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Assemblée nationale

commission élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission des affaires économiques

Commission des affaires étrangères

(Application de l’article 120 du Règlement)

Jeudi 30 octobre 2014

Présidence de M. Dominique Lefebvre,
vice-président de la Commission des finances,
de M. François Brottes,
président de la Commission des affaires économiques
et de M. Michel Vauzelle,
vice-président de la Commission des affaires étrangères

La réunion de la commission élargie commence à neuf heures dix.

projet de loi de finances pour 2015

Économie

M. Dominique Lefebvre, président. Monsieur le ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, monsieur le secrétaire d’État chargé du budget, madame la secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire, je suis heureux de vous accueillir, en compagnie de François Brottes, président de la commission des affaires économiques, et de Michel Vauzelle, vice-président de la commission des affaires étrangères.

Nous sommes réunis en commission élargie afin de vous entendre sur les crédits du projet de loi de finances pour 2015 consacrés à la mission « Économie » et aux comptes spéciaux qui y sont rattachés.

Je rappelle les règles de tenue de nos commissions élargies. Nous donnerons d’abord la parole aux rapporteurs de nos trois commissions, qui interviendront chacun pour une durée de cinq minutes sous forme de questions aux ministres. S’exprimeront ensuite les porte-parole des groupes. Enfin, tous les députés qui le souhaitent pourront interroger les membres du Gouvernement. Les temps d’intervention sont limités à deux minutes.

M. le président François Brottes. Cette année, la commission des affaires économiques s’est saisie pour avis de cinq budgets relevant de la mission « Économie » : les communications électroniques et l’économie numérique, le commerce extérieur, les entreprises, l’industrie et les postes. Il y a deux avis de moins que l’an dernier : l’avis sur la consommation n’a pas été repris, car nous avons adopté il y a peu un grand texte sur la consommation ; l’avis sur le tourisme a été présenté la semaine dernière, dans le cadre de la commission élargie, lors de l’examen de la mission « Action extérieure de l’État ». Vous noterez, monsieur le président, que la mission « Action extérieure de l’État » ne comportait pas le commerce extérieur. Il y a parfois une logique qui m’échappe dans la manière dont sont organisés nos débats. Je vous le dis, monsieur le président, car vous êtes le spécialiste de l’organisation des débats budgétaires. Pour notre part, nous sommes plutôt du côté de l’économie de terrain !

Le budget de la mission « Économie » contribue à l’effort de redressement des comptes publics puisqu’il connaît, à périmètre constant, une baisse de 5  %. Malgré ces moyens contraints, le Gouvernement est parvenu à proposer des mesures ambitieuses qu’il convient de saluer. Je prendrai pour exemple l’effort consenti en faveur du numérique à travers le lancement du Plan « France très haut débit ». Nous pourrons débattre de cette question avec Mme Axelle Lemaire, qui ne va pas tarder à nous rejoindre.

La Commission a retenu, pour la plupart de ses avis une présentation en deux parties, la première présentant les crédits, la seconde revenant plus précisément sur un thème. Les avis présentés comprennent un bilan d’étape de la réalisation des 34 plans de la France industrielle, qui contribuent à redynamiser l’industrie dans notre pays, ainsi que l’innovation. On l’a vu, notamment dans le secteur de l’automobile.

Les rapports rappellent aussi une analyse des enjeux du redressement du commerce extérieur français ou encore un examen du programme de simplification de la vie des entreprises – je salue au passage le travail de M. Mandon sur ce terrain.

Les analyses portées par Corinne Erhel et Jean Grellier, rapporteurs de notre commission, permettront de nourrir nos débats.

M. Michel Vauzelle, présidentJe vous prie d’abord d’excuser l’absence de Mme Guigou, qui ne peut être parmi nous ce matin.

La commission des affaires étrangères, qui rend traditionnellement un avis sur les crédits relatifs au commerce extérieur, permet, quant à elle, d’élever le débat au niveau de la mondialisation et de ses enjeux.

Ses crédits sont logés, cette année encore, au sein de la mission « Économie », alors que le secrétaire d’État compétent a été nommé auprès du ministre des affaires étrangères. Cela nous donnera le plaisir d’entendre Mme Seybah Dagoma, rapporteure pour avis de notre commission. Je me félicite que le ministère des affaires étrangères connaisse un élargissement de ses compétences et de ses moyens, ce qui lui permettra de développer une diplomatie économique offensive. On peut être étonné, à ce titre, que les crédits correspondants restent rattachés au ministère de l’économie. Monsieur le ministre, la géographie ministérielle ayant évolué, est-il envisagé de transférer ces crédits ?

M. Jean-Louis Gagnaire, rapporteur spécial de la commission des finances pour le développement des entreprises et pour les prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés. Je remercie M. le ministre, Mme et M. les secrétaires d'État pour leur présence et pour leur engagement en faveur du redressement productif de notre pays, qui passe par l’amélioration significative de la compétitivité des entreprises.

Le projet de rapport qui vous est soumis aborde l'ensemble des politiques d'intervention économique de l'État. En tant que commissaire aux finances, j'ai naturellement traité des évolutions du programme 134, qui connaît une réduction de ses crédits de 5%, à périmètre constant, par rapport à 2014 – 874 millions d'euros en 2015, contre un peu plus de un milliard en loi de finances initiale pour 2014.

Pour reprendre l’expression employée par François Brottes, praticien de « l’économie de terrain », qui privilégie les approches pragmatiques et l'efficacité, j'ai vu, dans la réduction de crédits proposée, l'occasion de mener une réflexion approfondie sur l'utilité de certains dispositifs d'aide aux entreprises, comme le recommandait le rapport de MM. Philippe Jurgensen, Jean-Jack Queyranne et Jean-Philippe Demaël, au titre de la modernisation de l'action publique.

Certains dispositifs, comme le FISAC, sont emblématiques de contradictions toujours présentes au sein de la mission. En effet, après avoir élargi les critères d'entrée dans ce dispositif en 2008, les dotations budgétaires qui lui ont été allouées ont progressivement été réduites jusqu'à une dotation de 19 millions d'euros dans le PLF 2015. Malgré la réforme du 18 juin 2014, je m'interroge sur la pertinence de maintenir ce type de dispositif au niveau national : ne conviendrait-il pas d'en confier la gestion aux régions, tout en conservant la logique de l'appel à projets et sur des critères définis avec l'État ?

En revanche, si certains dispositifs doivent être repensés ou supprimés, d'autres auraient mérité d'être renforcés. À cet égard, je m’interroge sur la réduction des crédits de l'action en faveur des entreprises industrielles, c'est-à-dire de l'action 3 du programme 134.

Je pense en particulier aux crédits destinés aux pôles de compétitivité. Avec environ 100 millions d'euros en 2015, dont 90 millions au titre du Fonds unique interministériel (FUI) et 11,5 millions au titre de l'aide à la gouvernance des pôles, nous atteignons un plancher. En 2014, je rappelle que près de 23 millions d'euros étaient alloués à la seule gouvernance des pôles, ce qui permettait de les décharger d'un certain nombre de contraintes organisationnelles et facilitait leur développement.

Il serait dommage de fragiliser cette politique qui a pris du temps à se mettre en place, mais qui représente aujourd'hui une véritable réussite, notamment en matière de partenariat entre grands groupes industriels et PME, entreprises et recherche académique, et de complémentarité entre l'action de l'État et celle des collectivités territoriales. Faire porter aux collectivités territoriales l'essentiel de l'effort financier en faveur des pôles de compétitivité ne me semble pas être une situation optimale, et je souhaiterais, monsieur le ministre, connaître votre position sur ce sujet.

J’aimerais également vous interroger sur le déploiement des investissements d'avenir, à travers trois réflexions. La première est que le lancement des appels à projets se fait un peu attendre, notamment en matière de signature des conventions entre l'État et les opérateurs. À cet égard, vous semble-t-il possible et souhaitable d'accélérer le mouvement ?

En outre, il conviendrait de faire en sorte que les grands groupes industriels ne tendent pas à monopoliser les financements accordés, notamment à travers les 34 plans de la Nouvelle France industrielle, qui constituent l'essentiel des investissements d'avenir. Pourrait-on mieux prendre en compte l'accès des PME innovantes au programme d’investissements d’avenir (PIA), notamment par le biais d'appel d'offres spécifiques ?

Enfin, je voudrais vous interroger sur le niveau global du PIA. Certes, 12 milliards d'euros représentent un engagement significatif, mais d'autres grands pays européens ont mis en place des programmes d'investissements plus ambitieux. Vous avez vous-même appelé à un plan de relance massif au niveau européen : la France pourrait-elle montrer le chemin en lançant prochainement un troisième programme d'investissements d'avenir ?

Ma quatrième et dernière question sera un peu plus technique et portera sur l'aide aux entreprises en difficulté. Je me réjouis que la réactivation du Fonds de développement économique et social, doté de 300 millions d'euros en loi de finances initiale pour 2014, ait permis au Comité interministériel de restructuration industrielle (ClRI) de venir en aide de manière plus efficace à des entreprises en difficulté. En PLF 2015, cette dotation a été réduite à 200 millions d'euros, inscrits sur le programme 862 du compte de concours financier «  prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».

Si cette dotation demeure à un niveau élevé, le FDES ne bénéficie pourtant pas de la capacité de reporter ses crédits non consommés. Or, ce fonds doit faire face au caractère par nature aléatoire du calendrier des entreprises en retournement. Afin de préserver sa capacité à réagir dans la durée aux menaces de fermetures d'entreprises, il semble nécessaire de prévoir un mécanisme de report des crédits non consommés. Je voudrais connaître, monsieur le ministre, votre position sur ce sujet.

Mme Monique Rabin, rapporteure spéciale de la commission des finances pour le commerce extérieur. Au premier semestre de cette année, le solde des échanges de biens est passé sous la barre des 30 milliards d'euros, pour la première fois depuis 2010, s'établissant à moins 29,2 milliards d'euros. Après le record de 2011 – moins 73,7 milliards –, le déficit commercial continue de se résorber, pour s'établir en 2013 à moins 61,4 milliards d'euros : c'est une bonne nouvelle, même si la situation mérite d'être nuancée, du fait de la baisse des importations d'énergie. La part de marché mondial en valeur de la France reste stable, à 3,1%

Il y a donc des signes positifs, mais soyons convaincus que le commerce extérieur est à la fois l'expression de la situation de l'économie française et l'une des principales opportunités de retour à la croissance pour notre pays. Je disais déjà ici, l'an passé, qu’il devrait être une véritable cause nationale.

Dans ce contexte, je regrette que le commerce extérieur ne soit pas davantage ancré dans l'architecture budgétaire de l'État : il ne constitue pas une mission au sens de la LOLF, pas même un programme. Un choix qui peut entraver la lisibilité des actions de l'État en faveur des entreprises à l'international et, de manière plus accessoire, ne favorise pas l'exercice de contrôle du Parlement.

Pour ma part, je commente donc, dans le cadre de ce rapport spécial, les crédits de la seule action 7 «  Développement international des entreprises et attractivité du territoire » du programme 134. Ces crédits s'élèvent, dans le PLF pour 2015, à 108,8 millions d'euros. Ils servent à financer à 100 % les subventions pour charges de service public, qui seront versées à la future agence issue de la fusion, actuellement en cours, d'Ubifrance et de l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII).

Les crédits alloués au dispositif de développement international des entreprises et à l'attractivité du territoire sont donc présentés dans la mission « Économie ». Je vous fais part de toutes ces précisions pour vous montrer la complexité du sujet. En avril dernier, le portefeuille du commerce extérieur a été placé sous l'égide du ministre des affaires étrangères, dans une logique d'unification de l'action extérieure de l'État. Pourtant, c'est vous, monsieur Macron, qui êtes présent devant nous, pour en présenter les crédits. Voilà une organisation budgétaire peu lisible, qui, je l’espère, sera revue l'année prochaine. Je vous demande, monsieur le ministre, d’y travailler avec les membres du Gouvernement.

L'autre grande évolution de l'année, c'est la fusion entre Ubifrance et l'AFII. Je suis intimement persuadée que cette fusion renforcera nos actions en faveur du développement international des entreprises, grâce à la mutualisation des réseaux, notamment, mais aussi au partage des savoir-faire.

Cette fusion devrait, à terme, générer des économies. Toutefois, lors de différentes auditions, notamment celle de Mme Muriel Pénicaud et du président Bacquet, j'ai été alertée sur un point central : le coût de la fusion. La fusion doit être effective au 1er janvier 2015, mais, monsieur Eckert, elle n'est pas financée. Au total, ce sont environ 3,2 millions d'euros qui manquent pour 2014 et 5 millions pour 2015. Ce point est confirmé par la Direction générale du Trésor, également auditionnée.

Monsieur le ministre, où en est-on ? La fusion pourra-t-elle être réellement effective au 1er janvier 2015 ?

Je l'ai dit, la subvention pour charges de service public allouée à la nouvelle agence fusionnée s'élève à 108,8 millions d'euros, ce qui représente une baisse, que je ne conteste pas dans le contexte que nous connaissons. Mais il convient d'être vigilant sur le fait que la part des ressources propres des deux agences n'a cessé d'augmenter au détriment du soutien public et que celle-ci ne peut pas croître davantage sans remettre en cause la mission de service public de l'opérateur. Quel sera le modèle économique de la future agence fusionnée ?

Évidemment, les actions du secteur public en faveur du commerce extérieur ne se résument pas au travail de l'AFII et d'UbiFrance. Il y a une multitude d'acteurs ; je pense en particulier aux Chambres de commerce à l'international et aux régions qui se sont vu confier le chef de filât en matière d'export, ou encore à la Banque publique d'investissement, qui a mis son expertise financière au service de l'export.

Ce nombre conséquent d'acteurs n'est pas sans poser problème. Malgré de réels efforts de clarification, il est difficile de discerner clairement le rôle de chacun. Je dois vous faire part de mes craintes sur ce point. À l'heure où les deniers publics sont rares et précieux, il est fondamental que les missions soient mieux définies, qu'il n'y ait pas de redondance des moyens et que les acteurs publics ne se fassent pas concurrence avec les crédits de l'État. Les moyens les moyens déployés par Bpifrance Export, concernant notamment la participation à des salons et à des missions à l'étranger, m’inquiètent un peu. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous éclairer sur ce point ?

Je m'interroge aussi sur les actions de certaines agences régionales, en particulier l'agence ERAI, en Rhône-Alpes. Sortant de son périmètre transalpin, ne vient-elle pas, sur le territoire national comme à l'étranger, s'ajouter aux acteurs de l'export, faisant concurrence aux chambres de commerce et à Ubifrance ?

Je crois, toutefois, qu'il y a un réel effort de simplification et la volonté de jouer collectif m’a été confirmée.

Cette année, je me suis intéressée au seul tissu d'opérateurs. Cela étant, je m’interroge sur la création de nos Maisons à l'international. La première a été inaugurée par le Président de la République début 2014. Le coût de fonctionnement ne relève pas de mon périmètre de contrôle. Cependant, je souhaiterais savoir si une première approche du rapport coût-efficacité a été faite à moins d'un an de l'ouverture.

En guise de conclusion, je veux aborder la promotion de l'image économique de la France. Nous souffrons d'un déficit de visibilité et d'un problème d'image. Lors de leur audition, Mme Pénicaud et M. Bacquet ont pointé du doigt la faiblesse du budget de communication de la future agence pour promouvoir l'image de la France : nous y consacrons 1 million d'euros, tandis que nos voisins italiens dépensent 12 millions et nos voisins anglais 25. Monsieur le ministre de l'économie, la promotion de la France n'est-elle pas un investissement d'avenir, qui mérite quelques crédits, mais surtout une volonté de fer ?

M. Dominique Lefebvre, président. Je vous informe que Thierry Robert, rapporteur spécial pour les statistiques et études économiques, pour la stratégie économique et fiscale et pour les accords monétaires internationaux, ne peut être présent ce matin. Il m’a fait savoir qu’il donnait un avis favorable à l’adoption des crédits de cette mission et du compte.

Je vais donner la parole à Joël Giraud, rapporteur pour avis pour le commerce extérieur, et je ne doute pas, monsieur le ministre de l’économie, que vous aurez à cœur, en l’absence du secrétaire d’État au commerce extérieur, de répondre aux questions posées par les rapporteurs.

M. Joël Giraud, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour le commerce extérieur. Nous sommes dans un contexte d’absence de croissance – 0,4  % en 2014 – et d’absence d’inflation – 0,3  % sur l’année. Les restrictions budgétaires imposent une diminution des crédits, et donc, une rationalisation de l’usage des crédits – Mme Rabin vient de mentionner la fusion de l’AFII et d’Ubifrance.

Le solde de la balance globale poursuit son amélioration, le déficit se réduit d’année en année depuis 2011 en raison d’un recul de nos échanges où nos importations régressent plus vite que nos exportations, ce qui explique une amélioration du solde et du taux de couverture. Nous sommes dans un contexte de ralentissement des échanges à l’échelle planétaire.

La facture énergétique pèse toujours aussi lourd dans notre déficit global puisqu’elle représente 83  % du déficit, malgré une baisse conjoncturelle des importations l’année dernière, due à un hiver clément et à une chute du prix du baril.

La balance France des services est largement excédentaire – 33 milliards – et croît continuellement depuis 2005, même si elle ne représente qu’un quart des exportations totales françaises en biens et services.

Les moteurs habituels de l’export français tournent au ralenti, à l’image de l’agroalimentaire qui passe de la deuxième à la troisième place en matière d’excédent sectoriel de la France entre le second semestre 2013 et le premier semestre 2014.

L’entrée en guerre des monnaies peut présager d’un avantage certain pour l’export français, le cours de l’euro ayant baissé de 10 % par rapport au dollar sur les six derniers mois et de 7 % par rapport à la livre sterling. Bercy prévoit qu’une dépréciation de l’euro d’environ 10 % entraînerait une hausse de 0,6 % du PIB après un an et de 1 % après deux ans.

Nos soldes bilatéraux avec la majorité de nos partenaires européens sont en nette amélioration entre le second semestre 2013 et le premier semestre 2014. Le déficit français se réduit de 7,3 % vis-à-vis de la zone euro et de 18 % avec l’Allemagne, et notre excédent avec l’Angleterre progresse de 9,7 %. Il semblerait que ce repli sur la consommation se traduise également par des réflexes plus franco-français en termes de consommation de biens et services. Le commerce français reste majoritairement orienté vers l’Union européenne, avec 60  % de nos échanges.

Nous sommes dans un nouveau contexte où le Gouvernement a adopté une logique d’unification de l’action extérieure de l’État sous la tutelle du ministre des affaires étrangères et du développement à l’international (MAEDI). Comme Monique Rabin, j’aimerais bien y retrouver mes petits, en termes de budget et d’interlocuteur, ce qui serait plus pratique pour comprendre l’architecture et l’économie globale du secteur.

Concernant la francophonie, nous possédons la sixième langue la plus parlée au monde, avec 220 millions de locuteurs. Le français est une langue de la culture et de l’exportation culturelle. C’est la langue la plus utilisée après l’anglais pour la diffusion cinématographique et littéraire. À cet égard, il faut souligner le succès du crédit d’impôt cinéma, qui a rapporté 129 millions d’euros de recettes directes, pour un coût de 42 millions d’euros, et qui, pour un euro de crédit accordé, a généré 11,60 euros de dépenses dans la filière du cinéma.

Les enjeux du tourisme, grande cause nationale voulue par le Président de la République, ont été posés par les conclusions des Assises du tourisme. Nous sommes aujourd’hui la première destination en termes de flux touristiques, avec 83 millions de visiteurs. L’objectif fixé par le ministère des affaires étrangères est de 109 millions en 2020 et de 121 millions en 2030. Ce sont les objectifs pluriannuels de la France pour se maintenir en tant que première destination mondiale de tourisme.

Notre appareil exportateur reste très concentré sur les grands groupes et ne comporte toujours pas assez de TPE et d’ETI. Sur 3,6 millions d’entreprises françaises, seulement 121 000 sont exportatrices, contre 300 000 en Allemagne. Sur ce plan, la coopération décentralisée peut constituer un atout considérable.

Il ne faut pas négliger l’atout territorial qui est le premier partenaire des entreprises dans leur démarche à l’export, à travers les plans régionaux pour l’internalisation des entreprises ou les réseaux régionaux d’Ubifrance. La réforme territoriale en cours doit prendre en compte ces secteurs en matière d’économie.

J’en viens à mes questions, qui sont au nombre de trois.

Dans le cadre des négociations du partenariat transatlantique, je souhaiterais faire part de mon inquiétude vis-à-vis du « cheval de Troie » juridique qu’est le mécanisme de règlement des différends investisseurs-État (ISDS), qui permettrait, au nom de la libre concurrence, à des exploitants américains de gaz de schiste ou de bœufs aux hormones, de traîner l’État français devant des juges siégeant non élus à huis clos.

Quelles sont les intentions du Gouvernement face à cette disposition antidémocratique, qui menace la souveraineté de l’État, délocalise sa justice hors de ses juridictions et tire vers le bas le mode de vie des citoyens ?

Ma deuxième question concerne la fusion d’Ubifrance et de l’AFII. Dans la mesure où l’AFII est dotée d’un contingent et d’un budget très inférieurs à Ubifrance, quelles garanties d’équité le Gouvernement peut-il fournir ?

J’en arrive à ma troisième question. La France est la première destination touristique mondiale, mais figure en troisième position en matière de recettes générées par cette activité. Après les Assises du tourisme, quels sont les enseignements retenus pour optimiser la monétisation des flux touristiques et faire de la France la première destination touristique en matière de recettes générées ?

M. Jean Grellier, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour l’industrie. Le budget concernant les actions en faveur des entreprises industrielles du programme 134 participe à l'effort national de réduction des dépenses publiques, avec une affectation en crédits de paiement de 71,5 millions d'euros, en diminution de 12 % par rapport à l'année 2014.

Cependant, il faut rappeler la dotation, en 2014, au programme 405 « Projets industriels », de 420 millions d'euros, au titre du programme des investissements d'avenir, qui ne figurent plus au budget 2015 puisque ces crédits ont été affectés aux différents opérateurs. Vous pourrez, monsieur le ministre, apporter un certain nombre de précisions sur cette spécificité budgétaire.

Après avoir, l'an dernier, dans le cadre de ce même rapport, auditionné les quatorze comités stratégiques de filières du Conseil national de l'industrie, j'ai rencontré cette année, lors de tables rondes thématiques, des intervenants représentant 32 des 34 plans de la Nouvelle France industrielle.

A travers les chefs de projet, c'est une dynamique industrielle nouvelle, volontariste et porteuse de projets concrets pour stimuler l'innovation et l'actualité économique dans nos territoires, qui est en train de se créer.

L'initiative des 34 plans est inédite en matière de politique industrielle. Elle vise à concilier la présence d'un État stratège et la libre initiative des acteurs économiques, dans un cadre de gouvernance très souple. Chaque plan réunit chefs d'entreprises, de grands groupes comme de PME, administrations et opérateurs publics, pôles de compétitivité et établissements d'enseignement supérieur. Le chef de plan est généralement un industriel du secteur.

Le financement des plans procède également d'une logique budgétaire propre et vertueuse. Sans enveloppe budgétaire fixe et dédiée, les plans doivent faire émerger des projets suffisamment porteurs pour qu'une aide publique puisse se matérialiser, notamment au travers des programmes d'investissements d'avenir.

Depuis un an que les plans sont lancés, des feuilles de route ont été établies et les premières actions concrètes ont été menées : création de consortiums pour mener des projets de recherche et développement, regroupements d'entreprises pour « chasser en meute » à l'international, identification des besoins technologiques des filières à l'horizon 2020, incubation de start-up dans le numérique, mise en place de projets vitrines pour susciter une demande, etc.

Le point commun essentiel à tous les plans est qu’ils ont su se décliner sur les territoires, parfois pour revitaliser des secteurs industriels, parfois pour étoffer le tissu des entreprises, notamment autour des pôles de compétitivité. Je tiens à souligner cette dimension territoriale, incontournable en matière de politique industrielle.

Ces nombreuses initiatives ont su, selon les acteurs économiques rencontrés, donner une impulsion aux filières pour « jouer collectif » dans des secteurs où la compétition internationale oblige à agir vite.

Dans ces conditions, les perspectives de « rationalisation » des plans, au sens d'un regroupement ou d'une suppression de plans moins performants, n'apparaît pas comme une priorité, un an seulement après leur déploiement. Au contraire, il faut tirer parti des externalités positives que ces plans produisent, plutôt que de risquer de casser leur élan.

Ainsi, plutôt que des rapprochements, ce sont des coopérations qui pourraient avoir lieu, en favorisant le dialogue entre les plans pour faire émerger des objectifs communs et développer l'échange de bonnes pratiques. Monsieur le ministre, quelles évolutions des plans sont prévues dans les mois à venir ?

Cette logique de projets concrets, innovants, qui rassemblent grands groupes et PME, est spécifique aux plans industriels. Pour que la politique industrielle reste cohérente, il faut toutefois s’assurer que ces plans s'articulent correctement avec les comités stratégiques de filière du Conseil national de l’industrie. Leurs approches sont complémentaires et doivent être combinées pour donner à la politique industrielle française toute son efficacité et sa cohérence.

Tandis que les comités stratégiques représentent chaque filière industrielle de manière collective – en associant industriels, partenaires sociaux et État –, les plans relèvent de la mise en commun des efforts d'un nombre réduit d'acteurs pour cibler un marché précis, sur lequel la France peut développer des avantages comparatifs.

Tandis que les comités stratégiques ont pour objet d'assurer la bonne structuration des filières – c'est-à-dire renforcer sa compétitivité et son positionnement international, redynamiser l'emploi et assurer l'adéquation de l'offre de formation –, les plans ont davantage un objet prospectif, à l'horizon 2020, parfois pour provoquer des ruptures technologiques décisives pour la compétitivité française, parfois pour faire émerger un marché suffisamment porteur pour stimuler l'appareil industriel du pays.

Je souhaite connaître votre position, monsieur le ministre, sur les relations que doivent entretenir les comités de filière et les plans. Faut-il renforcer leur articulation ou préserver une certaine autonomie ?

Enfin, je souhaite rappeler une proposition que j'avais soumise à votre prédécesseur, et sur laquelle je sollicite votre avis : les comités stratégiques de filière du Conseil national de l’industrie pourraient intégrer un correspondant parlementaire, qui servirait de relais politique pour identifier et résoudre les problèmes de nature industrielle qu'ils rencontrent. Je crois que ce serait vertueux, et que ce serait une première étape vers une association durable du Parlement à la mise en œuvre concrète de la politique industrielle.

M. Lionel Tardy, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques pour les entreprises. Figurant dans le programme 134, les crédits de la mission « Économie » en faveur des entreprises concernent essentiellement ses actions 2, 3, 7, 8 et 20.

Les crédits demandés au titre de ce programme diminuent cette année de 14,7 % et de 11,1 %, s'agissant des actions qui concernent directement les entreprises. Si votre rapporteur comprend cette baisse, qui correspond à un indispensable effort de maîtrise des dépenses au vu de la situation de nos finances publiques, il s'étonne cependant que les crédits en faveur des entreprises, qui constituent des dépenses éminemment productives, soient touchés dans ces proportions.

Je rappellerai que les mesures budgétaires en faveur des entreprises ne relèvent pas d'une logique de subvention, mais d'un indispensable soutien, en particulier en période de crise, qui vient compenser pour partie l'importante pression fiscale à laquelle nos entreprises sont assujetties.

Par ailleurs, je regrette le manque de lisibilité des évolutions budgétaires de la mission par rapport au PLF pour 2014.

Les programmes 405, 406 et 407, qui avaient fait leur apparition dans le précédent PLF et correspondaient au lancement du second volet du programme des investissements d'avenir, ont désormais disparu. Cette disparition est compréhensible, dans la mesure où les crédits versés en 2014 seront décaissés progressivement, sur plusieurs années, par les opérateurs. Il aurait convenu, toutefois, de le rappeler de manière expresse et, surtout, de fournir un suivi de la réalisation de ces investissements.

Je souhaite également mentionner certaines baisses de crédits, qui me paraissent particulièrement dommageables, et sur lesquelles je reviendrai.

L’aide au départ des commerçants permet de soutenir les artisans et les commerçants rencontrant des difficultés à céder leur fonds de commerce à leur départ en retraite. Au vu de la crise économique que nous traversons et de la concurrence subie par les commerçants du fait de la grande distribution, il est particulièrement regrettable de voir cette aide disparaître.

En outre, la réduction des crédits du FISAC atteint désormais des proportions alarmantes. Le FISAC n'est plus doté que de 8,5 millions d'euros en crédits de paiement dans le PLF 2015, contre 40 millions dans le PLF 2012. Il est donc progressivement vidé de ses moyens, alors que son utilité demeure cruciale pour la vie des territoires ruraux.

L'ensemble de ces raisons me conduit à émettre un avis défavorable à l'adoption des crédits du programme 134 en faveur des entreprises.

J’en viens au chantier de la simplification au service des entreprises, sujet auquel j’ai consacré une part importante de mon rapport.

Il m'a paru intéressant de revenir sur une question dont le Gouvernement s'est largement saisi et sur laquelle, je le reconnais, certaines avancées ont déjà eu lieu. Le Conseil de la simplification se réunit d'ailleurs ce matin, à l'Elysée, en présence du Président de la République, du Premier ministre et de huit ministres, ce que je salue.

La simplification représente aujourd'hui l'un des rares moyens dont nous disposons pour renforcer notre économie, dans un contexte où les marges de manœuvre budgétaires sont restreintes et où un effort substantiel a d'ores et déjà été consenti en matière fiscale à travers le CICE, qui représentera une aide de 20 milliards par an en régime de croisière.

La France, selon le World Economic Forum, se classe au 121e rang sur 144 pays, s'agissant de la lourdeur des réglementations encadrant les entreprises. La Direction générale de la modernisation de l'État avait chiffré en 2008 le coût de cet « impôt papier » à 60 milliards. Les auditions que j'ai conduites à l'occasion de cet avis m'ont amené à faire le constat que la marge de progression sur ce sujet demeurait très forte.

Tout d'abord, certaines mesures annoncées reçoivent une application décevante. C'est le cas, en matière fiscale, de la suppression de petites taxes, annoncée comme devant réduire la pression fiscale à hauteur de 1 milliard d'euros. À la suite de la discussion sur la première partie du projet de loi de finances, l'effort ne concernera en réalité que sept taxes, pour un montant compris entre 1 et 2 millions d'euros !

S'agissant de la simplification du bulletin de paie, que ma collègue Laure de La Raudière avait déjà appelée de ses vœux dans le cadre de ce même avis, il y a quatre ans, les choses semblent avancer, si j'en crois les dernières informations de ce matin. Au 1er janvier 2016, le nombre de lignes du bulletin de paie passerait à sept, quand bien même il serait possible de n'en garder que quatre ! C'est ce que nous avions suggéré, avec plusieurs collègues du groupe UMP, dans une proposition de loi examinée le mois dernier.

Certaines mesures du programme de simplification du Gouvernement reçoivent une application diamétralement opposée à l'intention qui les justifie. J'en veux pour preuve les décrets d'application du principe selon lequel « le silence de l'administration pendant 2 mois vaut décision implicite d'acceptation », qui conduisent à vider ce principe de sa substance. Ces décrets introduisent une complexité considérable dans la vie des entreprises, en raison du nombre et de la variété des exceptions qu'ils prévoient.

Désormais, au lieu de disposer d'une règle claire, une entreprise devra rechercher, si une procédure se voit appliquer le principe de la décision implicite d'acceptation ou celui de la décision implicite de rejet, lesquelles peuvent être acquises, au terme de délais extrêmement variés. Sous couvert de simplification, c'est donc un choc de complexité que vous avez créé !

Enfin, l'actuelle majorité continue à créer des dispositifs d'une complexité écrasante, qui vont, sans aucun doute possible, dégrader le climat des affaires et alourdir la vie des entreprises. Je mentionnerai le dispositif d'information des salariés deux mois avant la cession d'une entreprise de moins de 250 salariés, introduit par la loi relative à l'économie sociale et solidaire, ainsi que les six décrets pris le 9 octobre 2014 pour la mise en application du compte pénibilité.

La simplification que vous avez lancée ressemble trop souvent à une simplification en trompe-l'œil. La réalité qu'affrontent les entreprises est d’une complexité accrue, ce qui les handicape considérablement dans leurs projets. Vous agissez en partie sur le stock, mais il serait tout aussi important que vous vous préoccupiez du flux qui, lui, ne cesse de s'amplifier.

Mme Corinne Erhel, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques pour les communications électroniques et l’économie numérique. Le numérique est un domaine sans cesse en mouvement, où l'innovation est permanente et l'adaptation nécessaire.

Les crédits consacrés aux communications électroniques ne dérogent pas à cette règle, en se redéfinissant chaque année pour épouser au mieux les besoins liés au développement et saisir les opportunités offertes en matière de croissance et d'emploi, même si, cette année, on constate un secteur des opérateurs télécoms en pleine recomposition.

Les crédits consacrés aux communications électroniques sont répartis dans deux programmes : le programme 134, à travers les financements alloués à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP), à l'Agence nationale des fréquences (ANFR) et à certaines associations, et un nouveau programme important, le programme 343, dédié au financement du très haut débit.

L’ARCEP et l’ANFR sont confrontées à des enjeux similaires tels que l’accroissement de leurs missions dans un contexte d’efforts budgétaires. Je m’attarderai sur les moyens humains mis à disposition de ces deux agences.

Pour l'ARCEP, on constate, après un passage de 173 à 171 équivalents temps plein (ETP) entre 2013 et 2014, une accélération et un objectif cible pour le PLF 2015 à 166 ETP. Cette baisse se poursuivra, l’Autorité devant perdre au final entre vingt et vingt-sept ETP en trois ans. Il conviendra de préciser le rythme de cette diminution.

Cette ambition pose question, alors que l'on constate, au travers des auditions que j'ai menées, un accroissement des missions de régulation avec, notamment, la montée en charge du Plan «  France très haut débit » et, de fait, l’augmentation du nombre d’acteurs à réguler, ce qui n’avait peut-être pas été suffisamment anticipé, mais aussi l'attribution à venir des licences 4G en outre-mer et l'attribution de la bande des 700 MHz.

Aujourd'hui, il semble que l'ARCEP rencontre quelques difficultés pour financer, notamment, les travaux de prospective, qui sont un point important dans un secteur en constante évolution.

Pour l'ANFR, malgré des effectifs qui restent quasiment constants, l'agence a dû, pour faire face aux besoins de la mission de protection de la réception de la télévision, puiser dans son fonds de roulement. Cette question, déjà soulevée l'année dernière, appelle une réponse pérenne afin de permettre à l'agence de mener à bien ses missions, alors que ces dernières se multiplient et que la libération annoncée de la bande des 700 MHz risque de générer de nouveaux besoins.

Je salue la création du programme 343 « Plan France très haut débit », à hauteur de 1,412 milliard. Il permet d'adresser un signal fort aux acteurs du déploiement du très haut débit en France sur la permanence de l'engagement de l'État à leurs côtés dans le financement de ce chantier majeur. Je souhaiterais rappeler à cette occasion la nécessité de maintenir nos ambitions cibles en matière de fibre optique, enjeu industriel, économique, sociétal et d’aménagement du territoire.

Ce budget est satisfaisant au regard des enjeux de maîtrise de la dépense publique auxquels notre pays est confronté. J'émets donc un avis favorable sur ces crédits.

En complément, je souhaiterais poser quelques questions.

Le numérique est un sujet important. Même si je comprends la logique budgétaire, il me parait important de garantir la lisibilité du budget et la bonne information des parlementaires sur l'attribution et la consommation des crédits. Je pense notamment aux 615 millions d'euros du programme 407, avec la French Tech et le volet dit « cœur de filière et usages », présents sous le vocable « Économie numérique » dans le projet de budget 2014, et désormais entre les mains des opérateurs de l'État au titre du nouveau Programme d’investissements d’avenir (PIA2). Quelles clés de suivi pouvons-nous mettre en place ?

Le projet d'agence du numérique semble se confirmer, d'après les différentes auditions que j'ai menées. Quels seront son périmètre, ses compétences, mais aussi les ressources qui lui seront allouées ?

Comment permettre à l'ARCEP et à l’ANFR de faire face à la multiplication de leurs missions, dans un contexte de réduction budgétaire ?

Quel est aujourd'hui le calendrier de libération et de mise aux enchères des fréquences 700MHz, sujet récurrent dans les auditions que j’ai menées auprès des différents acteurs ?

Mme Brigitte Allain, suppléant Mme Michèle Bonneton, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques pour les postes. Je vous prie d’excuser l’absence de Michèle Bonneton qui, pour des raisons familiales, ne peut être présente parmi nous.

La Poste est confrontée à d'immenses défis, du fait de la baisse drastique du volume du courrier : alors qu'il s'élevait à 17,8 milliards d'objets en 2008, il atteindra à peine quelque 10 milliards d'objets n en 2020.

Comme Mme Bonneton a pu le souligner l'an passé, l'effort financier de l'État en faveur des postes ne reflète pas l'importance économique du secteur, qui représente 1 % du PIB et de la population active française. Pour l'essentiel, l'État compense, de manière partielle, les missions de service public confiées à La Poste par le législateur. Ces compensations ne sont pas toutes reportées au sein de la mission « Économie » qui nous occupe aujourd'hui.

En ce qui concerne l’analyse budgétaire, je m’attacherai principalement à la compensation par l’État des surcoûts de la mission de transport de la presse, conformément aux accords Schwartz de 2008, qui permet aux éditeurs de presse de bénéficier de tarifs préférentiels.

Certes, l’accord prévoyait une baisse tendancielle des aides, de l’ordre de 17 millions d’euros, mais le Gouvernement a aussi souhaité faire porter une partie du financement du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi par La Poste, pour un montant de 50 millions.

Bien évidemment, l’effort demandé à La Poste s’inscrit dans le cadre d’une politique transversale, qui touche toutes les entreprises publiques bénéficiaires du CICE. À ce titre, rappelons qu’en 2014, le montant prévisionnel du CICE devrait s’élever à environ 300 millions d’euros. La participation demandée à La Poste est faible au regard du bénéfice qu’elle retire du CICE et peut donc paraître légitime dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques.

Néanmoins, il est surprenant que cette diminution de 50 millions ait été décidée quelques jours à peine après la signature du contrat d’entreprise, le 1er juillet 2013, qui prévoyait le maintien de la compensation de l’État à hauteur de 200 millions d’euros. Par ailleurs, on peut s’interroger sur les conséquences de cette baisse, s'agissant de l'acheminement de la presse en milieu rural.

Enfin, Mme Bonneton considère que cette démarche « multicontrats » – contrat d'entreprise, contrat de présence postale territoriale, auxquels viennent s'ajouter, en interne, le plan stratégique et son pendant, le pacte social – rend peu lisible la politique conduite à l'égard d'un groupe qui est le deuxième employeur de France.

Confrontée à une baisse continue de son activité «  courrier », le groupe a décidé une augmentation inédite du prix du timbre, tout en cherchant à privilégier le recours au timbre vert, moins onéreux et plus compatible avec le développement durable, au détriment du timbre rouge. La hausse sera, en janvier prochain, de 11 % pour le premier et de 15 % pour le second. Si cette hausse n'est pas injustifiée, je déplore qu'elle n'ait pas été anticipée plus tôt, ce qui aurait évité un taux d'augmentation aussi brutal. En effet, cela risque de pousser les usagers – ce terme n’a rien de désuet pour nous – à recourir encore plus aux moyens numérisés.

La Poste a marqué sa volonté d'adaptation en présentant cette année un Plan stratégique qui a pour mérite de dégager des perspectives. Cependant, le pacte social devant accompagner ce plan a été refusé par les syndicats majoritaires. Cela met en évidence l’existence d’un malaise social dont bien des interlocuteurs de notre rapporteure se sont fait l’écho. Mme Bonneton reste donc vigilante au sujet de la condition des postiers.

Ainsi, la manne du crédit d’impôt compétitivité emploi, qui vient rééquilibrer plus de 50 % des comptes de La Poste ne saurait servir de paravent à des réductions d’effectifs là où les besoins se font sentir.

Par ailleurs, La Poste faisait reposer ses perspectives de retour à l’équilibre des comptes sur l’activité bancaire, l’entreprise passant alors du statut de poste fournissant des services bancaires à celui de banque fournissant des services postaux ; l’objectif étant que La Banque Postale fasse passer son résultat net de 547 millions d’euros en 2012 à plus de 1 milliard en 2020. Nous ne pouvons que prendre acte de cette situation. Cependant, les banques privées ne respectent pas leur obligation de présence territoriale ; La Poste, elle, répond à son obligation contractuelle. C’est donc La Poste et, par conséquent, le contribuable, qui pallient sur fonds publics à la défaillance organisée du secteur bancaire.

En ce qui concerne l’avenir des postiers, si chacun est conscient – les postiers les premiers – de la nécessité de la diversification, celle-ci doit s'opérer de manière concertée avec l'ensemble du personnel et les représentants syndicaux, afin d'éviter que ne se renforce l'impression d'être dans une holding dont les différentes branches s'ignorent. Or au-delà de l'acheminement des plis et des colis, le cœur du métier de La Poste est le service de proximité. À ce titre, de nouvelles perspectives s'offrent à La Poste dans le secteur, large, des services à la personne. La Poste s'est d'ailleurs lancée dans cette voie via l'offre Facteur Services Plus, qui propose une gamme de services tels que la visite aux personnes âgées, le portage de médicaments ou de produits culturels, ainsi que le relevé d'index EDF. Cela étant, la responsabilité du facteur peut-elle être engagée en cas d'incident suite à sa visite s'il n'a rien remarqué d'anormal ? Le portage de médicaments, qui fait l'objet de force critiques de la part des pharmaciens, peut-il perdurer ?

Pour conclure, Mme Bonneton demeure convaincue que l'avenir de La Poste réside dans sa qualité d'acteur de proximité. Cet avenir reposera toujours sur l'existence d'un maillage fin proche du public, ce qui est la définition même du service public.

Mme Seybah Dagoma, rapporteure pour avis de la commission des affaires étrangères pour le commerce extérieur. Après une décennie de dégradation continue de notre commerce extérieur, qui n'était manifestement pas une priorité de la majorité d'alors, le Gouvernement a engagé depuis 2012 une politique vigoureuse pour rétablir le rayonnement économique de notre pays.

En effet, la politique générale de compétitivité y contribue, même si le ciblage des mesures d'allégement des charges, comme le CICE, suscite quelques interrogations, sur lesquelles mon rapport revient. Le choc de simplification est aussi un élément déterminant. Les investisseurs disent tous qu'ils attendent des règles plus simples et plus stables.

Par ailleurs, le Gouvernement œuvre pour que notre dispositif de soutien à l'internationalisation des entreprises soit plus professionnel et plus cohérent.

Deux décisions très importantes ont été prises dans les derniers mois : le rattachement des politiques du commerce extérieur, de l’attractivité et du tourisme au ministère des affaires étrangères, et la fusion d'Ubifrance et de l'AFII. Mais ce mouvement de réforme ne peut pas être considéré comme achevé.

D'abord, toutes les conséquences de la nouvelle architecture gouvernementale n'ont pas été tirées. Nous débattons aujourd'hui du commerce extérieur dans le cadre de la mission « Économie », à côté de trop nombreux autres sujets. Le Gouvernement compte-t-il, l'année prochaine, transférer sur la mission « Action extérieure de l'État », c'est-à-dire le budget du Quai d'Orsay, les crédits de financement de la future agence Ubifrance-AFII et des services économiques des ambassades ? De même, il est incompréhensible que le ministre chargé de ces questions ne soit pas présent aujourd’hui pour nous répondre.

S'agissant des administrations centrales, considérez-vous que la dyarchie entre celles de Bercy, Direction générale du Trésor et Direction générale des entreprises, et la modeste direction des entreprises et de l'économie internationale du Quai d'Orsay est satisfaisante ?

Au niveau des opérateurs, la fusion entre Ubifrance et l'AFII est un premier pas, qui doit être correctement mis en œuvre. Les coûts de fusion sont évalués à 5 millions d'euros en 2015 pour l’harmonisation des statuts des logiciels, ainsi que pour la nouvelle communication d’entreprise. Or le projet de loi de finances ne les fournit pas. Pouvez-vous nous donner une explication ?

S'agissant de la dotation de l’État à Ubifrance, elle ne cesse de diminuer. Elle était de 103 millions en 2011 et devrait atteindre 95 millions en 2015. Cette réduction constante des moyens d'Ubifrance ne me paraît nullement judicieuse. En effet, des études économétriques sur le surplus d'exportations généré par les soutiens publics existants montrent qu'un euro d'argent public peut engendrer cinq à douze euros d'exportations supplémentaires, et donc, des ressources fiscales et sociales qui couvrent largement la dépense initiale.

S'appuyant notamment sur des études similaires, de nombreux pays ont fait des choix inverses aux nôtres. Citons pour exemple la Grande-Bretagne où je me suis rendue et où j'ai constaté que, malgré un déficit public nettement plus élevé que le nôtre, le gouvernement britannique avait décidé d'augmenter massivement les moyens de leur opérateur public UKTI, qui sont d'ores et déjà supérieurs de moitié à ceux de la future agence issue de la fusion Ubifrance-AFII, pour un périmètre de missions identique.

Ces observations ne justifieraient-elles pas une réflexion approfondie sur le niveau des moyens consacrés au rayonnement économique international ? Pour ma part, je plaide pour que le commerce extérieur devienne une priorité budgétaire.

S’agissant d’Ubifrance, l'Autorité de la concurrence a rendu cet été un avis qui invite à clarifier la distinction entre activités de service public et activités commerciales. Quelles conséquences seront tirées ?

Les maisons de l'international concrétisent, à l'étranger, un effort de fédération des acteurs présents. Pouvez-vous nous préciser quels sont les projets de développement de ces maisons pour les prochains mois, les prochaines années, et quel est le modèle suivi ?

Que pensez-vous également du rôle des régions dans notre politique économique internationale ? Pour ma part, je constate que nous avons vingt-deux politiques régionales de l'export, ce qui nuit parfois à l'unité de notre politique nationale. Je ne reviens pas sur le sujet d’ERAI, déjà évoqué.

La mission de préfiguration de la « Marque France », menée en 2013 par M. Lentschener, n'a pour le moment pas débouché. Or, une politique de construction et de valorisation à l'international de l'image de notre pays est plus que jamais nécessaire. Je suis allée en Suède et au Royaume-Uni, deux pays qui ont pris de l'avance dans ce domaine, et j'ai pu y voir quelques conditions essentielles de la réussite d'une telle action : l'octroi d'un budget significatif, se comptant en dizaines de millions d'euros, là où nous ne prévoyons qu’un seul million ; une impulsion politique forte et une gestion interministérielle, afin d'associer toutes les administrations, y compris celles qui ne relèvent pas du champ économique ; la mobilisation des acteurs privés : artistes et entreprises, notamment ; enfin, le recours à une communication multisupports et multilingue. Le site internet de la Suède est traduit en chinois, en arabe, en anglais, en espagnol, en français, en allemand et en russe. Sommes-nous en mesure d’en faire autant ?

En outre, les différents réseaux qui concourent au rayonnement économique de la France, Ubifrance, les chambres de commerce, les services économiques, restent insuffisamment déployés là où sont les opportunités de demain. La majorité de leurs effectifs à l'étranger restent à ce jour localisés en Europe ou en Amérique du nord, alors même que la croissance, et donc, les nouveaux marchés, seront concentrés aux deux tiers dans les économies émergentes et en pré-émergence, notamment en Afrique et en Asie du sud-est. Ne faudrait-il pas accélérer les redéploiements géographiques ?

En effet, faute de moyens pour investir dans les pays en pré-émergence, on y envoie parfois des VIE, donc des jeunes avec peu ou pas d’expérience, qui peuvent parfois se sentir esseulés. Je suis pour ma part tout à fait perplexe sur ces pratiques.

Plus généralement sur les VIE, il est impératif que nous diversifions leurs profils et que nous ne nous cantonnions pas aux seuls diplômés des grandes écoles. Des VIE aux profils plus techniques seraient un enrichissement pour tous.

M. Michel Vauzelle, présidentJe déplore, moi aussi, l’absence de tout représentant du ministère des affaires étrangères, qui dispose pourtant d’un ministre et de plusieurs secrétaires d’État.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. En effet, je ne suis pas un représentant du ministère des affaires étrangères et je comprends que vous puissiez le regretter. Mais le principe de solidarité gouvernementale et la cohérence de l’action économique font que cette discussion peut avoir beaucoup de sens, même si elle n’a lieu qu’entre nous. Les décisions concernant les périmètres d’intervention ministérielle ayant été prises en cours d’année, il n’est pas aberrant que toutes les conséquences sur le plan budgétaire n’en aient pas été tirées. Il n’en demeure pas moins qu’il doit y avoir – c’est la condition de notre réussite collective – une continuité d’action ainsi qu’une cohérence entre ce que nous faisons à l’intérieur et à l’extérieur du pays.

J’estime que la discussion budgétaire ne reflète pas la réalité des actions ministérielles et j’entends l’inconfort que certaines ou certains d’entre vous peuvent ressentir à travers les programmes « Commerce extérieur » ou « Action extérieure de l’État ».

La mission « Économie » comprend quatre programmes, dont deux seulement traduisent le périmètre du ministère. Demain matin, nous débattrons, avec Geneviève Fioraso, du programme 192, qui s’ajoute au programme 134 et qui porte des priorités cohérentes avec celles dont nous discutons ce matin : je pense aux financements versés à la BPI, qui sont répartis entre ces deux programmes – une partie est affectée au programme 134 avec les dotations de garantie, et l’autre au programme 192 avec les dotations d’intervention.

Il en est de même pour les pôles de compétitivité, pour lesquels la totalité du financement des projets préservés, voire renforcés avec le PIA, se retrouve dans le programme 192. Seuls les moyens de fonctionnement figurent dans le programme 134. Au-delà, je souligne l’importance des moyens du PIA, et en particulier du PIA2, voté l’an dernier, qui rassemble 2,3 milliards de crédits au service des axes majeurs de notre ministère. Axelle Lemaire, retenue à la Présidence de la République, nous rejoindra dans quelques instants et pourra évoquer plus largement la question du numérique, secteur qui, comme les filières industrielles ou l’innovation, constitue une priorité pour nous : 1,7 milliard d’euros y est consacré dans la mission « Économie ».

Notre discussion peut paraître parcellaire si l’on essaie de reconstituer la cohérence de l’action gouvernementale, mais il faut garder en tête l’ensemble de cette action. Nous allons chercher dans les prochains mois à en améliorer la cohérence, sans pour autant créer des frontières là où il n’y en a pas. Il ne faut pas créer de barricades car l’action du Gouvernement et de l’État est une. En fin de compte, notre réflexion doit porter sur la cohérence qu’il faut avoir à l’égard des politiques ou des publics que nous voulons servir.

S’agissant des entreprises que nous voulons accompagner, peu leur chaut de savoir si les crédits viennent du ministère des affaires étrangères ou de Bercy : l’important, c’est qu’ils arrivent, qu’ils soient rapides, bien fléchés et qu’il y ait des gens compétents en face d’elles. Voilà pourquoi nous ne devons pas nous perdre dans des débats parfois artificiels.

Plusieurs rapporteurs l’ont noté : l’évolution du programme 134 est marquée par la volonté de réaliser des économies ciblées – nous évitons autant que faire se peut le « rabot » – et de servir des priorités claires en matière de développement économique. La baisse des crédits de 5 % est cohérente avec l’effort d’ensemble. Les transferts de crédits effectués notamment vers Atout France, le fonds de soutien aux collectivités locales ou le Laboratoire national de métrologie et d’essais expliquent ces changements.

Néanmoins, nous réalisons des économies ciblées. Un ministère dit « dépensier » se doit de les assumer, par respect du principe de responsabilité et de solidarité. L’efficacité de notre politique économique passe aussi par un discours responsable en matière de finances publiques. Les économies portent donc sur certains dispositifs d’intervention : Mme Carole Delga vous parlera plus en détail des choix que nous avons faits. Les autorités administratives indépendantes, quant à elles, ont consenti des efforts importants en termes d’effectifs. Enfin, la compensation de la mission de transport de presse confiée à La Poste est revue à la baisse, dans le cadre du protocole passé en 2008 entre l’État, La Poste et les professionnels.

Je veux aussi souligner, même si la question a été débattue en première partie du projet de loi de finances, l’effort important que nous avons demandé aux chambres de commerce et d’industrie.

Dans tous les cas, nous nous efforçons de réaliser ces économies le plus intelligemment possible. Non seulement elles sont nécessaires, mais elles sont porteuses de sens et nous permettent de préserver nos priorités.

M. André Chassaigne. Encore faudrait-il que ces priorités soient pertinentes !

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Il s’agit par exemple du soutien à l’innovation et aux PME : comme vous le réclamiez vous-même, monsieur Chassaigne, nous augmentons la garantie de la BPI pour faciliter l’accès des entreprises aux crédits. Nous préservons également d’importantes missions du ministère alors qu’elles avaient été fortement mises à contribution par le passé. C’est le cas, par exemple, de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dont les effectifs avaient connu une baisse importante.

L’inconfort que vous éprouvez face à l’« illisibilité » de certaines dispositions budgétaires, mesdames et messieurs les rapporteurs, tient au fait que nous traversons une phase de transition. Une décision prise en avril ne peut trouver sa complète traduction dans ce PLF. Nous veillerons à faire évoluer collectivement et intelligemment la maquette budgétaire l’année prochaine. Pour autant, le ministère de l’économie ne saurait être totalement absent du champ du commerce extérieur. Il partage la tutelle de l’AFII-Ubifrance, ce qui signifie qu’il continuera à examiner ses crédits et à veiller à la cohérence de son action.

S’agissant de la Direction générale du Trésor et de la Direction générale des entreprises, vous avez raison, madame Dagoma : ne recréons pas ailleurs ce qui fonctionne bien à un endroit ! La Direction générale du Trésor est une direction importante, ce qui ne lui attire pas forcément la sympathie, mais elle donne satisfaction. Elle possède une expertise reconnue de longue date et un vrai savoir métier. Ne cassons pas les instruments qui marchent ! Il faut appliquer la convention passée il y a quelques semaines. En cohérence avec Laurent Fabius et Matthias Fekl, le ministère de l’économie continuera à travailler dans ce domaine qui relève à l’évidence de l’action extérieure et de l’action économique du Gouvernement.

Les coûts de la fusion entre l’AFII et Ubifrance seront bien pris en charge, il n’y a pas d’états d’âme à avoir à ce sujet. Le chiffre avancé pour 2015 est de 5 millions d’euros. Nous y travaillons avec le secrétaire d'État chargé du budget. La réflexion peut notamment se porter sur des reports de crédits, mais nous n’abandonnerons pas ce projet.

La décision a été prise au printemps et la fusion, j’y insiste, est effective. J’ai ouvert il y a quelques semaines la première réunion des personnels de l’AFII-Ubifrance, à laquelle participaient Mme Muriel Pénicaud et, pour la conclusion, Laurent Fabius et Matthias Fekl. Il n’y a pas d’exemple de structures publiques ayant fusionné aussi rapidement. J’ai toujours cru à la cohérence de ce projet, même si, bien entendu, les missions sont différentes : l’AFII attire les grands investisseurs internationaux sur le sol français, Ubifrance aide les entreprises, y compris les petites, à se développer à l’export. La nouvelle structure est l’interface essentielle entre nos territoires, nos entreprises et le reste du monde.

La réflexion stratégique engagée il y a plusieurs mois avec les services des différents ministères compétents, sous la houlette opérationnelle de Muriel Pénicaud, se poursuit. Avant la fin de l’année, nous aurons défini une feuille de route qui clarifiera le paysage institutionnel. Ce qu’il faut éviter, c’est un « territorialisme » des politiques à l’export. J’ai demandé à tous les services concernés du ministère de travailler avec l’agence fusionnée. Il doit en aller de même sur les territoires, où la multiplicité des structures – chambres de commerce et d’industrie, initiatives régionales, agences ad hoc, etc. – est beaucoup plus prononcée qu’au niveau de l’État. Si les entreprises s’y perdent, c’est à cause de cette multitude de guichets sur le terrain. Tous les décideurs locaux doivent travailler à une mise en cohérence et en synergie avec l’agence fusionnée.

Dans cette optique, j’ai demandé à Mme Pénicaud de consolider l’approche par filières, déjà engagée par Mme Nicole Bricq, et par implantation géographique. Les « familles export » ainsi définies renforceront l’action de tous ceux qui souhaitent exporter et se développer à l’international, en cohérence avec nos plans et nos priorités. Mais ces familles ne visent pas toutes les mêmes régions du monde. C’est pourquoi Mme Pénicaud, en lien avec le ministère des affaires étrangères et la Direction générale du Trésor, devra élaborer à la fois une cartographie et un plan stratégique. Je souhaite que ce travail, pour lequel nous devons nous donner un peu de temps, se fasse en toute transparence avec les parlementaires. Je demanderai à Mme Pénicaud qu’elle vous y associe pleinement, car c’est l’ensemble des acteurs qu’il faut mobiliser.

Vous m’interrogez, madame Rabin et madame Dagoma, sur le type de communication qui devra accompagner cette mobilisation. Pour ma part, je pense que l’on peut avoir des priorités qui se reflètent autrement que par des crédits budgétaires. Il faut tout d’abord établir un plan d’action cohérent et rigoureux en matière de politique de communication à l’international, car celle-ci, vous avez raison de le souligner, présente aujourd'hui des faiblesses. Cela fait partie de la feuille de route de Mme Pénicaud, qui est en train d’y travailler.

Cependant, j’en appelle encore au pragmatisme : actuellement, il y a trop de signaux divers, voire divergents, envoyés par un trop grand nombre d’émetteurs. On gagne en communication lorsqu’on envoie des messages simples, en nombre limité et répétés par tout le monde dans les mêmes termes. L’agence fusionnée devra nous aider à mettre en cohérence nos discours à l’international, quels que soient, ensuite, les canaux par lesquels ils seront délivrés. Après que nous aurons examiné ensemble ses propositions, nous envisagerons de façon réaliste l’action à mener pour avoir un programme de communication qui corresponde à nos ambitions. Il ne s’agit évidemment pas d’être malthusien ou de faire de fausses économies. Dans les comparaisons que vous faites avec nos voisins, vous avez raison de constater que l’Italie et la Grande-Bretagne consacrent plus d’argent public à la communication, mais ces pays savent aussi, sur d’autres sujets, mobiliser plus d’argent privé.

M. Jean-Paul Bacquet. Beaucoup plus !

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Quoi qu’il en soit, notre position n’est pas fermée, tant s’en faut !

Le Gouvernement travaille à ces questions d’attractivité économique internationale avec une grande unité. C’est un levier important de notre compétitivité. Si nous parvenons à réduire le déficit commercial et à mieux projeter notre excellence à l’international, nous renforcerons notre économie. Il s’agit, en somme, du deuxième versant de notre politique de compétitivité. Si nous abaissons le coût du travail et menons un politique réaliste en matière d’énergie en France, c’est parce nous voulons mener le combat à l’international.

Le travail de fusion et de mise en cohérence de l’AFII-Ubifrance se poursuivra. La nouvelle structure conduira le programme d’accompagnement personnalisé, en particulier à l’export, de mille PME et ETI de croissance d’ici à la fin de 2015. Les stratégies des familles et des produits prioritaires à l’export seront poursuivies et renforcées. Nous travaillons aussi, avec Michel Sapin et Christian Eckert, à améliorer les outils de financement à l’export. Comme vous le souligniez, monsieur Giraud, notre compétitivité face à nos grands concurrents repose aussi sur notre capacité à développer l’accès des PME et des ETI à ces outils, donc sur le développement de mécanismes de prêts directs à l’export comme ceux que propose la BPI.

Le dispositif « BPI France Export », madame Rabin, est un guichet unique déployé dans les régions qui associe les financements de la BPI, l’assurance-crédit de la Coface et le conseil à l’export d’Ubifrance. C’est une première étape dans la clarification que vous avez été nombreux à appeler de vos vœux. Je précise que le dispositif ne finance pas la participation d’entreprises françaises à des missions ou des salons organisés à l’étranger, notamment dans le cadre de politiques régionales. Si vous avez relevé des anomalies de cet ordre, je vous serais reconnaissant de nous les notifier.

La BPI travaille main dans la main avec l’AFII-Ubifrance. Une convention est en cours de rédaction. Là aussi, la rationalisation est à l’œuvre, ce qui est en soi une avancée majeure par rapport au statu quo ante.

Je ne dispose pas encore d’évaluations des « maisons de l’international », madame Rabin. La première, baptisée French Tech Hub, a été inaugurée par le Président de la République le 12 février dernier à San Francisco – une autre a ouvert à Boston. Elle est née de la transformation de plusieurs structures existantes, dont l’incubateur qu’avait implanté la région Île-de-France. La mise en cohérence effectuée avec Ubifrance, la BPI, les CCI et les CCEF (conseillers du commerce extérieur de la France) montre à quel point nous devons simplifier ce paysage. Une troisième maison de l’international a ouvert en Chine, d’autres sont à l’étude au Japon et à Hong Kong. Il faudra bien entendu attendre quelques mois avant de dresser un premier bilan.

Le Gouvernement a souhaité démocratiser le volontariat international en entreprise (VIE), madame Dagoma, en le rendant accessible à des jeunes moins diplômés grâce à un nouveau dispositif, « VIE pro », que cinq universités s’étaient engagées à expérimenter dès les rentrées 2013 et 2014. Quoi qu’il en soit, je ferai part à mes collègues de votre préoccupation.

J’ai déjà exposé le renforcement des mesures en faveur des TPE-PME, monsieur Giraud. Plus profondément, je suis persuadé que la simplification est la meilleure réponse que l’on puisse apporter à leurs besoins. On pourra toujours créer des dispositifs intelligents : s’ils sont compliqués ou cachés au milieu d’autres dispositifs, on ne touchera que les « abonnés » à tel ou tel guichet. La simplicité est donc la clé. Je m’engage notamment à améliorer les aides et les garanties à l’export, qui restent trop compliquées pour ces entreprises.

À propos du traité de libre-échange transatlantique, Mathias Fekl a exposé lors des questions d’actualité quelle était la position – et la grande vigilance – du Gouvernement. Nous partageons totalement votre préoccupation concernant le mécanisme de règlement des différends, tout comme, d’ailleurs, nos partenaires allemands, pour qui c’est un grand sujet de débat. Mon homologue Sigmar Gabriel ne cesse de m’en parler. Nous opposons donc un front uni et nous ne lâcherons pas l’affaire. Déjà mise en exergue dans la discussion du traité avec le Canada, cette position est portée par nos négociateurs dans le cadre de la discussion en cours.

Nous avons également veillé, monsieur Giraud, à ce que l’équité soit respectée dans la fusion entre Ubifrance et l’AFII, que Mme Muriel Pénicaud a menée de manière exemplaire. La nouvelle structure est dotée d’un projet collectif qui mobilise, je l’ai constaté moi-même, la volonté de tous. Certes, le premier organisme avait une importante force de projection à l’étranger, des représentants répartis partout dans le monde, des crédits plus importants, tandis que le second, beaucoup plus réduit, s’apparentait à une formation de chevau-légers dont la mission était d’être l’interlocuteur d’investisseurs ou de grandes entreprises étrangères s’installant sur notre sol. J’ai été attentif à ce qu’une culture ne s’impose pas au détriment l’autre. Ce qui m’importe, c’est le mariage des cultures et des compétences autour d’un projet commun, et c’est dans cet esprit que la fusion est menée. N’hésitez pas à nous faire part des points de vigilance qui pourraient se faire jour à ce sujet.

Concernant la « marque France », un travail lancé par mon prédécesseur a abouti à plusieurs propositions concrètes. Celles-ci n’ayant pas totalement convaincu, me semble-t-il, le Premier ministre et le Président de la République, l’agence fusionnée a repris cette initiative.

M. Jean-Paul Bacquet. J’y suis favorable.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. S’il faut distinguer la nouvelle bannière de l’agence – à laquelle vous faites sans doute référence, monsieur le président Bacquet – et la marque France, il faut également les mettre en cohérence. Mme Pénicaud fera avant la fin de l’année des propositions auxquelles vous serez associé.

J’espère avoir répondu à vos questions dans ce domaine. Avec mes collègues, dont je vous prie une nouvelle fois d’excuser l’absence, je partage le souci de travailler au développement de notre économie à l’intérieur comme à l’extérieur.

Concernant le FISAC, messieurs Gagnaire et Tardy, Mme Carole Delga détaillera les moyens qui lui sont alloués. Je pense que ce dispositif a encore du sens au sein de l’action de l’État, en dépit des restrictions budgétaires.

Un travail sur les pôles de compétitivité est en cours. Comme vous, je constate que les chiffres sont difficiles à reconstituer à partir des crédits des différents programmes. Pour l’année 2014, les crédits alloués aux actions collectives s’élevaient certes à 23 millions d’euros, mais l’animation et à la gouvernance des pôles ne représentait que 16 millions. Ces crédits passeront de 16 à 11,5 millions, sachant que l’État n’est pas le seul financeur de ces dispositifs. Là aussi, nous vivons une phase de transition, les régions étant devenues les chefs de file en matière de développement économique. La discussion du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République doit être l’occasion d’une réflexion collective pour déterminer, dans la perspective du projet de loi de finances pour 2016, à quel niveau les financements destinés aux pôles se feront et comment les compensations financières entre l’État et les régions pourront s’organiser. Je veillerai à ce que nos priorités économiques ne soient pas sacrifiées dans cette nouvelle répartition des compétences et à ce que les transferts ne conduisent pas à léser les régions. En tout état de cause, il faut considérer la réduction budgétaire de 2015 à la lumière de notre action d’ensemble : le programme 192 prévoit, à travers le FUI (fonds unique interministériel), 100 millions d’euros en autorisations d’engagement pour le financement des projets ; ce montant vient s’ajouter aux 300 millions du PIA 2. Il y a donc une continuité dans notre soutien aux pôles. Il nous appartient maintenant d’examiner ensemble comment nous articulerons le rôle de l’État et celui des régions dans notre nouvelle organisation territoriale.

Plusieurs intervenants ont regretté le peu de lisibilité du PIA. Cela tient au fait que, comme nous le souhaitions, les crédits ont été transférés le plus rapidement possible aux opérateurs. Je m’engage à ce que, l’année prochaine, nous retranscrivions de façon plus intelligible dans le PLF l’affectation de ces crédits. C’est par souci d’efficacité que nous avons été amenés à accélérer leur transfert. Si trois programmes de la mission « Économie » figurant dans le PLF pour 2014 ont disparu de celui de 2015, monsieur Tardy, c’est que les crédits ont été versés d’un coup aux opérateurs, en particulier à la PBI. Le suivi est néanmoins parfaitement assuré dans le document budgétaire annuel sur le PIA, dans les rapports annuels de performance et dans les conventions, soumises au Parlement début novembre, qui mettent en place les actions.

Le souci d’efficacité ne nous dispense pas, bien entendu, de transparence et de clarté dans nos documents budgétaires. Mais plus nous signons les conventions rapidement, plus nous donnons de visibilité aux opérateurs et aux porteurs de projets, donc plus notre politique devient une réalité économique.

Les 34 plans industriels, monsieur Gagnaire, doivent être portés par des acteurs industriels. C’est cette philosophie, définie le Président de la République, qu’a soutenue mon prédécesseur avec une conviction que je partage. L’optique est différente de celle d’initiatives telles que French Tech, ou encore le plan France très haut débit avec ses appels à projets. Les services du ministère, notamment la Direction générale des entreprises, ont effectué un travail important pour concevoir ces plans en concertation avec les acteurs. Les porteurs de projet, j’y reviens, sont des industriels – grandes entreprises, ETI et PME. Le dispositif peut être amélioré, étant entendu que l’on n’est pas complètement dans la logique d’appels d’offres qui régit d’autres programmes du PIA. Je propose la mise en place d’une cellule de suivi pour que les PME innovantes puissent bénéficier plus pleinement de ces actions.

Du point de vue du financement, il peut y avoir des appels à projets au titre du PIA 2, mais ce sont les chefs de projet qui ont la responsabilité de la structuration des plans. De ce fait, certains acteurs ont parfois le sentiment d’être en face d’un « guichet fermé ». Nous restons très vigilants : le bénéfice du dispositif ne doit pas être réservé à une sorte de rassemblement d’abonnés. Lorsque des entreprises de vos territoires vous semblent pouvoir participer à un des 34 plans, je vous invite à le faire remonter à mon cabinet. Cela contribuera au test régulier que je m’engage à réaliser avec les porteurs de projet.

Je vous remercie, messieurs Gagnaire et Grellier, d’avoir mené un examen complet de ces plans. J’entends bien votre préoccupation de ne pas casser un outil qui donne satisfaction. Telle n’est pas ma volonté. Comme je m’y suis engagé, je passerai moi-même en revue les 34 plans dans les prochains mois, avec pour objectif de déterminer ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Certains plans, de l’aveu même des porteurs de projet, sont à l’arrêt et les conditions de leur réussite ne sont plus réunies. Il faut que nous en tirions les conséquences, comme nous avons su le faire s’agissant de certains financements du PIA. L’action économique, c’est aussi cela : parfois, on perd les paris que l’on fait. La pire des choses est de s’entêter sur de mauvais choix.

Par ailleurs, certains plans s’apparentent à des politiques de filière. Comme vous l’avez fort justement souligné, il faut alors les articuler à l’action du CNI – j’ai d’ailleurs reçu le bureau de cette instance, qui m’a fait part de cette préoccupation. La gouvernance est en effet très différente. Les plans répondent à une logique industrielle : ils doivent aboutir à un produit fini, par exemple le véhicule à deux litres aux cent kilomètres, même si un ou deux plans – l’usine du futur, le numérique – sont très transversaux, alimentant notre économie par des innovations que l’on retrouvera dans de nombreux domaines. Ce caractère concret justifie que la gouvernance soit confiée aux chefs d’entreprise et que les partenaires sociaux, comme je le leur ai expliqué, n’y aient pas part. Par contre, il est indispensable que les partenaires sociaux soient parties prenantes des filières, avec les chefs d’entreprise et les territoires. Je pense donc qu’un travail de clarification permettra de reporter quelques éléments des 34 plans vers le CNI. Il ne s’agit pas de mettre fin à des projets, mais d’établir des synergies là où elles semblent insuffisantes.

Enfin, je suis très favorable à votre proposition de désigner des « correspondants » parlementaire. J’espère que le président Brottes pourra le faire rapidement, puisqu’une réunion importante du CNI, que le Premier ministre a accepté de présider, aura lieu avant la fin de l’année. Je souhaite aussi associer ces correspondants aux revues que nous consacrons régulièrement à chacune des filières.

J’en viens enfin à votre question sur le FDES (fonds de développement économique et social), monsieur Gagnaire. Mon prédécesseur a eu raison de défendre cet instrument d’exception qui s’est révélé particulièrement utile pour accompagner les restructurations financières. En 2014, le FDES a fait l’objet d’un abondement exceptionnel de 300 millions d’euros en autorisations d’engagement, ce qui représente un effort important par rapport aux 10 millions d’euros de 2013, dont seulement quatre entreprises ont bénéficié. L’effort que vous avez consenti en 2014 a permis d’aider six entreprises pour un montant cumulé de 114,5 millions d’euros. Comme vous l’indiquez, les crédits ne seront donc pas consommés dans leur totalité. L’engagement pris par mon prédécesseur étant d’avoir un affichage annuel parfaitement transparent, nous proposons d’inscrire 200 millions d’euros pour 2015. Ce montant me semble nécessaire car beaucoup de restructurations sont aujourd'hui en discussion. Au regard de notre estimation des besoins, je pense qu’il sera suffisant. S’agissant des crédits non consommés en 2014, nous aurons, le cas échéant, un dialogue constructif avec Michel Sapin et Christian Eckert.

En tout état de cause, le FDES est un important outil d’action économique défensive sur nos territoires. Son utilisation est transparente. Les arrêtés sont publiés au Journal officiel et les échanges avec la Commission européenne sont permanents, celle-ci estimant parfois, à l’instar de nos partenaires, qu’il s’agit là d’un dispositif d’aide. Étant donné le cadre dans lequel nous l’utilisons, je considère pour ma part qu’il s’agit d’un dispositif utile qui reste dans les limites du droit commun.

J’espère avoir démontré l’attachement de mon ministère au FISAC, monsieur Tardy. Accompagner l’activité économique, c’est l’accompagner sur tous les territoires et c’est accompagner les TPE et les PME, le commerce et l’artisanat. Il n’y a pas un discours de compétitivité qui vaudrait pour quelques entreprises et pas pour les autres. L’action économique de l’État est un continuum qui va du commerce de centre bourg à l’entreprise exportant dans les pays les plus lointains. L’objectif final, c’est le travail des Français sur notre territoire.

La question du FISAC doit s’inscrire dans une réflexion d’ensemble. L’aide au départ des commerçants est un point très sensible sur lequel Mme Carole Delga reviendra tout à l’heure. Sur ce sujet, nous avons été amenés à revoir, en lien avec M. Christian Eckert, les priorités budgétaires telles que nos documents les reflétaient.

Pour ce qui est de la simplification, M. Christian Eckert vous répondra au sujet des « petites taxes », son travail de Pénélope. Il faut également saluer l’action de M. Thierry Mandon, secrétaire d'État à la réforme de l’État et à la simplification, qui aiguillonne tous les autres ministères pour supprimer des procédures. Je lui transmettrai votre remarque concernant l’absence de réponse valant accord. Si l’on pose trop d’exceptions à ce principe, il devient en effet moins lisible.

Nous travaillons beaucoup à ces sujets avec les services du ministère des finances. Des annonces seront faites ce matin pour ce qui est de la simplification des feuilles de paie. Ces dispositions peuvent parfois contrarier certains acteurs – les experts-comptables, par exemple –, tant notre économie vit pour partie de la complexité. Bercy est à l’œuvre en matière de simplification de la fiscalité et des déclarations sociales. Au total, 40 % des mesures présentées ce matin par Thierry Mandon sont portées par nos ministères.

S’agissant de l’information préalable des salariés avant la cession d’une entreprise et du compte pénibilité, nous respectons trop le vote la représentation nationale pour avoir l’idée de nous en affranchir pour complaire à ceux que la loi n’arrange pas. Je comprends le discours des petits patrons, de ceux pour qui le quotidien est une lutte et qui ont parfois le sentiment qu’on alourdit leur fardeau. Le Gouvernement a le souci constant de répondre à leurs préoccupations. Mais il serait irresponsable de s’affranchir de la loi.

Le compte pénibilité est une formidable avancée et le Gouvernement y est très attaché. M. François Rebsamen fera très prochainement des propositions pour rendre le dispositif plus simple et plus pragmatique. J’appelle les représentants patronaux à leur devoir de responsabilité : si l’on met le feu chaque fois que l’on applique la loi, dans quel pays vivrions-nous ? La question dépasse les sensibilités politiques. M. de Virville a remis un rapport important et va prolonger ses travaux. Il faut que les parlementaires y soient associés pour relayer sur le terrain ce travail de simplification. M. Rebsamen partage totalement cette position.

Pour ce qui est de l’information préalable, un gros travail de concertation a été réalisé avec les représentants patronaux et avec les parlementaires pour l’application de la loi du 31 juillet dernier. Ce texte a été voté, on ne peut s’en affranchir en décidant soudainement, au mois de septembre, que c’était une mauvaise idée ! Il s’agit au contraire d’une bonne idée qui correspond à une réalité économique. Comme dans le cas du compte pénibilité, il faut l’adapter de manière pragmatique. C’est le sens du décret qui entrera en application le 1er novembre, conformément à la loi. Comme Mme Carole Delga l’a précisé au début de la semaine, nous souhaitons qu’une mission de suivi permette aux parlementaires, en lien avec nos services, d’évaluer le fonctionnement du dispositif sur le terrain et de discuter avec les représentants patronaux et les petits patrons. Le mécanisme doit être utile, réaliste et supportable. Ce n’est pas orthogonal à l’objectif de simplification, j’en conviens, mais nous nous efforçons de porter nos priorités avec pragmatisme.

L’ARCEP, madame Erhel, fait l’objet d’arbitrages budgétaires. Ses effectifs seront réduits de cinq ETPT (équivalents temps plein travaillé) en 2015. Cet effort participe à notre action collective et n’est pas disproportionné par rapport à ce qui avait été demandé, les années précédentes, aux directions de Bercy, notamment la DGCCRF. Nous serons attentifs au rythme, aux modalités et au montant de cet ajustement.

Mme Axelle Lemaire, qui vient de nous rejoindre, reviendra sur les différentes missions de l’agence. Il faut cependant être conscient que les nouvelles missions de l’ARCEP ne se traduisent pas forcément par de nouvelles charges ou de nouveaux besoins en effectifs. Nous devons examiner ces questions point par point avec l’équipe dirigeante – le président, vous le savez, devant être renouvelé l’année prochaine.

Mme Lemaire vous répondra également au sujet du Plan « France très haut débit » et de French Tech. Comme vous l’avez rappelé, ce sont là des priorités importantes auxquelles correspond un vrai engagement budgétaire. Il s’agit de préparer l’économie de demain et de mobiliser un tissu d’entreprises qu’il faut aider en lui donnant une visibilité et des capacités d’action.

La libération et la mise aux enchères de la bande des 700 MHz se font en lien avec le ministère des finances, avec celui de la culture et, en raison des « effets de bord » que l’attribution peut avoir, avec celui de la défense. Nous veillons à ce que les acteurs bénéficiant aujourd'hui de cette bande de fréquences puissent s’adapter à la situation, mais aussi à ce que le choix du moment de la mise aux enchères soit optimal pour nos intérêts patrimoniaux. Agir trop vite reviendrait à casser de la valeur.

J’entends vos préoccupations au sujet de La Poste, madame Allain. Le petit rattrapage de CICE doit être mesuré à l’aune de ce dont cette entreprise bénéficie au titre de ce dispositif. Il faut être cohérent. J’entends trop souvent dire que les entreprises publiques ne devraient pas bénéficier du CICE et que celui-ci ne devrait aller qu’aux entreprises soumises à la compétition internationale. Pourtant, il s’agit de facto d’un élément important de notre soutien aux postiers et nous n’entendons pas revenir sur ce point.

Vous l’avez bien souligné dans votre intervention : La Poste est un fleuron dont nous sommes fiers. Non seulement les postiers sont les acteurs d’une grande entreprise publique, mais ils participent au quotidien à une mission de service publique sur les territoires. La tâche du président-directeur général de La Poste, qui a notre entière confiance, est rendue difficile par le fort recul du marché du courrier, qui représente 50 % du chiffre d’affaires de l’entreprise. Entre 2008 et 2013, la baisse a atteint 22 %. Elle a été beaucoup plus rapide que prévu et représente une diminution annuelle de 600 millions d’euros de chiffre d’affaires. Nous devons donc aider l’entreprise à s’adapter, sachant qu’aujourd'hui nous ne compensons pas en totalité les missions de service public qu’elle remplit : la diffusion de la presse, l’accessibilité bancaire et, plus généralement, l’aménagement du territoire. Cela explique l’effort consenti par le biais du CICE pour accompagner le processus de transformation et de diversification de l’entreprise. Nous mentirions à nos postiers si nous leur affirmions qu’ils seront autant à distribuer du courrier dans dix ou vingt ans !

La diversification a commencé : aide aux personnes âgées, portage de médicaments, intervention au nom des assurances dans le cadre de contrats bien définis, aide apportée à l’État en lien avec les sous-préfectures, pour l’accomplissement de ses missions de service public. N’ayez crainte quant à la responsabilité des postiers : elle est couverte par leur employeur. Nous devons en revanche poursuivre ce travail stratégique pour leur redonner une perspective d’avenir.

L’augmentation du prix du timbre est douloureuse, j’en conviens volontiers. Mais c’était une nécessité pour accompagner la transition de l’entreprise. Soutenir une plus grande polyvalence ne signifie pas que nous ne serons pas vigilants quant à la nature et à l’articulation des métiers exercés. Je participerai demain au comité de suivi du contrat d’entreprise, où les syndicats et les associations de consommateurs sont représentés. J’y tiendrai le même discours de cohérence.

Pardonnez-moi, mesdames et messieurs les députés, d’avoir été un peu long.

M. Dominique Lefebvre, président. Huit rapporteurs sont intervenus : répondre à tous demandait forcément un certain temps !

Après avoir salué Mme Axelle Lemaire, secrétaire d'État au numérique, je vais donner la parole aux représentants des groupes et aux députés qui souhaitent intervenir.

Mme Clotilde Valter. L’enjeu, je le rappelle, est de redresser notre industrie et de préparer l’économie et les emplois de demain. Je me félicite particulièrement de quatre points.

Premièrement, le succès des 34 plans de la nouvelle France industrielle, constaté par notre rapporteur au terme de nombreuses auditions. Ce vaste programme de reconquête industrielle renforce nos capacités d’innovation et définit des priorités sectorielles.

Deuxièmement, la place prise par le Conseil national de l’industrie, dont il faut saluer le rôle de mise en cohérence et de prospective. Dans une démarche collective, les comités stratégiques de filière participent à l’invention des produits de demain.

Troisièmement, les décisions prises par le Gouvernement pour assurer la pérennité des centres techniques industriels (CTI) et des comités professionnels de développement économique (CPDE) et les conforter dans leur rôle de recherche et d’innovation au service des TPE, PME et ETI. Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit la stabilisation de leur financement, avant la réforme qui interviendra en 2016.

Quatrièmement, les moyens alloués au Plan « France très haut débit », dont l’objectif est d’assurer la couverture de 100 % du territoire en 2022 en mobilisant les capacités d’investissement aussi bien publiques que privées. Le PLF prévoit 1,4 milliard d’euros pour soutenir le déploiement des réseaux d’intérêt public. La dépense étant estimée à 3 milliards d’euros d’ici à 2022, nous aimerions avoir des précisions à ce sujet.

J’ai toutefois un regret : les parlementaires ont de plus en plus de mal à se retrouver dans les dépenses du programme d’investissements d’avenir. Il n’est pas possible d’en rester là. La dépense publique doit être lisible, surtout lorsqu’on demande des efforts importants à la nation !

M. Alain Chrétien. Cette longue intervention, monsieur le ministre, ne nous aura pas convaincus. Nous restons très inquiets quant à l’avenir du petit commerce, qui est le grand oublié de ce budget. L’effondrement des crédits du FISAC préoccupe les collectivités locales qui mettent en place des politiques volontaristes pour aider des commerces de proximités que la crise fait beaucoup souffrir. En outre, la restructuration budgétaire et territoriale qui s’annonce remettra en cause l’existence même de certaines chambres de commerce et d’industrie. Enfin, l’article 51 du projet de loi de finances supprime le dispositif d’accompagnement du départ en retraite des petits commerçants. Le Président de la République fait de la ruralité une antienne, mais le compte n’y est pas !

Nous nous inquiétons également du désengagement de l’État en matière de soutien à l’activité économique et du transfert de cette charge aux régions. Les pôles de compétitivité s’inscrivent dans une politique nationale qui ne peut en aucun cas être fragmentée. M. Gagnaire a également évoqué la régionalisation du FISAC, qui suppose que les régions reprennent là aussi la charge de l’action pour l’artisanat et le commerce. La réduction de l’action de l’État se fait au détriment des collectivités locales puisqu’elle s’accompagne d’une baisse conséquente de ses dotations. Contraindre les collectivités à plus de dépenses en leur donnant plus de pouvoirs et réduire dans le même temps leurs recettes, c’est, aux yeux du groupe UMP, les mettre devant une équation impossible.

M. Yannick Favennec. Devant l’aggravation continue du chômage et la perte de compétitivité de nos entreprises, il est devenu urgent de réagir pour redresser la situation économique de notre pays. Déjà fortement touchées par la crise, les entreprises françaises sont démesurément mises sous pression par le Gouvernement depuis plus de deux ans, qu’il s’agisse des différentes hausses d’impôt ou de la suppression de la « TVA compétitivité », qui aurait pourtant permis d’alléger leurs charges de 13 milliards d’euros dès 2012. Les dispositifs de soutien aux entreprises, notamment aux PME, se sont faits particulièrement rares depuis le début du quinquennat.

Et ce ne sont pas les crédits alloués à cette mission qui vont changer la donne, puisqu’ils sont en diminution de 5 % par rapport à 2014. Le groupe UDI le regrette fortement.

À mon tour, j’attire votre attention sur l’artisanat et le commerce. Le choc de simplification tant attendu peine à se traduire dans les faits, alors qu’il représente un enjeu majeur pour nos entreprises les plus fragiles. Souhaitons que les annonces de M. Mandon ce matin aillent dans le bon sens ! Par ailleurs, alors que la loi relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, adoptée il y a quelques mois a eu le mérite d’apporter certaines avancées, telles que la réforme des baux commerciaux ou la clarification du statut d’auto-entrepreneur, vous semblez désormais envoyer des signaux contradictoires à nos entreprises. L’article 51, par exemple, supprime une indemnité de départ qui représente une aide indispensable pour les artisans et les commerçants qui n’arrivent pas à céder leur fonds. En 2013, quelque 1 330 personnes modestes en ont bénéficié, pour un coût infime au regard du budget de l’État. Quelle est, selon vous, la pertinence de cette mesure ? Ne serait-il pas plus utile de s’attacher à de vraies économies budgétaires et d’éviter de mettre à mal nos chefs d’entreprise, nos commerçants et nos artisans ?

Le groupe UDI souhaiterait également que soit dressé un premier état des lieux de la mise en place du programme d’investissements d’avenir, notamment dans le domaine très important du numérique. Celui-ci dispose cette année d’un nouveau programme, le plan France très haut débit, auquel nous souscrivons. Nos territoires doivent être égaux face à l’accès au numérique. Nous serons donc très vigilants quant au financement et à la viabilité de ce plan.

M. Éric Alauzet. Comment le Gouvernement compte-t-il soutenir les activités de La Poste dans le cadre des maisons de services au public, qui représentent sans doute une planche de salut pour l’entreprise ? Ce dispositif vise à maintenir et à diversifier les services de proximité en s’appuyant sur un réseau de proximité inestimable.

La suppression de plateformes industrielles de tri postal, dans une optique de concentration et de rationalisation, contribue, avec d’autres opérations du même type dans d’autres secteurs, à déséquilibrer certains territoires. Comment la réforme territoriale et la nouvelle carte régionale permettront-elles d’anticiper ces mouvements qui vont toujours des plus petites villes vers les plus grandes, afin qu’ils se fassent dans un esprit plus coopératif et d’une manière plus équilibrée ?

En matière d’aide aux entreprises, une option dite de « politique de l’offre » a été prise. Elle n’a ni plus ni moins de chance de réussir que la « politique de la demande » : il faut les deux ! Mais, en attendant que ces mesures produisent leurs effets, les seules actions à effet immédiat sont les emplois aidés. Le Gouvernement prévoit certes d’en créer 50 000 de plus en 2015, mais nous aimerions qu’il soit plus actif et ambitieux en la matière. Nos concitoyens – on peut le regretter – supportent de moins en moins les aides apportées sous forme d’assistance. Si les personnes visées avaient un vrai travail au SMIC, on retrouverait de la paix sociale et de l’efficacité.

Nous avons aussi relevé une incohérence entre le discours gouvernemental sur la priorité à l’apprentissage et la baisse des subventions. En outre, sur le terrain, les réticences des chefs d’entreprise tiennent autant à des questions d’habilitation, d’organisation et de sécurisation qu’à des questions financières.

M. Joël Giraud. Je ne parlerai pas du commerce extérieur puisque je viens de l’évoquer sous une autre casquette, ni des chambres de commerce et d’industrie, sujet qui nous préoccupe mais qui relève de la première partie du projet de loi de finances.

Ma première question concerne le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » qui regroupe les instruments de soutien et de régulation des entreprises. Les grands régulateurs que sont la Commission de régulation de l’énergie (CRE), l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) et l’Autorité de la concurrence ont fait leurs preuves et nous sommes tous très conscients de leur haut niveau d’expertise et de leur utilité. À l’heure où nous cherchons des pistes d’économies sans perdre en qualité de service, nous savons qu’il existe des doublons, notamment entre les activités de l’ARCEP et de la Commission supérieure du service public des postes et des communications électroniques (CSSPPCE). Ne pourrions-nous pas espérer une mutualisation et une rationalisation des moyens entre ces deux structures connexes ?

Ma deuxième question a trait à l’activité de régulation et de protection des consommateurs qui est exercée par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Nous ne comptons plus les débats parlementaires au cours desquels nous réclamons des moyens supplémentaires pour cette direction, notamment pour son action déconcentrée. Certains départements ruraux et touristiques comptent une petite poignée d’agents, la petite poignée étant quelquefois réduite à un seul individu alors que les missions sont de plus en plus nombreuses et complexes. J’habite un département où il faut même contrôler les refuges en altitude ! Il y a une demande croissante de la part de nos concitoyens pour lutter contre la fraude, les consommateurs réclament la traçabilité alimentaire et souhaitent que l’on s’attaque au développement des tromperies à l’égard les touristes. Par ailleurs, la loi Hamon donne des perspectives et des missions nouvelles, mais sans moyens supplémentaires. Il faut donc préparer la bonne mise en œuvre de cette loi.

Ma troisième question porte sur le nouveau programme 343 « France Très haut débit », qui promet le très haut débit pour tous en 2022 avec un objectif intermédiaire : couvrir 50 % de la population d’ici à 2017. Je veux bien croire à tous les objectifs, notamment à cet objectif intermédiaire car les opérateurs vont y parvenir dans les villes, mais je ne vous cache pas que j’ai des doutes sur l’arrivée du très haut débit partout en 2022, dans les Alpes, les Pyrénées, le Massif central, en dépit des 14 milliards d’investissements annoncés pour le Réseau d’initiatives publiques (RIP).

Les stations touristiques qui sont en bout de réseau ont aussi besoin du haut débit. Or ce sont précisément celles-là qui ne sont jamais desservies.

Monsieur le ministre, je vous remercie de bien vouloir prendre en compte ces différentes interrogations.

M. André Chassaigne. Avec une diminution des crédits de mission de 80 millions d’euros pour 2015 à périmètre équivalent et une baisse totale de près de 8 % d’ici à 2017, le budget de la mission « Économie » n’échappe pas aux coupes budgétaires, comme le temps de parole des groupes.

La baisse des effectifs est de 143 équivalents temps plein (ETP) sur la seule année 2015. Les dépenses de fonctionnement, d’intervention et d’investissement diminueront de 9 % en crédits de paiement par rapport à 2014.

À l’opposé de ces choix, nous pensons que l’État et les collectivités territoriales ont un véritable rôle à jouer en termes de soutien direct ou indirect à l’investissement des entreprises, notamment les plus petites d’entre elles. Déjà fragilisées par la morosité du contexte économique et financier actuel, les très petites entreprises (TPE) seront pourtant les premières à être pénalisées par les coupes opérées en 2015, alors que les carnets de commandes se vident et que l’investissement privé est en berne.

Ajoutons au désengagement de l’État la réduction, en 2015, de 3,6 milliards d’euros de la dotation globale de fonctionnement (DGF) accordée aux collectivités, qui grèvera significativement l’investissement public. On voudrait mener le pays tout droit vers la récession que l’on ne s’y prendrait pas autrement.

On s’interroge également sur l’efficacité de la BPI dont les missions sont multiples, très larges même, tandis que ses moyens sont bien trop limités. Quel est son bilan par région, notamment dans sa mission d’outil public facilitant l’accès au crédit ?

Rappelons le rôle considérable que joue la KfW, la BPI allemande, troisième plus important émetteur de crédit du pays et occupant un rôle de stratège économique, avec, par exemple, la mise à disposition de plus de 100 milliards d’euros pour le développement des énergies renouvelables. L’action d’un service public bancaire tel que la BPI devrait contribuer à une réorientation du crédit et à la réalisation d’objectif sociaux et environnementaux, en subordonnant l’accès au crédit à des engagements en termes de développement de l’emploi stable ou de transition écologique.

Parmi les autres mesures budgétaires pour 2015, on peut citer la baisse de la dotation à la Banque de France. C’est inacceptable alors que le nombre de personnes surendettées n’a jamais été aussi élevé, tout comme le montant moyen de leurs dettes.

Plutôt que de renforcer la taxation des retraites chapeau, encore bien loin d’être dissuasive, le Gouvernement fait le choix de supprimer les aides au départ à la retraite des commerçants et des artisans. Il s’agissait d’une aide individuelle importante, notamment en milieu rural. Les aides visant à maintenir l’artisanat et le commerce s’amenuisent. Je pense notamment au Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (FISAC).

Rappelons que l’objectif de la mission « Économie » est de « favoriser la mise en place d’un environnement propice à une croissance durable et équilibrée de l’économie ». Les orientations définies par le Gouvernement ne vont pas dans le bon sens.

Notons tout de même deux points positifs : d’une part le contenu du plan « France Très haut débit » qui fixe des objectifs ambitieux afin d’étendre la couverture du territoire en réseaux très haut débit à l’horizon 2022, d’autre part la fusion entre la BPI et l’Agence française pour les investissements internationaux (AFII). Mais nous regrettons la réduction des moyens, ce que doit apprécier, bien évidemment, le président Bacquet.

Pour autant, nous émettons un vote négatif sur ce budget qui ne parvient à être globalement positif.

M. Jean-Paul Bacquet. J’aborderai quatre points et d’abord l’ambiguïté de la double tutelle du commerce extérieur évoquée par Monique Rabin, Seybah Dagoma et Michel Vauzelle.

Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir annoncé le versement de 5 millions d’euros au début du mois de janvier. Mais je me permets de rappeler qu’il y a quelques semaines, alors que je vous ai interrogé, en séance publique, sur ce point, vous m’avez répondu avoir adressé une lettre au ministère des affaires étrangères. Je ne sais pas si cette lettre est arrivée, mais ce que je sais, et Muriel Pénicaud vous le confirmera bien mieux que moi, c’est que, pour l’instant, nous avons affaire à une querelle d’égos entre les technocrates des deux ministères, et que nous ne voyons guère les choses aboutir.

Le deuxième point concerne les dépenses de communication. La nouvelle agence doit s’identifier par un nom et un logo, et vous le savez. Au moment où UbiFrance commençait à être connue, il est indispensable de faire en sorte que la nouvelle agence le soit parfaitement. Pour cela, un million d’euros, c’est vraiment très peu, et je remercie Mme Dagoma d’être intervenue sur ce sujet.

Vous avez insisté lourdement, et vous avez eu raison, sur l’attractivité et le budget de communication de la France, qui s’élève à 1,6 million d’euros alors qu’il est de 30 millions d’euros en Grande-Bretagne et de 10 millions en Italie. Sur ce point, nous sommes incontestablement très en retard.

Il existe actuellement, en matière de développement économique, des inégalités régionales tout à fait scandaleuses. En tant que président d’UbiFrance, j’ai rencontré le président de la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur (PACA) afin d’essayer de coordonner nos actions. Savez-vous, monsieur le ministre, que certaines régions prennent à leur charge les volontaires internationaux en entreprise (VIE) à 100 %, tandis que d’autres ont un seul et unique VIE et ne prennent rien en charge ? Savez-vous que certaines régions accompagnent les entreprises sur les salons, dans les actions collectives, etc., tandis que d’autres n’interviennent pas du tout ? Il faut veiller à ce que l’État ne sous-traite pas aux régions le développement économique. L’État doit mieux définir la mission des régions. Il ne doit pas être un organisme tatillon de contrôle, mais veiller à ce qu’il y ait une orientation commune et une cohérence entre les régions. L’État doit jouer un rôle de régulateur, il ne doit pas démissionner de ses fonctions, surtout en matière de développement économique.

M. André Chassaigne. C’est du jacobinisme de bon aloi !

M. Jean-Paul Bacquet. Le tourisme est une chance en matière de commerce extérieur. Le rapport Destot a montré qu’il y a davantage de Français qui se rendent en Chine que de Chinois qui viennent en France. Si l’on multipliait par quatre le nombre de Chinois qui visitent notre pays, on réduirait de 30 % le déficit du commerce extérieur.

J’appelle votre attention sur les chargés d’affaires internationaux, personnels d’UbiFrance mis à la disposition de la BPI. C’est un point fondamental.

Je souhaiterais que l’Agence française de développement (AFD) soit un peu moins autonome, et que le Gouvernement et le Parlement puissent agir sur ses interventions lorsqu’elle ne préfinance pas, sachant que, partout dans le monde, les entreprises gagnent des marchés parce qu’elles sont refinancées. Je pense en particulier à la Chine.

J’ai mis en place, avec Mme Muriel Pénicaud, l’évaluation des actions que nous menons et le suivi des entreprises car il ne suffit pas d’accompagner les entreprises à l’extérieur, encore faut-il suivre ce qu’elles font et comprendre pourquoi elles réussissent ou non.

Mme Françoise Imbert. Ma question portera sur le commerce extérieur.

Je suis députée d’une circonscription où l’aéronautique occupe une place centrale. Au cours du premier semestre 2014, le secteur aéronautique et spatial a affiché une progression dynamique, avec des exportations en hausse de 4 % et un excédent progressant de plus de 20 %. Quel avenir est promis, cependant, à ce secteur d’activité, sachant que les bureaux d’études, notamment ceux d’Airbus, s’inquiètent d’une baisse d’activité ?

Quant au secteur pharmaceutique, il connaît un net recul de 6,3 % après avoir déjà baissé de 3,9 % au semestre précédent, tout comme le secteur agroalimentaire qui fut pourtant une force vive de notre pays par le passé. Comment expliquer ces reculs, comment inverser la courbe ?

Enfin, le déficit commercial reprend sa réduction en passant sous la barre des 30 milliards d’euros. Quel est l’impact des représentants et ambassadeurs spéciaux ? Quels sont les secteurs qui permettront de réduire encore plus le déficit commercial ?

M. Alain Fauré. Monsieur le ministre, s’agissant du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), serait-il possible de contractualiser avec La Poste et les grandes surfaces sur les trois ans à venir ? Cela permettrait à ces services d’être présents en zone rurale et dans les banlieues difficiles et de ne plus entendre certains de nos collègues s’entêter en parlant de l’application du CICE dans les mauvais endroits et pour les mauvaises activités. La contractualisation sur plusieurs années permettrait d’y voir plus clair. Pouvez-vous me donner votre sentiment sur ce point ?

M. Michel Heinrich. Ma question concerne la participation des chambres de commerce et d’industrie (CCI) au plan d’économies du Gouvernement. Cette mesure se traduit, en 2015, par un prélèvement de 500 millions d’euros dans leur fonds de roulement, après 170 millions en 2014. Outre ce prélèvement, le montant de la taxe affectée aux 145 chambres passera de 1,23 milliard d’euros à 788 millions en 2017, soit une baisse de 36 %.

À l’échelon national, les CCI occupent une place majeure dans l’animation de la vie économique locale. Elles emploient 26 000 collaborateurs, forment chaque année 100 000 étudiants et 100 000 apprentis, gèrent près de 140 ports, aéroports et ponts. Ce plan menace entre 6 000 et 7 000 emplois dans les CCI. Les 145 chambres tirent leur revenu de la taxe affectée payée par les entreprises mais aussi des inscriptions des écoles qu’elles gèrent et des prestations de services aux entreprises. Ce plan menace donc aussi 20 000 à 30 000 apprentis sur un total de 100 000, et les cotisations au régime de retraite des salariés. Un certain nombre de chambres vont devoir cesser leur activité.

Je vous parlerai plus précisément de la CCI des Vosges qui, en 2012, a affecté 1,1 milliard d’euros à des travaux d’accessibilité puis a mis en place, à destination des TPE et PME, un fonds d’intervention de 2 millions d’euros pour leur permettre de se développer. Ce programme est totalement remis en cause par un prélèvement de 6 millions prévu dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015. Non seulement elle ne pourra pas assurer le soutien prévu aux entreprises, mais elle risque de devoir se déclarer en situation de cessation de paiement avec toutes les conséquences qui en découleront.

Je vous alerte donc sur les conséquences d’une telle décision en matière d’emplois, de formation, d’aménagement du territoire, d’investissements. Face à la crise que nous traversons, pouvons-nous nous résigner à ce que des missions au service des TPE et PME soient ainsi abandonnées ?

M. Jean-Luc Reitzer. Monsieur le ministre, je souhaite vous interpeller sur le problème de la fiscalité de l’EuroAirport de Bâle-Mulhouse. Cet aéroport est unique au monde par son statut binational, voire trinational, régi par une convention de 1949.

Soixante-quatorze entreprises y sont installées, 6 000 emplois sont générés, dont les deux tiers pour des citoyens français. L’activité globale de l’aéroport génère 28 000 emplois directs et indirects.

Ce modèle économique serait en danger aujourd’hui en raison d’une décision unilatérale française qui prévoit de taxer les vols au départ de l’aéroport de Bâle-Mulhouse en appliquant les taxes de la navigation civile française, en appliquant les taux de TVA français ainsi que l’ensemble de la fiscalité française des entreprises, ce qui est en totale contradiction avec la convention de 1949. Une telle mesure entraînera inéluctablement le départ de très nombreuses entreprises de la plate-forme aéroportuaire vers Zurich et Genève.

Monsieur le ministre, vous le savez, la chambre de commerce, l’aéroport et les parlementaires alsaciens sont intervenus sur ce sujet. Il est important de restaurer la confiance des acteurs économiques de l’aéroport et il nous faut trouver, avant le 1er janvier prochain, c’est-à-dire très rapidement, une solution qui puisse satisfaire les deux parties.

Vous l’avez compris, je souhaite connaître votre position sur cet important dossier qui concerne l’ensemble du bassin économique des trois frontières.

M. Yannick Favennec. La Cour des comptes a rendu public un référé très sévère sur le fonds d’intervention en faveur des services du commerce et de l’artisanat dont la gestion serait déficiente et l’utilité discutable. Le FISAC a été profondément rénové en 2010 avec un triple objectif de simplification, de régionalisation de l’évolution des projets.

La Cour constate qu’aucun de ces objectifs ne semble avoir été atteint, d’autant que la gestion budgétaire du dispositif s’est révélée déficiente. Elle déplore aussi que le FISAC, censé soutenir le commerce et l’artisanat, en particulier dans nos territoires ruraux, soit instruit par deux directions ministérielles, source de lourdeurs administratives qui provoquent des délais d’instruction très longs, quatorze mois en moyenne par dossier. Ce délai n’est pas sans conséquence pour les porteurs de projets, comme je peux le mesurer régulièrement dans mon département de la Mayenne.

Je voudrais connaître votre avis sur la pérennité du FISAC, dont les crédits ont été très fortement diminués puisqu’ils sont passés de 40 millions d’euros en 2012 à 8,5 millions en 2015, alors qu’ils représentent un véritable outil de soutien à nos entreprises locales, en particulier dans le monde rural, et que la réforme Pinel a élargi les critères d’éligibilité.

Mme Brigitte Allain. Les différents rapports concernant l’entreprise, l’industrie, mais aussi le commerce extérieur, ont fait peser des doutes sur les orientations économiques du Gouvernement. Ils révèlent le manque de programme réel de relance pour une industrie ou des entreprises innovantes et en phase avec les enjeux de la politique de la ville, du logement et de la transition énergétique, alors que la facture énergétique augmente et pèse sur notre compétitivité.

Dans ses différents rapports, il n’y a aucune évocation d’un bienfait éventuel du CICE sur la création d’emplois, sur la balance commerciale, sur une quelconque efficience économique, sociale ou environnementale.

Monsieur le ministre, vous l’avez dit tout à l'heure : la pire des choses, c’est de s’entêter sur des plans, surtout s’ils ne marchent pas. En quoi le projet de loi de finances pour 2015 inversera-t-il le mouvement de perte de confiance et de perspective pour les entreprises et les citoyens ?

Mme Carole Delga, secrétaire d’État chargée du commerce, de l’artisanat, de la consommation et de l’économie sociale et solidaire. Mesdames, messieurs les députés, ces dernières semaines, nous avons travaillé plus particulièrement sur le budget consacré au soutien au commerce de proximité, à l’artisanat, aux TPE et PME, en liaison, bien sûr, avec Emmanuel Macron et Christian Eckert. Nous avons le plaisir de vous annoncer que le budget alloué au FISAC sera, pour 2015, de 17 millions d’euros en crédits de paiement. Cela nous permettra de mobiliser pleinement notre action sur les commerces de proximité dans les territoires ruraux mais aussi dans les quartiers relevant de la politique de la ville. Nous fixerons bientôt, par décret, le nouveau cahier des charges sur le nouvel appel à projet du FISAC. Nous recentrerons les priorités. Tout d’abord, nous soutiendrons les territoires où le commerce est menacé ainsi que les travaux d’accessibilité et ceux liés à la sécurité. Une aide aux stations-service en milieu rural sera apportée. Cette politique volontariste en faveur du commerce de proximité et des artisans est en cohérence avec l’ensemble de la politique gouvernementale.

J’en viens aux critiques qui ont pu être formulées par la Cour des comptes sur l’utilité du FISAC. Ce fonds a un effet de levier sur l’ensemble de nos territoires, et nous pouvons en témoigner. Lors de mes déplacements sur l’ensemble du territoire français, je constate en effet que cet outil peut avoir une vraie potentialité de développement, une vraie dynamique autour de l’artisanat et du commerce de proximité, quand il est bien utilisé. Malheureusement, à partir de 2010, le FISAC a connu une inflation déraisonnable de ses crédits. Certains dossiers ont bénéficié de lettres de soutien qui ne correspondaient en rien à la politique de soutien des commerces de proximité. Nous sommes en train de recentrer les actions de ce fonds. Il est nécessaire d’utiliser les deniers publics de façon pertinente à destination des commerçants et artisans.

Concernant la double instruction dans le cadre d’appels à projet, la procédure sera plus efficace entre le niveau régional et le niveau national. Je peux vous assurer qu’il n’y aura plus de doubles instructions. S’agissant de la gestion des dotations du FISAC par le régime social des indépendants (RSI), nous avons répondu, avec Emmanuel Macron, aux remarques sur le faible coût de gestion.

Nous avons également souhaité réformer l’indemnité de départ des artisans et des commerçants sans la supprimer. J’ai fait un courrier missionnant le président du RSI, M. Quevillon, pour engager une réflexion sur ce sujet. Cette enveloppe était de 8 millions d’euros, sachant que 10 % du budget de l’action sociale du RSI, qui est de près de 140 millions d’euros, n’était pas utilisé. Une indemnité de départ sera versée aux artisans et commerçants qui sont en situation précaire, mais elle sera quelque peu redéfinie, car ses modalités précises étaient un peu désincitatives en ce qui concerne la transmission des entreprises. En effet, plus le chiffre d’affaires était faible, plus l’indemnité était forte. Nous allons donc revoir le dispositif.

Vous m’avez posé des questions sur la nécessité d’une simplification en matière de règles d’apprentissage. Comme vous avez peut-être pu l’entendre, monsieur Alauzet, parmi les mesures de simplification qui ont été débattues ce matin à l’Élysée figurent des mesures d’adaptation en ce qui concerne les travaux que les apprentis doivent effectuer en hauteur. Nous avons souhaité doubler la prime versée au maître d’apprentissage pour les entreprises de moins de onze salariés, et la porter à 2 000 euros. C’est un signal fort en direction des TPE et PME. Mais une aide financière n’est pas suffisante. Il fallait prévoir des simplifications, et c’est ce qui a été fait en modifiant les règles de protection des apprentis, notamment pour les travaux en hauteur. Si le geste doit pouvoir être pratiqué en toute sécurité, il doit aussi être opérationnel.

S’agissant des chambres de commerce et d’industrie, je rappelle qu’elles ont bénéficié, ces dix dernières années, une augmentation de 40 % de la fiscalité qui leur est affectée, ce qui leur a permis de constituer des réserves significatives. Nous demandons à l’ensemble de ces institutions de consentir des efforts, en raison de l’importance de la dette.

Nous avons décidé de prélever 500 millions d’euros aux CCI. Ce prélèvement est détaillé selon une formule qui tient compte de leur fonds de roulement, c’est-à-dire que nous prélevons celles qui disposent de plus de 120 jours de trésorerie et que nous tenons compte également de leur poids économique.

Si nous ne disposons pour l’instant que des chiffres de 2012, c’est parce que certaines CCI n’ont pas voulu à répondre à leur obligation légale de transmettre leurs comptes de 2013 avant le 30 juin dernier. La semaine dernière encore, nous n’avions pas la totalité des comptes de 2013. Or, pour être opérationnels, nous devons nous appuyer sur les comptes de 2013. Nous sommes en train de les expertiser, sachant que certains comptes sont insincères. Nous allons devoir donc les retravailler. Chacun doit avoir une démarche honnête et responsable, tout le monde doit jouer le jeu. Les petites manœuvres de dissimulation de certaines réserves ne peuvent pas continuer. Le Gouvernement est à l’écoute des besoins d’investissement des chambres de commerce et d’industrie, et plus particulièrement pour les établissements d’enseignement. Mais nous ne pouvons pas accepter que la solidarité nationale ne se fasse pas à armes égales entre les différentes chambres de commerce et d’industrie.

Monsieur Heinrich, vous avez cité le cas de la CCI des Vosges qui a beaucoup investi. De nombreuses CCI nous ont fait part de leurs projets d’investissement pour 2015. S’agissant des centres de formation des apprentis (CFA), nous ferons en sorte de préserver cette capacité d’investissements. Si c’est le cas de la CCI des Vosges, je les encourage à me contacter – ils ne l’ont pas fait jusqu’à présent. J’ai reçu de nombreuses CCI et j’en ai rencontré sur le terrain, comme les CCI de Brest, Clermont-Ferrand, Carcassonne.

Nous avons mis en place, avec Christian Eckert, dans le cadre du projet de loi de finances, un dispositif de péréquation afin de prendre en compte ces investissements. Il permettra de compenser certains prélèvements qui pourraient être élevés au vu des investissements envisagés afin de favoriser l’investissement et la territorialisation de l’ensemble des chambres de commerce et d’industrie.

Le Nord-Pas-de-Calais est la seule région à avoir achevé la régionalisation, alors qu’elle est demandée depuis 2010. Sur deux départements, il y a treize implantations territoriales. La régionalisation n’implique donc pas la suppression d’implantations territoriales. La régionalisation suppose la mutualisation des fonctions support et une réorganisation. Nous sommes prêts à travailler avec l’ensemble des CCI qui veulent s’inscrire dans cette procédure.

Le décret précisant les modalités d’application du nouveau droit d’information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise a été publié hier. Nous avons mis en place un dispositif très pragmatique, avec des modalités d’information des salariés souples et une obligation de confidentialité pour les conseils des salariés. Par ailleurs, c’est l’information des salariés qui fera courir le délai de deux mois après lequel le transfert de propriété peut avoir lieu. Nous avons également souhaité mettre en place une mission parlementaire qui débutera dans les prochaines semaines, qui sera chargée de dresser la liste les difficultés susceptibles d’être rencontrées sur le terrain et qui aura une réflexion plus large sur les conditions de transmission-reprise car, comme vous le savez, 26 000 emplois sont supprimés chaque année faute de repreneurs. L’information préalable des salariés est l’un des dispositifs qui permettra une meilleure réactivité sur la transmission-reprise, mais nous ne nous limiterons pas à ce dispositif. Nous sommes en train de travailler avec Emmanuel Macron à la mise en place d’autres mesures pour parvenir à une plus grande vitalité de la transmission-reprise de nos TPE et PME, comme l’accès au financement – nous connaissons les difficultés que peuvent rencontrer les chefs d’entreprise sur ce sujet – ainsi peut-être que des incitations fiscales.

Monsieur Giraud, vous avez évoqué le secteur touristique. Je vous indique que le ministère de l’économie et le ministère des affaires étrangères travaillent en toute complémentarité et efficacité. Nous avons pu annoncer des mesures, lors des Assises du tourisme, dont près des trois quarts ont déjà pu être mises en œuvre. Nous avons souhaité qu’en 2015 la priorité soit donnée aux contrats de destination à visée plutôt internationale. Nous allons lancer également les contrats territoriaux qui concernent plutôt le niveau régional et qui viendront en complément des contrats de destination. Notre politique doit promouvoir les grands sites qui sont vraiment des aimants à l’international, mais qui doivent être complétés par des sites ayant une valeur patrimoniale, une âme, et permettant la diffusion de notre culture, qu’il s’agisse de notre gastronomie, de notre patrimoine historique ou de l’artisanat d’art.

S’agissant de l’accès aux vacances pour tous, des dispositifs seront étudiés tout au long de l’année 2015 pour permettre au tourisme social de se développer et d’augmenter le nombre de Français modestes qui partent en vacances.

Nous rappelons que le plafonnement des taxes alimentant le Fonds d’assurance formation des chefs d’entreprise artisanale (FAFCEA) devrait permettre de couvrir toutes les dépenses prévues par ce fonds. Nous serons très vigilants en 2015 à ce que des actions ne puissent être réalisées en raison de la baisse de ce prélèvement.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Je vous parlerai du programme 220 « Statistiques et études économiques » qui a trait au budget de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), et du programme 305 « Stratégie économique et fiscale », qui correspond au budget de la direction générale du Trésor, de l’Agence des participations de l’État (APE) et de la direction de la législation fiscale (DLF).

Votre commission reviendra sur le budget du ministère des finances lors de l’examen de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » la semaine prochaine. Je souligne d’ores et déjà une contribution exemplaire aux économies réalisées sur le budget de l’État avec une baisse des crédits en valeur de 2,3 % en 2015, hors charges de la dette et pensions, et une réduction des effectifs de 2 491 emplois.

S’agissant de l’INSEE, le Gouvernement propose une diminution des crédits, qui passent de 353 à 346 millions d’euros. Le rythme de réduction des effectifs, sensiblement allégé par rapport aux années précédentes, permettra de poursuivre dans de bonnes conditions le regroupement à Metz de certaines activités aujourd’hui dispersées dans le réseau, avec un objectif de 350 emplois d’ici à la fin de l’année 2016.

S’agissant du programme 305, le Gouvernement propose de ramener ses crédits, hors contribution au compte d’affectation spéciale « Pensions », de 464 à 446 millions d’euros. Ceci est cohérent avec la stabilisation du réseau international de la direction générale du Trésor après de nombreuses années de restructuration. Nous poursuivrons par ailleurs l’optimisation des implantations immobilières à l’étranger avec, par exemple, la cession de certains logements de fonction devenus inutiles. Une bonne partie des économies sur ce programme résulteront des dotations à la Banque de France en contrepartie des missions de service public exercées par elle concernant notamment la gestion des dossiers de surendettement. Nous poursuivrons leur diminution de 300 à 290 millions d’euros en 2015, compte tenu de la baisse tendancielle du nombre des dossiers de surendettement, suite aux mesures législatives que vous avez prises en 2010 et 2013 et à la simplification des procédures adoptée en 2013.

Les taxes affectées à l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et à l’Autorité des marchés financiers (AMF), qui sont deux autorités publiques indépendantes rattachées budgétairement au programme 305, seront désormais plafonnées. Elles connaîtront pour la première fois une diminution en 2015, l’ACPR passant de 205 à 195 millions d’euros et l’AMF de 95 à 74 millions d’euros.

Quelques questions ont été posées qui justifient une réponse précise. Monsieur Reitzer, la question de l’aéroport Bâle-Mulhouse est ancienne puisque la convention bilatérale date de 1949. Il existe une zone douanière qui ne fait pas l’objet de mesures fiscales particulières. Cette zone douanière permet le dédouanement des marchandises importées suivant des procédures suisses, mais un contentieux existe depuis plusieurs années. D’ailleurs, le Conseil d’État et la Cour de cassation ont confirmé que les impôts français s’appliquent aux entreprises situées sur leur zone douanière. Des discussions longues et nombreuses qui ont justifié beaucoup de réunions interministérielles, des échanges avec nos partenaires suisses avaient permis, au début de l’année 2014, d’aboutir suite à des négociations conduites la plupart du temps par le ministère des affaires étrangères, à un projet d’accord entre les Français et les Suisses qui consistait à dire que les entreprises auraient payé la fiscalité française mais sur les bases d’une comptabilité suisse. Or, ce projet d’accord a fait l’objet d’une remise en cause unilatérale, non des Français mais des Suisses.

Ce que vous évoquez concerne le paiement des taxes d’aéroport qui est une question différente de celle de la fiscalité. Si vous le souhaitez, nous pourrons poursuivre cet échange à la buvette (Sourires) ou ailleurs, sur toute zone franche que vous pourriez choisir.

M. Jean-Luc Reitzer. Ce que vous dites est faux, monsieur le secrétaire d’État !

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Non ! Je connais très bien ce sujet, que votre collègue Mme Grosskost et d’autres ont soulevé auprès de moi. Le Président de la République traite cet après-midi même de cette question et nous verrons bien quels en seront les résultats. Ce que vous avez dit n’est pas complètement exact. Les dernières évolutions concernent les taxes d’aéroport et non la fiscalité des entreprises.

M. Jean-Luc Reitzer. Et la TVA.

M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Il y a beaucoup d’amalgames sur ce sujet.

Là encore, des accords ont été obtenus. Ce sont les Suisses qui les ont remis en cause ces derniers mois.

Monsieur Chassaigne, s’agissant de la Banque de France, il y a gain de productivité. D’ailleurs, le directeur des services du surendettement est l’ancien directeur de la succursale de Nancy, ce qui est nécessairement une référence intéressante. (Sourires.)

Les crédits nécessaires à la fusion d’UbiFrance et de l’AFII, qui sont en cours de vérification, seront bien entendu mobilisés par des mesures de gestion en 2015, à moins qu’elles puissent l’être en 2014. Je veux donc vous rassurer solennellement.

M. Tardy a appelé notre attention sur les petites taxes. J’invite l’ensemble des parlementaires à avoir sur ce sujet toutes les capacités de coproduction législative et à être des forces de propositions que le Gouvernement est prêt à recevoir. À vrai dire, pour être encore plus précis, j’aimerais qu’ils mettent autant d’énergie à faire des propositions de suppression qu’ils en mettent à opposer des résistances à chaque fois que le Gouvernement propose la suppression de l’une de ces petites taxes dont on dénonce souvent le nombre et le produit mais dont on défend systématiquement la pertinence, l’affectation et l’utilité. Je reconnais bien volontiers que les propos que j’ai tenus lorsque j’ai pris mes fonctions, qui étaient optimistes en raison du rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) et des suggestions de mon prédécesseur à ce poste, ont été fortement contrariés par la capacité de résistance initiée par tous les bénéficiaires de ces taxes qui utilisent légitimement le Parlement comme un relais, assez efficace je le reconnais, de mobilisation pour un statu quo que je n’entends pas conserver. Je souhaite que nous puissions évoluer sur ce sujet.

Mesdames, Messieurs les députés, j’avais promis d’être bref. J’ai un peu cabotiné (Sourires), mais j’entendrai volontiers les remarques qui pourront être apportées sur les oublis que j’aurais pu faire en réponse à vos questions.

Mme Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du numérique. Mesdames, messieurs les députés, même sans cabotiner, je crains d’être un peu longue…

J’aimerais apporter des précisions sur le nouveau programme 343 « France Très haut débit ». Il s’agit d’un projet d’infrastructures majeures du quinquennat, le plus ambitieux qui soit. Il nous donnera plusieurs années d’avance par rapport à nos voisins européens. C’est un grand atout pour l’attractivité internationale de la France. Ce programme poursuit également un objectif d’aménagement et d’égalité entre les territoires et les habitants de notre pays.

Notre objectif est de couvrir la totalité de la population en très haut débit d’ici à 2022, avec un point d’étape en 2017 où 50 % des foyers auront accès au très haut débit. Pour cela, 20 milliards d’euros d’investissements seront nécessaires. 6 milliards seront apportés par les pouvoirs publics dont 3,3 milliards par l’État, le reste venant des collectivités locales.

Ce plan avance bien, il est entré dans sa phase opérationnelle et est efficace. Les demandes de financement des collectivités locales ont commencé à être instruites par la mission France Très haut débit en 2013. Au 30 août dernier, vingt-sept projets de réseaux d’initiative publique (RIP) qui représentent trente-cinq départements ont fait l’objet d’une décision favorable par le Premier ministre pour engager un premier montant d’aides à hauteur d’un milliard d’euros. D’ici à la fin de cette année, seize projets supplémentaires devront être sélectionnés. Pour engager d’ores et déjà des crédits au-delà de ce montant et pour ne pas bloquer la sélection de projets susceptibles d’arriver bientôt, le programme budgétaire du plan France Très haut débit permet d’ouvrir les autorisations d’engagement nécessaires à hauteur de 1,4 milliard d’euros pour l’année 2015. À partir de là, les paiements effectifs s’étaleront dans le temps. Le Fonds national pour la société numérique (FSN) dispose encore à ce stade des ressources nécessaires pour couvrir le budget triennal 2015-2017.

Au-delà du soutien unanime exprimé par Mme Corinne Erhel, Mme Clotilde Valter, MM. Yannick Favennec, Joël Giraud, et André Chassaigne, ce dont je les remercie, c’est la preuve que les élus, en lien étroit avec leurs concitoyens, ont compris l’importance de ce sujet pour notre pays et ses habitants.

Monsieur Giraud, vous avez émis quelques doutes quant à la réussite des objectifs de déploiement, notamment dans les zones périurbaines et rurales. Sachez que des projets ont été déposés qui concernent déjà des départements très ruraux. Je citerai le Gers, l’Ardèche, la Haute-Marne, la Haute-Saône, la Lozère, avec des regroupements régionaux en Auvergne et en Limousin par exemple. On voit bien que lorsqu’il y a un engagement actif, volontaire, responsable de la part des collectivités locales concernées, le plan avance.

Cette initiative combinée entre l’État et les collectivités locales doit apporter des réponses plus rapides là où les besoins sont les plus criants. C’est le message qui a été adressé cette année, sous mon impulsion, aux collectivités locales. C’est la raison pour laquelle nous avons lancé le plan « Écoles connectées » pour contribuer au financement d’un accès haut débit par satellite. C’est donc un recours en urgence à cette technologie qui couvre 9 000 établissements primaires et secondaires dès cette rentrée. Je crois que cette initiative a été particulièrement appréciée par les maires des communes rurales.

En matière de couverture mobile, une nouvelle initiative est nécessaire. Il faut rompre avec la logique des zones blanches, cesser de traiter par silo vertical la question des réseaux fixes d’un côté, celle des réseaux mobiles de l’autre. Les niveaux de couverture mobile en 2G et 3G, rapportés à la population, sont élevés : 99,9 % de la population française est couverte en 2G et, selon les opérateurs, entre 96 et 97 % en 3G, mais tel n’est pas forcément le vécu des utilisateurs des zones très rurales.

Pour répondre aux attentes, plusieurs pistes d’action sont envisagées. Il convient tout d’abord de répondre aux besoins de couverture à l’intérieur des logements. C’est une question distincte de celle des zones blanches, mais qui recouvre une grande partie des préoccupations. Pour cela, il faut mobiliser les technologies aujourd’hui plus facilement utilisables, avec le déploiement des réseaux fixes.

En ce qui concerne, ensuite, les insuffisances de la couverture, il faut que les opérateurs de téléphonie aillent au bout de ce à quoi ils se sont engagés collectivement, à savoir la mutualisation de leurs réseaux 3G dans les campagnes, qui n’est à ce jour réalisée qu’à hauteur de 25 %. En liaison avec le régulateur, l’ARCEP, nous ferons en sorte que ce programme aboutisse. Le lien entre couverture numérique du territoire et ruralité est une priorité de ce gouvernement.

Le programme PIA 2, madame Erhel, se décompose entre, d’une part, les usages et les technologies numériques et, de l’autre, la French Tech. Le premier volet est financé à hauteur de 400 millions d’euros, le second à hauteur de 215 millions.

Sur les 400 millions d’euros du premier volet, 100 millions sont des subventions, 75 millions des avances remboursables, 50 millions des prêts et 175 millions des fonds propres. Tous ces fonds sont opérés par la BPI. En ce qui concerne les usages, il s’agit de soutenir l’effort d’investissement des acteurs de la transition numérique de l’économie et de stimuler les entreprises innovantes dans chaque filière industrielle afin de promouvoir le développement d’une offre nationale. C’est ainsi, par exemple, qu’un programme thématique de « territoires de soins numériques » a été lancé : ce sont cinq territoires – l’Aquitaine, la Bourgogne, l’Île-de-France, Rhône-Alpes et la zone de l’océan Indien – pilotés par expérimentation pour tester de nouvelles solutions plus coordonnées de prise en charge des patients au moyen des outils numériques. Autre exemple, 20 millions d’euros sont consacrés à l’apprentissage du code de la route, notamment dans le secteur périscolaire. Un appel à manifestation d’intérêt a été lancé après l’été : soixante-dix acteurs, associations, mécènes, entreprises privées et acteurs publics, ont répondu à l’appel, et les dossiers seront, l’an prochain, sans doute dès le premier trimestre, sélectionnés pour mettre en œuvre dans les territoires ces nouvelles méthodes d’apprentissage du code de la route.

En ce qui concerne le développement des technologies, c’est un partenariat entre les secteurs public et privé de la recherche et du développement, autour de technologies numériques identifiées, considérées comme stratégiques, dans plusieurs domaines clés : le logiciel embarqué, les objets connectés, domaine où il existe des industriels français performants et remarqués à l’international, l’informatique en nuage, ou cloud, le big data, la simulation numérique, les technologies de l’usine numérique – les Allemands diraient « usine 4.0 » –, la cyber-sécurité : autant d’objets identifiés dans le cadre des trente-quatre plans de la nouvelle France industrielle et accompagnés par les pouvoirs publics.

En ce qui concerne la mission French Tech, hébergée par Bercy, le processus de labellisation a été lancé en janvier 2014. À ce jour, la mission a reçu quatorze projets de la part des métropoles, et d’autres projets sont en cours de préparation. À chaque réception d’un projet, un référent à la direction générale des entreprises (DGE) est nommé. Les porteurs du projet dans les territoires travaillent en commun, car il s’agit de co-construction. Lorsque le projet est considéré comme suffisamment avancé, une visite sur site est effectuée, par les équipes de la mission French Tech, la DGE, la BPI, la Caisse des dépôts. Sur les quatorze projets reçus, onze déplacements ont eu lieu à ce jour. L’étape suivante, c’est la version deux du projet ; certaines collectivités en sont à la version sept, huit ou neuf. On voit que c’est un travail d’accompagnement sur la durée. La première vague de labellisation interviendra très rapidement, dans les quinze prochains jours. Les écosystèmes labellisés bénéficieront d’actions très concrètes, en s’engageant à améliorer encore leurs projets. Leur engagement sera publié d’ici à la fin de l’année.

Une enveloppe de 200 millions d’euros est réservée au cofinancement par la BPI d’un des accélérateurs privés, l’idée n’étant pas de subventionner directement des entreprises par des fonds publics, mais d’accompagner l’investissement privé dans des opérateurs à très fort potentiel de croissance. Ce dispositif entrera en vigueur au premier trimestre 2015.

Le volet « attractivité internationale » de la French Tech est financé à hauteur de 15 millions d’euros. Il permettra des démarches très structurantes de valorisation à l’international, afin d’attirer des investisseurs étrangers dans notre pays pour aider nos start-up à devenir des scale-up, c’est-à-dire à effectuer un passage à l’échelle pour éviter de se faire racheter et de partir à l’étranger.

M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Les moyens de financement des CTI et CPDE sont stabilisés en 2015, et une réforme du financement est prévue en 2016 pour répondre aux besoins de manière plus dynamique.

Je partage la volonté d’améliorer la lisibilité du PIA. Le suivi de ce programme au plan budgétaire est assuré, par le document budgétaire annuel du PIA, ainsi que les rapports annuels de performance ; l’information existe, mais elle n’est pas reflétée dans la mission que nous discutons aujourd’hui.

La réponse concernant les 5 millions d’euros de crédits, monsieur Bacquet, vous a été apportée. Il n’y a pas, d’un côté, des responsables politiques et ministériels intelligents et, de l’autre, des technocrates incapables. Ce sont mes collègues et moi qui sommes fautifs. Je suis prêt à prendre les 5 millions d’euros nécessaires au parachèvement de la fusion sur les reports de crédits de mon ministère, car je ne doute pas un seul instant que Laurent Fabius fera le même geste pour la politique de communication. Nous suivrons une politique intelligente où chacun fera un geste budgétaire, en sortant de la logique de tranchée qui est parfois celle des administrations de tutelle.

En ce qui concerne Bpifrance, une convention est en cours d’élaboration. Un travail plus accru doit être conduit.

S’agissant de notre politique économique, l’État ne se désengage pas. Notre volonté est au contraire qu’il fixe le cadre. C’est la discussion que nous devrons avoir au moment de discuter la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République. Fixer le cadre et les responsabilités, apporter les financements de manière transparente, être moteur là où l’État doit l’être, en laissant la place aux régions là où elles doivent l’occuper : ce n’est en aucun cas un désengagement. Nous conférons une responsabilité accrue aux régions en matière de développement économique, mais il ne s’agit pas d’instaurer une concurrence malsaine entre les différents niveaux de collectivités publiques, car en tout état de cause la cohérence d’ensemble de la politique économique sur le territoire relèvera toujours de l’État. Je partage donc pleinement votre « jacobinisme de bon aloi », pour reprendre la formule de M. Chassaigne.

Je ne crois pas que la meilleure politique économique soit forcément celle qui mette le plus d’argent sur la table. Ce n’est pas non plus celle – et je regrette que les députés UDI ne soient plus parmi nous – qui consisterait à dire : « Baissons les impôts, baissons les déficits publics, augmentons les dépenses », car je ne vois pas comment c’est possible, à moins d’imaginer une création budgétaire ex nihilo. Si cela existait, monsieur Chassaigne, nous le saurions.

Notre politique de compétitivité consiste à redonner des marges de manœuvre à nos entreprises, en conduisant une politique budgétaire plus sérieuse pour permettre cet effort, et l’État continuera d’intervenir aux bons endroits, où il fixera un cadre, marquera une volonté, affirmera sa place. L’alliance des productivismes à reconstruire, tâche à laquelle le Gouvernement entend s’atteler, ne nécessite pas davantage d’argent public. L’argent doit être mis au bon endroit et employé à bon escient : c’est cet esprit que je veux porter.

En ce qui concerne l’industrie aéronautique, nous sommes très vigilants sur le développement d’Airbus. La France tient aujourd’hui tous ses engagements en matière d’avances remboursables et l’entreprise remplit sa part de responsabilité. Il n’y a donc pas lieu d’avoir des craintes sur le secteur – notamment concernant l’aéroport de Blagnac, au sujet duquel j’ai rencontré plusieurs de vos collègues la semaine dernière. Airbus est l’un de nos fleurons et l’une de nos priorités, en termes d’emplois comme d’exportations.

Il en va de même pour l’industrie pharmaceutique, qui fait également partie de nos activités exportatrices. Nous sommes très vigilants sur notre fleuron. Le changement de direction décidé par ce grand acteur prend en considération, je n’en doute pas, nos contraintes de production sur le territoire national.

Je suis favorable, monsieur Chassaigne, à ce que nous détaillions ensemble le bilan de la BPI. J’ai noté, et je salue, votre intérêt pour le modèle allemand. (Sourires.) Il n’y a aucune volonté de la part de l’État de se désengager. Nous souhaitons au contraire conduire une politique cohérente. Ce que nous faisons avec les allégements de charges, la mobilisation du tissu industriel, les trente-quatre plans, les priorités budgétaires préservées en matière de défense industrielle, avec le Fonds de développement économique et social (FDES), l’aide à la réindustrialisation (ARI), toutes les actions engagées par mon prédécesseur, c’est un ensemble cohérent, car c’est par l’industrie et les services que notre pays recouvrera sa vitalité.

Le modèle qui consiste à vouloir marquer les priorités par des crédits budgétaires, à croire que la puissance publique peut se substituer à l’initiative privée, c’est, dans le monde où nous vivons, une erreur de raisonnement. Aussi vrai que le « socialisme dans un seul pays » n’a pas produit des résultats convaincants, la politique budgétaire dans un seul pays ne marche pas non plus, car, en économie ouverte, la dépense publique subventionne l’importation ou la production étrangère. Il faut donc renforcer nos producteurs nationaux, chercher à avoir une économie beaucoup plus forte, pour repartir sur ce dynamisme productif. Cela ne signifie pas l’abandon de nos priorités. Ainsi que Carole Delga l’a souligné, nous vous avons entendus sur plusieurs sujets de préoccupation, d’où les changements de ces derniers jours. De même, Axelle Lemaire a présenté les priorités de cette France de demain que nous construisons avec de l’investissement public et privé. Le bon investissement public est celui qui suscite l’investissement privé, qui exerce un effet de levier et permet d’enclencher une dynamique vertueuse.

Le CICE fait partie de l’équation budgétaire dont nous discutons avec La Poste. Pour ce qui est des grandes surfaces, nous avons réuni la semaine dernière, avec Stéphane Le Foll et Carole Delga, l’ensemble de la filière. Le secteur agroalimentaire perçoit beaucoup de fonds au titre du CICE, la grande distribution davantage encore. Nous avons demandé que ce crédit d’impôt ne serve pas qu’à faire baisser les prix, mais qu’il contribue à créer de l’emploi et à relancer les investissements. Un suivi sera assuré, filière par filière, branche par branche. François Rebsamen a organisé une réunion importante le 10 septembre. Les échanges avec les grandes surfaces devront aboutir à davantage d’investissements, à une meilleure intégration des différents circuits avec l’agroalimentaire, ainsi qu’à des contreparties en termes de temps de pause et de temps partiel. Nous serons très vigilants sur ces sujets.

Carole Delga a été très précise sur les CCI. Les économies sont une nécessité, pour notre souveraineté financière comme pour le financement de nos priorités. Tout en reconnaissant le rôle des CCI, j’en appelle à un esprit de responsabilité. Nous pouvons parvenir à une péréquation régionale vertueuse qui évite aux plus petits de périr, mais des économies doivent être faites et je ne céderai pas à l’obstruction contreproductive qui s’est fait jour.

Je pense, madame Allain, avoir répondu en creux au sujet de la perte de confiance. La période est difficile et les résultats ne sont pas encore là, mais notre politique économique est cohérente et répond à la nécessité de renforcer notre tissu productif, par des leviers budgétaires adaptés, la mobilisation de l’investissement privé, la simplification et toutes les autres réformes que nous devrons conduire pour apporter plus de souplesse, car c’est ainsi que nous retrouverons l’énergie dont notre économie a besoin.

En ce qui concerne La Poste, le développement des plateformes de tri postal est nécessaire pour adapter l’outil industriel. Je trouve qu’une cohérence de la carte avec la carte territoriale est une bonne idée ; je la porterai au débat que nous avons avec le président-directeur général de La Poste, que j’incite d’ailleurs à voir les parlementaires le plus souvent possible, ce qu’il fait avec beaucoup de dévouement car il sait que La Poste, l’un de nos fleurons, est aussi un instrument d’aménagement du territoire.

Les maisons de service public font partie du projet de La Poste. Un travail interministériel est conduit en ce moment, sous la supervision du Premier ministre. Je ne souhaite donc pas exprimer une opinion à ce stade, mais nous suivons la question avec beaucoup d’intérêt.

Si, cela a été rappelé, un geste a été fait sur l’emploi aidé, je ne pense pas que c’est par les emplois aidés que nous pouvons régler le problème du chômage. Les bons emplois aidés sont ceux qui conduisent à des emplois pérennes. Les gens veulent des emplois qualifiants qu’ils puissent garder. On en revient donc toujours au même constat : c’est la vitalité de nos entreprises qui est une nécessité, donc l’emploi marchand qualifiant et pérenne.

M. Dominique Lefebvre, président. Mesdames et messieurs les ministres, je vous remercie.

La réunion de la commission élargie s’achève à midi vingt-cinq.

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