux régénérations naturelles ainsi qu'aux futaies jardinées.

La commission a examiné un amendement de M. Claude Jacquot visant à unifier et à alléger les procédures pour bénéficier des exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties. Le rapporteur a indiqué que cette simplification induirait des effets pervers qui nuiraient aux bénéficiaires. L'amendement a alors été retiré par son auteur.

Le paragraphe I de cet article modifie le 1 de l'article 1395 du code général des impôts, visant les exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties. Le dispositif en vigueur, pour le bois, prévoit une exonération pour les trente premières années du semis, de la plantation ou de la replantation.

Jusqu'alors, cette durée était uniforme quelle que soit la nature du bois. Le présent projet vise à établir une corrélation entre la durée de l'exonération et celle nécessaire à l'arrivée à maturité de l'arbre. Il peut ainsi être constaté que la maturité d'un résineux est atteinte après quatre vingt dix ans, celle d'un feuillu après cent cinquante ans et celle d'un peuplier après trente ans seulement. La période de trente ans crée une distorsion favorable aux résineux mais surtout aux peupleraies, qui se voient, de fait, exonérées pour l'essentiel de leur durée d'exploitation.

Pour rendre le dispositif d'encouragements fiscaux plus équitable, le présent article ramène la période d'exonération des peupleraies à dix ans, maintient celle des résineux à trente ans et porte celle des feuillus et autres bois non résineux à cinquante ans. Désormais, le dispositif sera neutre, quel que soit le choix sylvicole, dans la mesure où l'exonération couvrira environ le tiers de la durée de vie avant maturité.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol portant à 15 ans la durée de l'exonération pour les peupleraies, le rapporteur ayant estimé que cette proposition dénaturerait l'équilibre du texte.

Par ailleurs, le présent article vise à étendre les avantages fiscaux à d'autres moyens de renouvellement des boisements. C'est ainsi que son paragraphe II insère un petit 1 bis à l'article 1395 du code général des impôts, visant la régénération naturelle.

En effet, il existe deux méthodes pour renouveler les boisements. La régénération artificielle consiste en l'utilisation de semis issus de graines récoltés sur d'autres peuplements ou bien de plants élevés en pépinière.

Quant à la régénération naturelle, elle consiste à laisser se développer de jeunes semis issus des graines tombées des arbres adultes. Ceux-ci, présents sur la parcelle, doivent être suffisamment nombreux et de bonne qualité. Après la réussite des semis, certains de ces arbres seront coupés.

Si les deux méthodes sont complémentaires, seule la régénération artificielle ouvre droit à une exonération de taxe foncière sur la propriété non bâtie.

Dès lors, le présent article vise à inclure dans le dispositif fiscal les régénérations naturelles, qui concourent tout autant que la régénération artificielle à l'objectif d'une gestion durable de la forêt.

Les peupleraies ne sont pas concernées par ce nouveau dispositif. En revanche, il s'applique aux résineux ainsi qu'aux feuillus et non résineux pour une durée de trente et cinquante ans, respectivement.

Pour bénéficier du présent dispositif, le propriétaire ou l'office national des forêts, pour les forêts domaniales, doit adresser, avant le 1er janvier de la première année pour laquelle l'exonération est demandée, une déclaration à l'administration, accompagnée d'un certificat.

La déclaration indique la liste des parcelles concernées. Quant au certificat, il vise à constater la réussite de l'opération de régénération naturelle. Il est établi par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt (DDAF) ou par un agent assermenté de l'office national des forêts (ONF).

La constatation de la réussite de la régénération s'effectue au mois trois ans après qu'elle a eu lieu et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année suivant l'achèvement de la coupe définitive. Dans le cas où la déclaration serait souscrite au-delà du délai de dix ans, l'entrée dans le dispositif est toujours possible. Cependant la durée de l'exonération est réduite du nombre d'années qui sépare le dépôt de la déclaration de la dixième année suivant celle de l'achèvement de la coupe définitive.

La commission a rejeté un amendement n° 16 de M. François Vannson permettant la modulation des délais pour la constatation de la réussite de la régénération naturelle, le rapporteur ayant indiqué qu'un de ses amendements à venir répondait à cette exigence.

Par ailleurs, les modalités de délivrance et le contenu du certificat sont fixés par décret.

La commission a examiné un amendement du rapporteur permettant au décret, qui définit les modalités de constatation d'une opération de régénération, de comporter des assouplissements en cas de dégradations naturelles. M. François Sauvadet s'est associé à cet amendement ainsi que M. Pierre Micaux qui a en conséquence annoncé le retrait de son amendement n° 15. La commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 229).

De plus, le paragraphe III introduit un 1 ter à l'article 1395 du code général des impôts instituant un dispositif similaire d'exonération en faveur des futaies irrégulières en équilibre de régénération.

La futaie irrégulière se caractérise par un mélange, sur une même parcelle, d'arbres de tous âges, avec un équilibre entre petits, moyens et gros bois. Dans ce cas, le renouvellement s'effectue au moyen de petites trouées réparties sur toute la parcelle. Un tel cas de figure se rencontre dans des zones qui nécessitent un boisement constant lié, soit à un souhait de permanence du paysage, soit aux exigences d'un sol fragile, notamment en zones de pente. La futaie irrégulière se rencontre notamment dans l'est de la France. Elle est connue sous l'appellation de « futaie jardinée », expression qui, si elle figurait dans la loi, aurait pour effet de restreindre le champ d'application du dispositif.

La mise en _uvre de méthodes de régénération naturelle dans ces futaies ne peut pas être observée au sein de chaque parcelle, mais sur l'ensemble de la surface. Pour autant, cette pratique est très efficace, le peuplement est correctement régénéré et l'équilibre entre les arbres d'âges différents est protégé.

Le présent article instaure un mécanisme d'exonération de taxe foncière sur la propriété non bâtie en faveur des futaies irrégulières en équilibre de régénération. L'exonération représente un quart du montant de la taxe et est accordée pendant 15 ans, cette mesure étant renouvelable.

Pour obtenir le bénéfice de ce dispositif, le propriétaire - ou l'ONF, dans le cas des forêts domaniales - adresse à l'administration une déclaration ainsi qu'un certificat. Ces documents doivent être adressés avant le 1er janvier de l'année qui verra l'application ou le renouvellement du dispositif. La déclaration indique la liste des parcelles concernées tandis que le certificat, établi par la DDAF ou un agent assermenté de l'ONF, constate l'état d'équilibre de régénération. Ce certificat, dont le contenu et les modalités d'élaboration sont définies par le décret, doit être établi moins d'un an avant le dépôt de la demande.

Le paragraphe IV prévoit en outre la compensation, selon les modalités fixées en loi de finances, des pertes de recettes pour les collectivités locales du fait de l'application des 1, 1 bis et 1 ter de l'article 1395 du code général des impôts. La compensation représente une charge estimée à 8,6 millions de francs.

Le montant de la compensation est calculé en multipliant les bases d'impositions exonérées par le taux correspondant.

Par ailleurs, le paragraphe V procède à la mise en cohérence des dispositions relatives à la détermination du bénéfice agricole imposable, définie à l'article 76 du code général des impôts, avec les exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties, précédemment étudiées.

Les règles de fixation du bénéfice agricole (BA) applicables aux semis, plantations et replantations en bois sont étendues aux cas de régénération naturelle.

Le BA sera donc constitué de la plus faible des deux sommes suivantes :

- le revenu servant de base à la taxe foncière établie d'après la nature de culture et le classement antérieurs aux travaux ;

- la moitié du revenu servant de base à la taxe foncière qui devrait être retenue à la suite de l'exécution des travaux.

De plus, dans les cas de régénération naturelle, ce régime de fixation du BA est applicable pendant dix ans pour les peupleraies, trente ans pour les résineux et cinquante ans pour les feuillus et les non résineux, soit les mêmes durées que pour l'exonération de taxe foncière. Le dispositif est mis en place à la suite du respect de la procédure établie pour l'exonération.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol allongeant la durée de l'exonération fiscale pour les peupleraies en cohérence avec un amendement précédemment rejeté.

Le présent article crée un 3 bis qui met en cohérence le régime du BA avec les mesures d'exonération en faveur des futaies irrégulières en état de régénération.

C'est ainsi que le BA afférent à ces terrains est diminué d'un quart pour une période de quinze ans, renouvelable. Le bénéfice de ces dispositions est lié à la production de la déclaration et du certificat à l'administration en vertu du deuxième alinéa du 1 ter de l'article 1395.

En dernier lieu, le paragraphe VI prévoit le maintien en vigueur des exonérations établies préalablement à l'entrée en vigueur du nouveau dispositif. C'est ainsi que les semis, plantations ou replantations effectués avant la publication rentrent dans le cadre du dispositif existant.

Les durées d'application du régime de calcul du bénéfice agricole visé au a du 3 de l'article 76 demeurent de 10, 20 et 30 ans pour, respectivement, les peupleraies, les bois résineux et les bois feuillus et autres bois non résineux.

De même, l'exonération trentenaire de la taxe foncière sur les propriétés non bâties demeure applicable aux semis, plantations ou replantations effectués avant la publication de la présente loi.

La commission a adopté un amendement de M. Jean Proriol prolongeant, pour les boisements touchés par la tempête, l'application de dispositions plus favorables (amendement n° 230).

La commission a adopté l'article 4 ainsi modifié.

TITRE II

FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT ET LA COMPÉTITIVITÉ
DE LA FILIÈRE FORÊT-BOIS

Chapitre Ier

Les modes de vente de l'Office national des forêts

Article additionnel avant l'article 5

Adhésion des entrepreneurs de travaux forestiers à des coopératives d'utilisation de matériel agricole

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel permettant aux entreprises de travaux forestiers d'adhérer à des coopératives d'utilisation de matériel agricole et ainsi de bénéficier de l'imposition du bénéfice agricole et donc du dispositif de déduction pour investissement (amendement n° 231).

Article additionnel avant l'article 5

Révision des dispositions défavorables à l'utilisation du bois-énergie

La commission a examiné un amendement du rapporteur visant la révision des dispositions défavorables à l'utilisation du bois-énergie. Il souffre en effet de discriminations négatives vis-à-vis des autres énergies, notamment dans le cadre des réseaux de chaleur. Après que son auteur eut accepté un sous-amendement rédactionnel de M. François Sauvadet, la commission a adopté ce sous-amendement puis l'amendement portant article additionnel ainsi modifié (amendement n° 232).

Article additionnel avant l'article 5

Obligations des acquéreurs de certains bois et forêts

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel précisant les obligations des acquéreurs et des vendeurs de certains bois et forêts (amendement n° 233). En effet, certains vendeurs sont poursuivis pour des infractions à l'engagement de bonne gestion sylvicole, alors même qu'elles sont commises par les acheteurs. Cet amendement précise que l'acquéreur doit respecter l'engagement de bonne gestion et qu'il est seul responsable des faits survenus postérieurement au transfert du bien, dans la mesure où ils lui sont imputables.

Article additionnel avant l'article 5

Plan d'épargne-forêt

La commission a examiné un amendement du rapporteur portant création d'un « plan d'épargne-forêt ». Son auteur a indiqué qu'il s'agissait d'un dispositif favorisant l'épargne et l'investissement dans la filière bois et la forêt. Il permettra de financer la restructuration forestière, de réaliser des investissements dans les bois et forêts et dans les entreprises de la filière mais aussi de favoriser la mutualisation du risque. Ce dispositif est la concrétisation des espoirs suscités par le rapport de M. Jean-Louis Bianco.

M. François Sauvadet a indiqué qu'il s'agissait d'une bonne idée, par ailleurs défendue dans l'un de ses amendements actuellement en cours d'examen de recevabilité financière. Il a souligné que ce plan ne prendrait tout son sens que s'il est l'objet de primes et d'avantages fiscaux. Le rapporteur a alors précisé que de telles incitations étaient indispensables mais qu'il revenait au gouvernement de les présenter, du fait de l'irrecevabilité de telles propositions parlementaires. Lors de son audition devant la commission, le ministre de l'agriculture et de la forêt a indiqué qu'il était ouvert à toute proposition sur le sujet.

M. Joseph Parrenin s'est demandé quelle pourrait être l'institution gestionnaire de tels plans. M. François Sauvadet a souligné l'importance de cette création qui permettra de traduire la volonté unanime des députés d'améliorer la situation de la filière.

Le rapporteur a indiqué que cette volonté était clairement affichée dans le texte, qui contient l'essentiel du dispositif.

M. Jean Charroppin s'est associé pleinement à cet amendement qui répond à une attente exprimée depuis plusieurs mois, voire plusieurs années.

M. Joseph Parrenin a proposé d'adopter cet amendement en l'état même si le dispositif pourra, au fil des débats, être précisé et cantonné dans l'aspect forêt à cause de l'existence d'outils d'appui industriels.

Le rapporteur a souhaité ne pas réduire le champ du dispositif, les entreprises de travaux forestiers ne trouvant souvent pas de banques acceptant de leur octroyer des prêts.

M. Pierre Ducout a souligné l'importance des difficultés de ces entreprises. M. Claude Gatignol a, de même, indiqué que ce plan répondait à leurs besoins. M. Claude Jacquot s'est déclaré favorable à l'esprit du dispositif. M. Jean Charroppin s'est réjoui que ce plan soulève le problème du cautionnement des prêts.

La commission a alors adopté à l'unanimité cet amendement portant article additionnel (amendement n° 234).

Avant l'article 5

La commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol prévoyant la remise au Parlement d'un rapport du gouvernement sur les aides aux jeunes forestiers.

Article 5

Ventes de l'Office national des forêts

Le droit commun veut que les ventes de coupes relevant du régime forestier soient réalisées par l'ONF avec publicité et appel à la concurrence. Généralement, cette exigence de l'article L. 134-7 du code forestier se traduit par des ventes par adjudication publique avec enchères descendantes ; plus rarement, elles se font sous la forme d'appels d'offres par soumission cachetée. Les ventes amiables sont autorisées de manière exceptionnelle lorsque des motifs d'ordre technique ou commercial les justifient.

La plupart du temps, les ventes sont faites sur pied et en bloc, sans garantie de mesure, de volume ou de qualité. La coupe est assise sur un terrain sur lequel les arbres vendus ont été identifiés par une marque apposée par le marteau de l'Etat ou un marteau particulier appartenant aux ingénieurs et agents assermentés de l'ONF. Les empreintes des marteaux étant déposées aux greffes des tribunaux, l'objet vendu est certain.

Ce régime de vente n'est plus adapté aux exigences d'une filière livrée à la concurrence internationale. Il fait l'objet de nombreuses critiques reprises dans le rapport Bianco qui toutes mettent l'accent sur son caractère anti-économique. En effet, ce mode de vente implique une reconnaissance préalable des coupes. Dans son rapport, M. Jean-Louis Bianco se livre ainsi à une édifiante démonstration : « si l'on évalue le volume moyen de grumes par coupe mise en vente à 200 m³, chacun de ces établissements (les scieries de taille industrielle) est obligé d'acheter une moyenne de 100 lots (coupes) et d'en prospecter cinq à dix fois plus du fait du caractère aléatoire du système d'adjudication. Une telle dépense de temps et d'énergie, renouvelée chaque année, et accrue par la dispersion géographique des coupes, grève lourdement l'activité des scieries (deux prospecteurs qualifiés à plein temps seraient nécessaires dans le cas de la scierie moyenne considérée, soit un coût de 20 à 40 F au minimum par m³ de grumes acheté, donc au total un coût de 400 000 à 800 000 F.) ». Souvent, en raison du caractère stratégique des achats de coupes, c'est le dirigeant de l'entreprise lui-même qui procède à la prospection au détriment de ses autres obligations.

L'exigence d'une caution (cf. article L. 134-3 du code forestier) et les conditions de paiement de la coupe sont d'autres facteurs pénalisants pour les scieries. Enfin, le système de l'adjudication, s'il présente l'avantage théorique de l'objectivité du choix de l'acheteur, aboutit à des prix qui ont (comme pour toute vente aux enchères quels que soient les biens vendus) tendance à amplifier les mouvements du marché.

C'est pour ces raisons que l'article 5 du projet de loi propose une série de mesures visant à moderniser le droit de la vente des coupes effectuées par l'ONF.

Le paragraphe I de cet article modifie l'article L. 134-2 du code forestier afin, tout d'abord de mettre en conformité le code forestier avec le code pénal qui exclut désormais la mention d'un montant minimum de l'amende. Les ingénieurs, techniciens et agents de l'Etat chargés des forêts, les ingénieurs et agents assermentés de l'ONF, ainsi que dans le territoire où ils exercent leurs fonctions, les fonctionnaires chargés de présider ou de concourir aux ventes et les receveurs du produit des coupes sont passibles, s'ils prennent part directement ou indirectement aux ventes de coupe, d'une amende ne pouvant excéder le quart du montant de la vente dans la limite de 80 000 F.

Par ailleurs, l'interdiction de participer aux ventes de l'ONF faites aux parents et alliés des fonctionnaires et agents chargés des forêts et des ingénieurs et agents assermentés de l'Office est supprimée. Cette mesure peu appliquée, était un vestige du code forestier de 1827, code extrêmement répressif car visant en premier lieu à sauver une forêt française menaçant ruine en raison des gains des terres agricoles et des besoins de l'industrie naissante.

Le paragraphe II assouplit les règles relatives aux conditions de la vente. L'actuel article L. 134-3 du code forestier indique que « les cautions de la vente sont solidairement tenues du paiement des dommages, restitutions et amendes qu'aurait encouru l'acheteur de coupes ». L'étendue de cette garantie au paiement des amendes ne manque pas de surprendre. Dans les faits, cela signifie que l'acheteur de la coupe doit s'assurer contre sa propre volonté de nuire ! Ces cautions sont généralement accordées par des banques (plus rarement par des compagnies d'assurances) à des taux très variables selon la fiabilité de la scierie. De ce point de vue, on peut considérer que cette exigence fausse le jeu de la concurrence.

Pour simplifier cette pratique, et la rendre moins contraignante, le présent paragraphe précise que les modalités de mise en jeu de la caution seront prévues dans les clauses de vente (elles seront donc définies dans le cahier des clauses générales de vente). Il serait souhaitable que ce document assouplisse certaines règles en prévoyant par exemple une réduction progressive de la caution au fur et à mesure des encaissements (rappelons qu'un acheteur de coupes de l'ONF paie 20  % du prix comptant et acquitte le solde par tranches de 20  % au terme des quatrième, sixième, huitième et dixième mois suivant la vente).

Quant à l'étendue de la garantie, il porte classiquement sur le prix principal de la vente et le cas échéant sur les accessoires (indemnités de retard) et les dommages relevant de la responsabilité de l'acheteur. En revanche, les cautions ne sont plus tenues du paiement des amendes qu'aurait encouru ce dernier.

Le paragraphe III porte sur les modalités de vente des coupes par l'ONF. Jusqu'à présent la règle, fixée par l'article L. 134-7 du code forestier est que les coupes effectuées dans les bois et forêts de l'Etat sont vendues par l'ONF avec publicité et appel à la concurrence. Longtemps intangible, cette règle a été assouplie par la loi n° 91-5 du 3 janvier 1991 modifiant diverses dispositions intéressant l'agriculture et la forêt. Celle-ci, en insérant un article L. 134-8 dans le code, a autorisé les ventes à l'amiable lorsque celles-ci sont exclusivement justifiées par des motifs d'ordre technique ou commercial. L'article R. 134-16 du code forestier pris en application de cette disposition, en donne une interprétation très extensive. En effet, il autorise l'ONF à procéder à des ventes amiables dans les cas suivants :

1° Pour les lots restés invendus en adjudication ou après appel d'offres ;

2° Pour les lots dont l'exploitation revêt un caractère d'urgence ;

3° Pour les lots d'une valeur très faible ;

4° Pour les chablis dans les coupes en exploitation ;

5° Lorsque la concurrence ne peut jouer efficacement, en raison notamment du très petit nombre d'intéressés ;

6° Lorsque la continuité de l'écoulement régulier des produits de la forêt ou les besoins spécifiques des industries du bois dans une zone déterminée nécessite la passation de contrats de longue durée qui ne peuvent être établis que par négociation de gré à gré ;

7° Pour les lots concernés par des recherches, des études ou des expériences ;

8° Pour les lots dont l'exploitation ne peut être confiée qu'à l'entreprise chargée d'exécuter des travaux sur la coupe.

Certains de ces points (le 6° par exemple) dépassent à l'évidence les motifs d'ordre exclusivement technique ou commercial.

Pour clarifier le droit existant et pour renforcer la compétitivité de la filière bois, le projet de loi érige les ventes de gré à gré en procédé normal de cessions de coupes de l'ONF. La vente par adjudication n'est donc plus la règle et la vente amiable l'exception. Ces deux systèmes coexistent sur un pied d'égalité juridique. Par ailleurs, et pour donner valeur légale aux pratiques issues de la rédaction de l'article R. 134-16 du code forestier, les ventes de gré à gré doivent non seulement répondre à des motifs d'ordre technique ou commercial mais aussi à des motifs d'ordre économique.

Enfin, le présent paragraphe autorise également la conclusion de contrats d'approvisionnement pluriannuels. Ceux-ci présentent de multiples avantages pour la filière :

- ils sécurisent les approvisionnements des industriels ;

- ils offrent pour l'ONF un débouché régulier ;

- ils permettent un lissage des cours du bois ;

- ils encouragent les scieries à se grouper.

Pour encourager une pratique qui doit avoir des retombées positives sur l'ensemble de la filière, il serait souhaitable, qu'à l'avenir, les contrats d'objectif de l'ONF contiennent une obligation de vendre par contrat d'approvisionnement annuel, un pourcentage minimal de volume de bois. Il faut rappeler à ce stade du rapport que la vente de coupes sur la forêt domaniale représente annuellement un chiffre d'affaires pour l'ONF de 1,7 milliard de francs.

Le paragraphe IV adapte le régime des sanctions prévu à l'article L. 135-1 du code forestier. Actuellement, tout changement à l'assiette des coupes et tout ajout d'arbre ou de portion de bois donne lieu à une amende de 100 000 F. Le projet de loi limite cette amende à 50 000 F. mais complète le dispositif répressif par une mesure beaucoup plus dissuasive pour les scieries indélicates : l'interdiction de participer aux ventes de l'ONF.

Par ailleurs, ces sanctions s'appliquent désormais également aux échanges d'arbres, pratique ayant donné lieu à des abus et qui peut avoir des conséquences sylvicoles préjudiciables.

Le paragraphe V modernise la rédaction actuelle de l'article L. 135-10 du code forestier relatif à l'engagement de responsabilité des acheteurs de coupes en supprimant la référence à leurs facteurs ou gardes-coupes, ces fonctions n'existant plus depuis plus de trente ans. Dorénavant, les acheteurs sont responsables de tous délits et contraventions perpétrés sur la coupe (entre la délivrance du permis d'exploiter et celle de la décharge) jusqu'à ce qu'ils aient porté plainte.

La nouvelle rédaction de l'article L. 135-11 du code forestier issu du paragraphe VI du présent article est la conséquence de la limitation du champ de la garantie de la caution. Elle prend donc en compte les nouvelles dispositions de l'article L. 134-3 qui ne tiennent plus les cautions comme solidairement tenues du paiement des amendes encourues par l'acheteur de la coupe. Seul ce dernier est désormais responsable des infractions commises sur la coupe. Le code forestier est ainsi mis en conformité avec les règles du droit pénal relatives à la personnalité des peines et à l'intentionnalité des délits. Toujours dans le prolongement de l'article L. 134-3, il est précisé que, sur le plan civil, l'acheteur est solidairement responsable avec sa caution (ou ses autres garanties) de la réparation des dommages causés par ses salariés, préposés ou toutes entreprises intervenant pour son compte.

Conformément aux dispositions du nouveau code pénal, le paragraphe VII insère dans le chapitre V du titre III du livre 1er un article L. 135-13 qui prévoit que les infractions relatives à l'exploitation des coupes de l'ONF peuvent engager la responsabilité pénale des personnes morales fautives. Celles-ci peuvent se voir infliger une amende d'un montant égal au quintuple de celui applicable aux personnes physiques.

Le paragraphe VIII vise à accélérer la procédure de récolement. Cet acte qui consiste à vérifier formellement sur la parcelle que ce sont des arbres martelés qui ont été coupés, n'est, en pratique, pas systématiquement accompli, l'ONF se contentant d'intervenir en cours de coupe en cas de problème et de dresser éventuellement des procès-verbaux.

Actuellement, le récolement doit avoir lieu dans les trois mois suivant l'expiration des délais accordés dans les clauses de vente pour vidanger la coupe (c'est-à-dire pour couper et enlever le bois acheté).

Le projet de loi accélère et simplifie la procédure (article L. 136-1 du code forestier) en permettant de procéder au récolement, soit un mois après l'expiration des délais accordés pour vidanger la coupe, soit un mois après la notification par l'acheteur à l'ONF de l'achèvement de la coupe (en cas d'achèvement prématuré, la procédure n'est donc pas bloquée dans l'attente de l'expiration des délais précédemment mentionnés). Passé ce délai, l'acheteur est dégagé de ses obligations afférentes à la coupe. Toutefois le récolement peut faire l'objet d'un report pour motifs techniques justifiés par l'ONF.

Le paragraphe IX qui modifie l'article L. 136-2 du code forestier poursuit le même objectif d'allègement de la procédure puisqu'il vise à raccourcir les délais de contestation du procès-verbal de récolement. L'ONF et l'acheteur ne disposent plus que de quinze jours (au lieu d'un mois) pour requérir l'annulation du procès-verbal pour vice de forme ou fausse énonciation.

Par ailleurs, en cas d'annulation du procès-verbal par le tribunal administratif, l'ONF a dix jours et non plus un mois pour dresser un nouveau procès-verbal, le projet de loi précisant que ce délai court à compter de la notification de la décision du tribunal.

Lors de l'examen de cet article, la commission a d'abord adopté un amendement du rapporteur opérant dans la rédaction de l'article L. 134-7 du code forestier une distinction claire entre ventes de gré à gré et contrats d'approvisionnement pluriannuels (amendement n° 235). Elle a ensuite rejeté l'amendement n° 17 de M. François Vannson autorisant les ventes à l'amiable lorsque celles-ci font suite à une catastrophe naturelle. Après avoir rejeté un amendement de M. Claude Jacquot jugé trop directif par le rapporteur, la commission a adopté un amendement de ce dernier corrigeant une erreur de référence (amendement n° 236). Puis elle a rejeté un amendement de M. Patrice Carvalho portant à deux mois le délai dont dispose l'Office national des forêts pour procéder au récolement de la coupe, le rapporteur ayant rappelé que l'esprit général de la nouvelle rédaction de l'article L. 136-1 du code forestier était d'abréger les procédures. Enfin, la commission a adopté deux amendements du rapporteur, le premier limitant à un mois le temps pendant lequel l'office peut bénéficier du report du récolement (amendement n° 237) et le second précisant que le délai de quinze jours dont disposent l'office et l'acheteur pour requérir l'annulation du procès-verbal de récolement court à compter de sa notification (amendement n° 238).

Puis la commission a adopté cet article ainsi modifié.

Chapitre II

Dispositions relatives à la qualification professionnelle
requise pour les travaux d'exploitation de bois

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant dans le titre du chapitre II, d'une part, que les dispositions relatives à la qualification professionnelle visent uniquement les personnes intervenant en milieu forestier et étendant, d'autre part, son champ à la protection sociale (amendement n° 239).

Article 6

(article L. 371-1, 371-2 et 371-3 du code forestier)

Qualification professionnelle requise
pour les personnes intervenant en milieu forestier

L'article 6 insère dans le livre III du code forestier, un titre VII composé de trois articles et intitulé : « Qualification professionnelle des personnes intervenant en milieu forestier ».

L'exploitation forestière a subi depuis vingt ans de profonds bouleversements. Si l'on ne tient pas compte du cas spécifique des agriculteurs faisant de la récolte de bois une activité d'appoint, l'exploitation forestière fait intervenir deux types de professionnels :

- les exploitants forestiers qui sont d'abord des commerçants et sont de ce fait inscrits au registre du commerce (ils achètent le bois sur pied, le coupent ou plus fréquemment le font couper et le revendent abattu) ;

- les entrepreneurs de travaux forestiers (ETF) qui récoltent le bois, en tant que prestataires de services des propriétaires ou des exploitants.

Jusqu'à la fin des années 1970, les travaux d'exploitation forestière étaient réalisés par les salariés des entreprises de sciage ou de pâte à papier. C'est à partir des années 1980 que se sont développés les ETF dans des conditions pour le moins choquantes. En effet, face à l'exacerbation de la concurrence, les opérateurs de l'amont de la filière ont cherché à réduire leurs coûts. Pour y parvenir, ils ont externalisé les activités de bûcheronnage et de débardage, qui, pesaient sur ces coûts en raison en particulier du montant élevé des cotisations sociales dû à la fréquence et la gravité des accidents du travail.

Entre 1980 et 1988, le nombre des salariés des exploitants forestiers est ainsi passé de 16 000 à 6 800. Dans le même temps, les ETF se multipliaient, généralement sous la forme d'entreprise unipersonnelle, la majorité des chefs d'entreprise étant des travailleurs indépendants sans salarié (on estime à 7 000 aujourd'hui le nombre des ETF).

Face à cette évolution, le législateur a réagi en instituant par la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt, une « présomption de salariat » pour toute personne réalisant des travaux d'exploitation de bois, de reboisement et de sylviculture ainsi que d'équipement forestier.

Toutefois, cette présomption peut être levée par une commission départementale « si l'intéressé satisfait à des conditions de capacité ou d'expérience professionnelle et d'autonomie de fonctionnement » (cf. article 1147-1 du code rural).

En pratique, les personnes qui n'obtiennent pas l'agrément de la commission départementale, choisissent souvent de changer de statut et s'inscrivent au registre du commerce en tant qu'exploitants forestiers. Or, aucune compétence forestière particulière n'est exigée pour l'exercice de ce métier.

Cette situation est préoccupante car la récolte du bois est l'une des activités économiques les plus dangereuses. On a ainsi dénombré une douzaine d'accidents mortels depuis le début 2000 (en année normale, c'est-à-dire hors travaux de remise en état de forêts dévastées par une tempête exceptionnelle, on compte un accident mortel par mois). Le taux de gravité des accidents (jours d'arrêt/heures travaillées) est cinq fois supérieur à la moyenne des autres activités agricoles.

Une étude faite en 1996 par la caisse centrale de la mutualité sociale agricole à la demande du ministère de l'agriculture a permis de comparer les données nationales des accidents du travail des salariés des secteurs « exploitation de bois » et « scieries fixes » avec les données relatives aux autres professions agricoles.

DONNÉES NATIONALES DES ACCIDENTS DU TRAVAIL DES SALARIÉS

DES SECTEURS « EXPLOITATION DE BOIS »ET « SCIERIES FIXES »

 

Secteur
« Exploitation de bois »

Secteur « Scieries fixes »

Tous secteurs agricoles

Nombre trimestriel moyen de salariés

11 093

15 480

799 751

Nombre d'accidents avec arrêt

2 459

2 494

 

Taux de fréquence (*)

142,16

87,40

52,82

Nombre d'accidents graves

384

346

 

Taux de gravité (*)

7 973

3 495

2 175

Coût moyen des accidents du travail

26 555 F

18 951 F

 

(*) Taux de fréquence : (Nbre d'accidents avec arrêt/Nbre d'heures de travail) x 10 6

(*) Taux de gravité : (Somme des jours indemnisés/Nbre d'heures de travail) x 10 6

Source : CCMSA

Pour remédier à cette situation, il convenait donc, comme le souhaite d'ailleurs largement la profession, de définir les travaux d'exploitation de bois (article L. 371-1 du code forestier), d'imposer une exigence de qualification professionnelle pour les personnes accomplissant ce type de travaux (article L. 371-2) et de prévoir des sanctions en cas d'emploi de personnes non qualifiées (article L. 371-3).

L'ensemble de ces mesures devrait renforcer la compétitivité de la filière en réduisant les coûts de production car l'exigence de qualification devrait s'accompagner de gains de productivité, d'une amélioration de la qualité du travail et d'une baisse des accidents, donc des cotisations.

Article L. 371-1 du code forestier

Définition des travaux d'exploitation de bois

Pour définir les travaux d'exploitation de bois, l'article L. 371-1 s'inspire de la rédaction de l'article 1144 du code rural qui énumère la liste des professions agricoles et forestières dont les salariés sont soumis au régime d'assurance obligatoire contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

On retrouve donc dans les travaux d'exploitation de bois : l'abattage, l'ébranchage, l'éhouppage (action consistant à débarrasser un arbre de son houppier, c'est-à-dire de ses branches supérieures), le débardage sous toutes ses formes (par traction animale ou automobile ou par câblage) et les travaux précédant ou suivant normalement ces opérations. Parmi ces derniers sont visés, le nettoyage des coupes, le transport de bois par l'entreprise ayant procédé aux travaux d'exploitation, et lorsqu'ils sont réalisés sur place, les travaux de façonnage (transformation des grumes en billons), de conditionnement du bois (enstérage), de sciage (car il existe encore des scieries mobiles) et de carbonisation (fabrication du charbon de bois).

Par cette énumération, le projet de loi a voulu viser, d'une part, les travaux directement dangereux et d'autre part ceux qui comportent des risques parce que se déroulant sur le chantier lui-même. Ce qui explique que les travaux d'éclaircie aient été rajoutés à la liste de ceux mentionnés à l'article 1144 du code rural (ils sont directement dangereux car ils impliquent des coupes ; celles-ci, pratiquées sur des arbres non arrivés à maturité, favorisent la croissance des arbres restants) et que les travaux d'élagage aient été retranchés de cette même liste (l'élagage ici visé est l'élagage forestier qui concerne des arbres jeunes et consiste à couper des branches sur le bas des troncs pour que des n_uds ne se forment pas sur cette partie noble de l'arbre ; ce travail n'a donc pas lieu sur les chantiers de coupe et ne présente pas le caractère dangereux de l'élagage dit « urbain »).

A l'article L. 371-1 du code forestier, la commission a adopté deux amendements du rapporteur, l'un précisant que ce sont les travaux de récolte de bois qui sont définis à cet article (amendement n° 240) et l'autre précisant que les entreprises visées sont notamment les entreprises de travaux forestiers (amendement n° 241).

Article L. 371-2 du code forestier

Exigence de qualification professionnelle

L'article L. 371-2 est révélateur de l'esprit de l'article 6 du projet de loi. En effet, il y est expressément indiqué que les entreprises « veillent à la sécurité sur les chantiers en s'assurant de la qualification des personnes y travaillant ». La sécurité du travail est donc un objectif clairement affiché auquel concourt l'exigence de qualification des personnes intervenant en milieu forestier.

S'ensuit un dispositif qui n'est pas sans rappeler celui mis en place par l'article 16, paragraphe I de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 (dite loi Raffarin) pour certaines professions artisanales.

Des décrets pris en Conseil d'Etat définiront, d'une part, les modalités de reconnaissance de la qualification professionnelle et, d'autre part, pour les personnes travaillant déjà en forêt à la date de leur publication, les conditions leur permettant de justifier de la qualification requise (on peut penser que la reconnaissance d'expérience s'effectuera selon des critères proches de ceux retenus pour lever la présomption de salariat).

En dehors de l'expérience professionnelle, la qualification aux métiers liés à l'exploitation de bois pourra être obtenue soit par l'obtention de diplômes, soit par la participation à des stages de formation, soit par l'apprentissage.

Il convient de signaler que l'enseignement agricole propose d'ores et déjà dans 188 unités de formation, un éventail important de diplômes comportant des spécialisations forestières.

Lors de l'examen de l'article L. 371-2 du code forestier, la commission a adopté un amendement du rapporteur sous-amendé par M. Patrice Carvalho rendant plus directive la rédaction de cet article en précisant que les entreprises ne se contentent pas de veiller à la sécurité sur les chantiers mais qu'elles en sont responsables et étendant leur responsabilité à l'hygiène sur les chantiers (amendement n° 242). Puis elle a examiné un amendement de M. Jean Proriol soustrayant les exploitants agricoles à l'obligation de qualification. M. Claude Gatignol a d'abord rappelé que les agriculteurs avaient l'habitude de pratiquer ce type de travaux, en particulier dans des exploitations « linéaires ». Pour sa part, M. Pierre Micaux a souhaité que seuls soient exclus du dispositif les exploitants agricoles ayant souscrit un contrat territorial d'exploitation. Après que le rapporteur eut répondu en indiquant que lesdits contrats ne constituaient pas des gages de qualification et que le présent article permettait de reconnaître la qualification de personnes exerçant effectivement un des métiers visés, la commission a rejeté l'amendement de M. Jean Proriol. La commission a ensuite adopté deux amendements identiques de précision de MM. Patrice Carvalho et Jean Proriol (amendement n° 243). Elle a enfin adopté un amendement de M. Patrice Carvalho indiquant que les décrets au Conseil d'Etat visés au présent article détermineront les règles d'hygiène et de sécurité à respecter sur les chantiers (amendement n° 244).

LES DIPLÔMES LIÉS AUX MÉTIERS DE LA FORÊT

Niveau

Diplôme

Option

Spécialité

V

CAPA

Conducteur de machines d'exploitation forestière

 

Ouvrier d'exploitation forestière

Abattage - façonnage

Ouvrier sylviculteur

 

BEPA

Aménagement de l'espace

Travaux forestiers

BPA

CE ou OHQ en travaux forestiers

Abattage - façonnage

CE ou OHQ en travaux forestiers

Débardage

CE ou OHQ en travaux forestiers

Sylviculture

IV

BTA

Aménagement de l'espace

Gestion et conduite des chantiers forestiers

III

BTSA

Productions forestières

 

Technico-commercial

Bois et grumes

Autres

Certificat de spécialisation

 

CCTAR

 

Signification des sigles :

CAPA Certificat d'aptitude professionnelle agricole

BEPA Brevet d'études professionnelles agricoles

BPA Brevet professionnel agricole (CE ou OHQ = chef d'entreprise ou ouvrier hautement qualifié)

BTA Brevet de technicien agricole

BTSA Brevet de technicien supérieur agricole

CCTAR Certificat de capacité technique agricole et rural (le support professionnel peut être la forêt).

Article L. 371-3 du code forestier

Sanctions en cas d'emploi de personnes non qualifiées

L'article 371-3 du code forestier poursuit d'une amende de 65 000 F (montant non habituel s'expliquant par le fait qu'il correspond environ à 10 000 euros), le fait d'exercer ou de faire exercer une activité visée à l'article L. 371-1 par une personne non qualifiée. Le montant de cette amende peut être multiplié par cinq si le fautif est une personne morale. A titre d'exemple, la loi Raffarin punit d'une amende de 50 000 F l'exercice par une personne ne disposant pas de la qualification requise d'un des métiers visés à son article 16 ou de la profession de coiffeur.

Par ailleurs, un arsenal de peines complémentaires est prévu tant pour les personnes physiques (interdiction d'exercice de l'activité pour une durée maximale de cinq ans, fermeture de l'établissement pour le même durée, affichage de la décision, exclusion des marchés publics pour cinq ans au plus) que pour les personnes morales (fermeture pour cinq ans au plus et affichage de la décision).

Enfin, il est précisé que les infractions au titre du code forestier relatif à la qualification professionnelle des personnes intervenant en milieu forestier, sont constatées par les officiers et agents de police judiciaire, les inspecteurs du travail et les ingénieurs, techniciens et agents de l'Etat chargés des forêts (c'est-à-dire les agents du ministère de l'agriculture et de la forêt).

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 245) et un amendement du même auteur permettant d'exclure des marchés publics les personnes morales ayant employé en forêt du personnel non qualifié (amendement n° 246). Elle a ensuite rejeté l'amendement n° 46 de M. François Vannson, celui-ci étant satisfait par l'amendement du rapporteur ajoutant un article additionnel après l'article L. 371-3 du code forestier.

Après l'article L. 371-3

Information des donneurs d'ordres sur la qualification professionnelle
des personnels employés

La commission a adopté un amendement du rapporteur créant un nouvel article dans le code forestier et indiquant que des décrets devront préciser les modalités d'information des donneurs d'ordres afin de leur permettre de s'assurer de la qualification professionnelle des personnes visées à l'article L. 371-2. Cette vérification pourra s'effectuer notamment par la délivrance d'une attestation administrative. Par ailleurs, d'autres décrets devront indiquer les modalités de levée de la présomption de salariat prévue à l'article 1147-1 du code rural (amendement n° 247).

Puis la commission a adopté l'article 6 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 6

Modification de l'article 1144 du code rural

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel corrigeant par cohérence avec les nouvelles dispositions du code forestier, l'article 1144 du code rural afin que soient mentionnés les travaux de récolte et non d'exploitation de bois (amendement n° 248).

Article additionnel après l'article 6

Accord collectif ou de branche

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel prévoyant qu'un accord collectif ou de branche devra être conclu. Celui-ci, tenant compte du caractère pénible et dangereux des professions de la forêt, devra prévoir des garanties en cas de décès, d'inaptitude ou d'incapacité de travail et des mesures couvrant les risques liés à la maladie. Il devra également favoriser le reclassement professionnel des salariés en cas d'inaptitude au travail (amendement n° 249).

Après l'article 6

La commission a rejeté un amendement de M. Patrice Carvalho visant à instituer des délégués à la sécurité des travaux forestiers dans chaque commission d'hygiène et de sécurité, le rapporteur ayant fait valoir que cette disposition était d'ordre réglementaire.

Chapitre III

L'emploi et la lutte contre le travail dissimulé

Article 7

Exonération de cotisations sociales
des jeunes chefs d'entreprise agricole

L'article 8 de la loi n° 99-1140 du 29 décembre 1999 de financement de la sécurité sociale pour 2000 a mis en place un système d'exonération partielle de cotisations sociales pour les jeunes exploitants agricoles pendant leurs trois premières années d'affiliation au régime agricole.

La rédaction actuelle de cet article limite ce bénéfice aux seuls exploitants agricoles. Le présent article élargit la disposition aux jeunes chefs d'entreprises agricoles. Entrent aussi, par exemple, dans le champ d'application de l'exonération les jeunes entrepreneurs de travaux forestiers ou de travaux agricoles. Dans le même esprit, les conditions relatives à la taille de l'exploitation sont supprimées, les textes d'application du présent article devant fixer des plafonds de revenus.

Sur cet article, la commission après avoir rejeté les amendements nos 23 de M. Pierre Micaux et 24 de M. François Vannson, a adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur matérielle du texte (amendement n° 250).

Puis elle a adopté l'article 7 ainsi modifié.

Article 8

Groupements d'employeurs pour le remplacement
des entrepreneurs de travaux forestiers

Les groupements d'employeurs, autorisés par l'article L. 127-1 du code du travail, sont définis comme des groupements de personnes physiques ou morales relevant de la même convention collective, ayant pour but exclusif de mettre à la disposition de leurs membres des salariés liés à ces groupements par un contrat de travail.

En ajoutant un article L. 127-9 au code du travail, la loi n° 95-95 du 1er février 1995 de modernisation de l'agriculture a étendu, en l'adoptant, ce dispositif aux exploitants agricoles. En raison de l'absence de salarié dans 90  % des exploitations, du caractère peu concurrentiel des activités agricoles et de leur saisonnalité, les groupements d'employeurs (qui succédaient aux services de remplacement) ont remporté un réel succès.

Or, les entreprises de travaux forestiers sont elles aussi très souvent unipersonnelles. La maladie ou l'accident du chef d'entreprise pose des problèmes similaires à ceux rencontrés sur les exploitations agricoles. C'est pourquoi le présent article se propose d'étendre aux entreprises de travaux forestiers, le droit de constituer des groupements d'employeurs. Comme en agriculture, leur régime sera plus souple que celui applicable aux autres groupements : les contrats de travail ne devront pas impérativement mentionner la liste des utilisateurs potentiels, ni leur lieu d'exécution (la simple mention de la zone géographique d'exécution suffit) ; les recrutements sous contrats à durée déterminée seront admis.

En revanche, les forestiers ne bénéficieront pas des mêmes avantages financiers que ceux dont disposent les exploitants agricoles (car ces avantages proviennent de l'ancien régime des services de remplacement).

La possibilité offerte aux entrepreneurs de travaux forestiers de se grouper pour employer des salariés devrait améliorer la viabilité d'un grand nombre de micro-entreprises et permettre une diminution de l'emploi non déclaré. Elle répond à une forte demande des professionnels concernés.

Après avoir adopté un amendement de précision du rapporteur (amendement n° 251), la commission a adopté cet article ainsi modifié.

Après l'article 8 

La commission a rejeté un amendement de M. Patrice Carvalho visant à étendre à l'ensemble des salariés les dispositions de l'article L. 127-9 du code du travail limitant le champ de déplacement des personnes travaillant pour des groupements d'employeurs dans le secteur agricole, la récente tempête ayant fait la démonstration de l'utilité de la mobilité dans des occasions exceptionnelles.

Article 9

(article 1263 bis du code rural)

Statut des ouvriers forestiers d'Alsace-Moselle

Le présent article vise à résoudre de manière définitive le problème posé par le statut des ouvriers forestiers d'Alsace-Moselle qu'une décision de la Cour de cassation vient de remettre en cause.

En Alsace-Moselle, les communes disposent de compétences particulières en matière de gestion et d'exploitation de leur patrimoine forestier. Elles peuvent en effet, conformément aux dispositions de l'instruction ministérielle du 25 octobre 1894, vendre leur bois abattu et façonné (et non vendre la coupe, c'est-à-dire des arbres sur pied). L'abattage et le façonnage peuvent être confiés à une entreprise privée. Mais, dans la grande majorité des cas, ces travaux sont réalisés directement en régie. Ces régies ont donc pour salariés des bûcherons qui disposent souvent de contrats de travail multi-employeurs (leur permettant d'être employés par plusieurs communes forestières ; parfois, l'ONF fait partie des employeurs) et sont souvent payés à la tâche.

Jusqu'à un passé récent, ce statut n'avait pas soulevé de difficultés juridiques particulières. Mais le 29 avril 1998, la Cour de cassation en estimant que « le service de la ville de Strasbourg assurant l'exploitation et l'entretien de la forêt privée de la ville constitue un service public administratif de sorte que les personnels contractuels travaillant pour son compte sont des agents de droit public quel que soit leur emploi », a bouleversé les données de la question car elle oblige en l'espèce à appliquer le principe issu de l'arrêt du 25 mars 1996 du tribunal des conflits (Préfet du Rhône, M. Berkani contre CROUS de Lyon) selon lequel toute personne employée par un établissement public est un agent public.

Cette décision, si elle ne remet pas en cause le régime forestier d'Alsace-Moselle, est toutefois lourde de conséquences pour les salariés : les contrats multi-employeurs leur sont interdits en application du principe du non cumul des emplois publics, leur rémunération est modifiée car le paiement à la tâche n'est plus autorisé, la convention collective du 18 juin 1975 concernant les exploitations forestières d'Alsace ne leur est plus applicable (alors que celle-ci leur assure de meilleures conditions de travail), leur couverture sociale est révisée (en matière d'assurance maladie par exemple, le régime local ne s'applique plus).

Or, cet arrêt de la Cour de cassation qui, comme on l'imagine, a suscité bien des mouvements en Alsace-Moselle (400 des 700 bûcherons communaux d'Alsace ont manifesté à Strasbourg en mars 1999), ne manque pas de surprendre les juristes. L'Institut du droit local Alsacien-Mosellan rappelle ainsi dans une note que « les forêts de l'Etat et des collectivités publiques appartiennent à leur domaine privé. Selon une jurisprudence constante, les activités ayant pour objet l'aménagement, l'entretien et l'utilisation du domaine privé des collectivités publiques relèvent du droit privé. L'activité de gestion du domaine privé ne constitue pas une activité de service public administratif. Dans un arrêt du 28 novembre 1975, le Conseil d'État s'est prononcé de manière très nette sur ce point, à propos des actes de gestion d'une forêt domaniale. Il a considéré qu'il n'y avait service public ni, bien sûr, dans les parties non aménagées de la forêt, ni davantage dans les parties aménagées. »

Pour éviter que perdure une situation mal vécue, le projet de loi, propose d'ajouter dans le code rural un article 1263 bis, indiquant expressément que les bûcherons et ouvriers recrutés par les communes du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, par leurs établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ayant compétence en matière de gestion forestière, par les syndicats mixtes de gestion forestière ou par des groupements syndicaux forestiers, sont des salariés agricoles relevant des dispositions du code rural et du code du travail.

Sur cet article, la commission a adopté un amendement de M. Claude Jacquot, sous-amendé sur proposition du rapporteur, rendant rétroactives les dispositions de cet article relatives au statut des ouvriers forestiers d'Alsace-Moselle (amendement n° 252).

Puis elle a adopté cet article ainsi modifié.

Article 10

(article L. 324-11-3 du code du travail)

Déclaration des chantiers de coupes et de débardage

Le travail dissimulé (plus connu sous le nom de travail clandestin et défini à l'article L. 324-10 du code du travail) est un fléau affectant gravement le secteur forestier en raison des difficultés de contrôle liées à la brièveté des chantiers et à la localisation de leur emplacement.

Actuellement, dans le secteur agricole et forestier, la seule obligation liée à l'information des services de contrôle est celle instaurée par l'article R. 620-5 du code du travail qui impose à tout employeur occupant plus de deux salariés sur un chantier devant durer au moins un mois d'en aviser le chef du service départemental du travail et de la protection sociale agricole en précisant la localisation du chantier, sa durée prévisible et le nombre de salariés présents sur le site. Les chantiers forestiers durant souvent moins d'un mois et occupant fréquemment une seule personne échappent généralement à cette obligation.

Le projet de loi prévoit, à son article 10, de doubler ce dispositif d'une nouvelle obligation d'information et d'affichage préalable ; cette dernière s'inspire de celle instituée par l'article R. 324-1 du code du travail pour les chantiers donnant lieu à permis de construire.

En vertu du nouvel article L. 324-11-3 du code du travail, tout entrepreneur forestier devra, avant le début des travaux adresser au service de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole du département dans lequel est prévu le chantier, une déclaration écrite. Celle-ci fournira divers renseignements : nom ou dénomination de l'entreprise, adresse, lieu du chantier, date de début et de fin des travaux, nombre de salariés occupés sur le chantier.

Ces mêmes informations doivent également être affichées en bordure de chantier.

Signalons que dans le cadre des conventions départementales de partenariat avec l'Etat pour la lutte contre le travail illégal, trois départements (Ariège, Corrèze et Vaucluse) ont déjà expérimenté ce type d'affichage. En termes de lutte contre l'emploi dissimulé, les résultats sont contrastés (seuls, les services départementaux de l'inspection du travail du Vaucluse relèvent l'effet dissuasif de la mesure) mais le dispositif n'est pas contraignant et donc difficilement comparable avec celui mis en place par le présent article. Par ailleurs, les mêmes services ont souligné le rôle non négligeable joué par l'affichage en faveur de la sécurité des promeneurs.

Lors de l'examen de l'article 10, la commission a adopté un amendement du rapporteur étendant l'obligation d'information et d'affichage aux chantiers de boisement, de reboisement ou de travaux sylvicoles (amendement n° 253).

Elle a ensuite adopté cet article ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 10

Pouvoirs de l'inspecteur du travail sur les chantiers
de coupes ou de débardage

La commission a adopté un amendement de M. Patrice Carvalho portant article additionnel permettant aux inspecteurs du travail, lorsqu'ils constatent sur un chantier de coupes ou de débardage qu'un salarié poursuit son travail alors qu'il existe un danger, de prendre toute mesure utile permettant de le soustraire à cette situation et de décider par exemple l'arrêt temporaire des travaux (amendement n° 254).

Après l'article 10

Après que M. Patrice Carvalho eut retiré un amendement satisfait par l'adoption d'un précédent amendement du rapporteur, la commission a rejeté deux amendements respectivement déposés par MM. Patrice Carvalho et Claude Jacquot visant à la création d'un observatoire des pathologies et des accidents du travail dans les secteurs agricole et forestier, le rapporteur ayant fait valoir que cette disposition était d'ordre réglementaire.

Chapitre IV

L'organisation interprofessionnelle

Les organisations interprofessionnelles sont des enceintes regroupant les organisations professionnelles les plus représentatives d'un secteur ou d'une filière de production, de transformation et de commercialisation d'un produit ou d'un groupe de produits agricoles, aquacoles, halieutiques, sylvicoles ou alimentaires donnés pour définir en commun et favoriser les rapports contractuels entre les membres de ces organisations professionnelles et pour mettre en place une politique commune de gestion qualitative, quantitative et promotionnelle du marché. Leur principal instrument d'action réside dans l'adoption d'accords interprofessionnels qui peuvent être étendus, à la demande de l'organisation interprofessionnelle, à tous les membres des professions concernées, par arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et des ministres chargés de l'économie et du budget, dès lors qu'ils ont été adoptés à l'unanimité des organisations professionnelles membres de l'interprofession.

L'institution des organisations interprofessionnelles remonte à la loi n° 75-600 du 10 juillet 1975 relative à l'organisation interprofessionnelle agricole, dont les dispositions ont été codifiées sous les articles L. 632-1 à L. 632-9 du code rural. Cette forme d'organisation est spécifique au monde agricole. Avant 1975, l'organisation interprofessionnelle des marchés agricoles était très lâche. La loi n° 60-808 du 5 août 1960 d'orientation agricole (article 32, codifié sous l'article L. 631-14 du code rural) avait tout d'abord autorisé le ministre de l'agriculture à établir, avec les professions intéressées, des contrats types, sans caractère impératif, par produit. La loi n° 62-933 du 8 août 1962 complémentaire à la loi d'orientation agricole mit ensuite en place les groupements de producteurs pour éviter que les producteurs ne se présentent en ordre dispersé sur le marché (articles L. 551-1 et L. 551-2 du code rural). La loi n° 64-678 du 6 juillet 1964 tendant à définir les principes et les modalités du régime contractuel en agriculture offrit plusieurs moyens contractuels nouveaux : les accords interprofessionnels à long terme (articles 2 à 8 et 14 à 16 de la loi du 6 juillet 1964 précitée), les conventions de campagne (articles 9 à 16 de la loi du 6 juillet 1964 précitée) et les contrats d'intégration (articles 17 à 22, codifiés sous les articles L. 326-1 à L. 326-10 du code rural).

Malgré le caractère innovant du dispositif des accords interprofessionnels à long terme, peu d'accords furent conclus car il n'existait pas d'enceinte de rencontre des organisations professionnelles intéressées. La loi n° 75-600 du 10 juillet 1975 relative à l'organisation interprofessionnelle agricole remédia à cette lacune.

Le but des organisations interprofessionnelles fut donc, dès l'origine, d'organiser, par la concertation et la conclusion d'accords entre les différentes familles professionnelles qui les composent, l'action des producteurs et des acteurs d'une filière et du marché. Les organisations interprofessionnelles faisant l'objet d'une reconnaissance ministérielle furent ainsi spécialement habilitées par la loi à élaborer et conclure de tels accords, leurs accords, et eux seuls, pouvant être étendus par arrêté des ministres de l'agriculture, de l'économie et du budget.

Les accords interprofessionnels sont assimilés à des contrats collectifs passés entre les organisations professionnelles membres de l'interprofession. Ils sont élaborés conformément au statut de l'interprofession au sein de laquelle ils sont négociés. L'ouverture des négociations est décidée librement par les groupements professionnels membres de l'interprofession. Chaque organisation professionnelle s'exprime par une seule voix, la loi n'exigeant pas que leur décision d'approuver un projet d'accord interprofessionnel soit prise à l'unanimité au sein des membres composant leur organisation.

Cependant, les conditions posées par la loi (article L. 632-3 du code rural) pour qu'un accord interprofessionnel puisse être étendu pèsent fortement sur le déroulement de ces négociations. En effet, seuls peuvent être étendus les accords adoptés à l'unanimité des organisations professionnelles. Toutefois, la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole a permis que les accords ne concernant qu'une partie des professions représentées au sein d'une interprofession ne soient adoptés qu'à l'unanimité de ces seules professions, sous réserve qu'aucune autre profession membre ne s'y oppose.

Le régime des interprofessions a été modifié à quatre reprises depuis 1975 : par la loi n° 80-502 du 4 juillet 1980 d'orientation agricole, l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence (article 60, VIII), la loi n° 95-95 du 1er février 1995 de modernisation de l'agriculture et la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole (voir le rapport n° 1058, tome I, pp. 243 à 245, de M. François Patriat pour l'analyse de ces modifications). Cette dernière loi a réformé substantiellement le droit des interprofessions et a notamment étendu leur intervention au secteur de la sylviculture.

Article 11

Statut des organisations interprofessionnelles sylvicoles

Le Gouvernement propose de placer les futures organisations interprofessionnelles sylvicoles sous le statut général des interprofessions agricoles en définissant toutefois quelques règles dérogatoires comme il a été procédé dans la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 pour la mise en place des interprofessions du secteur de la pêche maritime et de l'aquaculture. Ce statut général est fixé par les articles L. 632-1 à L. 632-11 du code rural. Le projet de loi modifie à cette fin les articles L. 632-1, L. 632-2 et L. 632-3 du code rural en prévoyant quatre points dérogatoires :

- la composition et la procédure de reconnaissance des interprofessions (2ème à 4ème alinéas du paragraphe I de l'article 11) ;

- l'objet légal des interprofessions (quatre derniers alinéas du paragraphe I de l'article) ;

- l'inapplicabilité des dispositions autorisant les accords de qualité et de prix conclus au sein d'interprofessions reconnues spécifiques à un produit sous signe officiel d'identification de la qualité ou de l'origine (paragraphe II de l'article) ;

- l'impossibilité d'étendre un accord interprofessionnel contenant une mise en _uvre, sous le contrôle de l'Etat, de règles de mise en marché, de prix et de conditions de paiement (paragraphe III de l'article).

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur portant sur le paragraphe I (amendements nos  255 et 256).

· Composition et procédure de reconnaissance des interprofessions sylvicoles

A l'instar des interprofessions du secteur de la pêche maritime et de l'aquaculture, le deuxième alinéa du 2° du paragraphe I de l'article définit spécifiquement les organisations professionnelles autorisées à constituer un groupement interprofessionnel dans le secteur de la forêt et des produits forestiers. Ces organisations professionnelles sont le pendant sylvicole des organisations professionnelles du secteur agro-alimentaire visées au premier alinéa du I de l'article L. 632-1 du code rural. Il s'agit tout d'abord des organisations les plus représentatives de la production sylvicole et de la récolte des produits forestiers, dont la présence est impérative quel que soit l'objet de l'interprofession. Ensuite, selon l'objet de l'interprofession, le groupement peut comprendre les organisations professionnelles les plus représentatives de la transformation, de la commercialisation, de la distribution et de la mise en _uvre des produits forestiers (c'est-à-dire des métiers de la menuiserie, charpenterie, ébénisterie, etc.).

Il appartiendra à l'autorité administrative compétente en matière de reconnaissance des interprofessions, c'est-à-dire les ministres chargés des forêts, de l'économie et du budget, d'apprécier si le groupement dont la reconnaissance est demandée comprend les organisations professionnelles les plus représentatives conformément à ces dispositions. La loi ne détermine aucune règle quant au seuil de représentativité. Le décret n° 81-228 du 10 mars 1981 relatif à la reconnaissance des organisations interprofessionnelles agricoles n'a pas non plus fixé de règle. Le pouvoir d'appréciation des ministres est donc totalement discrétionnaire.

Après que le rapporteur eut fait valoir qu'un de ses amendements étendait le régime des interprofessions sylvicoles aux produits dérivés du bois, qui est l'expression consacrée, M. Claude Jacquot a retiré deux amendements précisant que le dispositif du quatrième alinéa du I de l'article s'appliquait au secteur de la forêt, des produits forestiers et du bois.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur incluant les producteurs de plants forestiers dans les membres de droit des interprofessions sylvicoles afin que les pépiniéristes prennent une part active, à la mesure de l'importance de leur activité économique, dans le fonctionnement de ces interprofessions (amendement n° 257), puis un amendement du même auteur étendant le champ des interprofessions sylvicoles aux produits dérivés du bois(amendement n° 258).

Par ailleurs, le projet de loi impose de recueillir l'avis du Conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers préalablement à la reconnaissance d'une interprofession sylvicole. La commission a adopté un amendement de coordination du rapporteur modifiant la dénomination de ce conseil, qui, conformément à un amendement adopté par la commission à l'article 1er du projet de loi et portant nouvelle rédaction de l'article L. 3 du code forestier, s'appelle le conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois (amendement n° 259).

En dernier lieu, le deuxième alinéa du 2° du I de l'article exige, à l'instar du droit commun des interprofessions, qu'une interprofession sylvicole soit constituée par produit ou groupe de produits. Il appartiendra donc aux ministres chargés de la forêt, de l'économie et du budget d'apprécier si l'interprofession soumise à leur reconnaissance porte sur un produit de la forêt. Par exemple, la constitution d'une interprofession de l'ameublement ne serait pas conforme à la loi car les meubles meublants ne sont pas constitués uniquement de mobiliers en bois ou dérivés du bois. En outre, les interprofessions peuvent être reconnues soit au niveau national, soit au niveau d'une zone de production (c'est-à-dire un massif).

Sur ces derniers points, il convient de souligner que les interprofessions sylvicoles ne dérogeront pas, aux termes du projet de loi, aux dispositions du paragraphe II de l'article L. 632-1 du code rural. De ce fait, selon le dispositif du Gouvernement, il ne pourra être reconnu qu'une seule organisation interprofessionnnelle par produit ou groupe de produits. Ainsi, si une interprofession est reconnue pour l'ensemble des produits de la forêt, aucune autre interprofession ne pourra être créée ultérieurement sauf sous la forme d'une section de cette interprofession. De même, si une interprofession du bois d'ameublement ou de construction est reconnue, aucun autre groupement interprofessionnel qui utilise le même produit ne pourra être reconnu. Or, dans les filières du bois, un même arbre et des mêmes planches ou troncs issus de la première transformation peuvent être utilisés pour différentes fabrications qui emprunteront des filières distinctes (une branche de liège peut être utilisée indifféremment pour fabriquer des bouchons ou dans la décoration ; un tronc de chêne peut emprunter la filière de la trituration (pâte à papier) ou de la construction ; une planche de noyer peut servir à la décoration d'intérieur ou à la construction). En dernier lieu, au cas où des interprofessions sylvicoles régionales seraient constituées en premier, à la reconnaissance d'une interprofession nationale couvrant leurs produits celles-ci devraient se transformer en comité de cette interprofession nationale.

Lors de la réunion de la commission, votre rapporteur a indiqué qu'il souhaitait que la réflexion sur le dispositif de l'article 11 se poursuive car la rédaction actuelle conduit à mettre en place une seule forme d'interprofession couvrant tout le secteur de la forêt et des produits forestiers et dérivés du bois. Il a fait observer que les professionnels de la trituration, de l'ameublement ou des pins des Landes ne souhaitaient pas être dilués dans la masse des organisations professionnelles du secteur et perdre leur spécificité. M. Pierre Ducout, a approuvé cette remarque et souligné l'importance de l'enjeu.

Le principe d'exclusivité décrit ci-dessus ne s'applique qu'aux demandes de reconnaissance formulées en application de la loi n° 75-600 du 10 juillet 1975 précitée, ce qui sera le cas des interprofessions sylvicoles. Ont ainsi pu subsister les interprofessions spécifiques, notamment viticoles, antérieures à cette loi. La loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 a toutefois introduit une dérogation à ce principe général : des interprofessions spécifiques à un produit bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée, d'une même indication géographique protégée, d'un même label ou d'une même certification de conformité peuvent être reconnues. Le dernier alinéa de l'article L. 632-1 du code rural prévoit en ce cas des mesures de coordination impérative entre l'interprofession spécifique et l'interprofession générale. Cependant, comme on le verra plus loin, ce dispositif dérogatoire est, en l'état du projet de loi, inapplicable aux interprofessions sylvicoles.

M. Pierre Micaux a annoncé qu'il retirerait ses amendements nos 25 et 47 précisant que les interprofessions sylvicoles pourraient être reconnues par type de produits, et la commission a rejeté l'amendement n° 26 de M. François Vannson ayant le même objet.

· Objet légal des interprofessions sylvicoles

La loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 a innové en définissant l'objet que doivent poursuivre les organisations interprofessionnelles reconnues : l'article L. 632-1 du code rural ne permet de reconnaître une interprofession qu'à la condition qu'elle poursuive concomitamment trois groupes d'objectifs :

- « définir et favoriser les démarches contractuelles entre leurs membres ; »

« contribuer à la gestion des marchés, par une meilleure adaptation des produits aux plans quantitatif et qualitatif et par leur promotion ; »

- « renforcer la sécurité alimentaire, en particulier par la traçabilité des produits, dans l'intérêt des utilisateurs et des consommateurs. »

Le projet de loi fixe quatre objectifs aux interprofessions sylvicoles, mais ces objectifs sont peu éloignés de ceux définis pour les interprofessions agricoles :

« 1° définir et favoriser des démarches contractuelles entre leurs membres ;

« 2° améliorer la connaissance de l'offre et de la demande par produits ou groupes de produits ;

« 3° permettre l'établissement de normes techniques et de programmes de recherche appliquée ;

« 4° contribuer à la promotion des produits sur les marchés intérieurs et extérieurs. »

Le projet de loi reprend sans modification le premier objectif des interprofessions agricoles et les trois autres objectifs qu'il définit reprennent les premier, cinquième et sixième objectifs que peuvent poursuivre, en application de l'article L. 632-3 du code rural, les accords interprofessionnels étendus. Le dernier objectif relatif à la promotion des produits sur les marchés intérieurs et extérieurs rejoint, en outre, en partie le second objectif des interprofessions agricoles.

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol précisant que les normes techniques visées au troisième objectif assigné aux interprofessions sylvicoles reconnues devaient être conformes aux réglementations européennes, après que le rapporteur eut fait valoir que cette précision allait de soi.

De même, la commission a rejeté l'amendement n° 94 de M. François Vannson dans la mesure où la notion de promotion des produits incluait leur découverte et leur connaissance.

M. Claude Gatignol a ensuite présenté un amendement de M. Jean Proriol fixant un nouvel objectif aux interprofessions sylvicoles reconnues tenant à la mise en _uvre des démarches de certification forestière. Après que le rapporteur eut fait remarquer que les interprofessions n'étaient pas chargées de la mise en _uvre des démarches de certification mais qu'elles constituaient des enceintes adaptées permettant d'associer tous les acteurs d'une filière à la démarche de certification, M. Claude Gatignol a rectifié l'amendement afin de préciser que l'objectif était de participer à la mise en _uvre de ces démarches. Puis, la commission a adopté l'amendement ainsi rectifié (amendement n° 260).

M. Claude Gatignol a ensuite retiré un amendement de M. Jean Proriol définissant un objectif supplémentaire aux interprofessions sylvicoles reconnues, après que le rapporteur eut fait remarquer que les interprofessions ne seraient pas chargées de développer la qualification professionnelle par des actions de formation mais qu'elles interviendraient par des actions de stimulation et qu'en ce sens la rédaction de son amendement suivant était mieux adaptée. La commission a donc adopté un amendement du rapporteur assignant aux interprofessions sylvicoles reconnues l'objectif de favoriser la diffusion, y compris par la formation, des techniques de fabrication et de mise en _uvre des produits forestiers ou dérivés du bois (amendement n° 261).

· Les accords de qualité et de prix des interprofessions spécifiques à un signe de qualité ou de l'origine

La loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 a introduit une réforme importante dans le droit des interprofessions en permettant aux interprofessions reconnues spécifiques à un produit sous un des signes officiels d'identification de la qualité ou de l'origine que sont l'appellation d'origine contrôlée, l'indication géographique protégée, le label ou la certification de conformité, de conclure, à l'unanimité de leurs membres, un accord comportant certaines restrictions de concurrence énumérées au paragraphe II de l'article L. 632-2 du code rural, à savoir :

- une programmation prévisionnelle et coordonnée de la production en fonction de débouchés ;

- une fixation d'un plan d'amélioration de la qualité des produits ayant pour conséquence directe une limitation de volume de production ;

- une limitation des capacités de production ;

- une restriction temporaire de l'accès des nouveaux opérateurs selon des critères objectifs et appliqués de manière non discriminatoire ;

- une fixation de prix de cession par les producteurs ou de prix de reprise des matières premières.

Le rapport établi pour la première lecture du projet de loi d'orientation agricole à l'Assemblée nationale par M. François Patriat (n° 1058, du 9 juillet 1998, pp. 258 à 265) fait une analyse complète de cette réforme.

Le présent projet de loi exclut les interprofessions sylvicoles du bénéfice de ces dispositions en rendant celles-ci inapplicables aux produits forestiers (paragraphe II de l'article).

Votre rapporteur n'approuve pas cette exclusion.

Le dispositif du paragraphe II n'est tout d'abord pas cohérent avec le dispositif du projet de loi et les dispositions actuelles du code rural. En effet, si l'article 1er du projet de loi (article L. 13 nouveau du code forestier) ouvre aux acteurs des filières du bois la possibilité d'établir des certifications de conformité prévues par le code de la consommation (certification des produits autres qu'alimentaires ou autres qu'agricoles non alimentaires et non transformés qui sont régis par les dispositions du code rural), l'article L. 632-1 du code rural ne permet de reconnaître que des interprofessions spécifiques à un signe de qualité ou de l'origine mentionné aux chapitres II et III du titre IV du livre VI du code rural ; or ces chapitres ne visent que des signes attachés à des produits agricoles ou alimentaires, excluant de jure les produits de la forêt. Une interprofession sylvicole ne pourrait donc pas bénéficier des dispositions du II de l'article L. 632-2 du code rural.

Sur la proposition de votre rapporteur, la commission a adopté un amendement portant article additionnel après l'article 1er visant à ouvrir l'appellation d'origine contrôlée aux produits de la forêt. Cette réforme permet de rendre applicable une partie des dispositions du II de l'article L. 632-2 du code rural sur les accords de qualité comportant des restrictions de concurrence. En outre, il conviendrait d'étendre ce dispositif aux certifications de conformité délivrées en application des articles L. 115-27 à L. 115-32 du code de la consommation, comme c'est le cas dans les filières sylvicoles.

Il est important que les facultés ouvertes par ce paragraphe II de l'article L. 632-2 du code rural ne soient pas limitées aux seuls produits agricoles. Les filières sylvicoles et du bois sont très fragiles au regard des surproductions, comme c'est le cas actuellement après les chablis de décembre 1999, et les producteurs subissent des variations de prix parfois insupportables économiquement. Des accords de qualité conclus au sein de filières interprofessionnelles de signes d'origine ou de qualité doivent pouvoir être accessibles aux professions sylvicoles et du bois. Ce paragraphe II de l'article L. 632-2 donne une opportunité d'organisation aux professionnels qu'il ne faut pas écarter par avance comme le fait le projet de loi.

Pour ces raisons, la commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant le paragraphe II de l'article (amendement n° 262).

· L'extension des accords interprofessionnels contenant une mise en _uvre de règles de mise en marché, de prix et de conditions de paiement

L'article L. 632-3 du code rural permet d'étendre des accords interprofessionnels comportant notamment des mesures tendant à favoriser « la mise en _uvre, sous le contrôle de l'Etat, de règles de mise en marché, de prix et de conditions de paiement » (3° de l'article). Cette disposition a été introduite dans la loi n° 75-600 du 10 juillet 1975 relative à l'organisation interprofessionnelle agricole par la loi n° 80-502 du 4 juillet 1980 d'orientation agricole.

Le paragraphe III du présent article interdit cependant aux accords interprofessionnels sylvicoles de bénéficier de cette disposition.

Pour les mêmes arguments que ceux avancés pour supprimer le paragraphe II de l'article, votre rapporteur est opposé à cette exclusion. Les filières de la forêt et du bois peuvent en effet également tirer un grand bénéfice de cette faculté. Pour cette raison, la commission a adopté un amendement du rapporteur supprimant le paragraphe III de l'article (amendement n° 263).

La commission a enfin adopté un amendement de coordination du rapporteur insérant un paragraphe IV afin d'étendre la dérogation prévue à l'article L. 632-5 du code rural aux interprofessions sylvicoles (amendement n° 264).

Puis, elle a adopté l'article 11 ainsi modifié, M. Jean Charroppin ayant expressément déclaré s'abstenir.

Après l'article 11

M. Patrice Carvalho a retiré un amendement portant article additionnel après l'article 11 prévoyant qu'un décret en Conseil d'Etat fixe, au plus tard dans les six mois suivant la promulgation de la loi d'orientation sur la forêt, la fraction minimale de la valeur des bois utilisés dans les constructions publiques, après que le rapporteur eut indiqué qu'un décret d'application de la loi sur l'air et l'utilisation rationnelle de l'énergie serait publié d'ici cet été et donnerait satisfaction à M. Patrice Carvahlo.

TITRE III

INSCRIRE LA POLITIQUE FORESTIÈRE DANS LA GESTION DES TERRITOIRES

Chapitre IER

Dispositions relatives aux défrichements

Article additionnel avant l'article 12

Maintien de la taxe sur les défrichements

La commission a examiné un amendement du rapporteur, portant article additionnel avant l'article 12 et visant à maintenir la taxe sur les défrichements. Le rapporteur a rappelé que le projet de loi de finances pour 2000 avait prévu de supprimer cette taxe dès le 1er janvier 2000 et que cette échéance avait été repoussée d'un an suite à un amendement qu'il avait déposé et qui avait été adopté. Il a signalé que cette taxe, si elle était d'un faible produit, de l'ordre de 30 millions de francs, était néanmoins appréciée des professionnels du secteur de la forêt et que ces derniers en souhaitaient le maintien, pour deux raisons essentielles : d'une part, la taxe permet de lutter contre les défrichements intempestifs, d'autre part, elle permet de rééquilibrer le coût des terrains forestiers par rapport à celui des terrains agricoles. La commission a adopté cet amendement portant article additionnel avant l'article 12 (amendement n° 265).

Article 12

Régime des défrichements

Cet article précise la définition des défrichements et en actualise le régime pour tenir compte de la diversité du patrimoine forestier.

La législation actuelle sur les défrichements résulte, pour une grande part, de la volonté de lutter contre les opérations abusives. La loi de finances rectificative pour 1969, n° 69-1160 du 24 décembre 1969, avait déjà établi le principe d'une autorisation administrative préalable pour certains défrichements et avait institué une taxe perçue sur toutes les opérations de défrichement. La loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt a donné une première définition législative du défrichement, et a accru les pénalités en cas de défrichements non autorisés ainsi que la taxe frappant l'ensemble des défrichements.

Ces dispositions répondaient avant tout à un souci de protection du patrimoine forestier, ce qui passait par des renforcements successifs du contrôle et de la dissuasion des défrichements directs ou indirects.

Le présent projet de loi poursuit les mêmes objectifs, tout en les actualisant. Il s'agit non seulement de protéger l'espace forestier, mais également de tenir compte de la diversité des peuplements forestiers. Si l'on constate que globalement, l'espace forestier a tendance à s'étendre, les évolutions de chaque massif sont divergentes : alors que les zones très boisées sont peu défrichées, les espaces en voie de déboisement font l'objet de défrichements parfois intensifs. Pour tenir compte de cette réalité, le régime des défrichements est adapté : la définition du défrichement et le régime de l'autorisation préalable sont précisés ; la notion de reboisement compensatoire est introduite pour tenir compte du rôle écologique et social des bois visés par un défrichement ; le régime de la responsabilité pénale des personnes opérant des défrichements non autorisés est complété et adapté aux dispositions du nouveau code pénal et s'applique désormais également aux personnes morales.

1. Définition des défrichements et principe de l'autorisation préalable

Le paragraphe I de cet article du projet de loi propose une nouvelle rédaction de l'article L. 311-1 du code forestier. Aux termes de la rédaction actuelle de cet article, « les opérations volontaires ayant pour conséquence d'entraîner à terme la destruction de l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière sont assimilées à un défrichement ». Cette définition extensive s'applique donc quelle que soit la nature de l'opération et ne distingue pas entre défrichement direct ou indirect. Cette conception globalisante pose cependant problème, car elle est assortie du principe général de la soumission de ces opérations à autorisation, sauf si elles sont entreprises en application d'une servitude d'utilité publique. C'est par exemple le cas des emprises de passage de lignes électriques en forêt, qui constituent un défrichement indirect. Il semble cohérent de dispenser de telles opérations d'une autorisation préalable. Pour autant, la rédaction actuelle conduit, contrairement à l'intention initiale du législateur, à exempter d'une telle autorisation un défrichement direct en application d'une servitude d'utilité publique, par exemple pour l'exploitation d'une carrière.

Il convenait donc de clarifier la définition des défrichements, en distinguant plus clairement les opérations directes et indirectes.

Constituent donc un défrichement, aux termes du premier alinéa de l'article L. 311-1 du code forestier :

- toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière. Il s'agit là de la définition actuelle du défrichement et qui pose deux conditions cumulatives : détruire l'état boisé et mettre fin à la destination forestière, ce qui suppose un changement de l'affectation du terrain. Ainsi, une coupe rase ne constitue pas un défrichement si elle est suivie de rejets de souche, la destination forestière du terrain n'ayant pas disparu. C'est d'ailleurs pourquoi les opérations de défrichement consistent généralement en une coupe et un désouchage ;

- toute opération volontaire entraînant indirectement les mêmes conséquences, sauf si elle est entreprise en application d'une servitude d'utilité publique. Ainsi, tout doute disparaît : une opération volontaire menée en application d'une servitude d'utilité publique ne constitue un défrichement que s'il peut être qualifié de direct.

Il est en outre précisé que la destruction, qu'elle soit accidentelle ou volontaire, de l'état boisé, ne fait pas disparaître la destination forestière du terrain ; il n'y a donc pas systématiquement défrichement lors d'une coupe rase ou après un incendie.

La définition du défrichement étant ainsi précisée, le deuxième alinéa de l'article L. 311-1 dispose que nul ne peut user du droit de défricher ses bois, sans avoir préalablement obtenu une autorisation. Cette rédaction est plus large que celle du premier alinéa de l'article L. 311-1 dans sa rédaction actuelle, qui limite cette obligation aux seuls particuliers. La rédaction proposée par le projet de loi permet de l'appliquer aux personnes morales privées (sachant que cet article est inscrit dans le chapitre Ier du titre Ier du livre III, relatif aux bois des particuliers).

Le même alinéa, ainsi que les deux suivants, précisent ensuite la procédure d'autorisation préalable en l'allégeant par rapport au système actuel, source de lenteurs et de contentieux.

En effet, lors de toute demande d'autorisation de défrichement, le directeur départemental de l'agriculture et de la forêt (DDAF) doit faire procéder à la reconnaissance de l'état et de la situation des bois, en application de l'actuel article L. 311-1. Un procès-verbal doit être dressé dans les quatre mois suivant l'enregistrement de la demande d'autorisation. Lorsque l'instruction de la demande fait apparaître que les bois n'ont pas un des rôles utilitaires énumérés par l'actuel article L. 311-3 et motivant une décision de refus, le préfet a délégation du ministre pour autoriser le défrichement et sa décision est notifiée au propriétaire par le DDAF. Le défaut de notification du procès-verbal de reconnaissance vaut alors autorisation à l'expiration du délai de quatre mois précité.

Si les bois ont un des rôles utilitaires prévus par l'article L. 311-3 et motivant une décision de refus d'autorisation de défricher, le ministre chargé de l'agriculture statue alors après avis de la section des travaux publics du Conseil d'Etat et sa décision est notifiée au propriétaire par le DDAF. L'absence de décision du ministre dans les six mois de la notification de la reconnaissance des bois vaut autorisation.

Le projet de loi prévoit d'alléger cette procédure sur plusieurs points :

- l'établissement d'un procès-verbal de reconnaissance n'est plus systématique. Il relèvera donc de la diligence de la direction départementale de l'agriculture, ce qui devrait permettre d'éviter la multiplication des recours contentieux sur ce document ;

- les conditions de délais, qui seront déterminées par décret en Conseil d'Etat, devraient être modifiées. D'après les informations fournies à votre rapporteur, le décret devrait préciser que dans les cas où l'administration fait part au pétitionnaire de sa décision de procéder à la reconnaissance des bois, le délai de droit commun, qui est ramené à deux mois, est porté à quatre mois à compter de la demande et en cas de proposition de refus à six mois, à compter du dépôt de la demande ;

- la procédure de l'avis en Conseil d'Etat en cas de refus ou d'autorisation partielle est supprimée, car source de lourdeurs excessives.

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que les autorisations de défrichement doivent être expresses lorsque le défrichement est soumis à enquête publique ou a pour objet de permettre l'exploitation de carrières (amendement n° 266).

Concernant la durée de la validité des autorisations, le projet de loi la maintient à cinq ans, en précisant que ces autorisations prennent effet à compter de leur délivrance expresse ou tacite et non plus à partir de la reconnaissance des bois, qui n'est plus systématique. En revanche, la durée maximale de ces autorisations lorsque le défrichement a pour objet de permettre l'exploitation de carrières est portée de quinze ans (dispositif actuel) à trente ans. Ainsi, le régime des défrichements est mis en adéquation avec la législation relative aux carrières et notamment avec l'article 16-1 de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, en vertu duquel les autorisations administratives d'exploitations de carrières ne peuvent excéder trente ans.

Le projet de loi reprend par ailleurs les dispositions actuelles imposant aux autorisations de défrichement, accordées au titre d'un défrichement ayant pour objet de permettre l'exploitation de carrières, de comporter un échéancier des surfaces à défricher. Comme cela est déjà le cas actuellement, cet échéancier est fixé en fonction du rythme prévu d'exploitation. En cas de non-respect de ce document, l'autorisation de défrichement est suspendue après mise en demeure restée sans effet. La commission a rejeté l'amendement n° 27 de M. Pierre Micaux.

2. Bois des particuliers dispensés d'autorisation préalable de défrichement en raison de leur nature

Certains bois de particuliers peuvent être librement défrichés par leur propriétaire en raison de leur nature. Il n'est donc pas nécessaire à ce dernier de déposer une demande d'autorisation préalable. Aux termes de l'actuel article L. 311-2 du code forestier, sont exemptés d'autorisation préalable les défrichements opérés sur les bois suivants :

- les jeunes bois pendant les vingt premières années après leur semis ou plantation, sauf s'il s'agit d'un remplacement de bois défrichés, conservés à titre de réserves boisées ou encore bénéficiant d'interventions publiques. Cette disposition est limitée aux bois de moins de vingt ans : elle ne concerne donc que les terrains qui, avant d'être transformés en bois, étaient affectés à une autre culture ;

- les parcs ou jardins clos et attenant à une habitation principale, lorsque l'étendue close est inférieure à 10 hectares ;

- les bois d'une étendue inférieure à 4 hectares, sauf s'ils font partie d'un autre bois qui complète la contenance à 4 hectares ou s'ils sont situés sur le sommet ou la pente d'une montagne, ou encore s'ils bénéficient d'interventions publiques ;

- les bois situés dans une zone agricole délimitée en application de la réglementation des boisements, si le défrichement a pour but une mise en valeur agricole ou pastorale, afin de lutter contre le phénomène de la déprise agricole.

Le paragraphe II de cet article du projet de loi remanie ce dispositif sur plusieurs points :

- parmi les cas de dérogations prévues pour les bois des particuliers par l'article L. 311-2 du code forestier, est supprimé celui des jeunes bois de moins de vingt ans. Il ne s'agit pas d'une disparition pure et simple puisque le paragraphe XIII de cet article du projet de loi renvoie le traitement de ce cas au nouvel article L. 315-1 du code forestier qui s'applique à la fois aux bois des particuliers et à ceux des collectivités ;

- de même, le cas des bois de moins de 4 hectares est supprimé. Le projet de loi introduit un nouveau dispositif : le préfet fixe par département ou par partie de département un seuil compris entre 0,5 et 4 hectares en deçà duquel la superficie du terrain à défricher est insuffisante pour donner lieu à autorisation préalable. En dessous de ce seuil, le défrichement est donc libre, sauf si le bois fait partie d'un autre bois dont la superficie, ajoutée à la sienne, dépasse le seuil fixé par le préfet. L'abaissement potentiel du seuil à 0,5 hectare est destiné à lutter contre les disparités croissantes constatées entre, d'une part, les régions peu boisées qui font l'objet d'un déboisement intensif et, d'autre part, les régions fortement boisées qui ne font pas l'objet de défrichements. Le cas particulier des défrichements en montagne, qui étaient soumis à autorisation préalable, n'est plus explicitement mentionné. Il reviendra au préfet de fixer le seuil de surface qu'il estime approprié ;

- le dispositif relatif aux parcs et jardins clos est rendu plus restrictif. Si le principe de base d'une dispense d'autorisation préalable pour les défrichements d'étendues inférieures à 10 hectares est maintenu, il est désormais prévu que la surface déclenchant la demande d'une autorisation de défrichement est abaissée à un seuil compris entre 0,5 et 4 hectares et fixé par le préfet dans le département ou par partie de département. Cette disposition s'applique lorsque les défrichements sont liés à la réalisation d'une opération d'aménagement ou d'une opération de construction soumise à autorisation. Ainsi, il est fait abstraction de la clôture lorsque le défrichement projeté doit permettre de réaliser des lotissements dans un parc ;

- les dispositions dispensant d'une autorisation les défrichements de bois situés dans une zone agricole, si ces défrichements ont pour but une mise en valeur agricole ou pastorale, sont supprimées. Elles sont néanmoins reprises et complétées dans le nouvel article L. 315-1 proposé par le paragraphe XIII de cet article du projet de loi et qui s'applique à la fois aux bois des particuliers et aux bois des collectivités et de certaines personnes morales.

La commission a rejeté l'amendement n° 67 de M. François Vannson et a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 267). La commission a ensuite rejeté l'amendement n° 28 de M. François Vannson.

Puis, elle a examiné un amendement de M. Claude Jacquot précisant que sont dispensés d'autorisation les défrichements nécessaires à la création d'infrastructures forestières. Après que le rapporteur eut signalé que cette préoccupation était satisfaite par le XIII de l'article 12 du projet de loi, M. Claude Jacquot a retiré son amendement, ainsi qu'un amendement de conséquence.

3. Motifs de refus d'autorisation de défrichement

Le paragraphe III de cet article du projet de loi actualise les motifs de refus d'autorisation de défrichement en remaniant l'article L. 311-3 du code forestier qui s'applique aux bois des particuliers. Les dispositions actuellement en vigueur prévoient dix rôles utilitaires des bois qui peuvent motiver une décision de refus.

Le projet de loi maintient en l'état la possibilité d'exciper des rôles utilitaires des bois suivants pour refuser un défrichement :

- le maintien des terres sur les montagnes ou sur les pentes ;

- la défense du sol contre les érosions et débordements de cours d'eau ;

- l'existence de sources et cours d'eau ;

- la protection des dunes et des côtes ;

- la défense nationale ;

- la salubrité publique.

Il procède, pour les autres rôles utilitaires, à des modifications de portée variable.

S'agissant de la nécessité d'assurer le ravitaillement national en bois et produits dérivés en ce qui concerne les bois provenant de reboisements bénéficiant d'une intervention publique, le principe même est conservé mais la formulation modernisée. Peut désormais motiver une décision de refus de défricher, la valorisation des investissements publics consentis pour améliorer la ressource forestière lorsque les bois ont bénéficié d'aides publiques à la constitution ou à l'amélioration des peuplements forestiers. Le principe d'un droit de regard des collectivités publiques sur le sort réservé aux boisements qu'elles ont aidés est donc maintenu.

Le critère relatif à l'équilibre biologique d'une région ou au bien-être d'une population est complété. Il motive aujourd'hui près de 80 % des décisions d'autorisation ou de refus de défricher. Le projet de loi précise que le refus peut être motivé en outre par l'équilibre biologique d'un territoire présentant un intérêt du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l'écosystème. Cette précision est destinée à éviter le mitage des forêts par défrichements successifs et à clarifier la notion de « région naturelle ». Elle vise surtout les zones Natura 2000, pour l'instant caractérisées avec difficulté.

Le projet de loi supprime par ailleurs, au sein des critères motivant un refus d'autorisation de défricher, l'aménagement des périmètres d'actions forestières et des zones dégradées à faible taux de boisement prévues par les 2° et 3° de l'article L. 126-1 du code rural. Parallèlement, l'article 37 du projet de loi abroge, dans son paragraphe II, ces dispositions dans ledit article. Cette abrogation est motivée par le caractère dirigiste de la procédure qui était prévue à cet article et qui était utilisée essentiellement lorsque l'Etat prenait en charge la reconstitution de ces zones. Aujourd'hui, la problématique est différente : il ne s'agit plus de lutter contre la disparition de la forêt, mais de gérer et d'entretenir les bois. C'est par exemple le cas lorsque la forêt progresse excessivement vers les zones d'habitat rural : le problème est bien d'arriver à une gestion minimale de ces bois.

C'est pourquoi il a été considéré que la procédure prévue par les 2° et 3° de l'article L. 126-1 du code rural était obsolète, ainsi que les dispositions qui y sont rattachées dans l'article L. 311-3 du code forestier.

Ce dernier article prévoit par ailleurs, dans son 10° actuel, que la protection contre l'incendie des massifs forestiers peut motiver un refus de défrichement. Cette disposition a pour objet de limiter l'habitat dispersé en forêt, qui présente un fort risque de départ de feu (du fait de la circulation automobile, ou des installations électriques provoquant des étincelles, par exemple). Or, ce motif de refus s'est révélé d'application délicate ; il est en effet difficile de montrer le caractère risqué en termes d'incendie d'une urbanisation dispersée en forêt méditerranéenne par exemple, lorsque les habitations sont équipées de piscines. Du fait de ces difficultés d'application, les refus motivés sur le fond par les risques d'incendie se sont donc appuyés sur le motif d'équilibre biologique d'une région ou du bien-être de la population, ce qui ne constituait pas une solution satisfaisante.

C'est pourquoi le projet de loi modifie le 10° de l'article L. 311-3 en élargissant le motif de refus à la protection des personnes et des biens et du massif forestier dans lequel ils sont situés contre l'ensemble des risques naturels et notamment les incendies et les avalanches.

La commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que pour motiver un refus d'autorisation de défrichement, l'intérêt présenté par les territoires du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l'écosystème doit être remarquable et motivé (amendement n° 268). Sont alors devenus sans objet l'amendement n° 127 de M. François Vannson et un amendement identique de M. Jean Proriol. La commission a alors rejeté l'amendement n° 31 de M. François Vannson. Lors de l'examen de l'amendement n° 32 de M. Pierre Micaux, visant à préciser que les défrichements opérés en vue de la protection contre les risques naturels et dispensés d'autorisation peuvent être notamment réalisés contre les tempêtes d'une exceptionnelle ampleur, le rapporteur a émis un avis défavorable en soulignant le caractère imprévisible de ces phénomènes. Suivant son rapporteur, la commission a alors rejeté l'amendement n° 32.

4. Subordination de l'autorisation de défrichement à certaines conditions

L'actuel article L. 311-4 du code forestier permet de subordonner l'autorisation de défricher à certaines conditions : la conservation sur le terrain de réserves boisées suffisamment importantes pour remplir les rôles utilitaires des bois ou l'exécution de travaux de reboisement sur d'autres terrains.

La taxe sur les défrichements, qui constituait une dissuasion, est destinée à disparaître au 1er janvier 2001. Le projet de loi de finances initiale pour 2000 avait prévu cette abrogation pour le 1er janvier 2000 ; un amendement de votre rapporteur a reporté cette échéance d'un an. Le risque d'une multiplication des défrichements est donc à craindre à compter de 2001. C'est pourquoi le paragraphe IV de cet article du projet de loi modifie l'article L. 311-4 pour contrebalancer ce risque en créant des conditions supplémentaires auxquelles l'autorisation de défricher peut être subordonnée ; la condition de conservation sur le terrain de réserves boisées suffisamment importantes pour remplir les rôles utilitaires définis à l'article L. 311-3 est maintenue en l'état.

La condition d'exécution de travaux de reboisement est, quant à elle, complétée. L'autorisation peut désormais être subordonnée, non seulement au reboisement d'autres terrains, mais également à leur boisement ainsi qu'au reboisement des terrains en cause. Surtout, il est précisé que la surface des terrains à boiser ou reboiser doit correspondre à la surface défrichée, assortie, le cas échéant, d'un coefficient multiplicateur compris entre 2 et 5. Ce coefficient, fixé discrétionnairement par le préfet, est destiné à prendre en compte « le rôle écologique ou social des bois visés par le défrichement » ; le préfet dispose donc d'une grande latitude d'appréciation, cette notion étant particulièrement vague. Par ailleurs, il est précisé qu'il pourra imposer la réalisation d'un boisement compensateur dans la même région forestière, cette notion étant clairement définie dans l'inventaire forestier national qui dresse une liste des différentes régions forestières. Le préfet pourra également imposer un boisement compensateur dans un « secteur écologiquement ou socialement comparable ».

Il s'agit là d'un nouveau concept, aucune définition de tels secteurs n'existant pour l'instant. Sur ce point, le pouvoir d'appréciation du préfet sera donc important. Selon les informations fournies à votre rapporteur, les « secteurs écologiquement ou socialement comparables » devraient recouvrir de larges catégories, telles que les zones périurbaines, les zones dunaires ou les zones humides. L'ensemble de ce dispositif permettra au préfet d'imposer le boisement d'autres terrains choisis de manière quasi-discrétionnaire, y compris dans un autre département que celui du terrain à défricher. Cette disposition permet de donner un fondement législatif aux pratiques actuelles des directions départementales de l'agriculture et de la forêt.

Pour autant, on peut s'interroger sur l'efficacité d'un tel dispositif. Rien n'interdit, en effet, à un propriétaire de défricher un terrain de feuillus et de réaliser un boisement compensateur en résineux. En outre, rien ne l'oblige à entretenir le terrain bénéficiant du boisement compensateur. S'il y a obligation de moyens, il n'y a donc pas obligation de résultat.

Le projet de loi précise, en outre, que le demandeur peut proposer de s'acquitter de ses obligations, soit en versant une indemnité équivalente à l'Etat pour que ce dernier achète des terrains boisés ou à boiser, soit en cédant à l'Etat ou à une collectivité territoriale des terrains boisés ou à boiser susceptibles de jouer le même rôle écologique et social. Plusieurs remarques s'imposent : la notion de rôle écologique et social est reprise, là encore sans être définie et en laissant une grande marge d'appréciation au préfet. Le versement d'une indemnité ou la cession de terrain ne constituent qu'une faculté du propriétaire ; il revient à l'Etat seul d'accepter la mise en _uvre de ce mécanisme. En outre, comme il a été souligné plus haut, n'est ici visée que l'opération de boisement, le propriétaire étant déchargé de toute obligation d'entretien des terrains boisés ou reboisés. Enfin, ce dispositif peut conduire à des pertes nettes de surface forestière puisque le propriétaire peut se contenter de céder des terrains déjà boisés à l'Etat.

De nouvelles conditions, introduites par le projet de loi, peuvent également subordonner l'autorisation de défricher à :

- la remise en état boisé du terrain lorsque le défrichement a pour objet l'exploitation du sous-sol à ciel ouvert. Cela vise tout particulièrement les carrières, pour lesquelles la terre arable provenant de la tranche d'exploitation qui vient d'être ouverte peut être utilisée pour « retapisser » la tranche venant d'être fermée ;

- l'exécution de travaux de génie civil ou biologique visant la protection contre l'érosion des sols des parcelles défrichées. Il s'agit, par exemple, d'aménagements en terrasses, destinés à pallier les difficultés rencontrées notamment en zone AOC (appellation d'origine contrôlée), comme en Champagne et en Alsace, où des défrichements successifs de superficies limitées peuvent compromettre la stabilité des pentes ;

- l'exécution de travaux ou mesures visant à réduire les risques naturels, notamment les incendies et les avalanches. Il s'agit, par exemple, pour lutter contre les risques d'incendies, de réaliser des voies de défense des forêts contre l'incendie, ou des zones de pare-feu.

La commission a examiné un amendement du rapporteur visant à supprimer le IV de cet article du projet de loi. Le rapporteur a signalé que ce dernier, prenant acte de la disparition imminente de la taxe sur les défrichements, durcissait le dispositif relatif aux mesures compensatoires. Compte tenu du maintien de la taxe adopté précédemment par la commission, il a estimé souhaitable d'alléger ces dernières dispositions en s'en tenant à l'actuel article L. 311-4 du code forestier qui prévoit que le préfet peut subordonner une autorisation de défrichement à la conservation de réserves boisées ou à l'exécution de travaux de reboisement. La commission a adopté cet amendement (amendement n° 269). Sont alors devenus sans objet les amendements nos 33, 30 et 1 de M. François Vannson et les amendements nos 29 et 36 de M. Pierre Micaux.

5. Nécessité d'obtention d'une autorisation de défrichement préalablement aux autorisations d'occupation ou d'utilisation du sol

L'actuel article L. 311-5 dispose que préalablement à toute demande d'autorisation de lotissement dans un terrain boisé n'entrant pas dans la catégorie des terrains dispensés d'une autorisation de défricher, le demandeur est tenu d'obtenir une autorisation de défrichement.

Le paragraphe V de cet article du projet de loi élargit le champ d'application de cette disposition de deux manières. D'une part, au-delà des opérations de lotissement, est visé l'ensemble des opérations ou travaux soumis à une autorisation administrative. Sont ainsi concernés, par exemple, outre les autorisations de lotir, les permis de construire ou les autorisations d'installations ou travaux divers. Sont néanmoins exclues de ce dispositif les autorisations relatives aux installations classées prévues par la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement. D'autre part, le dispositif est assoupli puisque l'obtention de l'autorisation de défrichement ne doit plus être préalable à la demande d'autorisation administrative d'occupation ou d'utilisation du sol, mais à la délivrance de cette autorisation. Cette disposition est destinée à permettre le dépôt conjoint des deux demandes (défrichement et occupation ou utilisation du sol).

L'actuel article L. 312-1, relatif aux opérations de défrichement opérées par les collectivités locales, les établissements publics, les établissements d'utilité publique, les sociétés mutualistes et les caisses d'épargne, applique à l'ensemble de ces personnes la définition du défrichement.

Le paragraphe VI de cet article du projet de loi coordonne la rédaction de l'article L. 312-1 du code forestier pour appliquer à ces personnes la nouvelle définition du défrichement donnée au premier alinéa de l'article L. 311-1 du même code.

6. Application aux défrichements sollicités par les collectivités et certaines personnes morales des dispositions relatives aux défrichements des forêts des particuliers

Les dispositions législatives du code forestier relatives au défrichement des bois des collectivités et des personnes morales citées plus haut se limitent à l'article L. 321-1 qui dispose que ces dernières ne peuvent défricher leurs bois sans autorisation spéciale et expresse de l'autorité supérieure. En pratique, les décisions d'autorisation ou de refus sont prises par le préfet du département si la surface à défricher est inférieure à un hectare ; sinon, elles sont prises par le ministre de l'agriculture.

Le paragraphe VII de cet article du projet de loi complète ce dispositif en précisant que les dispositions des articles L. 311-3 à L. 311-5 du code forestier sont applicables à ces décisions. Les demandes de défrichement des collectivités et des personnes morales peuvent donc faire l'objet d'un refus en raison du rôle utilitaire des bois (article L. 311-3) ; les autorisations de défrichement peuvent être subordonnées à certaines conditions (article L. 311-4) ; enfin, l'obtention d'une autorisation de défrichement doit être préalable à la délivrance d'une autorisation d'occupation ou d'utilisation des sols (article L. 311-5).

7. Mode de calcul de l'amende en cas d'infraction

Le paragraphe VIII de cet article du projet de loi modifie le mode de calcul de l'amende due par le propriétaire commettant une infraction aux dispositions de l'article L. 311-1, c'est-à-dire commettant un défrichement irrégulier. Notons que cette amende ne frappe pas seulement le propriétaire du terrain, mais également les auteurs directs ou bénéficiaires de l'infraction, qu'il s'agisse du locataire, d'un propriétaire voisin, ou d'un maître d'_uvre ayant pris l'initiative de l'opération de défrichement illicite.

Aux termes de l'actuel article L. 313-1, le montant de l'amende est calculé à raison de 10 millions de francs par hectare de bois défriché.

Le projet de loi substitue à ce mode de calcul une amende calculée à raison de 1 000 francs par mètre carré. Ainsi, si l'amende reste bien de 10 millions de francs par hectare, il est possible de moduler son montant en fonction des fractions inférieures à un hectare qui auraient été défrichées.

8. Peines complémentaires

Le paragraphe IX de cet article du projet de loi durcit le dispositif des sanctions infligées en cas de délit de défrichement irrégulier, en créant l'article L. 313-1-1 qui institue des peines complémentaires.

Ces dispositions sont destinées à éviter que ne soient amnistiées les infractions commises en cas de défrichement irrégulier ; en effet, ne sont généralement amnistiées que les infractions non assorties de peines complémentaires. En conformité avec le nouveau code pénal, et notamment son article 131-10, des dispositions particulières aux personnes physiques et morales ont été prévues.

Concernant les personnes physiques, les peines complémentaires encourues sont les suivantes :

- l'interdiction de poursuivre les opérations ou l'activité au cours de laquelle le défrichement a été réalisé. Il s'agit de sanctionner le défrichement direct, qui consiste en une coupe ou un arrachage, mais également le défrichement indirect. Ce dernier est visé par le terme « activité au cours de laquelle le défrichement a été réalisé ». Il s'agit, par exemple, du passage incessant de bestiaux ou de vélos tout terrain en forêt, qui ont pour conséquence une destruction indirecte du boisement ;

- la remise en l'état des lieux par reboisement (plantation ou semis et autres travaux) pour maintenir les fonctions qu'assurait le bois défriché, qu'elles aient été économiques, sociales ou sociologiques ;

- l'affichage de la décision prononcée, à la charge du condamné ;

- la fermeture pour une durée de trois ans au plus des établissements ayant servi à commettre l'infraction ;

- l'exclusion des marchés publics pour une durée de trois ans au plus.

Ces deux dernières dispositions sont plus souples que celles prévues par le nouveau code pénal, puisqu'au vu de ses articles 131-6, 131-33 ainsi que 131-34, la fermeture des établissements et l'exclusion des marchés publics peuvent être définitives.

En outre, le projet de loi n'institue pas, en tant que peine complémentaire, l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, pour une durée de cinq ans au plus et prévue à l'article 131-27 du nouveau code pénal. La mise en conformité avec les dispositions de ce code n'est donc que partielle pour ce qui concerne les peines prononcées à l'encontre des personnes physiques.

Par ailleurs, le paragraphe II du nouvel article L. 313-1-1 du code forestier introduit la responsabilité pénale des personnes morales qui commettent un défrichement irrégulier. Rappelons qu'aux termes de l'article 121-2 du nouveau code pénal, les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, dans les cas prévus par la loi et le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. Les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public.

Dans ce cadre, les personnes morales déclarées responsables pénalement d'un défrichement irrégulier encourent la peine d'amende de 1 000 francs par mètre carré prévue à l'article L. 313-1 du code forestier, suivant les modalités prévues par l'article 131-38 du nouveau code pénal, (un taux maximum d'amende égal au quintuple de celui prévu par les personnes physiques), soit une peine d'amende de 5 000 francs par mètre carré défriché.

Le même paragraphe dispose en outre que les personnes morales encourent des peines complémentaires dont la liste est dressée. Or, en matière criminelle et correctionnelle, la loi ne prévoit qu'une seule catégorie de peines applicables aux personnes morales et n'opère aucune distinction entre peines principales, complémentaires ou alternatives. L'opportunité de la création d'une catégorie de peines complémentaires pour le secteur spécifique de la forêt est douteuse car elle contribuerait à complexifier le régime de la responsabilité pénale des personnes morales. Votre rapporteur a donc présenté un amendement visant à supprimer le qualificatif « complémentaires ».

Les peines encourues par les personnes morales, outre l'amende citée plus haut, sont énumérées dans les troisième et quatrième alinéas de ce paragraphe. Il s'agit :

- pour une durée de trois ans au plus, d'une fermeture des établissements ayant servi à commettre l'infraction ;

- pour la même durée, de l'exclusion des marchés publics ;

- de la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit (8° de l'article 131-39 du nouveau code pénal) ;

- de l'affichage de la décision prononcée ou de la diffusion de celle-ci soit par la presse écrite, soit par tout moyen de communication audiovisuelle (9° de l'article 131-39 du nouveau code pénal).

Là encore, les dispositions prévues sont moins sévères que celles contenues dans le nouveau code pénal. Concernant la fermeture des établissements et l'exclusion des marchés publics, ce dernier dispose en effet que ces peines peuvent être prononcées à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus ; le projet de loi ramène la durée de ces peines à trois ans au plus.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 270) et a rejeté l'amendement n° 3 de M. François Vannson ; puis elle a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 271 et 272) et a rejeté l'amendement n° 95 de M. Pierre Micaux.

L'actuel article L. 313-2 du code forestier dispose qu'en cas de non-exécution, dans un délai maximum de trois ans, des travaux de reboisement sur d'autres terrains imposés en application de l'article L. 311-4 du même code, les lieux défrichés doivent être rétablis en nature de bois dans un délai fixé par l'autorité administrative.

Il est nécessaire de modifier cette rédaction pour prendre en compte les modifications apportées à l'article L. 311-4 par le projet de loi. Outre des travaux de reboisement, peuvent désormais être prescrits des travaux de génie civil ou biologique, ou des travaux visant à réduire les risques naturels. La référence aux seuls travaux de reboisement dans l'article L. 313-2 est trop restrictive. Sa rédaction est donc modifiée en conséquence par le paragraphe X de cet article du projet de loi.

Le paragraphe XI de cet article du projet de loi corrige une erreur de référence d'alinéa.

9. Montant de l'amende en cas de continuation de travaux irréguliers

Le montant de l'amende due en cas de continuation des travaux irréguliers est actuellement fixé à 500 000 francs. Le paragraphe XII de cet article du projet de loi le porte au double du montant de l'amende initiale, ce qui est conforme aux dispositions du code pénal en cas de récidive.

10. Défrichement des bois des collectivités, de certaines personnes morales et des particuliers dispensés d'autorisation préalable

Le chapitre IV du titre Ier du livre III du code forestier est relatif à la taxe sur les défrichements, qui doit être abrogée à compter du 1er janvier 2001. Le chapitre IV est donc destiné à disparaître à cette date. Or, il contient l'actuel article L. 314-5 qui dispense de la taxe certains défrichements. La taxe étant due à l'occasion de toute décision, expresse ou tacite, autorisant un défrichement (qu'il s'agisse des bois de personnes privées ou de collectivités), les défrichements exemptés de cette taxe ne sont donc pas soumis à autorisation préalable.

Afin que ces défrichements restent dispensés d'autorisation préalable, le paragraphe XIII de cet article du projet de loi crée un chapitre V, intitulé « Dispositions particulières », au titre Ier du livre III du code forestier. L'actuel article L. 314-5 y est transféré, afin de maintenir les cas où certains défrichements ne nécessitent aucune autorisation et est numéroté L. 315-1 en conséquence par le A du paragraphe XIII de cet article du projet de loi. L'article L. 315-1 nouveau ainsi créé regroupe donc les cas où les bois des particuliers ainsi que ceux des collectivités et de certaines personnes morales peuvent être librement défrichés.

La rédaction de l'article L. 314-5, devenu L. 315-1 du code forestier, est modifiée. En premier lieu, son champ d'application exclut les forêts domaniales, qui ne sont pas soumises au titre Ier du livre III.

En second lieu, les cas de dispense d'autorisation déjà existants sont modifiés et de nouveaux cas sont introduits.

Les opérations ayant pour but de remettre en valeur d'anciens terrains de culture ou de pacage envahis par « une végétation ou un boisement spontanés » sont actuellement dispensées d'autorisation (1° de l'article L. 314-5). Cette rédaction est modifiée pour que ne soient visés que les anciens terrains de culture ou de pacages envahis par « une végétation spontanée ». La condition de boisement spontané n'a pas réellement disparu pour autant, puisque ce cas est traité ultérieurement par l'insertion d'un 5°  au même article qui vise les opérations portant sur les jeunes bois de moins de vingt ans. Or, ces jeunes bois couvrent à la fois les arbres plantés et les boisements spontanés. La nouvelle rédaction permet ainsi d'unifier le régime des boisements spontanés ou plantés : si les bois ont moins de vingt ans, leur défrichement est libre, sauf s'ils ont été conservés à titre de réserves boisées non plantées à titre de compensation du défrichement d'un autre terrain, en application de l'article L. 311-4 (cf. supra).

La dispense d'autorisation de défricher les noyeraies, oliveraies, plantations de chênes truffiers et vergers à châtaignes est maintenue (2° de l'article L. 315-1). Il en est de même pour les opérations ayant pour but de créer à l'intérieur de la forêt les équipements indispensables à sa mise en valeur et à sa protection, sous réserve qu'ils ne modifient pas fondamentalement la destination forestière du terrain et n'en constituent que les annexes indispensables (3° de l'actuel article L. 314-5 et 6° de l'article L. 315-1 nouveau).

Ainsi, la construction d'un pavillon de chasse peut être dispensée d'autorisation de défricher si cette opération ne modifie pas la destination forestière du terrain, c'est-à-dire s'il ne s'agit pas d'une résidence secondaire nécessitant des installations électriques ou sanitaires. De même, la réalisation d'un dépôt pour le bois est libre car cette installation constitue une annexe indispensable. Il peut en être de même pour une réserve d'eau destinée à la lutte contre l'incendie. Dans le cadre de ces opérations de défrichement, déjà libres de toute autorisation, le projet de loi précise que figurent les opérations portant sur les terrains situés dans les zones définies comme devant être défrichées pour la réalisation d'aménagements, par un plan de prévention des risques naturels. Cela concerne par exemple les tours de guet ou les bandes pare-feu. Cette précision permet de mettre un terme à des problèmes d'interprétation concernant les coupures agricoles, notamment en forêt méditerranéenne, imposées pour protéger la forêt contre les incendies. Un doute subsistait quant à la soumission des défrichements qu'elles nécessitaient à une autorisation préalable. La nouvelle rédaction proposée par cet article du projet de loi lève le doute : ces opérations ne sont pas soumises à l'autorisation de défrichement.

Un nouveau cas de défrichement libre est par ailleurs introduit au 3° de l'article L. 315-1. Il s'agit des opérations portant sur les taillis à courte rotation normalement entretenus et exploités, implantés sur d'anciens sols agricoles depuis moins de trente ans. Cette disposition vise les coupes régulières (tous les cinq à sept ans) de rejets sur souches d'essences forestières à croissance rapide, comme les peupliers et qui sont utilisés comme bois de chauffage. La fréquence élevée de ces coupes s'apparente, dans les faits, à une culture agricole. Cette activité, relativement récente, n'avait pour l'instant donné lieu à aucune disposition législative. Cet article du projet de loi prévoit que, désormais, de telles activités sont dispensées d'autorisation préalable de défricher.

Les défrichements ayant pour but une mise en valeur agricole et pastorale de bois situés dans une zone agricole délimitée à l'issue d'une opération d'aménagement foncier, agricole et forestier, sont également dispensés d'autorisation (4° de l'article L. 315-1). Cela est déjà le cas pour les bois des particuliers (4° de l'actuel article L. 311-2 du code forestier). En plaçant cette disposition à l'article L. 315-1 nouveau, le projet de loi l'étend aux bois des collectivités.

Ce dispositif est par ailleurs complété et concerne également, aux termes de la nouvelle rédaction, les défrichements effectués dans une des zones définies en application du 1° de l'article L. 126-1 du code rural, à savoir celles dans lesquelles des plantations et des semis d'essences forestières peuvent être interdits ou réglementés ou dans lesquelles la reconstitution des boisements après coupe rase ou chablis importants peut être interdite. Cela concerne, par exemple, les vallées de montagne qui connaissent une forte progression de la forêt et qu'il leur est difficile de contrôler, à moins de procéder à des défrichements. C'est pourquoi cette nouvelle disposition est introduite : dans les zones faisant l'objet d'une réglementation ou d'une interdiction de boisement, le défrichement n'est soumis à aucune autorisation.

Le B du paragraphe XIII de cet article du projet de loi crée un article L. 315-2 dans le code forestier, aux termes duquel les conditions d'application de l'ensemble de ces dispositions sont fixées par un décret en Conseil d'Etat.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 273 et 274)

Puis, elle a examiné l'amendement n° 68 de M. Pierre Micaux et un amendement identique de M. Jean Proriol, visant à supprimer, parmi les cas de défrichements dispensés d'autorisation préalable, les opérations exécutées dans les zones où la reconstitution des boisements après coupe rase ou chablis importants peut être interdite ou celles qui ont pour but une mise en valeur agricole et pastorale. Le rapporteur a déclaré partager la préoccupation des auteurs de ces deux amendements et a reconnu que les chablis étant vécus comme des traumatismes par les propriétaires forestiers, il était provocateur de la part des rédacteurs du projet de loi d'interdire le reboisement après chablis. Après qu'il eut indiqué qu'il présentait un amendement supprimant la référence aux seuls chablis, la commission a rejeté les deux amendements identiques et a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 275) Puis, elle a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 276 et 277) et a rejeté l'amendement n° 96 de M. François Vannson.

La commission a adopté l'article 12 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 12

Lutte contre l'enfrichement et la déprise agricole

La commission a examiné un amendement de M. Claude Jacquot portant article additionnel après l'article 12 et visant à créer un chapitre IX intitulé « Lutte contre la friche et le boisement spontané des terres agricoles » au titre II du livre I du code rural. Ce chapitre, contenant les articles L. 129-1 à L. 129-5 nouveaux, permet à l'autorité administrative d'édicter des mesures pour lutter contre l'enfrichement et le boisement spontané d'anciennes terres agricoles. Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent prescrire ou exécuter des travaux afin de gérer les espaces en déshérence ; en outre, les propriétaires de fonds non exploités peuvent conclure une convention de gestion avec une collectivité territoriale, pour une durée minimale de neuf ans et bénéficier, dans ce cas, d'une exonération de la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Lorsque le propriétaire du fonds s'oppose à la gestion d'un espace en friche par la collectivité, le débroussaillement et le maintien en état débroussaillé peuvent être rendus obligatoires par l'autorité administrative dans des zones limitativement énumérées. Enfin, il est prévu que la non-réalisation du débroussaillement dans les délais fixés par le préfet est punie d'une amende de cinquième classe et que les personnes morales sont alors pénalement responsables. Le rapporteur a estimé ce dispositif très intéressant et s'y est déclaré favorable, sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement visant à supprimer la référence à une amende de cinquième classe en cas d'infraction, cette précision étant d'ordre réglementaire, ainsi qu'à introduire un gage. La commission a adopté le sous-amendement du rapporteur ; puis elle a adopté l'amendement portant article additionnel après l'article 12, ainsi modifié (amendement n° 278)

Article additionnel après l'article 12

Modification de conséquence du code général des impôts

La commission a examiné un amendement de conséquence de M. Claude Jacquot portant article additionnel après l'article 12 et rétablissant un 2° à l'article 1395 du code général des impôts. Le rapporteur a présenté un sous-amendement proposant un gage. La commission a adopté le sous-amendement ; puis, elle a adopté l'amendement portant article additionnel après l'article 12, ainsi modifié (amendement n° 279)

Article additionnel après l'article 12

Coordination de l'article L. 121-1 du code rural

La commission a adopté un amendement de M. Claude Jacquot portant article additionnel après l'article 12 et visant à intégrer le nouveau dispositif de lutte contre l'enfrichement dans la rédaction de l'article L. 121-1 du code rural (amendement n° 280)

Article 13

Coordination et adaptation du code de l'urbanisme et du code rural

Le paragraphe I de cet article du projet de loi coordonne, dans son 1° et son 2° , la rédaction de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme qui permet au préfet de rejeter une demande de défrichement au motif d'assurer la protection, la conservation ou la création d'espaces boisés. Cette coordination a pour effet d'appliquer ces dispositions à la fois aux bois des particuliers et à ceux des collectivités et de certaines personnes morales.

Ainsi, si ceux-ci souhaitent défricher un espace boisé classé par le plan d'occupation des sols (POS), une révision préalable de ce dernier est nécessaire.

Le 3° du paragraphe I de cet article du projet de loi introduit en outre une procédure conservatoire qui existait déjà pour les bois, forêts et parcs ainsi que les espaces boisés classés situés sur le territoire de communes où l'établissement d'un POS a été prescrit mais où ce plan n'a pas été rendu public. L'actuel article L. 130-1 du code de l'urbanisme dispose que dans ces espaces, les coupes et abattages d'arbres sont soumis à autorisation préalable, sauf exceptions limitativement énumérées.

Le projet de loi complète ce dispositif en l'appliquant également aux coupes ou abattages d'arbres isolés, de haies ou réseaux de haies et de plantations d'alignement, qui sont donc soumis à autorisation préalable si le POS a été prescrit.

Le paragraphe II de cet article du projet de loi aligne la procédure prévue par l'article L. 315-6 du code de l'urbanisme avec celle énoncée par l'article L. 311-5 du code forestier.

L'actuel article L. 315-6 du code de l'urbanisme dispose que préalablement à toute demande d'autorisation de lotissement, l'obtention d'une autorisation de défrichement est nécessaire.

Ce dispositif est modifié pour tenir compte de la nouvelle rédaction de l'article L. 311-5 du code forestier (voir supra). Il s'applique désormais à l'ensemble des opérations ou travaux nécessitant une autorisation administrative et non aux seuls lotissements. L'obtention de l'autorisation de défricher doit en outre être préalable à la délivrance de l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol, et non plus préalable au dépôt de la demande, ce qui permet le dépôt conjoint des deux demandes.

Ce dispositif a pour objet de coordonner la législation de l'urbanisme et la législation forestière. Il est donc curieux qu'il ne s'applique qu'à la période d'élaboration du POS, ce qui limite dans le temps la mise en cohérence des deux législations. Votre rapporteur estime que cette contrainte temporelle doit être supprimée et il a déposé un amendement en ce sens.

Le paragraphe III de cet article du projet de loi procède dans son 1° à une renumérotation d'article du code rural, afin d'y introduire, dans son 2° , le nouvel article L. 126-7.

L'article L. 126-6 du code rural prévoit que le préfet peut prononcer la protection de boisements linéaires, haies et plantations d'alignement, existants ou à créer. Dans ce cas, ledit article prévoit que la destruction de ces boisements, haies et plantations est soumise à l'autorisation préalable du préfet.

Ce dispositif a été considéré comme insuffisant, car aucune sanction n'a été prévue en cas d'infraction. Le projet de loi prévoit donc que les infractions à ces dispositions sont constatées et sanctionnées dans les conditions prévues aux articles L. 121-22 et L. 121-23 du code rural. Le constat de l'infraction est donc dressé par des agents assermentés appartenant aux services de l'Etat chargés de l'agriculture, de la forêt ou de l'environnement. La sanction consiste en une amende de 25 000 francs.

La commission a adopté deux amendements du rapporteur corrigeant une erreur de décompte d'alinéas (amendements nos 281 et 282). Puis, elle a rejeté l'amendement n° 97 de M. François Vannson. Elle a examiné un amendement du rapporteur prévoyant que l'obligation d'obtenir une autorisation de défrichement avant une autorisation d'occupation ou d'utilisation des sols n'est pas limitée à la seule période d'élaboration du plan d'occupation du sol. Après que le rapporteur eut indiqué qu'il s'agissait de supprimer toute contrainte temporelle à la mise en cohérence de la législation sur l'urbanisme et de la législation forestière, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 283).

Puis, elle a adopté l'article 13 ainsi modifié.

Chapitre II

Dispositions relatives à l'aménagement agricole et forestier

Article 14

Réglementation des boisements

L'article L. 126-1 du code rural prévoit une procédure d'aménagement agricole et forestier, destinée à favoriser une meilleure répartition des terres entre les productions agricoles, la forêt, les espaces de nature ou de loisirs et les espaces habités en milieu rural, et à assurer la préservation de milieux naturels ou de paysages remarquables. A ce titre, le préfet peut, après avis des chambres d'agriculture, des conseils régionaux de la propriété forestière et des conseils généraux, définir les zones dans lesquelles des plantations et des semis d'essences forestières peuvent être interdits ou réglementés.

Cette procédure est instituée à la demande des communes qui souhaitent mieux contrôler leur environnement, par exemple en cas de progression importante de la forêt vers l'habitat rural.

L'utilisation de ce dispositif s'est révélée, en pratique, aléatoire, car la procédure n'est mise en _uvre que sur demande des collectivités et si le conseil général a voté les crédits. Les difficultés rencontrées dans cette mise en _uvre ont conduit à douter de l'efficacité du dispositif, jugé trop lourd et complexe.

En outre, la réglementation des boisements ainsi prévue ne s'applique pas aux boisements déjà constitués, mais uniquement aux boisements nouveaux. Si l'on peut donc interdire de planter ou de semer de nouveaux arbres, on ne peut obliger à défricher un boisement existant.

Cet article du projet de loi modifie donc l'article L. 126-1 du code rural afin d'en améliorer l'efficacité.

Dans son paragraphe I, il prévoit que le préfet peut désormais définir des zones dans lesquelles la reconstitution de boisements après coupe rase ou chablis importants peut être interdite. L'objectif est de définir des périmètres de reconquête, où existent déjà des boisements. Cette procédure est avant tout conservatoire. Elle doit permettre, lors de négociations engagées avec le propriétaire d'un terrain boisé en vue de l'échange ou du rachat de ce dernier, de prévenir toute progression de la forêt en interdisant la reconstitution des boisements.

Ce dispositif est cependant lacunaire, car il n'envisage pas la simple réglementation de la reconstitution des boisements. C'est pourquoi votre rapporteur a déposé un amendement visant à réparer cet oubli.

Le paragraphe II du même article complète les dispositions actuelles relatives aux violations de la réglementation des boisements. L'actuel troisième alinéa de l'article L. 126-1 du code rural prévoit qu'en cas de plantations ou semis exécutés en violation de cette réglementation, diverses sanctions peuvent être infligées aux propriétaires :

- la suppression des exonérations et avantages fiscaux de toute nature prévus en faveur des propriétés boisées ou des reboisements ;

- la destruction du boisement irrégulier par les propriétaires ;

- la non prise en compte de la nature boisée du terrain lors des opérations de remembrement, ce qui en réduit évidemment le prix ;

- la destruction d'office des boisements irréguliers.

Il est introduit, dans cette liste, l'interdiction de reconstituer les boisements après coupe rase ou chablis importants. Cette disposition doit permettre au préfet d'intervenir au-delà du délai de quatre ans qui le lie pour imposer la destruction d'un boisement irrégulier (article R. 126-10). En effet, dès lors qu'il y a coupe rase ou chablis important, il pourra désormais intervenir pour interdire toute reconstitution.

Le même paragraphe modifie en outre les dispositions relatives à la non prise en compte de la nature boisée du terrain : elles s'appliquent désormais à l'ensemble des opérations d'aménagement foncier qui, outre le remembrement, couvrent par exemple la réorganisation foncière, les échanges d'immeubles ruraux ou la mise en valeur des terres incultes.

La commission a examiné l'amendement n° 126 de M. Pierre Micaux visant à supprimer cet article. Le rapporteur a signalé qu'il présentait un amendement visant à supprimer la seule référence aux chablis, ceux-ci ne devant pas donner lieu à une réglementation ou à une interdiction des reboisements. M. Pierre Micaux a alors déclaré qu'il retirerait son amendement. Puis, la commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 284) et M. Claude Jacquot a retiré un amendement. La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 285) corrigeant une erreur de décompte d'alinéas et un amendement de conséquence du même auteur (amendement n° 286).

La commission a ensuite examiné un amendement du rapporteur visant à compléter le livre IV du code forestier par un titre V intitulé « Protection des berges » et comprenant un article L. 450-1 nouveau, aux termes duquel la plantation de certaines essences forestières à proximité des cours d'eau peut être interdite, la liste de ces essences étant fixée par décret en Conseil d'Etat et l'application de cette disposition pouvant faire l'objet de modulations locales. Après que M. Claude Jacquot eut déclaré qu'il se ralliait pleinement à ce dispositif, la commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 287).

Puis, elle a adopté l'article 14 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 14

Possibilité de créer une association syndicale pour créer
ou entretenir des chemins forestiers

La commission a examiné un amendement du rapporteur portant article additionnel après l'article 14 et précisant que la possibilité de créer une association syndicale pour exécuter ou entretenir des chemins d'exploitation concerne notamment les chemins forestiers. Le rapporteur a indiqué que cette disposition permettrait de faciliter la réalisation de tels chemins, grâce à la règle de la majorité qualifiée qui s'impose aux décisions des associations syndicales. La commission a alors adopté cet amendement portant article additionnel après l'article 14 (amendement n° 288).

Article additionnel après l'article 14

Associations foncières forestières

La commission a examiné un amendement portant article additionnel après l'article 14 de M. Jean Proriol et visant à permettre la création d'associations foncières forestières en zones de montagne pour faciliter le regroupement et l'exploitation de petits terrains boisés ; le régime proposé permet d'intégrer d'office dans le périmètre de l'association les petites parcelles dont les propriétaires n'ont pu être identifiés, en fixant le principe de déchéance de leur droit de propriété, un an après la constitution de l'association. Le rapporteur s'est déclaré très favorable à cet amendement et a proposé un sous-amendement rédactionnel que la commission a adopté. Puis, elle a adopté l'amendement portant article additionnel après l'article 14, ainsi modifié (amendement n° 289).

Après l'article 14 

M. Claude Jacquot a présenté un amendement visant à faire bénéficier les opérations de restructuration foncière de la propriété forestière autres que celles prévues au titre de l'aménagement foncier, d'une aide de l'Etat. Après que le rapporteur eut indiqué qu'un amendement précédemment adopté avant l'article 5, et visant à créer un plan d'épargne-forêt, répondait à la préoccupation exprimée, M. Claude Jacquot a retiré son amendement. Puis, il a retiré un amendement relatif à la réglementation des boisements en bordure de cours d'eau, celui-ci étant satisfait par l'adoption, à l'article 14, d'un amendement du rapporteur.

Chapitre III

Dispositions relatives à la prévention des incendies de forêt

La prévention des incendies constitue une des préoccupations les plus anciennes du droit forestier. L'interdiction d'allumer des feux en forêt ou à moins de deux cent mètres d'un terrain boisé était déjà incluse dans le code forestier de 1827. Par la suite, l'arsenal législatif de lutte contre les incendies s'est continûment enrichi : le classement des bois situés dans des régions particulièrement exposées au feu date de 1921 ; la loi n° 66-505 du 12 juillet 1966 a permis de déclarer d'utilité publique divers travaux d'aménagement, d'équipement et de reconstitution entrepris dans les forêts du pourtour méditerranéen ; la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt et celle n° 92-613 du 6 juillet 1992 modifiant le code forestier ont défini le débroussaillement et en ont précisé les conditions ; enfin la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement a créé les plans de prévention des risques naturels prévisibles et y a intégré le risque lié aux incendies de forêt.

Cet ensemble de dispositions se justifie car la forêt française est particulièrement exposée au risque d'incendie (7 millions d'hectares sont considérés comme « à risque », soit 13 % du territoire national et 45 % des surfaces couvertes par des forêts, chiffre sous-estimé pour l'année 2000 car l'importance des chablis provoqués par les tempêtes constitue un facteur d'aggravation du risque). Il ne constitue toutefois que la partie la plus visible d'une politique de prévention qui se traduit également par :

- un effort de sensibilisation du public plus que jamais nécessaire lorsque l'on sait que 90 % des feux ont pour origine des activités humaines et que 75 % d'entre eux sont directement dus à des comportements imprudents ; dans le même esprit, les collectivités publiques doivent s'efforcer également de résorber des causes de départ de feux relevant de leur responsabilité en éliminant par exemple certains dépôts d'ordures situés aux abords de forêts (rappelons qu'en 1997 un incendie parti d'une décharge au nord de Marseille a détruit près de 1500 hectares de pinèdes, 2000 hectares de garrigues et a mobilisé 1800 pompiers venus de 18 départements) ;

- la surveillance des massifs forestiers qui engage de nombreux services de l'État et établissements publics (direction départementale de l'agriculture et de la forêt, gendarmerie, police nationale, services départementaux de lutte contre l'incendie, services communaux, agents et gardes de l'ONF). Dans chaque département concerné, un plan de surveillance a été établi afin de coordonner l'observation sur poste fixe (à partir de tour de guet), celle effectuée par les patrouilles terrestres mobiles et l'observation aérienne. C'est grâce à ce dispositif que neuf feux de forêts sur dix sont éteints avant d'atteindre cinq hectares ;

- l'élaboration de schémas de prévention abordant tous les aspects de la prévention et la lutte contre l'incendie (équipement, desserte de la forêt, cloisonnement des massifs par le recours à l'agriculture ou à l'élevage, promotion de traitements sylvicoles adaptés, etc.) ;

- la poursuite de programmes de recherche portant par exemple sur l'état hydrique de la végétation, la modélisation des développements de feux, la reconstitution des zones incendiées, les produits retardant les incendies ou les éteignant, etc.).

Mais comme le souligne M. Jean-Louis Bianco dans son rapport précité, « le maintien d'une activité agricole, pastorale et forestière constitue la meilleure des préventions ». En zone méditerranéenne par exemple, « les quelques expériences menées montrent l'efficacité d'une « ligne Maginot agricole et pastorale » (...) constituées d'oliveraies, de vignes, d'amandiers, de figuiers ou de champs pâturés par des moutons ou des chèvres ».

Cette politique de prévention a porté ses fruits. Certes en 1998, près de 5600 feux ont encore détruit 19 100 hectares de forêt, mais par comparaison, pendant la période 1975-1987, la moyenne annuelle des surfaces brûlées s'élevait à 35 900 hectares.

LES FEUX DE FORÊT EN FRANCE DE 1991 A 1998

années

superficie brûlee
(en hectares)

nombre de feux

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

10 130

16 593

16 698

24 995

18 137

11 400

21 581

19 080

3 888

4 002

4 769

4 618

6 563

6 401

8 005

5 591

Source : Prométhée et enquête statistique feux de forêt

Cette quasi-division par deux ne doit toutefois pas nous conduire à « baisser la garde », car le nombre des départs de feux reste stable. C'est dans cet esprit que s'inscrivent les mesures renforçant les obligations de débroussaillement et légalisant les travaux de brûlage dirigé contenues dans l'article 15 du présent projet de loi.

Article 15

Prévention des incendies de forêt

Le paragraphe I vise à mettre l'article L. 321-3 du code forestier en conformité avec l'organisation de la lutte contre l'incendie issue de la loi n° 96-369 du 3 mai 1996. En effet, ce texte, repris dans les articles L. 1424-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, confie aux seuls services d'incendie et de secours la mission de lutte contre le feu. En conséquence, les associations syndicales créées par la loi du 21 juin 1865 ne peuvent plus, comme les y autorisait l'article premier de cette loi, se voir confier une mission générale de « défense contre les incendies dans les forêts, landes boisées et landes nues ». Leur mission se limite désormais à la prévention des feux. Dans la pratique, les associations syndicales - en Aquitaine en particulier - jouent déjà un rôle préventif essentiel en entretenant, par exemple, les pistes de desserte, les pare-feu ou en aménageant des points d'eau et des tours de guet. Il s'agit donc de rationaliser le dispositif anti-incendie en confiant aux seuls professionnels de la sécurité civile (et parfois de l'armée) le soin de combattre les incendies et en recentrant tous les autres intervenants et en particulier les associations syndicales, sur la mission fondamentale de prévention qui devra évidemment être exercée en coordination avec les services chargés de la lutte contre les feux.

Au paragraphe I, la commission a adopté un amendement du rapporteur proposant une nouvelle rédaction de l'article L. 321-3 du code forestier (amendement n° 290). L'adoption de cet amendement de forme a rendu sans objet l'amendement n° 98 de M. Pierre Micaux et l'amendement n° 99 de M. François Vannson.

Le paragraphe II élargit sensiblement le champ de la servitude de passage et d'aménagement instauré par l'article L. 321-5-1 du code forestier. Cette servitude s'applique d'une part, dans les bois classés par l'autorité administrative et situés dans des régions particulièrement exposées aux incendies (on trouve actuellement des bois classés dans une quinzaine de départements qui tous ne sont pas situés dans la moitié sud du pays ; il existe ainsi des bois classés dans l'Eure, les Yvelines, en Seine-et-Marne ou en Ille-et-Vilaine) et d'autre part, dans les massifs forestiers mentionnés à l'article L. 321-6 du code forestier (c'est-à-dire dans la rédaction proposée par le projet de loi, ceux situés dans les régions Aquitaine, Corse, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées, Poitou-Charentes, Provence- Alpes-Côte d'Azur ainsi que ceux situés dans les départements de l'Ardèche et de la Drôme à l'exception de ceux figurant sur une liste arrêtée par le préfet du département concerné en raison de la faiblesse du risque d'incendie).

Au-delà de son extension géographique liée à l'élargissement de l'aire d'application de l'article L. 321-6, la servitude de passage et d'aménagement est renforcée ou précisée sur plusieurs points :

- il est désormais expressément indiqué à qui profite cette servitude ; actuellement, c'était curieusement la partie réglementaire du code forestier qui, dans son article R. 321-14-1, apportait cette précision (« La servitude prévue par l'article L. 321-5-1 est créée par arrêté préfectoral au profit d'une collectivité publique, d'un groupement de collectivités locales ou d'une association syndicale ») ; le texte qui nous est soumis reprend cette liste de bénéficiaires et indique que l'État peut l'instituer à son profit ;

- l'objet de la servitude ne porte plus seulement sur la continuité des voies de défense contre l'incendie mais concerne également la pérennité des itinéraires ; cette notion est essentielle car de très nombreuses voies dites de DFCI (défense de la forêt contre les incendies) sont créées par accord contractuel ou tacite entre la commune et le propriétaire ; à titre d'exemple, en zone méditerranéenne, 90 % des 40 000 kilomètres de pistes DFCI sont d'origine contractuelle ; d'où la nécessité de pérenniser les itinéraires ;

- la servitude s'étend également désormais à l'établissement des équipements de protection et de surveillance (pare-feu, points d'eau, tours de guet) ;

- enfin son assiette est élargie afin de tenir compte de l'évolution des gabarits des engins de lutte contre l'incendie ; le code forestier, dans sa rédaction actuelle, limite l'assiette de la servitude à une largeur de six mètres ; le projet de loi la limite à une largeur « permettant l'établissement d'une bande de roulement de six mètres ». Signalons qu'avant la loi n° 92-613 du 6 juillet 1992 modifiant le code forestier, l'assiette de la servitude était limitée à quatre mètres.

Au paragraphe II, la commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol visant à créer une servitude de passage et d'aménagement au profit de tout propriétaire forestier souhaitant réaliser une piste nécessaire à l'enlèvement du bois, le rapporteur ayant indiqué que cet amendement était déjà satisfait.

Le paragraphe III vise à mettre en cohérence le zonage issu de l'article L. 321-6 du code forestier précité avec celui exigé par le règlement communautaire n° 2158/92 du Conseil du 23 juillet 1992 relatif à la protection des forêts dans la Communauté contre les incendies.

Aujourd'hui, en droit interne, outre les bois classés en vertu de l'article L. 321-1 du code forestier, seuls les massifs forestiers visés par l'article L. 321-6 peuvent bénéficier de dispositions spéciales renforçant la protection contre l'incendie. La principale mesure spécifique qu'autorise l'article L. 321-6 est de permettre de déclarer d'utilité publique les travaux de prévention entrepris sur ces massifs. Mais cette mesure pourtant intéressante, a été très peu utilisée, puisque seul le massif des Maures a fait l'objet de la création d'un périmètre de protection et de reconstitution forestière après déclaration d'utilité publique.

Dans sa rédaction actuelle, l'article L. 321-6 s'applique aux massifs forestiers des régions Corse, Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côte d'Azur ainsi que dans les départements limitrophes de ces régions.

Le règlement européen du 23 juillet 1992 impose aux États membres de l'Union européenne de classer leur territoire selon le degré de risque d'incendie de forêt (zones à haut risque, moyen risque, faible risque). S'agissant de la France, il précise que les régions Aquitaine, Midi-Pyrénées, Corse, Languedoc-Roussillon, Provence-Alpes-Côte d'Azur ainsi que les départements de l'Ardèche et de la Drôme sont obligatoirement classés en zone à haut risque. Enfin, il autorise, sur demande justifiée, la classification comme zones à haut risque d'autres parties du territoire.

Il convenait en conséquence d'étendre le champ d'application de l'article L. 321-6 aux régions Aquitaine et Midi-Pyrénées (comme l'y enjoint le règlement européen). Par ailleurs, en raison du risque encouru par la forêt charentaise, la France a obtenu le droit d'ajouter les départements de Charente et de Charente-Maritime dans les zones à haut risque et a choisi de placer l'ensemble de la région Poitou-Charentes dans le champ d'application de l'article L. 321-6.

La nouvelle rédaction de l'article L. 321-6 permet par ailleurs d'exclure du champ d'application de cet article les massifs forestiers qui, bien que situés dans les régions et départements visés, sont soumis à des risques faibles. C'est au préfet d'arrêter la liste de ces massifs après avis de la commission départementale de la sécurité et de l'accessibilité (commission consultative et d'arbitrage créée en application de l'article R. 321-6 du code forestier).

Enfin, il est ajouté que tout département entrant dans le champ d'application de l'article L. 321-6 doit être couvert par un plan de protection des forêts contre les incendies. L'élaboration de tels documents, qui s'effectuera sous l'autorité du préfet, est une exigence de l'article 3, paragraphe 1 du règlement européen pour les zones à haut ou moyen risque.

Dans la pratique, le règlement communautaire est déjà appliqué, les départements concernés ayant établi leur plan de protection en s'appuyant souvent sur des documents préexistants, tels les schémas départementaux d'aménagement des forêts contre l'incendie (SDAFI) ou les plans d'aménagement des forêts contre l'incendie (PAFI).

Contenu des plans de protection des forêts

contre l'incendie

(article 5 du Règlement [CEE] n° 2158/92 du Conseil du 23 juillet 1992)

graphique

·  Contenu des plans dans les zones classées à haut risque

a) un état indiquant la situation actuelle de la zone ou sous-zone en question en ce qui concerne le système de prévention et de surveillance existant, ainsi que les moyens de lutte disponibles, et comprenant également une description des méthodes et des techniques employées pour la protection des forêts contre les incendies ;

b) le bilan des incendies des cinq dernières années, y compris une description et une analyse des causes principales constatées ;

c) l'indication des objectifs à atteindre à la fin de la durée du plan en ce qui concerne :

- l'élimination ou la diminution des causes principales,

- l'amélioration des systèmes de prévention et de surveillance,

l'amélioration des systèmes de lutte ;

d) la description des mesures envisagées pour atteindre les objectifs ;

e) l'indication des partenaires associés à la protection des forêts contre les incendies, ainsi que des modalités de coordination entre ces partenaires.

·  Contenu des plans dans les zones classées à moyen risque

Il est le même que celui exigé pour les plans des zones à haut risque à l'exception des documents et mentions indiquées en italique.

carte 1

carte 2

carte 3

La lecture de ces cartes appelle deux commentaires :

- quatre départements limitrophes des régions Languedoc- Roussillon et Provence-Alpes-Côte d'Azur entrant à ce titre dans le champ d'application de l'article L. 321-6 dans sa rédaction actuelle vont en sortir dans la nouvelle rédaction : le Cantal, la Haute-Loire, l'Isère et la Savoie. Ils ne sont même pas considérés comme zones de moyen risque dans la classification issue du règlement communautaire et de ce fait ne seront pas couverts par un plan de protection des forêts contre l'incendie ; les statistiques départementales de feux de forêt justifient ce déclassement ;

- certains départements (comme le Tarn-et-Garonne par exemple) vont être soumis aux dispositions de l'article L. 321-6, simplement en raison de leur appartenance à l'une des régions visées par la directive européenne alors qu'ils ne sont pas véritablement exposés au risque des incendies de forêt ; dans leur cas, rien n'interdit au préfet d'inscrire l'ensemble des massifs du département sur la liste des forêts non soumises à l'article L. 321-6.

Lors de l'examen du paragraphe III, la Commission a, après que M. Pierre Micaux eut indiqué qu'il retirerait ultérieurement son amendement n° 100, rejeté deux amendements de M. Patrice Carvalho relatifs à la sous-commission départementale de la prévention des risques d'incendie de forêts, landes, garrigues et maquis et à ses attributions, le rapporteur ayant fait valoir que cette instance dépendait d'une commission d'origine réglementaire : la commission départementale de la sécurité et de l'accessibilité.

Le paragraphe IV s'inscrit dans une logique de soutien au développement du pastoralisme comme moyen de prévention des incendies de forêt.

Aujourd'hui dans les périmètres où les travaux de prévention ont été déclaré d'utilité publique (soit en application de l'article L. 321-6 du code forestier pour la Corse et certaines zones du pourtour méditerranéen, soit en application des articles L. 151-36 et suivants du code rural portant sur les travaux présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence), le préfet peut « mettre en demeure les propriétaires ou les titulaires du droit d'exploitation de fonds boisés ou couverts d'une végétation arbustive, d'y réaliser une mise en valeur agricole ou pastorale ».

Cette dernière peut être mise en _uvre par le biais de conventions pluriannuelles de pâturage conclues en zone de montagne entre propriétaires et éleveurs. Ces conventions autorisées par l'article 13 de la loi n° 72-12 du 3 janvier 1972 relative à la mise en valeur pastorale dans les régions d'économie montagnarde, constituent en montagne une des formules d'exploitation des terres à vocation pastorale ; elles peuvent prévoir des travaux d'aménagement, d'équipement ou d'entretien des fonds.

Lorsque les fonds concernés relèvent du régime forestier, le pâturage est concédé après publicité, soit à l'amiable, soit à défaut avec appel à la concurrence. La concession peut autoriser le pâturage d'espèces animales autres que les bovins, ovins, équidés et porcins. Le présent paragraphe complète l'article L. 321-11 du code forestier afin d'étendre cette dernière disposition à l'ensemble des massifs visés à l'article L. 321-6, c'est-à-dire aux forêts privées du tiers sud du pays. Pourquoi une telle disposition est-elle nécessaire ? Simplement parce qu'il est apparu à l'usage que le pâturage des caprins que le droit commun forestier prohibe en raison des dégâts qu'il peut occasionner est un moyen efficace de prévention des feux de forêt, les chèvres consommant des espèces végétales que les autres animaux d'élevage dédaignent.

Au paragraphe IV, la commission a adopté un amendement du rapporteur clarifiant la rédaction de l'article L. 321-11 du code forestier qui autorise désormais le pâturage des caprins dans l'ensemble des massifs forestiers mentionnés à l'article L. 321-6 du même code (amendement n° 291).

Le paragraphe V porte sur le brûlage dirigé. Le brûlage dirigé est une pratique très ancienne dans les pays du sud de l'Europe. Elle consiste à combattre le mal par le mal en utilisant le feu pour prévenir d'éventuels incendies. Elle est avec l'incinération des bois morts et tombés et avec les contre-feux l'une des techniques d'emploi du feu contre le feu.

Aujourd'hui, le code forestier autorise les brûlages dirigés dans deux cas :

- dans les périmètres où les travaux d'aménagement et d'équipement ont été déclarés d'utilité publique en application des articles L. 321-6 et suivants du code forestier. Les brûlages sont alors strictement encadrés : ils ne peuvent avoir lieu qu'en dehors des périodes d'interdiction d'allumer des feux ; ils ne peuvent être effectués que par les collectivités territoriales, ne peuvent concerner que les pâturages et les périmètres débroussaillés en application du code forestier, ils doivent respecter un cahier des charges et faire l'objet de mesures d'affichage en mairie (ne serait-ce que pour informer les propriétaires ou occupants du fond) ;

- lorsque les brûlages dirigés sont effectués par les propriétaires du fond eux-mêmes puisque le code forestier interdit à « toutes personnes autres que les propriétaires de terrains boisés ou non (et à leurs ayants droit) de porter ou d'allumer du feu à l'intérieur et jusqu'à une distance de 200 mètres des bois, forêts, plantations, reboisements, ainsi que des landes et maquis soumis aux dispositions de l'article L. 322-10 (landes et maquis soumis à l'interdiction de pâturage après incendie) » ;

Les limites et les dangers de ce dispositif sont faciles à cerner. Les périmètres de travaux soumis à déclaration d'utilité publique ont reçu une application quasi-anecdotique. De ce fait, l'actuel article L. 321-12 du code forestier n'est pratiquement pas entré en vigueur. Il faut toutefois relever que les brûlages dirigés dans le massif des Maures, unique massif forestier dont les travaux sont soumis à déclaration d'utilité publique, ont fait, au début des années 1980, la preuve de leur efficacité.

Par ailleurs, les propriétaires usent du droit de faire des feux sur leur fond de manière diverse. Dans de nombreux cas, le brûlage dirigé se fait ainsi par délégation du propriétaire. L'opération se déroule alors dans un cadre juridique incertain voire dans des conditions de sécurité douteuse.

Or, le brûlage dirigé peut être l'instrument d'une bonne politique de prévention des incendies de forêt. En montagne, par exemple, certains terrains sont inaccessibles aux engins de lutte contre le feu et à ceux de débroussaillage. Sur d'autres terrains, la création de pare-feu peut se révéler impossible. Dans ces cas, la seule action de prévention possible est le brûlage dirigé.

Le projet de loi propose donc de compléter l'article L. 321-12 par un nouveau paragraphe autorisant l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi que les associations syndicales autorisées à recourir au brûlage dirigé dans toutes les zones où la protection contre les incendies le rend nécessaire, à l'exception des périmètres d'aménagement et d'équipement visés à l'article L. 321-6 qui demeurent soumis aux mesures plus contraignantes actuellement en vigueur.

Ces travaux sont toutefois encadrés : il nécessitent l'accord écrit ou tacite des propriétaires et leurs modalités de réalisation seront précisées par un décret pris en Conseil d'État.

La commission a adopté au paragraphe V un amendement du rapporteur proposant une nouvelle rédaction de l'article L. 321-12 du code forestier (amendement n° 292). Cette rédaction vise à en élargir le champ afin d'autoriser non seulement le brûlage dirigé mais également d'autres emplois du feu telle l'incinération. Elle permet également de mentionner le rôle que peuvent jouer en la matière l'Office national des forêts et les services départementaux d'incendie et de secours.

Le paragraphe VI donne valeur législative au principe précité interdisant à toute personne autre que le propriétaire, à porter ou allumer du feu dans ou à moins de 200 mètres d'une forêt.

Cette disposition est l'une des plus anciennes de notre droit forestier. L'ordonnance des Eaux et Forêts de 1669 interdisait déjà toute personne autres que propriétaires et ayants-droit d'« allumer du feu dans les forêts, landes et bruyères ». Le code forestier de 1827 a repris cette interdiction et l'a étendue aux abords des forêts (limitant de ce fait le droit de certains propriétaires forestiers, qui, dans le cas de parcelles boisées proches, ne pouvaient plus faire de feu chez eux car leur propriété se situait aux abords de la forêt d'autrui).

Par un curieux cheminement, ce principe s'était trouvé relégué dans la partie réglementaire du code forestier (article R. 322-1, 1er alinéa). Il est donc proposé de le « remonter » dans la partie législative du code à l'article L. 322-1 sans en changer la rédaction.

Les paragraphes VII et VIII complètent et précisent le contenu des obligations de débroussaillement instaurées par les articles L. 322-1 et L. 322-3 du code forestier. Il faut rappeler à ce stade du rapport que, depuis la loi n° 92-613 du 6 juillet 1992, il existe une définition légale du débroussaillement. Celui-ci s'entend comme « la destruction par tous moyens des broussailles et morts-bois et, si leur maintien en l'état est de nature à favoriser la propagation des incendies, la suppression des végétaux et sujets d'essences forestières ou autres lorsqu'ils présentent un caractère dominé, dépérissant ou une densité excessive de peuplement, ainsi que l'élagage des sujets conservés » (article L. 321-5-3 du code forestier).

Le débroussaillement constitue un axe essentiel de notre politique de prévention des incendies de forêt. Le ministère de l'intérieur a ainsi consacré, en 1999, 460 millions de francs aux actions de débroussaillement obligatoire. Il n'est donc pas surprenant que ce sujet soit un des points forts du dispositif du projet de loi visant à renforcer la prévention des incendies.

En la matière, il est logique que les obligations de débroussailler soient renforcées dans les communes sur le territoire desquelles se trouvent des bois classés en raison de leur situation dans des régions particulièrement exposées aux incendies (cf. article L. 321-1 du code) ou des bois inclus dans des massifs situés dans les zones géographiques mentionnées à l'article L. 321-6. Dans ces cas, sont mises en place des obligations de droit.

En revanche, sur l'ensemble du territoire national, le code forestier permet au préfet, par arrêté, d'instaurer des obligations de débroussaillement. Ces obligations sont définies à l'actuel article L. 322-1 du code forestier (article numéroté L. 322-1-1 dans le projet de loi, en raison de l'insertion dans le code du principe interdisant à toute personne autre que le propriétaire de faire du feu en forêt).

Cette différence d'« intensité » des obligations de débroussaillement trouve une parfaite illustration dans les formules utilisées par le code forestier. Alors que l'article L. 322-1 stipule que « l'autorité supérieure peut (...) édicter toutes mesures de nature à assurer la prévention des incendies (...) », l'article L. 322-3 prévoit que dans les communes où se trouvent des bois classés ou des massifs forestiers mentionnés à l'article L. 321-6, « le débroussaillement et le maintien en état débroussaillé » sont obligatoires dans certaines zones.

Lors de l'examen du paragraphe VI, la commission a ensuite adopté deux amendements du rapporteur, l'un visant à tirer les conséquences de l'autorisation des brûlages dirigés et incinérations (amendement n° 293), et l'autre réparant un oubli du projet de loi puisque la rédaction actuelle, si elle interdisait de faire ou porter du feu dans les forêts, landes et maquis d'autrui, le permettait dans les garrigues (amendement n° 294).

L'obligation de débroussaillement résultant d'un arrêté préfectoral est peu modifiée par le paragraphe VII du projet de loi qui crée un article L. 322-1-1 reprenant, en les modifiant, les dispositions de l'article L. 322-1. Elle continue à peser sur les propriétaires de terrains jusqu'à une distance maximale de 50 mètres des habitations, dépendances, chantiers, ateliers et usines leur appartenant. Le débroussaillement peut même être rendu obligatoire sur les fonds voisins d'un bâtiment d'habitation jusqu'à une distance de 50 mètres de l'habitation (à condition, dit le code, que « la nature de l'occupation d'un bâtiment d'habitation justifie des précautions particulières pour la protection des vies humaines »).

En revanche, le projet de loi supprime la disposition portant ces distances à 100 mètres, dans les communes où se trouvent des bois classés au titre de l'article L. 321-1 ou inclus dans les massifs forestiers visés à l'article L. 321-6, une mesure équivalente existant à l'article L. 322-3.

Il clarifie, par ailleurs, le dispositif en précisant que les régimes des obligations des articles L. 322-1 et L. 322-3 sont exclusifs l'un de l'autre alors que la rédaction actuelle du code forestier était peut claire sur ce point. Désormais, seuls les abords des zones à risques limitativement énumérées à l'article L. 322-3 peuvent être soumis à des obligations de débroussaillement de plein droit ; dans le reste du pays (y compris sur le reste du territoire des communes comprenant des zones à risques visées à l'article L. 322-3), l'obligation de débroussaillement relève d'un arrêté préfectoral.

Enfin, dépassant les seules obligations de débroussaillement, le projet de loi complète la panoplie de mesures que le préfet est susceptible de prendre en lui permettant d'imposer aux propriétaires de nettoyer les parcelles des « chicots, volis, chablis, rémanents et branchages » avant l'ouverture de la période à risque. Quelques précisions de vocabulaire s'imposent : les chablis sont les arbres tombés accidentellement (du fait des tempêtes ou de la foudre par exemple) ; il sont au sol avec ou sans leur « motte » ; les volis sont les parties tombées d'un arbre cassé et les chicots (ou chandelles) leur partie restant débout ; quant aux rémanents et branchages, ce sont les bois, branches et débris divers restant sur le parterre d'une coupe après l'enlèvement des produits marchands. Il est précisé de surcroît qu'à défaut, l'administration pourra y pourvoir aux frais du propriétaire. Il autorise aussi le préfet à réglementer l'usage du feu et à interdire l'apport et l'usage d'appareils pouvant être à l'origine d'un incendie ainsi que la circulation et le stationnement des véhicules. Pour une large part, ces mesures étaient déjà incluses dans la partie réglementaire du code forestier (article R. 322-1, alinéa 4 et 7 à 10).

Quant à l'obligation de débroussailler instaurée de droit par l'article L. 322-3 du code forestier, elle a été imparfaitement appliquée en raison de l'imprécision de la rédaction actuelle du code. Il importait donc dans ces zones particulièrement exposées au risque présenté par les incendies, de définir méticuleusement les zones dites d'interfaces, c'est-à-dire les zones situées entre les espaces boisés et les parties urbanisées du territoire. Très souvent, dans les régions méditerranéennes, la pinède s'arrête peu avant l'entrée de ville. Les bandes de terrain parfois fort minces qui séparent ces deux espaces sont donc, au regard de la prévention des incendies, des endroits stratégiques. Or ceux-ci n'étaient pas définis par le code forestier. Le projet de loi remédie à cet oubli en indiquant que le débroussaillement et le maintien en état débroussaillé est obligatoire « sur les zones situées à moins de deux cents mètres de terrains en nature de bois, forêt, landes, maquis, garrigue, plantations ou reboisement ». Là encore un peu de sémantique s'impose : la garrigue est une formation arbustive poussant sur sol calcaire alors que le maquis peut être considéré comme son équivalent sur sol granitique ; quant à la lande, elle couvre également un sol granitique mais développe une végétation plus basse et plus clairsemée.

Les zones qui doivent ainsi être protégées sont limitativement énumérées par le code forestier : il s'agit des abords des constructions, chantiers, travaux et installations de toute nature (sur une profondeur de 50 mètres) et des voies privées y donnant accès (sur une longueur de 10 mètres de part et d'autre de la voie), des terrains situés en zone urbaine d'un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé, des terrains servant d'assiette aux zones d'aménagement concerté, aux lotissements et aux périmètres des associations foncières urbaines ainsi que des terrains de camping et de stationnement de caravanes.

Afin de parfaire l'articulation entre les dispositions du code forestier et celles relatives aux plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPR), le projet de loi complète cette liste en y ajoutant les terrains situés dans les zones délimitées et spécifiquement définies par un PPR comme devant être débroussaillées et maintenues en état débroussaillé. C'est également le PPR qui désigne la personne qui a la charge de ces travaux.

Il est également précisé que les travaux de débroussaillement visés à l'article L. 322-3 peuvent être confiés à des associations syndicales.

Au paragraphe VII, la commission a d'abord adopté deux amendements de forme du rapporteur (amendements nos 295 et 296). Puis elle a adopté un amendement du même auteur supprimant la disposition permettant à l'administration de procéder d'office et aux frais des propriétaires au nettoyage des parcelles. C'est un décret en Conseil d'Etat pris après avis du Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois qui précisera les conditions d'exécution de l'obligation de nettoyage (amendement n° 297).

Enfin, le paragraphe VIII qui modifie l'article L. 322-3, s'efforce de renforcer l'implication des maires dans le dispositif de prévention des incendies dans les régions à risque. Ainsi, à l'instar des pouvoirs supplémentaires accordés dans ce domaine au préfet dans les autres zones du territoire, les maires peuvent exiger d'un propriétaire ou de ses ayants-droit de nettoyer les parcelles des chablis, volis, chicots et autres branchages. Mais, à la différence du préfet, il ne peut réaliser ces travaux d'office aux frais du propriétaire. Dans le même esprit, le projet de loi confie aux maires, personnalités proches du terrain donc plus susceptibles de vigilance, de contrôler l'exécution de l'ensemble des dispositions contenues dans l'article L. 322-3 (débroussaillement, nettoyage des coupes, nettoyage des parcelles après chablis).

Au paragraphe VIII, la commission a d'abord adopté un amendement (amendement n° 298) de précision du rapporteur puis un amendement du même auteur étendant l'obligation de débroussaillement prévue à l'article L. 322-3 du code forestier aux terrains situés à moins de 200 mètres de zones comprenant des constructions sur les communes non couvertes par un plan d'occupation des sols ou un document en tenant lieu (amendement n° 299). Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Patrice Carvalho d'ordre réglementaire car mentionnant la sous-commission départementale de la prévention des risques d'incendie de forêts, landes, garrigues et maquis et l'amendement n° 70 de M. Pierre Micaux limitant le champ d'application de l'article L. 322-3 du code forestier. Après avoir adopté deux amendements du rapporteur corrigeant des erreurs matérielles du projet de loi (amendements nos 300 et 302), la commission a adopté un amendement de précision du même auteur (amendement n° 301). Puis elle a rejeté l'amendement n° 101 de M. Pierre Micaux jugé trop contraignant car imposant aux propriétaires un délai d'un mois après mise en demeure du maire ou du préfet pour nettoyer toute parcelle après chablis. La commission a enfin adopté deux amendements du rapporteur : le premier renvoyant à un décret pris en Conseil d'Etat après avis du Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois le soin de préciser les conditions d'exécution de l'obligation de nettoyage de parcelles mentionnée à l'article L. 322-3 du code forestier (amendement n° 303) et le second étant d'ordre rédactionnel (amendement n° 304).

LES OBLIGATIONS DE DÉBROUSSAILLER

OBLIGATION INSTAURÉE DE DROIT

OBLIGATION INSTAURÉE PAR ARRÊTÉ PRÉFECTORAL

Droit actuel : article L. 322-3

Droit futur LOF : article L. 322-3

Droit actuel : article L. 322-1

Droit futur LOF : article L. 322-1-1

Zone concernée :

- les communes où existent des bois classés au titre de l'article L. 321-1 (classement au regard du risque incendie par arrêté préfectoral ou par décret en Conseil d'Etat)

- les communes des régions Corse, Languedoc-Roussillon, PACA et des départements limitrophes, dans lesquelles existent des massifs forestiers.

Zone concernée :

- les communes où existent des bois classés au titre de l'article L. 321-1 : cf ci-contre

- les communes des régions Aquitaine, Corse, Languedoc-Roussillon, Midi-Pyrénées, PACA, Poitou-Charentes, et des départements Ardèche et Drôme, dans lesquelles existent des massifs forestiers.

Zone concernée :

Tout le territoire national

Zone concernée :

Tout le territoire national (sauf les zones concernées par les obligations de droit résultant de l'article L. 322-3) pour les terrains situés à moins de 200 mètres de terrains en nature de bois, forêt , lande, maquis, garrigue, plantations ou reboisements.

graphique

Terrains et espaces concernés :

a) Abords des constructions, chantiers, travaux et installations de toute nature, sur une profondeur de 50 m, ainsi que des voies privées y donnant accès sur 10 m de part et d'autre de la voie ;

b) Terrains situés dans les zones urbaines délimitées par un POS rendu public ou approuvé, ou un document d'urbanisme en tenant lieu ;

c) Terrains servant d'assiette aux ZAC ou aux lotissements et périmètres des associations foncières urbaines ;

d) Terrains de camping et de stationnement de caravanes.

Le maire peut porter à 100 m la distance visée au a)

Terrains et espaces concernés :

a), b), c) et d) ci-contre

e) Terrains situés dans les zones urbaines délimitées et spécifiquement définies comme devant être débroussaillées par un PPR.

Les terrains visés de a) à d) ne sont soumis à l'obligation que s'ils sont situés à moins de 200 mètres de terrains en nature de bois, forêt, lande, maquis, garrigue, plantations ou reboisements.

Terrains et espaces concernés :

1) Les terrains d'un propriétaire jusqu'à une distance maximum de 50 m des habitations, chantiers, ateliers et usines lui appartenant ;

2) Les fonds voisins d'un bâtiment d'habitation jusqu'à une distance de 50 m de cette habitation, si la nature de l'occupation du bâtiment justifie des précautions particulières pour la protection des vies humaines.

La distance est portée, dans les deux cas, à 100 m dans les communes où se trouvent des bois classés au titre de l'article L. 321-1 ou inclus dans les massifs forestiers du L. 321-6.

Terrains et espaces concernés :

Terrains visés en 1) et 2) ci-contre.

Suppression de la faculté d'instaurer une distance de 100 m dans les communes visées ci-contre (leurs espaces sensibles sont couverts par une obligation de 50 m que le maire peut porter à 100 m. Cf article L. 322-3, 1ère colonne).

Sur qui porte l'obligation :

Définie en a) : le propriétaire des constructions, chantiers etc...

Définie en b) c) et d) : le propriétaire des terrains visés.

Sur qui porte l'obligation :

Définie en a), b), c) ou d), comme ci-contre

Obligation définie en e) : la personne désignée par le PPR.

Sur qui porte l'obligation :

Définie en 1) ou en 2) : le propriétaire des dépendances etc... ou de l'habitation dont l'occupation justifie des précautions particulières.

Sur qui porte l'obligation :

Comme ci-contre

Autorité compétente :

Réglementation : le maire peut renforcer les mesures de droit.

Contrôle : le maire et le préfet

Travaux d'office : le maire

Autorité compétente :

Réglementation : le maire peut renforcer les mesures de droit.

Contrôle : le maire (et le préfet selon CGCT)

Travaux d'office : le maire (et en cas de carence le préfet)

Autorité compétente :

Réglementation : le maire peut renforcer les mesures de droit.

Contrôle : le maire (et le préfet selon CGCT)

Travaux d'office : le maire (et en cas de carence le préfet)

Autorité compétente :

Réglementation : le préfet

Contrôle : le préfet (et le maire au titre de ses pouvoirs de police)

Travaux d'office : le préfet

Sanctions :

Amende de 5° classe

Sanctions :

Amende de 4° classe et nouvelle infraction définie : non exécution après mise en demeure

Sanctions :

Amende de 4° classe

Sanctions :

Amende de 4° classe et nouvelle infraction définie : non exécution après mise en demeure

(en gras : ajouts du projet de loi ; en italiques : retraits du projet de loi)

Le paragraphe IX renforce les pouvoirs de la puissance publique pour faire procéder aux travaux d'office en cas de non exécution des obligations de débroussaillement définies à l'article L. 322-3 du code forestier.

La nouvelle rédaction de l'article L. 322-4 du code oblige désormais le maire à pourvoir d'office aux travaux de débroussaillement si les propriétaires continuent à ne pas les exécuter après mise en demeure (dans sa forme actuelle, l'article L. 322-4 est moins directif : « la commune peut y pouvoir d'office »). Il est précisé qu'en conséquence les dépenses liées à ces travaux sont des dépenses obligatoires pour les communes. Comme par le passé, les départements, les groupements de collectivités territoriales et les syndicats mixtes peuvent contribuer à leur financement. Après avoir réalisé d'office les travaux, la commune se retourne contre le propriétaire en émettant à son encontre un titre de perception du montant correspondant aux travaux effectués.

La seconde nouveauté apportée par le projet de loi à l'article L. 322-4 du code forestier réside dans les pouvoirs donnés au préfet en cas de carence du maire. Si ce dernier ne fait pas exécuter les travaux d'office, le préfet, après mise en demeure de la commune, peut se substituer au maire. Le financement est alors mis à la charge de la commune qui peut ensuite se retourner contre le propriétaire négligent.

Au paragraphe IX, la commission a adopté un amendement de forme du rapporteur (amendement n° 305) puis a rejeté un amendement de M. Paul Patriarche déjà satisfait par le projet de loi.

Le paragraphe X poursuit un double objectif.

Il clarifie le droit positif. Depuis 1995, les plans de prévention aux risques naturels prévisibles (PPR) créés par la loi n° 87-565 du 22 juillet 1987 relative à l'organisation de la sécurité civile, à la protection de la forêt contre l'incendie et à la prévention des risques majeurs, ont succédé aux plans de zones sensibles aux incendies que la loi n° 91-5 du 3 janvier 1991 modifiant diverses dispositions intéressant l'agriculture et la forêt avait institués. Le projet de loi insère dans le code forestier (nouvel article L. 322-4-1) l'article 21 de la loi de 1991 dans sa rédaction issue de la réforme de 1995.

Désormais, les plans de prévention des risques naturels prévisibles dont les plans de prévention des risques prévisibles liés aux feux de forêts (PPRIF) constituent un sous-ensemble, sont donc mentionnés dans le code forestier.

Mais le paragraphe X veut également rendre plus efficaces les PPRIF à qui l'on peut reprocher aujourd'hui de n'avoir pas un contenu assez contraignant.

En effet, ils ne soumettent à aucune obligation de travaux de prévention des incendies les propriétaires de terrains non boisés situés entre forêt et zones urbanisées. D'où l'insertion dans le code forestier d'un nouvel article L. 322-4-1 qui :

- impose aux préfets d'élaborer, en concertation avec les conseils régionaux et généraux, des plans de prévention des risques naturels prévisibles dans les zones sensibles aux incendies de forêt ;

- oblige, lors de toute opération nouvelle d'aménagement (création de zones d'aménagement concerté, de lotissements, opérations de rénovation urbaine, etc.) à mettre en place une bande de terrain inconstructible sise entre les constructions et les bois, forêts, landes, maquis, etc. et à l'entretenir afin de la maintenir en état débroussaillé ;

- permet aux PPRIF d'imposer le débroussaillement et le maintien en état débroussaillé de terrains compris dans des zones qu'ils prédéterminent. Là aussi sont visées les zones situées à l'interface forêt-zones urbanisées ; l'article L. 322-4-1 impose une obligation générale pour les opérations d'aménagement nouvelles et autorise le préfet, par le biais des PPRIF à imposer, s'il le juge nécessaire, des obligations de débroussaillement aux abords des constructions existantes. C'est d'ailleurs le PPRIF lui-même qui précise à qui incombera la charge de ces travaux.

Enfin, il est rappelé, comme à l'article L. 322-3, que les travaux de prévention visés au présent article peuvent être confiés à une association syndicale.

D'après les informations fournies au rapporteur on peut estimer que les PPRIF concerneront entre 600 et 800 communes du sud de la France. Actuellement, dix-sept plans sont à l'étude ; un seul a été approuvé (à Auribeau-sur-Sciane, commune des Alpes-Maritimes).

Après avoir adopté, au paragraphe X, un amendement du rapporteur (amendement n° 306) associant les communes, leurs groupements et les services départementaux d'incendie et de secours à l'élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles (PPR), la commission a rejeté l'amendement n° 102 de M. Pierre Micaux obligeant le préfet à recueillir l'avis de l'Office national des forêts avant l'élaboration de tout PPR. Puis elle a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 307), et a rejeté l'amendement n° 104 de M. François Vannson, celui-ci étant partiellement satisfait par un amendement du rapporteur qui a été adopté et qui précise que le débroussaillement ou le maintien en l'état débroussaillé peut incomber à des personnes publiques (amendement n° 308).

Le paragraphe XI crée un article L. 322-4-2 qui habilite les communes, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et les syndicats mixtes à effectuer, à la demande des propriétaires et aux frais de ces derniers, les travaux de débroussaillement et de maintien en état débroussaillé prescrits par les articles L. 322-3 et L. 322-4-1. Il s'agit d'une disposition visant à rendre plus simples, plus efficaces et moins onéreux les travaux de débroussaillement. Ceux-ci pourront ainsi être groupés et ne se heurteront plus aux difficultés couramment rencontrées dès lors qu'il y a pénétration sur le terrain d'autrui.

Les paragraphes XII à XIV portent sur les obligations de débroussaillement et autres travaux de prévention aux abords d'ouvrages linéaires (lignes électriques, voies ouvertes à la circulation, voies ferrées).

La commission a rejeté au paragraphe XI l'amendement n° 103 de M. François Vannson précisant qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les prix des prestations de débroussaillement, le rapporteur ayant fait valoir que le coût du débroussaillement est très variable et qu'en conséquence des mesures d'encadrement n'étaient pas souhaitables.

Le paragraphe XII modifie le premier alinéa de l'article L. 322-5. Il étend le champ d'application et modifie le contenu des obligations imposées aux distributeurs d'électricité lorsqu'une ligne aérienne traverse une forêt.

Actuellement ces obligations ne s'appliquent que dans les périmètres de protection et de reconstitution forestières définis à l'article L. 321-6, autant dire dans de très rares endroits. Le projet de loi propose d'étendre leur champ à l'ensemble des massifs visés à l'article L. 321-6, soit à la plupart des forêts de 32 départements métropolitains.

Par ailleurs, l'obligation de débroussaillement porte aujourd'hui sur une bande de terrain de cinq mètres de largeur de part et d'autre de l'axe de la ligne. La hauteur croissante de certains ouvrages de transport d'électricité nécessitait une révision de cette disposition. Plutôt que d'imposer une norme unique, le projet de loi précise que la largeur de la bande à débroussailler sera désormais calculée en fonction de la hauteur de la ligne et de ses caractéristiques.

Au paragraphe XII, la commission, après avoir adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 309), a également adopté un amendement du même auteur précisant que l'obligation de débroussaillement autour des lignes électriques incombe non seulement aux distributeurs mais également au transporteur d'électricité (amendement n° 310).

Le paragraphe XIII modifie la rédaction de l'actuel article L. 322-7 du code forestier qui permet à l'État et à certaines collectivités territoriales de débroussailler les terrains d'autrui situés aux abords des voies ouvertes à la circulation. La faculté ainsi offerte est peu utilisée car elle est trop étendue. De ce fait, la puissance publique pouvait donner l'impression de se désintéresser de l'état des abords des routes et constituer un exemple fâcheux pour les propriétaires privés soumis à une obligation de débroussaillement.

En effet, actuellement les communes sur le territoire desquelles se trouve un bois classé en application de l'article L. 321-1 du code forestier ou inclus dans un massif mentionné à l'article L. 321-6 du même code peuvent user d'une servitude de débroussaillement sur tous les terrains jouxtant l'ensemble de la voirie communale dans la limite d'une largeur maximale de vingt mètres de part et d'autre de l'emprise des voies. Cette disposition valait également pour l'Etat : dès lors qu'une route nationale passait par exemple sur le territoire d'une commune où, à son autre extrémité se trouvait un bois classé, l'État pouvait user de ladite servitude pour débroussailler les abords de la voie dans les conditions définies à l'article L. 322-7.

Lorsqu'on sait que le coût du débroussaillement à l'hectare oscille entre 6 000 et 30 000 F, on comprend aisément que cette disposition n'ait pu être pleinement appliquée.

La rédaction proposée par le projet de loi est à la fois plus directive et plus raisonnable. Elle devrait ainsi permettre aux pouvoirs publics d'avoir, en matière de débroussaillement, une attitude exemplaire. Désormais, l'obligation de débroussailler, instaurée par l'article L. 322-7, s'applique uniquement aux portions de voies traversant les bois classés ou inclus dans un massif forestier visé à l'article L. 321-6.

De plus, l'obligation de débroussaillement porte sur une largeur de vingt mètres de chaque côté de la route (et non plus de vingt mètres au plus) et concerne également le maintien des terrains en état débroussaillé.

Par ailleurs, elle s'applique aussi (toujours sur le territoire des communes susvisées) aux voies situées à moins de 200 mètres « de terrains en nature de bois, forêts, landes, maquis, garrigue, plantations ou reboisements ».

Enfin, lorsque la voie est une autoroute, la nouvelle rédaction de l'article L. 322-7 fait porter l'obligation sur la société concessionnaire.

La commission a adopté, au paragraphe XIII, un amendement de M. Patrice Carvalho, sous-amendé par le rapporteur, limitant à 20 mètres la largeur maximale (de part et d'autre de l'emprise des voies ouvertes à la circulation) sur laquelle s'applique l'obligation de débroussaillement (amendement n° 311).

Le paragraphe XIV concerne le débroussaillement des voies ferrées. Il adapte au paysage ferroviaire contemporain la servitude instaurée par l'article L. 322-8 du code forestier (possibilité de débroussailler les terrains d'autrui situés sur une largeur de vingt mètres à partir du bord extérieur de la voie) en précisant que les bénéficiaires de ce droit sont désormais les « propriétaires d'infrastructures ferroviaires » et non plus les « compagnies de chemin de fer ».

Par parallélisme avec l'obligation de débroussaillement imposée aux abords de certaines voies ouvertes à la circulation, le projet de loi met en place une obligation équivalente pour les propriétaires d'infrastructures ferroviaires pour les portions de lignes traversant des bois classés ou inclus dans un des massifs forestiers mentionnés à l'article L. 321-6.

Le paragraphe XV insère un article L. 322-9-2 qui autorise les maires ou, en cas de carence de ceux-ci, les préfets à mettre en demeure les propriétaires d'exécuter les travaux de débroussaillement ou de maintien en état débroussaillé de leur terrain en cas de violation des dispositions relatives à :

- l'obligation instaurée par arrêté préfectoral conformément à l'article L. 322-1-1 du code forestier ;

- l'obligation de débroussailler découlant des pouvoirs attribués aux maires en application de l'article L. 322-2 du même code qui les autorise à prendre toutes mesures utiles pour faire cesser le danger d'incendie présenté par un dépôt d'ordures ménagères ;

- l'obligation de droit prévue par l'article  L. 322-3 du même code ;

- l'obligation résultant de la mise en _uvre d'un plan de prévention des risques d'incendie de forêt conformément à l'article L. 322-4-1 ;

- l'obligation de débroussailler imposée aux distributeurs d'énergie électrique en application de l'article L. 322-5 ;

- celles imposées aux propriétaires d'infrastructures ferroviaires en application de l'article L. 322-8.

A cette liste, le projet de loi ajoute curieusement l'article L. 322-1 qui ne prévoit pas d'obligation de débroussailler puisqu'il pose le principe de l'interdiction de faire ou de porter du feu sur le terrain d'autrui. En revanche, le texte qui nous est soumis ne fait pas référence à l'article L. 322-7 du code forestier et interdit ainsi à la puissance publique de mettre en demeure les sociétés concessionnaires d'autoroutes de remplir leurs obligations de débroussaillement.

La mise en demeure est assortie d'un délai ; passé celui-ci, le propriétaire qui n'a pas obtempéré est passible d'une amende ne pouvant excéder 300 F par mètre carré soumis à obligation (montant très dissuasif car il représente une amende de 3 millions de francs par hectare alors que le coût maximal du débroussaillement à l'hectare peut atteindre 30 000 francs).

Enfin, le présent paragraphe prévoit que le non accomplissement des obligations de débroussaillement par une personne morale peut engager leur responsabilité pénale conformément à l'article 121-2 du code pénal. Ce sont en particulier les aménageurs et les lotisseurs visés par l'article L. 322-4-1 du code forestier qui peuvent se voir appliquer cette disposition. En application de l'article 131-38 du code pénal, le taux maximal de l'amende qui leur est applicable est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques.

Après avoir rejeté, au paragraphe XV, l'amendement n° 105 de M. Pierre Micaux, la commission a adopté trois amendements du rapporteur : un amendement d'ordre rédactionnel (amendement n° 314) et deux amendements modifiant la liste des articles du code forestier portant obligation de débroussaillement pouvant donner lieu aux sanctions prévues à l'article L. 322-9-2 du même code. La mention erronée de l'article L. 322-1 est ainsi supprimée (amendement n° 312) et la mention de l'article L.322-7 y est ajoutée afin de permettre à la puissance publique de mettre en demeure les sociétés concessionnaires d'autoroutes d'accomplir leurs obligations de débroussaillement (amendement n° 313). La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol, malgré une intervention de M. Eric Doligé, visant à alléger les amendes dont sont passibles les propriétaires ne procédant pas aux travaux de débroussaillement prescrits, le rapporteur ayant fait valoir qu'il s'agissait d'une mesure de protection contre un danger susceptible de menacer des vies humaines.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur insérant un paragraphe XV bis afin qu'il soit fait mention des garrigues à l'article L. 322-10 du code forestier relatif à l'interdiction de pâturage après incendie (amendement n° 315).

Enfin, le paragraphe XVI contient diverses modifications portant sur des articles inclus dans des codes autres que le code forestier.

Ainsi, à l'article L. 157-36 du code rural, la liste des travaux présentant du point de vue agricole ou forestier un caractère d'intérêt général ou d'urgence et que les communes et les départements peuvent réaliser ou prescrire à des associations syndicales par exemple, est complétée. Actuellement sont visés, entre autres, les travaux de défense contre les incendies et les travaux de desserte forestière. A ceux-ci, la rédaction proposée par le projet de loi ajoute les travaux de desserte pastorale ainsi que ceux « permettant l'accès aux équipements répondant aux objectifs de protection précités » (protection contre l'érosion, les avalanches, les crues torrentielles et l'incendie). De plus, un alinéa ajouté à l'actuel article L. 151-38 du code rural prévoit de grever d'une servitude de passage et d'aménagement l'assiette des chemins d'exploitation lorsque sont réalisés les travaux de desserte des équipements visés à l'article L. 151-36.

Enfin, ce paragraphe modifie l'article L. 1615-2 du code général des collectivités territoriales relatif aux conditions d'éligibilité au fonds de compensation de la TVA des interventions des communes et de leurs groupements. Aujourd'hui, dans le domaine de la prévention des incendies de forêt, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent seulement se faire rembourser la TVA payée sur les investissements réalisés sur leurs propres terrains.

Or, depuis la loi de finances pour 1999, les dépenses d'investissement réalisées par les collectivités territoriales ou leur groupement sur des terrains ne leur appartenant pas sont éligibles au fonds de compensation de la TVA « dès lors qu'elles concernent des travaux de lutte contre les avalanches, glissements de terrains, inondations, ainsi que des travaux de défense contre la mer, présentant un caractère d'intérêt général ou d'urgence ». En ajoutant à cette liste les travaux pour la prévention des incendies de forêt, le présent projet corrige un oubli et rend éligible au fonds de compensation tous les travaux relatifs à la création de pistes de défense contre l'incendie, à la construction de tours de guet, à la mise en place de points d'eau ou à la création de bandes débroussaillées entravant la progression du feu.

L'éligibilité de ces investissements devrait, selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, représenter pour la collectivité une charge supplémentaire annuelle estimée à environ 10 millions de francs.

La commission a adopté au paragraphe XVI un amendement du rapporteur prenant en compte la rédaction de l'amendement n° 48 de M. François Vannson précisant que les acquéreurs de biens immobiliers situés dans des zones à risques doivent être informés des contraintes qu'ils auront à subir, la mention de cette servitude devant être annexée à tout acte notarié ou sous seing privé (amendement n° 316). En conséquence, M. François Vannson a annoncé qu'il retirerait ultérieurement son amendement n° 48. Puis la commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 317).

La commission a adopté l'article 15 ainsi modifié.

Chapitre IV

Dispositions relatives à la prévention des risques naturels
en montagne

Article 16

Aides de l'Etat pour prévenir les risques naturels en montagne

(art. L. 423-1 du code forestier)

Cet article constitue la base légale à l'intervention technique et financière de l'Etat afin de prévenir les risques naturels dans certaines zones de montagne (hors terrains domaniaux). Il actualise la rédaction de l'article L. 423-1 du code forestier qui, dans sa forme actuelle issue d'une loi de 1884, ne porte que sur les subventions accordées par l'Etat pour les travaux de mise en valeur pastorale et forestière ainsi que pour ceux liés à la consolidation du sol.

Le nouvel article L. 432-1 proposé par le projet de loi relève d'une autre logique et affiche une autre ambition. Il s'inscrit dans un objectif de prévention des risques naturels en privilégiant la protection active, c'est-à-dire en s'attaquant prioritairement aux sources des risques. Il importe donc de soutenir d'abord les actions des collectivités territoriales, de leurs groupements, des établissements publics, des associations syndicales et des particuliers portant sur l'« amont » des risques. Les actions de protection passive des biens situés en aval sont désormais aidées subsidiairement en complément de travaux de protection active.

Il faut en effet rappeler que la prévention active est beaucoup plus complexe et coûteuse que la protection passive. L'érosion est particulièrement visée par le projet de loi car elle est source de nombreuses catastrophes en montagne : glissements de terrains, éboulements, crues torrentielles. Or aujourd'hui, l'Etat n'intervient que pour restaurer les périmètres les plus érodables (environ 3  % des zones de montagne) où ce type de travaux a été déclaré d'utilité publique. Dans les zones voisines qui couvrent environ 5 % de la montagne et où sont exposées 15 000 habitations de résidents permanents, les collectivités territoriales interviennent de manière moins systématique en raison des coûts et de la technicité des opérations de génie civil de stabilisation des sols ou de corrections torrentielles ou de génie biologique de revégétalisation.

Dans sa nouvelle rédaction, l'article L. 423-1 du code forestier indique d'abord que les subventions ne sont accordées que dans les « départements de montagne où l'érosion active, les glissements de terrain ou l'instabilité du manteau neigeux créent des risques pour les personnes et les biens ». Quels sont les départements ainsi visés ? 42 départements ont sur leur territoire une zone de montagne répondant à la définition de l'article 3 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne. Mais l'article L. 423-1 du code forestier ne vise que les départements où existent des phénomènes naturels dangereux liés aux écoulements gravitaires. Ces phénomènes sont actuellement observés dans 25 départements correspondant à ceux pour lesquels des servitudes d'utilité publique de restauration des terrains de montagne (RTM) ont été instaurées à la fin du XIXème siècle.

Sur ces départements, on compte dix départements de haute montagne où la fréquence et l'intensité des phénomènes d'érosion a nécessité la présence d'un service départemental spécialisé de RTM (Alpes-de-Haute-Provence, Hautes-Alpes, Alpes-Maritimes, Ariège, Haute Garonne, Isère, Hautes-Pyrénées, Pyrénées-Orientales, Savoie et Haute-Savoie).

D'après les informations fournies au rapporteur, ce sont en pratique ces dix départements auxquels s'ajoutent la Drôme et les Pyrénées Atlantiques, c'est-à-dire la douzaine de départements exposés aux risques les plus graves qui pourront bénéficier des subventions visées à l'article L. 423-1 du code forestier. Bien que pouvant aussi être accordées aux autres collectivités territoriales, aux établissements publics, aux associations syndicales et aux particuliers, ces subventions seront principalement attribuées aux communes car l'essentiel des actions concerne des terrains d'altitude leur appartenant le plus souvent. Un inventaire récent des travaux de protection active à réaliser dans les massifs alpins et pyrénéens sur la période 2000-2006 estime à 140 millions de francs leur coût total. Ces travaux peuvent consister à la stabilisation des terrains et du manteau neigeux sur les pentes, à la correction des lits des torrents ainsi qu'au reboisement et au reverdissement car une couverture végétale continue demeure un des moyens les plus efficace pour stabiliser l'érosion. Les programmes de travaux peuvent subsidiairement comprendre des ouvrages complémentaires de protection passive (digues, plages de dépôt, etc.).

Les travaux ne sont d'ailleurs pas les seules actions susceptibles d'être aidées, puisque l'article L. 423-1 prévoit que les études sont également éligibles aux subventions.

Lors de l'examen de l'article 16, la commission a d'abord adopté l'amendement n° 106 de M. François Vannson permettant de subventionner les actions de prévention active contre certains risques naturels lorsque ceux-ci menacent des sites. Elle a également adopté un amendement du rapporteur étendant les dispositions de l'article L. 423-1 du code forestier aux associations pastorales (amendement n° 318). Puis elle a rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand limitant les ouvrages et travaux éligibles aux aides définies à cet article, le rapporteur ayant indiqué que la rédaction proposée par cet amendement pouvait poser des problèmes d'interprétation.

La commission a adopté cet article ainsi modifié.

Article 17

Règles de gestion et d'exploitation forestière
imposées par les plans de prévention des risques naturels prévisibles

(art. L. 425-1 du code forestier)

Le présent article ajoute au chapitre V intitulé « règles de gestion et d'exploitation forestière » au titre deuxième du livre IV du code forestier.

L'article unique de ce chapitre (art. L. 425-1) autorise les plans de prévention des risques naturels prévisibles, lorsqu'ils ont pour but de prévenir les inondations, les mouvements de terrains ou les avalanches, à inclure dans leur règlement, des règles de gestion et d'exploitation forestière dans des zones à risque qu'ils déterminent.

Lorsque le règlement d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles contient des règles de gestion et d'exploitation, celles-ci s'imposent aux propriétaires et exploitants. En contrepartie, comme cela est déjà prévu dans le cas des forêts de protection (forêts dont la conservation est nécessaire au maintien des terres sur les montagnes et les pentes, à la défense contre les avalanches, les érosions et les envahissements des eaux et des sables et bois et forêts situés à la périphérie des grandes agglomérations), les propriétaires et usagers bénéficient de garanties : ils peuvent être indemnisés si les règles de gestion et d'exploitation qui leur sont imposées, diminuent leurs revenus et peuvent même exiger l'acquisition de la forêt par l'Etat s'ils justifient que les mesures prises les privent de la moitié du revenu annuel qu'ils tirent de leur bien.

La commission a adopté cet article sans modification.

Après l'article 17

La commission a rejeté un amendement de M. Jean Charroppin visant à harmoniser les valeurs cadastrales des massifs forestiers de l'Ain et du Jura, M. Joseph Parrenin ayant fait valoir que l'incidence de ces écarts était minime du fait de l'exonération de la part régionale et départementale de la taxe foncière sur les propriétés non bâties déjà prévue dans le code général des impôts.

La commission a également rejeté un amendement de M. Jean Proriol demandant au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport étudiant la possibilité d'instituer un fonds national de garantie des calamités forestières.

TITRE IV

RENFORCER LA PROTECTION DES ÉCOSYSTÈMES
FORESTIERS OU NATURELS

chapitre Ier

Contrôle des coupes et des obligations de reconstitution
de l'état boisé

Article 18

Réforme du régime spécial d'autorisation administrative

Cet article vise à lever les obstacles juridiques et pratiques qui empêchent actuellement la généralisation de la gestion des forêts privées conformément à un plan simple de gestion agréé, pour les propriétés soumises à cette obligation.

Dans le cadre juridique actuellement en vigueur, défini à l'article L. 222-5 du code forestier, toute propriété forestière qui relève obligatoirement de ce régime et qui n'est pas dotée d'un tel plan de gestion, se trouve placée sous un régime spécial d'autorisation administrative, sauf en cas de force majeure reconnu par le centre régional de la propriété forestière (CRPF).

Dans ce cas, tant qu'un plan simple n'a pas été agréé et quelles que soient les mutations de propriété, aucune coupe ne peut être opérée sur celle-ci sans une autorisation préalable du préfet, donnée après avis du CRPF. Cette autorisation administrative peut être assortie de l'obligation, pour le bénéficiaire, de réaliser certains travaux liés aux coupes.

Si, à l'origine, le régime spécial d'autorisation administrative avait été conçu comme une phase transitoire et précaire vers l'agrément d'un plan simple de gestion, il est devenu, particulièrement dans certaines régions, un mode courant de gestion pour le propriétaire. Ce phénomène est particulièrement répandu puisque, selon les informations communiquées au rapporteur, plus de 700 000 hectares sont placés sous ce régime sur un ensemble de 4 millions d'hectares relevant normalement du plan simple de gestion (soit plus du sixième des forêts privées concernées).

Le premier alinéa de l'article 18 du projet de loi supprime la mention, à l'article L. 221-5 du code forestier, exonérant le propriétaire de l'obligation de présenter un projet de plan simple de gestion en cas de force majeure reconnue par le CRPF, cette disposition étant inutile et n'ayant jamais connu d'application.

Les deux derniers alinéas insèrent une phrase à la fin de l'article L. 221-5 précité qui rétablit l'objectif initial du législateur, lors de la création du plan simple de gestion, en restituant au régime spécial d'autorisation administrative son caractère transitoire, dans l'attente d'une gestion de la propriété forestière fondée sur un plan simple.

Il s'agit ainsi de donner une base légale à un refus d'autorisation administrative de coupe, dans le cadre du régime spécial, lorsque le propriétaire aura négligé pendant plus de trois ans de présenter un projet de plan, soit à l'expiration du plan simple de gestion précédemment agréé, soit après la notification qui lui aura été adressée par le CRPF ou l'administration, l'invitant à présenter un premier projet.

Dans ce cas, et à l'expiration de ce délai, l'administration pourra refuser l'autorisation de coupe dans le cadre du régime spécial lorsque le caractère répété des demandes, l'importance ou la nature de la coupe ou l'évolution des peuplements présents sur la propriété nécessitent de définir une orientation de gestion ou des travaux importants et de ne plus différer la présentation d'un plan simple de gestion.

La commission a tout d'abord rejeté un amendement de M. Jean Proriol de suppression du premier alinéa. Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 319) réservant à l'autorité administrative le droit de refuser les autorisations de coupe dans les propriétés forestières qui ne sont pas dotées d'un plan simple de gestion. Après avoir rejeté l'amendement n° 107 de M. Pierre Micaux, la commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 320) qui assouplit les conditions dans lesquelles l'autorité administrative peut refuser les coupes, afin d'inciter les propriétaires à présenter un plan simple de gestion. Puis, elle a adopté l'article 18 ainsi modifié.

Article 19

(article L. 223-1 du code forestier)

Sanctions dissuasives à l'encontre des personnes coupables
de coupes abusives

Cet article remplace l'actuel article L. 223-1 du code forestier, qui traite de l'obligation de reconstitution de peuplements forestiers après coupe rase de résineux dans une propriété forestière non soumise au régime forestier. Cette disposition, désormais étendue à toute forêt, se trouve replacée dans le livre préliminaire du code forestier, à l'article L. 9, créé à l'article 1er du projet de loi.

Le nouvel article L. 223-1 porte sur un sujet différent, la sanction pénale des coupes abusives, et reprend tout en les modifiant profondément, les dispositions de l'actuel article L. 223-3 du code forestier.

Actuellement, en cas de coupe abusive (c'est-à-dire qui remet gravement en cause l'avenir de la forêt sans pour autant modifier la destination forestière du terrain), non conforme aux orientations régionales de production et aux plans simples de gestion, ou non autorisée lorsque la propriété est placée sous le régime spécial de l'autorisation administrative, le propriétaire du fonds est passible d'une amende de 120 000 francs lorsque le total des circonférences des arbres exploités, mesurés à 1,30 mètre du sol, dépasse 500 mètres hors taillis. L'actuel article L. 351-1 du code forestier dispose par ailleurs que cette peine est doublée lorsque les délinquants auront procédé à la coupe ou à l'enlèvement du bois avec des engins mécaniques ou à moteur.

Certains opérateurs peu scrupuleux ont détourné ce dispositif et considéré cette amende, non comme la sanction d'un délit, mais comme un simple coût de gestion d'une coupe consciemment opérée dans des conditions portant gravement atteinte à l'équilibre économique et écologique de la forêt. Il s'agit notamment de l'attitude de marchands de biens qui achètent des propriétés forestières peuplées d'essences de valeur, y coupent les sujets en toute illégalité, avant leur maturité, puis procèdent à une reconstitution des peuplements, avant de remettre en vente la parcelle.

Dans les faits, chacune de ces coupes représente en moyenne un profit supérieur à un million de francs ; dans ce cas les coûts de la reconstitution, de l'ordre de 15 000 francs par hectare, ainsi que de l'amende, ne représentent qu'une charge normale qui s'ajoute aux frais d'exploitation.

C'est afin de disposer d'un montant d'amende dissuasif que le nouvel article L. 223-1 du code forestier prévoit que son montant maximum pourra atteindre cinq fois la valeur estimée des bois coupés, dans la limite d'un million de francs par hectare parcouru par la coupe.

Par ailleurs, par rapport au texte en vigueur, le délit sera constitué dès que le total de la circonférence des arbres exploités dépassera deux cents mètres, soit un seuil abaissé de plus de deux fois.

En outre, il est précisé, afin de clarifier le système actuellement appliqué, que le calcul de cette circonférence prendra en compte l'ensemble des parcelles constituant la coupe, qu'elles soient ou non contiguës.

Le deuxième alinéa de cet article ouvre la possibilité de prononcer cette peine contre tout bénéficiaire de la coupe, et non plus seulement, comme aujourd'hui, à l'encontre du seul propriétaire du fonds. Cette disposition vise notamment le preneur d'un bail emphytéotique, l'usufruitier, ou toute autre personne, quelles que soient les conditions qui l'ont conduit à profiter de cette coupe.

Les troisième, quatrième (1°), cinquième (2°) et sixième (3°) alinéas de cet article prévoient les peines complémentaires qu'encourent les personnes physiques bénéficiaires de la coupe abusive.

Il s'agit de la reprise exacte des dispositions visées au 3°, 4° et 5° du I de l'article L. 313-1-1, contenues au paragraphe IX de l'article 12 du projet de loi, applicables aux défrichements non autorisés : affichage de la décision, fermeture pour une durée maximale de trois ans d'un ou plusieurs des établissements de l'entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés, exclusion de trois ans des marchés publics.

Le septième alinéa de cet article étend la responsabilité pénale du délit de coupe abusive aux personnes morales. Selon les modalités prévues à l'article 131-38 du code pénal, elles encourent une amende du quintuple de celle prévue pour les personnes physiques, soit vingt cinq fois le montant estimé de la valeur des bois coupés, dans un plafond de 5 millions de francs par hectare parcouru par la coupe.

Les huitième, neuvième (1°) et dixième (2°) alinéas de cet article prévoient enfin que les personnes morales responsables du délit de coupe abusive encourent les mêmes peines complémentaires que les personnes physiques, ainsi que celles de l'interdiction d'exercer, pendant trois ans au plus, directement ou indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales et celle de la confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l'infraction ou de la chose qui en est le produit.

Il convient de rappeler, comme pour les sanctions pénales prises à l'encontre des personnes morales reconnues coupables de défrichement non autorisé (II de l'article L. 313-1-1 du code forestier, au IX de l'article 12 du projet de loi), qu'à la différence des sanctions dont sont passibles les personnes physiques, la loi n'opère pas, en matière criminelle et correctionnelle, de distinction entre les peines principales, complémentaires ou alternatives, pour les personnes morales.

La commission a tout d'abord rejeté un amendement de M. Jean Proriol visant à abaisser le niveau des sanctions prévues au premier alinéa de cet article, ainsi que l'amendement n° 108 de M. François Vannson prévoyant une peine d'interdiction d'exercer une activité sylvicole. La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 321) tirant les conséquences de l'absence de distinction en matière correctionnelle entre les peines dont sont passibles les personnes morales, puis l'article 19 ainsi modifié.

Article 20

Sanctions liées au non-respect de
la réglementation des coupes

Cet article crée deux articles nouveaux au sein du code forestier et procède à deux mesures de coordination.

Le paragraphe I remplace tout d'abord les dispositions de l'article L. 223-2 actuel, devenues obsolètes, par l'institution d'une procédure d'interruption des coupes illicites.

Le premier alinéa du I de cet article L. 223-2 étend aux coupes abusives le régime de l'interruption des défrichements illicites prévu à l'article L. 313-6 du code forestier. Ces coupes abusives ne pouvaient jusqu'ici être interrompues que par décision judiciaire, ce qui rendait la procédure le plus souvent inopérante compte tenu des délais inévitables. Désormais, l'interruption des travaux de coupe abusive pourra être ordonnée, soit sur réquisition du ministère public agissant à la requête du fonctionnaire compétent, soit même d'office, par le juge d'instruction saisi des poursuites ou par le tribunal correctionnel. Cette décision judiciaire sera exécutoire sur minute et nonobstant toute voie de recours. En outre, dès qu'un procès-verbal aura été dressé par un officier de police judiciaire ou un fonctionnaire habilité, le préfet pourra également, si le tribunal ne s'est pas encore prononcé, ordonner à titre conservatoire et par arrêté motivé, l'interruption des travaux.

Le second alinéa du I de cet article punit d'un emprisonnement de six mois et d'une amende portée au double de celle prévue en cas de délit de coupe abusive le fait de continuer la coupe en violation d'une décision judiciaire ou administrative ordonnant son interruption.

La rédaction retenue par le projet de loi limitant ces sanctions, s'agissant de la violation d'une décision judiciaire, aux seuls cas où la condamnation est devenue définitive, risque toutefois de ne pas atteindre l'objectif fixé d'interrompre effectivement la coupe avant qu'il ne soit trop tard. Une telle formulation, qui impliquerait que tous les délais et recours auraient été épuisés, est en effet trop restrictive.

Le II du nouvel article L. 223-2 du code forestier rend caduc le plan simple de gestion applicable aux bois concernés par une coupe abusive, lorsqu'un propriétaire, condamné en application de l'article L. 223-1, n'a pas présenté dans les délais impartis par l'autorité administrative, un avenant à ce plan au centre régional de la propriété forestière.

Le III de l'article L. 223-2 prévoit enfin que l'autorité administrative, dans la pratique la direction départementale de l'agriculture et de la forêt, peut imposer à l'auteur sanctionné d'une coupe abusive la réalisation de travaux de reconstitution forestière. Cette injonction, prise après avis du centre régional de la propriété forestière, fixe les délais dans lesquels ces travaux doivent être effectués. Selon les informations communiquées à votre rapporteur, l'administration recherchera préalablement à la notification de l'injonction, à conclure un accord avec le propriétaire sur la nature et le calendrier des travaux à effectuer pour reconstituer les fonds parcourus par la coupe abusive. Dans le cas où aucun accord ne pourrait être trouvé, une reconstitution forestière à l'identique sera imposée.

Les sanctions aux manquements à ces obligations seront d'ordre contraventionnelle et seront prévues dans les décrets d'application de la loi.

La commission a rejeté l'amendement n° 109 de M. François Vannson. Elle a en revanche adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 322) simplifiant les conditions dans lesquelles une décision judiciaire d'interdiction d'une coupe abusive peut entraîner une aggravation des sanctions à l'encontre de celui qui l'enfreint. Puis elle a rejeté l'amendement n° 72 de M. Pierre Micaux.

Le paragraphe II de cet article du projet de loi remplace les dispositions actuelles de l'article L. 223-3 du code forestier, qui sont reprises et modifiées par ailleurs au nouvel article L. 223-1 (à l'article 19 du projet de loi).

Le premier alinéa du nouvel article L. 223-3 prévoit qu'est puni d'une amende de 8 000 francs par hectare exploité le fait de ne pas réaliser dans les délais impartis les opérations qui conditionnent l'exécution d'une coupe autorisée.

Ces travaux, qui ont un coût de l'ordre de 1 500 francs à 3 000 francs par hectare à entretenir, peuvent entraîner une dépense de 15 000 francs par hectare de coupe rase. Le montant maximum retenu pour l'amende est donc à la fois dissuasif et proportionné, d'autant plus que la condamnation éventuelle n'exonère pas de l'obligation de réalisation des travaux.

Le second alinéa de ce nouvel article L. 223-3 du code forestier prévoit qu'en cas de vente du terrain, s'il n'y a pas engagement de l'acheteur de prendre en charge le paiement des travaux de reconstitution obligatoire résultant d'une coupe réalisée avant la vente, le vendeur en reste redevable, comme des sanctions pénales, s'il entrave par son refus de verser les sommes dues, l'exécution des travaux de reconstitution dans les délais fixés.

La commission a rejeté l'amendement n° 110 de M. François Vannson. Elle a ensuite adopté deux amendements rédactionnels identiques, l'un du rapporteur (amendement n° 323), l'autre (n° 73) de M. François Vannson.

Le paragraphe III de cet article procède à une simple coordination, à l'article L. 223-4 du code forestier, pour tenir compte des nouvelles numérotations des articles de ce code, relatifs au régime applicable aux coupes abusives.

Le paragraphe IV de cet article procède de même, à l'article L. 223-5 du code forestier. Enfin, il abroge le deuxième alinéa de cet article, dont les dispositions sont désormais contenues et modifiées au III de l'article L. 223-2.

La commission a adopté l'article 20 ainsi modifié.

Article 21

Sanctions des coupes illicites

Cet article du projet de loi crée deux chapitres au sein du titre III du livre III du code forestier, consacrés aux peines relatives à la protection de tous bois et forêts.

Actuellement, ce titre, qui n'est pas divisé en chapitres, comporte huit articles, L. 331-1 à L. 331-8. Les articles L. 331-1 et L. 331-8 précités, qui portent sur des dispositions tombées en désuétude, sont abrogés par ailleurs au I de l'article 37 du projet de loi.

Le premier chapitre créé (chapitre 1er), intitulé « sanctions applicables aux infractions commises en forêt d'autrui », intègre sans les modifier les dispositions existantes restant en vigueur dans le titre III précité, soit les articles L. 331-2 à L. 331-7 du code forestier. Rappelons qu'il s'agit notamment de sanctionner de 60 000 francs d'amende la coupe ou l'enlèvement d'arbres dans la forêt d'un tiers propriétaire et de 25 000 francs d'amende les propriétaires d'animaux trouvés en délit dans les semis ou plantations de moins de dix ans.

Cet article du projet de loi insère par ailleurs un chapitre II dans le titre III, intitulé « sanctions applicables aux infractions commises par les propriétaires ou leurs ayants cause dans leurs propres forêts ».

Ce chapitre comporte deux articles nouveaux, L. 332-1 et L. 332-2.

L'article L. 332-1 punit d'une amende de 8 000 francs par hectare exploité le propriétaire qui ne prend pas, dans un délai de cinq ans à compter de la fin de l'exécution d'une coupe rase visée à l'article L. 9 du code forestier (créé à l'article 1er du projet de loi), et en l'absence d'une régénération ou reconstitution naturelle satisfaisante, les mesures nécessaires à la reconstitution de peuplements forestiers, conformes au document de gestion ou aux prescriptions imposées à l'occasion d'une autorisation administrative de coupe.

Il convient de relever que cette disposition, qui s'applique à toute forêt publique ou privée, est conforme au dispositif mis en place par le nouvel article L. 223-3 (à l'article 20 du projet de loi) pour les seules forêts privées, lorsque notamment les opérations qui conditionnent l'exécution d'une coupe autorisée ne sont pas exécutées dans le délai fixé.

La dernière phrase de l'article L. 332-1 précise que le tribunal peut ajourner le prononcé de la peine, dans les conditions prévues par les articles 132-66 à 132-70 du code pénal, relatifs à l'ajournement avec injonction. Dans ce cas, la juridiction qui ajourne le prononcé de la peine, peut enjoindre à la personne déclarée coupable de se conformer à des prescriptions et impartir un délai pour leur exécution. Cet ajournement avec injonction ne peut intervenir qu'une fois. A l'audience de renvoi et lorsque les prescriptions énumérées par l'injonction ont été exécutées dans le délai fixé, la juridiction peut, soit dispenser le coupable de peine, soit prononcer celle-ci.

Cette disposition permet donc d'offrir au propriétaire négligent une chance de se ressaisir pour remettre sa parcelle en valeur.

L'article L. 332-2, créé par le dernier alinéa de l'article 21 du projet de loi, sanctionne, dans toute forêt, le propriétaire et le bénéficiaire d'une coupe non autorisée de plus de cinq hectares, telle que définie à l'article L. 10 du code forestier, dans les forêts ne présentant pas l'une des caractéristiques de gestion durable mentionnées à l'article L. 8 (article 1er du projet de loi). Le fait de réaliser une telle coupe est puni des sanctions prévues à l'article L. 223-1 relatif aux coupes abusives dans les forêts privées (amende jusqu'à cinq fois la valeur des bois coupés, dans la limite d'un million de francs par hectare parcouru par la coupe), ainsi que des sanctions prévues au I de l'article L. 223-2 (saisie des matériaux et du matériel de chantier, d'une part, emprisonnement de six mois et amende portée au double en cas de poursuite d'une coupe en violation d'une décision administrative ou judiciaire, d'autre part).

La commission a adopté un amendement du rapporteur à la fin de cet article, rectifiant une erreur matérielle (amendement n° 324), puis l'article 21 ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 21

Relèvement du montant des amendes pour coupes illicites

La commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 325) portant article additionnel et harmonisant, à l'article L. 331-2 du code forestier, le montant de l'amende prévue avec celui retenu à l'article 311-3 du code pénal punissant le vol.

Article additionnel après l'article 21

Sanctions contre les enlèvements de liège

La commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 326) portant article additionnel afin d'étendre les dispositions de l'article L. 331-4 du code forestier aux enlèvements d'écorce de liège.

Après l'article 21

La commission a examiné un amendement de M. Jean Proriol tendant à utiliser les plans de chasse comme moyen d'assurer l'équilibre sylvo-cynégétique. M. François Vannson a insisté sur la nécessité de rechercher un tel équilibre. M. Joseph Parrenin a estimé que l'adoption de cet amendement risquait d'ouvrir la porte à une indemnisation incontrôlée des dégâts forestiers. M. Jean-Michel Marchand a souligné qu'il était possible de mesurer avec une certaine précision les taux de pression des gibiers sur les milieux naturels et d'évaluer les dégâts qui en résultaient. Considérant que les ressources financières existaient pour indemniser les victimes, il a déclaré qu'il voterait cet amendement dont il partageait les objectifs. M. Jean Proriol a indiqué qu'il avait beaucoup hésité avant de déposer cet amendement ; il a toutefois précisé que les problèmes qu'il soulevait étaient bien réels et rappelé qu'un régime d'indemnisation des dégâts de gibier existait en faveur du monde agricole.

Après l'intervention de M. Pierre Ducout, le rapporteur a rappelé qu'un amendement avait déjà été adopté à l'article 1er, définissant la notion d'équilibre sylvo-cynégétique, de même qu'à l'article 2 le terme de « gibier » avait été substitué à celui de « cervidé ». Il a également indiqué qu'il avait souhaité que, dans le projet de loi relatif à la chasse actuellement en discussion au Parlement, il soit prévu d'associer les intérêts forestiers à l'élaboration des plans de chasse. Considérant qu'il convenait de laisser à d'autres voies que celle de la loi le soin de régler les problèmes soulevés par l'amendement, il a émis un avis défavorable à son adoption. La commission a alors rejeté cet amendement.

Chapitre II

La protection et la stabilité des dunes

Article 22

Régimes de contrôle applicables aux dunes côtières
et aux dunes de mer du Pas-de-Calais

Le régime de contrôle des coupes de plantes aréneuses (plantes qui poussent dans le sable, du latin arena, sable) est essentiellement utilisé dans les départements côtiers situés au nord de la Bretagne. En revanche, les dunes côtières de l'Atlantique sont le plus souvent propriété de l'Etat ou du conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres et, de ce fait, mieux protégées contre les destructions de ces plantes conservatrices des dunes.

Cet article du projet de loi précise, plus qu'il ne modifie, le régime de contrôle applicable aux coupes des plantes aréneuses des dunes côtières (terres situées au-dessus du niveau de la mer) et le régime strictement conservatoire relatif aux dunes de mer (terres au-dessous du niveau de la mer, toutes situées dans le département du Pas-de-Calais et dont le rôle est assimilable à celui des digues des polders néerlandais).

S'agissant des dunes côtières, les modifications apportées au chapitre premier du titre III du livre IV du code forestier remanient le dispositif s'appliquant à la fixation des dunes, afin de conforter sa base juridique. Durant les dernières années, en effet, des contentieux ont mis en relief l'imprécision du régime en vigueur, qui a conduit à l'annulation de décisions d'autorisations de coupe prises par l'autorité administrative.

Le parti qui a été retenu est d'aligner, en tenant compte des spécificités des dunes et des plantes aréneuses, le dispositif s'appliquant aux dunes côtières sur celui du contrôle des défrichements forestiers.

Le I de cet article du projet de loi définit le régime de coupe des plantes aréneuses situées sur les dunes côtières et le II précise les sanctions applicables en cas d'infraction.

Le paragraphe I propose une nouvelle rédaction de l'article L. 431-2 du code forestier relatif aux coupes. Il est précisé tout d'abord que les coupes des plantes aréneuses des dunes côtières peuvent inclure des arbres épars, afin de tenir compte de la diversité des végétations existantes, et que le régime institué est exclusif de celui applicable aux défrichements sur le domaine forestier.

Comme dans le droit en vigueur, la nouvelle rédaction de l'article L. 431-2 pose le principe qu'aucune coupe de ces végétaux ne peut être pratiquée sans une autorisation préalable et spéciale de l'autorité administrative. Ce dernier terme vise le ministre chargé des forêts ou son délégataire.

Le principe qui demeure est celui de l'absence de motivation des autorisations. En revanche, le refus d'autorisation devra être motivé. Il ne pourra être fondé, comme actuellement, que sur des motifs liés au maintien des terres, à la défense du sol contre les érosions des cours d'eau et à la protection des dunes contre les érosions de la mer et les envahissements de sable. Deux motifs nouveaux de refus s'ajoutent à ceux-ci. L'un, qui est une adaptation du régime actuel, vise la défense de l'équilibre écologique d'une région ou d'un territoire en vue de la préservation des espèces, de l'écosystème ou du bien-être de la population. L'autre, nouveau, porte sur la protection des personnes et des biens contre les risques naturels.

Dorénavant, afin de mieux préserver l'équilibre naturel, l'autorité administrative disposera en outre du pouvoir discrétionnaire de subordonner son autorisation de coupe au respect de prescriptions spécifiques.

Tout d'abord, les coupes de plantes aréneuses sur les dunes ayant notamment pour objet de permettre la construction d'habitations sur le front de mer, l'autorisation de coupe pourra être subordonnée à la cession, au profit de l'Etat, d'une collectivité locale ou d'un établissement public tel que le conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, de dunes comparables d'une surface au moins égale à celle faisant l'objet de l'autorisation. Cette disposition vise clairement à empêcher l'extension de constructions mitoyennes qui barrent l'espace maritime et dégradent gravement les paysages.

En outre, l'autorisation de coupe pourra être assortie de l'obligation, pour le bénéficiaire, d'exécuter des travaux de restauration dans un secteur de dunes comparable et pour une superficie au moins équivalente à celle coupée, afin de maintenir globalement les surfaces de dunes préservées.

Le dernier alinéa de l'article L. 431-2 précise qu'un décret en Conseil d'Etat définira les formes, conditions et délais de délivrance des autorisations dont la durée est limitée à cinq ans. Selon les informations communiquées à votre rapporteur, l'absence de réponse à la demande, de la part de l'administration, au-delà d'une période qui ne devrait pas excéder quatre mois, emportera un accord tacite.

La commission a rejeté l'amendement n° 111 de M. Pierre Micaux.

Le paragraphe II de l'article 22 du projet de loi modifie la rédaction de l'article L. 431-3 du code forestier, consacré aux sanctions des infractions à la législation sur les coupes non autorisées de plantes aréneuses. Là encore, le régime applicable est aligné sur celui des défrichements. Sera notamment puni d'une amende de 1 000 francs par mètre carré de dune parcouru le fait de couper sans autorisation préalable et spéciale des plantes aréneuses, ainsi que le cas échéant les arbres épars, qui fixent les dunes côtières.

Le deuxième alinéa de l'article L. 431-3 dispose que les personnes physiques encourent également, en cas de coupes illicites sur les dunes, les peines complémentaires prévues à l'article L. 313-1-1 du code forestier (créé à l'article 12 du projet de loi) en cas de défrichement irrégulier. Il prévoit aussi que les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement des mêmes infractions.

Le dernier alinéa de cet article prévoit enfin l'extension à la législation sur les coupes des plantes aréneuses des dispositions des articles L. 313-3, L. 313-5 à L. 313-7 du code forestier relatives aux sanctions des défrichements illicites. Il s'agit notamment des sanctions pour absence de replantation, des modalités d'ordonnance d'interruption des travaux de coupe et des sanctions en cas de continuation de la coupe en violation de la décision de l'arrêté d'interdiction.

La commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 327) corrigeant, aux deux derniers alinéas de cet article du code forestier, deux erreurs matérielles.

Le paragraphe III de l'article 22 du projet de loi clarifie la rédaction de l'article L. 422-1 du code forestier, relatif aux dispositions spéciales aux dunes de mer du département du Pas-de-Calais.

Ces dunes, qui protègent des terrains situés en dessous du niveau de la mer, constituent un enjeu de sécurité particulier. C'est pourquoi demeure le principe, posé actuellement dans la rédaction en vigueur de l'article L. 432-1 du code forestier, de l'interdiction des fouilles dans ces dunes. Cette interdiction porte jusqu'à la distance de 200 mètres de la laisse de haute mer.

La nouvelle rédaction de cet article apporte les modifications suivantes :

- l'interdiction ne s'applique pas aux espaces urbanisés au sens de l'article L. 146-2 et suivants du code de l'urbanisme. Il s'agit ici d'harmoniser les dispositions du code forestier avec celles de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, qui organisent une exception au régime de protection des espaces littoraux ;

- les fouilles pratiquées malgré l'interdiction seront sanctionnées d'une amende de 1 000 francs par mètre carré fouillé. Ce régime est aligné sur celui des défrichements illicites ;

- enfin, une exception à l'interdiction des fouilles est instaurée dans le cas limitatif où le maintien ou la restauration de la dune l'exige.

Sur ce point, votre rapporteur considère qu'il importe que le propriétaire qui engage ces travaux de confortement puisse savoir préalablement si l'autorité administrative admet cette exception dans le cas d'espèce. C'est pourquoi, afin à la fois de garantir la sécurité juridique du propriétaire de la dune et d'éviter de mettre l'autorité administrative devant le fait accompli, la commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 328) proposant une nouvelle rédaction du premier alinéa de l'article L. 422-1.

La commission a ensuite adopté l'article 22 ainsi modifié.

chapitre III

Dispositions relatives à la police des forêts

Article 23

Adaptation de la police des forêts

Cet article précise notamment les compétences des ingénieurs, techniciens et agents de l'office national des forêts (ONF) en matière de constatation d'infractions. Il harmonise par ailleurs certaines dispositions du code forestier avec celles du nouveau code de procédure pénale.

Le paragraphe I, en complétant l'article L. 122-7 du code forestier habilitant les ingénieurs en service à l'ONF et les agents assermentés de cet établissement à constater certaines infractions, autorise désormais ceux-ci à relever les violations aux dispositions législatives et réglementaires en matière de protection de la nature et des paysages.

Le paragraphe II de l'article 23 du projet de loi, assouplit le dispositif de l'article L. 138-4 du code forestier qui confie actuellement aux seuls ingénieurs en service à l'ONF les compétences pour désigner les chemins de pâture et de panage et pour y indiquer les fossés à creuser.

Désormais, l'ONF désignera elle-même les agents qu'elle mandatera à cet effet. Selon les indications fournies à votre rapporteur, l'ONF devrait confier cette responsabilité aux techniciens qu'il emploie.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 329).

Le paragraphe III propose une nouvelle rédaction de l'article L. 231-2 du code forestier, relatif aux modalités de remise au procureur de la République des procès-verbaux dressés par les gardes particuliers, la rédaction actuelle ayant été rendue obsolète par l'entrée en vigueur du nouveau code de procédure pénale. Afin d'harmoniser le dispositif avec ce dernier code, les procès-verbaux dressés par les gardes particuliers, lesquels sont agréés et assermentés par l'autorité administrative, devront être désormais adressés, à peine de nullité, au procureur de la République dans les trois jours francs après leur établissement.

La commission a adopté deux amendements identiques, l'un du rapporteur et de M. Jean Proriol (amendement n° 330), l'autre de M. Pierre Micaux (n° 74), étendant à quinze jours le délai au cours duquel les procès-verbaux dressés par les gardes particuliers peuvent être transmis au procureur de la République.

Le paragraphe IV de cet article du projet de loi apporte quatre modifications à la rédaction de l'article L. 323-1 du code forestier :

- le 1° inclut les garrigues à la liste des espaces boisés visés au premier alinéa de cet article, s'agissant de la lutte contre les incendies, afin de mettre cette rédaction en cohérence avec les dispositions contenues au VIII de l'article 15 du projet de loi ;

- le 2° regroupe les troisième et quatrième alinéas en vigueur de l'article L. 323-1 précité et en simplifie la rédaction, s'agissant des personnes de l'Etat habilitées à constater les atteintes à la protection des forêts contre les incendies ;

- le 3° lève une ambiguïté sur les catégories de personnels de l'ONF habilités à constater les infractions affaiblissant la prévention et la lutte contre les incendies de forêts, en précisant qu'il s'agit des ingénieurs, techniciens et agents de l'office assermentés à cet effet ;

- le 4° ajoute les agents commissionnés des parcs nationaux et les gardes champêtres à la liste des personnes habilitées à constater les infractions précitées.

La commission a examiné un amendement de M. Claude Jacquot visant à étendre à l'ensemble de la France le régime des « brigades vertes » instauré en Alsace-Moselle. Après l'intervention de M. Patrice Carvalho et après que le rapporteur eut émis un avis défavorable, l'amendement a été retiré par son auteur.

Le paragraphe V de cet article du projet de loi, enfin, harmonise la rédaction de l'article L. 351-1 du code forestier, relatif au régime d'aggravation des sanctions encourues dans certaines conditions de réalisation des infractions, avec les dispositions du nouveau code pénal.

Ainsi, des dispositions des deux premiers alinéas de l'article précité du code forestier, n'est conservée que la mention du doublement de la peine lorsque les infractions sont commises la nuit.

Cette nouvelle modification ne modifie pas la réalité du dispositif existant pour ce qui concerne la récidive. En effet, le doublement de la peine en cas de récidive en matière correctionnelle est désormais prévu par l'article 132-10 du code pénal, lorsqu'une personne physique déjà condamnée définitivement pour un délit commet, dans le délai de cinq ans, soit le même délit, soit un délit qui lui est assimilé. Des dispositions similaires sont contenues à l'article 132-14 du code pénal, s'agissant des personnes morales. Il est à noter que, dans le cas des infractions au code forestier, le dernier alinéa de l'article L. 351-1 de ce code limite ce délai à douze mois. En revanche, la récidive est élargie à toute condamnation antérieure en matière forestière, quelle que soit l'infraction qui a motivé les poursuites pénales.

Il est par ailleurs mis fin au doublement de la peine lorsque les infractions en matière correctionnelle au code forestier auront été commises à l'aide d'engins mécaniques ou à moteur pour la coupe ou l'enlèvement des bois. Outre le fait que cette méthode de coupe ne constitue plus une exception, mais la règle, une telle disposition n'est plus nécessaire, du fait de l'accroissement sensible des maxima des peines encourues.

La suppression des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 351-1 du code forestier, qui traite de l'aggravation des peines en matière contraventionnelle, correspond au renvoi de leur contenu dans la partie réglementaire du code où elles doivent trouver leur place.

La commission a adopté l'article 23 ainsi modifié.

Chapitre IV

Dispositions particulières aux départements
d'outre-mer

Article 24

Dispositions applicables à la Guadeloupe,
à la Martinique et à la Réunion

Il convient tout d'abord de relever que si aucune disposition de cet article ne vise la Guyane, c'est parce que le régime de propriété forestière y est spécifique et qu'un projet de loi est en cours d'élaboration, portant code forestier de ce département d'outre-mer. Un code particulier y sera d'autant plus utile que la question forestière y est essentielle, en raison de l'importance des surfaces boisées de ce DOM.

Le paragraphe I de cet article complète le chapitre 1er, consacré aux départements de Guadeloupe et de Martinique, du titre VII relatif aux dispositions particulières aux DOM du livre 1er du code forestier, par un article nouveau L. 171-3, qui permet l'extension à ces deux départements des sanctions et mesures d'exécution forcée d'ores et déjà en vigueur à l'île de la Réunion, prévues à l'article L. 173-4 du code. Ces dispositions permettront de lutter plus efficacement contre les occupations illicites, le plus souvent accompagnées de défrichement, des bois et forêts de l'Etat et des collectivités. Ces occupations sont en effet relativement fréquentes aux Antilles et justifient que des moyens soient mis à la disposition des services de l'ONF, chargés de la protection de ces espaces.

Le paragraphe II de cet article du projet de loi, qui porte sur le chapitre III relatif à la Réunion du titre VII du livre 1er du code forestier, comporte cinq sections :

- le 1° complète, à l'article L. 173-4 du code forestier (désormais rendu applicable à la Guadeloupe et en Martinique, comme à la Réunion, par le I de cet article du projet de loi) les sanctions mises à la disposition des juges pour mieux dissuader les occupations illicites. Celles-ci, déjà punies d'une amende de 15 000 francs par hectare détruit, pourront désormais également entraîner la confiscation des récoltes, des outils et des installations situés sur les empiétements ;

- le 2° étend à l'ensemble des bois les sanctions d'amende prévues à l'encontre des propriétaires d'animaux trouvés en délit, dans les bois, forêts et terrains relevant à la Réunion du régime forestier ;

- la modification, au 3°, de l'article L. 343-1 du code forestier, a pour objet d'étendre au département de la Réunion les dispositions applicables en métropole, donnant compétence à l'administration chargée des forêts en matière de poursuites des infractions forestières sur les terrains, relevant du régime forestier, appartenant au département ou aux communes ;

- le 4° apporte, à l'article L. 363-2 du code forestier, une modification rédactionnelle qui tire les conséquences de la nouvelle numérotation du code rural intervenue en 1995 ;

- enfin, le 5° modifie la rédaction du quatrième alinéa de l'article L. 363-3 du code forestier afin de tenir compte de l'abrogation, au II de l'article 37 du projet de loi, du 3° de l'article L. 126-1 du code rural.

La commission a adopté l'article 24 sans modification.

TITRE V

MIEUX ORGANISER LES INSTITUTIONS
ET LES PROFESSIONS RELATIVES À LA FORÊT

Chapitre Ier

L'Office national des forêts

Héritier de l'administration des eaux et forêts, l'Office national des forêts (ONF) est un établissement public à caractère industriel commercial créé par la loi de finances rectificative pour 1964 n° 64-1278 du 23 décembre 1964.

L'Office national des forêts gère plus de quatre millions et demi d'hectares de forêts publiques en métropole et environ huit millions d'hectares outre-mer dont plus de sept millions et demi en Guyane.

Les forêts publiques gérées par l'ONF sont celles qui relèvent du régime forestier qui est un ensemble de normes spécifiques édictées pour l'essentiel par le livre premier du code forestier. C'est l'article L. 111-1 de ce même code qui définit le champ de ce régime forestier en disposant qu'il s'applique :

- aux forêts et terrains à boiser qui font partie du domaine de l'Etat, les forêts dites domaniales couvrant en métropole plus d'un million sept cent mille hectares ;

- par décision administrative, aux « bois et forêts susceptibles d'aménagement d'exploitation régulière ou de reconstitution et les terrains à boiser » appartenant à des collectivités territoriales, à des établissements publics, à des établissements d'utilité publique, à des sociétés mutualistes ou à des caisses d'épargne ;

- aux terrains reboisés par l'Etat pour le compte de leurs propriétaires tant que ces derniers restent débiteurs de l'Etat ;

- aux bois, forêts et terrains à boiser propriété d'un groupement forestier constitué dans un secteur de reboisement et propriétaire de terrains dont plus de la moitié de la surface lui a été apportée par les collectivités et personnes morales dont les bois sont susceptibles de relever du régime forestier.

L'établissement public intervient également comme prestataire de services pour réaliser, à la demande de propriétaires forestiers publics et privés et dans le cadre de conventions passées avec ceux-ci, des opérations en vue de la protection, de l'aménagement et du développement des ressources naturelles en particulier des bois et forêts.

L'Office contribue par exemple à la lutte contre les incendies de forêt dans le cadre de conventions conclues avec les départements. L'établissement encadre ainsi près de 900 forestiers-sapeurs, qui participent à la prévention et à la surveillance des départs de feu et à la lutte contre les incendies. L'Office encadre, en outre, dans le cadre d'une convention conclue avec l'Etat plus de 150 forestiers français de souche islamique rapatriés d'Afrique du Nord qui réalisent des travaux de protection de la forêt méditerranéenne contre l'incendie.

Compte tenu de l'importance des superficies qu'il gère, l'ONF constitue un acteur économique majeur sur le marché du bois français. Ainsi, les forêts relevant du régime forestier fournissent, en bois d'_uvre, plus de 50 % du chêne, 85 % de hêtre et 50 % du sapin-épicéa mis sur le marché. En 1998, les recettes des ventes de bois ont représenté pour les forêts domaniales, 1497 millions de francs dont 358 millions de francs pour les bois façonnés. Pour les forêts des collectivités, ces recettes se sont élevées à 1732 millions de francs dont 657 millions de francs pour les bois façonnés.

Article additionnel avant l'article 25

Substitution de l'expression « relèvent du régime forestier »
à l'expression « soumis au régime forestier »

La commission a adopté un amendement portant article additionnel du rapporteur substituant dans toutes les dispositions législatives l'expression « relèvent du régime forestier » à l'expression « soumis au régime forestier » et procédant par coordination à la même substitution pour les expressions voisines (amendement n° 331).

Article additionnel avant l'article 25

Coordination

La commission a adopté un amendement portant article additionnel du rapporteur supprimant dans le dernier alinéa de l'article L. 111-1 du code forestier une référence à l'article L. 243-3 de ce code que l'article 37 du projet de loi propose de supprimer (amendement n° 332).

Article additionnel avant l'article 25

Contrat de plan pluriannuel de l'ONF

La commission a adopté un amendement portant article additionnel du rapporteur complétant l'article L. 121-1 du code forestier pour instituer un contrat de plan pluriannuel conclu entre l'Etat et l'ONF et précisant les orientations de gestion et les programmes d'actions de cet établissement public ainsi que les moyens de mise en _uvre de ces actions (amendement n° 333). Son auteur a précisé qu'il s'agissait de consacrer dans la loi la pratique de la contractualisation en s'inspirant du dispositif existant pour La Poste et a estimé qu'il s'agissait d'une avancée importante.

Avant l'article 25

La commission a examiné un amendement portant article additionnel présenté par M. Jean-Michel Marchand et disposant, d'une part, que l'ONF est un établissement public national à caractère administratif et, d'autre part, que les décrets en Conseil d'Etat déterminent les conditions dans lesquelles cet établissement est regroupé avec les autres établissements publics chargés de l'espace naturel en une agence nationale de l'espace naturel. Son auteur a indiqué que cet amendement permettait de mettre l'accent sur la nécessaire exemplarité de l'ONF en l'identifiant comme le service public de la forêt plutôt que comme producteur de bois. Le rapporteur ayant précisé que tout en partageant largement les préoccupations de M. Jean-Michel Marchand, la rédaction de cet amendement ne lui semblait pas satisfaisante, l'ONF devant demeurer un établissement public industriel et commercial, la commission a rejeté cet amendement.

Article 25

(article L. 121-4 du code forestier)

Opérations confiées à l'ONF par convention

Cet article du projet de loi propose une nouvelle rédaction de l'article L. 121-4 du code forestier qui donne compétence à l'ONF pour accomplir certaines opérations dans le cadre de conventions passées avec des personnes publiques ou privées.

En premier lieu, il modifie et surtout complète la liste des finalités en vue desquelles ces opérations peuvent être entreprises par l'établissement public. En effet, dans la rédaction actuelle de l'article L. 121-4, ces opérations doivent viser la protection, l'aménagement et le développement des ressources naturelles, notamment des ressources forestières. Le projet de loi reprend cette formulation large en précisant toutefois que le développement visé doit être « durable ». Il l'explicite ensuite en évoquant également les objectifs :

- de prévention des risques naturels et des travaux de lutte contre ces risques  ;

- de protection, de réhabilitation, de surveillance et de mise en valeur des espaces naturels et des paysages ainsi que d'aménagement et de développement rural sous réserve que les opérations conduites à ces fins soit « concernent principalement les arbres, la forêt et les espaces naturels », soit participent au maintien de services publics dans les zones rurales fragiles.

Le premier de ces points, la prévention des risques naturels, constitue un domaine dans lequel l'ONF a acquis une véritable expertise en particulier en ce qui concerne la restauration des terrains en montagne pour lutter contre l'érosion et les phénomènes violents qu'elle peut entraîner et en matière de lutte contre l'incendie.

Le second point vise à élargir la compétence de l'établissement public dans une perspective d'intervention globale sur les espaces naturels. Il convient en effet de permettre à l'ONF de conduire des opérations comprenant des interventions sur des zones non boisées dans un souci d'aménagement d'ensemble.

La commission a rejeté l'amendement n° 112 de M. François Vannson ajoutant la conservation des ressources naturelles aux objectifs des opérations susceptibles d'être entreprises par l'ONF. La commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 334), puis un amendement de précision du même auteur scindant en deux alinéas le quatrième alinéa du I de cet article (amendement n° 335).

La commission a rejeté l'amendement n° 113 de M. Pierre Micaux ajoutant la conservation des espaces naturels et des paysages aux objectifs des opérations susceptibles d'être entreprises par l'ONF, puis elle a examiné un amendement de M. Jean Proriol disposant que la réalisation par l'ONF de certaines des opérations est soumise à l'avis de la chambre de l'agriculture et du Centre régional de la propriété forestière (CRPF) concernés. Son auteur a indiqué qu'il s'agissait de veiller à instaurer une meilleure coordination entre les principaux intervenants du secteur forestier et le rapporteur lui a répondu que des instances spécifiques existaient déjà pour permettre cette coordination. La commission a rejeté cet amendement.

L'article 25 du projet de loi crée en outre un second paragraphe complétant l'article L. 121-4 du code forestier et précisant le contenu des conventions passées entre une personne publique et l'ONF lorsque celui-ci agit au nom et pour le compte de cette personne publique. Il s'agit d'un dispositif dérogeant explicitement aux dispositions de l'article 3 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'_uvre privée. L'esprit général est de permettre aux personnes publiques de confier des prérogatives plus larges à l'ONF qu'à un prestataire de droit commun mais aussi d'expliciter ab initio aussi clairement que possible et sous peine de nullité le rôle exact de l'ONF.

Cette disposition vise notamment à permettre à l'ONF d'intervenir comme mandataire de collectivités. En effet, certaines collectivités, et en particulier de petites communes, ont besoin de bénéficier des services d'un partenaire unique chargé de concevoir et de mettre en _uvre un projet intégré y compris sur le plan financier. Ceci devra être fait dans un cadre précisément défini, garant, d'une part, des intérêts de ces collectivités qui seront en constant dialogue avec l'ONF via une commission de concertation (prévue à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 121-4), et, d'autre part, de la transparence des procédures notamment dans un souci de concurrence loyale avec le secteur privé.

La commission a adopté l'article 25 ainsi modifié.

Article 26

Élargissement du conseil d'administration de l'ONF

La composition du conseil d'administration de l'ONF est régie par l'article L. 122-1 du code forestier et par les articles R. 122-1 et suivants du même code pris pour son application.

L'article L. 122-1 prévoit que le conseil d'administration compte entre douze et vingt-quatre membres et comprend des représentants de l'Etat, des collectivités locales et des personnels ainsi que des personnalités qualifiées. Celles-ci doivent être choisies en fonction de « leur compétence particulière dans le domaine professionnel, technique, économique, scientifique ou social ».

L'article R. 122-1 du même code précise pour sa part que le conseil d'administration de l'établissement compte vingt-quatre membres dont :

- un représentant du Premier ministre ;

- un membre du Conseil d'Etat, de la Cour des comptes ou de l'inspection générale des finances ;

- deux représentants du ministre chargé de la forêt, à savoir : le directeur chargé des affaires financières et économiques et le directeur chargé des forêts, membre de droit ;

- trois représentants du ministre chargé des finances et du domaine, à savoir : le directeur du budget, le directeur de la comptabilité publique et le directeur général des impôts, membres de droit ;

- un représentant du ministre de l'intérieur, à savoir : le directeur général des collectivités locales, membre de droit ;

- un représentant du ministre chargé de l'aménagement du territoire, à savoir : le délégué à l'aménagement du territoire et à l'action régionale, membre de droit ;

- un représentant du ministre chargé de l'environnement, à savoir : le directeur chargé de la nature, membre de droit ;

- un représentant du ministre chargé de l'industrie ;

- trois représentants des collectivités et personnes morales autres que l'Etat, propriétaires de forêts relevant du régime forestier ;

- un représentant des collectivités publiques intéressées par l'utilisation de la forêt, et notamment des forêts suburbaines, à des fins touristiques ou sociales ;

- six représentants du personnel en service à l'office, choisis sur des listes de présentation établies par les organisations syndicales représentatives, dont un au moins appartenant au personnel ouvrier ;

- trois personnalités choisies en raison de leur compétence particulière dans les domaines professionnel, technique, économique, scientifique ou social.

L'article 26 du projet de loi vise à élargir davantage la composition du conseil d'administration en ajoutant la protection de la nature aux domaines dans lesquels une compétence particulière permet à une personnalité qualifiée de pouvoir être nommée.

La commission a adopté un amendement du rapporteur visant à porter à 28 le nombre maximal des membres du conseil d'administration de l'ONF qui est actuellement de 24 (amendement n° 336), après que son auteur eut indiqué que cela permettrait que le nécessaire élargissement de ce conseil, notamment à des représentants d'associations de protection de la nature, ne conduise pas à remettre en cause la diversité et l'équilibre actuels de celui-ci. M. Pierre Micaux a précisé qu'il souhaitait une présence plus importante d'élus et de responsables professionnels au sein de cette instance. Puis, la commission a examiné l'amendement n° 114 de M. François Vannson disposant qu'une ou des personnalités, choisies en raison de leurs compétences particulières dans le domaine de la protection du patrimoine, siégeaient au conseil d'administration de l'ONF. Son auteur a indiqué que la représentation des propriétaires forestiers lui semblait indispensable et le rapporteur a jugé que la rédaction de cet amendement pouvait être ambiguë et partiellement redondante avec la prise en compte de la compétence en matière de protection de la nature proposée par le projet de loi. La commission a en conséquence rejeté cet amendement et adopté l'article 26 ainsi modifié.

Article 27

Constatation par les agents assermentés de l'ONF des contraventions à certains arrêtés de police du maire

L'ONF dispose d'une présence exceptionnelle sur le territoire, en particulier dans des zones très rurales. Les agents de l'établissement public sont donc souvent présents sur le territoire de petites communes dont les moyens sont très modestes et ils peuvent y constater les infractions en matière forestière.

L'article 27 du projet de loi vise à leur permettre en outre de constater les contraventions à certains arrêtés de police municipale, une convention entre la commune concernée et l'ONF précisant les modalités financières de l'exercice de cette mission. Ainsi, une commune pourra, moyennant rémunération de l'ONF, faire participer les agents assermentés de celui-ci au contrôle du respect de certaines dispositions de police municipale.

Deux domaines voisins des compétences propres de l'ONF sont concernés. Il s'agit des dispositions de police municipale relatives, d'une part, à la prévention des incendies, des éboulements et des avalanches, et, d'autre part, à celles concernant la « divagation des animaux malfaisants et féroces ».

La commission a examiné un amendement de M. Patrice Carvalho tendant à supprimer le dernier alinéa de l'article 27, qui prévoit qu'une convention entre l'ONF et les communes concernées précise les modalités financières selon lesquelles des agents de cet établissement public seront susceptibles de constater les contraventions à certains arrêtés de police municipale. Son auteur a estimé que ces missions devaient être exercées à titre gratuit et que le dispositif proposé conduirait à créer une différence de traitement entre les communes selon leurs moyens. Le rapporteur a précisé qu'il ne s'agissait pas d'imposer de charges à des collectivités, puisque seules celles souhaitant bénéficier des services d'agents de l'ONF, souvent présents dans des zones rurales où les communes sont dépourvues de personnels, seraient concernées par ce dispositif. La commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 337), puis l'article 27 ainsi modifié.

Article 28

(article L. 123-2 du code forestier)

Répartition du bénéfice net de l'ONF

La répartition du bénéfice de l'ONF est actuellement régie par l'article L. 123-2 du code forestier qui prévoit que « l'autorité supérieure fixe, au vu des résultats de chaque exercice, la part des excédents qui, après affectation des sommes nécessaires aux investissements, sera versée au budget général de l'Etat. »

L'article 28 du projet de loi propose une nouvelle rédaction de cet article L. 123-2. Celle-ci vise tout d'abord à prévoir la constitution de réserves pour financer le cycle d'exploitation et les investissements. Elle précise également que cette affectation doit prendre en compte le niveau de la précision pour variation de conjoncture. Celle-ci s'élevait fin 1998 à 137,5 millions de francs.

Enfin et surtout, la nouvelle rédaction proposée de l'article L. 123-2 prévoit qu'une partie de la somme versée à l'Etat est affectée au financement de l'acquisition de forêts ou de terrains à boiser par celui-ci. Le Gouvernement manifeste ainsi son souci de reprendre une politique d'acquisition foncière publique en matière forestière.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article 29

Suppression de la possibilité pour l'ONF de conclure des conventions d'une durée de moins de dix ans avec des particuliers

L'article L. 224-6 du code forestier permet à l'ONF de se charger de la conservation et de la régie des bois des particuliers selon des conditions fixées contractuellement. Les contrats concernés doivent en principe avoir une durée d'au moins dix années.

Toutefois, la loi n° 91-5 du 3 janvier 1991 modifiant diverses dispositions intéressant l'agriculture et la forêt a complété cet article pour permettre dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat la conclusion de contrats d'une durée comprise entre cinq et dix ans.

C'est cette possibilité, qui n'est pas utilisée selon les informations que le Gouvernement a communiquées à votre rapporteur, que vise à supprimer l'article 29 du projet de loi.

La commission a adopté cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 29

Droit de pêche sur le domaine privé de l'Etat

La commission a adopté un amendement portant article additionnel du rapporteur disposant que le droit de pêche est exercé au profit de l'Etat sur son domaine privé et qu'il est ouvert aux membres des associations agréées de pêche et de pisciculture sur les cours d'eaux de ce domaine, y compris lorsqu'ils sont gérés par ses établissements publics (amendement n° 338). Son auteur a précisé qu'il s'agissait de mettre fin à certaines dérives de l'ONF qui ne prend parfois en compte qu'une perspective commerciale dans l'attribution des baux de pêche, alors qu'il convient de tenir compte de la gestion efficace et responsable de l'environnement par les associations agréées de pêche.

Après l'article 29

La commission a examiné un amendement portant article additionnel de M. Jean-Michel Marchand relatif aux ressources de l'ONF dont l'auteur a précisé qu'il visait à conforter le financement de la gestion multifonctionnelle de la forêt et a espéré que l'affectation d'écotaxes à ce financement serait prochainement envisagée. Le rapporteur a déclaré partager la préoccupation de M. Jean-Michel Marchand pour ce qui concerne les écotaxes, mais a jugé que cet amendement constituait en fait, pour une large partie, l'ébauche d'un contrat d'objectifs entre l'Etat et cet établissement public dont un de ses amendements consacrait l'existence mais dont le contenu ne lui semblait pas devoir être trop précisément encadré. La commission a rejeté cet amendement.

Chapitre II

Le rôle des centres régionaux de la propriété forestière
et des chambres d'agriculture

Article 30

Centres régionaux de la propriété forestière

Les centres régionaux de la propriété forestière ont été créés par la loi n° 63-810 du 6 août 1963 pour l'amélioration de la production et de la structure foncière des forêts françaises. Ce sont des établissements régis par les articles L. 221-1 à L. 221-7 du code forestier.

Les centres régionaux de la propriété forestière (CRPF) sont en principe compétents dans une région administrative. Certains couvrent toutefois deux régions (Haute Normandie et Basse Normandie, Nord-Pas-de-Calais et Picardie, Ile-de-France et Centre, Lorraine et Alsace) lorsqu'un tel regroupement est pertinent au regard notamment de l'importance de l'activité sylvicole.

Leur rôle, défini par l'article L. 221-1 du code forestier, est de « développer et orienter la production forestière » :

- en développant les formes de regroupement des propriétaires,

- en vulgarisant les méthodes de sylviculture,

- en participant à l'orientation de la production par l'élaboration des orientations régionales de production et par l'approbation des plans simples de gestion.

Ces missions sont adaptées par le paragraphe I de l'article 30 du projet de loi qui modifie l'article L. 221-1 du code forestier pour tenir compte d'une part, des fonctions environnementales et sociales de la forêt et, d'autre part, des nouveaux instruments d'orientation institués par l'article 1er du projet de loi. Elles sont également étendues, les CRPF se voient en effet plus généralement confié « l'encouragement à l'adoption des méthodes de sylviculture conduisant à une gestion durable des forêts et compatibles avec une bonne valorisation économique du bois et des autres produits et services des forêts » par, outre la vulgarisation sylvicole qui comptait déjà au nombre de leurs compétences, la formation des propriétaires forestiers et le développement sylvicole. Le projet de loi précise toutefois que cette compétence doit être exercée « à l'exclusion de tout acte de gestion directe, de maîtrise d'_uvre de travaux ou de commercialisation relevant du secteur marchand ». Cette précision vise à éviter toute confusion des rôles : les centres régionaux de la propriété forestière, établissements publics administratifs, n'ont pas de vocation marchande et ne doivent notamment pas concurrencer les experts forestiers.

Enfin, le projet de loi ajoute que chaque CRPF « concourt au développement durable et à l'aménagement rural pour ce qui concerne les forêts privées » reconnaissant ainsi le rôle incontestable de ces établissements dans ces domaines.

Les CRPF sont dirigés par des conseils d'administration constitués pour deux tiers par des personnes élues par les propriétaires et pour le tiers restant par des représentants des organisations professionnelles les plus représentatives de la forêt privée. En outre, le président de la chambre d'agriculture de la région dans laquelle le CRPF a son siège est de droit membre du conseil d'administration du centre.

Les personnes élues par les propriétaires forestiers le sont à l'heure actuelle par un collège constitué pour chaque département par les propriétaires de parcelles boisées d'une surface totale d'au moins quatre hectares sises sur le territoire de la même commune ou de communes limitrophes.

La commission a examiné l'amendement n° 34 de M. François Vannson précisant que, parmi les formes de regroupement des propriétaires que doivent encourager les CRPF, figurent les organismes de gestion en commun. Le rapporteur s'est déclaré très favorable à cet amendement et a d'ailleurs rappelé qu'il avait lui-même déposé plusieurs amendements visant à encourager le développement des organismes de gestion en commun. M. Pierre Ducout s'étant lui aussi déclaré favorable à cet amendement, la commission l'a adopté. En conséquence, l'amendement n° 75 de M. Pierre Micaux est devenu sans objet.

Elle a ensuite adopté un amendement du rapporteur précisant que la formation des propriétaires assurée par les CRPF peut être théorique et pratique (amendement n° 339), son auteur ayant indiqué qu'il entendait ainsi permettre l'intervention de ces établissements publics sur le terrain qui pourrait être remise en cause par une interprétation trop stricte de l'interdiction qui leur est faite d'exercer toute activité marchande.

La commission a ensuite examiné l'amendement n° 116, rédactionnel, de M. Pierre Micaux dont l'auteur a indiqué qu'il le retirerait après que le rapporteur lui eut indiqué qu'il présentait un amendement ayant le même objet. La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur, réglant la même difficulté que l'amendement précédent (amendement n° 340), puis deux autres amendements rédactionnels du même auteur (amendements n° 341 et 342).

Le paragraphe II de l'article 30 du projet de loi modifie l'article L. 221-3 du même code afin d'adapter la composition de ce collège pour prendre en compte dans le calcul de la surface totale possédée l'ensemble des parcelles boisées détenues dans le département et les communes limitrophes et non plus seulement sur le territoire d'une même commune ou de communes limitrophes. Il s'agit tout à la fois de simplifier l'organisation de ces élections et de démocratiser la désignation des membres des conseils d'administration des CRPF.

Le projet de loi ouvre en outre la possibilité au président de la chambre d'agriculture d'être suppléé par un autre membre élu de la chambre d'agriculture pour siéger au conseil d'administration d'un CRPF.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur portant sur ce paragraphe (amendements n° 343 et 344).

Enfin, dans son paragraphe III cet article modifie l'article L. 221-4 du code forestier pour prévoir qu'un décret en Conseil d'Etat fixe le statut de l'ensemble des personnels des CRPF, garantie dont ne disposent actuellement que les personnels techniques.

La commission a adopté l'article 30 ainsi modifié.

Après l'article 30

La commission a examiné l'amendement n° 125 de M.  François Vannson disposant que le commissaire du gouvernement placé auprès de chaque CRPF porte à la connaissance de celui-ci les informations nécessaires à l'application des législations mentionnées à l'article L. 11 du code forestier créé par le projet de loi. M. Pierre Micaux, cosignataire a indiqué que cet amendement serait retiré après que le rapporteur eut rappelé que la commission avait adopté un amendement à l'article 1 modifiant l'article L. 11 pour prévoir que l'information souhaitée par M. Pierre Micaux était assurée par les commissions régionales de la forêt et des produits forestiers.

Article 31

Rôle des chambres d'agriculture

Cet article insère à l'article L. 511-3 du code rural un alinéa consacrant le rôle joué par les chambres d'agriculture dans l'aménagement de l'espace rural et pour le développement de la filière forêt-bois, rôle que précise le IV de l'article 32.

La commission a adopté l'amendement n° 118 de M. Pierre Micaux précisant que le développement de la filière forêt-bois auquel contribuent les chambres d'agriculture doit être durable puis l'article 31 ainsi modifié.

Article 32

Modalités de financement des centres régionaux de la propriété forestière et du centre national professionnel de la propriété forestière
et programme pluriannuel d'actions en matière forestière
des chambres d'agriculture

Conformément à l'article L. 221-6 du code forestier, les CRPF étaient financés par un prélèvement sur les recettes du fonds forestier national et par une cotisation versée par les chambres d'agriculture par l'intermédiaire du Fonds national de péréquation et d'action professionnelle des chambres d'agriculture.

L'article 32 du projet de loi tire les conséquences de la suppression du Fonds forestier national (FFN) et modifie en conséquence l'article L. 221-6 du code forestier. Il prévoit qu'un financement par l'Etat des centres régionaux de la propriété forestière, d'une part, et du Centre national professionnel de la propriété forestière (CNPPF) créé par le projet de loi, d'autre part, se substitue au prélèvement sur les recettes du FFN. Il prévoit également que la cotisation versée par les chambres d'agricultures finance également le nouveau CNPPF.

La cotisation versée par les chambres d'agriculture s'élève, conformément à l'article L. 221-6 du code forestier, à 50 % du produit des taxes que celles-ci perçoivent sur les immeubles classés au cadastre en nature de bois. Le projet de loi prévoit qu'en contrepartie de la part de ce produit qu'elles conservent, les chambres d'agriculture doivent mettre en _uvre un programme pluriannuel d'actions en matière forestière coordonné avec les orientations retenues pour les forêts publiques et privées et précise les modalités d'élaboration de ce programme ainsi que les domaines sur lesquels il doit porter.

La commission a adopté trois amendements rédactionnels du rapporteur (amendement nos 345, 346 et 347) puis un amendement du même auteur précisant que le programme pluriannuel d'actions des chambres d'agriculture doit être approuvé par des représentants des collectivités concernées plutôt que par ces collectivités (amendement n° 348). La commission a ensuite adopté quatre amendements rédactionnels du même auteur (amendements nos 349, 350, 351 et 352) et l'article 32 ainsi modifié.

Chapitre III

Le centre national professionnel de la propriété forestière

Article 33

Centre national professionnel de la propriété forestière

Cet article vise à créer un centre national professionnel de la propriété forestière (CNPPF) et à lui confier les attributions actuellement exercées, d'une part, par l'Association nationale des centres régionaux de la propriété forestière (ANCRPF) et, d'autre part, par la Commission nationale professionnelle de la propriété forestière.

En effet, les CRPF sont à l'heure actuelle rassemblés au sein de l'ANCRPF, association régie par la loi de 1901, qui les représente au niveau national et qui réalise pour leur compte dans un souci d'efficacité et de coordination des missions d'utilité commune telles que une fonction de conseil juridique ou d'assistance à la gestion des personnels.

Par ailleurs, conformément à l'article L. 221-8 du code forestier une commission nationale professionnelle de la propreté forestière, constituée de représentants de chacun des CRPF est obligatoirement consultée sur les projets d'orientations régionales de production, sur les recours formés auprès du ministre chargé des forêts par des propriétaires contre des décisions des CRPF ainsi que sur les délibérations de ceux-ci que le commissaire du gouvernement placé auprès d'eux estime contraire à la loi. Cette commission est également compétente pour donner au ministre un avis sur toutes les questions concernant les attributions et le fonctionnement des CRPF.

Cette dualité de structures ne se justifiant pas, le projet de loi propose de confier l'ensemble de ces missions à un CNPPF qu'il crée.

Cet article modifie en conséquence l'intitulé de la section VI du chapitre Ier du livre II du code rural, consacrée à la commission nationale professionnelle de la propriété forestière, au sein de laquelle il propose d'introduire les dispositions relatives au CNPPF.

C'est l'objet du paragraphe I de cet article qui vise à adopter une nouvelle rédaction consacrée au nouveau CNPPF de l'article L. 221-8 du code forestier qui, dans sa rédaction actuelle, institue la commission nationale professionnelle de la propriété forestière.

Ce projet de loi indique que la structure ainsi créée sera un établissement public à caractère administratif puis précise ses missions que les modalités de fonctionnement et en particulier la composition de son conseil d'administration.

En ce qui concerne les compétences du CNPPF, le projet de loi prévoit que celui-ci assurera tout d'abord les missions dévolues à l'heure actuelle à la commission nationale professionnelle de la propriété forestière. Il sera donc chargé de donner au ministre chargé des forêts un avis sur les questions concernant les attributions, le fonctionnement et les décisions des CRPF.

Le CNPPF sera également chargé de jouer le rôle actuellement assumé par l'ANCRPF :

- en gérant des services communs pour le compte des CRPF, en leur apportant un appui technique et administratif et en coordonnant leur action ;

- en participant à l'application du statut des personnels et

- en contribuant au rassemblement de données concernant la forêt privée.

Le CNPPF donnera également un avis sur la répartition des ressources destinées à son financement et à celui des CRPF. Celles-ci seront, conformément à l'article L. 221-6, constituées d'une dotation de l'Etat et des versements du Fonds national de péréquation et d'action professionnelle des chambres d'agriculture et le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur qu'il souhaitait qu'elles fassent l'objet d'un versement global au CNPPF, celui-ci étant ensuite chargé dans le cadre d'une convention passée avec l'Etat d'en répartir le montant entre les différents CRPF.

La commission a examiné un amendement de M. Jean-Michel Marchand plaçant le centre national professionnel de la propriété forestière (CNPPF) sous la double tutelle du ministre chargé des forêts et du ministre chargé de l'environnement. Le rapporteur a estimé qu'il était important que le ministère de l'environnement s'implique dans la politique forestière mais après avoir rappelé qu'il avait lui-même déposé des amendements en ce sens, il a estimé que celui-ci n'était pas opportun. M. Joseph Parrenin a ajouté que les activités forestières et agricoles étaient très liées et que le rattachement du CNPPF à un autre ministre que celui de l'agriculture constituait un acte politique auquel il était opposé. M. Jean-Michel Marchand a jugé que la forêt constituait un domaine où les considérations environnementales sont particulièrement présentes justifiant ainsi cette double tutelle. Après que M. Patrice Carvalho eut répondu que l'on pouvait en dire autant de la plupart des secteurs d'activités, la préoccupation environnementale étant transversale, la commission a rejeté cet amendement.

Elle a ensuite rejeté un amendement de M. Jean Proriol précisant que le concours apporté par le CNPPF à la création et à la gestion de services communs aux CRPF pouvait être réalisé en recourant, le cas échéant par convention, à des organismes qualifiés après que le rapporteur eut estimé que, permise par le droit commun, cette possibilité n'avait pas à être précisée.

Puis, la commission a adopté un amendement du rapporteur précisant que le CNPPF veille notamment à permettre la mobilité de son personnel et de celui des CRPF (amendement n° 353) dont l'auteur a indiqué qu'il ne s'agissait que d'ouvrir une possibilité, d'ailleurs souhaitée par les organisations syndicales des personnels, et non de créer une obligation. Puis la commission a rejeté un amendement de M. Jean Proriol précisant que le CNPPF contribue au rassemblement des données concernant la forêt privée soit par lui-même, soit en liaison avec des organismes qualifiés.

Elle a ensuite examiné un amendement de M. Patrice Carvalho disposant que des représentants des organisations syndicales représentatives au plan national siégeraient au conseil d'administration du CNPPF. Son auteur a expliqué que cet amendement lui semblait relever d'un souci démocratique élémentaire compte tenu du rôle reconnu au CNPPF en matière d'application du statut des personnels. Le rapporteur s'est déclaré vivement favorable à cet amendement dont il a toutefois souhaité qu'il soit précisé. A cette fin, il a proposé à son auteur d'indiquer qu'il s'agirait d'un ou plusieurs représentants des organisations syndicales du personnel représentatives au plan national. M. Patrice Carvalho ayant accepté de rectifier son amendement comme proposé, la commission a adopté cet amendement ainsi modifié (amendement n° 354).

Puis elle a adopté deux amendements identiques, le premier du rapporteur et le second de M. Jean Proriol disposant que le président de l'assemblée permanente des chambres d'agriculture peut se faire suppléer au conseil d'administration du CNPPF (amendement n° 355). Elle a ensuite adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos356 et 357).

Le paragraphe II de cet article crée dans la même section un article L. 221-9 précisant que le statut applicable aux personnels du CNPPF est celui prévu pour les personnels des CRPF.

Les paragraphes III et IV organisent le transfert pour le premier des personnels et pour le second des biens de l'ANCRPF au CNPPF.

Enfin, le paragraphe V substitue, dans toutes les dispositions, la référence au CNPPF à celles faites à la commission nationale professionnelle de la propriété forestière.

La commission a adopté l'article 33 ainsi modifié.

Chapitre IV

Organisation de la profession d'expert foncier et agricole
et d'expert forestier

Article 34

(article L. 171-1 [nouveau] du code rural)

Organisation de la profession d'expert foncier et agricole
et d'expert forestier

Cet article crée dans le livre 1er du code rural, un titre VII comprenant un article L. 171-1 relatif à la profession d'expert foncier et agricole et d'expert forestier. Celle-ci est actuellement régie par la loi n° 72-565 du 5 juillet 1972 portant réglementation des professions d'expert agricole et foncier et d'expert forestier dont le projet de loi reprend de nombreuses dispositions.

Il s'agit d'une profession dont l'exercice est libre. En revanche, l'utilisation du titre d'expert agricole et foncier ou de celui d'expert forestier est réglementée. Il est nécessaire d'être inscrit sur une liste dont on peut être radié pour pouvoir faire usage de ces titres.

La principale modification proposée par l'article 34 du présent projet, outre l'insertion dans le code rural des dispositions relatives aux experts, concerne les modalités d'établissement et de gestion de cette liste. Le projet de loi institue en effet un Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière chargé d'établir cette liste, tâche jusqu'alors accomplie par l'administration en étroite concertation avec les professionnels concernés. Le projet de loi consacre ainsi la capacité des experts à gérer leur profession en veillant à l'indépendance de ceux qui l'exercent.

Tout le dispositif vise en effet à rassembler les conditions de cette indépendance. Les incompatibilités prévues par la loi du 5 juillet 1972 sont ainsi reprises et précisées par le projet de loi. Celui-ci charge en outre le Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière d'assurer le respect des devoirs professionnels des experts, devoirs qui seront définis par un décret en Conseil d'Etat. Le conseil constituera d'ailleurs l'instance disciplinaire de la profession en disposant d'un pouvoir de sanction, jusqu'alors confié à l'administration, pouvant aller jusqu'à la radiation de la liste.

Le projet de loi précise également que l'inscription sur la liste des experts nécessitera, outre des conditions de capacité professionnelle déjà prévues par la loi du 5 juillet 1972 et qui sont précisées, une assurance contre les conséquences pécuniaires de leur responsabilité civile et professionnelle ainsi qu'un engagement à respecter l'indépendance nécessaire à l'exercice de la profession.

Enfin, afin de permettre la mise en place du nouveau Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière, le projet de loi prévoit que les dispositions du présent article entreront en vigueur le premier jour du sixième mois suivant la publication du décret en Conseil d'Etat prévu pour son application.

Lors de l'examen en commission, le rapporteur a indiqué que la modernisation des dispositions régissant la profession d'expert foncier et agricole et d'expert forestier constituait un chapitre important de ce projet de loi pour lequel le Gouvernement s'était largement inspiré des propositions de M. Jean Proriol chargé, dans le cadre du groupe d'études de l'Assemblée nationale sur la forêt et le bois, de travailler sur cette question.

La commission a examiné un amendement du rapporteur étendant aux professions consistant à acquérir de façon habituelle des biens mobiliers en vue de leur revente les activités incompatibles avec la profession d'expert foncier et agricole et d'expert forestier. Son auteur a précisé qu'il s'agissait de renforcer les garanties d'indépendance de ces professionnels comme ils le souhaitaient eux-mêmes. M. Jean Proriol, dont un amendement similaire est devenu sans objet, s'est associé à cet amendement que la commission a adopté (amendement n° 358).

La commission a ensuite examiné un amendement de M. Jean Proriol proposant une nouvelle rédaction du troisième alinéa de l'article L. 171-1 du code rural créé par le projet de loi relatif à la composition du Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière et prévoyant notamment que ce Conseil est présidé par un représentant des experts siégeant en son sein. M. Jean Proriol a indiqué que la rédaction qu'il proposait résultait d'une large concertation. Après que le rapporteur eut exprimé son accord avec cet amendement et que M. Joseph Parrenin eut au contraire estimé qu'il n'était pas opportun de revenir sur le fait que ce Conseil soit présidé par un membre du Conseil d'Etat comme le prévoit le projet de loi, ce qui constitue une garantie de neutralité, la commission a adopté cet amendement (amendement n° 359). En conséquence, l'amendement n° 119 de M. François Vannson et l'amendement n° 120 de M. Pierre Micaux sont devenus sans objet.

La commission a ensuite adopté un amendement rédactionnel de M. Jean Proriol (amendement n° 360) puis elle a examiné un autre amendement du même auteur prévoyant que le Conseil national de l'expertise foncière, agricole et forestière est assisté et présidé par un membre du Conseil d'Etat lorsqu'il siège en matière disciplinaire. Le rapporteur a exprimé son accord avec cet amendement mais a souhaité que son auteur accepte de le rectifier en estimant qu'il n'était pas nécessaire de préciser que le Conseil est assisté par le magistrat le présidant. M. Jean Proriol ayant accepté cette modification, la commission a adopté l'amendement ainsi rédigé (amendement n° 361). Elle a ensuite adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements nos 362 et 363) puis l'article 34 ainsi modifié.

Chapitre V

Dispositions relatives à la recherche forestière

La commission a examiné deux amendements relatifs à l'intitulé du chapitre V du projet de loi. Le premier, présenté par M. Claude Jacquot, propose d'intituler ce chapitre : « Dispositions relatives à la recherche dans la filière forêt-bois » et le second, présenté par M. Jean-Michel Marchand, « Dispositions relatives à la formation et à la recherche forestière ».

M. Claude Jacquot a expliqué que la nouvelle rédaction de l'intitulé qu'il proposait visait à mettre en évidence l'importance d'une recherche s'intéressant à l'ensemble de la filière pour éviter tout cloisonnement entre la recherche sylvicole et la recherche sur le bois et ses dérivés. Le rapporteur a déclaré partager la préoccupation importante animant l'amendement de M. Claude Jacquot mais a souhaité que son auteur accepte de le modifier pour retenir comme intitulé du chapitre : « Dispositions relatives à la recherche sur la forêt et le bois ».

M. Jean-Michel Marchand a indiqué que son amendement permettait de mettre l'accent sur la formation importante pour l'ensemble de la filière et négligée par le projet de loi. Le rapporteur lui a répondu que la formation lui semblait en effet un sujet essentiel mais qu'il fallait bien la distinguer de la recherche. Il a ajouté réfléchir à des dispositions susceptibles d'enrichir le projet de loi sur ce point. M. Jean-Michel Marchand a jugé qu'il faudrait bien intégrer dans un chapitre du projet de loi d'éventuelles dispositions nouvelles sur la formation, ce qui justifiait son amendement.

M. Claude Jacquot ayant accepté de rectifier son amendement, comme le souhaitait le rapporteur, la commission a adopté son amendement ainsi rectifié (amendement n° 364). En conséquence, l'amendement de M. Jean-Michel Marchand est devenu sans objet.

Article 35

(article L. 521-3 (nouveau) du code forestier)

Principes et missions de la recherche en matière forestière

Cet article du projet de loi modifie l'intitulé actuel (« Inventaire forestier ») du titre II du livre V du code forestier, qui devient « Inventaire forestier et recherche en matière forestière » et il y introduit l'article L. 521-3 relatif précisément à la recherche en matière forestière.

La commission a rejeté un amendement de. Jean-Michel Marchand visant à modifier l'intitulé du titre II du livre V du code forestier pour inclure dans celui-ci la formation. Puis elle a adopté un amendement de M. Claude Jacquot rectifié modifiant cet intitulé par coordination avec le nouvel intitulé du chapitre V du projet de loi après que son auteur eut accepté de lui apporter la même modification que celle réalisée à son amendement portant sur l'intitulé de ce chapitre (amendement n° 365).

La création, au sein du code forestier, d'un article L. 521-3 consacré à la recherche forestière, constitue une innovation. En effet, aucune disposition législative ne figure actuellement dans le code forestier sur la recherche ; la loi n° 99-574 d'orientation agricole du 9 juillet 1999 a pallié une insuffisance similaire du code rural en y introduisant un titre spécifique à la recherche agronomique et vétérinaire, comportant l'article unique L. 830-1.

La recherche en matière forestière est donc simplement régie par la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France.

L'article 35 du projet de loi donne pour la première fois une existence législative à la recherche en matière forestière. Il s'est d'ailleurs largement inspiré de l'article L. 830-1 du code rural cité plus haut.

Il permet de reconnaître l'importance de la recherche dans le secteur forestier et notamment son rôle fondamental pour l'ensemble de la filière du bois. La recherche est en effet essentielle pour bien positionner le bois français sur un marché où, d'une part, la concurrence avec les produits étrangers est forte et où, d'autre part, l'utilisation du bois est concurrencée par celle d'autres matériaux. Elle est également indispensable pour promouvoir la multifonctionnalité de la forêt et sa gestion durable.

Cet article est d'une rédaction très générale, compte tenu du caractère spécifique de la recherche qui se prête mal à des dispositions autres que d'orientation. Il fixe les missions de la recherche en matière forestière ainsi que le rôle des différents intervenants.

Dans son premier alinéa, il définit les objectifs assignés à la recherche en matière forestière, dans une perspective multifonctionnelle. Celle-ci doit donc répondre à des préoccupations de développement durable, en concourant à la « gestion durable des forêts ». Elle a également un objectif de performance, puisqu'« elle concourt au renforcement de la filière de production, de récolte et de valorisation des produits forestiers ». Elle a enfin pour mission de satisfaire les « demandes sociales ». Il est précisé que le développement de la recherche fondamentale contribue à ces missions.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand disposant qu'en matière forestière la formation concourt aux mêmes objectifs que la recherche. Elle a ensuite examiné un amendement de M. Claude Jacquot ajoutant la valorisation du matériau bois aux objectifs de la recherche. Le rapporteur a présenté un sous-amendement à cet amendement visant à retenir l'expression de « produits dérivés du bois » au lieu de celle de « matériau bois », que la commission a adopté après accord de M. Claude Jacquot, puis elle a adopté l'amendement de M. Claude Jacquot ainsi modifié (amendement n° 366).

Elle a ensuite adopté un amendement du même auteur mentionnant la recherche appliquée (amendement n° 367).

Le deuxième alinéa de cet article recense les intervenants de la recherche en matière forestière, en distinguant les acteurs publics et ceux liés aux professions des secteurs du bois et de la forêt. Les premiers « conduisent » la recherche. Il s'agit des organismes publics de recherche, comme l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), le Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et forêts (CEMAGREF) ou encore le Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Sont également visés les établissements supérieurs, comme l'Ecole nationale du génie rural, des eaux et des forêts (ENGREF) et plus largement l'ensemble des laboratoires d'enseignement et de recherche.

Les intervenants liés aux professions peuvent concourir à la recherche forestière. Il s'agit des instituts et centres techniques, comme l'Association forêt cellulose (AFOCEL), les centres techniques du bois et de l'ameublement (CTBA), mais aussi les centres techniques du textile ou les centres techniques du papier de manière plus ponctuelle. Ces structures ont des formes juridiques diverses mais ont pour point commun d'être créées ou majoritairement financées par les professions du bois et de la forêt.

La commission a adopté un amendement de M. Claude Jacquot proposant une nouvelle rédaction de cet alinéa énonçant que la recherche en matière forestière est conduite dans les organismes publics et privés et que les instituts et centres techniques liés aux professions y concourent (amendement n° 368).

Le troisième alinéa de cet article précise que le ministre chargé de la recherche et le ministre chargé des forêts définissent conjointement les modes de coordination des programmes et des organismes de recherche concernant la forêt, le bois et le papier. Cette disposition constitue une réelle nouveauté qui devrait permettre de remédier à l'éclatement de la recherche en matière forestière.

En 1997, avaient été recensés par le ministère de l'agriculture et de la pêche, 26 laboratoires dont 23 appartenant au secteur public ou privé collectif et 3 au secteur industriel privé. Ces laboratoires regroupaient 92 chercheurs ou ingénieurs et 98 enseignants-chercheurs. Compte tenu de la dispersion, tant géographique que thématique des différentes unités de recherche, la définition coordonnée de programmes entre ministère chargé des forêts et ministère chargé de la recherche devrait permettre d'établir des lignes directrices aux travaux des chercheurs (par exemple, en termes de peuplements forestiers prioritaires, de lutte contre les parasites ou encore de développement durable), en évitant les redondances inutiles entre laboratoires.

Notons qu'il est précisé, dans un souci d'exhaustivité, que cette coordination concerne la forêt, le bois et le papier. Il s'agit donc de l'écosystème et du matériau lui-même, le cas particulier du papier étant mentionné car la structure bois disparaît lors de la transformation.

Le même alinéa prévoit en outre que dans le cadre d'une coordination conjointe des programmes de recherche, les ministres chargés respectivement de la recherche et des forêts veillent à l'adaptation des recherches entreprises aux objectifs de la politique forestière ; il leur revient également de veiller à ce que les spécificités forestières soient prises en compte, notamment au regard de la durée dans les procédures de programmation et de financement. En effet, la recherche en matière forestière est caractérisée par la durée des programmes entrepris par rapport aux activités de recherche dans d'autres secteurs qui peuvent être beaucoup plus rapides.

La commission a examiné en discussion commune trois amendements. Le premier présenté par M. Jean-Michel Marchand disposant que le ministre chargé de l'éducation nationale, le ministre chargé de l'environnement, le ministre chargé de la forêt et le ministre chargé de la recherche veillent conjointement à la coordination en matière de recherche et de formation dans le domaine forestier. Le second présenté par M. Claude Jacquot disposant que le ministre chargé de l'industrie participe à la coordination de la recherche forestière conjointement avec les ministres chargés de la recherche et de la forêt et le troisième du rapporteur disposant que la définition des modes de coordination doit être réalisée en association avec le Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois.

Le rapporteur a indiqué que, dans le domaine de la recherche, une coordination collégiale lui semblait indispensable et que celle-ci devait associer les ministres chargés de l'environnement et de l'industrie ainsi que l'ensemble des acteurs de la filière. Il a donc proposé de sous-amender l'amendement de M. Claude Jacquot pour ajouter le ministre chargé de l'environnement à ceux dont cet amendement prévoit l'intervention et pour prévoir, comme le faisait son amendement, l'association du Conseil supérieur de la forêt, des produits forestiers et de la transformation du bois. M. Jean-Michel Marchand a déclaré se rallier à cette rédaction et a, en conséquence, retiré son amendement.

Après que M. Pierre Ducout eut indiqué partager l'analyse du rapporteur et précisé que la collégialité que celui-ci souhaitait était d'ores et déjà pratiquée dans certaines régions, la commission a adopté les deux sous-amendements du rapporteur puis l'amendement de M. Claude Jacquot ainsi modifié (amendement n° 369). L'amendement du rapporteur est en conséquence devenu sans objet.

Le nouvel article L. 521-3 précise ensuite, dans son quatrième alinéa, la mission d'expertise technique reconnue aux organismes publics de recherche, qui doivent ainsi mettre leurs capacités au service des pouvoirs publics de manière permanente, notamment dans le domaine de la gestion durable des forêts métropolitaines et d'outre-mer. Cette distinction entre deux types de forêts s'explique par des différences à la fois climatologiques et relatives aux essences forestières. Les organismes publics de recherche ont ainsi, outre leurs fonctions traditionnelles, un rôle d'aide à la décision publique.

Cet article prévoit enfin, dans son cinquième alinéa, que les résultats obtenus par les organismes de recherche en matière forestière font l'objet d'une évaluation périodique, en ce qui concerne les personnels, les équipes et les programmes. Cette évaluation sera menée par l'Etat pour les organismes publics ainsi que pour ceux ayant mené des programmes ayant fait l'objet de concours de l'Etat. Cette évaluation devrait ainsi permettre de vérifier la cohérence d'ensemble du système de recherche en matière forestière et son adaptation à la politique forestière.

La commission a rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand précisant par coordination avec ses autres amendements que l'évaluation concerne également la formation. Elle a ensuite adopté un amendement rectifié de M. Claude Jacquot précisant par coordination avec le nouvel intitulé retenu pour le chapitre V du projet de loi que l'évaluation porte sur la recherche sur la forêt et le bois, cette dénomination ayant été retenue à la demande du rapporteur par cohérence avec celle apportée aux amendements du même auteur à cet article (amendement n° 370).

La commission a ensuite rejeté un amendement de M. Jean-Michel Marchand visant à créer un Institut national de la forêt chargé de coordonner l'ensemble des formations en matière forestière.

Puis elle a adopté l'article 35 ainsi modifié.

Après l'article 35

La commission a examiné un amendement de M. Claude Jacquot tendant à créer un Conseil de la recherche sur la forêt et les produits forestiers afin de coordonner celle-ci. Le rapporteur ayant jugé que cette coordination était favorisée par les dispositions retenues à l'article 35, en particulier par l'association du Conseil supérieur de la forêt, des produits forestier et de la transformation du bois, M. Claude Jacquot a retiré cet amendement.

TITRE VI

DISPOSITIONS DIVERSES

Article additionnel avant l'article 36

Perception des aides publiques pour le compte des propriétaires
par les organismes agréés de maîtrise d'ouvrage

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel disposant qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les conditions dans lesquelles des organismes agréés assurant la maîtrise d'ouvrage de travaux ou d'opérations de gestion forestière concernant les forêts privées réalisées de façon collective ou regroupée peuvent percevoir les aides publiques auxquelles ces travaux ou opérations ont donné lieu au nom et pour le compte des propriétaires devant en bénéficier (amendement n° 371).

Article 36

Modifications

L'article 36 du projet de loi opère des modifications liées pour la plupart d'entre elles aux autres dispositions du projet de loi.

Le paragraphe I a ainsi pour objet de remplacer la dénomination d'orientation régionale de production par celle, retenue à l'article 1er, d'orientation régionale de gestion sylvicole.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur (amendements n° 372 et 373).

Le paragraphe II vise à procéder à deux modifications. La première tire les conséquences de la modification du régime des droits de mutation des immeubles par l'article 39 de la loi de finances pour 1999 n° 98-1266 du 30 décembre 1998. En effet, la diminution générale des droits de mutation à titre onéreux a rendu obsolète le régime préférentiel existant pour les bois et forêts sous réserve d'un engagement de leur propriétaire, ce régime étant devenu moins favorable que le droit commun. Le présent projet supprime donc une référence à ce régime préférentiel dans l'article L. 222-3 du code forestier. La loi de finances pour 1999 a, d'autre part, déplacé les dispositions relatives au régime préférentiel concernant les droits de mutation à titre gratuit des bois et forêt prévues par l'article 703 du code général des impôts, abrogé. Ces dispositions figurent désormais à l'article 793 du même code. Le présent projet modifie en conséquence la référence qui leur est faite dans l'article L. 222-3 du code forestier.

La seconde modification proposée par ce paragraphe ramène de cinq à trois ans le délai dans lequel le propriétaire d'un bois doit faire agréer un plan simple de gestion pour bénéficier d'une exonération des droits de mutation à titre gratuit. Cette disposition est cohérente avec la possibilité ouverte à l'administration de refuser, après une période de trois ans à compter de la date d'expiration du plan simple de gestion précédemment agréé ou de la ratification invitant le propriétaire à présenter un premier plan simple de gestion, l'autorisation nécessaire pour réaliser une coupe dans les propriétés soumises à l'obligation d'un plan simple de gestion et non dotées d'un tel plan.

La commission a rejeté l'amendement n° 123 de M. Pierre Micaux supprimant l'alinéa procédant à cette modification.

Le paragraphe III vise à modifier l'article L. 222-4 du code forestier pour tenir compte de la nouvelle dénomination de « garantie de gestion durable ».

Le paragraphe IV tire les conséquences de la suppression, d'une part, de diverses dispositions relatives aux groupements pour le reboisement par l'article 37 du projet de loi et, d'autre part, de celle du fonds forestier national.

Les paragraphes V et VI tirent les conséquences de la suppression des associations syndicales autorisées de gestion forestière par l'article 37 du projet de loi. Le paragraphe V supprime ainsi une référence à ces structures tandis que la nouvelle rédaction de la fin de l'article L. 247-7 du code forestier proposée par le paragraphe VI qui participe de la même logique, prend en compte le fait que dès lors que ne demeurent que des associations syndicales libres qui ne sont pas soumises au régime des marchés publics, la référence à celui-ci, qui était liée à l'existence d'associations autorisées pouvant y être soumis, n'a plus lieu d'être.

Le paragraphe VII vise à corriger une référence erronée dans l'article L. 323-2 du code forestier. Les infractions dont il s'agit d'organiser la constatation sont en effet celles résultant des dispositions de l'article L. 322-10 relatif à l'interdiction de pâturage après incendie et non celles de l'article L. 322-6 qui prévoit la prescription de règles spéciales de gestion forestière dans une bande d'une largeur maximale de cinquante mètres le long des voies ouvertes à la circulation du public.

Le paragraphe VIII supprime une référence à deux articles dont l'article 37 du projet de loi propose l'abrogation.

Le paragraphe IX adapte les missions de la commission départementale d'orientation de l'agriculture pour tenir compte de la réforme de la politique agricole commune mise en _uvre notamment par le règlement communautaire n° 1257/1999 du 17 mai 1999.

Le paragraphe X adapte l'article 793 du code général des impôts par coordination avec la modification de l'article L. 222-3 du code forestier à laquelle il est procédé au 2° du paragraphe II du présent article du projet de loi.

La commission a rejeté l'amendement n° 78 de M. François Vannson tendant à supprimer ce paragraphe.

Le paragraphe XI vise à étendre la compétence du juge unique en matière correctionnelle aux délits prévus par le code forestier et par le code de l'urbanisme pour la protection des bois et forêts.

La commission a examiné l'amendement n° 122 de M. Pierre Micaux visant à supprimer le paragraphe XI de cet article qui vise à étendre la compétence du juge unique en matière correctionnelle aux délits prévus par le code forestier et par le code de l'urbanisme pour la protection des bois et forêts. Le rapporteur a estimé qu'il convenait de maintenir cette disposition qui permettrait d'accélérer les procédures judiciaires et de désencombrer les tribunaux à moyens constants. M. Pierre Micaux a jugé que cette mesure était dangereuse car elle risquait d'accroître l'influence des experts, et notamment ceux de l'administration, qui sont consultés dans ce domaine très technique. La commission a rejeté cet amendement.

Enfin, le paragraphe XII de cet article prévoit que les dispositions des articles L. 8 et L. 9 du code forestier n'entreront en vigueur qu'un an après la publication de la loi.

Elle a ensuite examiné l'amendement n° 79 de M. Pierre Micaux proposant une nouvelle rédaction du paragraphe XII de cet article afin de prévoir que les dispositions de l'article L. 7 du code forestier créé par le projet de loi entreront en vigueur cinq ans après la publication de la loi. Le rapporteur a jugé qu'il serait effectivement utile de prévoir un délai avant la mise en _uvre des dispositions de l'article L. 7 mais que, d'une part, il fallait également en conserver un comme prévu par le projet de loi quant à celles des articles L. 8 et L. 9 et que, d'autre part, un délai de cinq ans lui paraissait excessif. Il a donc demandé à M. Pierre Micaux de rectifier son amendement pour que celui-ci complète le paragraphe XII de cet article au lieu de le remplacer et pour que le délai préalable à l'entrée en vigueur des dispositions de l'article L. 7 soit de trois ans au lieu de cinq. M. Pierre Micaux ayant indiqué qu'il procéderait à ces modifications, la commission a adopté l'amendement n° 79 sous réserve de celles-ci.

Puis, conformément à l'avis du rapporteur, elle a adopté l'amendement n° 121 de M. François Vannson précisant que les orientations régionales de production de la forêt privée en vigueur à la date de publication de la loi vaudront schémas régionaux de gestion sylvicole des forêts privées.

Conformément à l'avis du rapporteur, elle a ensuite rejeté l'amendement n° 80 de M. François Vannson disposant que les dispositions de l'article L. 222-1 du code forestier dans leur version antérieure à celle résultant de la loi resteront applicables pour l'agrément des plans simples de gestion présentés avant la publication de la loi. La commission a également rejeté l'amendement n° 81 du même auteur relatif au transfert à l'acquéreur de l'engagement pris pour bénéficier du régime préférentiel en matière de droits de mutation, le rapporteur ayant rappelé que cet amendement était pleinement satisfait par un amendement portant article additionnel après l'article 5 ayant le même objet adopté par la commission à son initiative.

La commission a adopté l'article 36 ainsi modifié.

Article 37

Abrogations

Cet article a pour objet d'abroger des dispositions soit par coordination avec les autres articles du projet de loi soit parce qu'elles sont jugées obsolètes ou inopportunes.

Le paragraphe I concerne le code forestier. Il vise à abroger :

- l'article L. 101 auquel se substitueront les articles L. 1, L. 2, L. 7 et L. 8 créés par l'article 1er du projet de loi ;

- la troisième section du chapitre IV du titre III du livre Ier relative aux ventes à l'amiable des coupes ou des produits des coupes dans les bois et forêts de l'Etat qui seront désormais régies par l'alinéa introduit dans l'article L. 134-7 par le 2° du III de l'article 5 du projet de loi ;

- les articles L. 135-3, L. 135-6 et L. 135-7 relatifs à l'exploitation des coupes dans les forêts et terrains de l'Etat :

. l'article L. 135-3 permet à un acheteur de coupes d'avoir un facteur ou un garde-coupe agrée et assermenté susceptible de dresser des procès-verbaux faisant foi jusqu'à preuve du contraire dans les limites de la coupe ;

. l'article L. 135-6 sanctionne par une amende contraventionnelle et des dommages-intérêts l'inexécution par les acheteurs des obligations relatives à la coupe et à la vidange des bois prévues par les clauses de la vente ;

. l'article L. 135-7 édicte une obligation pour les acheteurs d'exécuter certains travaux imposés par les clauses de la vente et prévoit l'exécution de ces travaux à leurs frais s'ils sont défaillants.

Ces dispositions sont jugées obsolètes ; la première étant tombée en désuétude et les deux autres pouvant relever du domaine contractuel.

- La section première du chapitre premier du titre cinquième du livre Ier comprenant six articles (L. 151-1 à L. 151-6) relatifs aux interdictions de construction à proximité des bois et forêts relevant du régime forestier. Ces interdictions visaient à réglementer la construction d'installations utilisant le feu (article L. 151-1 : four à chaux ou à plâtre, briqueterie ou tuilerie) en raison du risque d'incendie ainsi que celle de bâtiments pouvant être utilisés pour une exploitation illicite des bois et forêts (articles L. 151-2, L. 151-3 et L. 151-4 : maison sur perches, loge, baraque, hangar, atelier à façonner le bois, chantier ou magasin pour faire le commerce du bois, usine à scier le bois). Leur abrogation tire les conséquences du fait que la prévention du risque d'incendie relève désormais de dispositifs spécifiques tels que les plans de prévention aux risques naturels majeurs. Les dispositions prenant en compte le risque d'exploitation illicite ne sont, quant à elles, plus jugées nécessaires.

- L'article L. 152-5 prévoyant que les procès-verbaux rédigés et signés par les ingénieurs et agents assermentés de l'ONF et constatant des infractions dans les bois relevant du régime forestier ne sont pas soumis à l'affirmation. Cette précision était utile dans la mesure où le droit commun en matière forestière était le recours à cette procédure mais ne parait plus pertinente puisque le présent article abroge également la disposition prévoyant d'une manière générale l'affirmation des procès-verbaux d'infractions en matière forestière ;

- les articles L. 154-1 et L. 154-3 à L. 154-6 relatifs à l'exécution des jugements concernant les infractions commises dans les bois et forêts relevant du régime forestier que le projet de loi vise à aligner sur la procédure de droit commun ;

- l'article L. 211-1 auquel se substitue l'article L. 5 créé par l'article 1er du projet de loi ;

- le troisième alinéa de l'article L. 231-1 relatif à l'affirmation des procès-verbaux des infractions commises dans les bois ne relevant pas du régime forestier. Cette procédure, exceptionnelle, impose aux personnes ayant constaté par procès-verbal des infractions, d'en attester la véracité au plus tard le lendemain devant un juge du tribunal d'instance ou le maire ou un adjoint au maire soit de leur commune de résidence soit de celle où a été commise l'infraction à peine de nullité. Elle impose donc une contrainte lourde aux personnes concernées sans apporter pourtant en contrepartie de garanties significatives aux personnes susceptibles d'être poursuivies. Il convient dès lors, là aussi, d'appliquer le droit commun ;

- l'article L. 231-4 qui prévoit que les jugements contenant des condamnations en faveur des particuliers pour réparation des infractions commises dans leurs bois sont exécutés dans les mêmes conditions que ceux rendus à la requête de l'administration chargée des forêts. L'abrogation de cet article résulte de la suppression proposée plus haut des dispositions prévoyant une procédure spéciale pour l'exécution des jugements rendus à la requête de l'administration chargée des forêts ;

- l'article L. 231-5 qui dispose que les auteurs d'infraction insolvables peuvent être admis à se libérer au moyen de prestations en nature des amendes et des frais qui ont été avancés par l'Etat ;

- l'article L. 241-7 et les chapitres III et IV du titre quatrième du livre deuxième relatifs aux groupements forestiers en vue du reboisement. Ceux-ci peuvent être créés dans des secteurs de reboisement par la majorité des propriétaires représentant la majorité des surfaces en vue d'exécuter des travaux déterminés par l'autorité administrative ;

- le chapitre V du titre quatrième du livre deuxième qui dispose que l'Etat peut provoquer ou faciliter par l'attribution de primes la création de groupements forestiers dans les périmètres d'actions forestières et les zones dégradées à faible taux de boisement. Cette disposition s'articule avec celles du chapitre VI du titre deuxième du code rural relatif à l'aménagement agricole et forestier ;

- le chapitre VIII du titre quatrième du livre deuxième relatif aux groupements de productions forestiers reconnus par le préfet ;

- les articles L. 247-2 à L. 247-6 relatifs aux associations syndicales de gestion forestière autorisées. Il s'agit en effet d'une structure peu adaptée à une activité de gestion. Les associations syndicales de propriétaires de droit commun ont d'ailleurs pour objet la réalisation de travaux ;

- l'article L. 321-4 concernant la direction des secours par le maire ou par son délégué en cas d'incendie de forêt dans les communes où n'existent pas d'associations syndicales ayant pour tâche la défense des forêts contre l'incendie, obsolète compte tenu de la création par la loi n° 96-369 du 3 mai 1996 des services départementaux d'incendie et de secours ;

- l'article L. 331-1 excluant les propriétaires riverains des forêts dont les arbres de lisière avaient plus de trente ans le 31 juillet 1827 du bénéfice de l'article 673 du code civil qui permet de contraindre son voisin à couper les branches avançant sur sa propriété et de récupérer celles-ci ;

- l'article L. 331-8 régissant l'extraction de matériaux pour les travaux publics dans les lieux indiqués par l'administration des ponts et chaussées situés en forêt ;

- les articles L. 342-4 à L. 342-9 relatifs à la constatation et à la poursuite des infractions par l'administration chargée des forêts qu'il s'agit ainsi d'aligner sur le droit commun ;

- les articles L. 351-2, L. 351-4, L. 351-6, L. 351-7 et L. 351-8 relatifs à l'application des peines prononcées à la suite d'une infraction commise en matière forestière qu'il s'agit ainsi d'aligner sur le droit commun ;

- l'article L. 432-3 soumettant à autorisation le pâturage dans les dunes et interdisant d'y entretenir des lapins, jugé obsolète ;

- l'article L. 531-1 précisant les compétences du ministre chargé des forêts en vue de la reconstitution de la forêt française ;

- le titre quatrième du livre cinquième relatifs aux secteurs de reboisement ;

- le chapitre III du titre cinquième du livre cinquième instituant une obligation de déclaration par les entreprises concernées de leurs activités au comité national interprofessionnel de l'horticulture florale et ornementale et des pépinières dont le Gouvernement a indiqué à votre rapporteur qu'il ne fonctionnait plus à la charge des entreprises de ce secteur.

La commission a examiné un amendement présenté par M. Patrice Carvalho complétant ce paragraphe pour modifier l'article L. 121-5 du code forestier en supprimant la limitation des hypothèses dans lesquelles l'Office national des forêts peut étendre ses activités d'exploitation en régie directe. Le rapporteur a indiqué qu'il entendait sur ce point maintenir un équilibre et qu'il s'opposait aux amendements ouvrant plus largement les possibilités d'exploitation par l'ONF en régie directe comme à ceux les limitant davantage. La commission a rejeté cet amendement.

Le paragraphe II tend à abroger deux alinéas de l'article L. 126-1 du code rural qui prévoient, d'une part, la définition de périmètres prioritaires d'action forestière, et d'autre part, de zones dégradées à faible taux de boisement.

Le paragraphe III propose d'abroger l'article L. 26 du code du domaine de l'Etat relatif à l'appréhension des parcelles réputées vacantes et sans maître comprises dans les secteurs de reboisement que le paragraphe I du présent article tend à supprimer.

Le paragraphe IV vise à abroger l'article 3 de la loi du 13 août 1940 relative à l'organisation de la production forestière mais précise que « toutefois, pendant une période transitoire de quatre ans à compter de la publication de la présente loi, ses dispositions continuent de s'appliquer ».

Cet article interdit le commerce des bois et des produits dérivés à toute personne non agréée par le groupement interprofessionnel forestier et non munie d'une carte professionnelle délivrée par le préfet du département où réside le demandeur sur proposition du groupement interprofessionnel forestier. Cette procédure inhabituelle avait pour principal intérêt de permettre le recensement des intéressés notamment à des fins statistiques, aucun contrôle n'étant effectué pour la délivrance de cette carte. Or, l'administration estime pouvoir rassembler les données relatives à la filière sans un tel recensement.

La commission a examiné, en discussion commune, trois amendements, deux identiques, le n° 124 de M. Pierre Micaux et un amendement de M. Jean Proriol, visant à supprimer le paragraphe IV de cet article abrogeant, après une période transitoire de quatre ans, l'article 3 de la loi du 13 août 1940 qui institue une carte professionnelle pour les personnes pratiquant le commerce du bois et le troisième, présenté par le rapporteur, supprimant la période transitoire prévue par le projet de loi.

Le rapporteur a indiqué que l'article 3 de la loi du 13 août 1940 était obsolète, le Gouvernement lui ayant indiqué que la carte professionnelle était délivrée sans conditions et que le seul intérêt du dispositif était un recensement utilisé à des fins statistiques qui n'est plus jugé nécessaire. M. Jean Proriol a rappelé que cette carte était exigée des propriétaires forestiers qui exploitent leurs bois sans être agriculteur pour obtenir l'immatriculation de leur tracteur comme tracteur forestier, ce qui les autorise à les conduire sans permis poids lourds et en utilisant le carburant agricole. Il a ajouté que les tempêtes de décembre 1999 avaient mis en évidence l'utilité de l'intervention de ces propriétaires avec leurs tracteurs pour dégager les chablis. Le rapporteur a indiqué qu'il ignorait ce rôle de la carte professionnelle et qu'il était tout à fait sensible à cette question et qu'à l'occasion de la loi d'orientation agricole, il avait souhaité maintenir les possibilités d'utilisation des engins agricoles (sans permis poids lourd) qui sont parfois les seuls à rouler en montagne lorsque l'enneigement est important et qui pallient le manque de matériel spécialisé. Il a souhaité que les amendements de MM. Pierre Micaux et Jean Proriol puissent être examinés par la commission au cours de la réunion qu'elle tiendra en application de l'article 88 du Règlement afin de lui permettre de s'informer sur ce point, ce que les auteurs de ces amendements ont accepté. La commission a adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 376).

Le paragraphe V a pour objet d'abroger les articles 1er et 76 de la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985 relative à la gestion, la valorisation et la protection de la forêt.

L'article 1er énonce les objectifs de la politique forestière. Le projet de loi lui substitue l'article L. 1 créé par l'article 1er.

L'article 76 dispose que les forêts dont les propriétaires ont adhéré à une société coopérative ayant pour objet le conseil en gestion, la réalisation de travaux et la vente de produits forestiers sont considérées jusqu'en 2005 comme présentant une garantie de bonne gestion. Le projet de loi établissant un nouveau dispositif relatif aux présomptions de bonne gestion, cette disposition n'est plus jugée opportune.

Le paragraphe VI abroge l'article 21 de la loi n° 91-5 modifiant diverses dispositions intéressant l'agriculture et la forêt. Cet article prévoit l'élaboration d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles dans les zones sensibles aux incendies de forêt, disposition que le X de l'article 15 du présent projet insère dans le code forestier en créant au sein de celui-ci un article L. 322-4-1.

Enfin, le paragraphe VII est relatif à l'abrogation de la loi n° 72-565 du 5 juillet 1972, portant réglementation des professions d'expert agricole et foncier et d'expert forestier à laquelle le présent projet de loi substitue l'article L. 171-1 du code forestier créé par l'article 34.

La commission a adopté deux amendements rédactionnels du rapporteur portant sur ce paragraphe (amendements nos 374 et 375), puis l'article 37 ainsi modifié

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La commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

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En conséquence, la commission de la production et des échanges vous demande d'adopter le projet de loi d'orientation sur la forêt (n° 2332), modifié par les amendements figurant au tableau comparatif ci-après.

2417-1 Rapport de M. François Brottes, au nom de la commission de la production et des échanges, sur le projet de loi (n° 2332), d'orientation sur la forêt. (tome I : Rapport)


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