Accueil > Projet de loi de finances pour 2016 > Les comptes rendus des commissions élargies (plf 2016) > Compte rendu intégral

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Assemblée nationale

commission élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission des affaires économiques

Commission du développement durable
et de l’aménagement du territoire

(Application de l’article 120 du Règlement)

Mardi 3 novembre 2015

Présidence de M. Gilles Carrez,
président de la Commission des finances,
puis de M. Dominique Baert, vice-président
de la Commission des finances,
de Mme Frédérique Massat,
présidente de la Commission des affaires économiques,
et de M. Jean-Paul Chanteguet,
président de la Commission du développement durable
et de l’aménagement du territoire.

La réunion de la commission élargie commence à dix-huit heures.

projet de loi de finances pour 2016

Politique des territoires

M. le président Gilles Carrez. Madame la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité, monsieur le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, la présidente de la commission des affaires économiques, le président de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire et moi-même sommes heureux de vous accueillir pour vous entendre au sujet des crédits de la mission « Politique des territoires », dans le cadre de l’examen du budget de la Nation pour 2016.

Mme la présidente Frédérique Massat. La commission des affaires économiques s’est penchée sur l’avis budgétaire consacré aux crédits de la mission « Politique de la ville » dont Mme Maquet est la rapporteure pour avis.

L’année 2015 aura été faste pour la politique de la ville puisqu’elle aura été celle de la négociation des contrats de ville : 437 d’entre eux ont été conclus, soit la quasi-totalité, avec cette particularité que les territoires ruraux sont désormais impliqués. Ces outils faciliteront le lancement du nouveau Plan de rénovation urbaine (NPNRU). Notre rapporteure pour avis nous indiquera que la politique de la ville constitue une priorité pour le Gouvernement puisque, hors dispositif d’extinction des zones franches urbaines, le projet de loi de finances (PLF) pour 2016 prévoit une augmentation de 18 millions d’euros de ce budget, soit une hausse de 4 %.

Ce programme a, par ailleurs, bénéficié d’une rallonge budgétaire dès 2015, en application d’une décision du comité interministériel à l’égalité et la citoyenneté (CIEC) du 6 mars dernier. Cette priorité a été réaffirmée lors du comité interministériel qui s’est tenu la semaine dernière.

Il faut enfin relever que, lors de la discussion de la première partie du PLF, la commission des affaires économiques, par l’intermédiaire de son rapporteur pour avis, M. François Pupponi, a fait adopter plusieurs amendements relatifs à la politique de la ville, dont un améliorant l’application de la TVA au taux de 5,5 % pour l’accession sociale à la propriété dans les quartiers prioritaires.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Comme pour les deux années précédentes, M. Alain Calmette est le rapporteur pour avis de la commission du développement durable.

M. Michel Vergnier, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour la politique des territoires. Depuis l’an dernier, la mission « Politique des territoires » intègre la politique de la ville, ce qui est une bonne chose, puisque la ville de Guéret, dont je suis le maire, s’est aussi livrée à cet exercice. Cela explique l’attention avec laquelle je veille sur cette mission qui, pour 2016, représente un effort total de 674,4 millions d’euros en autorisations d’engagement et 718,3 millions d’euros en crédits de paiement.

Les crédits des programmes 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » et 162 « Interventions territoriales de l’État », sur lesquels porte ce rapport spécial, s’élèvent pour leur part à 237 millions d’euros en autorisations d’engagement et 280 millions en crédits de paiement. Si les autorisations d’engagement du programme 112 sont stables, ses crédits de paiement baissent, avec une participation à l’effort national de 3,4 %. Les crédits du programme 162, quant à eux, baissent de plus de 20 %.

Les crédits du programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » sont modestes. Ils représentent moins de 5 % de l’effort global de l’État en faveur de la politique d’aménagement du territoire, mais ils sont importants, car, comme l’indique le nom du programme, ils sont destinés à impulser des politiques, qui peuvent ensuite être poursuivies grâce aux crédits d’autres missions ou aux contrats de plans.

En effet, la politique des territoires est par essence transversale, et c’est pour cette raison que j’estime particulièrement pertinente l’organisation par le Gouvernement, cette année, de deux comités interministériels aux ruralités. Ils ont donné un nouvel élan à la politique des territoires et dessiné un cadre global d’action conférant à la politique du Gouvernement plus de cohérence et de lisibilité.

Aussi, plus que sur les crédits de la mission, mes questions et remarques porteront sur les annonces faites par le Gouvernement à l’issue des deux comités interministériels.

De nombreuses mesures ont été annoncées, qui sont pour la plupart très positives. Toutefois, je souhaiterais que soient très clairement définies les priorités à court et moyen termes pour la couverture mobile et internet à haut et très haut débit, afin de ne pas décevoir les très fortes attentes de nos concitoyens. Il s’agit avant tout pour moi de privilégier l’économie et l’attractivité des territoires dans lesquels la santé et l’éducation jouent un rôle primordial. Annoncer la couverture 4G sur 22 000 km de voies ferrées, pourquoi pas ? Mais il s’agit seulement d’un élément parmi d’autres.

Le thème du numérique m’amène à évoquer le télétravail, que je considère à la fois comme un levier pour le développement des territoires ruraux et, s’il est implanté dans de bonnes conditions, comme un moyen d’améliorer la qualité de vie et la sécurité des salariés. J’attends avec impatience la publication du décret relatif aux modalités de mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique, prévu par la loi du 12 mars 2012. Notre pays accuse un certain retard dans le développement du télétravail, sans doute pour partie dû à un manque de volonté de certains décideurs. Le Gouvernement a annoncé l’élaboration d’un plan pour en favoriser le déploiement. Pouvez-vous préciser le contenu et l’état d’avancement de ce plan ?

Le Gouvernement s’est également donné pour objectif l’ouverture de 1 000 maisons de services au public (MSAP) dès la fin 2016. Je me félicite de la création d’un fonds interopérateurs qui allégera la charge pesant sur les collectivités territoriales dans le financement du fonctionnement de ces maisons, mais, si l’on veut atteindre l’objectif, il est nécessaire d’aller plus loin dans l’accompagnement des communes dont les moyens sont limités et ne peuvent être sollicités trop lourdement. Madame la ministre, pouvez-vous préciser les évolutions et les intentions du Gouvernement en la matière ? Le partenariat avec La Poste est une proposition intéressante, mais il en existe d’autres.

Enfin, je souhaiterais évoquer la prime d’aménagement du territoire (PAT) et les zones de revitalisation rurale (ZRR), dont je souligne la complémentarité pour renforcer l’attractivité économique des territoires ruraux.

La PAT a été modifiée l’an dernier, notamment pour la recentrer sur les PME. Quel bilan tirez-vous des premiers mois d’application du nouveau dispositif ? Les PME se le sont-elles approprié ?

Les ZRR vont également faire, dans les prochaines semaines, l’objet d’une réforme que je suivrai avec la plus grande attention. Pouvez-vous nous confirmer le calendrier et les grandes orientations de cette réforme annoncée lors du comité interministériel du 14 septembre ?

Tous les atouts doivent être mis du côté de la réussite des territoires fragiles. Il me semble que cette volonté est affichée, il faut la conforter et, si j’admets que des efforts aient pu être demandés à certaines missions, elles ne pourront à l’avenir jouer leur rôle de levier qu’à la condition que leurs moyens financiers et humains soient sanctuarisés.

Compte tenu des engagements pris et de leur pertinence, je vous invite, mes chers collègues, à adopter les crédits de la mission « Politique des territoires ».

M. Dominique Baert, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour la politique de la ville. C’est sur une tonalité positive que j’ouvre cette présentation des crédits de la mission « Politique de la ville ». En tant que rapporteur spécial, je n’ai pu qu’apprécier, à la veille de cette commission élargie, d’avoir reçu 100 % des réponses à mes questionnaires budgétaires : la quantité est au rendez-vous, mais la qualité aussi, car les réponses sont plus complètes et précises qu’elles ne l’ont jamais été.

Je peux encore me montrer satisfait sur le fond, car les crédits du programme 147, s’ils sont en baisse apparente de 2,6 %, préservent le cœur de la politique de la ville, à savoir les actions territorialisées, qui passent de 331,8 à 346,9 millions d’euros, soit une progression positive de 4,6 %. La réalité, c’est qu’en dépit des efforts de redressement des finances publiques, la politique de la ville est confortée. Cela contraste favorablement avec le quinquennat précédent où, de 2007 à 2012, les crédits de la politique de la ville avaient diminué de 250 millions d’euros.

Aussi, monsieur le ministre, mes questions porteront-elles moins sur l’ambition politique que sur le quotidien de la politique de la ville.

En ce qui concerne les contrats de ville, quel est l’état d’avancement de leur signature ? Le Gouvernement tiendra-t-il ses objectifs pour la fin de cette année ?

Dès le début de mes travaux budgétaires, j’ai plaidé pour la simplification des structures et la réduction du nombre d’organismes. J’ai salué le regroupement du secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV), de la Délégation interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale (DATAR) et de l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances (Acsé) en Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET) ; mais sommes-nous maintenant au stade optimal ? Le CGET, l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), l’Établissement public national d’aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA) et la nouvelle Agence économique ne devraient-ils pas constituer une source d’économie des deniers publics et d’une plus grande cohérence ? Quel sera le rôle des délégués du préfet dans l’exercice des missions de l’Agence France Entrepreneur ?

Que ce soit pour les quartiers en veille active, ou pour les actions conduites en « réussite éducative », le leitmotiv de l’État est dorénavant d’appeler au cofinancement pour les communes hier bénéficiaires, ce qui, pour certaines, n’est pas compatible avec leurs capacités financières, surtout lorsqu’elles doivent intégrer la contribution au redressement des finances publiques ou la réforme scolaire. Le risque est que, faute de capacité à les financer, certaines communes ne renoncent à des actions, tel le « coup de pouce » pour la lecture publique, qui, pour être efficaces, devraient être menées dans la durée. Ne peut-on envisager d’éviter de requérir des cofinancements croissants pour les communes bénéficiant de la Dotation de solidarité urbaine (DSU) – cible ?

Je souhaite vous interroger au sujet de la sous-consommation croissante des crédits. De fait, le taux des crédits effectivement consommés fléchit de 95 % en 2012 à 86 % en 2014. C’est regrettable, pour deux raisons : ces fonds non consommés pourraient certainement être utiles dans les quartiers, et il ne faudrait pas que ce bon budget soit obéré par la constitution d’une cagnotte par Bercy – en chti, on parlerait de « muche ». Allez-vous accroître la fongibilité de vos crédits afin de mieux les dépenser ?

Ma dernière question veut vous appeler à la vigilance : votre ministère, monsieur le ministre, est-il en voie de technocratisation ? Ceci serait le contraire à l’esprit d’action d’urgence, d’intervention rapide et de proximité devant constituer l’essence même de la politique de la ville.

Ainsi, les projets d’intérêt régional, lancés dans le cadre du NPNRU, étant, par définition, de taille et de volume financier limités, sont plus aisés à mettre en œuvre que les plans d’intérêt national. Les procédures qui leur sont applicables ne peuvent qu’être simplifiées et déléguées au sein des régions : des crédits faciles à débloquer, des décisions rapidement prises, afin de satisfaire sans tarder les attentes des élus et des habitants. Dès lors, estimez-vous raisonnable que soient exigés un an de préparation du protocole de préfiguration, puis des études transversales, des études thématiques, des études urbaines d’une durée de deux ou trois ans, avant que ne s’engagent les moindres travaux ? Pourriez-vous, monsieur le ministre, décréter l’urgence pour la simplification des procédures ? Plus rapide, plus proche des besoins des habitants, telle doit être la politique de la ville. Après des procédures et de l’argent, donnez-lui du souffle et changeons réellement et rapidement la vie des habitants des quartiers concernés ! Avec l’ANRU 2, du changement leur a été promis : ne les faisons pas attendre la prochaine décennie…

Les dispositions de la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine ont profondément rénové la politique de la ville : nouvelle géographie prioritaire, nouvelle génération de contrats de ville, nouvelle gouvernance, nouvelles méthodes de participation des habitants. Tout dernièrement encore, la création de l’Agence France Entrepreneur et les décisions du CIEC du 26 octobre aux Mureaux, soulignent que la politique de la ville n’a pas pour seul but la transformation des quartiers, mais aussi et surtout la vie quotidienne et l’emploi des habitants.

Les crédits budgétaires de la politique de la ville n’ont jamais été aussi élevés. Voilà pourquoi j’appelle à leur adoption.

M. Alain Calmette, rapporteur pour avis de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour la politique des territoires. Le Gouvernement et vous-même, madame la ministre, avez pris à bras-le-corps les problématiques des ruralités, et l’année 2015 a été riche d’avancées concrètes. Elle a notamment été marquée par deux réunions du comité interministériel aux ruralités qui n’avaient pas été tenues depuis plus de cinq ans.

Dans le cadre d’une procédure d’évaluation et de suivi coordonnée par le CGET, une soixantaine de mesures touchant à tous les domaines de la vie rurale ont été décidées et sont en cours d’application ou s’apprêtent à l’être. Cet aspect du suivi des mesures annoncées est très important, car les politiques transversales mobilisent tous les ministères ou presque et nécessitent une coordination permanente.

Du numérique aux maisons de services au public, des stations-service isolées à la réforme des ZRR, des maisons de santé aux conventions ruralité en matière d’éducation, de la réforme de la dotation globale de financement (DGF) à la mise en réseau des territoires, de l’augmentation de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) à la politique des bourgs-centres, tout illustre les avancées réelles enregistrées, mais aussi la transversalité d’une politique publique qui, par définition, n’est pas que le fait des deux seuls programmes 112 et 162. Ils ne représentent en effet que 280 millions d’euros environ en crédits de paiement sur les 5,46 milliards consacrés à la politique transversale d’aménagement du territoire.

Ma première réflexion sous forme de question porte sur le programme 162, qui est piloté par le ministère de l’intérieur. Ce programme d’intervention territoriale de l’État (PITE), qui ne fait que regrouper des crédits existants de quatre actions régionales provenant de différents ministères, semble à bout de souffle. En effet, toutes les demandes d’actions nouvelles ont été rejetées ces dernières années et les quatre actions inscrites sont prorogées. Il semble donc qu’il soit plus facile de rester dans le programme que d’y entrer. Cet état de fait doit faire l’objet d’une réflexion sur l’avenir de ce programme qui enregistre cette année une très forte diminution de ses crédits.

En ce qui concerne l’évolution des ZRR, les travaux d’évaluation de l’inspection générale, et ceux de la commission du développement durable ont abouti à des propositions auxquelles vous avez répondu en vous engageant à faire évoluer en profondeur ce dispositif. Pouvez-vous indiquer, madame la ministre, ce qui est prévu, tant pour la définition d’un nouveau zonage que pour la date de sa mise en œuvre ?

Je souhaite également vous interroger sur une mesure essentielle que vous aviez lancée à titre expérimental et que le comité interministériel de septembre a décidé d’élargir en la dotant de 300 millions d’euros pris sur le fonds de soutien à l’investissement local. Je veux parler de la revitalisation des bourgs-centres. C’est un enjeu essentiel du maillage équilibré des territoires ruraux qui ont besoin de pôles de centralité pouvant répondre aux besoins de leur population et de celle de leur zone d’influence.

Vous avez voulu donner à ce dispositif la dimension la plus transversale possible : le logement, bien sûr, mais aussi les services, le commerce, la mobilité, la santé, l’éducation. Pouvez-vous préciser l’échéancier de la mise en œuvre de cette revitalisation et la procédure de choix des bourgs ou villes moyennes retenus ?

Hormis le programme « Interventions territoriales de l’État », pour lequel des décisions stratégiques doivent être prises, l’année 2015 marque un nouvel élan prometteur pour redonner confiance aux territoires ruraux.

Toutefois, c’est la transversalité qu’elle suppose qui fait à la fois la richesse et la difficulté d’une politique pour les ruralités : transversalité au niveau national, certes, mais aussi et surtout au niveau local. Revitalisation des bourgs-centres, maisons de services au public, maisons de santé appellent une coordination au plus près du terrain. En effet, les politiques verticales induisent souvent une discordance entre territoire de santé, bassin de vie, bassin scolaire, etc.

Quel dispositif envisagez-vous pour que cette politique transversale d’aménagement du territoire et, notamment, d’accès aux services publics soit territorialisée sous l’autorité des préfets de département qui pourraient ainsi en assurer la cohérence à l’échelle de bassins de vie qui correspondent aux réalités de la vie quotidienne de nos concitoyens ?

Mme Jacqueline Maquet, rapporteure pour avis de la commission des affaires économiques, pour la politique de la ville. La refondation de la politique de la ville restera assurément l’une des grandes réformes de justice sociale de ce quinquennat. Inaugurée par François Lamy, elle a été poursuivie par l’ensemble des ministres chargés de cette politique de rétablissement de l’égalité républicaine dans les quartiers.

Année après année, cette politique se construit : après un comité interministériel des villes fondateur en 2013, 2014 fut l’année du vote de la loi de programmation et de la délimitation des nouveaux quartiers prioritaires ; 2015 aura été celle de la négociation des nouveaux contrats de ville et de la mise en place des outils nécessaires pour le lancement opérationnel du nouveau programme national de rénovation urbaine.

Cette priorité politique a pris un relief particulier avec les tragiques événements de janvier dernier qui ont conforté le Gouvernement dans sa conviction que tout devait être mis en œuvre pour garder ces quartiers défavorisés dans le sein de la République. C’est le sens des conclusions du premier comité interministériel à l’égalité et la citoyenneté qui s’est réuni le 6 mars dernier et dont un certain nombre de mesures concernent directement la politique de la ville. Cette volonté a été réaffirmée lors du récent deuxième comité interministériel qui s’est tenu le 26 octobre dernier aux Mureaux dans les Yvelines.

Le projet de loi de finances porte la marque de cette priorité réaffirmée puisque, hors zones franches urbaines, le budget est en progression de 18 millions d’euros grâce aux mesures issues du CIEC. Ainsi, les crédits des actions territorialisées passeront de 337 millions d’euros en 2015 à 352 millions en 2016.

J’ai centré ma réflexion sur trois thèmes qui m’ont semblé particulièrement importants. Le premier concerne la mise en œuvre des mesures issues du CIEC, à savoir le renforcement du programme de réussite éducative, la revalorisation des adultes-relais et l’augmentation des capacités de l’Établissement public d’insertion de la défense (EPIDE). Des crédits supplémentaires ont été mobilisés dès l’exécution 2015 et sont reconduits dans le PLF 2016. S’agissant plus précisément les adultes-relais, pensez-vous que la revalorisation de l’indemnité qui leur est octroyée comblera la vacance de postes trop souvent constatée dans ce programme ?

Le deuxième thème est la mobilisation des crédits de droit commun des ministères dans les quartiers prioritaires, qui constitue un axe structurant de la réforme menée depuis 2012. Trois ministères ont été plus particulièrement ciblés : ceux du travail, de l’éducation nationale et de l’intérieur dont les champs d’action correspondent aux trois attentes prioritaires des habitants.

Les résultats sont plutôt encourageants, même si des progrès doivent encore être accomplis pour garantir que ces quartiers bénéficient bien, hors crédits spécifiques de la politique de la ville, de la même attention que le reste du territoire.

À ce sujet, pensez-vous nécessaire, monsieur le ministre, de reconduire la méthode des conventions triennales d’objectifs entre votre ministère et les autres ministères concernés ?

Dernier thème : la clarification du financement du renouvellement urbain pour les prochaines années. La convention tripartite entre l’État, l’ANRU et Action logement a assaini la situation : elle garantit le financement de l’achèvement du PNRU et le lancement du NPNRU. Cependant, elle est fondée sur des hypothèses de décaissement des crédits liés au nouveau plan assez tardifs. En cas d’accélération des mises en chantier – ce que nous souhaitons tous –, qu’est-il prévu pour que l’ANRU dispose de la trésorerie nécessaire ?

Comment et avec quels moyens fonctionneront les conseils de citoyens institués dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville qui seront sollicités au sujet des projets de rénovation urbaine ?

L’évaluation des politiques publiques est particulièrement indispensable à la politique de la ville. Or je crains que les moyens budgétaires dont dispose l’Observatoire national de la politique de la ville ne soient insuffisants pour mener à bien cette mission. Pouvez-vous, monsieur le ministre, me rassurer sur ce point ?

Je propose de soutenir l’action du Gouvernement en donnant un avis favorable à l’adoption des crédits du programme 147 « Politique de la ville ».

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité. Cette commission élargie me fournit l’occasion de présenter les grandes orientations de mon ministère en matière d’égalité des territoires et de ruralité. Nos échanges me permettront d’apporter d’autres précisions ; Patrick Kanner reviendra probablement sur les mesures adoptées par les deux comités interministériels à l’égalité et à la citoyenneté qu’il m’a été donné de présenter devant la commission élargie relative au logement.

L’activité de mon ministère a été particulièrement soutenue cette année, avec l’organisation de plusieurs événements importants ayant une incidence sur ce projet de loi de finances. Au terme du comité interministériel aux ruralités du 13 mars dernier, quarante-six mesures ont été annoncées. Le comité interministériel qui s’est tenu à Vesoul au mois de septembre a procédé à une première évaluation et proposé vingt et une nouvelles mesures s’inscrivant dans trois ambitions : garantir l’accès aux services, améliorer leurs capacités de développement, notamment économique, accélérer la mise en réseau des territoires et faire émerger de nouvelles formes de coopération, particulièrement dans le domaine de l’ingénierie.

J’ai également souhaité accélérer le déploiement des maisons de services au public, dont 1 000 seront opérationnelles avant la fin de l’année prochaine et je rappelle que les opérateurs et l’État participent à leur financement. Les maisons issues du partenariat avec La Poste bénéficient du fonds national postal de péréquation territoriale et leur financement a été sécurisé par la création d’un fonds alimenté par les opérateurs afin d’éviter que le dispositif ne repose que sur les collectivités, ce qui était précédemment le cas.

Ce sont 1 000 maisons pluridisciplinaires de santé qui seront également ouvertes en 2017. Nous savons qu’il s’agit d’une préoccupation essentielle pour les territoires ruraux : 708 sont déjà en activité et une centaine en construction, contre 170 en 2012.

Le Gouvernement veille à la cohérence de l’organisation des réseaux de services publics afin d’éviter que certains territoires déjà fragilisés ne connaissent la fermeture simultanée de plusieurs établissements. Vous l’avez dit, monsieur Calmette, le rôle des préfets sera accru afin de garantir une meilleure coordination des implantations territoriales des ministères et de leurs opérateurs. Ils s’appuieront particulièrement sur les schémas d’accessibilité des services au public et les schémas directeurs immobiliers régionaux. En ce sens, une instruction du Premier ministre aux préfets est en cours de rédaction.

L’accès au numérique constitue, lui aussi, une priorité partagée à la fois par nos concitoyens et les élus locaux : tous les départements seront engagés dans le plan France Très haut débit d’ici à la fin de l’année afin d’accélérer le raccordement des territoires ruraux. Dans le dessein de répondre aux besoins des populations qui sont aujourd’hui les plus mal desservies, le cahier des charges a été modifié : le recours à des solutions complémentaires à la fibre optique est privilégié afin de garantir la couverture du territoire.

En ce qui concerne la téléphonie mobile, le programme de résorption des zones blanches se poursuit et l’ensemble des 3 600 centres-bourgs non couverts en 3G le seront à la fin de l’année 2017.

En faveur de la revitalisation des centres-bourgs, l’année passée a connu le lancement de plusieurs chantiers, tel l’élargissement du prêt à taux zéro (PTZ) dans l’ancien à toute la zone C, soit 30 000 communes, ce qui lui conférera plus de visibilité, encouragera l’accession à la propriété, à la rénovation énergétique et contribuera à lutter contre l’étalement urbain et la dégradation du bâti ancien constaté dans nos villages. Dans les prochains jours, je présenterai au Président de la République et au Premier ministre des propositions tendant à améliorer l’ensemble des dispositifs d’accession à la propriété, qu’il s’agisse du neuf ou de l’ancien. Le Gouvernement déposera à cet effet un amendement au PLF.

Conscient du rôle des centres-bourgs dans le maillage de nos territoires, le Gouvernement a décidé de consacrer des moyens particuliers à leur revitalisation. La première expérimentation permet aux communes de moins de 10 000 habitants de bénéficier de crédits ciblés du Fonds national d’aménagement et de développement du territoire (FNADT) et de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH). Le second comité interministériel a décidé de consacrer 300 millions à la revitalisation des centres-bourgs et des villes de moins de 50 000 habitants. Ces crédits seront directement affectés aux préfets de région, une circulaire précisant les critères de sélection des projets – singulièrement en fonction de leur caractère transversal – leur sera adressée. L’objectif est de désigner les premiers destinataires à la mi-2016. Vous l’avez rappelé, cette somme constitue une fraction du fonds de soutien à l’investissement local, doté de 1 milliard d’euros. Avec l’augmentation de 200 millions d’euros de la DETR, c’est la moitié de ce fonds qui bénéficiera aux territoires ruraux.

Les contrats de réciprocité, décidés par le comité interministériel sont expérimentés dans plusieurs régions : il s’agit de renforcer les complémentarités entre les métropoles et leur arrière-pays en zones rurales et périurbaines.

À l’occasion du Conseil national de la montagne, qui s’est tenu au mois de septembre dernier à Chamonix, le Premier ministre a présenté la feuille de route de l’acte II de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, dont les grandes orientations proviennent des conclusions du rapport fait par les députées Annie Genevard et Bernadette Laclais, que je tiens à remercier pour leur travail.

Vous avez raison, monsieur Vergnier, de souligner que le télétravail est trop peu répandu en France alors qu’il offre de nombreux avantages pour les territoires ruraux ou de montagne, ainsi que pour les salariés, travailleurs indépendants et entreprises qui y recourent. Afin de hisser notre pays au niveau de nos partenaires européens, le comité interministériel a décidé l’élaboration d’un plan national de déploiement du télétravail avec les associations d’élus et les partenaires sociaux. Le pilotage de ce plan a été confié au CGET, à la direction générale du travail (DGT) ainsi qu’à la direction générale de l’administration et de la fonction publique ; sous son égide, des travaux ont commencé qui aboutiront à la prise d’un décret encadrant et soutenant le développement du télétravail dans la fonction publique. Avant la fin de l’année, le CGET et la DGT réuniront un premier groupe consacré au secteur privé, inaugurant une consultation de plusieurs mois et à laquelle seront associés des représentants des collectivités territoriales. Ce plan sensibilisera et soutiendra les acteurs par une large diffusion des expériences, il apportera un appui au développement des réseaux de lieux d’accueil, il installera un observatoire national du télétravail, en collaboration avec l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) et la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES). En cas de besoin, le cadre juridique sera modifié. Je déplore, par ailleurs, que ce sujet n’ait été que peu évoqué au cours des travaux des assises de la ruralité.

Comme vous l’avez souligné, l’ensemble des mesures prises lors de ces divers événements excède le cadre du budget de la présente mission et les 192 millions du programme 112 sont à rapprocher des 5,5 milliards d’euros – hors aides fiscales – qui contribuent à la politique d’aménagement des territoires. Le caractère fortement interministériel de cette politique explique cet état de fait ; c’est la raison pour laquelle le Gouvernement annexe à ce PLF dix-huit documents de politique transversale – les « oranges budgétaires » ; l’un d’eux concerne la politique d’aménagement du territoire.

À M. Calmette, je répondrai que le programme d’intervention territoriale de l’État, piloté par le ministère de l’intérieur, a fait preuve de son efficacité. Si aucune nouvelle action n’a été créée, cela ne signifie pas pour autant qu’il soit devenu un outil obsolète. La prorogation des programmes concernés traduit le soutien du PITE ; les diminutions de crédits que vous évoquez ne résultent que de l’aboutissement proche de certaines actions dont les objectifs initiaux ont été atteints, comme dans le marais poitevin.

Je n’ignore pas que la réforme des ZRR inquiète de nombreux élus, mais j’ai pu entendre des contre-vérités : cette réforme répond à la nécessité de simplifier et de rendre plus juste ce classement qui ne correspond plus à la réalité de nos campagnes. Se fondant particulièrement sur les conclusions du rapport que vous avez rédigé avec Jean-Pierre Vigier, cette réforme sera inscrite dans le projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2015 et entrera en vigueur au 1er juillet 2017. Le classement sera établi à l’échelon intercommunal selon un double critère simple de densité de population et de revenu par habitant.

Les crédits du programme 112 sont stables en autorisations d’engagement et connaissent une réduction de 4 % en crédits de paiement en comparaison avec la loi de finances initiale (LFI) pour 2015. Cela s’explique par un décaissement plus lent des pôles d’excellence rurale ainsi que par la transformation d’une partie des subventions des maisons de services au public de La Poste en aides fiscales. En engagement prévisionnel, ces crédits peuvent être répartis en quatre ensembles. Les crédits affectés aux contrats de plan État-région (CPER), qui représentent environ 60 % des dépenses du programme, soit 115 millions d’euros – la plupart de ces contrats ayant été signés et réalisés cette année –, constituent un engagement important de l’État dans un contexte budgétaire contraint : au total, 12,5 milliards y seront consacrés d’ici à 2020. Les crédits de la prime d’aménagement du territoire sont stabilisés à 25 millions d’euros dans le PLF 2016 par rapport à l’exécution de la loi de finances pour 2015. Comme vous le savez, la PAT constitue le dernier régime autorisé d’aides directes de l’État aux entreprises ; depuis le début de l’année, j’ai souhaité qu’elle bénéficie à davantage de PME en abaissant certains seuils d’éligibilité. À l’heure actuelle, vingt-cinq dossiers ont été subventionnés pour un montant total d’environ 14 millions d’euros et 1 733 créations d’emploi sont attendues. Malgré une arrivée à maturité tardive, compte tenu de l’évolution des critères, nous parviendrons à affecter l’ensemble de ces crédits avant la fin de l’année.

Le FNADT, dont la dotation représente 12 % de la mission, contribue, lui aussi, au développement solidaire et harmonieux des territoires ; il garantit l’accompagnement des mutations de l’espace rural, les innovations, à travers les pôles d’excellence rurale, des maisons de santé pluridisciplinaires ou encore, le programme de revitalisation des centres-bourgs. Les dépenses de fonctionnement, parmi lesquelles le soutien au CGET, à Business France et aux fonctions support, représentent les 14 % restant.

Le fil conducteur de l’action du Gouvernement est de considérer que tous les territoires méritent son attention et doivent faire l’objet de politiques adaptées à leurs particularités comme à leurs besoins, susceptibles d’être différents d’un territoire à l’autre. Aussi ai-je décidé d’engager un travail sur le domaine périurbain et j’ai confié cette mission, relative à l’aménagement de ces espaces, à Frédéric Bonnet, grand prix de l’urbanisme 2014. Vous l’aurez compris : notre politique en faveur de l’aménagement des territoires est, par essence, partenariale, avec les collectivités territoriales, notamment les régions et intercommunalités, transversale et interministérielle ; et mon ministère est responsable de la mise en cohérence de l’ensemble de ces dispositifs.

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. Il n’y a pas de quartiers perdus dans la République. Bâtir un budget, c’est faire des choix politiques. Il s’agit d’affirmer les priorités d’action de l’État au regard des attentes de nos concitoyens, notamment les plus modestes d’entre eux. Permettez-moi de vous rappeler quelques chiffres. Dans ces 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville vivent 5,5 millions de nos concitoyens. Sur le plan administratif, cela représente la signature de 437 contrats de ville. À ce jour ont été signés neuf contrats sur dix, et nous pensons raisonnablement les avoir tous signés d’ici à la fin de l’année. Une centaine de ces quartiers se trouvent en secteur à dominante rurale, ce qui constitue une très grande nouveauté par rapport à la période précédente et permet de renouer avec l’équité territoriale qui sous-tend la politique de la ville.

Un choix a clairement été fait, puisque le budget alloué au programme « Politique de la ville » augmente de 4 % pour 2016, hors poursuite de la baisse mécanique des exonérations en zones franches urbaines. Cette augmentation est la traduction budgétaire de la volonté politique du Gouvernement de donner corps à la promesse d’égalité républicaine dans les territoires prioritaires. Très concrètement, sur les 438 millions d’euros du budget « Politique de la ville », plus de 350 seront consacrés aux actions de terrain du secteur associatif dans les quartiers prioritaires. Ce chiffre était de 337 millions d’euros en 2015.

Avec ce budget, nous restaurons les crédits aux associations qui travaillent dans ces quartiers, comme nous en avions pris l’engagement lors du comité interministériel du 6 mars dernier. Il s’agit bien de restaurer ces crédits, puisqu’ils avaient été progressivement supprimés entre 2009 et 2012. Sur l’ensemble de mon ministère, 50 millions d’euros ont été dégagés en 2015 en crédits de paiement, 77 millions le seront en 2016, tous ministères confondus. Le comité interministériel pour l’égalité et la citoyenneté permet de dégager 131 millions d’euros supplémentaires pour l’année 2016.

Cela me permet d’ailleurs d’évoquer la question de M. Baert sur la baisse de la consommation des crédits. Dès 2013, nous avons engagé un rééquilibrage des crédits entre les départements, car certains étaient sous-dotés et auraient pu consommer plus, tandis que d’autres étaient sur-dotés. Avec la réforme, nous lissons précisément pour mieux coller à la réalité des besoins. Par ailleurs, des dispositifs expliquent cette baisse : l’abandon des emplois francs, qui n’ont pas fonctionné, les postes d’adultes-relais et l’exonération des cotisations sociales en ZFU.

Quatre priorités conditionnent ce budget. La première est le renforcement de la présence des adultes, de l’accompagnement des habitants et des jeunes, bref, ce qui contribue au lien social dans les quartiers. Le secteur associatif est conforté. Les crédits supplémentaires du CIEC ont été orientés pour donner plus de visibilité à ces associations, notamment grâce aux contrats pluriannuels d’objectifs. Toutes les initiatives citoyennes sont aussi confortées, que ce soit par l’intermédiaire des conseils citoyens ou des fonds de participation des habitants.

Le forfait d’aide aux structures employeuses des adultes relais, notamment les collectivités locales et les associations, a été revalorisé de plus de 5 % au 1er octobre dernier. Cela représente des contributions supérieures à 18 000 euros. Ce dispositif est essentiel, car les jeunes des quartiers prioritaires ont besoin de référents à qui parler, de personnes avec lesquelles ils se sentent en confiance, qui vivent le quotidien de leurs quartiers. Cette mesure vise à renforcer l’attractivité de ce dispositif, à réduire le taux de vacances et à lever les freins potentiels qui existaient depuis la baisse de prise en charge de l’État en 2013.

Renforcer la présence des adultes, c’est aussi renforcer leur formation. C’est le sens du lancement d’un grand plan de formation à la laïcité et aux valeurs de la République, qui bénéficie de 4 millions d’euros et permettra de former 10 000 personnes d’ici à la fin de l’année 2017.

La deuxième des priorités de mon ministère – qui est celle du Président de la République pour le quinquennat –, c’est la réussite des jeunes. C’est avec eux que nous construirons les générations de demain. Cette priorité est tout d’abord incarnée par le programme de réussite éducative. Je souhaite que chaque jeune en risque de rupture scolaire, sociale ou familiale, bénéficie d’un accompagnement individualisé. Cela passe par la présence d’équipes de réussite éducative dans tous les collèges des réseaux d’éducation prioritaire qui n’étaient pas couverts jusqu’à présent, soit 45 sites qui viennent s’ajouter aux 541 sites existants. C’est la confirmation d’une politique qui a été menée par d’autres gouvernements, je pense en particulier à l’un des ministres emblématiques de la ville, M. Jean-Louis Borloo.

De plus, 1 000 places supplémentaires seront créées dans les EPIDE pour apporter un encadrement de type militaire aux jeunes qui ont besoin de repères. Le Président de la République a lancé le service militaire volontaire, équivalent du SMA d’outre-mer pour les jeunes en métropole qui sont vraiment en très grande difficulté. Les EPIDE s’adressent à des jeunes qui présentent des difficultés, mais qui sont capables d’une certaine forme d’autonomie, notamment le week-end. Nous les renforçons donc et ouvrirons deux nouveaux centres en 2016, à Toulouse et à Nîmes, comme annoncé lors du comité interministériel du 26 octobre dernier.

Autre point concernant les jeunes, le droit à la seconde chance. Nous avons développé des emplois aidés, notamment les contrats « starter » qui connaissent un véritable succès, puisque plus de 10 000 contrats sont d’ores et déjà signés sur un objectif de 13 000 d’ici à la fin de l’année. Le contrat « starter » prévoit la prise en charge par l’État de 45 % de la totalité d’un salaire au SMIC et des cotisations. Aujourd’hui, c’est l’aide la plus importante qui existe sur ce type de contrat : ce ne sont pas des sous-SMIC, mais des SMIC ouvrant tous les droits pour des jeunes en difficulté, notamment des jeunes issus de la politique de la ville, en milieu économique ordinaire.

Le droit à la seconde chance, c’est aussi la mise en place de la garantie jeunes, du parrainage, du pacte deuxième chance, et du service civique dont la montée en charge est soutenue par un doublement des crédits dans ce PLF. Ce n’est pas l’objet de notre débat de ce soir, mais sachez que ces crédits ont été votés en première lecture par l’Assemblée nationale, hier, dans le cadre du programme 163.

La troisième priorité de l’action de mon ministère, c’est le développement économique des quartiers prioritaires. Ce sujet a longtemps été perçu comme la cinquième roue du carrosse de la politique de la ville, il est pourtant essentiel. Car le meilleur moyen de lutter contre le chômage est de miser sur le potentiel endogène de ces territoires. Du potentiel, il y en a ; mais des occasions de l’exprimer, beaucoup moins. C’est pour cela que nous avons multiplié les outils : mutation des zones franches urbaines en cent « territoires entrepreneurs » (ZFU-TE), mise en place d’exonérations fiscales pour les petits commerces de proximité, soutien de l’entrepreneuriat avec la création du prêt Bpifrance, mobilisation de 600 millions d’euros de la Caisse des dépôts, mobilisation de l’ANRU, mobilisation de l’EPARECA pour le développement de l’immobilier d’entreprise dans les quartiers. J’inaugurais il y a quelques jours à La Chapelle-Saint-Luc, près de Troyes, le cinquantième centre commercial porté par l’EPARECA dans un quartier prioritaire de la ville, ce qui montre le succès de cet outil.

Je souhaite aussi conclure un pacte pour le développement économique avec les entreprises de France, notamment en étendant la charte « Entreprises et quartiers », déjà signée par une soixantaine de grandes entreprises, et en incitant les branches professionnelles à intégrer des jeunes des quartiers dans le cadre du pacte de responsabilité. Par ailleurs, l’entrepreneuriat des jeunes est bel et bien un atout de ces quartiers, parce qu’un jeune qui crée son entreprise crée son emploi et peut contribuer à en créer d’autres. Je vous invite à regarder les images de l’opération « Talents des cités » qui s’est déroulée au Sénat il y a quelques jours. Elles montrent que ces talents méritent qu’on les accompagne et que l’on croie en leur potentiel.

C’est dans cet objectif que nous avons lancé l’agence de développement économique des territoires, appelée « France entrepreneur ». Elle aura pour mission de rendre plus lisible le millefeuille d’acteurs et d’unir tout le monde sous une même bannière. Elle rétablira l’équilibre territorial en matière de développement économique, en particulier pour les quartiers. Je souhaite vraiment insister sur ce point : le développement économique est la clé de la réussite des quartiers prioritaires.

La quatrième priorité est le nouveau plan national de rénovation urbaine. L’ANRU et ses partenaires engageront bien 5 milliards d’euros, avec l’objectif de générer 20 milliards d’investissements en dix ans. Dans le contexte budgétaire, cet effort est tout à fait significatif. Il est important et fait sens pour transformer le cadre de vie dans les quartiers, les désenclaver, rénover l’habitat et y amener les entreprises. Je vous rappelle les enjeux : 200 quartiers d’intérêt national, et 250 quartiers d’intérêt régional – qui ne sont pas d’une moindre importance, mais qui concernent moins de logements.

En réponse à différentes craintes exprimées par les rapporteurs, je peux assurer que l’accélération des mises en chantier des projets de NPNRU ne sera pas freinée par un manque de trésorerie, puisque la convention quinquennale 2015-2019, déclinée dans la convention que j’ai signée le 2 octobre dernier avec Action logement et l’ANRU, apporte des réponses concrètes sur les modalités d’apports des partenaires sociaux. Ces apports ne représentent pas moins de 5 milliards d’euros d’équivalent-subvention, soit 6,4 milliards d’euros, dont 5,4 milliards viennent d’Action logement, et 600 millions de reliquat du PNRU 1. Un tel reliquat peut sembler important, mais, le budget total était de 12,2 milliards d’euros : cela veut dire que le PNRU 1 a quasiment été mené jusqu’à son terme. Enfin, je n’oublie pas 400 millions d’euros de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS).

Par ailleurs, aux termes de la même convention, l’ANRU s’engage à mettre à disposition des porteurs de projets 150 millions d’euros, et la Caisse des dépôts 90 millions d’euros pour financer l’ingénierie des protocoles de configuration. Il sera alors possible d’engager sans attendre des réflexions sur les sites concernés par l’ANRU 2. Enfin, la Caisse des dépôts met à disposition 1 milliard d’euros à titre de préfinancement : cette somme est mobilisable dès aujourd’hui par l’ANRU pour accélérer la mise en œuvre des projets du nouveau programme. Nous gagnerons ainsi deux ans sur ce programme pour les dossiers les plus avancés. Je préfère des dossiers très bons qu’il est possible de mettre en œuvre tout de suite à des dossiers très excellents dont la mise en œuvre prendrait du temps. Il faut être pragmatique au regard des attentes des habitants, et c’est notamment pour cela que les dossiers qui ne représenteront pas plus de 7 millions d’euros d’engagement ne seront pas passés au niveau national, mais traités au niveau local.

Le budget de la politique de la ville augmente. Grâce aux conventions interministérielles et aux contrats de ville, la mobilisation des politiques de droit commun devient une réalité, qui devra être largement amplifiée. Dans les documents de politique transversale, 4,66 milliards sont mobilisés. Combiné au programme 147, aux efforts de l’ANRU et de la Caisse des dépôts et aux exonérations fiscales qu’il ne faut pas oublier, le budget de la politique de la ville n’est pas de 438 millions d’euros, mais de 11 milliards. C’est par exemple l’équivalent du budget du travail et de l’emploi, qui constitue, comme la jeunesse, une priorité de ce quinquennat. Les quartiers prioritaires de la ville et leurs habitants le sont tout autant.

Je voudrais terminer en disant un mot des habitants de ces quartiers. C’est pour eux que nous conduisons ces réformes, c’est avec eux, pour la première fois, que nous avons décidé de co-construire l’action publique : conseils citoyens, maison du projet. Et je sais qu’ils nous le rendront. J’en profite, madame Maquet, pour vous rassurer quant aux moyens que nous consacrerons à ces outils de démocratie participative : nous débloquerons notamment 2 millions d’euros dans le cadre de l’ANRU pour former les citoyens à participer à l’élaboration des programmes de rénovation urbaine les concernant. Il nous faut des citoyens formés si nous voulons en faire de véritables partenaires des politiques publiques.

Pour toutes ces raisons, j’espère que vous approuverez les orientations du budget qui vous sont proposées.

M. Jean-Louis Bricout. Nous examinons aujourd’hui en commission élargie les crédits de la mission « Politique des territoires ». Elle se décompose en trois programmes sur lesquels je ne pourrais pas revenir complètement compte tenu de leur densité.

En tant que porte-parole du groupe Socialiste, républicain et citoyen, et parce que je sais que c’est une priorité partagée par beaucoup, notamment au sein de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, je souhaite plus particulièrement insister sur le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire ». Cela me permettra d’aborder le nécessaire soutien à nos territoires ruraux — j’insiste sur la pluralité de ces territoires, qui a été réaffirmée dans la continuité des assises des ruralités et des deux comités interministériels de Laon et Vesoul. Ces deux comités interministériels se sont intéressés aux ruralités dans leur diversité pour faire rayonner les territoires, encourager les initiatives, répondre aux inquiétudes légitimes et, surtout, corriger les inégalités.

De façon globale, les crédits de la mission prouvent, si c’était nécessaire, l’engagement du Gouvernement. J’ai noté une hausse de 5 % du budget de l’action « Attractivité économique et compétitivité des territoires », et l’élu de l’Aisne que je suis ne peut que saluer cette évolution qui représente une hausse des crédits de 4,4 millions d’euros. Pour autant, la lisibilité des actions qui seront menées n’est pas forcément évidente, dans la mesure où elles sont transversales et que de nombreux crédits dépendent d’autres missions.

Discuter de cette mission budgétaire, c’est d’abord évoquer le CGET, véritable outil de réduction des inégalités, dans et entre les territoires, tout en en assurant la continuité territoriale. Il est l’acteur d’un partenariat renouvelé entre l’État et les collectivités.

Pour ce qui concerne les mesures à mettre en œuvre à destination des ruralités, l’un des objectifs est de garantir l’égalité d’accès aux services pour tous. À ce titre, les maisons de services au public constituent une réponse intéressante. D’ici à la fin 2016, 1 000 maisons seront implantées. Quelles sont les zones qui restent encore à couvrir et comment s’assurer que le territoire national soit couvert de façon cohérente ? Quelle aide spécifique sera apportée aux opérateurs ? Un seul exemple : comment demander à la CAF de dépêcher un correspondant au sein de la MSAP quand les responsables de la même CAF expliquent que, dans les structures classiques, ils manquent déjà terriblement de personnel ? La question des ressources humaines conditionne la viabilité de ces structures et des permanences qui y sont exercées.

Je souhaite également revenir sur l’objectif de lutte contre les déserts numériques ou autres zones blanches. Ainsi que le rappelle le bleu budgétaire, il s’agit de desservir 100 % de la population en services de télécommunication. Le numérique est partout et bouleverse notre quotidien, la pratique de certains métiers ou l’apprentissage des jeunes. Il est une chance pour le désenclavement et l’insertion économique de notre territoire et le développement des échanges. Il est essentiel et permettra à nos services publics de se réinventer. Toutefois, prenons garde que son développement ne favorise pas le repli sur soi : il ne faudrait pas que tout le monde, cédant à la facilité, se retrouve tout seul devant son écran. Ce serait un comble pour notre ruralité.

S’agissant de la génération de contrats de plan 2015-2020, un montant de 115 millions d’euros en autorisations d’engagement est réservé pour l’engagement des dossiers des volets numériques et territoriaux des CPER. Comment cette priorité va-t-elle s’articuler avec les objectifs contenus dans le projet de loi relatif au numérique ?

Je souhaiterais conclure en évoquant le dispositif de soutien aux centres-bourgs, à travers l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) que j’ai pu expérimenter dans la ville de Bohain-en-Vermandois dont je suis maire. Je comprends que l’ensemble des dispositifs prévus au programme 112, dont l’AMI fait partie, seront maintenus. Pour 2016, 6 millions d’euros sont prévus en crédits de paiement, mais ils ne serviront qu’à couvrir les paiements sur des engagements antérieurs à 2016. C’est bien pour les projets déjà engagés, mais qu’en est-il de la nécessaire pérennisation du dispositif, que j’appelle de mes vœux ?

S’agissant du volet opérationnel de l’AMI, Alain Calmette nous a rappelé que le dispositif centres-bourgs est capital pour exercer nos charges de centralité pour une ruralité plus profonde. Le financement fait appel à des subventions de droit commun : FNADT, crédits abondés et fléchés sur les projets des villes éligibles. Ces financements croisés supposent l’instruction de nombreux dossiers dont les bases de travaux éligibles sont souvent différentes, ce qui pose des difficultés dans l’instruction et l’avancement des dossiers. Cerise sur le gâteau, les travaux de voirie sont exclus alors que la plupart des projets concernent de la requalification urbaine, qui contient une part souvent importante de travaux de voirie. Cette situation est dommageable, alors que les projets de requalification urbaine sont au service du commerce et de l’économie. Ces projets laissent un reste à charge aux communes parfois trop important et qui ralentit le projet global. Pensez-vous confier aux villes éligibles au dispositif centres-bourgs une enveloppe spécifique qui puisse donner plus de souplesse et de simplicité au financement de ces projets ?

M. Alain Chrétien. Qu’est-ce que l’aménagement du territoire ? Ce n’est plus ce que l’on a connu sous Olivier Guichard ou dans les années quatre-vingt, avec des contrats de plans ambitieux placés sous l’égide d’un plan quinquennal ordonné par l’État. L’aménagement du territoire, aujourd’hui, c’est un État qui, plutôt que de répartir la richesse, comme lorsque nous connaissions 3 à 4 % de croissance annuelle, lisse la pénurie, donne un peu plus à ceux qui ont encore moins, et pas beaucoup moins à ceux qui ont un peu plus. L’aménagement du territoire, aujourd’hui, c’est l’addition de procédures complexes que seuls les technocrates – et encore, ceux de préfecture ! – peuvent comprendre.

L’aménagement du territoire dépend aujourd’hui des collectivités locales. L’État, bien avant cette législature, a décidé de se retirer par manque de moyens. Malheureusement, l’administration de l’État croit encore qu’elle a la richesse et le pouvoir de direction. Aujourd’hui, les collectivités locales peuvent se rebeller contre des décisions qui ont été prises par l’État. C’est donc à elles qu’il revient d’aménager leur propre territoire.

Nous sommes tous plus ou moins des décentralisateurs, nous souhaitons plus de pouvoir pour nos collectivités locales. Or, aujourd’hui, les seuls acteurs capables d’aménager leur territoire sont asphyxiés : on les empêche de travailler. On les asphyxie par la baisse drastique des dotations, mais aussi par les impôts locaux que nous ne voulons pas augmenter, pour ne pas étrangler les acteurs économiques. Comptez le nombre d’usines à gaz que nos collaborateurs locaux doivent monter : pour les contrats de ville, pour les schémas de cohérence territoriale, les SCOT dont nous n’avons pas encore parlé, mais qui sont devenus des outils d’urbanisme d’une rare complexité.

Mes chers collègues, le groupe Les Républicains vous appelle à une prise de conscience. Nous n’en sommes plus à distribuer des autoroutes ou des TGV, comme dans les années soixante-dix. D’ailleurs, les seuls TGV que vous avez distribués, vous n’avez pas d’argent pour les payer ! Mais, à quelques mois des élections régionales, on sait à quoi servent ces annonces ! Aujourd’hui, les seuls acteurs publics qui peuvent aménager le territoire sont les collectivités locales. Or, nous les déstabilisons par des baisses de dotation et en détricotant la réforme territoriale. Tout est lié, mes chers collègues. Vous imposez des seuils selon des principes inexplicables, avec des dérogations incompréhensibles : allez comprendre les seuils fixés département par département pour détricoter les intercommunalités que nous avions patiemment construites !

L’aménagement du territoire doit être conçu de manière globale, et pas simplement en fonction de programmes technocratiques imposés par Paris et s’appliquant avec des critères extrêmement limitatifs. Notre collègue ne vient-il pas de dire que la voirie ne serait pas éligible à ces futurs contrats de bourgs-centres ? Je suis maire de Vesoul, qui est un gros bourg-centre, comme Guéret, et je peux vous dire que l’un de mes soucis est l’aménagement de la voirie publique, pour rendre le centre-ville plus accessible. Si l’on sort ces dépenses du contrat de bourg-centre, que restera-t-il ?

Mes chers collègues, pour une politique efficace, il nous faut de la simplification, rendre la liberté aux collectivités territoriales d’aménager leur territoire comme bon leur semble, et il faut que l’État comprenne qu’il n’a plus les moyens de ses ambitions. Ce débat dépasse largement la gauche et la droite : la prise de conscience doit être générale.

M. Thierry Benoit. Madame la ministre, monsieur le ministre, vous êtes, en fait, les premières victimes de la politique que vous avez à défendre, puisque vous êtes membres d’un Gouvernement qui est incapable d’exposer une vision claire de l’architecture territoriale qu’il souhaite pour le pays. Depuis 2012, nous avons eu la réforme des métropoles, le redécoupage des régions, le redécoupage des cantons, la répartition des compétences entre régions et départements – qui n’est d’ailleurs pas achevée – et la loi NOTRe. Nous sommes au milieu du gué, alors que l’État devrait être à la recherche d’une convergence, d’une cohésion, d’une cohérence avec les territoires. L’État doit exposer sa vision de l’aménagement du territoire. Je suis les comités interministériels, dont sortent régulièrement des annonces, mais on voit peu de réalisations concrètes dans les territoires.

La puissance publique doit nous dire comment elle s’organise, en 2015, dans les territoires. Nous assistons au démantèlement des territoires, au retrait des services publics : nous perdons nos commissariats de police, nos commandements de gendarmerie, nos trésoreries, etc. Quels que soient les gouvernements, la procédure est la même, méthodique, sournoise : le mal se propage dans les territoires périphériques et dans les villes moyennes. J’ai la chance, grâce au cumul des mandats, de présider un pays en Bretagne : lorsque nous travaillons les contrats de plan État-région, nous voyons que la majeure partie des crédits est concentrée sur les métropoles de Rennes et Brest, et que les villes moyennes et les territoires ruraux sont abandonnés.

Nous examinons un budget de 700 millions d’euros avec lesquels nous voulons faire du rééquilibrage territorial et de l’aménagement du territoire. Le groupe Union des démocrates et indépendants constitue une minorité, mais une minorité constructive. Il sait donc reconnaître ce qui va bien. Par exemple, nous approuvons la politique en faveur des quartiers prioritaires et la mise en place du deuxième plan de renouvellement urbain qui profitera à 216 quartiers. Je voudrais aussi saluer le ministre Kanner qui a soutenu le dispositif « argent de poche » du programme « Ville Vie Vacances ».

Mais il y a aussi ce qui va moins bien. Ainsi, je déplore la baisse de la prime à l’aménagement du territoire. M. Bricout a évoqué le très haut débit. Je souhaiterais un état des lieux du plan France Très haut débit. Il y a une heure, dans l’hémicycle, nous évoquions l’accès à l’électricité en Afrique. J’aimerais que, dans ce pays moderne qu’est la France, nous puissions avoir un plan stratégique massif pour l’accès au très haut débit et à la téléphonie pour tous. Je tiens à souligner les graves problèmes de connexion aux réseaux mobiles que nous rencontrons dans tous nos territoires. La situation se dégrade, et nous sommes moins bien desservis aujourd’hui qu’en 2012.

Enfin, je salue la création du CGET, car cette réorganisation va dans le bon sens.

Mme Jeanine Dubié. Il n’est pas besoin de rappeler l’importance des crédits de la mission « Politique des territoires » dans la période de crise que nous traversons, dans nos quartiers dits « sensibles » comme dans nos territoires ruraux.

Nous constatons une très légère baisse des crédits de la mission, qui participe comme les autres à l’effort de redressement des comptes publics, mais cette baisse des crédits n’est qu’apparente, car d’autres moyens qui ne figurent pas dans les crédits de cette mission sont mobilisés pour la politique des territoires.

C’est une politique par nature transversale et interministérielle, puisqu’elle consiste à soutenir le commerce, l’artisanat, l’agriculture, l’économie de proximité, l’habitat, les services publics ou encore l’accès aux soins. C’est par exemple le cas de l’abondement de 500 millions d’euros pour les collectivités dans les zones rurales, dont 300 millions iront à la revitalisation des centres-bourgs. Ces crédits sont indispensables pour le maintien de l’animation et le développement de ces territoires. Il y a aussi l’augmentation significative de la DETR qui sera poursuivie.

Cette année, les travaux des assises de la ruralité ont abouti à deux comités interministériels aux ruralités. Des dizaines d’autres mesures ont été annoncées et confirmées. Certaines sont déjà en application, comme l’élargissement du PTZ à l’ensemble des communes rurales. D’autres annonces récentes me paraissent intéressantes, comme les mesures en faveur de la formation et de l’incitation à l’installation des médecins : une formation spécifique à l’aide médicale d’urgence pour les zones rurales et l’encouragement de l’installation des médecins en milieu rural pour atteindre l’objectif annoncé de plus de 1 000 maisons de santé en 2017.

Depuis l’année dernière, le programme 147 « Politique de la ville » qui relevait auparavant de la mission « Égalité des territoires et logement » a été transféré à la mission « Politique des territoires ». Cela peut paraître étonnant, d’autant que cette mission a pour objectif principal l’égalité des territoires et que son acteur principal est le CGET. L’organisation budgétaire imposée par la loi organique relative aux lois de finances impose des mouvements de programmes entre les missions : c’est probablement plus cohérent, mais il est parfois difficile de s’y retrouver.

Les crédits du programme 147 correspondent aux évolutions liées à la profonde réforme de la politique de la ville que le Gouvernement a menée avec la loi dite Lamy, loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014. Cette réforme a pour objectif de concentrer l’effort de solidarité nationale sur les quartiers les plus en difficulté, selon des critères objectifs de pauvreté grâce à la fameuse méthode du carroyage. Pour répondre aux critiques traditionnelles de saupoudrage de la politique de la ville, nous avons défini une nouvelle géographie prioritaire. C’est à la fois dommage et heureux pour les quartiers qui sortent du dispositif, mais il faut saluer le courage du Gouvernement qui a mené une réforme que tous les spécialistes appelaient de leurs vœux, mais que personne ne voulait endosser.

Je tiens aussi à saluer le travail de l’ANRU. Cette démarche de rénovation urbaine globale doit favoriser l’implantation de commerces, d’équipements de qualité et encourager la mixité sociale dans ces quartiers.

De manière plus générale, le grand principe d’égalité inscrit dans notre Constitution doit être modulé selon les différences de situation. Cette mission, qui a pour but un développement équilibré et solidaire des territoires, permet donc d’adopter un traitement différencié des territoires en fonction des situations constatées. Nous avons ici des crédits d’intervention en faveur des territoires défavorisés, dans les quartiers en ville comme dans les territoires ruraux. Il s’agit d’assurer une continuité territoriale et de favoriser les leviers de coopération entre ces territoires pour répondre aux besoins et attentes de leurs habitants. À ce sujet, les députés du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste sont très attachés à la présence des services publics – ou de services au public – dans les espaces ruraux et montagnards.

Au titre de la redynamisation des territoires ruraux, le CGET a aussi pour mission de garantir la couverture du territoire par les services publics et les services collectifs. Ainsi, il accompagne les territoires pour la constitution des maisons de services au public dans les zones rurales, afin de réduire les inégalités d’accès et de qualité, que ces services soient assurés par l’État, les collectivités ou des opérateurs de services.

Madame la ministre, le déploiement de 1 000 maisons de services au public d’ici à fin 2016, que vous aviez déjà évoqué l’année dernière lors de l’examen des crédits de cette mission, a été confirmé lors des comités interministériels aux ruralités, et la moitié sera issue du partenariat signé avec La Poste. Pouvez-vous nous expliquer comment ces dispositifs se traduiront dans le PLF 2016, et comment ces MSAP seront-elles réellement financées ? Je veux croire à ce nouvel élan donné depuis deux ans, il semble y avoir un changement de paradigme, et nous constatons une mobilisation et l’implication de nombreux ministères.

Madame la ministre, monsieur le ministre, nous vous faisons confiance et nous voterons les crédits de la mission, mais nous vous encourageons à redoubler d’efforts afin de lutter contre la diffusion du sentiment de déclassement et d’abandon. Les territoires ruraux, vous le savez comme moi, ce sont d’abord les femmes et les hommes qui les font vivre, ils représentent un atout pour notre pays et nous sommes nombreux à pouvoir témoigner de leur potentiel. Ils associent souvent, avec force, qualité de vie, tradition, innovation et solidarité.

M. Gaby Charroux. Les principales priorités de la mission « Politique des territoires » sont la mise en œuvre des contrats de plan État-région de nouvelle génération, les nouveaux contrats de ville signés en 2015 et les mesures décidées dans le cadre des comités interministériels sur la ruralité.

Je voudrais revenir sur les deux premières priorités. Le Gouvernement fait valoir à juste titre que la nouvelle génération des contrats de plan État-région 2015-2020 constitue un enjeu majeur pour l’investissement public et la mise en œuvre d’un partenariat renouvelé entre l’État et les régions. Les CPER ont en effet vocation à favoriser la relance de l’investissement dans les territoires au service de l’emploi. Au regard des enjeux, le chiffre de 12,5 milliards d’euros sur cinq ans n’apparaît pas pharaonique, et moins encore si on le met en regard de l’importante baisse des dotations aux collectivités locales, qui s’élève à 11 milliards d’euros sur trois ans. Ainsi, tandis qu’on ajoute 12,5 milliards d’euros d’un côté, on en enlève 11 de l’autre.

On constate, pour le moins, une contradiction entre la volonté affichée de renforcer l’action conduite par les régions et la baisse globale et considérable des dotations d’État. Ainsi, ma région de Provence-Alpes-Côte d’Azur rencontre quelques difficultés rencontrées pour boucler le CPER.

Dans un tel contexte, on voit mal comment les CPER pourraient jouer leur rôle de catalyseurs des investissements, ou exercer un effet de levier pour élever le niveau d’équipement des territoires, soutenir l’emploi et préparer l’avenir, même s’ils contribuent à la mise en œuvre des fonds européens structurels et d’investissement, dont ils représentent une part importante des contreparties nationales.

La réforme territoriale, que ces contrats de plan accompagnent, n’apporte pas non plus de réponse quant à l’autonomie financière des régions, pas plus qu’elle ne traite de la question d’une réforme fiscale juste.

La métropolisation des territoires et, au-delà, des politiques publiques – je pense par exemple à l’hôpital, avec les groupements hospitaliers de territoire – vont créer des déséquilibres encore plus forts avec ce que les technocrates appellent les « hinterlands » : nous aurons, d’un côté, des territoires soumis à la concurrence internationale avec les métropoles qui capteront les ressources de territoires jusque-là stables et, de l’autre, des zones rurales et périurbaines laissées à l’abandon. C’est la réalité territoriale qui se dessine, alors même que les moyens promis, par exemple, pour la métropole Aix-Marseille-Provence, ne sont pas inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016.

Les collectivités locales assument une part déterminante de la solidarité nationale par le biais des services publics qu’elles développent sur tout le territoire. Elles jouent leur rôle de correctrice des inégalités et sont des atouts irremplaçables de lutte contre la crise et pour l’emploi. Il y a urgence à réorienter l’action tant en matière de réforme territoriale et de solidarité nationale que de réduction de la dépense publique pour élaborer un plan de relance de l’investissement public beaucoup plus cohérent et ambitieux.

Si nous ne négligeons pas l’utilité du Commissariat général à l’égalité des territoires dans son rôle de conception et de mise en œuvre de la politique d’égalité des territoires, d’une part, et de pilotage des politiques contractuelles, d’autre part, force est de constater que les contraintes budgétaires pèsent sur l’efficacité de ses moyens d’action.

C’est vrai, par exemple, du pilotage des nouveaux contrats de ville, qui nous invite à dire quelques mots du comité interministériel Égalité et Citoyenneté qui s’est réuni aux Mureaux le 26 octobre. À cette occasion en effet, le Premier ministre a fait le point sur les mesures annoncées il y a six mois, pour lutter contre le phénomène de ghettos urbains et a annoncé de nouvelles mesures de lutte contre les ségrégations. Il a également annoncé, pour 2016, un projet de loi sur le logement qui fixera de nouvelles règles.

Les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine se retrouvent dans un certain nombre de ces propositions, que nous approuvons, même si l’emploi dans les quartiers populaires reste le grand absent de cet ensemble de mesures. Nous ne comprenons toujours pas pourquoi certains quartiers sont sortis du dispositif, alors que d’autres mesures, conduites par l’ANRU par exemple, sont en cours. Nous avons appris à douter des effets d’annonce : pour nombre des 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville, la baisse des dotations sera une dure réalité, d’autant qu’elle s’accompagne d’une baisse des crédits budgétaires, puisque les autorisations d’engagement et les crédits de paiement demandés pour 2016 semblent reculer globalement de près de 12 millions d’euros.

Les avancées obtenues pour augmenter la solidarité nationale, avec la DSU et la solidarité intercommunale avec le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), ne doivent pas servir, selon nous, à compenser la baisse des dotations. Cela pose encore une fois un problème de cohérence entre les ambitions affichées dans le budget des missions concernées et les moyens effectivement mis en œuvre.

M. Régis Juanico. Monsieur Kanner, pourriez-vous dresser un premier bilan des mesures fiscales votées en loi de finances rectificatives pour 2014, en faveur des commerces de proximité dans les 1 500 quartiers prioritaires de la ville, à compter du 1er janvier 2015 ? Je pense à la cotisation foncière des entreprises (CFE), à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et à la taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB).

S’agissant du sport, vous avez signé la circulaire du 25 mars 2015 relative à l’intégration des enjeux et de la place du sport au sein des contrats de ville. À défaut d’un premier bilan, une première évaluation est-elle possible ? Je souhaiterais avoir quelques éclaircissements sur le plan « Citoyens du sport », le nombre d’éducateurs sportifs engagés, la mise en œuvre du programme « J’apprends à nager » et du plan d’accès aux métiers du sport, le plan Sésame. Qu’en est-il également de l’offre pratique mixte, notamment lorsqu’elle est encadrée dans les clubs, ou encore de l’intégration des activités physiques et sportives dans les parcours de découverte multi-activités ?

S’agissant des équipements sportifs, au-delà de leur financement par le Centre national pour le développement du sport (CNDS), l’ANRU est-elle d’ores et déjà mobilisée pour leur création ou leur rénovation ? Les crédits de droit commun peuvent-ils y être employés, comme la DETR, les programmes d’investissement d’avenir (PIA) et le fonds intercommunal doté de 1 milliard d’euros ?

Par rapport aux critères de localisation des clubs sportifs dans le périmètre des quartiers prioritaires de la ville, les services déconcentrés de l’État disposent-ils d’une marge d’appréciation lorsqu’il s’agit d’implanter un nouvel équipement, en prenant par exemple en considération le fait qu’il puisse accueillir un public défavorisé ?

Mme Valérie Lacroute. Au moment où l’inquiétude grandit dans les territoires ruraux, le budget de la mission « Politique des territoires » ne va pas forcément les rassurer. En 2016, c’est une nouvelle baisse de 52 millions d’euros qui se profile, affaiblissant un peu plus la politique d’aménagement du territoire, qui est pourtant censée réduire les inégalités entre ville et campagne.

Aujourd’hui, le risque de fracture territoriale est bien réel. Chaque jour, le monde rural a un peu plus le sentiment d’être abandonné. Il s’est accru avec la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe), qui a créé les métropoles. Il s’est accru avec la baisse des dotations aux collectivités, dont les conséquences sur l’investissement et l’emploi local sont désastreuses. Cet abandon se nourrit aussi de la création incessante de nouvelles taxes, comme la taxe diesel, dont chacun sait qu’elle frappera davantage les ruraux qui n’ont pas accès aux transports en commun des centres-ville.

Vous affichez des objectifs ambitieux. Vous voulez redynamiser les territoires ruraux, lutter contre les fractures territoriales. Ces objectifs sont louables, mais les moyens ne suivent pas. En ces temps de rigueur budgétaire, il faut davantage cibler les dispositifs sur les territoires les plus fragiles, notamment hyper-ruraux, et éviter la fâcheuse tendance au saupoudrage.

Pourquoi ne pas créer des contrats ruraux de cohésion territoriale, à l’image de ce qui se fait pour la politique de la ville ? Cela permettrait de passer d’une logique de guichet à une logique de projet et d’apporter l’ingénierie qui fait parfois défaut au niveau local. Aujourd’hui, ce sont des signes forts qu’attendent les élus et les populations rurales.

Mme Marie-Noëlle Battistel. Sur le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire », l’une des priorités du CGET sera de desservir 100 % de la population en services de télécommunications fixes et mobiles et de faire du numérique une chance pour les territoires les plus fragiles. Le comité interministériel aux ruralités du 13 mars 2015 a d’ailleurs défini plusieurs mesures dans ce domaine, dont certaines ont déjà fait, durant le premier semestre 2015, l’objet d’une mise en œuvre opérationnelle.

Je pense à la résorption des zones blanches de la 2G et de la 3G : les dispositions législatives ont été prises dans le cadre de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, de manière à obliger les opérateurs à achever la couverture des centres-bourgs en 2G avant fin 2016 et en 3G avant mi-2017. Mais le déploiement du très haut débit mobile, ou 4G, doit être prioritaire en montagne. Il était question de créer un fonds spécifique pour la couverture numérique des territoires isolés. Où en est-on aujourd’hui ?

L’ouverture d’un guichet de couverture mobile devait répondre aux besoins locaux spécifiques en dehors des centres-bourgs. Pouvez-vous faire un point sur ce sujet ?

M. Michel Heinrich. Je voudrais vous faire part d’une préoccupation relative à la mise en œuvre du NPNRU au niveau régional. Les dossiers sont très complexes et très longs à élaborer. Cela me semble tout à fait disproportionné étant donné l’importance des sommes en jeu. Le démarrage des travaux s’en trouve en tout cas retardé.

Par ailleurs, alors que tout le monde s’accorde à dire que l’emploi et l’activité économique ne se développeront qu’à travers l’innovation et la recherche, je me demande pourquoi il n’y a pas de volet relatif à la PAT dans le programme correspondant.

M. François Pupponi. Monsieur Kanner, la réforme de la DGF, plutôt favorable aux communes de banlieue, étant repoussée à 2016, comment vont-elles faire pour se financer ? Elles se heurtent en effet à des difficultés, à la suite de la baisse générale des dotations, dont les effets ne sont pas, pour elles, amortis par une péréquation, au motif que la réforme de la DGF devait remplir cette fonction. D’ores et déjà, elles ne peuvent faire face à leurs obligations, telles qu’elles sont consignées dans le NPNRU, faute de pouvoir accompagner l’ANRU par des cofinancements de projets qui varient entre 20 % et 40 %.

M. Yannick Favennec. Endiguer la fracture numérique en améliorant l’offre fixe et mobile est l’un des objectifs de la mission « Politique des territoires ». Pour que nos concitoyens et les entreprises puissent tous bénéficier d’un service de téléphonie mobile devenu indispensable dans leurs activités quotidiennes, le Gouvernement s’est engagé, au printemps dernier, à prendre les mesures nécessaires pour que tous les centres-bourgs disposent d’un service de téléphonie mobile d’ici à la fin de 2016.

Je me réjouis naturellement de cette volonté affichée. J’espère seulement qu’il ne s’agit pas d’un simple effet d’annonce, car il est essentiel que notre pays mette un terme aux graves insuffisances de la couverture numérique, qu’elle soit fixe ou mobile, dans les territoires ruraux. C’est un enjeu d’égalité et d’aménagement des territoires dont l’État a la responsabilité. Comme élu de la Mayenne, je constate au contraire une dégradation de la qualité de service. Nos concitoyens, habitants des territoires ruraux, déplorent de ne pouvoir bénéficier des mêmes facilités numériques que ceux qui vivent dans des zones plus urbanisées.

En matière de couverture en téléphonie mobile, un recensement devait être effectué par les préfets de région pour la fin de l’été 2015, afin d’actualiser la liste des communes concernées par le plan de résorption des zones blanches. Pouvez-vous m’indiquer dans quel délai sera dévoilée cette liste des communes qui bénéficieront en priorité du mécanisme permettant de couvrir les zones où, même lorsque le centre-ville ou le centre-bourg est couvert, aucune réception n’est possible ?

Le ministre de l’économie a récemment réuni les opérateurs de téléphonie mobile pour un point d’étape. Pouvez-vous nous apporter des informations sur l’état d’avancement du programme de couverture des zones blanches en téléphonie mobile ?

Le projet de taxe visant à financer l’audiovisuel public, annoncé par la ministre de la culture et de la communication, ne risque-t-il pas d’avoir des conséquences sur l’engagement des opérateurs ?

Enfin, où en est l’avancement du plan France Très haut débit ? Quel est son calendrier prévisionnel ?

M. Alain Fauré. Élu de l’Ariège, je veux d’abord souligner que la PAT y a permis l’implantation d’une entreprise qui a créé une centaine d’emplois. Combien de dossiers prévoit-on en 2016 ? Va-t-on pouvoir accompagner l’implantation de nouveaux emplois de manière aussi efficace qu’en 2015 ?

Ensuite, je m’interroge au sujet des bassins d’emploi à redynamiser (BER). Il en existe un en Ariège et un autre dans les Ardennes, qui avaient connu des saignées très importantes en raison de la suppression d’emplois dans le secteur du textile. Ces bassins sont-ils efficaces et, si tel est le cas, seront-ils maintenus dans les années à venir ?

M. Jean-Claude Mathis. Je souhaite vous interroger sur les actions envisagées dans le cadre du budget 2016 de la mission « Politique des territoires » en faveur de l’égalité des territoires. Plus particulièrement, je voudrais attirer votre attention sur les mesures visant à améliorer la qualité de vie des habitants en zone rurale, en assurant l’égalité d’accès aux soins partout en France.

Lors du comité interministériel aux ruralités du 14 septembre 2015, le Président de la République a fait part d’un objectif ambitieux dans le volet santé : en 2017, tous les Français devront pouvoir être pris en charge en moins de trente minutes dans les situations les plus graves et urgentes. Il a ainsi annoncé qu’il souhaitait signer 1 700 contrats pour favoriser l’installation de jeunes médecins, atteindre 1 000 maisons de santé en service d’ici à 2017 et former 700 médecins correspondants du SAMU.

Au-delà de déclarations d’intention louables, quelles actions concrètes le Gouvernement entend-il mettre en place dans le cadre du budget 2016 pour remplir ces objectifs ?

M. Pierre Morel-A-L'Huissier. Je souhaite attirer votre attention sur deux problématiques essentielles d’accès aux services des populations en zone rurale.

Le premier point concerne le réseau des lignes de téléphonie fixe, dont la gestion est du ressort d’Orange. Dans mon département, la Lozère, comme dans de nombreuses autres zones rurales, l’entretien de ces lignes est laissé à l’abandon, ce qui entraîne des dysfonctionnements récurrents pour les usagers. La qualité de service qui leur est due contractuellement n’est pas assurée, et cela a des répercussions, non seulement sur les communications téléphoniques, mais également sur d’autres dispositifs tels qu’internet, les télécopies, les services de téléassistance, les paiements par carte bleue…

Suite aux nombreuses plaintes qui m’ont été transmises par les usagers, j’ai saisi Stéphane Richard, qui s’est abrité derrière ces considérations agacées : Orange veille sur un réseau qui représente 1 million de kilomètres d’artères de câbles, soit l’équivalent de vingt-cinq fois le tour de la Terre, 15 millions de poteaux et 16 000 nœuds de raccordement. S’il ne sait pas gérer ces infrastructures, qu’il le dise !

Le Gouvernement s’est fixé pour priorité de garantir l’égalité d’accès aux services et d’assurer la mise en réseau des territoires. Ces objectifs font largement écho à la problématique d’abandon des lignes fixes en zone rurale. C’est pourquoi je vous demande ce que vous comptez faire vis-à-vis d’Orange qui n’entretient pas correctement son réseau.

Le deuxième point que je souhaite aborder concerne les maisons de services au public, qui ont été créées pour répondre aux besoins de proximité des usagers. Je salue l’effort du Gouvernement en la matière, qui a fixé un objectif de déploiement de 1 000 MSAP d’ici à fin 2016, contre 363 existantes aujourd’hui. Outre ce maillage territorial resserré, il s’est également fixé un objectif de diversification du contenu et de l’offre des MSAP, qui se traduirait par un accroissement du nombre d’opérateurs partenaires. Pouvez-vous préciser quel budget de fonctionnement vous comptez allouer à ce réseau ?

M. Guillaume Chevrollier. L’examen de la mission « Politique des territoires » montre une fois de plus le fossé qui sépare les promesses des réalisations. Élu d’une circonscription rurale, je constate chaque semaine l’inquiétude des habitants pour leur avenir et à quel point la parole gouvernementale, plutôt tournée vers les métropoles et le Grand Paris, est déconnectée de la réalité. Je voudrais insister sur l’importance du plan France Très haut débit, capital pour l’avenir des territoires ruraux et pour les agriculteurs, qui aimeraient que vous preniez des engagements concrets en la matière.

Madame la ministre, vous avez dit que l’extension du prêt à taux zéro dans l’ancien doit favoriser la rénovation et permettre de lutter contre l’étalement urbain. Je crois plutôt l’instabilité normative et fiscale bloque de nombreux investissements. Il eût sans doute été préférable de fixer des objectifs clairs à la politique du logement sur la durée du quinquennat.

M. Arnaud Viala. Il a été dit à juste titre que la mission « Politique des territoires » relève d’une action interministérielle. Je constate quant à moi que ce budget relève d’une supercherie. La hausse de la DETR ne saurait compenser la forte baisse des dotations aux blocs communal et départemental, car les collectivités territoriales ne seront plus en mesure de solliciter leur mise en œuvre, faute de capacité propre d’investissement.

J’en viens à ce que j’appellerai la « double peine ». Certains territoires, non contents de subir un recul des services publics, doivent financer par eux-mêmes les maisons de service au public, les maisons de santé ou les ateliers relais pour les commerçants et artisans. Dans le domaine du numérique, la mise en œuvre du plan France Très haut débit contraint le contribuable local à payer davantage, outre l’abonnement dont il doit s’acquitter auprès de son opérateur. Pourtant, même cet effort fiscal en leur faveur ne fait pas toujours venir les opérateurs.

M. Gabriel Serville. Madame la ministre, depuis 2012, je n’ai manqué aucune commission ou séance consacrée au budget de la politique des territoires, de la ville ou à ceux relatifs à l’égalité des territoires, et je n’ai eu de cesse de regretter les arbitrages qu’avaient faits en la matière les gouvernements successifs. Aussi serez-vous peut-être surprise de la teneur de mon propos de ce soir, puisque je tiens à saluer ce budget que vous nous présentez, qui, s’il accuse une légère baisse dans sa globalité, reste très favorable à la Guyane que je représente. De là à penser que vous avez fini par entendre mes appels, il y a un pas que je serai tenté de franchir.

Les crédits du programme « Politique de la ville » sont sanctuarisés et ceux du programme « Impulsion et coordination de la politique d’aménagement du territoire » en forte hausse, pour des engagements en hausse de 28 % sur le triennal pour la mission dans sa globalité. Cette hausse, bienvenue, car les besoins sont immenses, est à attribuer à la montée en puissance du dispositif de la prime d’aménagement du territoire. Aussi, un an après la mise en place de ce dispositif d’aide direct aux entreprises en faveur du maintien des emplois locaux, vous serait-il possible de nous en livrer un premier bilan ?

M. André Chassaigne. Je voudrais mettre en regard les mesures arrêtées au comité interministériel aux ruralités du 14 septembre 2015 et les propositions formulées par l’association Nouvelles ruralités.

Elle souhaite en effet le maintien et le développement de l’économie de proximité sous toutes ses formes – économie circulaire et collaborative, artisanat, commerce, agriculture, économie sociale et solidaire –, en proposant des mesures d’accompagnement local des entrepreneurs et grâce à la création d’un guichet unique départemental. Le nouveau zonage de revitalisation rurale permettra-t-il de la soutenir dans cette démarche, et sous quelle forme ? Le comité interministériel a annoncé qu’il serait plus juste et plus simple. Je relève une contradiction entre la nécessité de créer ces guichets uniques départementaux et le transfert aux régions de la compétence économique tel qu’il est prévu par la loi NOTRe.

Deuxième proposition de l’association Nouvelles ruralités : assurer une proximité minimale départementale pour les populations, entreprises, services publics, avec l’implantation et le développement d’équipements au service d’intérêts régionaux. Une mesure du comité interministériel aux ruralités prévoit d’« assurer davantage de cohérence dans les évolutions des réseaux de services publics dans les territoires ». Comment assurer cette cohérence dans des régions fusionnées où seront supprimées des directions régionales – agences régionales de santé (ARS), directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE), voire, dans quelques années, des rectorats ?

Mme Sylvia Pinel, ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité. Monsieur Bricout, le Gouvernement veut donner aux centres-bourgs les moyens de leur attractivité. Grâce aux crédits d’ingénierie du FNADT et de l’ANAH, en 2014, ce sont cinquante-quatre communes de moins de 10 000 habitants qui ont déjà reçu un soutien dans le cadre d’une première expérimentation. Ils ont été employés à la voirie, puisqu’il s’agit de crédits d’ingénierie. Pour amplifier ce mouvement, au deuxième comité interministériel aux ruralités tenu cette année, une enveloppe de 300 millions d’euros supplémentaires a été accordée à la revitalisation des centres-bourgs. Des communes de plus de 50 000 habitants pourront également engager des actions transversales. Les préfets de région en définiront les modalités avec les collectivités. Les premières subventions seront versées dès les premiers mois de 2016.

La transversalité que nous recherchons fait que nous ne prêtons pas seulement attention à l’espace public et aux services publics, mais aussi aux logements et aux commerces. Les volets territoriaux des CPER permettent précisément de promouvoir l’attractivité des centres-bourgs. Dans de nombreux territoires, les politiques régionales sont également complémentaires de l’action de l’État.

L’implantation des maisons de services au public se fait de manière souple. Engagée avec le concours de différents opérateurs, elle s’appuie toutefois plus particulièrement sur un partenariat ambitieux avec La Poste. J’ai voulu que les préfets jouissent de la souplesse nécessaire pour définir, avec les élus et les opérateurs, en fonction des besoins locaux, des schémas d’accessibilité et des stratégies poursuivies, la localisation la plus pertinente.

Quand les opérateurs s’engagent à être présents, cela ne signifie pas qu’ils sont constamment sur place. La Caisse d’allocations familiales assure des permanences, mais n’emploie pas sur place quelqu’un en permanence. Grâce aux moyens numériques, des points visio-public permettent également de courts entretiens, qui évitent de longs et coûteux déplacements.

S’agissant de la complexité des dossiers, je souligne que les lauréats des appels à candidatures en matière d’aménagement des centres-bourgs sont parfois des communes très modestes, alors que de plus grandes ne sont pas retenues. Ces expériences prouvent que les procédures peuvent donc être utiles aux territoires qui en ont besoin et qui savent se donner les moyens nécessaires.

En tout état de cause, je n’accepterai pas les faux semblants. J’entends les leçons de députés de l’opposition qui parlent d’un sentiment d’abandon, mais ce sentiment n’est-il pas plus ancien que 2012 ? Ne date-t-il pas de l’époque où fermaient les classes, les commissariats, les administrations ? Grâce à des mesures innovantes telles que les MSAP, nous tentons de réparer ce que vous aviez alors sacrifié.

J’entends du reste une contradiction entre les propos de Mme Lacroute, qui demande que l’on sorte de la logique du guichet pour entrer dans celle du projet, et ceux de M. Chrétien, qui, dans nos appels à projets, voit des usines à gaz. Nous nous engageons, quant à nous, aux côtés des régions, des communes et des intercommunalités, dans le cadre des contrats de plan, pour agir sur la mobilité, sur la transition énergétique et écologique, sur le numérique, sur l’innovation et sur les filières d’avenir, sur l’enseignement supérieur, sur les usines du futur, sur le volet territorial des contrats de plan, en essayant d’avoir une vision globale et transversale.

De nombreuses questions concernaient l’accès au numérique et à la téléphonie mobile, qui constitue une priorité pour les élus locaux et pour nos concitoyens. Nous cherchons à accélérer le raccordement des territoires ruraux au très haut débit, afin de répondre aux besoins des populations les plus mal desservies. Les collectivités sont encouragées à mener des actions complémentaires au déploiement de la fibre optique jusqu’à l’abonné. Le cahier des charges du plan France Très haut débit a été revu en ce sens. Des améliorations sont déjà enregistrées dans 30 000 communes de moins de 2 000 habitants, totalisant 8,5 millions de lignes. Parmi elles, 710 000 sont devenues éligibles au très haut débit, dont 530 000 grâce au réseau satellitaire.

Une dynamique est donc engagée sur l’ensemble du territoire. Les zones d’initiative publique y seront bientôt couvertes aussi bien que les zones les plus denses. À l’échelle nationale, la couverture en très haut débit est passée de 27,1 % fin 2012 à 44,3 % en juin 2015. Dans les zones rurales, la couverture en très haut débit est passée de 2 % à 24 % dans les zones d’initiative publique.

À ce stade, quatre-vingt-sept départements sont engagés dans le plan France Très haut débit. L’État a déjà versé 1,5 milliard d’euros de subventions. Il mobilise les moyens de l’Agence du numérique pour finaliser un programme d’investissement sur l’ensemble des 101 départements en 2015. Par la contractualisation, l’objectif de la couverture en très haut débit pour l’ensemble des Français sera tenu en 2022. Grâce à de meilleures capacités satellitaires, dans les zones enclavées, notamment en montagne, ce sont 150 000 foyers de plus qui seront couverts dès 2018.

La loi pour la croissance et l’activité a pris en compte l’engagement formulé au comité interministériel du mois de mars pour améliorer la couverture en téléphonie mobile dans les zones les plus rurales. Les quatre opérateurs se sont engagés à couvrir les 3 300 centres-bourgs restants du programme de résorption des zones blanches 2G, ainsi que les dernières communes identifiées dans le cadre d’un recensement en cours par une couverture en téléphonie mobile d’ici à la fin de l’année 2016 et l’ensemble des 3 600 centres-bourgs non couverts en 3G par un accès mobile à internet d’ici à la mi-2017. Pour assurer l’application de ces deux mesures, la loi a renforcé le pouvoir de sanction de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) en cas de non-respect des engagements des opérateurs.

Début novembre, un guichet unique a été mis en place pour soutenir les projets de couverture en dehors des centres-bourgs. Il permettra de traiter les demandes des collectivités locales au fil de l’eau. Grâce à un cofinancement par l’État, les opérateurs mobiles se sont engagés à raccorder 800 sites sur quatre ans.

Enfin, l’amélioration de la couverture à l’intérieur des logements constitue une dernière priorité.

Les primes à l’aménagement du territoire constituent le dernier régime d’aides d’État autorisé au bénéfice des entreprises. J’ai toujours soutenu son maintien et j’ai signé un décret qui abaisse les seuils d’éligibilité, pour qu’elles soient plus accessibles aux PME. Un document de communication simple a été publié, afin que chaque acteur puisse se saisir de la prime. Je ne peux que vous inciter, mesdames et messieurs les députés, à le diffuser auprès des entreprises de vos territoires.

Les crédits alloués à la PAT restent stables, à 25 millions d’euros. C’est l’équivalent des crédits disponibles cette année, à la suite des différentes annulations intervenues en gestion pour financer les mesures de lutte contre le terrorisme. Nous avons constaté que les entreprises ont besoin de temps pour s’adapter aux nouveaux critères. Néanmoins, l’ensemble des crédits prévus au budget devraient être consommés d’ici à la fin de l’année. Grâce à ce dispositif, vingt-cinq dossiers ont été primés, pour un montant total d’aides de près de 14 millions d’euros et un volume de 1 733 créations d’emplois.

Les opérateurs financent les maisons de services au public, en 2015, à travers le fonds interopérateurs, à hauteur de 4,8 millions d’euros, soit le même montant que pour l’État, via le FNADT et l’abattement fiscal supplémentaire consenti à La Poste. Les collectivités apportent quant à elles 9,6 millions d’euros, par des financements directs aux maisons classiques ou, pour les maisons portées par La Poste, par le biais du fonds postal national de péréquation territoriale.

En 2016, ces valeurs s’établiront respectivement à 7,28 millions d’euros pour les opérateurs, à 7,28 millions pour l’État – dont une partie par le biais du FNADT et l’abattement fiscal de La Poste –, et à 14,5 millions d’euros pour les collectivités, soit directement, soit par le biais du fonds postal de péréquation. En 2017, pour 1 000 maisons en fonctionnement, 9,5 millions seront apportés par les opérateurs et 9,5 millions par l’État.

À M. Mathis, je confirme que la santé constitue un enjeu majeur, qui préoccupe particulièrement nos concitoyens et les élus locaux. Aussi 1 000 maisons de santé seront-elles mises en service en 2017, alors que seules 170 fonctionnaient en 2012 ; 1 700 contrats d’engagement de service public seront passés avec des étudiants ou des médecins internes d’ici à 2017 afin d’inciter les jeunes professionnels à s’installer en milieu rural. Par ailleurs, 700 médecins correspondants du SAMU seront formés à l’aide médicale d’urgence avant 2017.

En ce qui concerne la réforme des ZRR, je répète que, pour son application au 1er juillet 2017, nous nous fondons sur des critères simples de densité et de revenu. Afin de prendre en compte la modification des périmètres des intercommunalités, nous avons entrepris une consultation avec des associations d’élus. Les principaux bénéfices attendus de ce zonage en matière d’exonérations fiscales et de charges sociales seront maintenus.

Vous avez aussi évoqué l’association Nouvelles ruralités, que je rencontre régulièrement et avec laquelle nous travaillons depuis les assises des ruralités ; nombre de leurs propositions ont été reprises, comme vous avez pu le voir dans le document relatif aux deux comités interministériels publiés par le Gouvernement.

M. Dominique Baert, vice-président de la commission des finances, remplace M. Gilles Carrez à la présidence.

M. Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports. Avant de répondre aux questions, je donnerai un exemple au sujet du développement du très haut débit. J’ai eu le privilège de présider le conseil général du plus grand département rural de France, celui du Nord, où vivent 600 000 habitants en secteur rural. Présidant encore aujourd’hui le syndicat mixte du très haut débit 59/62, je puis vous dire que l’Agence française du numérique, dans le cadre du plan de développement du très haut débit, m’a accordé 181,1 millions sur 700 millions d’euros de projet porté par des collectivités territoriales avec, pour objectif, le financement de 700 000 prises dans l’actuelle région Nord-Pas-de-Calais.

Je confirme que le CGET regroupe désormais la DATAR, le SG-CIV et l’Acsé ; nous renouons avec l’ambition de mettre en œuvre le développement équilibré et durable des territoires avec un point d’entrée unique pour l’élaboration et l’application de la politique de la ville. Ce regroupement a des effets bénéfiques, en termes de mutualisation des compétences des services de l’État et aussi de rationalisation immobilière des trois implantations originelles puisque, aujourd’hui, toutes les équipes du CGET sont regroupées dans le site Pleyel à Saint-Denis. Outre les économies d’échelle ainsi réalisées, les services de l’État ont gagné en efficacité.

Dominique Baert m’a interrogé au sujet des interventions de l’ANRU, de l’EPARECA et de l’Agence France Entrepreneur et de leur complémentarité. Je rappelle que l’ANRU, l’EPARECA et la Caisse des dépôts coordonnent leur action dans le domaine du développement économique, plus particulièrement dans celui de l’immobilier d’entreprise. De son côté, la nouvelle Agence France entrepreneur s’appuie sur l’État, les régions, la Caisse des dépôts et, plus largement, sur les entrepreneurs, telle Bpifrance ; elle apportera une meilleure efficacité, même si je dois vous concéder que nous sommes au début de la procédure et que des moyens humains et financiers restent à venir.

Mme Maquet a évoqué le remplacement de l’Observatoire national des zones urbaines sensibles (ONZUS) par l’Observatoire national de la politique de la ville, créé par un décret pris à la fin du mois de juin 2015 et qui sera installé avant la fin de l’année. Afin de donner à l’observation toutes ses lettres de noblesse, nous allons concentrer nos efforts et je m’engage à ce que les moyens humains et financiers soient les mêmes que ceux de l’ONZUS avec, toutefois, plus d’efficacité.

M. Charroux s’est félicité des mesures prises par le CIEC, créatrices d’emplois et promoteurs d’actions nouvelles dans les quartiers alors que j’ai perçu dans son propos une inquiétude au sujet, précisément, de l’emploi. Ces mesures existent : pourquoi vouloir en créer de nouvelles ? Nous disposons d’ores et déjà d’un arsenal pour les publics prioritaires de la ville, avec, notamment, l’emploi aidé. Un bilan complet a été établi et il n’y a rien de mal à attribuer prioritairement ces emplois aux quartiers prioritaires, tant il est vrai que l’emploi est distributeur de richesses.

M. Charroux a évoqué des baisses de dotations. Nous n’avons pas la même lecture, puisque l’on assiste à une hausse historique de la péréquation depuis 2012 : plus 40 % de DSU en 2016, soit 1,91 milliard d’euros. Par ailleurs, le FPIC a compensé la baisse des dotations pour les communes les plus pauvres : c’est là une augmentation inédite des crédits de la politique de la ville. Et n’oublions pas les 5 milliards d’euros nouveaux pour l’ANRU 2 qui intéresse 1 500 quartiers, contre 2 500 auparavant, mais concentrant les moyens du NPNRU.

M. Juanico m’a interrogé au sujet de la mise en œuvre de l’exonération de fiscalité pour les petits commerces de fiscalité, en demandant un bilan. Les services de la gestion fiscale de la Direction générale des finances publiques ont indiqué que 7 462 demandes d’exonération ont été adressées au titre de l’année 2015. Ce chiffre est d’autant plus encourageant que l’instruction n’est parue que le 19 juin, ce qui illustre l’intérêt des petites entreprises et des petits commerces pour cette mesure fiscale.

M. Juanico a également évoqué le problème de la localisation des clubs dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) pour les dispositifs du plan « Citoyens du sport ». Je confirme que c’est bien le critère du public défavorisé qui est pris en compte et non pas la localisation ès qualités en QPV.

En ce qui concerne la mobilisation des politiques sportives en direction des quartiers, hors équipements sportifs, je voudrais rappeler que 25 % des crédits du Centre national pour le développement du sport (CNDS) vont aux territoires prioritaires, soit 30 millions d’euros en 2014, dont 20 % des aides aux clubs alloués à des clubs de quartier, soit 15 millions d’euros, et que 12 % du total des emplois aidés par le CNDS sont dans ces quartiers.

Concernant les équipements sportifs, une meilleure articulation a été recherchée. Lors du conseil d’administration du CNDS de mars dernier, une délibération a été adoptée pour limiter son champ d’intervention aux QPV et aux ZRR, qui rassemblent 11 millions d’habitants, soit un habitant sur six. C’est pour éviter le saupoudrage que le bénéfice de ce financement est exclu dans les QPV en zone ANRU, cette dernière prenant en charge les équipements sportifs dans les secteurs concernés par son intervention.

Vous avez aussi évoqué la dotation d’équipement des territoires ruraux. Cette enveloppe est maintenue à un niveau important au sein de l’enveloppe de 1 milliard d’euros consacrée au fonds de soutien aux collectivités locales. Après sa progression de l’an dernier, il est important que la DETR soit mieux mobilisée. Les préfets jouent le jeu en ciblant les équipements sportifs dans les priorités de la DETR, et, si ce n’était pas le cas, je veillerais dans mes discussions avec Bernard Cazeneuve et Marylise Lebranchu à ce que la note d’instruction relative à la DETR 2016 soit bien précisée sur cette question.

M. Heinrich a évoqué la complexité des projets d’intérêt régional dans le cadre de l’ANRU. Je répète les éléments que j’ai donnés à M. Baert : nous avons simplifié la procédure puisque, en deçà de 7 millions d’euros, les projets restent traités au niveau régional. La logique d’élaboration des projets est la même pour la qualité des projets, notamment grâce aux protocoles de préfiguration et à la convention concernant la mise en œuvre des études, le tout étant financé à hauteur de 1 milliard d’euros d’avances de trésorerie par la Caisse des dépôts et consignations.

Monsieur Pupponi, vous avez souligné le report de la réforme de la DGF qui a été confirmé par le Premier ministre il y a quelques heures. Comment réagir pour préserver les 250 communes les plus pauvres de notre pays ? En 2015, la péréquation a connu une augmentation historique qui a permis de compenser la baisse des dotations pour les communes les plus pauvres, notamment grâce à un amendement que vous connaissez bien. En 2016, ces 180 millions d’euros sont gravés dans le marbre du PLF pour la DSU. Le FPIC augmente de 220 millions d’euros pour atteindre un milliard d’euros. La dotation politique de la ville (DPV) sera renouvelée à hauteur de 100 millions d’euros. Nous devrons donc nous assurer que ces dispositifs seront suffisants et concentrés pour éviter les baisses de dotation en direction des collectivités les plus pauvres, dans le cadre de la contribution au redressement des finances publiques.

Vous avez aussi soulevé la question de la répartition des subventions s’agissant de l’ANRU. Les critères de répartition intègrent la capacité des maîtres d’ouvrage à porter des projets, et j’espère que l’ANRU donnera plus à ceux qui ont moins : c’est aussi un rôle de péréquation que vous portez en votre qualité de président de cet organisme extrêmement important.

Nous avons évoqué l’outre-mer. Monsieur Serville, je répondrai à une question que vous ne m’avez pas posée, car je voudrais préciser que la politique de la ville s’adresse aussi aux outre-mer, j’y veille fortement à titre personnel. Il s’agit de l’une des principales politiques publiques en direction de l’outre-mer : 200 quartiers prioritaires ont été identifiés dans la nouvelle géographie, qui regroupent 600 000 habitants. Plus d’un habitant de quartier prioritaire de la politique de la ville sur dix est ultramarin. Quarante-trois des quarante-sixcontrats de ville sont signés, ce qui prouve l’avancée de ce dossier.

Les crédits ANRU ont progressé pour vingt-deux sites ultramarins, puisqu’ils représentaient 3,5 % des subventions dans l’ANRU 1, contre 10 % à l’avenir. Cela montre les besoins de l’outre-mer en la matière, mais aussi la réponse publique que nous apportons.

Pour conclure, je tiens à dire que les banlieues méritent attention et respect. Il ne faut pas les désespérer par des propos qui peuvent blesser. Quand je lis qu’un ancien président de la République a déclaré, lors du dîner du club Choiseul 100 : « Les banlieues doivent arrêter de culpabiliser la France » et que les ruraux, eux, « n’ont pas brûlé les abribus et pourtant ils crèvent », je tiens à souligner que ce n’est pas en opposant secteur rural et secteur des banlieues que nous ferons progresser la République.

M. Dominique Baert, président. Madame la ministre, monsieur le ministre, nous vous remercions.

La réunion de la commission élargie s’achève à vingt heures vingt.

Le Directeur du service
des comptes rendus des commissions,

Nicolas VÉRON

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