Document mis en distribution le 13 février 2002 ![]() N° 3597 -- ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 ONZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 13 février 2002. RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE (1) SUR LA PROPOSITION DE LOI, ADOPTÉE PAR LE SÉNAT, portant réforme de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, dans ses dispositions relatives à la publicité foncière, PAR M. ARMAND JUNG, Député. -- (1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page. Voir les numéros : Sénat : 421 (2000-2001), 109 et T.A. 28 (2001-2002). Assemblée nationale : 3467. Droit local. La Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République est composée de : M. Bernard Roman, président ; M. Pierre Albertini, Mme Nicole Feidt, M. Gérard Gouzes, vice-présidents ; M. Richard Cazenave, M. André Gerin, M. Arnaud Montebourg, secrétaires ; M. Léon Bertrand, M. Jean-Pierre Blazy, M. Émile Blessig, M. Jean-Louis Borloo, M. Michel Bourgeois, Mme Danielle Bousquet, M. Michel Buillard, M. Dominique Bussereau, M. Christophe Caresche, M. Patrice Carvalho, Mme Nicole Catala, M. Jean-Yves Caullet, M. Olivier de Chazeaux, M. Pascal Clément, M. Jean Codognès, M. François Colcombet, M. François Cuillandre, M. Henri Cuq, M. Jacky Darne, M. Camille Darsières, M. Francis Delattre, M. Bernard Derosier, M. Franck Dhersin, M. Marc Dolez, M. Renaud Donnedieu de Vabres, M. René Dosière, M. Julien Dray, M. Jean-Pierre Dufau, Mme Laurence Dumont, M. René Dutin, M. Renaud Dutreil, M. Jean Espilondo, M. Roger Franzoni, M. Pierre Frogier, M. Claude Goasguen, M. Philippe Houillon, M. Michel Hunault, M. Michel Inchauspé, M. Henry Jean-Baptiste, M. Armand Jung, M. Jérôme Lambert, Mme Christine Lazerges, Mme Claudine Ledoux, M. Jean Antoine Leonetti, M. Bruno Le Roux, M. Jacques Limouzy, M. Noël Mamère, M. Thierry Mariani, M. Jean-Pierre Michel, M. Ernest Moutoussamy, Mme Véronique Neiertz, M. Robert Pandraud, M. Dominique Perben, Mme Catherine Picard, M. Henri Plagnol, M. Didier Quentin, M. Dominique Raimbourg, M. Jean-Pierre Soisson, M. Frantz Taittinger, M. André Thien Ah Koon, M. Jean Tiberi, M. Alain Tourret, M. André Vallini, M. Michel Vaxès, M. Alain Vidalies, M. Jean-Luc Warsmann. INTRODUCTION 7 I. L'ETAT DES LIEUX DU DROIT LOCAL DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE 8 A. LA GENÈSE DU DROIT LOCAL DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE 8 1. La modernisation de la législation locale et l'introduction du livre foncier de 1871 à 1900 8 2. La généralisation du livre foncier de 1900 à 1925 9 B. LA PÉRENNISATION DU DROIT LOCAL DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE APRÈS 1925 11 1. Le choix d'un régime spécifique de publicité foncière 11 2. Le livre foncier aujourd'hui 11 a) Les atouts du régime de droit local 11 b) L'informatisation du livre foncier 13 II. LA PROPOSITION DE LOI ADOPTÉE PAR LE SÉNAT : LA MODERNISATION DE L'ORGANISATION ET DU RÉGIME DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE D'ALSACE-MOSELLE 14 A. L'ADAPTATION DU DROIT LOCAL INDUITE PAR L'INFORMATISATION 14 1. L'adaptation de la structure du livre foncier 14 a) La tenue du livre foncier sous forme électronique 14 b) La création d'un établissement public d'Etat 14 2. L'adaptation du régime de la publicité à l'informatisation 15 a) Les nouvelles modalités de consultation du livre foncier 15 b) L'instauration d'une requête informatique normalisée 16 B. LA MODERNISATION DU DROIT LOCAL 16 1. L'élargissement du domaine de la publicité 16 a) Le renforcement de la publicité informative 16 b) L'admission à la publicité des droits acquis par prescription 16 2. Le toilettage des dispositions légales 17 a) L'extinction des servitudes conventionnelles constituées avant le 1er janvier 1900 17 b) La définition des sanctions du défaut de publicité 17 c) L'harmonisation du droit local des incapacités 18 DISCUSSION GÉNÉRALE 19 EXAMEN DES ARTICLES 21 Article 1er (Chapitre III du titre II de la loi du 1er juin 1924) : Régime de la publicité foncière en Alsace-Moselle 21 - Article 36 de la loi du 1er juin 1924 : Délimitation géographique 21 - Article 36-1 de la loi du 1er juin 1924 : Énoncé des droits sur les immeubles concernés 21 - Article 36-2 de la loi du 1er juin 1924 : Définition du livre foncier 22 - Article 37 de la loi du 1er juin 1924 : Consultation du livre foncier 24 - Article 38 de la loi du 1er juin 1924 : Droits soumis à inscription 26 - Article 38-1 de la loi du 1er juin 1924 : Effets d'opposabilité aux tiers 30 - Article 38-2 de la loi du 1er juin 1924 : Opposabilité aux tiers de certains droits 31 - Article 38-3 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription pour information des tiers 32 - Article 38-4 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription à peine d'irrecevabilité 32 - Article 39 de la loi du 1er juin 1924 : Prénotation 33 - Article 40 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription d'une requête 33 - Article 41 de la loi du 1er juin 1924 : Effet de l'inscription 35 - Article 42 de la loi du 1er juin 1924 : Exigences de la forme authentique 35 - Article 43 de la loi du 1er juin 1924 : Autorités tenues de faire procéder à l'inscription 37 - Article 44 de la loi du 1er juin 1924 : Ordre de priorité en matière d'inscription 37 - Article 44-1 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription d'un droit acquis par prescription ou accession 38 - Article 45 de la loi du 1er juin 1924 : Prise de rang des droits 38 - Article 46 de la loi du 1er juin 1924 : Contrôle préalable des droits inscrits et responsabilité du juge du livre foncier 39 - Article 47 de la loi du 1er juin 1924 : Dispense d'inscription de certains privilèges 40 - Article 47-1 de la loi du 1er juin 1924 : Assiette de l'inscription des droits portant sur des lots dépendant d'un immeuble en copropriété 40 - Article 48 de la loi du 1er juin 1924 : Spécialité de l'inscription 41 - Article 49 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription du privilège des architectes 41 - Article 50 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription du privilège de séparation des patrimoines 41 - Article 51 de la loi du 1er juin 1924 : Application du droit général en matière d'hypothèque légale 42 - Article 52 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription des hypothèques et privilèges 42 - Articles 57 et 58 de la loi du 1er juin 1924 : Modalités d'inscription de l'hypothèque légale d'une tutelle sur les immeubles du tuteur ou du curateur 43 - Article 59 de la loi du 1er juin 1924 : Obligation d'un notaire en matière d'hypothèque légale des personnes sous tutelle 43 - Article 60 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription de l'hypothèque légale d'un ancien incapable 44 - Article 61 de la loi du 1er juin 1924 : Inscription de l'hypothèque légale d'une personne placée dans un établissement d'aliénés 44 - Article 62 de la loi du 1er juin 1924 : Hypothèque judiciaire 44 - Article 63 de la loi du 1er juin 1924 : Péremption et renouvellement de l'inscription des hypothèques 45 - Article 64 de la loi du 1er juin 1924 : Radiation des inscriptions 45 - Article 65 de la loi du 1er juin 1924 : Mainlevée de l'hypothèque légale du Trésor public 45 Articles 1er bis, 1er ter, 1er quater et 1er quinquies : Création, administration et modalités de financement et fonctionnement d'un établissement public 46 Article 2 : Servitudes foncières constituées avant 1900 47 Article 3 : Inscription des sûretés légales pour les personnes de droit local placées sous tutelle 47 Article 4 : Entrée en vigueur différée de certains articles 48 Après l'article 4 48 TABLEAU COMPARATIF 51 ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 77 AMENDEMENT NON ADOPTÉ PAR LA COMMISSION 81 La proposition de loi portant réforme de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, dans ses dispositions relatives à la publicité foncière a été présentée par l'ensemble des sénateurs des trois départements concernés et adoptée à l'unanimité en séance le 13 décembre 2001. Dans le même temps, votre rapporteur déposait sur le bureau de l'Assemblée nationale une proposition de loi ayant le même objet (1). Ce consensus pour faire évoluer le droit de la publicité foncière en Alsace-Moselle est le fruit d'une concertation approfondie réunissant les juristes du groupement pour l'informatisation du livre foncier d'Alsace et de Moselle (GILFAM), l'Institut du droit local, le ministère de la justice et le notariat ; les réflexions auxquelles ont abouti ce groupe de travail ont en outre été approuvées par la commission d'harmonisation du droit privé alsacien-mosellan. Il s'agit en premier lieu, en ce début du XXIe siècle, de relever le défi de l'informatisation ; l'objectif est de rendre les informations contenues dans le livre foncier d'Alsace-Moselle disponibles sur Internet, tout en préservant la protection due à la vie privée. Dans cette optique, plusieurs études ont été menées sur les expériences étrangères entreprises dans des pays ayant un système de publicité foncière comparable, tels que l'Allemagne, la Suisse ou l'Autriche. Le groupe de travail a également réfléchi aux moyens de moderniser le droit local lui-même, les règles locales remontant, pour l'essentiel, à la loi du 1er juin 1924 et n'ayant fait depuis l'objet que d'ajustements mineurs ; cette modernisation s'imposait compte tenu à la fois de la modernisation du droit général et des difficultés croissantes d'articulation entre droit local et droit général. La proposition de loi adoptée par le Sénat reprend les conclusions de la concertation menée depuis 1994 ; grâce à cette réflexion accomplie largement en amont, ainsi qu'au travail de fond accompli par le Sénat, et notamment par son rapporteur M. Daniel Hoeffel, il paraît envisageable que l'Assemblée nationale adopte à son tour par un vote conforme la proposition de loi du Sénat ; l'urgence qui s'attache à obtenir rapidement un texte avant la fin des travaux des assemblées est en effet réelle : la procédure d'informatisation du livre foncier est en cours et nécessite un cadre légal approprié. Avant de proposer de reprendre sans modification le texte du Sénat, le rapporteur souhaiterait néanmoins exposer dans ses grandes lignes générales la spécificité du droit local de la publicité foncière. I. - L'ÉTAT DES LIEUX DU DROIT LOCAL DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE A. LA GENÈSE DU DROIT LOCAL DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE Officialisée par le Traité de Paix de Francfort du 10 mai 1871, l'annexion des départements du Rhin et de la Moselle est à l'origine de l'existence du droit local alsacien-mosellan. Dès l'annexion, en effet, les pouvoirs publics allemands décident de maintenir en vigueur les principales lois françaises, telles que le Code civil de 1804, la loi du 23 mars 1855 sur la transcription en matière hypothécaire ou encore le Concordat du 26 messidor en IX et les articles organiques du 18 Germinal an X. L'ensemble de ces textes forment la première strate de droit local puisque leur application dans l'espace est limitée à l'Alsace-Moselle. Désireux cependant d'y introduire progressivement le droit privé allemand, le Gouvernement s'attelle dès 1871 à l'élaboration de textes destinés à harmoniser pour certaines matières la législation applicable sur l'ensemble du territoire. Ces travaux aboutissent au vote et à la promulgation du Code civil allemand par la loi du 18 août 1896 qui entre en vigueur, dans les trois départements de l'Est, le 1er janvier 1900 avec tout un ensemble de lois destinées à en préciser la portée. Date charnière, le 1er janvier 1900 permet de distinguer deux grands périodes d'évolution du droit local de la publicité foncière. La première, allant de 1871 à 1900, se caractérise par la modernisation de la législation et l'introduction du livre foncier dans les communes à cadastre rénové. La seconde, qui s'étend de 1900 à 1925, est marquée par le remplacement du Code napoléon par le Code civil allemand et la généralisation du livre foncier. 1. La modernisation de la législation locale et l'introduction du livre foncier de 1871 à 1900 En 1871, dans les provinces annexées, la publicité foncière organisée par bureaux des hypothèques est régie par la loi du 23 mars 1855 relative à la transcription en matière hypothécaire et le Code civil de 1804. A l'expérience, ce système de publicité immobilière ne donne guère satisfaction en raison de la faiblesse de la protection offerte aux tiers et de l'insécurité juridique générée par l'existence de sûretés réelles immobilières produisant leurs effets sans faire l'objet d'inscription. Sur le plan économique, la conjonction de ces deux facteurs se traduit par une entrave à l'essor du crédit hypothécaire. Conscient de cette situation, le Gouvernement programme alors une réforme d'envergure passant pas l'instauration du livre foncier. Pour autant, une telle avancée ne peut être obtenue que dans la mesure où les propriétés immobilières privées et publiques sont susceptibles d'être identifiées physiquement avec exactitude. Or, le cadastre napoléonien issu de la loi du 15 septembre 1807 présente en 1871 de nombreuses inexactitudes. Aussi, le premier changement à opérer d'un point de vue législatif consiste-t-il à moderniser la législation cadastrale. A cette fin, le Gouvernement saisit la Délégation d'Alsace-Lorraine (2) d'un projet de loi relatif au renouvellement du cadastre. Définitivement adoptée au cours de la XIe session de la Délégation (1883-1884), la loi est promulguée le 31 mars 1884. La rénovation du cadastre s'effectue désormais en vertu de ce texte, toujours en vigueur à ce jour en Alsace-Moselle. Cette première étape franchie, la Délégation d'Alsace-Lorraine s'attache à réformer la réglementation de la publicité foncière. Pour ce faire, elle adopte la loi du 24 juillet 1889 relative à la propriété immobilière, le régime hypothécaire et les honoraires des notaires qui s'inscrit dans un environnement juridique français compte tenu du maintien en vigueur du Code napoléon et de la loi du 23 mars 1855. Ayant pour objectif de moderniser le droit de la transcription immobilière en renforçant la sécurité et l'information des tiers, la loi du 24 juillet 1889 impose le recours à un notaire, garantissant par-là même la réalisation de la publicité, élargit le domaine des inscriptions en augmentant le nombre de sûretés réelles immobilières soumises à publication et instaure la règle de la spécialité de l'inscription hypothécaire. Entre-temps, de 1884 à 1889, les travaux de rénovation du cadastre progressent, au point qu'en 1890 de nombreuses communes disposent d'un plan cadastral présentant toutes les garanties concernant l'identification physique des propriétés. Dans ce contexte propice à de nouvelles évolutions, le Gouvernement projette d'instituer le livre foncier, sur le modèle allemand, dans les communes dotées d'un cadastre rénové, afin de simplifier la forme de la publicité et d'assurer une véritable information des tiers. Pour atteindre cet objectif, il dépose un projet de loi sur le bureau de la Délégation d'Alsace-Lorraine qui aboutit à l'adoption de la loi du 22 juin 1891 sur le livre foncier abrogeant notamment la loi du 23 mars 1855. Adaptée aux besoins des régions agricole et industrielle, cette loi impose l'établissement du livre foncier dans toutes les communes à cadastre refait et innove en confiant la tenue de ce registre à un magistrat, le juge du livre foncier, qui exerce un contrôle portant sur les requêtes en inscription. Compte tenu de ces évolutions législatives successives, le droit local de la publicité foncière se caractérise, dans la dernière décennie du XIXe siècle, par la coexistence de deux régimes de publicité foncière, le premier organisé par des livres fonciers dans les communes disposant d'un cadastre rénové, le second par registres hypothécaires réglementés par les lois des 23 mars 1855 et 24 juillet 1889 pour les communes dotées d'un ancien cadastre. Ce paysage juridique est profondément modifié le 1er janvier 1900, date où le Code civil français est abrogé et remplacé par le Code civil allemand. 2. La généralisation du livre foncier de 1900 à 1925 Les dispositions du code civil allemand relatives à la constitution, la transmission et l'extinction des droits entrent en vigueur avec une loi locale d'application du 17 avril 1899, adoptée par la Délégation d'Alsace-Lorraine, qui édicte les mesures d'application rendues nécessaires pour assurer l'intelligibilité et la lisibilité du droit de la publicité foncière. Peu après, la loi locale du 29 novembre 1899 abroge expressément le Code civil, la loi du 23 mars 1855 et la loi du 21 juin 1891. L'apport fondamental de la loi de 1899 consiste à généraliser la mise en place du livre foncier en Alsace-Moselle en imposant son établissement dans toutes les communes non dotées d'un livre foncier institué conformément à la loi du 22 juin 1891. Le procédé vise à instaurer dans ces communes un registre foncier spécifique : le livre de propriété. A l'origine, ce livre est composé exclusivement de feuillets ne comportant aucune inscription, mais destinés à être remplis progressivement en fonction de l'accomplissement des formalités de publication obligatoire des opérations juridiques immobilières. Parallèlement, la loi de 1899 conserve le livre foncier établi par la loi du 22 juin 1891 sous l'appellation de livre foncier provisoire. Au 1er janvier 1900, ces deux registres de publicité constituent les livres fonciers de départ devant être remplacés au fur et à mesure de leur achèvement par le livre foncier définitif. Registre foncier par excellence dont les mentions bénéficient de la présomption irréfragable d'exactitude à l'égard des tiers de bonne foi, le livre foncier définitif forme un véritable état civil de la propriété immobilière dans la mesure où les droits réels immobiliers, ainsi que l'ensemble des charges les affectant y sont publiés, à l'exception cependant des servitudes conventionnelles constituées antérieurement au 1er janvier 1900. S'agissant en effet de ces démembrements du droit de propriété, aucune disposition légale ne prévoit leur inscription au livre de propriété ou au livre foncier définitif. Au demeurant, cette absence de transcription ne concerne pas le livre foncier provisoire institué par la loi de 1891 puisque les servitudes conventionnelles devaient y être publiées. Il en résulte que les servitudes conventionnelles établies avant l'entrée en vigueur du Code civil allemand et régulièrement transcrites dans les registres hypothécaires existant dans les communes non dotées du livre foncier régi par la loi de 1891 restent actuellement toujours opposables aux tiers en l'absence de toute mention au livre de propriété ou au livre foncier d'Empire. A la veille du déclenchement du premier conflit mondial, sur 1 778 circonscriptions foncières, il existe 257 livres fonciers définitifs, 208 livres fonciers provisoires et 1 313 livres de propriété. Lors du recouvrement de la souveraineté française sur les territoires des départements du Bas-Rhin du Haut-Rhin et de la Moselle en 1918, le Gouvernement français poursuit la politique de généralisation du livre foncier en vertu des dispositions légales allemandes, devenues du droit local, maintenues à titre provisoire par la loi du 17 octobre 1919 relative au régime transitoire de l'Alsace-Lorraine. Néanmoins, l'objectif des pouvoirs publics est de parvenir assez rapidement à l'abrogation du droit local de la publicité foncière en raison de son incompatibilité avec le droit général, toujours composé de la loi du 23 mars 1855 et du Code civil. Ce point de vue suscite cependant de vives discussions sur l'opportunité d'introduire intégralement le droit général de la transcription immobilière, compte tenu des imperfections dont il souffre toujours à cette époque. B. LA PÉRENNISATION DU DROIT LOCAL DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE APRÈS 1925 1. Le choix d'un régime spécifique de publicité foncière Dans la perspective de trancher le problème du maintien ou non de la législation sur le livre foncier, la Commission des lois civiles instituée en 1919 et chargée spécialement par le Gouvernement de préparer l'introduction de la législation civile française, entame ses travaux au cours du dernier trimestre de l'année 1920. L'idée directrice retenue pour mener ces travaux consiste à conserver le droit local sans modification ou à l'adapter au droit général en raison, d'une part, de sa supériorité par rapport aux règles correspondantes de la législation générale et, d'autre part, du modèle qu'il est susceptible d'incarner pour moderniser le droit général. La mise en _uvre de ce principe directeur conduit la Commission à opter pour le maintien du livre foncier. Pour autant, la matière de la publicité foncière ne saurait rester régie par les règles du droit allemand du fait de leur antinomie avec les règles du droit français relatives à la constitution, la transmission et l'extinction des droits. Aussi, la Commission des lois civiles innove-t-elle en élaborant une proposition de texte associant les meilleurs matériaux juridiques du droit allemand et du droit français. Le résultat de ces travaux aboutit au vote de la loi du 1er juin 1924 qui entre en vigueur le 1er janvier 1925 : le législateur décide ainsi de conserver le livre foncier en tant qu'instrument de publicité des opérations juridiques portant sur les immeubles situés en Alsace-Moselle, tout en adaptant cependant sa réglementation aux traditions juridiques françaises fortement imprégnées de consensualisme. Conformément à cette logique, les articles 36 à 65 formant le chapitre III intitulé « Droit sur les immeubles. Livre foncier » du Titre II de la loi civile du 1er juin 1924 posent le principe d'introduction des règles de fond du droit français et édictent des dispositions relatives à la forme de la publicité dont les modalités d'application sont précisées par les décrets des 18 novembre 1924 et 14 janvier 1927, ainsi que par les instructions du 21 décembre 1972. Depuis lors, les réformes du droit local de la publicité foncière sont rares ; après plus de soixante-dix sept années d'application, la législation locale est désormais confrontée au défi de l'informatisation, dont dépend indiscutablement sa pérennisation. 2. Le livre foncier aujourd'hui a) Les atouts du régime de droit local Le livre foncier est tenu par les bureaux fonciers relevant des tribunaux d'instance des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Compte tenu de la réforme de l'organisation judiciaire opérée en 1958, il existe à ce jour 46 bureaux fonciers (3) rattachés à 25 tribunaux d'instance. Relevant du Ministère de la Justice, le service de la publicité foncière est assuré par 36 juges du livre foncier et 150 greffiers et agents administratifs qui tiennent le livre foncier sous leur responsabilité. Environ 200 000 requêtes sont traitées annuellement débouchant sur près de 750 000 opérations d'inscription. Couvrant 1 800 circonscriptions foncières, le livre foncier inventorie 2 000 000 de propriétaires et 4 500 000 parcelles. Sur le plan matériel, il comprend 40 000 volumes composés de 2 500 000 feuillets, ce qui représente plus de 10 kilomètres linéaires d'archives, chaque volume pesant en moyenne 7 kg. En tant qu'institution civile, le livre foncier a pour finalité de rendre opposable aux tiers les opérations juridiques immobilières. Pour ce faire, les règles locales organisent un régime permettant de régler dans le temps les conflits de droits réels immobiliers entre personnes qui sont les ayants cause d'un auteur commun. Ce système permet de garantir la sécurité juridique, renforcée d'ailleurs par l'existence d'une présomption simple d'exactitude accordée aux inscriptions figurant au livre foncier. L'existence de cette présomption légale se justifie par le principe de légalité qui suppose un contrôle des requêtes en inscription incombant au juge du livre foncier. S'inscrivant dans le cadre de la matière gracieuse, ce contrôle consiste à vérifier l'admissibilité du droit à l'inscription, la forme authentique ou authentiquement légalisée de l'acte produit à l'appui de la requête, le respect de la règle de l'effet relatif, la capacité et la représentation des contractants. Un contrôle de cette nature n'existe pas en droit général de la publicité foncière, qui se caractérise donc par l'inexistence d'une présomption d'exactitude attachée aux informations foncières publiées à la Conservation des hypothèques. De 1925 à 1990, le livre foncier est uniquement conçu comme une institution civile dont la fonction consiste à prévenir et à régler les conflits de droits par le jeu de l'inopposabilité, se différenciant ainsi du droit général de la publicité foncière qui prévoit, en plus d'une publicité à fin d'opposabilité, une publicité informative dont le défaut est sanctionné autrement que par l'inopposabilité. Sur ce point, la loi d'harmonisation n° 90-1248 du 29 décembre 1990 portant diverses mesures d'harmonisation entre le droit applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et le droit applicable dans les autres départements, contient une innovation fondamentale puisqu'elle institue en droit local une publicité informative, orientant ainsi clairement le livre foncier vers l'institution de police tout en lui conservant sa fonction traditionnelle d'institution civile. Rapprochant le droit local du droit général, la création d'une publicité informative renforce incontestablement l'information des tiers par l'augmentation du nombre des droits publiés au livre foncier, ce qui ne peut qu'affermir la sécurité du commerce juridique. Autre supériorité du droit local, l'obtention par les tiers des informations portées au livre foncier est aisée puisqu'à côté de la faculté de demander des copies des feuillets, il existe la possibilité pour le public de consulter directement les registres de publicité au bureau foncier. Actuellement, les consultants sont classés en deux catégories. La première comprend des professionnels (notaires, avocats et avoués), ainsi que les administrations publiques et les fonctionnaires d'Etat qui disposent d'une liberté totale de consultation. La seconde recouvre toutes les autres personnes qui sont tenues, pour accéder directement au livre foncier, de faire valoir un intérêt légitime. Cette notion d'intérêt légitime n'est toutefois définie par aucune disposition légale et n'a donné lieu à aucune jurisprudence depuis 1925. Aussi, en pratique, incombe-t-il au personnel des bureaux fonciers d'apprécier l'existence d'un intérêt légitime au cas par cas. A l'expérience, l'apport principal de la consultation directe est l'obtention instantanée des informations foncières, vecteur de rapidité de conclusion des transactions immobilières. Conscients de ces multiples atouts et de la nécessité de les adapter aux exigences des nouvelles technologies d'information et de communication, les pouvoirs publics envisagent, à partir de l'année 1990, d'informatiser le livre foncier afin de garantir sa pérennité. b) L'informatisation du livre foncier Historiquement, l'idée d'informatiser le livre foncier voit le jour dans les années 1980. En 1986, le VIIIe congrès interrégional des notaires des Cours d'appel de Colmar et de Metz aborde ce thème par le biais d'un rapport de Me Joseph Saas, intitulé « Essai sur l'informatisation du livre foncier ». L'année suivante, sous l'égide de l'Institut du droit local alsacien-mosellan, une étude de faisabilité est entreprise. Le projet est relancé en 1992, dans le cadre d'une convention liant le Ministère de la Justice et l'Institut du droit local, qui aboutit à un rapport rédigé par M. Eric Sander consacré à « La modernisation de la publicité foncière par l'harmonisation européenne et l'informatisation à partir de l'exemple alsacien-mosellan ». Après une tentative avortée en 1993 à la suite de la censure par le Conseil Constitutionnel de l'amendement introduit dans le projet de loi de finances rectificative (4), la traduction sur le plan législatif du projet d'informatisation du livre foncier est réalisée par la loi du 29 avril 1994 (5). Ce texte institue un groupement d'intérêt public, le GILFAM, qui constitue la cheville ouvrière de l'informatisation du livre foncier. Les membres de ce groupement sont : l'Etat (Ministère de la Justice), les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, la région Alsace, l'Institut du droit local alsacien-mosellan, ainsi que le Conseil interrégional des notaires des cours d'appel de Colmar et de Metz. Créée pour une durée de dix années, le GILFAM est présidé par un magistrat de l'ordre judiciaire, M. Jean-Luc Vallens, nommé par le ministre de la Justice. Ses règles de fonctionnement sont précisées par le décret n° 94-662 du 27 juillet 1994, le financement étant assuré par une taxe départementale d'enregistrement de 0,60 % portant sur les baux de plus de douze ans (CGI, art. 742), les mutations entre vifs à titre gratuit (CGI, art. 791) et les acquisitions immobilières donnant lieu au paiement de la TVA (CGI, art. 692). II. - LA PROPOSITION DE LOI ADOPTÉE PAR LE SÉNAT : LA MODERNISATION DE L'ORGANISATION ET DU RÉGIME DE LA PUBLICITÉ FONCIÈRE D'ALSACE-MOSELLE A. L'ADAPTATION DU DROIT LOCAL INDUITE PAR L'INFORMATISATION L'objectif de l'informatisation est de moderniser le fonctionnement et la gestion du livre foncier en informatisant sa tenue, son exploitation et sa consultation. Les résultats attendus consistent principalement en un allégement des tâches répétitives accomplies par le personnel chargé de la tenue des registres fonciers et une réduction du taux d'erreurs entre la réalité juridique et les informations figurant au livre foncier. Dans cette perspective, il est indispensable d'adapter les textes du droit local et d'organiser le cadre légal de l'informatisation. 1. L'adaptation de la structure du livre foncier a) La tenue du livre foncier sous forme électronique Comblant une lacune du Chapitre III du Titre II de la loi civile de 1924, l'article 1er de la proposition de loi adoptée par le Sénat introduit un nouvel article numéroté 36-2, qui donne une définition matérielle du livre foncier : il est constitué de l'ensemble des registres destinés à la publicité des droits réels immobiliers. Actuellement, il existe un livre foncier des immeubles par circonscription foncière dont les nombreux registres sont numérotés dans l'ordre chronologique de leur ouverture. Composé de trois sections, un feuillet recense toutes les propriétés appartement à un propriétaire déterminé dans une même circonscription foncière. Au-delà de cette innovation, le nouvel article 36-2 consacre la possibilité de tenir le livre foncier sur support électronique, étant précisé que ledit support doit offrir toute garantie en matière de preuve et de sécurité. A cette fin, l'article 36-2 renvoie à l'article 1316-1 du code civil, créé par la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique, qui dispose que « l'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité » ; il s'agit ainsi de déterminer les conditions de tenue du livre foncier sur support dématérialisé. Dans le même ordre d'idées, l'autre instrument principal de publicité, à savoir le registre des dépôts, peut également être tenu sous forme électronique conformément à l'article 1316-1 du Code civil. b) La création d'un établissement public d'Etat Dans la perspective d'assurer l'exploitation des systèmes destinés à supporter le livre foncier informatisé, l'article 1er bis de la proposition de loi crée un établissement public d'Etat, dont le financement sera assuré par la redevance perçue lors de la consultation du livre foncier informatisé et des subventions de l'Etat ou de toute autre personne publique. A compter de sa création, l'établissement public se substituera au GILFAM dans l'ensemble de ses droits et obligations. 2. L'adaptation du régime de la publicité à l'informatisation a) Les nouvelles modalités de consultation du livre foncier Actuellement, l'accès au livre foncier est ouvert à toute personne faisant valoir un intérêt légitime, certains professionnels (notaires, avocats et avoués) et personnes publiques en étant cependant dispensés. Afin d'intégrer les impératifs tenant au respect de la vie privée et les modalités de consultation électronique, l'article 1er de la proposition de loi adoptée par le Sénat rénove le régime de consultation par une nouvelle rédaction de l'article 37 de la loi du 1er juin 1924. La distinction traditionnelle entre les collectivités publiques et certaines catégories de professionnels, et les autres personnes, est conservée. Au demeurant, plusieurs précisions sont apportées en ce qui concerne les collectivités publiques afin de tenir compte de la décentralisation et de l'émergence de la coopération intercommunale. Par ailleurs, l'énumération des officiers ministériels est enrichie par l'ajout des huissiers de justice, appelés fréquemment à accomplir des actes portant sur des biens immobiliers. Une nouvelle distinction est également établie entre, d'une part, les informations essentielles englobant celles relatives à l'identité du propriétaire et à l'énoncé des droits ou charges dont il est titulaire et, d'autre part, les autres informations, tels que le régime matrimonial ou le montant du prêt garanti. Cette discrimination se justifie par un impératif de protection de la vie privée ; dans la mesure où les informations seront collectées sur des fichiers informatisés, la Commission nationale de l'Informatique et des Libertés devra veiller au respect de cet impératif (6). La distinction entre les informations essentielles et celles touchant à la vie privée est la seule qui soit de nature à permettre au livre foncier de conserver son atout majeur de registre public accessible à tous les usagers désireux d'obtenir des informations foncières. C'est notamment pour cette raison que l'article 37, tel que rédigé dans la proposition de loi adoptée par le Sénat, prévoit que les professionnels conservent, dans l'exercice de leur compétence, l'accès à l'ensemble des données de la publicité foncière. De plus, le titulaire du droit, ainsi que toute personne dûment autorisée, se voient reconnaître l'accès à l'ensemble des informations sur un bien. Autre innovation, la consultation et la communication des informations foncières non essentielles peuvent donner lieu à la perception d'une redevance. L'instauration de cette contribution se justifie essentiellement par l'amélioration qualitative et quantitative du service rendu par le livre foncier et la faculté d'y accéder à distance. Sur le plan pratique, ce dispositif devrait générer une économie pour les consultants dispensés de se déplacer au bureau foncier. b) L'instauration d'une requête informatique normalisée L'informatisation du livre foncier implique une normalisation du traitement des requêtes en inscription afin de simplifier les tâches du juge du livre foncier et de garantir l'exactitude des informations. Aussi, l'article 1er de la proposition de loi adoptée par le Sénat donne une nouvelle rédaction de l'article 40 de la loi du 1er juin 1924, qui permet de poser le principe d'une requête normalisée obligatoire ; cette normalisation facilitera la saisine du juge du livre foncier et accélérera l'examen des requêtes. Ce faisant, l'instauration d'une requête informatique normalisée contribuera à renforcer substantiellement le rôle des notaires en droit local de la publicité foncière. Toutes les modifications apportées dans la proposition de loi ne sont pas uniquement le fait de l'informatisation. Compte tenu du vieillissement du droit local de la publicité foncière, il est apparu également indispensable d'apporter certaines révisions dans un objectif de simplification et d'harmonisations avec le droit général. B. LA MODERNISATION DU DROIT LOCAL 1. L'élargissement du domaine de la publicité a) Le renforcement de la publicité informative Dans la conception de la publicité foncière retenue par la loi civile du 1er juin 1924, la publicité au livre foncier est exclusivement imposée à fin d'opposabilité aux tiers. Le livre foncier est alors envisagé en tant qu'institution civile tranchant les conflits de droits réels immobiliers. L'innovation majeure de la loi d'harmonisation n° 90-1248 du 29 décembre 1990 a été la création d'une publicité informative des jugements rendus en matière de procédure collective et des demandes en justice. Le jalon est depuis lors posé pour élargir le domaine de la publicité obligatoire à fin d'information des tiers. L'article 1er de la proposition de loi adoptée par le Sénat contribue à cette extension en prescrivant l'inscription au livre foncier des limitations administratives au droit de propriété et les dérogations à ces limitations. Avec cette avancée, il y aura une identité des niveaux d'information en droit général et en droit local. b) L'admission à la publicité des droits acquis par prescription Afin d'assurer le caractère complet de la publicité foncière, l'article 1er de la proposition de loi sénatoriale insérant un nouvel article 44-1 attribue au juge du livre foncier le pouvoir de faire constater, dans le cadre de la matière gracieuse, l'acquisition d'un droit par prescription trentenaire et d'inscrire ensuite ce droit au livre foncier. Cette nouveauté est de nature à renforcer l'exactitude du livre foncier pour des immeubles dont le propriétaire, après un délai de trente ans, ne peut plus être atteint ou identifié. L'instauration de cette prérogative au profit du juge du livre foncier sous la forme d'une dérogation à la règle de l'effet relatif de la publicité est cependant bornée par au moins deux limites. D'une part, ce magistrat ne fait qu'autoriser l'inscription du bien au nom du possesseur sur le fondement des éléments de preuve rapportés par ce dernier. D'autre part, si la prescription vient à être contestée, seul le juge du fond est compétent pour déterminer si le possesseur a pu ou non acquérir la propriété par usucapion. 2. Le toilettage des dispositions légales a) L'extinction des servitudes conventionnelles constituées avant le 1er janvier 1900 A ce jour, les servitudes conventionnelles établies antérieurement au 1er janvier 1900 dans des circonscriptions foncières non-dotées d'un livre foncier institué par la loi du 22 juin 1891, c'est-à-dire d'un livre foncier provisoire au sens de l'article 37 de la loi civile du 1er juin 1924 actuellement en vigueur, sont opposables aux tiers à conditions d'avoir été transcrites au bureau de la Conservation des hypothèques avant l'entrée en vigueur du Code civil allemand (7). En d'autres termes, elles restent opposables aux tiers en l'absence de toute publicité au livre foncier dès lors qu'elles grèvent un immeuble situé dans une circonscription foncière dotée d'un ancien livre foncier définitif ou d'un ancien livre de propriété et à condition que leur publication soit intervenue avant le 1er janvier 1900. Dans la perspective de constituer un livre foncier informatisé à jour et de d'affermir la sécurité juridique, l'article 2 de la loi de la proposition adoptée par le Sénat impose, à titre transitoire, une publicité obligatoire de ces servitudes au livre foncier dans un délai de 5 ans à compter de la promulgation de la loi, à peine d'extinction. Les modalités d'application de cette obligation seront précisées par un décret en Conseil d'Etat. b) La définition des sanctions du défaut de publicité L'article 40 actuel de la loi civile du 1er juin 1924 sanctionne le défaut de publicité au livre foncier par l'inopposabilité aux tiers. Il s'agit de la sanction classique en matière de publicité foncière envisagée en tant qu'institution civile. En instaurant une publicité informative par la loi d'harmonisation du 29 décembre 1990, le législateur a cependant omis de préciser la sanction applicable à l'absence d'inscription. Cette sanction ne saurait être l'inopposabilité des droits et actes entrant dans le champ d'application du livre foncier dans sa fonction d'institution de police. En effet, une peine de cette nature est inadaptée. Pour s'en convaincre, il suffit d'imaginer une demande en justice tendant au prononcé de la nullité d'un contrat dont le défaut de publicité serait sanctionné par une inopposabilité ! Il s'agit incontestablement d'un non-sens juridique. La seule peine concevable est l'irrecevabilité de l'action. Pour lever toute ambiguïté en ce qui concerne les effets découlant de l'absence de publicité, la proposition de loi sénatoriale précise et clarifie utilement les sanctions attachées au défaut de transcription au livre foncier : inopposabilité aux tiers des droits réels immobiliers et irrecevabilité des demandes en justice tendant à obtenir la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort, sans préjudice du jeu des règles de la responsabilité civile. c) L'harmonisation du droit local des incapacités Un grand nombre d'articles contenus dans la loi du 1er juin 1924 concerne l'inscription des droits de personnes placées sous tutelle ; la proposition de loi adoptée par le Sénat procède à une modernisation de ces dispositions, afin de tenir compte, d'une part, de l'abrogation, par la loi du 29 décembre 1990 précitée, du droit local des incapacités et, d'autre part, du mouvement d'harmonisation du droit général et du droit local en cette matière, qui ne justifie plus le maintien de dispositions spécifiques. * * * Après l'exposé du rapporteur, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale. Après avoir salué la qualité du travail effectué par le rapporteur, M. Emile Blessig a souligné que la mise en _uvre de l'informatisation du livre foncier d'Alsace -Moselle par un groupement d'intérêt public, dont le budget est alimenté par une taxe additionnelle aux droits d'enregistrement prélevée par les trois départements concernés pour un montant de 350 millions de francs, constituait une première expérience de décentralisation en matière de nouvelles technologies de l'information. Il a indiqué que l'adoption de la proposition de loi était nécessaire avant de choisir l'opérateur qui serait chargé de construire le logiciel permettant d'informatiser le livre foncier. Intervenant en application de l'article 38, alinéa premier du Règlement, M. Bernard Schreiner a rappelé l'importance de la proposition de loi pour l'Alsace-Moselle et souligné les avantages qui s'attachaient à l'existence d'un livre foncier. M. Dominique Raimbourg a souhaité savoir si l'informatisation du livre foncier d'Alsace-Moselle pourrait servir d'exemple pour l'informatisation du cadastre et du registre des hypothèques dans le reste de la France, tandis que M. Nicole Feidt s'est interrogée sur la composition du groupement d'intérêt public chargé de la mise en _uvre de l'informatisation. En réponse aux différents intervenants, le rapporteur a considéré que la mise en _uvre de l'informatisation du livre foncier d'Alsace-Moselle pourrait effectivement servir d'exemple pour d'autres expériences dans le reste de la France, tout en précisant qu'il ne s'agissait nullement d'imposer un modèle aux autres régions. Il a indiqué que le groupement d'intérêt public appelé à remplacer le GILFAM serait, selon la rédaction retenue par le Sénat, composé à parité de représentants de l'Etat et de représentants des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, de la région d'Alsace, de l'Institut du droit local et du conseil interrégional des notaires. Article 1er L'article premier de la proposition de loi adoptée par le Sénat procède à une réécriture complète du chapitre III du titre II de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; c'est ainsi près de 35 articles de la loi portant sur le régime applicable à la publicité foncière en Alsace-Moselle, qui sont revus dans le sens d'une simplification, d'une modernisation et d'une harmonisation avec le droit général. Article 36 de la loi du 1er juin 1924 La rédaction adoptée par le Sénat pour l'article 36 de la loi du 1er juin 1924 reprend en substance celle du premier alinéa de l'article 36 actuellement en vigueur, les deux derniers alinéas de cet article figurant désormais dans le nouvel article 36-1. L'article 36 se limite désormais à définir le champ d'application géographique du régime de publicité foncière mis en place par la loi du 1er juin 1924, en précisant qu'il s'agit des trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; en conséquence, tous les immeubles situés dans ces départements relèvent du régime de droit local, la domiciliation effective de leurs propriétaires étant sans incidence. Article 36-1 de la loi du 1er juin 1924 L'article 36-1 rappelle la nature des droits concernés par la publicité foncière en Alsace-Moselle, en indiquant qu'il s'agit des droits sur les immeubles, des privilèges et des hypothèques prévus par la législation civile française, auxquels viennent s'ajouter des dispositions spécifiques à l'Alsace-Moselle. La rédaction adoptée par le Sénat pour le premier alinéa de l'article 36-1 propose ainsi, dans un objectif de simplification, une synthèse de différents articles figurant à la fois dans la loi du 1er juin 1924 et dans des textes épars du droit civil local ; elle reprend d'abord, en la simplifiant, la rédaction du deuxième alinéa de l'article 36 en vigueur, qui fait référence aux droits réels immobiliers prévus par la loi française, ainsi qu'aux prestations foncières prévues par les articles 1105, 1107 et 1108 du code civil local ; la prestation foncière est une sûreté réelle immobilière assortie d'un droit de suite et d'un droit de préférence, renforcée par une obligation personnelle à la charge du propriétaire débiteur, grevant un immeuble en garantie d'obligations ayant pour objet des prestations périodiques (remises des fruits en nature, exécution de travaux) dont le disposant ou un tiers est créancier à l'encontre de l'acquéreur (8). L'usage des prestations foncières s'étant généralisé dans la pratique alsacienne, essentiellement dans les cas d'aliénation de petits domaines ruraux cédés de leur vivant par les propriétaires exploitants à leurs enfants, avec charge foncière grevant l'immeuble au profit du cédant, la loi de 1924 n'a pas voulu porter atteinte à ces usages. Sont ainsi maintenus en vigueur le premier alinéa de l'article 1105, les articles 1107 et 1108 du code civil local, ainsi que l'article 75 de la loi d'application de ce code du 17 avril 1899. Le premier alinéa de l'article 1105 autorise l'établissement de redevances au profit de personnes déterminées ; l'article 75 prévoit que les prestations périodiques promises par l'acquéreur d'un immeuble ne doivent pas dépasser la durée de vie de l'aliénateur ou d'un tiers ; les articles 1107 et 1108 appliquent aux redevances périodiques échues les dispositions relatives aux intérêts des créances hypothécaires. L'article 36-1 mentionne également comme droits soumis au régime de publicité foncière ceux conférés par les privilèges et les hypothèques, tels que prévus par la législation civile française ; sont ainsi repris, dans une rédaction quasiment identique, les articles 47 et 51 de la loi du 1er juin 1924. Figure enfin, dans l'énumération faite au premier alinéa de l'article 36-1, une disposition spécifique à l'Alsace-Moselle concernant l'hypothèque d'exécution forcée encore dénommée hypothèque de garantie ; cette hypothèque résulte d'un titre exécutoire donnant au créancier une garantie lui permettant d'inscrire son droit sur le bien du débiteur afin de préserver son rang. Le caractère obligatoire de son inscription résultant non de la loi du 1er juin 1924 mais de l'article 866 du code de procédure civile locale, le Sénat a fort opportunément choisi d'y faire référence afin de rassembler dans un seul et même article l'ensemble des textes imposant l'inscription d'un droit sur le livre foncier. Le deuxième alinéa de l'article 36-1 reprend, en les modernisant afin d'en supprimer les références obsolètes, les dispositions figurant au dernier alinéa de l'actuel article 36 ; il énonce ainsi le principe selon lequel le régime juridique applicable aux droits soumis à publicité foncière, qu'il s'agisse de l'organisation de ces droits, de leur constitution, de leur transmission ou de leur extinction, est fixé par la législation civile française, sous réserve de dispositions spécifiques de droit local toujours en vigueur. Article 36-2 de la loi du 1er juin 1924 L'article 36-2, nouvellement créé par la proposition de loi adoptée par le Sénat, reprend partiellement les dispositions qui figurent actuellement à l'article 37 de la loi du 1er juin 1924. Le premier alinéa de l'article donne une définition matérielle du livre foncier, en précisant qu'il s'agit de l'ensemble des registres destinés à la publicité des droits sur les immeubles. Par rapport à la rédaction actuelle figurant à l'article 37, la proposition de loi adoptée par le Sénat supprime toute référence au livre foncier définitif, livre foncier provisoire et livre de propriété ; ces trois livres étant regroupés sous la même désignation de livre foncier depuis 1925, le maintien d'une telle distinction dans la loi du 1er juin 1924 ne présentait plus qu'un intérêt historique. La mention de l'ensemble des registres suffit à couvrir les divers types de volumes encore utilisés, que ce soit les livres mentionnés, mais également les fichiers et registres d'accès et le registre des dépôts notamment. Il existe actuellement un livre foncier des immeubles pour chaque circonscription foncière, une circonscription foncière correspondant en principe à une commune ; les registres composant le livre foncier sont numérotés dans l'ordre chronologique de leur ouverture et sont constitués de feuillets ; un feuillet regroupe l'ensemble des immeubles appartenant à un propriétaire déterminé dans une même circonscription foncière et est divisé en trois sections, la première désignant les immeubles conformément aux indications du cadastre, la deuxième comprenant « les charges et restrictions du droit de disposer », tandis que la troisième est réservée aux « privilèges, hypothèques et à la séparation des patrimoines ». Exigeant, compte tenu de son volume, une manipulation difficile, la consultation du livre foncier devait être modernisée grâce à l'informatisation de son contenu ; la loi du 29 avril 1994 relative à l'informatisation du livre foncier dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle a permis de définir le cadre juridique préalable à cette informatisation ; le deuxième alinéa proposé pour l'article 36-2 permet dorénavant d'inscrire, dans la loi du 1er juin 1924, cette faculté nouvelle consistant à tenir le livre foncier sur support informatique ; dans cet objectif, le Sénat, sur proposition de son rapporteur, a souhaité faire clairement référence à l'article 1316-1 du code civil, introduit par la loi n° 2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de l'information et relative à la signature électronique. Aux termes de cet article, « l'écrit sous forme électronique est admis en preuve au même titre que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité. » Le troisième alinéa de l'article 36-2 confie à l'autorité du juge du livre foncier la tenue du livre foncier ; il s'agit là, par une disposition nouvelle, de rappeler une différence fondamentale avec le dispositif de publicité foncière existant sur le reste du territoire : le service du livre foncier en Alsace-Moselle dépend du Ministère de la justice et est assuré par un juge, alors que cette mission est impartie dans le droit général de la publicité foncière à un conservateur des hypothèques relevant de la direction générale des impôts ; contrairement au conservateur des hypothèques, qui n'a qu'un rôle d'inscription avec un contrôle limité à la régularité formelle des actes, le juge du livre foncier exerce un rôle actif puisque, d'une part, il exerce un contrôle sur les requêtes en inscription en statuant conformément aux règles régissant la matière gracieuse et, d'autre part, il surveille l'exécution régulière des affaires par le secrétaire du bureau foncier. Les juges du livre foncier sont donc des juges spécialisés, généralement choisis parmi les greffiers ayant plus de quinze ans de fonctions. Le dernier alinéa proposé pour l'article 36-2 reprend une précision figurant actuellement à l'article 37 de la loi du 1er juin 1924, indiquant que « le service du livre foncier est assuré par le tribunal d'instance » ; les tribunaux d'instance disposent d'un effectif propre de juges du livre foncier, assistés par un ou plusieurs greffiers et personnels d'exécution ; l'ensemble constitue le bureau foncier du tribunal d'instance, chargé de la tenue du livre foncier pour toutes les circonscriptions foncières relevant du ressort du tribunal d'instance. Article 37 de la loi du 1er juin 1924 Partiellement réécrit à l'article 36-2 de la loi du 1er juin 1924, l'article 37, qui traitait auparavant de la définition du livre foncier, fait l'objet d'une nouvelle rédaction permettant de définir le régime de consultation du livre foncier. La consultation du livre foncier est actuellement organisée par les articles 50 et 51 du décret du 18 novembre 1924, qui distinguent deux modes d'accès, la consultation directe sur place et la consultation indirecte effectuée par demandes de copies ; le mode de consultation directe est réservé dans les textes à toute personne « qui fera valoir un intérêt légitime », les administrations publiques et les fonctionnaires de l'Etat, ainsi que les notaires, les avocats et les avoués étant dispensés de cette condition ; le mode de consultation indirecte n'exige, quant à lui, aucune condition et est ouvert à toute personne qui en fait la demande. Dans les faits, aucune définition légale n'ayant été donnée à la notion d'intérêt légitime, la consultation directe du livre foncier est ouverte à tous, en faisant ainsi le mode de consultation le plus largement utilisé. L'accès direct à la publicité constitue l'un des grands avantages du régime foncier alsacien-mosellan par rapport au système de publicité foncière du droit général, dans lequel la délivrance de renseignements se fait exclusivement par réquisition écrite ; en outre, l'accès au livre foncier est gratuit et permet d'obtenir instantanément un état-civil complet du patrimoine immobilier d'une personne, les informations y figurant étant présumées exactes en vertu des pouvoirs d'investigation et de contrôle conférés au juge du livre foncier ; le système alsacien-mosellan combine ainsi les impératifs de sécurité, de rapidité et de transparence lui conférant une indéniable supériorité sur celui de la conservation des hypothèques. La proposition de loi adoptée par le Sénat modifie sensiblement ce mode d'accès à la publicité foncière afin de tenir compte de deux exigences nouvelles : l'informatisation du livre foncier, qui, en permettant une consultation à distance, risque de générer une multiplication des demandes et rend totalement obsolète la condition de l'intérêt légitime à faire valoir ; le droit au respect de la vie privée, les informations contenues dans le livre foncier, telles que le régime matrimonial de la personne propriétaire ou l'inscription de condamnations impliquant une restriction au droit de disposer du bien, exigeant une protection particulière. Afin de tenir compte de ces nouveaux impératifs, inconnus en 1924, la proposition de loi, tout en maintenant la distinction traditionnelle en fonction de la qualité des consultants, aménage l'accès au livre foncier en distinguant d'une part, les informations essentielles englobant celles relatives à l'identité du propriétaire et à l'énoncé des droits et charges dont il est titulaire et, d'autre part, les autres informations, telles que le régime matrimonial ou le montant du prêt garanti. Le premier paragraphe concerne ainsi les données essentielles, dont l'accès, sur place ou à distance, reste entièrement libre ; sont définies comme données essentielles au sens de la publicité foncière, les nom, prénoms du titulaire des droits, ou sa dénomination s'il s'agit d'une personne morale, l'identification cadastrale de l'immeuble, ainsi que la nature des droits, des servitudes, des sûretés et des charges relatifs à celui-ci. Il s'agit ainsi, pour le rapporteur de la commission des lois du Sénat M. Daniel Hoeffel, de permettre un accès le plus large possible aux « données minimales susceptibles d'être connues de tous sans causer d'atteinte à la vie privée ». Le deuxième paragraphe concerne l'accès à l'ensemble des données de publicité foncière détenues par un bureau foncier ; cet accès serait désormais réservé aux agents habilités des services de l'Etat, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics de coopération, pour l'exercice de leurs compétences, ainsi qu'aux notaires, avocats et huissiers de justice ; l'accès de ces professionnels exige toutefois qu'ils agissent dans le cadre de l'exercice d'un mandat légal, formule qui exclut notamment la consultation de l'ensemble des données du livre foncier par un notaire qui agirait dans le cadre d'une activité de courtage immobilier. Par rapport au droit de consultation directe reconnue aux professionnels par le décret du 18 novembre 1924, le droit de consultation est élargi dans le nombre de ses bénéficiaires, puisqu'il s'étend désormais aux huissiers de justice, mais restreint dans l'exercice de ses modalités, puisqu'est désormais exigé l'exercice d'un mandat légal. Le deuxième paragraphe reconnaît également à toute personne le droit d'accès, sur place ou à distance, à l'ensemble des données contenues dans le livre foncier, à condition qu'elle puisse se prévaloir d'une autorisation du titulaire de la propriété, d'un titre exécutoire ou d'une autorisation judiciaire. Le Sénat a fort justement défini, par rapport à la proposition de loi initiale, la notion de propriétaire du bien en faisant une mention explicite à l'article 543 du code civil ; il s'agit ainsi de ne viser que le propriétaire au sens strict, le propriétaire indivis, le copropriétaire ou le nu-propriétaire, à l'exclusion des personnes disposant sur le bien d'un droit de jouissance, d'un privilège ou d'une servitude. Le troisième paragraphe proposé pour l'article 37 rend obligatoire l'information des titulaires des droits ayant fait l'objet d'une inscription, avec l'indication de leur droit d'accès et de rectification. La notification prévue au troisième paragraphe permet ainsi une information personnelle du titulaire des droits, celui-ci ayant, dans la majorité des cas, formulé sa requête d'inscription par la voie d'un mandataire, qu'il soit notaire, avocat ou avoué. L'obligation de notification implique également que soit informé le titulaire d'un droit de propriété de l'inscription d'une hypothèque venant grever son bien. Déjà prévu par l'article 19 du décret du 18 novembre 1924, le principe de cette notification et le droit de rectification qui en découle est, par ailleurs, conforme aux exigences de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés. Le deuxième alinéa du paragraphe précise, en outre, que toute personne ayant des droits sur un bien peut obtenir communication des informations la concernant et exiger, sous réserve des droits des tiers, la modification ou la suppression d'une information inexacte, incomplète ou périmée ; cette rédaction s'inspire là encore de la loi du 6 janvier 1978 précitée, et plus précisément de ses articles 35 et 36. Il appartiendra au juge du livre foncier de se prononcer sur la légitimité d'une telle demande ; en cas de contestation, la demande devra être portée au contentieux. Le quatrième paragraphe prévoit le versement d'une redevance pour la consultation et la communication des informations inscrites au livre foncier ; il s'agit là d'une innovation en droit alsacien-mosellan, qui doit s'analyser comme le corollaire de l'informatisation et de la modernisation du livre foncier par la voie de la consultation à distance prévue dans les deux premiers paragraphes de l'article. Le gain de temps réalisé par les professionnels consultant le livre foncier à distance et la fiabilité du système informatisé mis en _uvre constitueront de toutes façons, en dépit de cette redevance, un avantage appréciable pour les professionnels. Une redevance correspondant aux services apportés serait en outre de nature à limiter un usage abusif du système. Cependant, l'alignement avec le régime de la conservation des hypothèques, pour lequel l'accès est entièrement payant, n'est pas complet dans la mesure où la redevance ne sera exigée que pour la consultation de l'ensemble des données figurant au livre foncier ; la consultation des données essentielles, telles que prévues au premier paragraphe de l'article 37, restera entièrement libre et gratuite. Les modalités du versement de cette redevance feront l'objet d'un décret en Conseil d'Etat ; néanmoins, l'article 1er quater de la proposition de loi adoptée par le Sénat, introduit par un amendement du Gouvernement, précise d'ores et déjà que la redevance servira en partie à financer la création et l'administration d'un établissement public chargé d'assurer la maintenance des systèmes informatisés du livre foncier. Le dernier paragraphe de l'article 37 renvoie à un décret en Conseil d'Etat les conditions d'application dudit article ; devront notamment être précisées les modalités de consultation à distance, ainsi que la définition des données essentielles consultables directement. Article 38 de la loi du 1er juin 1924 L'article 38 de la loi du 1er juin 1924 récapitule l'ensemble des droits devant faire l'objet d'une inscription au livre foncier. Déjà complété par la loi n° 90-1248 du 29 décembre 1990 portant diverses mesures d'harmonisation entre le droit applicable dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et le droit applicable dans les autres départements, cet article fait de nouveau l'objet de différents aménagements afin de poursuivre l'harmonisation des droits inscriptibles avec le droit général. Le premier alinéa précise la finalité de l'inscription des droits sur le livre foncier, en énonçant qu'il s'agit ainsi de les rendre opposables aux tiers ; cette précision est d'autant plus utile que les articles 38-3 et 38-4, introduits dans la loi du 1er juin 1924 par la proposition de loi, distinguent désormais la procédure d'inscription aux fins d'opposabilité aux tiers de celle qui n'a d'autre objet que la simple information ou la recevabilité des demandes en justice. Les onze autres alinéas de l'article 38 procèdent à l'énumération des droits inscriptibles ; cette liste de droits a un caractère limitatif, à l'exception toutefois des droits énumérés au f) de l'article, qui vise les restrictions conventionnelles et judiciaires au droit de disposer, avec, comme il sera dit plus loin, une énumération purement énonciative. Le deuxième alinéa (a) de l'article 38 rend ainsi inscriptible « la propriété immobilière, quelle que soit son mode d'acquisition » ; la rédaction utilisée pour l'article 38 possède un caractère très général, permettant d'englober tous les cas de mutation et d'attribution de la propriété, qu'ils soient réalisés par actes entre vifs ou à cause de mort, à titre onéreux ou à titre gratuit, à titre universel ou à titre particulier. Par rapport à la rédaction actuelle de l'article 38, la commission des lois du Sénat a supprimé la précision visant à inclure, dans les modes d'acquisition de la propriété, « notamment les cas d'attribution par voie de partage » : le maintien de cette précision est, en effet, apparu inutile du fait de l'alignement, par un décret-loi du 30 octobre 1935, du droit général sur le droit local soumettant les actes et jugements déclaratifs à l'obligation d'inscription. Le troisième alinéa (b) vise comme droits réels immobiliers devant faire l'objet d'une publication au livre foncier : - la superficie ; le droit de superficie consiste dans le droit réel qu'un propriétaire exerce sur la surface d'un fonds, dont le dessous appartient à un autre propriétaire ; - l'emphytéose, qui se définit comme un bail à très long terme ayant ordinairement pour objet des terres que le preneur ou emphytéote s'engage à mettre en culture et comportant le paiement d'une redevance annuelle ; - tout autre droit réel conféré par un bail ; il s'agit ici d'un ajout de la proposition de loi à la liste des droits figurant à l'article 38 qui permettra ainsi d'inclure de façon globale tous les droits s'appliquant à un bien particulier ; cette disposition « balai » permet notamment de prévoir l'inscription des droits conférés par un bail à construction ; constitue un bail à construction le bail par lequel le preneur s'engage, à titre principal, à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en bon état d'entretien pendant toute la durée du bail ; le bail à construction est conclu pour une durée comprise entre 18 et 99 ans ; l'énumération de l'article 38 de la loi du 1er juin 1924 ne pouvait bien évidemment faire figurer le bail à construction, dont l'existence remonte à une loi du 16 décembre 1964, parmi les droits devant faire l'objet d'une inscription au livre foncier ; néanmoins, la jurisprudence, comme la doctrine, a toujours reconnu que l'ensemble des droits réels immobiliers établis par les lois civiles françaises après 1924 devaient s'appliquer en Alsace-Moselle ; en vertu de cette solution jurisprudentielle, le bail à construction fait déjà l'objet d'une inscription au livre foncier et la proposition de loi adoptée par le Sénat se limite en fait à accorder les textes à cette jurisprudence ; - l'usufruit établi par la volonté de l'homme ; cette expression vise à exclure les inscriptions d'usufruit et les droits de jouissance dérivant directement de la loi, ainsi, l'usufruit du conjoint survivant ou le droit de jouissance des père et mère sur les biens de leurs enfants mineurs ; - l'usage et l'habitation ; les droits d'usage et d'habitation sont des variantes de l'usufruit ; le droit d'usage est réglementé par les articles 625 et suivants du code civil et permet à son bénéficiaire, par la voie conventionnelle, d'utiliser un bien ainsi que d'en percevoir les fruits, dans les limites de ses besoins et de ceux de sa famille ; le droit d'habitation, prévu aux articles 632 et 633 du code civil, est un droit d'usage portant spécifiquement sur une maison ; - les servitudes foncières établies par le fait de l'homme ; la formule utilisée par l'article 38 exclut de l'obligation de publicité les deux autres catégories de publicité que prévoit le code civil, qui sont les servitudes dérivant de la situation des lieux (servitudes naturelles) et les servitudes résultant des obligations imposées par la loi (servitudes légales) ; les servitudes ainsi visées sont celles acquises par titre, par prescription (article 690 du code civil : servitudes continues et apparentes acquises par la possession trentenaire) ou par destination du père de famille (articles 692 et 693 du code civil : servitudes continues et apparentes issues de deux fonds actuellement divisés ayant appartenu au même propriétaire) ; ces servitudes ne résultant pas d'un titre, elles n'ont pas, en droit général, l'obligation d'être publiées ; la formulation retenue en droit local constitue donc une spécificité ; - l'antichrèse ; prévue à l'article 2085 du code civil, l'antichrèse désigne une convention par laquelle le créancier acquiert le droit de percevoir les fruits d'un immeuble, à charge pour lui de les imputer annuellement sur les intérêts, puis sur le capital de sa créance ; l'obligation d'inscription de l'antichrèse au livre foncier est identique à celle existant en droit général ; - le droit réel résultant d'un titre d'occupation du domaine public de l'Etat ou d'un établissement public de l'Etat délivré en application des articles L. 34-1 à L. 34-9 de code du domaine de l'Etat et de l'article 3 de la loi n° 94-631 du 25 juillet 1994 complétant le code du domaine de l'Etat et relative à la constitution de droits réels sur le domaine public ; - les prestations foncières ; inconnues en droit général, les prestations foncières existent dans les trois départements de l'Est depuis le 1er janvier 1900, date d'entrée en vigueur du code civil local. Leur régime est défini par les articles 1105 (premier alinéa), 1107 et 1108 du code civil local, ainsi que par l'article 75 de la loi d'application de ce code du 17 avril 1899. Les prestations foncières ne peuvent grever qu'un immeuble et garantissent l'exécution d'obligations périodiques, tels que le paiement d'une rente viagère ou l'obligation de cultiver des terres. Elles ne peuvent être constituées qu'en cas d'aliénation d'un immeuble (vente, échange, apport en société, donation) et leur durée est limitée à celle de la vie de l'aliénateur ou d'un tiers. Le quatrième alinéa (c) prévoit l'obligation d'inscription de tous les privilèges et les hypothèques ; par cette définition très générale, la loi du 1er juin 1924 a souhaité viser sans distinction l'ensemble des privilèges généraux et des privilèges spéciaux, les hypothèques conventionnelles, légales et judiciaires. Le cinquième alinéa (d) impose au locataire ou au fermier de publier au livre foncier le droit de bail ou de fermage dont il bénéficie, lorsque la durée du bail est supérieure à douze ans ; cette disposition correspond à l'obligation d'inscription à la conservation des hypothèques prévues dans le droit général par le décret du 4 janvier 1955. Le sixième alinéa (e) soumet, suivant le même principe que l'inscription des baux de plus de douze ans, le paiement anticipé ou la cession d'une somme équivalant à au moins trois années de loyers ou de fermages non échus. Le septième alinéa (f) impose l'obligation de publier les restrictions au droit de disposer insérées dans un acte d'aliénation ou découlant de tous autres actes ; à ce titre, la rédaction de la loi du 1er juin 1924 procède à une énumération énonciative, et non limitative, des restrictions susceptibles de faire l'objet d'une publication. Sont ainsi couvertes par cette obligation les restrictions découlant de la volonté de l'homme, telles que la promesse de vente, le droit de retour conventionnel, le droit de réméré ou les legs et donations sous conditions d'ordre conventionnel. Le même alinéa inclut également les restrictions découlant de décisions judiciaires telles que la saisie immobilière. Le huitième alinéa (g) soumet à inscription une autre restriction au droit de disposer, d'origine légale celle-ci, concernant la résolution d'un contrat synallagmatique ; prévue par l'article 1184 du code civil, cette clause résolutoire intervient dans les cas d'inexécution des engagements pris dans le cadre d'un contrat synallagmatique. Le neuvième alinéa (h) prévoit l'inscription au livre foncier du droit à révocation d'une donation ; constituant une restriction légale au droit de disposer, le droit à révocation d'une donation peut intervenir pour inexécution des charges, pour cause d'ingratitude (article 955 du code civil : cas où le donataire a attenté à la vie du donateur, s'est rendu coupable envers lui de sévices, délits, injures graves ou lui a refusé des aliments), pour survenance d'enfants (article 960 du code civil : cas où un enfant survient après une donation faite entre personnes qui n'avaient pas de descendants) ou dans les cas de donations faites entre époux (article 1096 du code civil). Le dixième alinéa (i) soumet à inscription le droit au rapport en nature d'une donation (articles 859 et 860 du code civil : rapport à la succession des biens reçus du défunt par donation entre vifs). Le onzième alinéa (j) prévoit l'inscription sur le livre foncier des droits résultant des actes et décisions constatant ou prononçant la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort ; introduite par la loi n° 90-1248 du 29 décembre 1990 dans l'objectif d'un alignement du livre foncier avec les dispositions du droit général prévues dans le décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière, cette disposition s'applique également, de par la rédaction actuelle de l'article 38, aux demandes en justice tendant à obtenir la décision prononçant la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort. La proposition de loi adoptée par le Sénat a néanmoins supprimé cette précision concernant les demandes en justice, pour la réintroduire plus loin, dans un article 38-4 qui lui est spécifiquement consacré ; cette suppression à l'article 38 est motivée par le fait que l'inscription des actes et décisions n'emporte pas les mêmes conséquences que l'inscription des demandes en justice : dans le premier cas, l'absence d'inscription emporte inopposabilité aux tiers, dans le second cas, il y irrecevabilité de la demande. La sanction de la non-publication étant différente, c'est donc tout à fait à bon escient qu'a été crée un nouvel article traitant des demandes en justice. Le douzième et dernier alinéa (k) fait l'objet d'une nouvelle rédaction; dans l'article 38 actuellement en vigueur, l'alinéa k) est consacré à l'obligation d'inscription des décisions rejetant les demandes en justice mentionnées à l'alinéa précédent ; l'obligation d'inscription des demandes en justice aux fins d'opposabilité aux tiers ayant été supprimée, pour être transférée à l'article 38-4, l'alinéa dans sa rédaction actuelle devient sans objet. Le Sénat a réutilisé cet alinéa pour inclure dans les obligations d'inscription toute servitude dont la publicité foncière est prévue par la loi à peine d'inopposabilité. Il s'agit ainsi, par une disposition générale, de permettre à l'avenir l'inscription de toute servitude que la loi viendrait à prévoir ; l'énumération de l'article 38 étant jusqu'à présent limitative, les textes ultérieurs à 1924 exigeaient, en effet, une modification de la loi du 1er juin 1924, pour que soient prévues une nouvelle inscription au livre foncier. Au total, la rédaction adoptée par le Sénat pour l'article 38 ne bouleverse pas les conditions d'inscription des droits au livre foncier ; les nouveautés apportées permettent en premier lieu de clarifier la rédaction en précisant que l'inscription emporte des conséquences sur l'opposabilité aux tiers ou en distinguant les effets de la demande en justice de ceux des actes résultant de ces demandes en justice ; la rédaction adoptée permet également de moderniser la rédaction, en l'actualisant afin d'y inclure des éléments postérieurs à 1924, par une disposition générale incluant toutes les servitudes prévues par la loi ou en citant expressément les baux à construction. Article 38-1 de la loi du 1er juin 1924 Cet article permet de déterminer avec précision le moment à partir duquel l'inscription d'un droit prend effet vis-à-vis des tiers ; le régime local de publicité foncière actuellement défini à l'article 40 de la loi du 1er juin 1924 comporte, en effet, une ambiguïté que la nouvelle rédaction proposée par le Sénat à l'article 38-1 permet de clarifier. La rédaction actuelle précise ainsi que jusqu'à leur inscription définitive, les droits et restrictions visés à l'article 38 ne peuvent être opposés aux tiers ; l'inscription ne prend ainsi effet qu'une fois que le bureau foncier a instruit la requête, et non à compter du dépôt de cette requête. Afin de remédier à une disposition qui s'est révélée, en matière de redressement judiciaire notamment, défavorable au crédit hypothécaire et à la sécurité des transactions, la loi du 29 décembre 1990 précitée a complété l'article 40 en précisant que « l'inscription prend rang à compter du dépôt de la requête » ; cet ajout a cependant été source de complication puisque l'article 40 fixe désormais le rang de l'inscription à la date du dépôt de la requête et l'opposabilité à la date de l'inscription définitive. Dans un objectif de simplification, le principe retenu par la rédaction adoptée pour le Sénat pour l'article 38 est celui de l'opposabilité aux tiers à compter de la date du dépôt de la requête. Le rang de l'inscription ainsi que les effets de l'opposabilité aux tiers sont donc déterminés par le même événement, qui est la requête formulée devant le juge du livre foncier ; cette solution a également le mérite de ne pas faire dépendre les effets de l'opposabilité aux tiers des délais de traitement de la requête. L'opposabilité résultant du dépôt de la requête reste cependant provisoire car elle est subordonnée, selon la rédaction proposée à l'article 38-1, à la réalisation de l'inscription effective des droits et restrictions concernés. Le juge du livre foncier a en effet, contrairement au Conservateur des hypothèques, le pouvoir, après instruction de la requête, de la rejeter. Article 38-2 de la loi du 1er juin 1924 L'article 38-2, introduit par le Sénat dans la loi du 1er juin 1924, reprend en partie les dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article 40 ; il s'agit de prévoir, par rapport à l'article 38-1, des dispositions particulières relatives à certains droits. Le premier alinéa concerne les donations et restitutions : il précise que le régime de l'opposabilité aux tiers reste régi par les dispositions des articles 941 et 1070 du code civil ; aux termes de ces articles, le défaut de publicité des donations peut être opposé par « toute personne ayant intérêt » et le défaut de publicité des substitutions par « les créanciers et tiers acquéreurs ». il s'agit ainsi, par rapport à l'article 38-1 qui désigne par « tiers » toute personne qui a des droits sur les immeubles et les a fait inscrire régulièrement, d'élargir le cercle des tiers pouvant opposer le défaut de publicité. La référence aux articles 941 et 1070 du code civil n'a dans les faits qu'une portée limitée, la jurisprudence ayant en pratique aboli les distinctions existant entre la définition donnée aux tiers par le droit civil local et celle existant dans le code civil ; les auteurs de la proposition de loi ont cependant préféré garder ce renvoi au code civil, sa suppression pouvant donner lieu à des interprétations malencontreuses. Le deuxième alinéa de l'article 38-2 est également une reprise d'une disposition figurant à l'actuel article 40 de la loi du 1er juin 1924 ; elle concerne la publicité des baux de plus de douze années et précise que ceux-ci, lorsqu'ils n'ont pas fait l'objet d'une publication sont inopposables aux tiers pour une durée de plus de douze années ; il s'agit ainsi de faire écho au d) de l'article 38, qui prévoit l'inscription au livre foncier du droit du locataire ou du fermier en cas de bail d'une durée de plus de douze années. Lorsque ceux-ci n'ont pas été publiés, ils sont très logiquement inopposables aux tiers ; cette inopposabilité ne joue pas cependant pour les douze premières années pour lesquelles, publiés ou non, les baux sont opposables comme des baux ordinaires. Article 38-3 de la loi du 1er juin 1924 L'article 38-3 inséré par la proposition de loi concerne les cas d'inscription sur le livre foncier pour information des tiers ; il ne s'agit donc plus, comme à l'article 38, de l'obligation d'inscription aux fins d'opposabilité. La rédaction adoptée par le Sénat reprend à la fois des dispositions contenues à l'article 38-1 de la loi du 1er juin 1924 et des dispositions relevant du droit général, prévu par le décret du 4 janvier 1955 précité. Les règles de publicité relatives à la déclaration de faillite figuraient auparavant au livre foncier comme une restriction au droit de disposer prévue à l'article 38 de la loi du 1er juin 1924 ; la loi du 29 décembre 1990 a supprimé cette obligation dans l'article 38 pour le remplacer, à l'article 38-1, par une simple mention aux seules fins d'information des tiers. L'article 38-3 reprend en substance la rédaction de l'article 38-1. L'obligation d'inscription, sur le livre foncier, des limitations administratives au droit de propriété et des dérogations à ces limitations résulte d'un souci d'harmonisation avec le droit général ; l'article 36 du décret du 4 janvier 1955 prévoit, en effet, dans un but d'information des tiers, une telle inscription. La modification proposée est rendue possible par l'informatisation du livre foncier : de telles mentions imposent en effet d'ajouter sur les registres une division particulière propre à ces mentions informatives. Le non-respect des obligations prévues à l'article 38-3 est sanctionné non par l'inopposabilité du droit, mais par la mise en jeu de la responsabilité délictuelle sur le fondement de l'article 1382 du code civil. Article 38-4 de la loi du 1er juin 1924 L'article 38-4 inséré par la proposition de loi adoptée par le Sénat prévoit un troisième motif d'inscription sur le livre foncier ; il ne s'agit plus d'une inscription aux fins d'opposabilité aux tiers, ni de leur information, mais d'une condition de recevabilité de la demande. Dans sa rédaction actuelle, le j) de l'article 38 prévoit l'inscription des demandes en justice tendant à obtenir la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort ; cette obligation résulte d'une disposition introduite par la loi du 29 décembre 1990 précitée, qui concernait également les actes et décisions résultant de ces demandes en justice. La loi n'a toutefois pas précisé la sanction de cette obligation et la jurisprudence a refusé jusqu'à présent d'étendre au droit local, sans fondement législatif, le droit général qui prévoit l'irrecevabilité de la demande, En fait, en cas de non-publication, seuls les droits peuvent être sanctionnés par l'inopposabilité aux tiers ; la non-publication des demandes en justice ne saurait en elle-même encourir une telle sanction. Il est en effet difficile d'imaginer une demande en justice tendant au prononcé de la nullité d'un contrat, dont le défaut de publicité serait sanctionné par une inopposabilité...En conséquence, la proposition de loi adoptée par le Sénat a fort justement supprimé la disposition relative aux demandes en justice à l'article 38, pour créer un nouvel article 38-4 sanctionnant l'absence d'inscription par une irrecevabilité de ces demandes. Article 39 de la loi du 1er juin 1924 La proposition de loi adoptée par le Sénat a repris quasiment à l'identique, sous réserve d'une correction purement formelle, la rédaction de l'article 39 actuellement en vigueur, consacré à la procédure de prénotation. La prénotation constitue une spécificité du droit local ; elle permet, lorsque l'inscription des droits prévue à l'article 38 ne peut momentanément pas être réalisée, soit en raison d'un litige dont le droit fait l'objet, soit parce que celui-ci n'a pas encore définitivement pris naissance, de garantir, par une mesure conservatoire sur le livre foncier, le rang à l'inscription future du droit. Permettant de la sorte de préserver l'avenir, la prénotation ne constitue toutefois qu'une mesure provisoire, qui doit être confirmée par la suite par l'inscription définitive. Tous les droits énumérés à l'article 38 peuvent faire préalablement l'objet d'une prénotation ; il est cependant nécessaire pour cela que cette procédure ait recueilli le consentement des intéressés ou ait été effectuée en vertu d'une décision judiciaire. Article 40 de la loi du 1er juin 1924 Une inscription au livre foncier est subordonnée à la présentation préalable d'une requête accompagnée des pièces qui justifient l'inscription. Le juge du livre foncier procède à une vérification de cette requête et de ses pièces annexes puis ordonne, si aucun obstacle ne s'y oppose, l'inscription du droit sur le livre foncier. L'article 40 concerne la procédure d'enregistrement de la requête ; il reprend pour cela une partie des dispositions contenues dans l'article 45 en vigueur, en modernisant leur rédaction afin de définir un cadre légal préalable à l'informatisation. Le premier alinéa énonce le principe de l'existence obligatoire d'une requête préalablement à l'inscription : il ne peut donc y avoir inscription d'office par le juge du livre foncier. Le deuxième alinéa précise que les requêtes sont enregistrées sur un registre spécial, couramment dénommé « registre des dépôts ». L'inscription se fait par ordre de présentation, au fur et à mesure des dépôts. Par rapport à la rédaction actuelle de l'article 45, la proposition de loi adoptée par le Sénat a supprimé toute référence au numéro d'ordre que devait revêtir chaque inscription, le Sénat ayant considéré qu'il s'agissait de précisions d'ordre réglementaire et renvoyé pour cela, en fin d'article, à un décret en Conseil d'Etat. Le troisième alinéa consacre la validité du registre des dépôts tenu sous une forme électronique en renvoyant, comme à l'article 36-2, aux dispositions de droit général du Code civil, sur l'écrit électronique. Cette reconnaissance est nécessaire en raison des effets juridiques attachés à l'enregistrement des requêtes en inscription, qui détermine l'opposabilité des droits et leur rang. Le quatrième alinéa constitue une nouveauté : il rend obligatoire, à peine de rejet, la présentation de la requête sous forme d'un modèle préétabli. Le traitement informatique exige, en effet, que soit rationalisée la présentation des requêtes ; il en résultera un gain de temps dans l'instruction des demandes d'inscription. Guidés par l'exemple du document hypothécaire normalisé, la commission d'harmonisation du droit privé alsacien-mosellan, le groupement d'intérêt public créé pour informatiser le livre foncier et le notariat d'Alsace et de Moselle ont en effet été conduits à préconiser un formalisme uniforme destiné à faciliter à la fois la rédaction des actes notariés et le traitement des requêtes par le greffe. L'application informatisée du livre foncier permettra en effet au notaire rédacteur d'un acte d'extraire de l'application les données utiles à celui-ci et de préparer en même temps cet acte et la requête en inscription. Cette modification importante des pratiques s'intègre dans le cadre plus général de l'informatisation des traitements, illustré par la dématérialisation des actes authentiques et par la signature électronique. La proposition de loi n'impose cependant pas le format électronique, pour deux raisons : - le dépôt des requêtes constitue un acte de procédure gracieuse, qui saisit le Tribunal d'Instance chargé du livre foncier. Ce dépôt est suivi après examen d'une décision du juge du livre foncier, ordonnant l'inscription du droit ou rejetant la requête. Un tel formalisme de nature judiciaire reste régi par les règles de procédure civile applicables en vigueur ; - rendre obligatoire la saisine du bureau foncier par voie informatique introduirait une discrimination entre les usagers de la publicité foncière. La transmission des actes accompagnant les requêtes doit donc pouvoir être effectuée sur des supports traditionnels. La forme de cette requête normalisée est en cours de définition, en étroite collaboration avec le notariat et les autres usagers professionnels du livre foncier pour ce qui concerne les besoins de leur profession (géomètre-expert cadastre). Article 41 de la loi du 1er juin 1924 L'article 41 adopté par le Sénat reprend l'essentiel de la rédaction de l'article 41 en vigueur : il confirme ainsi un principe essentiel du droit local de la publicité foncière, qui est la présomption simple d'exactitude. Cette présomption s'attache à l'inscription de tous les droits portées au livre foncier. Elle renforce ainsi la situation du titulaire du droit inscrit, évite au notaire de procéder à une recherche d'antériorité par un simple renvoi aux mentions figurant au livre foncier et limite sensiblement les risques de contentieux judiciaire. Par rapport à l'article 41 actuellement en vigueur, la proposition de loi adoptée par le Sénat supprime la deuxième phrase, qui lie la présomption d'inexistence à tout droit qui aurait été radié : le Sénat a en effet considéré qu'il n'était juridiquement pas exact de parler d'inexistence pour un droit radié à la suite d'une cause postérieure à son inscription. Article 42 de la loi du 1er juin 1924 L'article 42 adopté par le Sénat reprend, en la modernisant, la rédaction de l'actuel article 42 ; il énonce, au premier alinéa, l'obligation de procéder par acte authentique pour tout droit susceptible d'être inscrit sur le livre foncier ; la forme authentique de l'acte doit émaner d'un notaire, d'un tribunal ou d'une autorité administrative. En outre, la rédaction adoptée par le Sénat maintient, dans le deuxième alinéa, une règle de droit local importante pour la sécurité juridique : l'obligation de régulariser par un acte authentique tout acte sous seing privé translatif ou déclaratif d'un droit de propriété immobilière, ou constitutif ou translatif d'une servitude foncière dans les six mois suivant cet acte. Le texte proposé introduit néanmoins deux modifications à cette règle : il précise d'abord que la sanction de cette application est la caducité de l'acte, au lieu de la nullité prévue actuellement par l'article 42 en vigueur. Cette substitution est juridiquement fondée dans la mesure où la nullité vise à sanctionner l'inobservation des conditions de formation des conventions prévues à l'article 1108 du code civil. Or, compte tenu du principe de consensualisme applicable en Alsace-Moselle depuis le remplacement du code civil allemand par le code civil français au 1er janvier 1925, l'acte authentique n'est pas une condition de validité des actes juridiques qui s'ajouteraient aux exigences de l'article 1108 du Code précité. En conséquence, la sanction civile attachée au dépassement du délai légal de six mois ne saurait être la nullité, mais la caducité (9). La Commission a été saisie d'un amendement n° 2 présenté par M. Warhouver visant à modifier, à l'article 42 de la loi du 1er juin 1924, les effets de la non-réitération dans les six mois d'un acte sous seing privé par un acte authentique ; le rapporteur a considéré que le fait de rendre cet acte nul, et non plus caduc, comme le prévoit la proposition de loi, porterait atteinte à la fiabilité des inscriptions sur le livre foncier ; il a, en outre, émis le souhait que, dans un objectif d'adoption rapide de la proposition de loi avant la fin des travaux parlementaires, le texte ne soit modifié qu'a minima. La Commission a en conséquence rejeté l'amendement. La rédaction adoptée par le Sénat a également introduit, par un amendement présenté par le Gouvernement, avec l'avis favorable du rapporteur de la commission des lois, M. Daniel Hoeffel, une disposition actuellement contenue dans le décret d'application du 14 novembre 1924. Cette disposition, qui déroge au premier alinéa de l'article 42 permet de procéder à l'inscription au livre foncier d'un droit résultant d'un acte établi sous seing privé, dès lors que les signatures de cet acte sont constatées et authentifiées par le notaire. Le droit local qualifie cet acte d'acte authentiquement légalisé, l'article 129 (non abrogé) du code civil local confirmant sa valeur juridique. L'alinéa 3 de l'article 42 n'est donc que la reprise de la substance de l'article 36 du décret du 18 novembre 1924 relatif à la tenue du livre foncier. Le Gouvernement a jugé nécessaire, afin de respecter la hiérarchie des normes, de rehausser les dispositions régissant l'acte authentiquement légalisé au niveau de la loi dans la mesure où cet acte constitue, pour les besoins de la publicité foncière, une dérogation au premier alinéa de l'article 42. Dérogatoire par rapport aux modalités d'inscription sur le livre foncier, cette disposition n'entend nullement pour autant déroger aux règles générales du droit civil qui requièrent, comme condition de validité de l'acte, le formalisme de l'acte authentique. Néanmoins, et malgré la concertation dont il semble pourtant avoir fait l'objet, l'amendement du Gouvernement n'a pas fait l'unanimité parmi les notaires d'Alsace-Moselle, certains d'entre eux craignant que ne soit remise en cause la procédure de l'acte authentique, et à travers elle, le rôle de conseil du notaire envers son client ; pour les actes authentiquement légalisés, ce rôle se limite en effet à authentifier les signatures. En outre, les notaires ont exprimé la crainte que, en substituant l'acte authentique par l'acte authentiquement légalisé, les inscriptions sur le livre foncier ne répondent plus aux critères de fiabilité qui caractérisent jusqu'à présent le système d'Alsace-Moselle. Compte tenu de ces inquiétudes, le rapporteur a indiqué qu'un accord avait été trouvé pour supprimer la disposition en cause, la rédaction ainsi proposée dans son amendement ayant fait l'objet d'une large concertation réunissant les juristes spécialistes du droit local, les députés d'Alsace-Moselle et les institutions représentatives du notariat. La Commission a, en conséquence, adopté l'amendement du rapporteur (amendement n° 3). Article 43 de la loi du 1er juin 1924 Reprenant en substance les dispositions contenues dans l'actuel article 43, la rédaction adoptée par le Sénat pour cet article a pour objet de préciser les autorités tenues de faire procéder à l'inscription. Pour cela, il maintient la règle du texte actuel selon laquelle les notaires et les autorités tenues de faire inscrire les droits doivent y procéder sans délai. Le deuxième alinéa modifie néanmoins le principe selon lequel les autorités précitées peuvent être dispensées par les parties de faire inscrire certains droits ; tout en maintenant le dispositif, la proposition de loi rend nécessaire, dans un souci de sécurité juridique, l'existence d'une dispense expresse accordée par les parties ; le texte en vigueur repose sur un mécanisme inverse, dans lequel ce sont les parties qui doivent demander expressément l'inscription des droits. Les droits qui peuvent être dispensés d'inscription sont énumérés limitativement : il s'agit du droit à résolution d'un contrat synallagmatique, du droit à la révocation d'une donation et du droit au rapport en nature d'une donation prévu par les articles 859 et 865 du code civil. L'inscription de ces droits au livre foncier n'ayant d'autre objet que la protection du titulaire, il n'est pas illogique que celui-ci puisse y renoncer par une demande expresse. Article 44 de la loi du 1er juin 1924 L'article 44, dans la rédaction adoptée par le Sénat, reprend les deux premiers alinéas de l'article 44 actuellement en vigueur ; il a ainsi pour objet d'affirmer le principe relatif de l'inscription : le titulaire d'un droit ne peut être inscrit au livre foncier avant que son auteur immédiat n'ait lui-même été inscrit. Ce principe a donc pour objet d'assurer la continuité dans la chaîne des inscriptions ; dans la pratique, lorsque le propriétaire d'un immeuble, ou plus largement le titulaire d'un droit soumis à publicité, veut en disposer, soit en le cédant, soit en le grevant d'autres droits, il doit au préalable requérir son inscription au livre foncier ; le défaut d'inscription rend impossible la publicité de la nouvelle opération. Le droit général s'est inspiré de la loi du 1er juin 1924 en prévoyant, à l'article 3 du décret du 4 janvier 1955, une disposition selon laquelle : « Aucun acte ou décision judiciaire ne peut être publié au fichier immobilier, si le titre du disposant ou dernier titulaire n'a pas été préalablement publié ». Des exceptions à ce principe de l'effet relatif existent : l'une est prévue au deuxième alinéa du présent article et dispense l'héritier d'un bien d'inscrire son droit de propriété lorsque un acte translatif ou déclaratif de décès est dressé dans les dix mois du décès. Cette dispense permet ainsi d'éviter de surcharger inutilement le livre foncier d'inscription de droits qui n'ont vocation à durer que quelques mois. L'article 44 actuellement en vigueur contient également des dispositions qui présentent un caractère transitoire et concernent les mutations par décès intervenues avant la loi du 29 décembre 1990 ou les immeubles n'ayant encore jamais fait l'objet d'une inscription au livre foncier ; ces dispositions n'ayant désormais plus lieu d'être, la proposition de loi adoptée par le Sénat les a fort opportunément supprimées. Article 44-1 de la loi du 1er juin 1924 Une autre exception au principe de l'effet relatif de l'inscription, qui constitue cette fois une innovation de la proposition de loi, est prévue avec l'introduction d'un nouvel article 44-1 ; ce dernier consiste à reconnaître au juge du livre foncier la possibilité d'ordonner l'inscription d'un droit immobilier acquis par prescription ou par accession, alors même que le bien en question était jusqu'à présent inscrit au nom d'un tiers. Cette hypothèse vise le cas de biens immobiliers de faible valeur, dont le titulaire officiel figurant au livre foncier a disparu depuis longtemps ou est inconnu, et qui sont exploités de fait par un tiers. Selon le droit actuel applicable, le possesseur du bien doit engager une action contentieuse, source de frais, pour faire reconnaître son droit contre le titulaire inscrit mais disparu. La jurisprudence locale ne reconnaît pas au possesseur qui a acquis le bien par prescription la possibilité d'être inscrit au livre foncier. Cette règle diffère du droit général qui permet la publicité foncière d'un droit acquis par usucapion. La proposition de loi adoptée par le Sénat permet donc d'harmoniser le droit local avec le droit général, tout en réservant expressément la compétence du juge du fond en cas de contestation. Il est également prévu d'organiser par voie réglementaire des mesures de publicité légale, destinée à informer les tiers. Article 45 de la loi du 1er juin 1924 La rédaction adoptée par le Sénat pour l'article 45 reprend, en les actualisant, les deux premiers alinéas de l'article 45 en vigueur ; la valeur juridique du dépôt de la requête se trouve ainsi confirmée, en coordination avec l'article 38-1 exposé précédemment. Ainsi, le premier alinéa confirme le principe de la prise de rang d'un droit selon l'ordre chronologique du dépôt de la requête ; lorsqu'il y a concurrence entre les créanciers ou autres titulaires de droits, le rang se trouve déterminé par l'ordre d'inscription de la requête sur le registre des dépôts. Le deuxième alinéa permet de régler les cas où il y a simultanéité des dépôts de requête sur un même immeuble ; la proposition de loi adoptée par le Sénat reprend les dispositions en vigueur afin de préciser que, dans ces cas là, il y a parité de rang entre les requêtes. Une exception est cependant maintenue pour les privilèges du vendeur et du copartageant, qui viennent, dans le cas de simultanéité des requêtes, primer les droits inscrits du nouveau propriétaire. Le dernier alinéa maintient à droit constant l'exclusion des règles correspondantes de droit général contenues à l'article 2134 du code civil ; il convient, en effet, de réaffirmer le caractère autonome des règles applicables en Alsace-Moselle par rapport au droit général, ce dernier attribuant une parité de rang aux inscriptions prises le même jour, sans distinction de l'ordre de dépôt, alors que l'article 45 ne reconnaît cette parité qu'en cas de simultanéité des dépôts ; de même, en vertu du premier alinéa de l'article, le droit local applique strictement le principe de primauté chronologique et ne reconnaît donc pas d'antériorité de rang à certains privilèges. Il convient de préciser que les deux derniers alinéas de l'article 45 en vigueur ont été transférés, sur proposition du rapporteur de la commission des lois du Sénat, dans un nouvel article numéroté 47-1 ; s'agissant de dispositions relatives à l'assiette de l'inscription d'une ordonnance d'exécution forcée portant sur des lots d'un immeuble soumis au statut de la copropriété, le Sénat a jugé, avec raison, qu'elles n'avaient pas de lien logique avec l'économie générale de l'article 45 qui détermine les règles de prise de rang d'un droit. Article 46 de la loi du 1er juin 1924 L'article 46 est la reprise de l'article 46 actuellement en vigueur ; il est donc maintenu à droit constant le principe selon lequel le juge procède aux vérifications avant de procéder à l'inscription d'un droit. Ce principe fonde à la fois la spécificité du droit local de la publicité foncière et la valeur juridique de l'inscription, telle qu'elle figure à l'article 41 de la loi du 1er juin 1924. Le premier alinéa proposé par le Sénat permet néanmoins de procéder à une modification rédactionnelle : est ainsi substituée à l'appellation de « préposé au livre foncier », celle de juge du livre foncier, lequel est le magistrat spécialisé chargé du contrôle de la tenue du livre foncier, selon l'article R 911-5 du code de l'organisation judiciaire. Le deuxième alinéa maintient à droit constant le régime de responsabilité de l'Etat ; contrairement au droit général, il s'agit d'une responsabilité pour faute simple, en cas d'erreur du juge du livre foncier. L'Etat dispose néanmoins de la faculté de se retourner contre le juge, quelle que soit l'importance de sa faute et d'exercer une action récursoire à l'encontre de ce dernier dans le cas où il aurait commis une faute personnelle établie. Article 47 de la loi du 1er juin 1924 La rédaction de l'article 47 dans la proposition de loi du Sénat supprime une grande partie des dispositions des deux premiers alinéas de l'article 47 en vigueur, qui ont respectivement trait à la classification et à l'inscription des privilèges spéciaux ; le maintien de telles dispositions ne s'impose plus dans la mesure où est appliqué, en Alsace-Moselle, en vertu de l'article 36-1 de la proposition de loi, le principe des privilèges du droit général. L'article 47 se trouve en définitive réduit à une disposition qui dispense de publicité les privilèges généraux sur les immeubles ainsi que le privilège immobilier spécial du syndicat des copropriétaires. La rédaction proposée est identique aux dispositions du code civil ; néanmoins, le Sénat a souhaité maintenir de façon explicite ce principe de dispense de publicité, craignant qu'une suppression ne fasse naître des controverses et des interprétations jurisprudentielles divergentes. Article 47-1 de la loi du 1er juin 1924 Les deux premiers alinéas de l'article 47-1 reprennent, à l'identique, la rédaction de l'article 47-1 de la loi du 1er juin 1924 actuellement en vigueur ; il s'agit ainsi de confirmer que l'obligation de publicité des privilèges et hypothèques portant sur des lots dépendant d'un immeuble en copropriété ne concerne pas la quote-part des parties communes comprises dans ces lots ; cette exemption d'inscription répond à un souci de ne pas surcharger inutilement le livre foncier. Néanmoins, afin de ne pas léser les créanciers, le deuxième alinéa de l'article 47-1 précise à son tour que les créanciers saisissants inscrits peuvent exercer leurs droits sur cette quote-part au moment de la mutation. Le Sénat a complété cet article par les deux derniers alinéas de l'article 45, sans en modifier la rédaction ; concernant l'inscription d'une ordonnance d'exécution forcée portant sur un immeuble dépendant d'une copropriété, il a paru en effet opportun de regrouper dans un même article l'ensemble des règles relatives aux droits portant sur des immeubles soumis au statut de la copropriété. Article 48 de la loi du 1er juin 1924 La rédaction adoptée par le Sénat pour l'article 48 reprend, en en actualisant les références, la rédaction de l'article 48 en vigueur ; le principe de spécialité de l'inscription, qui exige qu'une inscription ne puisse avoir lieu que pour une somme déterminée et sur des immeubles déterminés, est donc conservé sans changement. Est également maintenue, dans les mêmes conditions, l'exception concernant une créance indéterminée, celle-ci devant faire l'objet, d'une part, d'une inscription au principal et d'une inscription en accessoires, et d'autre part, d'une possibilité réservée au débiteur de demander au tribunal la réduction de l'évaluation. Article 49 de la loi du 1er juin 1924 L'article 49 actuellement en vigueur concerne l'inscription des privilèges de certaines professions déterminées ; au terme de cet article, les professionnels bénéficient d'un privilège spécial, qui garantit les sommes dues par le propriétaire à ceux qu'il a chargés de l'exécution des travaux. Tout en en conservant le principe, la rédaction adoptée par le Sénat met fin à l'inscription d'un privilège tombé en désuétude, relatif au privilège de plus-value concernant les travaux de dessèchement des marais et de drainage. En revanche, le Sénat maintient le privilège des architectes et entrepreneurs prévu par l'article 2103 du code civil ; bien que ce privilège ne soit plus mis en _uvre de nos jours, le Sénat a préféré le laisser subsister afin de ne pas déroger, sur ce point précis, au droit général. La rédaction proposée conserve néanmoins un particularisme de droit local qui limite ce privilège au montant figurant au premier procès-verbal mentionné aux articles 2103 et 2110 du code civil ; cette limitation apporte aux tiers une sécurité supérieure à ce que fait, en droit général, le privilège établi par le second procès-verbal, dans la mesure où leurs droits, inscrits après le premier procès-verbal, ne sont pas atteints par les effets d'un procès-verbal ultérieur qui porterait sur une somme plus élevée. Article 50 de la loi du 1er juin 1924 La rédaction proposée pour l'article 50 reprend, en substance, le principe, exposé dans l'actuel article 50, d'une obligation de publicité pour le privilège de la séparation des patrimoines. Le privilège de la séparation des patrimoines accorde un privilège aux créanciers et aux légataires de la personne défunte, qui leur permet d'éviter le concours des créanciers d'un héritier insolvable. L'article 50 de la loi du 1er juin 1924 actuellement en vigueur impose l'obligation de publicité de ce privilège par l'inscription sur le livre foncier d'une prénotation ; à l'inverse de la prénotation prévue à l'article 39, celle-ci présente, dès son inscription, un caractère définitif. La rédaction adoptée par le Sénat met fin à ce qui constituait jusqu'à présent une particularité du droit local, en remplaçant la procédure de prénotation par une inscription dans les conditions de droit commun des privilèges ; la nature juridique du privilège de la séparation des patrimoines est de la sorte reconnue dans les mêmes conditions que celles du droit général. La rédaction proposée reprend également, sans le modifier, le principe selon lequel le privilège de la séparation des patrimoines peut être inscrit par les créanciers et légataires du défunt avant l'inscription de l'héritier lui-même ; cette dérogation à l'effet relatif énoncé à l'article 44 est destinée à protéger les créanciers et légataires de toute man_uvre utilisée par l'héritier pour diminuer la valeur de son patrimoine héréditaire. L'inscription des créanciers et légataires du défunt ne peut plus toutefois intervenir lorsqu'il y a eu transfert de propriété à un tiers. Article 51 de la loi du 1er juin 1924 L'article 51 de la loi du 1er juin 1924 pose le principe de l'application du droit général pour les hypothèques légales ; la rédaction adoptée pour l'article 36-1 disposant dorénavant que « les droits sur les immeubles, les privilèges et les hypothèques sont ceux prévus par la législation française », le Sénat a abrogé en conséquence l'article 51. Article 52 de la loi du 1er juin 1924 L'article 52 définit les règles relatives à la prise de rang des hypothèques et privilèges. Dans sa rédaction actuelle, l'article 52 fait référence aux articles 47 et 48, en précisant qu'ils sont applicables aux hypothèques légales. L'article 47 concernait les règles spécifiques relatives à la prise de rang des privilèges ; l'article 48 précisait les règles relatives au principe de la spécialité de l'inscription. Réécrits par la proposition de loi, le renvoi à ces deux articles n'a plus d'objet dans la mesure où l'ensemble de ces règles ont été harmonisées avec le droit général. Dès lors, la rédaction de l'article 52 se limite désormais à énoncer que « l'inscription des privilèges et des hypothèques est sans effet rétroactif ». Bien que redondante avec la rédaction de l'article 45, qui dispose que la date et le rang de l'inscription sont déterminés par la mention du dépôt de la requête, cette disposition de non-rétroactivité permet toutefois de clarifier la situation en excluant toute disposition de législation civile contraire. S'agissant en outre d'une disposition dérogeant au droit général, qui reconnaît que certaines dates d'effet des privilèges puissent remonter à la date de leur constitution, la suppression d'une telle mention aurait pu engendrer controverses et interprétations diverses sur les intentions du législateur. Articles 57 et 58 de la loi du 1er juin 1924 La proposition de loi adoptée par le Sénat abroge l'article 57 relatif aux modalités d'inscription d'une hypothèque légale d'une personne ayant le statut personnel d'alsacien lorrain et placée sous tutelle ; la loi du 29 décembre 1990 portant diverses mesures d'harmonisation entre le droit alsacien-mosellan et le droit général ayant abrogé le droit local des incapacités pour lui substituer le droit général, le Sénat a, en toute logique, supprimé ce qui constituait, dans la loi du 1er juin 1924, une survivance anachronique. Comme le note le rapporteur du Sénat, « le législateur en 1990 aurait dû, par coordination avec l'abrogation des règles particulières de droit local des incapacités, abroger l'article 57 de la loi du 1er juin 1924 ». La proposition de loi adoptée par le Sénat abroge également l'article 58, qui détermine des règles spécifiques relatives à l'assiette de l'hypothèque légale d'une personne placée sous tutelle ou d'un mineur placé sous administration légale ; le Sénat a considéré que ces dispositions, qui n'ont effectivement pas d'équivalent en droit général, n'ont plus lieu d'être dans la mesure où le droit général a atteint, en matière de droit des incapacités, un niveau de protection comparable à celui existant en Alsace-Moselle. Article 59 de la loi du 1er juin 1924 La rédaction adoptée par le Sénat reprend en substance l'obligation d'information, figurant à l'article 59 en vigueur, imposée au notaire en matière d'hypothèque légale des personnes placées sous tutelle. Ainsi, aux termes de cet article, le notaire qui reçoit un acte duquel résulte de nouveaux droits ou valeurs qui échoient à une personne sous tutelle doit en informer sans délai le juge du tribunal d'instance ou le greffe du tribunal de grande instance du lieu de tutelle et assortir cette information de l'envoi, par recommandé, d'un extrait de l'acte établi sur papier libre et sans frais. Cette disposition, qui n'existe pas en droit général, est destinée à assurer la publicité des hypothèques légales. La rédaction adoptée par le Sénat simplifie la procédure en proposant la suppression de la double information du juge ; seul l'envoi d'un extrait de l'acte sur papier libre et sans frais suffit. Par ailleurs, en coordination avec l'article L. 322-1 du code de l'organisation judiciaire, qui prévoit que les fonctions de juge des tutelles sont exercées par un juge du tribunal d'instance, la référence au juge du tribunal d'instance est remplacée par celle de juge des tutelles. Article 60 de la loi du 1er juin 1924 L'article 60 actuellement en vigueur ouvre la possibilité à l'ancien incapable de faire inscrire son hypothèque légale sur les biens du tuteur, ou de requérir une inscription complémentaire dans un délai d'un an à compter de la date qui a mis fin à son incapacité. La proposition de loi adoptée par le Sénat abroge cet article dans un objectif d'harmonisation avec le droit général ; en effet, cette disposition paraît faire double emploi avec l'article 2144 du code civil, qui, par ailleurs, autorise la transmission de ce droit aux héritiers de l'ancien incapable décédé ; le droit général étant donc plus protecteur que le droit local, le Sénat a fort opportunément supprimé l'article 60. Article 61 de la loi du 1er juin 1924 L'article 61, qui définit les modalités d'inscription de l'hypothèque sur les biens d'une personne placée dans un établissement d'aliénés, ainsi que sur les immeubles des tuteurs désignés à la suite d'une déchéance paternelle, fait également l'objet d'une suppression pour les mêmes raisons que l'article 60 : le maintien de telles dispositions ne se justifie plus dans la mesure où elles ont été progressivement étendues à l'ensemble du territoire et figurent, désormais, dans le code de l'action sociale et familiale créé par l'ordonnance n° 2000-1249 du 21 décembre 2000. Article 62 de la loi du 1er juin 1924 La proposition de loi adoptée par le Sénat permet d'aligner la définition de l'hypothèque judiciaire sur celle applicable en droit général en vertu de l'article 2123 du code civil ; alors que l'actuel article 62 définit l'hypothèque judiciaire comme ne pouvant résulter que de décisions de justice en matière contentieuse, et impose que les créances soient certaines, liquides et exigibles, le droit général donne une définition moins restrictive en prévoyant que l'hypothèque judiciaire résulte de jugements, de décisions arbitrales revêtues de l'ordonnance judiciaire d'exécution ou de décisions de justice rendues par des pays étrangers. En outre, le montant de la créance n'a pas nécessairement à être déterminée par le jugement. Poursuivant un objectif d'harmonisation avec le droit général, la rédaction adoptée par le Sénat substitue à l'actuelle définition de l'hypothèque judiciaire une référence explicite à l'article 2123 du code civil. Le Sénat a également supprimé la dernière phrase de l'article précisant que « l'hypothèque ne prend rang que du jour de son inscription » : cette précision est effectivement devenue inutile puisque le principe général de la prise de rang des droits inscrits est désormais posé à l'article 45. Le Sénat a cependant maintenu le second alinéa, qui prévoit que l'inscription doit porter pour la totalité de la créance les divers immeubles du débiteur, à moins que le créancier ne le requiert autrement. Le maintien de cette règle spécifique au droit local est justifié par la nécessité de faire une distinction entre l'hypothèque judiciaire, prévue au présent article, et l'hypothèque d'exécution forcée de droit local, soumise à un régime différent et donnant lieu à un fractionnement de la créance. Article 63 de la loi du 1er juin 1924 L'article 63 de la loi du 1er juin 1924 concerne la péremption et le renouvellement de l'inscription des privilèges et hypothèques ; le Sénat a repris, sans aucune modification, le texte actuel de l'article. Article 64 de la loi du 1er juin 1924 Le texte adopté par le Sénat pour l'article 64 reprend le texte actuel de l'article 64, qui a trait aux règles de radiation des inscriptions, et le complète par un alinéa destiné à donner une base légale à la radiation d'une inscription devenue caduque et périmée du fait de l'arrivée du terme. Ainsi, la radiation d'office des inscriptions comportant une date extrême d'effet sera dorénavant autorisée ; le juge du livre foncier devra constater que les conditions d'une telle radiation sont réunies dès lors que la durée maximale de l'inscription est atteinte. Jusqu'à présent, il ne pouvait le faire en l'absence de requête en ce sens ; Article 65 de la loi du 1er juin 1924 L'article 65 adopté par le Sénat reprend à l'identique la rédaction de l'article 64-1 en vigueur ; est ainsi confirmé le principe selon lequel les actes de mainlevée de l'hypothèque légale du Trésor sont dispensés de la forme authentique. La rédaction de l'article 64-1 venant se substituer à celle de l'article 65, celui-ci se trouve de facto supprimé : cet article, qui vise à préciser que les règles de droit local s'appliquent aux tribunaux, aux greffiers et aux notaires exerçant sur le territoire français dès lors qu'ils ont à connaître des droits sur les immeubles situés en Alsace-Moselle est en effet redondant avec la rédaction adoptée de l'article 36 selon lequel les droits sur les immeubles situés en Alsace-Moselle sont régis selon le régime de droit local, quel que soit le lieu d'exercice des professionnels concernés. La Commission a adopté l'article 1er ainsi modifié. Articles 1er bis, 1er ter, 1er quater et 1er quinquies Introduits par quatre amendements présentés par le gouvernement, avec l'avis favorable du rapporteur du Sénat, ces articles ont pour objet de créer un établissement public d'Etat chargé d'assurer l'exploitation des systèmes destinés à supporter le livre foncier informatisé. Ces quatre articles reprennent, en substance, la rédaction de la proposition de loi déposée par votre rapporteur sur le bureau de l'Assemblée. L'article 1er bis crée un établissement public de l'Etat afin d'assurer et de contrôler l'exploitation du livre foncier informatisé ; cette exploitation étant, d'après les informations recueillies par votre rapporteur, destinée à être confiée à un prestataire extérieur, l'établissement public devra donc contrôler ce prestataire ainsi que les opérations de gestion et de consultation du système. Il aura pour cela à se substituer au groupement d'intérêt public créé par la loi du 29 avril 1994, le groupement pour l'informatisation du livre foncier d'Alsace et de Moselle (GILFAM). L'article 1er ter détermine la composition de l'établissement public ; cette composition, qui comprend pour moitié des représentants de l'Etat et pour moitié des représentants des trois départements concernés, de la région Alsace, de l'Institut de droit local et du conseil interrégional des notaires, est très proche de celle retenue pour le GILFAM ; ainsi seront assurées la continuité du système et la représentation des collectivités locales qui ont permis sa réalisation. L'article 1er quater prévoit le financement de l'établissement public sous deux formes : la redevance, qui sera perçue à l'occasion des consultations du livre foncier par les professionnels énumérés à l'article 37 de la loi du 1er juin 1924, et des subventions de l'Etat ou de tout autre personne publique. Ce dernier mode de financement vise, en particulier, les collectivités locales et notamment le droit départemental d'enregistrement, introduit en Alsace et en Moselle dans l'objectif de permettre le financement de l'informatisation. L'article 1er quinquies concerne le statut des membres du personnel de l'établissement public qui seront soumis aux règles applicables à la fonction publique de l'Etat. La Commission a adopté les articles 1er bis, 1er ter, 1er quater et 1er quinquies sans modification. Article 2 L'article 2 a été introduit à l'initiative du rapporteur du Sénat, qui a souhaité disjoindre de l'article 1er de la proposition de loi présentée initialement, toute disposition ayant un caractère transitoire ; ces dispositions transitoires ne figureront donc pas dans la loi du 1er juin 1924. Cet article, initialement prévu dans la proposition de loi à l'article 36-1, permet ainsi d'apurer la situation liée à la survivance des servitudes anciennes publiées avant le 1er janvier 1900 à la conservation des hypothèques et qui n'avaient pas été retranscrites au livre foncier. En 1924, il était important de garantir la continuité des droits et de reconnaître, en conséquence, la valeur juridique de ces anciennes servitudes, dont la trace pouvait être retrouvée dans les registres et fichiers hypothécaires tenus par l'administration fiscale. Il est aujourd'hui proposé de mettre fin aux conséquences négatives que cette règle peut entraîner, du fait de la non-inscription des servitudes subsistantes, en prescrivant l'inscription au livre foncier de celles-ci à peine d'extinction. Cette mesure pouvant constituer une atteinte à un droit réel existant, un délai suffisamment long, de cinq années, est prévu pour permettre aux titulaires de ces droits et à leurs ayants droits de procéder à la retranscription. Un décret d'application devra fixer les modalités de publication, de nature à informer les éventuels titulaires de ces anciennes servitudes et à leur permettre d'exercer leurs droits. Une autre solution, qui consisterait simplement à rendre les servitudes non inscrites inopposables serait de nature à générer une incertitude juridique dommageable aux tiers et aux nouveaux acquéreurs : aussi la commission d'harmonisation du droit privé alsacien-mosellan a-t-elle recommandé la mesure de l'extinction des servitudes non inscrites. La Commission a adopté l'article 2 sans modification. Article 3 Comme l'article 2, l'article 3 concerne une disposition transitoire qui n'a pas vocation à subsister dans la loi du 1er juin 1924. Cette disposition figurait auparavant, dans la proposition de loi initiale, à l'article 57. La loi n° 90-1248 du 29 décembre 1990 portant diverses mesures d'harmonisation entre le droit local alsacien-mosellan et le droit général a abrogé le droit local des incapacités pour lui substituer les dispositions du droit général. L'article 4 de la loi précitée a néanmoins défini un régime transitoire jusqu'à la cessation de fonctions du tuteur ou du curateur pour les personnes relevant du statut alsacien-mosellan placées sous tutelle ou curatelle avant le 6 janvier 1991, date d'entrée en vigueur de la loi d'harmonisation. Le texte proposé à l'article 3 prévoit simplement que, par dérogation au droit local des incapacités, soient appliqués les articles 2143 et 2144 du code civil relatifs à l'inscription des hypothèques sur les immeubles du tuteur ou du curateur. Cette modification permet ainsi d'achever l'harmonisation opérée depuis 1990 en matière de tutelle. La Commission a adopté l'article 3 sans modification. Article 4 Cet article détermine les conditions d'entrée en vigueur de la loi. Il est proposé de reporter au 1er janvier 2006 l'entrée en vigueur des dispositions de la loi sur la tenue informatisée du livre foncier (article 36-2) sur la consultation à distance (article 37), les inscriptions pour information des tiers (article 38-3) et la procédure normalisée d'inscription des requêtes (article 40). Ces dispositions ne pourront être applicables, en effet, que lorsque l'application dont la réalisation est engagée sera testée et déployée dans l'ensemble des tribunaux. Un décret d'application devra définir de manière plus détaillée les modalités de la mise en vigueur de ces dispositions, afin de conserver au système sa fiabilité et la valeur juridique des droits enregistrés. Jusqu'à l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles relatives à la consultation à distance (article 37) et aux mentions informatives (article 38-3), les dispositions actuelles des articles 37 et 38-1 de la loi en vigueur resteront applicables, afin d'éviter une solution de continuité. Dans la mesure où ces dispositions actuelles en vigueur pourraient être touchées par la codification de la partie réglementaire des lois commerciales, le décret d'application en préparation mentionnera le maintien des dispositions réglementaires correspondantes. Enfin, l'établissement public créé par le texte qui est présenté devra être opérationnel au 1er janvier 2006, date retenue pour l'entrée en vigueur des dispositions nouvelles relatives à la tenue informatisée du livre foncier. Jusque-là le GIP assurera le contrôle de l'exploitation du système du livre foncier au fur et à mesure du déploiement de l'application sur site. La Commission a adopté l'article 4 sans modification. La Commission a rejeté l'amendement n° 1 de M. Pierre Ducout ayant pour objet de modifier la portée du décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 421-12 du code de l'environnement concernant les modalités de fonctionnement des fédérations interdépartementales de chasse d'Ile-de-France, le rapporteur ayant indiqué qu'une telle disposition, manifestement étrangère à l'objet de la proposition de loi, allait à l'encontre de l'objectif poursuivi d'aboutir rapidement à une adoption conforme du texte par le Sénat. Puis elle a adopté l'ensemble de la proposition de loi ainsi modifiée. * * * En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant réforme de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, dans ses dispositions relatives à la publicité foncière (n° 3467), modifiée par les amendements figurant au tableau comparatif ci-après. ___
Article 1er du texte adopté par le Sénat (art. 38 de la loi du 1er juin 1924) Code du domaine de l'Etat Chapitre I - Occupation temporaire Section III : occupations constitutives de droits réels Art. 34-1. - Le titulaire d'une autorisation d'occupation temporaire du domaine public de l'Etat a, sauf prescription contraire de son titre, un droit réel sur les ouvrages, constructions et installations de caractère immobilier qu'il réalise pour l'exercice d'une activité autorisée par ce titre. Ce droit confère à son titulaire, pour la durée de l'autorisation et dans les conditions et les limites précisées dans la présente section, les prérogatives et obligations du propriétaire. Le titre fixe la durée de l'autorisation, en fonction de la nature de l'activité et de celle des ouvrages autorisés, et compte tenu de l'importance de ces derniers, sans pouvoir excéder soixante-dix ans. Art. 34-2. - Les droits, ouvrages, constructions et installations de caractère immobilier ne peuvent être cédés, ou transmis dans le cadre de mutations entre vifs ou de fusion, absorption ou scission de sociétés, pour la durée de validité du titre restant à courir, y compris dans le cas de réalisation de la sûreté portant sur lesdits droits et biens et dans les cas prévus aux troisième et quatrième alinéas, qu'à une personne agréée par l'autorité compétente, en vue d'une utilisation compatible avec l'affectation du domaine public occupé. Lors du décès d'une personne physique titulaire d'un titre d'occupation constitutif de droits réels, celui-ci peut être transmis, dans les conditions prévues à l'alinéa précédent, au conjoint survivant ou aux héritiers sous réserve que le bénéficiaire, désigné par accord entre eux, soit présenté à l'agrément de l'autorité compétente dans un délai de six mois à compter du décès. Les droits, ouvrages, constructions et installations ne peuvent être hypothéqués que pour garantir les emprunts contractés par le titulaire de l'autorisation en vue de financer la réalisation, la modification ou l'extension des ouvrages, constructions et installations de caractère immobilier situés sur la dépendance domaniale occupée. Les créanciers chirographaires autres que ceux dont la créance est née de l'exécution des travaux mentionnés à l'alinéa précédent ne peuvent pratiquer des mesures conservatoires ou des mesures d'exécution forcée sur les droits et biens mentionnés au présent article. Les hypothèques sur lesdits droits et biens s'éteignent au plus tard à l'expiration des titres d'occupation délivrés en application des articles L. 34-1 et L. 34-4, quels qu'en soient les circonstances et le motif. Art. L. 34-3. - A l'issue du titre d'occupation, les ouvrages, constructions et installations de caractère immobilier existant sur la dépendance domaniale occupée doivent être démolis, soit par le titulaire de l'autorisation, soit à ses frais, à moins que leur maintien en l'état n'ait été prévu expressément par le titre d'occupation ou que l'autorité compétente ne renonce en tout ou partie à leur démolition. Les ouvrages, constructions et installations de caractère immobilier dont le maintien à l'issue du titre d'occupation a été accepté deviennent de plein droit et gratuitement la propriété de l'Etat, francs et quittes de tous privilèges et hypothèques. Toutefois, en cas de retrait de l'autorisation avant le terme prévu, pour un motif autre que l'inexécution de ses clauses et conditions, le titulaire est indemnisé du préjudice direct, matériel et certain né de l'éviction anticipée. Les règles de détermination de l'indemnité peuvent être précisées dans le titre d'occupation. Les droits des créanciers régulièrement inscrits à la date du retrait anticipé sont reportés sur cette indemnité. Deux mois au moins avant la notification d'un retrait pour inexécution des clauses et conditions de l'autorisation, les créanciers régulièrement inscrits sont informés des intentions de l'autorité compétente à toutes fins utiles, et notamment pour être mis en mesure de proposer la substitution d'un tiers au permissionnaire défaillant. Art. L. 34-4. - Lorsque les ouvrages, constructions ou installations sont nécessaires à la continuité du service public, les dispositions de l'article L. 34-1 ne leur sont applicables que sur décision de l'Etat. Art. L. 34-5. - Les dispositions de la présente section sont également applicables aux conventions de toute nature ayant pour effet d'autoriser l'occupation du domaine public. Lorsque ce droit d'occupation du domaine public résulte d'une concession de service public ou d'outillage public, le cahier des charges précise les conditions particulières auxquelles il doit être satisfait pour tenir compte des nécessités du service public. Art. L. 34-6. - Des décrets en Conseil d'Etat fixent les conditions d'application des articles L. 34-1 à L. 34-5. Art. L. 34-7. - Dans le cadre des titres d'occupation prévus par les articles L. 34-1 et L. 34-5, la réalisation des ouvrages, constructions et installations, à l'exclusion de ceux affectés à un service public et aménagés à cet effet ou affectés directement à l'usage du public ainsi que des travaux exécutés pour une personne publique dans un but d'intérêt général, peut donner lieu à la conclusion de contrats de crédit-bail par le titulaire du droit d'occupation. La conclusion de tels contrats de crédit-bail au bénéfice d'organismes dans lesquels l'Etat ou l'établissement public gestionnaire du domaine apporte un concours financier ou détient, directement ou indirectement, une participation financière permettant d'exercer un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion est soumise à un agrément de l'Etat. Cet agrément peut être refusé si l'opération se traduit par un accroissement des charges ou une diminution des ressources de l'Etat. Les modalités de cet agrément sont précisées par décret en Conseil d'Etat. Art. L. 34-8. - Les dispositions des articles L. 34-1 à L. 34-7 sont applicables aux établissements publics de l'Etat, tant pour le domaine public de l'Etat qui leur est confié que pour leur domaine propre. Pour l'application du deuxième alinéa de l'article L. 34-3, les ouvrages, constructions et installations concernés situés sur le domaine propre d'un établissement public deviennent la propriété dudit établissement public. Des décrets en Conseil d'Etat apportent les adaptations nécessaires aux dispositions relatives à la gestion du domaine public par les établissements publics de l'Etat, et notamment les conditions dans lesquelles les décisions prises par les autorités compétentes de ces établissements sont, dans les cas prévus à l'article L. 34-4, soumises à approbation de leur ministre de tutelle et du ministre chargé du domaine. Art. L. 34-8-1. - Les dispositions de la présente section et de l'article 3 de la loi n° 94-631 du 25 juillet 1994 complétant le code du domaine de l'Etat et relative à la constitution de droits réels sur le domaine public sont applicables sur le domaine public de l'Etat compris dans les limites administratives des ports qui relèvent de la compétence des départements, mis à disposition de ces départements ou ayant fait l'objet, à leur profit, d'un transfert de gestion. Les autorisations, décisions et agréments mentionnés aux articles L. 34-1, L. 34-2, L. 34-3 et L. 34-4 sont pris ou accordés, après consultation du représentant de l'Etat, par le président du conseil général. Ils peuvent également être pris ou accordés par le concessionnaire, lorsque les termes de la concession le prévoient expressément. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article. Art. L. 34-9. - Les dispositions de la présente section ne sont pas applicables au domaine public naturel. Article 1er du texte adopté par le Sénat (art. 48 de la loi du 1er juin 1924) Code civil Art. 2161. - Lorsque les inscriptions prises en vertu des articles 2122 et 2123 sont excessives, le débiteur peut demander leur réduction en se conformant aux règles de compétence établies dans l'article 2159. Sont réputées excessives les inscriptions qui grèvent plusieurs immeubles lorsque la valeur d'un seul ou de quelques-uns d'entre eux excède une somme égale au double du montant des créances en capital et accessoires légaux, augmenté du tiers de ce montant. Art. 2162. - Peuvent aussi être réduites comme excessives les inscriptions prises d'après l'évaluation faite par le créancier des créances conditionnelles, éventuelles ou indéterminées dont le montant n'a pas été réglé par la convention. L'excès, dans ce cas, est arbitré par les juges d'après les circonstances, les probabilités et les présomptions de fait, de manière à concilier les droits du créancier avec l'intérêt du crédit à conserver au débiteur, sans préjudice des nouvelles inscriptions à prendre avec hypothèque du jour de leur date, lorsque l'événement aura porté les créances indéterminées à une somme plus forte. Art. 2163. - Quand l'hypothèque légale a été inscrite par application des articles 2136 ou 2137, et sauf clause expresse du contrat de mariage l'interdisant, l'époux bénéficiaire de l'inscription peut en donner mainlevée totale ou partielle. Il en est ainsi même en ce qui concerne l'hypothèque légale, ou éventuellement l'hypothèque judiciaire, garantissant la pension alimentaire allouée ou susceptible d'être allouée à un époux, pour lui ou pour ses enfants. Si l'époux bénéficiaire de l'inscription, en refusant de réduire son hypothèque ou d'en donner mainlevée, empêche l'autre époux de faire une constitution d'hypothèque ou une aliénation qu'exigerait l'intérêt de la famille ou, s'il est hors d'état de manifester sa volonté, les juges pourront autoriser cette réduction ou cette mainlevée aux conditions qu'ils estimeront nécessaires à la sauvegarde des droits de l'époux intéressé. Ils ont les mêmes pouvoirs lorsque le contrat de mariage comporte la clause visée au premier alinéa. Quand l'hypothèque a été inscrite par application de l'article 2138, l'inscription ne peut être rayée ou réduite, pendant la durée du transfert d'administration, qu'en vertu d'un jugement du tribunal qui a ordonné le transfert. Dès la cessation du transfert d'administration, la radiation ou la réduction peut être faite dans les conditions prévues aux alinéas 1 et 3 ci-dessus. Art. 2164. - Si la valeur des immeubles sur lesquels l'hypothèque du mineur ou du majeur en tutelle a été inscrite excède notablement ce qui est nécessaire pour garantir la gestion du tuteur, celui-ci peut demander au conseil de famille de réduire l'inscription aux immeubles suffisants. Il peut pareillement lui demander de réduire l'évaluation qui avait été faite de ses obligations envers le pupille. L'administrateur légal peut, dans les mêmes cas, lorsqu'une inscription a été prise sur ses immeubles en vertu de l'article 2143, demander au juge des tutelles de la réduire, soit quant aux immeubles grevés, soit quant aux sommes garanties. Le tuteur et l'administrateur légal peuvent en outre, s'il y a lieu, sous l'observation des mêmes conditions, demander la mainlevée totale de l'hypothèque. La radiation partielle ou totale de l'hypothèque sera faite au vu d'un acte de mainlevée signé par un membre du conseil de famille ayant reçu délégation à cet effet, en ce qui concerne les immeubles du tuteur, et au vu d'une décision du juge des tutelles, en ce qui concerne les immeubles de l'administrateur légal. Art. 2165. - Les jugements sur les demandes d'un époux, d'un tuteur ou d'un administrateur légal dans les cas prévus aux articles précédents sont rendus dans les formes réglées au code de procédure civile. Si le tribunal prononce la réduction de l'hypothèque à certains immeubles, les inscriptions prises sur tous les autres sont radiées. AMENDEMENTS NON ADOPTÉS PAR LA COMMISSION Article premier Amendement n° 2 présenté par M. Aloyse Warhouver : Dans le deuxième alinéa de cet article, substituer au mot : « caducité », le mot : « nullité ». Après l'article 4 Amendement n° 1 présenté par M. Pierre Ducout : Insérer l'article suivant : « Le dernier alinéa de l'article L. 421-12 du code de l'environnement est ainsi rédigé : « Les modalités d'organisation et de fonctionnement de ces deux fédérations sont fixées par un décret en Conseil d'Etat. » () Proposition de loi n° 3446 déposée le 5 décembre 2001. () Parlement local titulaire d'un pouvoir législatif créé par le décret du 29 octobre 1874 et remplacé dans la Constitution d'Alsace-Lorraine du 31 mai 1911 par un Landtag composé de deux chambres). () 31 pour le Bas-Rhin et le Haut-Rhin et 15 pour la Moselle. () Cons. Const., Déc. 93-320 DC, 21 juin 1993. () Cf. E. Sander, L'informatisation du livre foncier alsacien-mosellan : JCP N 1995, p. 1667 s. () J.-L. Vallens, Publicité foncière et vie privée : les enjeux de l'informatisation : D. 2000, p. 375 s. () Cf. à titre d'exemple, CA Colmar, 9 janv. 1995, Wagner c/ Mark : Juris-Data n° 043999. - E. Sander, Le sort des servitudes conventionnelles publiées avant le 1er janvier 1900 à l'ère de l'informatisation du livre foncier alsacien-mosellan : JCP N 2000, p. 480 s. () Cf. E. Sander, Droit de sûretés, Droit spécial : Juris-Classeur Alsace-Moselle, Fasc. 352, n° 152. () Cf. E. Sander, A propos des actes sous seing privé ayant trait à la propriété immobilière et aux servitudes foncières : JCP N 2000, p. 1466 s. © Assemblée nationale |