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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du mercredi 19 juin 2013

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Marc Le Fur

1. Transparence de la vie publique

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion des articles (suite)

Article 10 (suite)

Amendement no 105

M. Jean-Jacques Urvoas, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Amendements nos 104, 373, 400, 131, 103, 125, 374, 401, 148, 124, 212 rectifié, 149, 82, 318, 230, 304, 310, 93, 123, 94, 91

Rappel au règlement

M. Jean-Charles Taugourdeau

M. le président

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur

M. Alain Vidalies, ministre délégué

Article 10 (suite)

Amendements nos 165, 372, 376, 410, 326, 208, 209, 332, 328, 83

Après l’article 10

Amendements nos 144 rectifié, 404 rectifié, 335

Article 11

Amendements nos 190, 16, 54, 101 rectifié, 17, 203, 157, 162, 232, 55

M. le président

M. Alain Vidalies, ministre délégué

M. Hervé

Amendements nos 213, 87, 313, 84, 100, 223, 306, 136, 159, 137, 307, 7, 99, 308

Après l’article 11

Amendements nos 47 rectifié, 169 rectifié

Article 11 bis

Amendements nos 115, 114

Article 11 ter

Mme Axelle Lemaire

Amendements nos 113, 85, 56

Après l’article 11 ter

Amendements nos 178, 48, 176, 321, 324, 320, 323, 59, 58, 46, 177, 388, 57, 130 deuxième rectification, 234, 371 deuxième rectification

Article 12

Amendements nos 227, 164, 129, 168, 192, 9, 8, 86, 167, 80, 193, 166, 194

Article 13

Amendements nos 49, 10, 11, 12, 139, 173 rectifié

Article 14

Amendements nos 134, 152

Article 15

Amendements nos 88, 172 rectifié

M. Hervé Morin

Après l’article 15

Amendement no 50

Article 16

Amendements nos 171, 19

Article 17

Amendements nos 132, 89

Après l’article 17

Amendements nos 23, 28, 29, 24, 26, 25, 20, 160 rectifié, 21, 27, 22, 30

Article 18

Amendements nos 135, 224, 309, 143, 195

Après l’article 18

Amendement no 60

Article 19

Amendements nos 219, 382, 394, 52, 380 rectifié, 225, 386

Article 19 bis

Amendement no 392

Article 20

Amendements nos 170, 53

Article 21

Amendement no 92

Articles 22, 22 bis et 23

Après l’article 23

Amendement no 95 rectifié

Article 24

Amendement no 145

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Le Fur
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Transparence de la vie publique

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif à la transparence de la vie publique (nos 1005, 1109).

Discussion des articles (suite)

M. le président. Cet après-midi, l’Assemblée a commencé l’examen des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 10.

Article 10 (suite)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour présenter l’amendement n° 105.

M. Jean-Jacques Urvoas, président et rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, pour donner l’avis du Gouvernement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Avis favorable.

(L’amendement n° 105 est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 104, présenté par le rapporteur, est également rédactionnel.

(L’amendement n° 104, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 373 – le premier des 120 000 amendements qu’il a déposés sur ce texte…

M. Lionel Tardy. Nous vous avons attendu, cher collègue, ne manquez pas votre affaire !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon amendement n° 373 tend à supprimer les mots : « d’une commune de plus de 20 000 habitants » à l’alinéa 3 de l’article 10, et en conséquence, au même alinéa, de supprimer les mots : « dont la population excède 20 000 habitants ».

Le Gouvernement s’est fixé l’objectif de placer la France au rang des démocraties les plus avancées en matière de prévention des conflits d’intérêts, et d’utiliser le principe de transparence au service de cette ambition.

Il est absurde de considérer que des élus seraient plus ou moins intègres selon la population qu’ils représentent.

Tout comme j’avais pu le faire remarquer dans le cadre de précédents débats parlementaires, les seuils imposés tant à l’administration qu’aux entreprises et aux particuliers sont ridicules, arbitraires, et parfois pervers dans leurs effets. Ceux-ci engendrent inévitablement des inégalités qui n’ont aucune autre raison que de se trouver au-dessus ou en dessous d’un seuil décrété arbitrairement par le législateur.

Vous l’aurez compris : je suis pour le lissage des seuils. Et quand le lissage n’est pas possible, ce qui tend parfois à démontrer leur absurdité, je suis contre tous ces seuils, quels qu’ils soient.

Voilà pourquoi je propose la suppression de l’indication « 20 000 habitants ». En cas de rejet de cet amendement, nous aurons l’occasion de poursuivre nos débats.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Avis défavorable.

(L’amendement n° 373 n’est pas adopté.)

M. le président. J’appelle maintenant l’amendement n° 400 de M. Jean-Charles Taugourdeau.

Notre collègue a décliné cet amendement en 120 000 exemplaires, ce qui constitue une forme de record, en faisant varier le seuil de population à partir duquel les élus locaux sont soumis à l’obligation de déclaration instituée par le projet de loi.

M. Taugourdeau ayant rendu publique cette initiative et indiqué qu’il ne défendrait pas chacun de ces amendements…

M. Lionel Tardy. Bravo !

M. Guy Geoffroy. Cela aurait été pourtant nécessaire !

M. le président. …je vais lui donner la parole pour une présentation globale de ceux-ci en lui laissant toute latitude pour s’exprimer librement au-delà des deux minutes réglementaires.

À l’issue de la discussion, je mettrai aux voix par un seul vote l’ensemble de ces amendements.

Vous avez la parole, mon cher collègue.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Monsieur le président, l’amendement n° 373 tendait à supprimer le seuil de 20 000 habitants, et l’amendement n° 374, que nous examinerons tout à l’heure, portera sur le seuil de 100 000 habitants prévu à l’alinéa 4. Ma présentation, comme celle que je ferai tout à l’heure, équivaudra à la défense de quatre ou cinq amendements.

L’amendement n° 400 pourrait être le premier d’une longue série. J’ai déjà eu l’occasion de créer un débat dans notre hémicycle au sujet des seuils : dans le cadre du projet de loi sur la sécurisation de l’emploi, j’avais déjà déposé, pour dénoncer les effets néfastes des seuils imposés aux entreprises, trois cents amendements : ce chiffre n’avait d’ailleurs impressionné personne à l’époque.

Ma démarche est bien d’interpeller vos consciences de parlementaires et d’interpeller la haute administration. J’ai mis trois secondes pour rédiger 120 000 amendements…

M. Jacques Myard. Bravo !

M. Jean-Charles Taugourdeau. …en utilisant les technologies modernes. Trois secondes qui pourraient nous coûter cent trente-neuf jours de travail, c’est-à-dire nous faire siéger jusqu’en mai 2015. (Murmures sur les bancs du groupe SRC.) Ce que je vous dis est sérieux, mes chers collègues : il nous arrive de voter dans cet hémicycle, en trois secondes, des seuils qui peuvent pénaliser une entreprise durant son existence, allant même jusqu’à la tuer et donc détruire des milliers d’emplois.

J’ai l’occasion aujourd’hui de vous réexpliquer que les seuils sont stupides et surtout combien ils mettent en danger la vie de nos entreprises.

Car même si le sujet porte aujourd’hui sur la question de la transparence de la vie publique, je saisis l’occasion de dénoncer tous ces blocages administratifs à l’endroit de tous ceux qui entreprennent.

Notre législation impose aux entreprises des obligations d’autant plus fortes que leur effectif salarié est important, allant jusqu’à les étouffer.

En période de difficultés économiques, et puisque le Président de la République a parlé, lors de son intervention télévisée du 28 mars dernier, de simplification administrative, je propose la suppression ou le lissage de ces seuils, plutôt que d’en inventer de nouveaux.

Nous pourrions commencer par la suppression des seuils dans notre administration et au sein même de notre vie politique. Comment peut-on considérer qu’un élu peut être intègre au gré de la population qu’il représente ? Soyons sérieux ! Jusqu’à 19 999 habitants, nous serions insoupçonnables, et un habitant de plus nous ferait, d’un seul coup, devenir suspect ?

M. Jacques Myard. Il a raison !

M. Jean-Charles Taugourdeau. D’ailleurs, si l’on considère les effets pervers, j’invite mes chers collègues attachés à la construction de logements sociaux à se demander si le maire d’une commune de 19 000 habitants aura envie de construire beaucoup de logements sociaux pour passer le seuil de 20 000 habitants…

Alors, puisque ce projet de loi vise à prévenir les conflits d’intérêts, il doit concerner soit tout le monde, soit personne. C’est l’objet de ce premier amendement. Je tiens à préciser que c’est là que se place l’enjeu du débat que je suscite.

Je regrette que la majorité n’ait pas suivi mon raisonnement sur la suppression des seuils. Alors, pour vous faire la démonstration de la multiplicité et la complexité de ceux-ci, en voici quelques-uns listés, bien sûr non exhaustivement, qui bloquent la France à tous les niveaux : le seuil pour le plan de sauvegarde de l’emploi, obligatoire à partir de cinquante salariés – alors que l’on sait que la plupart des emplois sont dans les entreprises de moins de cinquante salariés ; le seuil de passation des marchés publics, c’est-à-dire exigences de publicité, de transparence et de mise en concurrence ; le seuil pour l’attribution des bourses ; le seuil d’application du régime d’auto-entrepreneur – et lorsque l’on manque de courage politique, c’est souvent sur les seuils que l’on souhaite agir : tout renvoi à l’actualité ne serait évidemment que fortuit ; le seuil pour la création d’un comité d’entreprise ; le seuil pour la mise en place d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ; le seuil pour la mobilité dans les entreprises, grâce à votre projet de loi dit de sécurisation de l’emploi ; le seuil d’imposition sur les sociétés ; le seuil d’imposition sur la fortune ; le seuil d’imposition sur le revenu, en vertu duquel on n’est pas imposable en dessous de 5 963 euros – pourquoi 5 963 et pas 5 962 ? – ; le seuil pour la création d’un groupe parlementaire à l’Assemblée nationale, nous y reviendrons ; le seuil pour l’attribution des logements sociaux ; le seuil pour l’attribution des allocations familiales ; le seuil pour l’attribution de l’allocation personnalisée d’autonomie ; le seuil pour la construction de bâtiments – des arrêtés sont en cours de préparation pour des décalages de construction de 7 millimètres ! – ; le seuil de mise en conformité avec les règles ; le seuil pour l’obtention d’un local syndical ; le seuil pour la désignation d’un représentant du personnel ; le seuil pour la désignation d’un commissaire aux comptes ; le seuil pour l’autorisation de stockages dans les entreprises – jusqu’à 50 000 mètres cubes, il s’agit d’une déclaration, au-delà il faut une autorisation qui met parfois douze à dix-huit mois à venir ; le seuil pour l’attribution de l’aide personnalisée au logement ; le seuil de TVA ; le seuil pour les prélèvements sociaux ; le seuil pour les dotations sociales ; les seuils en matière de protection de la santé ; le seuil de qualité de l’air ; le seuil sismique ; le seuil d’exposition aux ondes ; le seuil de contaminations aux OGM ; les seuils en matière de protection de l’environnement ; le seuil de 127 mètres cubes par seconde pour l’autorisation de pomper dans la Loire, – pourquoi 127 mètres cubes ? Personne n’a jamais su me répondre ; le seuil d’émission de gaz carbonique ; le seuil de préservation des espèces protégées ; les seuils en matière d’aménagement des locaux à usage d’habitation…

Cette liste ne vous a pas émus, je suis donc contraint de poursuivre ma démonstration. D’aucuns se sont émus du gaspillage du temps que j’aurais pu perdre à déposer tous ces amendements. Mais le droit d’amendement est l’illustration que nous sommes bien en démocratie. Et rassurez-vous, les effets de seuils, précédemment cités, font perdre bien plus de temps aux entreprises que j’aurais pu vous en faire perdre à vous-même et à mon équipe parlementaire !

Je veux dénoncer ces seuils. D’ailleurs, au gré des majorités, certains s’accordent à les dénoncer, sans jamais avoir le courage d’y mettre fin.

Par exemple, le président du Parti de gauche, appartenant à votre majorité, intervenait en mars dernier au sujet de la taxe exceptionnelle sur les très hauts revenus souhaitée par l’Élysée alors qu’était évoquée une recommandation du Conseil d’État de fixer un taux maximal de 66,66 %, le taux de 75 % ayant subi une censure constitutionnelle. « Ça me tire un petit sourire, commentait-il. 66,66 %, c’est bon, 66,67 % c’est confiscatoire ! C’est d’une extraordinaire précision ! Franchement c’est grotesque ! » Vous voyez, je ne suis pas le seul à le penser : pourtant, on ne peut pas dire que je sois d’accord avec M. Mélenchon sur beaucoup de sujets.

Permettez-moi, toujours sur le même sujet, de vous parler du cas d’une commune de ma circonscription : Corné, qui comptait 2 866 habitants en 2010. Cette commune a eu la mauvaise surprise de constater, sur le site internet de la direction générale des collectivités locales, que le montant de la fraction bourg-centre de la dotation de solidarité rurale qui lui sera alloué en 2013 a été diminué de moitié.

Pourquoi ? Après recherches, il semblerait que cela correspond à une situation d’inéligibilité pour cette année étant donné que la population de la commune ne représenterait plus au moins 15 % de la population du canton. Le calcul effectué à partir de la population totale INSEE au 1er janvier 2013 fait ressortir qu’il manquerait moins de cinq habitants pour atteindre cette proportion… Voilà dans quelle situation vous placez nos communes sans lissage des seuils ! Voilà les conséquences des seuils pour nos communes ! Cela est d’autant plus regrettable que les dépenses sont en hausse pour nos communes avec notamment la mise en place de la réforme des rythmes scolaires !

M. Guy Geoffroy. Elle va coûter cher !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Monsieur le président, je m’arrête là pour la défense de ce premier bloc de 20 000 amendements, que je considère tous défendus.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Avis défavorable.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Faut-il que je vous oblige à dire 20 000 fois « défavorable » ?

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous auriez tort de considérer que ce que vient de faire notre collègue relève du subalterne, du secondaire et du ridicule.

Nous avons un véritable problème dans ce pays. Moi qui n’atteins pas un mètre soixante, je ne pourrais pas entrer dans le premier régiment de la garde républicaine, je suis trop petit. (Exclamations sur plusieurs bancs.)

M. René Dosière. Ça aurait pourtant été chouette !

M. Jacques Myard. Vous voyez bien que les problèmes de seuil peuvent aussi avoir des conséquences humaines !

M. Lionel Tardy. Comment voulez-vous que cela marche ? (Sourires.)

M. René Dosière. Il n’est pas à la hauteur !

M. Jacques Myard. Ne vous tracassez pas, camarade : dans cette matière, ce n’est pas simplement une affaire de hauteur, c’est une question de position ! Et on y arrive !

Ce qui est certain, c’est que les seuils sont proprement ridicules, et qu’il nous faut trouver autre chose. La démonstration qui vient de nous être faite est frappée au coin du bon sens. C’est la raison pour laquelle je voterai ces amendements.

(L’amendement n° 400 n’est pas adopté, non plus que les amendements associés.)

M. le président. La parole est à M. Richard Ferrand, pour soutenir l’amendement n° 131.

M. Richard Ferrand. Il s’agit d’une mise en cohérence de seuils. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

En cohérence avec la disposition introduite en commission, il est logique que les présidents d’EPCI à fiscalité propre dont les recettes ordinaires dépassent 5 millions d’euros soient également visés par les dispositions du présent projet de loi.

Ce n’était pas proposé par le Gouvernement pour l’instant ; il me paraît donc utile d’amender le texte en ce sens.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cet amendement vient compléter un débat que nous avons eu en commission des lois. Celle-ci a donné un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Avis favorable.

(L’amendement n° 131 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 103.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Il est rédactionnel.

(L’amendement n° 103, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l’amendement n° 125.

M. Patrice Verchère. Cet amendement est, lui aussi, d’ordre plutôt rédactionnel.

Nous avons adopté cette année un texte relatif aux conseillers départementaux. Nous avions longuement débattu, notamment sur l’utilité de modifier le nom du conseiller général auquel nous sommes habitués. Or le présent projet de loi parle encore de président du conseil général et de conseillers généraux. Même si je n’ai pas voté en faveur de la loi relative aux conseillers départementaux, je propose donc de garder une certaine cohérence.

Cette situation montre quand même à quel point nous sommes tous habitués au conseil général : le conseil départemental n’est pas près d’entrer dans les esprits !

M. Matthias Fekl. Quel talent !

M. Patrice Verchère. Voilà ce qui arrive quand on change les noms ! Le conseil général reste bien ancré dans nos esprits !

M. Laurent Wauquiez. Il faut sauver le conseil général !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Il ne s’agit évidemment pas d’un amendement de nostalgie de Patrice Verchère, que je sais au contraire attiré essentiellement par les choses de l’avenir. (Sourires.) Je loue son souci de cohérence.

Cependant, si nous adoptions cet amendement, la loi ne s’appliquerait pas aux conseils généraux dans la mesure où ceux-ci ne deviendront conseils départementaux que le 1er janvier 2015. À cette date, une « disposition balai » – pour utiliser une expression que cet hémicycle aime bien – transformera partout les conseils généraux en conseils départementaux.

Monsieur Verchère, je suis navré de devoir vous dire non. Vous savez que je n’aime pas vous le dire, (Sourires) mais l’avis de la commission est défavorable.

M. Guy Geoffroy. M. Verchère est un lanceur d’alerte ! (Sourires.)

(L’amendement n° 125, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 374.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Comme je l’ai fait pour le seul de 20 000 habitant dans l’amendement n° 373, je dénonce ici le seuil de 100 000 habitants fixé pour déterminer les agglomérations dont les adjoints au maire seront concernés par les dispositions de cet article. Je souhaite que ce seuil soit supprimé : les mesures dont nous discutons doivent s’appliquer à tout le monde ou à personne.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Depuis le début de nos débats, j’ai souvent dit combien nous souhaitions légiférer en cohérence avec le droit positif existant. Le seuil de 100 000 habitants figure dans la loi de 1988 : nous souhaitons donc qu’il soit maintenu. Avis défavorable.

(L’amendement n° 374, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 401 et les amendements associés.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Soucieux de ne pas vous faire perdre trop de temps, mais de vous interpeller tout de même, je défendrai l’équivalent de quatre ou cinq de ces 100 000 amendements, ce qui me semble raisonnable ! Et le rapporteur ne sera pas obligé de me répondre 100 000 fois « défavorable ».

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. C’est gentil ! (Sourires.)

M. Jean-Charles Taugourdeau. Mais auparavant, je veux réagir sur le qualificatif utilisé par le président de notre assemblée à propos de mon initiative. Si j’en crois la presse, il l’aurait trouvée « farfelue »…

M. René Dosière. Non, ce n’est pas possible !

Mme Marie-Françoise Bechtel. Au contraire, elle est très intelligente ! (Sourires.)

M. Jean-Charles Taugourdeau. Mais sait-on véritablement ce qui est farfelu ?

M. le président de l’Assemblée nationale préside une institution qui, au gré des alliances politiques, modifie les seuils pour faire une place à des mini-groupes parlementaires.

M. Jacques Myard. Eh oui !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Il y a un an, quasiment jour pour jour, Claude Bartolone déclarait qu’il était prêt à baisser de quinze à dix députés le seuil nécessaire pour la constitution d’un groupe – une modification sur mesure pour nos collègues communistes, partenaires de la majorité.

M. Lionel Tardy. On a même parlé de coprésidence !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Comment qualifier ce bidouillage des seuils ? Il est toujours favorable à notre système politique, et quasiment toujours défavorable à notre système économique. Comme je l’ai dit au mois de février, je suis toujours atterré de constater qu’on puisse se permettre ici tout ce qu’on interdit ailleurs.

Sachez que j’ai décidé, avec mon esprit de chef d’entreprise, de consacrer mon action politique à tout ce qui facilite la création de travail et à tout ce qui freine cette même création de travail. C’est d’ailleurs pourquoi je ne défendrai pas chacun de mes 120 000 amendements.

M. Guy Geoffroy. Dommage !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Mon intervention serait donc farfelue. Mais savez-vous combien il existe de normes farfelues ? Par exemple, savez-vous que la progression d’une équipe de football dans une division supérieure entraîne l’obligation pour le club d’augmenter la surface des vestiaires ?

M. Jacques Myard. Ah bon ?

M. Jean-Charles Taugourdeau. Est-il prouvé scientifiquement que les joueurs de football atteignant un certain niveau ont un besoin impérieux d’un vestiaire plus grand ? Voilà ce que disait l’association des maires de grandes villes de France : « Il n’a pas encore été prouvé jusqu’alors le besoin physiologique du joueur passé d’un niveau départemental à un niveau régional de disposer d’un espace plus étendu pour se préparer et se changer. »

Savez-vous aussi que des décrets et arrêtés prescrivent précisément les quantités d’œufs que doivent servir les cantines scolaires aux enfants ? On progresse de quart d’œuf en quart d’œuf selon les classes… A-t-on pensé aux redoublants ? (Sourires.) Soyons sérieux ! Je tiens à préciser que ce n’est pas moi qui le dis, mais un rapport commandé par le Gouvernement à MM. Lambert et Boulard sur l’inflation normative.

En France, personne ne se rend compte qu’il est lourd, trop lourd, parfois économiquement impossible de construire une usine. Tant que l’administration pensera qu’elle n’est pas là pour aider mais pour contrôler… Remarquez qu’en continuant comme cela, il n’y aura plus rien à contrôler ! Ce sera l’emploi sans travail.

M. Matthias Fekl. Caricature !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Ce n’est pas une caricature !

Aujourd’hui, avec nos règles environnementales, les quais de la Seine n’existeraient pas, la levée de la Loire non plus, ni les châteaux au bord de ce fleuve. On ne pourrait construire le château de Versailles, parce qu’il est situé en pleine forêt. Et ne parlons pas de la tour Eiffel ! Nous fêtons l’anniversaire de la tour Montparnasse, mais aujourd’hui, nous ne pourrions même plus la construire…

M. Matthias Fekl. Ce ne serait pas grave. Elle est horrible, cette tour ! (Sourires.)

M. Jean-Charles Taugourdeau. …car le plan d’occupation des sols de la ville de Paris a interdit toute construction au-delà de trente-sept mètres de haut. Mais, et cela illustre encore le caractère arbitraire de ces seuils, le maire a étendu cette autorisation à cinquante mètres, mais seulement de manière ponctuelle. Jugez vous-mêmes de l’application de la norme !

En conclusion pour cet amendement, prenez conscience, prenons conscience, nous parlementaires – et je m’adresse aussi à la haute administration –, que les seuils peuvent parfois être infranchissables pour les entreprises et pénalisants en termes de concurrence.

Les normes ne sont que des seuils ; aujourd’hui, l’informatique permettrait de les lisser, à défaut de les supprimer. On ne peut pas continuer à faire travailler les fonctionnaires comme au temps on l’on travaillait avec un boulier : de 10 000 à 20 000 vous appliquez tel taux, de 20 000 à 30 000 vous en appliquez un autre… Même les seuils sociaux peuvent changer dès lors que l’on ouvre son esprit à une autre façon de raisonner.

Comme le disait un de mes collègue, j’aurais pu déposer 5 millions d’amendements sur ce paragraphe ou cet article : on parle d’un seuil de 5 millions d’euros de recettes… Pourquoi 5 millions ? On ne sait pas !

Reprenons explicitement les dispositions contenues dans cette loi et les conséquences des effets de seuils. Considérant que 36 236 communes ont moins de 20 000 habitants et représentent 514 036 élus, considérant que 442 communes ont entre 20 000 et 99 000 habitants pour 17 208 élus, dont les 442 maires concernés par la loi, on en déduira que le projet de loi concerne uniquement 442 maires de communes entre 20 0000 et 100 000 habitants et 48 maires et leurs adjoints des villes de plus de 100 000 habitants, et non les 531 244 élus de la République !

Le projet de loi sur la transparence de la vie publique laisse aussi sous-entendre qu’au-delà d’un certain nombre d’habitants, les élus seraient suspects. Il stigmatise une catégorie d’élus sans pour autant rendre la vie publique plus transparente.

M. Jacques Myard. Tout à fait !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Pour résumer, votre projet de projet de loi est une opération de communication de plus. Il ne concerne pas 36 236 communes et 531 244 élus de la République. Monsieur le ministre, je souhaite que vous expliquiez ces chiffres.

Le seuil de 20 000 habitants est donc pertinent pour vous, de même que le seuil de 100 000 habitants. Et pourtant, en parcourant la presse, en fouillant un peu, j’ai pu relever un certain nombre de condamnations définitives d’élus de petites communes – moins de 20 000 habitants – non concernées par la loi de demain. On y trouve des condamnations pour fraude aux marchés publics, pour prise illégale d’intérêt, pour corruption, pour abus de bien sociaux, pour favoritisme, pour détournement de subventions, pour travail dissimulé… Je m’arrêterai là.

Vous le voyez : il n’y a pas une catégorie d’hommes politiques plus malhonnête qu’une autre. Mais pour créer un écran de fumée après l’affaire Cahuzac, vous faites des annonces et vous faites voter des lois qui ne changeront rien.

Vous le savez, monsieur le ministre : l’honnêteté ne s’apprend pas, mais elle existe. Pour que les Français retrouvent confiance en leurs représentants, il faut condamner ceux qui mentent et ceux qui trichent. Et c’est maintenant, pour tout le monde ou pour personne.

M. Jacques Myard. Eh oui !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Nous avons bien entendu le message de Jean-Charles Taugourdeau, qui concernait en réalité assez peu notre sujet, mais qui nous alertait au sujet des seuils.

Nous aurons un débat sur les seuils et sur les normes : c’est un vrai sujet. Une proposition a été adoptée par le Sénat,…

M. Lionel Tardy. En urgence !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. …et elle sera examinée très rapidement par la commission des lois. Par ailleurs, dans le débat sur les métropoles, il me semble que le rapporteur a l’intention de faire progresser un certain nombre de dispositions.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Ah !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Je ne veux pas vous inciter à redéposer 120 000 amendements lors du débat sur les métropoles,…

M. Guy Geoffroy. Non, cinq millions !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. …mais le message est bien passé. En conséquence, avis défavorable, défavorable, défavorable, défavorable, défavorable, défavorable, défavorable, défavorable… (Sourires.)

M. Jacques Myard. Arrêtez-le !

M. Matthias Fekl. Bravo !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Monsieur Taugourdeau, je répondrai d’abord sur le raisonnement que vous avez suivi et sur la fin de votre intervention, pour lever toute ambiguïté.

À l’issue de votre démonstration, et après avoir cité des exemples divers et variés, vous êtes revenu à la question du projet de loi. Vous avez essayé de démontrer qu’avec ce texte, les adjoints des villes de plus de 100 000 habitants seraient potentiellement considérés comme…

M. Jacques Myard. Suspects !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. …à surveiller, tandis qu’en dessous de ce seuil – et vous avez donné des exemples –, les élus seraient délivrés de toute surveillance. Je veux être précis, au cas où la lecture de ce que nous faisons prêterait à confusion : nous n’avons pas l’intention d’établir un état d’impunité pour les élus dont les communes se situent en dessous du seuil.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Certes. Je ne parlais que de l’obligation de déclaration.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Nous considérons simplement que, dans certaines circonstances et compte tenu du volume, il convient de prendre davantage de précautions. On peut naturellement discuter de la question du seuil.

Plus généralement, j’interprète votre intervention comme une interrogation sur la cohérence de l’ensemble des seuils.

M. Jacques Myard. Oui !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Il est vrai qu’il vaudrait mieux regrouper ces seuils secteur par secteur – vous en avez cité quelques uns. Cependant, le président de la commission des lois a fait référence à un travail en cours, d’ailleurs élaboré au Sénat d’une manière assez consensuelle.

Je crois que personne ne veut supprimer les seuils par définition. Par exemple, si l’on voulait imposer aux élus d’une petite commune la rédaction de déclarations d’intérêts que l’on souhaite instaurer pour les adjoints des grandes communes, cela poserait quelques difficultés.

Je terminerai par une remarque plus personnelle. Vous aviez une entreprise d’horticulture, monsieur Taugourdeau, qui produit des plantes de très bonne qualité et qui a conservé votre nom. Et comme j’ai quelque activité jardinière, j’achète des plantes Jean-Charles Taugourdeau. Et figurez-vous que la première chose que je vois sur leur notice, ce sont des seuils à respecter pour que la plantation soit bonne… (Sourires.) Vous avez oublié de citer votre propre exemple, monsieur Taugourdeau ! Et maintenant, vous me voyez un peu déstabilisé : dois-je respecter ces seuils ou non ? (Rires et applaudissements.)

Mme Sophie Dessus. Vive les jardiniers !

Plusieurs députés du groupe UMP. Conflit d’intérêts, encore et toujours !

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard. Ce projet de loi pose quand même un problème : il va imposer aux élus de remplir une déclaration d’intérêts au-delà d’un seuil, et non en dessous. Il y a là une rupture d’égalité entre des élus, point-barre : dès lors, il se peut que les sages du Conseil constitutionnel ne soient pas d’accord avec vous. Ou bien l’obligation de déclaration s’applique à tous,…

M. Lionel Tardy. Dans ce cas, la Haute autorité va avoir du boulot ! Vous les avez, vos 500 000 emplois jeunes !

M. Jacques Myard. …ou bien elle ne s’applique à personne ; en tout cas, elle ne peut être fonction d’un seuil mal préparé.

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy.

M. Guy Geoffroy. Je constate avec beaucoup de satisfaction que ce qui semblait anecdotique – un peu farfelu, comme le disait notre collègue Taugourdeau – au début de nos discussions rentre finalement bien dans le cadre notre débat. Nous pouvons constater combien cette affaire des seuils est un vrai sujet et suscite des interrogations beaucoup plus nombreuses qu’on ne le pense.

Je veux poser une question au Gouvernement et au rapporteur. Peut-être ma relecture de l’article 10 est-elle imparfaite, auquel cas je serais très heureux de le vérifier, mais il ne me semble pas que cet article traite le cas des élus d’une collectivité dont la population dépasserait en cours de mandat un seuil à partir duquel une déclaration de patrimoine deviendrait obligatoire.

Imaginons un maire qui sera élu, en mars prochain, à la tête d’une commune de 19 500 habitants. Il n’aura donc pas à fournir une déclaration d’intérêts ni de patrimoine. Si quelque temps après, une à deux années après la mise en place de cette municipalité, le recensement – fait chaque année désormais par sondage, je le rappelle – donne un chiffre officiel supérieur 20 000 habitants, y aura-t-il alors une obligation de déclaration ? À mon avis, la réponse est oui : ce maire devrait entrer dans le dispositif et faire une déclaration de patrimoine et d’intérêts.

M. Pascal Cherki. C’est juridiquement solide. Excellente question !

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Je ne vais pas reprendre tous les arguments de mes collègues. En quoi est-on plus honnête à moins de 100 000 ou plus de 100 000 habitants ou risque-t-on de ne pas l’être ? Je ne vois pas très bien le sens de ce seuil. En outre, si vous ajoutez les adjoints des communes à partir d’un certain niveau, quel sort réservez-vous aux vice-présidents des intercommunalités à fiscalité propre ? Ils exercent désormais des responsabilités beaucoup plus importantes que les adjoints aux maires, voire parfois que les maires d’un certain nombre de communes lorsqu’il s’agit d’intercommunalités avec des coefficients d’intégration importants.

M. Guy Geoffroy. En effet.

M. Hervé Morin. Je ne comprends pas bien le dosage retenu. Vous nous expliquez que vous vous êtes calés sur d’autres textes liés à d’autres dispositifs. Mais là, il est question d’abord de transparence du patrimoine, il s’agit de s’occuper de ceux qui pourraient oublier les règles de la République. Quel sort réservez-vous aux vice-présidents des intercommunalités ? À partir de combien d’habitants ? Je sais que c’est 5 millions de budget pour les présidents. On pourrait estimer qu’il faudrait également prendre en compte le cas des syndicats intercommunaux, au moins à fiscalité propre, mais aussi s’interroger sur celui des syndicats à vocation unique, tels que les syndicats d’eau, monsieur Dosière.

M. Jacques Myard. Oui.

M. Hervé Morin. Ces syndicats ont beaucoup de relations avec des délégataires de service public, avec des enjeux de pouvoir et d’investissement absolument considérables et pour lesquels, là aussi, rien n’est prévu.

M. René Dosière. Ils sont prévus, à partir de 5 millions de recettes.

M. Hervé Morin. Seulement les syndicats à fiscalité propre.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. À la question posée par M. Geoffroy, la réponse est oui : dès que le seuil est franchi, on entre immédiatement dans le champ d’application de la loi.

Quant l’observation de M. Morin, sur les EPCI et les vice-présidents qui auraient délégation de signature dans les mêmes conditions, elle est tout à fait juste. Nous n’allons pas déposer d’amendement dès maintenant, mais, dans la suite du débat, y compris au Sénat, le Gouvernement essaiera de réparer cet oubli.

M. Jacques Myard. C’est la loi sur les suspects !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je ne vois pas en effet ce qui pourrait justifier une telle lacune. Je vous remercie de votre observation et nous en tiendrons compte dans la suite de l’élaboration de la loi.

(L’amendement n° 401 n’est pas adopté, non plus que les amendements associés.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour soutenir l’amendement n° 148.

M. Jean-Michel Clément. L’amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. Jean-Michel Clément. Je retire l’amendement.

(L’amendement n° 148 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l’amendement n° 124.

M. Patrice Verchère. Défendu.

(L’amendement n° 124, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin, pour soutenir l’amendement n° 212 rectifié.

M. Hervé Morin. Défendu.

(L’amendement n° 212 rectifié, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Clément, pour soutenir l’amendement n° 149.

M. Jean-Michel Clément. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. Jean-Michel Clément. Je retire l’amendement.

(L’amendement n° 149 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 82.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. À la fin de l’alinéa 5 de l’article 10, nous proposons de supprimer les mots : « qui font l’objet d’une nomination au Journal officiel ». On sait qu’à côté des membres officiels des cabinets ministériels, dont les noms sont publiés au Journal officiel, il y a aussi par ailleurs des « officieux » qui n’apparaissent pas au Journal officiel, mais qui n’en sont pas pour autant moins réels.

M. Jacques Myard. Oh !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Cela a existé sous tous les gouvernements successifs. Tout le monde a été, est ou sera ministre, et connaît cela (Sourires) : dans les cabinets ministériels, il y a des officiels et des officieux.

M. Pascal Cherki. Et des officines !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Les officieux doivent être assujettis aux mêmes obligations que les officiels. Tel est le sens de l’amendement n° 82 qui les soumet aux obligations de déclaration de patrimoine et d’intérêts.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. C’est René Dosière qui a proposé la précision que vous voulez supprimer. Il fallait bien trouver un critère objectif pour les membres du cabinet, à moins qu’ils soient notoirement ou sciemment membres du cabinet – je renvoie à un débat que nous avons eu à ce sujet. Si nous supprimons la mention « qui font l’objet d’une nomination au Journal officiel », tous les membres du cabinet, y compris ceux qui exercent des fonctions de support – secrétariat, chauffeurs – seraient concernés.

M. Jacques Myard. Ce serait une usine à gaz !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Quand on vise globalement les cabinets, c’est tout le monde. Si l’on précise qu’il s’agit des membres des cabinets publiés au Journal officiel, on connaît le nom des personnes. Quant aux cabinets officieux, dont je ne nie pas leur existence, il me paraît difficile d’en donner la liste. Même si nous avons doté la Haute autorité de capacités d’enquête, il ne me semble pas utile qu’elle y consacre son énergie.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. On comprend bien le sens de cet amendement ; mais la difficulté est d’en déterminer le périmètre. S’agissant de la composition des cabinets ministériels, je ne dis pas que l’ensemble des pratiques autrefois en vigueur ait été abandonné, mais, pour présenter les budgets des services de l’État lors de la session budgétaire en ce qui concerne les actions du Gouvernement, je puis vous assurer qu’elles ont été très largement réduites. Il est difficile de donner une définition des conseillers officieux. Certains parmi eux appartiennent à l’administration et peuvent à un moment donné être plus particulièrement affectés à ce travail. Lequel aura le label de conseiller officieux ? Les conséquences ne sont pas anodines, je ne voudrais pas que l’on mette des gens dans la difficulté : l’absence de déclaration, rappelons-le, a des conséquences, y compris sur le plan pénal.

J’accepte, monsieur Schwartzenberg, votre observation sur le fait qu’il puisse exister une zone grise. Mais on ne peut souscrire à votre amendement si, pour appréhender cette zone grise, on en arrivait à mettre nombre de gens dans la difficulté par le fait le défaut de déclaration aurait des conséquences graves. Cela étant, je reconnais que votre souci est légitime dans ce débat.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Il y a environ six cents collaborateurs de cabinet au sens strict, auxquels il faut ajouter une cinquantaine au niveau de la Présidence de la République. À cela s’ajoutent les emplois support qui font partie des cabinets, à raison de cinq emplois support pour un emploi de cabinet. Autrement dit, le nombre augmenterait très rapidement.

J’ai bien entendu Roger-Gérard Schwartzenberg. Les « clandestins »…

M. Jacques Myard. Oh !

M. René Dosière. Disons les officieux des cabinets ministériels sont un peu comme les immigrés clandestins.

M. Guy Geoffroy. Il faut les régulariser ?

M. René Dosière. Comment voulez-vous en connaître le nombre avec précision dans la mesure où ils n’ont pas d’existence ? D’où la difficulté du Gouvernement, dans son rapport annuel sur les membres des cabinets ministériels, à suivre l’évolution des effectifs : par définition, on ne peut suivre que ceux qui sont officiels, c’est-à-dire ceux qui ont fait l’objet d’une nomination au Journal officiel, …

M. Alain Chrétien. Ils n’ont qu’à être bénévoles !

M. René Dosière. …y compris à la Présidence de la République où l’on trouve également un certain nombre de collaborateurs officiels, en quelque sorte, mais dont le nom ne figure pas au Journal officiel.

M. Laurent Furst. On attend le rapport du député Dosière !

M. René Dosière. Il fallait trouver un critère pour ne pas augmenter indéfiniment le nombre.

M. Pascal Cherki. Des visiteurs du soir.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je comprends les observations du ministre et de René Dosière. Mais si l’on veut connaître la réalité d’un cabinet ministériel, il suffit d’ouvrir le trombinoscope – pas celui de l’assemblée, Le Trombinoscope que l’on trouve dans le commerce – pour s’apercevoir qu’il y a plus de dix membres de cabinet par ministre délégué ou quinze par ministre.

On peut dans cet amendement préciser que l’on exclut ceux qui exercent les fonctions support – secrétariat et autres. Mais il serait assez paradoxal que ceux qui exercent les fonctions importantes, tout cas pas mineures, ne soient pas assujettis à la déclaration de patrimoine et d’intérêts : non seulement on dissimulerait leur existence en tant que membres de cabinets, mais ils ont les mêmes pouvoirs d’intervention, éventuellement contestables, que les chargés de mission officiels ou les membres officiels de cabinets ministériels.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. J’entends les observations du président Schwartzenberg et je suis tout à fait prêt à sous-amender dans le sens qu’il vient d’évoquer en excluant les personnes chargées des fonctions de support.

M. Jacques Myard. On pourrait écrire : « tous les membres, y compris les clandestins »…

M. le président. Monsieur le rapporteur, cela suppose de réécrire tout l’amendement, et cela ne peut se faire en séance. On ne peut pas ajouter un élément positif sur un élément négatif.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Vous avez raison, monsieur le président.

M. le président. Il faudra modifier l’amendement au cours de la navette parlementaire.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Je propose que nous votions l’amendement en l’état et nous l’adapterons au Sénat.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le Gouvernement avait songé à cette solution imparfaite, mais à laquelle il sera remédié.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. La proposition du rapporteur serait tout à fait efficace. Il s’agirait de dire : « Les membres des cabinets ministériels…à l’exception de ceux exerçant des fonctions support. »

M. le président. Non, mon cher collègue, il n’est pas possible de sous-amender, car la phrase est négative. Nous procéderons à la modification au cours de la navette. Pour ne pas retarder le débat, je vous suggère de vous rallier à la solution du rapporteur qui propose de voter pour votre amendement en l’état.

(L’amendement n° 82 est adopté et l’amendement n° 102 tombe.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 318.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Nous proposons de compléter l’alinéa 5 par les mots : « ainsi que les personnels chargés des fonctions support ».

Au sein des cabinets ministériels des personnels chargés des fonctions support et concourant au fonctionnement quotidien de l’institution sont souvent recrutés. Ces personnels peuvent exercer diverses fonctions telles que de l’intendance – cuisine, hôtellerie – ou de l’assistance – administration, courrier, secrétariat.

Malgré leur grande utilité, ces personnels ne font pas l’objet d’une nomination au Journal officiel, ce qui leur permet d’être recrutés au-delà des effectifs prévus par les circulaires Fillon et Ayrault.

Ainsi, compte tenu de leur présence effective au sein des cabinets ministériels, il est proposé de les ajouter à la liste des personnes assujetties à cette obligation de déclaration de situation patrimoniale.

(L’amendement n° 318, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. La déclaration d’intérêts doit toucher les plus hauts représentants de l’État, comme les représentants de l’administration qui en ont la direction.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Avis défavorable pour des raisons non de principe, mais de véhicule législatif : cet amendement trouvera toute sa place dans le futur projet de loi sur le statut de la fonction publique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

(L’amendement n° 230 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 304.

M. Damien Abad. L’objet est le même, pour ce qui concerne les administrateurs des commissions permanentes et temporaires de l’Assemblée nationale et du Sénat.

(L’amendement n° 304, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 310.

M. Damien Abad. Cet amendement a pour but de préciser quels membres des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes sont concernés par les dispositions de l’article 10.

(L’amendement n° 310, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 93 et 123, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 93.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Cet amendement vise à étendre l’obligation d’une déclaration d’intérêts et d’une déclaration de patrimoine aux fonctionnaires d’autorité du fait de leur influence ou du pouvoir qu’ils détiennent.

Certes, le rapporteur vient d’indiquer qu’une loi relative au statut général de la fonction publique sera bientôt examinée ; mais mieux vaut sans doute agir maintenant plutôt qu’attendre des décrets qui ne seront pas publiés avant plusieurs mois.

M. le président. La parole est à M. Patrice Verchère, pour soutenir l’amendement n° 123.

M. Patrice Verchère. Je rejoins tout à fait M. Schwartzenberg. Certains directeurs d’administration locale, au niveau régional ou départemental, ont un pouvoir décisionnel important et il me semble normal qu’ils soient également soumis à cette obligation.

J’ai bien noté toutefois ce qu’avait indiqué le président de la commission des lois.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que celles que j’ai exposées précédemment.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Vouloir faire entrer une telle disposition dans le champ d’application de cette loi poserait un problème de légalité : dès lors que nous touchons au statut des fonctionnaires, nous sommes tenus de consulter au préalable divers organismes, notamment le Haut conseil de la fonction publique. Mais dès le 17 juillet, nous serons en mesure d’y réfléchir dans le cadre d’un texte concernant l’ensemble de la fonction publique.

(Les amendements nos 93 et 123, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 94.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il nous paraît normal d’étendre l’obligation aux magistrats tant de l’ordre judiciaire que de l’ordre administratif car ils exercent un pouvoir important, même s’il n’y a pas de pouvoir judiciaire à proprement parler. L’autorité judiciaire est en effet dotée de prérogatives très fortes, aux retentissements majeurs sur la vie des personnes et des entreprises.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable. Je précise qu’un projet de loi organique spécifique aux magistrats sera présenté en conseil des ministres probablement le 24 juillet.

(L’amendement n° 94 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 91.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis, en l’état. La question de leur inclusion est légitime. Pour l’heure, nous avons choisi de ne pas intégrer les membres du Conseil d’État et de la Cour des comptes. Le débat aura probablement lieu au Sénat.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je remercie M. le ministre de sa réponse ouverte. Je rappelle que la commission Sauvé a recommandé dans son rapport d’inclure dans la liste des personnes assujetties à l’obligation de déclaration les membres du Conseil d’État – dont fait partie le vice-président Sauvé – et les membres de la Cour des comptes, qui exercent des prérogatives tout à fait importantes. Un projet de loi présenté en juillet 2011 par M. Sauvadet comprenait la même préconisation.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Mon rappel est fondé sur l’article 98, alinéa 4.

J’ai eu la mauvaise surprise de découvrir que la recevabilité de l’un de mes amendements avait été appréciée souverainement par le président de notre assemblée ; autrement dit, il n’a pas franchi le cap de la recevabilité.

M. Matthias Fekl. Parlez-en à M. Carrez !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Je m’étonne d’autant plus de cette décision que mon amendement avait toutes les raisons d’être, eu égard à la teneur des débats d’hier – un amendement interdisant aux députés d’exercer tout autre activité a été voté hier soir.

J’éprouve une très forte compassion pour mon collègue René Dosière qui doit être bien malheureux de ne pouvoir intervenir sur un point qui aurait pu combler un vide juridique s’agissant du fonctionnement de l’Élysée.

Mon amendement n’avait pas pour but d’attaquer personnellement le Président de la République. Il visait à permettre enfin à la première dame ou au futur premier sieur – si une femme est élue à la tête de l’État –, …

Mme Dominique Nachury. Même un homme, avec le mariage gay ! (Rires sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Charles Taugourdeau. …d’obtenir un vrai statut. La première dame ou le premier sieur exerce une fonction de représentation aux côtés de son conjoint, et ce quel que soit son statut matrimonial.

M. Jacques Myard. Surtout qu’on la voit partout !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Si tant est que, malgré votre volonté de faire adopter le mariage pour tous, le chef de l’État pourrait n’être pas marié, il convient de reconnaître officiellement le conjoint ou la conjointe en toute transparence. Les Français ne peuvent supporter l’opacité au plus haut niveau.

Que des moyens lui soient alloués, cela va de soi. Peu importe à quelle hauteur, ce n’est pas l’objet de cet amendement. Mais nous devons savoir pour qui et pour quoi. Comment expliquer que le trésor public verse de l’argent public à une personne dépourvue de statut ?

M. le président. Mon cher collègue, vous vous éloignez du rappel au règlement. Je vais vous répondre sur la question de l’irrecevabilité.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Monsieur le président, ce n’est pas un rappel au règlement : M. Taugourdeau défend un amendement irrecevable !

M. Jean-Charles Taugourdeau. Notre texte concerne bien la transparence de la vie publique. Voilà tout le sens de mon initiative qui, je le regrette, n’a pas suscité de la part du président de notre assemblée une appréciation objective. Mon amendement n’a pas pu être débattu par la représentation nationale.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Il y a vraiment un problème de procédure, monsieur le président !

M. le président. Nous avons compris, monsieur Taugourdeau.

M. Jean-Charles Taugourdeau. C’est la raison pour laquelle je crois indispensable de protéger la première dame ou le premier sieur et de permettre aux agents du trésor public d’officier en toute sérénité.

M. le président. Monsieur Taugourdeau, je vais vous lire la réponse que le président de l’Assemblée nationale a lui-même préparée.

Le Président de l’Assemblée nationale a déclaré cet amendement irrecevable au motif que, au-delà son caractère provocant et inconvenant, (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), il portait atteinte indirectement à la personne et au statut du Président de la République et, ce faisant, au principe de la séparation des pouvoirs.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Monsieur le président, je le dis afin que cela figure dans le compte rendu de la séance : je ne voudrais pas que les rappels au règlement deviennent le cadre où l’on peut défendre des amendements frappés par l’irrecevabilité devant l’Assemblée. Si à chaque fois qu’un amendement est frappé d’irrecevabilité au titre de l’article 40 – procédure qui, je le rappelle, relève du président de la commission des finances –…

M. Jacques Myard. Mais c’est faux !

M. Christian Jacob. Il ne s’agit pas de l’article 40

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. …on use d’un rappel au règlement pour le défendre, on crée un précédent que je ne voudrais pas voir se renouveler.

M. Jacques Myard. Vous êtes frappé d’amnésie !

M. le président. Que les choses soient bien claires, monsieur le président de la commission des lois : il ne s’agit pas d’une irrecevabilité au titre de l’article 40, qui repose sur une tout autre logique.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. C’est le même principe !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. L’ensemble des moyens en personnel et des prestations alloués à l’Élysée figure dans un rapport qui est soumis à votre assemblée. Je ne veux pas – même si telle n’était pas votre intention – que l’on en vienne à croire qu’il y ait des dépenses inconnues ou cachées.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Ce n’était pas mon propos de l’insinuer !

M. Christian Jacob. Il n’a pas parlé de dépenses cachées !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. En tant que ministre des relations avec le Parlement, je présente devant votre assemblée le budget des hautes autorités et de l’Élysée. Nous avons tous les ans une discussion très ciblée, et c’est bien normal, sur cette institution. Nous répondons à toutes les questions dans la plus parfaite transparence. Et si le moment venu, vous avez des questions, vous aurez des réponses.

Je ne voudrais pas que quiconque sorte de cet hémicycle en pensant qu’il y a la moindre zone d’ombre en ce domaine. Il n’y en a strictement aucune.

Article 10 (suite)

M. le président. L’amendement n° 91 est-il maintenu ?

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je le retire, monsieur le président.

(L’amendement n° 91 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki, pour soutenir l’amendement n° 165.

M. Pascal Cherki. Monsieur le président, je précise, puisqu’ils sont présents dans cet hémicycle, que cet amendement est cosigné par mes collègues Jean-Michel Clément, Denis Robilliard, Fanélie Carrey-Conte et Barbara Romagnan.

Cet amendement n° 165 est assez simple. L’objet de ce projet de loi est de faire en sorte que les élus qui font appel public au suffrage des Français soient astreints à des obligations de transparence et nous souhaiterions que celles et ceux qui font appel public à l’épargne des Français soient soumis à ces mêmes obligations. Nous voulons faire entrer dans le droit commun de la transparence les membres des conseils d’administration des sociétés cotées au sens de l’article 990 E du code général des impôts.

Bien évidemment, il n’y a pas de société sans pouvoirs. Le pouvoir législatif est un pouvoir très important : nous le détenons en tant que représentants de la nation, élus au suffrage universel. Le pouvoir exécutif est soumis à un certain nombre de contrôles. Mais il existe un pouvoir, qui ne figure pas dans la Constitution et que le général de Gaulle avait très bien qualifié : celui de la corbeille. Le pouvoir financier et le pouvoir économique prennent une place de plus en plus importante dans notre vie publique. Certains patrimoines se sont constitués de manière assez rapide, arbitrage ou pas. Ils suscitent des questions qu’en tant qu’homme de gauche, je ne peux éluder.

Notre rôle d’élus républicains est de faire en sorte que la lumière de la transparence atteigne aussi les dirigeants de ces sociétés cotées.

Mme Barbara Romagnan. Très bien !

Mme Chaynesse Khirouni. Excellent !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cet amendement est satisfait par le droit positif s’agissant de toutes les entreprises publiques cotées – GDF-Suez, EADS, Areva, EDF, dont les dirigeants sont aujourd’hui soumis à déclaration de patrimoine et seront demain soumis à déclaration d’intérêts.

Pour ce qui est des sociétés privées, votre amendement, vous ne serez pas surpris de me l’entendre dire, constitue un cavalier législatif. Convenez qu’il serait singulier qu’une autorité administrative indépendante dont les compétences concernent la vie publique contrôle le patrimoine et les intérêts de dirigeants de sociétés privées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Avis défavorable également.

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Je ne voudrais pas fragiliser le texte du Gouvernement par un cavalier qui le rendrait inconstitutionnel.

M. Hervé Morin. Si ce n’est que cela, ce n’est pas grave !

M. Pascal Cherki. N’étant pas un adepte de l’autorégulation concernant le patronat, et considérant que la législation doit aussi s’appliquer aux chefs d’entreprise et aux actionnaires des sociétés cotés, je souhaite que dans un délai assez rapide, le Gouvernement élabore un projet législatif de nature à surmonter ces problèmes de constitutionnalité : il faut faire en sorte que le pouvoir économique soit astreint à la même obligation de transparence. Ce serait une démarche bien comprise de la population.

Je retire mon amendement.

(L’amendement n° 165 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 372.

M. Guy Geoffroy. L’amendement n° 372 vise à prévenir les conflits d’intérêts dans les collectivités territoriales en obligeant les élus à déclarer tout intérêt qu’ils détiennent ou toutes positions qu’ils occupent dans une entreprise ou un organisme, y compris de statut associatif, ayant un lien commercial ou financier avec leur collectivité d’élection.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cet amendement, qui renvoie à un enjeu important, est satisfait par le contenu des déclarations d’intérêts tel qu’il est prévu à l’article 3 au travers des catégories « activités professionnelles », « fonction bénévole susceptible de faire naître un conflit d’intérêts » ou « autre lien susceptible de faire naître un conflit d’intérêts ».

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

(L’amendement n° 372 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 376.

M. Guy Geoffroy. Dans le même souci de totale transparence, l’amendement n° 376 propose d’insérer après l’alinéa 8 un alinéa tendant à prévenir les pratiques de népotisme dans les collectivités territoriales. Il prévoit que les élus déclareront les liens familiaux de toute nature, y compris en situation de concubinage, qu’ils entretiennent avec des personnes travaillant dans leur collectivité d’élection ou dans un organisme de toute nature juridique dépendant financièrement de celle-ci.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. C’est là un enjeu non moins important, qui est non moins satisfait par le contenu des déclarations d’intérêts prévus à l’article 3, aux rubriques « activités professionnelles du conjoint, du partenaire de PACS, du concubin, des enfants ou des parents » et « autres liens susceptibles de faire naître un conflit d’intérêts ».

(L’amendement n° 376, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre, pour soutenir l’amendement n° 410.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Amendement de cohérence.

(L’amendement n° 410, accepté par la commission, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 326.

M. Jean-Charles Taugourdeau. L’amendement n° 326 propose, après le mot « présidents », de rédiger ainsi la fin de l’alinéa 14 : « aux directeurs généraux et aux dirigeants ». Le Gouvernement s’est fixé – et c’est très louable – l’objectif de placer la France au rang des démocraties les plus avancées en matière de prévention des conflits d’intérêts, en utilisant le principe de transparence au service de cette ambition. L’introduction du terme générique « dirigeants » permettra d’intégrer, dans les prochains amendements défendus, les responsables d’entités nationales bénéficiaires de subventions publiques de l’État, telles que les associations nationales et les syndicats nationaux.

(L’amendement n° 326, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard, pour soutenir l’amendement n° 208.

M. Jacques Myard. Ah, ces élus, monsieur le ministre ! Toujours prêts à la prévarication et à la corruption ! Que voulez-vous, nous sommes du gibier de mise en examen, nous le savons ! Mais à examiner les choses de plus près, en matière d’influence, il existe tout de même des médias qui ont légèrement plus de pouvoir que nous. Il faut regarder les choses en face.

Mme Claudine Schmid. Tout à fait !

M. Laurent Furst. Et c’est payé par l’impôt !

M. Jacques Myard. D’ailleurs, quand ils ont lu cet amendement, ils ont fait des bonds de cabri, comme s’ils plaidaient déjà coupable ! Dès lors que des entreprises de médias et de presse bénéficient de subventions publiques de l’État, je ne vois pas pourquoi leurs dirigeants ne feraient pas, comme nous le ferons, des déclarations de patrimoine. C’est la raison pour laquelle je vous invite à un peu de courage : puisque vous voulez laver plus blanc que blanc, allons-y ! Prenons en compte ces entreprises aussi et mettons leurs dirigeants sur la liste de ceux qui seront tenus de faire une déclaration ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Guy Geoffroy. Et ça presse ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable, au nom de la liberté de la presse. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Laurent Furst. Copains et coquins ! C’est honteux !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. J’ai une interrogation. Puisque l’obligation de déclaration reposerait sur le fait que ces entreprises reçoivent des subventions publiques, un problème d’égalité se pose. Il serait cohérent d’adopter une proposition semblable à celle de M. Cherki en élargissant le champ de votre amendement…

M. Jacques Myard. Sous-amendez !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. …à l’ensemble des entreprises recevant des aides ou subventions publiques.

M. Jacques Myard. Et il y en a un paquet !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Ce serait alors un axe Myard-Cherki qui nous permettrait d’obtenir satisfaction. (Sourires.) Sinon, vous infligez un traitement péjoratif qui n’est pas acceptable eu égard à la liberté de la presse. Mais si l’important, c’est de contrôler les aides publiques, alors pour le coup ayez, vous, du courage, et nous pourrons avancer sur ce terrain.

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Nous voyons bien que M. Myard et ses collègues de l’UMP qui l’ont bruyamment applaudi n’aiment pas tout ce qui peut être indépendant : la justice – question après question, ils réclament des sanctions contre les magistrats, surtout s’ils appartiennent à un certain syndicat – et à présent les entreprises de presse.

Ce que je regrette, monsieur Myard, c’est que vous et vos collègues de l’UMP, qui étaient présents hier soir, n’aient pas soutenu hier soir mon amendement n° 34, sur la loi organique, qui visait à traiter le conflit d’intérêts – car je vous rappelle que c’est le sujet de ces projets de loi – chez ceux qui exercent un mandat public et sont en même temps patrons de presse. M. Morin, que je remercie à cette occasion, n’ayant pu le faire hier, pris dans le maelström autour de l’amendement n° 49, m’a soutenu, en citant concrètement le cas bien connu d’un sénateur UMP – il faut bien le dire –, par ailleurs patron d’un groupe d’armement ainsi que d’un groupe de presse possédant un grand journal ! Cette personne, si j’en crois les propos de M. Morin, qui parlait d’expérience en tant qu’ancien ministre de la défense, a clairement usé de sa situation de conflit d’intérêts pour peser dans les débats sur les choix d’armement en France.

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard. La liberté de la presse a bon dos, monsieur le rapporteur ! La liberté de la presse est-elle en cause avec cet amendement ? Non ! Il s’agit simplement de savoir si l’on veut appliquer cette règle à des médias peuvent avoir reçu à certains moments quelques avantages pour lancer des campagnes de presse et soigner leurs présentations – jamais biaisées, on le sait bien ! Tous ces gens sont tellement objectifs, tellement vertueux ! C’est cela qui est en cause !

Quant aux propos de notre collègue écologiste, ils tombent à côté de la plaque. Il s’agit de savoir ce que l’on veut. Faut-il faire échapper à cette obligation de transparence toutes celles et tous ceux qui ont un pouvoir d’influence, qui peuvent orienter l’opinion publique avec des moyens médiatiques mille fois plus puissants que nos propres personnes, alors que c’est à nous que l’on prête ce pouvoir, nous qui toucherions de l’argent pour défendre des lobbies ? Où est la logique ? Il n’y en a aucune ; et une fois de plus, vous vous couchez ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin, pour une brève intervention, si nous ne voulons pas nous coucher trop tard ! (Sourires.)

M. Hervé Morin. Pour ne pas que vous vous couchiez trop tard, monsieur le président, j’ajouterai juste une chose. Dans ce qui est devenu aujourd’hui une démocratie d’opinion,…

M. Jacques Myard. Voilà !

M. Hervé Morin. …il serait cohérent, pour plus de transparence, pour que chaque citoyen puisse connaître les enjeux, les influences, les intérêts et les pouvoirs, que les dirigeants de presse, et pas seulement des entreprises ayant accès aux subventions publiques, fassent eux-mêmes, si l’on considère que les médias sont un quatrième pouvoir,…

M. Guy Geoffroy. Sans contre-pouvoir !

M. Jacques Myard. Oui, allons-y !

M. Hervé Morin. …une déclaration sur les éventuels conflits d’intérêts. Ces grands groupes de presse font l’opinion matin, midi et soir, devraient de voir appliquer un régime comparable à celui du pouvoir législatif.

M. Jacques Myard. Très bien !

(L’amendement n° 208 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 209 et 332, pouvant être soumis à une discussion commune.

Sur le vote de l’amendement n° 209, je vous indique d’ores et déjà que je suis saisi par le groupe UMP d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Jacques Myard, pour soutenir l’amendement n° 209.

M. Jacques Myard. Les syndicats sont nécessaires à la démocratie – du reste, nous souffrons trop souvent, en France, d’une faiblesse des syndicats. Ils touchent des subventions d’État et concourent directement au dialogue social. Dans certains cas, on voit bien qu’il peut y avoir des modalités d’influence un peu obscures, sans parler de leu utilisation, dans un temps ancien et révolu, par des puissances étrangères ; cela a malheureusement existé, à droite comme à gauche. Les dirigeants de ces syndicats devraient être soumis à cette déclaration de patrimoine. Cela permettrait de faire la lumière et peut-être, après tout, de découvrir un certain nombre de choses.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Exactement !

M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 332.

M. Jean-Charles Taugourdeau. J’ajouterai aux propos de notre collègue Jacques Myard que la déclaration de patrimoine des dirigeants des syndicats nationaux ne porterait en aucune façon atteinte à la liberté du droit de grève, monsieur le rapporteur.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable, au nom de la liberté syndicale. (Rires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Il y a là une vraie incohérence du Gouvernement et de la majorité. Le Premier ministre lui-même, et il a raison, je le soutiens dans cette idée, considère que tout ne doit pas procéder d’en haut, qu’il faut désormais conduire une partie de l’exercice de la réforme dans le cadre d’une société décentralisée, grâce aux corps intermédiaires. Nous avons siégé sur les bancs de cet hémicycle, pendant plusieurs jours et plusieurs nuits, pour traduire sur le plan législatif un accord interprofessionnel : à travers l’accord national interprofessionnel, les syndicats ont indirectement participé à l’élaboration de la loi.

Par ailleurs, je me permets de vous signaler que l’État gère quelque 300 milliards d’euros par an alors que le paritarisme gère la bagatelle de 650 milliards… Quand on parle de réforme de l’État, on oublie toujours que le premier facteur de réforme de l’État serait de mettre fin au millefeuilles du paritarisme, qui empêche d’améliorer le fonctionnement de l’ensemble de la sphère publique.

Nous avons des syndicats qui gèrent une grande partie de la dépense publique, qui font œuvre de réforme et de transformation législative, et nous considérerions que leurs dirigeants ne sont pas concernés par la transparence que nous sommes en train de mettre en place dans notre pays ? Je suis favorable à ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy.

M. Guy Geoffroy. Notre rapporteur est un homme affable, – en un mot (Sourires) et il a parfois un sens de l’humour intéressant. Mais l’humour dont il a fait preuve en en appelant à la liberté de la presse, puis, avec un grand sourire, à la liberté syndicale, m’amène à lui poser une question, tirée de l’absurdité de sa déclaration : devons-nous en déduire que nous n’avons pas de liberté dans l’exercice de notre mandat, puisque nous allons être soumis au dispositif que vous êtes en train de faire voter par la représentation nationale ? Expliquez-vous, monsieur le rapporteur ! Car nous serions fondés à dire qu’au nom de la liberté des représentants du peuple, nous n’avons pas à nous voir imposer ce que le Gouvernement nous impose. J’aimerais des explications. Vous présentez souvent des amendements de cohérence ; je ne voudrais pas vous avoir pris en flagrant délit d’incohérence.

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard. Lorsqu’on commence à passer la lessive partout, il faut aller jusqu’au bout, ou bien l’on est dans l’incohérence et la contradiction. La liberté ne se divise pas, monsieur le rapporteur ; ce n’est pas moi qui le dis, cela remonte aux pères de la Troisième République. Dès lors que l’on est sur un logiciel, on va au bout, ou bien abstenez-vous d’entrer dans cette usine à gaz ! Je regrette que votre devise ne soit autre que « Courage, fuyons ! »

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Je souhaite répondre à Guy Geoffroy. Nous sommes sur le projet de loi ordinaire. Durant la discussion du projet de loi organique, j’ai souvent refusé des amendements au nom précisément de l’autonomie des chambres et de leur liberté : c’est ce qui explique aussi qu’il n’y ait pas de pouvoir d’injonction de la Haute Autorité sur les parlementaires. Je crois avoir, par ce refus et par mes propres amendements, préservé la liberté des parlementaires.

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix l’amendement n° 209.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 85

Nombre de suffrages exprimés 85

Majorité absolue 43

(L’amendement n° 209 n’est pas adopté.)

M. le président. Je vais à présent mettre aux voix l’amendement n° 332.

(L’amendement n° 332 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour soutenir l’amendement n° 328.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Nos concitoyens attendent une réelle transparence sur l’utilisation des données publiques. Je vous propose d’ajouter les présidents des associations nationales bénéficiant de subventions publiques d’État à la liste des personnes assujetties à l’obligation de déclaration de situation patrimoniale. Je ne sais pas quelle liberté va invoquer le rapporteur…

M. Denys Robiliard. La liberté d’association !

M. Jean-Charles Taugourdeau. La liberté associative, sans doute.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Avis défavorable, au nom de la liberté d’association.

(L’amendement n° 328, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 83.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il est défendu.

(L’amendement n° 83, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 10, amendé, est adopté.)

Après l’article 10

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard, pour soutenir l’amendement n° 144 rectifié.

M. Jacques Myard. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Avis défavorable au nom de l’opposition aux peines automatiques.

(L’amendement n° 144 rectifié, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel, pour soutenir l’amendement n° 404 rectifié.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Cet amendement vise à doter enfin les collaborateurs parlementaires d’un véritable statut qui trouverait naturellement sa place dans le règlement de chacune des assemblées et permettrait d’en finir avec les différents abus favorisés par le flou total qui entoure l’exercice de ce qui est, nous le savons tous, une véritable profession, ou qui devrait l’être.

M. Jacques Myard. Corporatisme !

Mme Marie-Françoise Bechtel. Les collaborateurs parlementaires – institutionnalisés depuis 1976 avec l’introduction de crédits collaborateurs, sous l’impulsion, je crois, du président Edgar Faure – ont toujours existé, qu’on les ait appelés assistants, attachés, parfois même aides dactylographiques dans les années 1950 ou encore conseillers. Malgré cette permanence, qui répond à un besoin évident pour les parlementaires d’une assistance logistique et technique – au sens le plus noble terme incluant le juridique –, ces collaborateurs, au nombre de 4 000 environ, se trouvent dans des situations extrêmement diverses et hétérogènes, qu’ils s’affairent à Paris ou dans les circonscriptions.

Le souci de l’intérêt général qui doit commander l’action du législateur demande qu’il soit mis fin une bonne fois pour toutes à cette opacité, pour deux raisons distinctes bien que complémentaires. Premièrement, la précarité forcée qui marque la situation de nos collaborateurs est une réalité, même si les conditions dans lesquelles ils quittent leur fonction, naturellement ou par le choix de leur employeur, ont été humanisées par la règle du versement des six mois de rémunération à la cessation de l’exercice des fonctions. Pour le reste, force est de constater qu’en l’absence de conventions collectives, tous ces personnels employés dans des conditions du droit privé forment une communauté parmi les plus fragilisées de celles régies par un droit du travail réduit au minimum.

Deuxièmement, se pose la question des conflits d’intérêts. Comme le relevait récemment le président de la commission des lois au cours d’une séance de la commission, à l’occasion du présent texte, une proportion anormale de collaborateurs semble aujourd’hui être prise en charge par des employeurs privés. Il existe des cumuls d’activités chez des assistants qui ont des contrats avec des organismes privés, parfois des organismes de veille, et qui parfois aussi cumulent une activité de lobbying et travaillent auprès d’un parlementaire.

Nous le savons tous, mais je vous demande de ne pas fermer les yeux une fois encore. C’est en effet au règlement de chacune des assemblées, souveraines pour déterminer le statut du personnel travaillant en leur sein, qu’il revient d’établir un statut du collaborateur parlementaire qui s’appliquerait à détailler aussi bien les droits professionnels, qui aujourd’hui ne résultent que de la jurisprudence des prud’hommes, que leurs devoirs, notamment déontologiques.

Cette solution raisonnable pourra sembler à certains trop radicale, mais elle permet, par le renvoi au règlement, une réflexion mûrie et une véritable étude d’impact sur les contours souhaitables de ce futur statut.

Mme Chantal Guittet. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Je partage naturellement votre souci du fond.

M. Jacques Myard. Cela commence mal !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Toutefois je ne peux pas accepter votre amendement. Si l’on inscrivait le statut des collaborateurs dans le règlement de l’Assemblée nationale, au-delà du fait que cela ne concernerait pas les collaborateurs du Sénat, nous aboutirions à un texte particulièrement rigide ou figé, alors que le statut est par essence évolutif et qu’il appelle des négociations paritaires. Je souhaiterais que le chemin que pourra prendre l’Assemblée – et elle s’en honorerait – vienne plutôt d’une décision du Bureau, comme c’est déjà le cas pour le statut des fonctionnaires parlementaires.

M. François Rochebloine. Bonne réponse !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée nationale pour respecter l’autonomie des assemblées.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel.

Mme Marie-Françoise Bechtel. Je maintiens mon amendement, même si j’ai entendu, compris et apprécié ce qu’a dit le président et rapporteur, car par la notion de statut, il ne s’agit pas, dans mon esprit, de définir un corset rigide, mais quelques éléments-clés relatifs notamment à la rémunération, aux positions, à la grille indiciaire ou à la cessation de fonction, points autour desquels le Bureau pourrait ensuite bâtir quelque chose de souple qui permettrait l’évolution du statut. Mais je crois qu’il faut fixer quelques éléments de statut et rappeler par la loi les deux assemblées à leurs devoirs.

(L’amendement n° 404 rectifié n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour soutenir l’amendement n° 335.

M. Laurent Wauquiez. Ce projet de loi impose beaucoup d’obligations aux élus, ce qui est sans doute compréhensible puisque l’élu a plus de devoirs que les autres ; je ne doute pas sur ce point du soutien de M. Myard.

M. Jacques Myard. Les élus, ce sont des affreux !

M. Laurent Wauquiez. Encore faut-il que ces obligations s’imposent aussi à d’autres : il ne faut pas oublier que l’enrichissement de M. Cahuzac vient d’une activité de cabinet ministériel et qu’il l’a ensuite recyclé dans un conseil aux entreprises pharmaceutiques.

M. Matthias Fekl. Et M. Guéant ? Soyez complet !

M. Laurent Wauquiez. Nous proposons, pour les déclarations de conflits d’intérêts, de mettre en place une traçabilité sur une période de cinq ans, qui porte à la fois sur les membres du cabinet ministériel et les collaborateurs du Président de la République relativement aux activités professionnelles, aux activités de consultants, aux participations détenues et aux participations financières directes. Encore une fois, il s’agit d’assurer une transparence et un contrôle. Il ne s’agit pas de les interdire. Je suis favorable au fait de donner des informations, mais pas aux interdictions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Avis défavorable. Le présent projet de loi n’impose à aucune autre personne une telle contrainte. En application de l’article 87 de la loi du 23 janvier 1993, les membres des cabinets ministériels doivent faire l’objet d’un avis de la commission de déontologie, s’ils souhaitent exercer une fonction dans une entreprise avec laquelle ils auraient été en rapport dans les trois ans qui suivent la fin de leur fonction au sein du cabinet. Ce même délai de trois ans s’applique au délai de pantouflage ou de prise illégale d’intérêts à l’issue de fonctions publiques prévues par l’article 432-13 du code pénal. Les deux volets préventif et répressif pour une durée de trois ans apparaissent suffisants pour le contrôle du pantouflage des membres de cabinet, sans qu’il soit nécessaire de mettre en place une troisième obligation pour un délai supérieur.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis que la commission.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Je suis un peu étonné des amendements-leçons que nous propose M. Wauquiez sur un tel sujet. Je n’ai pas le sentiment que les gouvernements auxquels il a appartenu aient été particulièrement exemplaires. Je ne citerai pas de noms, mais il est évident que tout le monde pense à ceux qui ont organisé un certain nombre de regroupements bancaires pour en prendre la direction par la suite. M. Wauquiez, pour être plus crédible, devrait être un peu plus modeste. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Ce qu’il y a de terrible avec M. Dosière, c’est la tournure que prennent parfois ses interventions, tout à la fois personnelle et agressive, et souffrant d’un petit manque de vision globale. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Pascal Popelin. Parole de spécialiste !

M. Laurent Wauquiez. Monsieur Dosière, quel dommage que vous ne fassiez pas preuve d’un esprit un peu plus constructif ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Chaynesse Khirouni. Vous jouez mal, monsieur Wauquiez !

M. Laurent Wauquiez. Vous avez une affaire qui est simple ; nous avons eu sous les yeux un exemple simple, qui a abouti à ce projet de loi, pour essayer de corriger la situation. Cette réalité, quelle est-elle ? Un membre d’un cabinet ministériel, au ministère de la santé, est devenu, dans la foulée de sa participation à ce ministère, consultant pour des entreprises pharmaceutiques : c’est tout de même assez basique. Ce que je vous propose, ce n’est pas d’accuser les cabinets de gauche ou de droite : nous avons essayé tout au long de ce débat de nous placer un peu au-dessus de cela.

M. Matthias Fekl. ON essaie, mais on n’y arrive pas !

M. Laurent Wauquiez. Ce sont là des domaines à propos desquels nous pouvons tous balayer devant notre porte. Il n’est pas question de lancer quelque accusation que ce soit : il s’agit de la République et nous pouvons essayer d’améliorer un tant soit peu la situation. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Mais visiblement, cela vous gêne !

M. Denys Robiliard. C’est pour cela que vous parlez de Jérôme Cahuzac !

M. Laurent Wauquiez. Pardonnez-moi, mais ce n’est pas moi qui ai parlé de M. Cahuzac : c’est François Hollande, c’est votre Président de la République ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Denys Robiliard. C’est aussi le vôtre !

M. Laurent Wauquiez. C’st lui qui, lorsqu’il a présenté son projet de loi, a expliqué que ce projet était la conséquence et la déclinaison de l’affaire Cahuzac. C’est lui-même, dans le premier discours qu’il a tenu à l’Élysée, qui a reconnu que le projet de loi qu’il portait était destiné à remédier aux conséquences apparues à l’occasion de l’affaire Cahuzac. Cela vous fait peut-être mal,…

Mme Chaynesse Khirouni. Non, pas du tout !

M. Laurent Wauquiez. C’est peut-être difficile à entendre pour vous, mais la réalité est que ce projet de loi est d’abord le fruit de l’affaire Cahuzac. Dans ces conditions, on peut attendre que vous souteniez des amendements destinés à éviter que cette trahison, qui vient de vos rangs, ne se reproduise !

(L’amendement n° 335 n’est pas adopté.)

Article 11

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 190.

M. Lionel Tardy. La possibilité de consultation, par les électeurs inscrits sur la liste électorale, des déclarations patrimoniales d’un certain nombre de personnes élues me semble avoir pour effet d’instituer et d’entretenir un climat de suspicion généralisée. Je ne m’étendrai pas sur ce sujet toutefois, puisque nous en avons longuement débattu hier soir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. C’est le début d’une nouvelle série d’amendements miroirs, déjà proposés dans le cadre de la loi organique. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Nous avons déjà répondu longuement à cette question hier soir. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. « Il a trompé les plus hautes autorités du pays : le chef de l’État, le Gouvernement, le Parlement et, à travers lui, tous les Français. C’est une faute, c’est une faute impardonnable. »

Mme Chantal Guittet. C’est un amendement ?

M. Laurent Wauquiez. « C’est un outrage fait à la République. D’autant que les faits reprochés sont eux-mêmes intolérables. […] Donc, toute la lumière sera faite. […] J’affirme ici que Jérôme Cahuzac n’a bénéficié d’aucune protection. […] C’est un choc qui vient de se produire. […] Je suis donc amené à prendre trois décisions qui vont dans le sens des engagements que j’avais pris devant les Français. […] La défaillance d’un homme doit nous rendre encore plus exigeants, plus intransigeants, et je le serai. […] L’exemplarité des responsables publics sera totale. C’est mon engagement. »

Est-ce là une déclaration de Guy Geoffroy ? De Christian Jacob ? D’un député UMP ? Non, c’est une déclaration de François Hollande !

M. Alain Chrétien. Il était au courant depuis le 15 décembre !

M. Laurent Wauquiez. Cela prouve bien – et c’est ce qui vous gêne – que la totalité de ce projet de loi n’est que le prolongement, à ce stade, de l’affaire Cahuzac. La moindre des choses que l’on peut attendre de vous, c’est que, sur tous les points d’identification de l’affaire Cahuzac, vous acceptiez les amendements qui permettraient d’y remédier. C’est là le socle de crédibilité minimale : faire en sorte, à travers cette loi, que ce qui a été révélé par l’affaire Cahuzac ne se reproduise pas. Ne vous cachez pas derrière votre petit doigt : oui, cette loi est le fruit de l’affaire Cahuzac ; oui, ce que nous essayons de faire dépasse le cadre de l’affaire Cahuzac pour essayer plus largement, de garantir une meilleure exemplarité de la République ; mais, à la base, c’est d’abord la trahison de M. Cahuzac qui justifie notre présence ici. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy.

M. Guy Geoffroy. Sans répéter ce que vient de dire excellemment notre collègue Laurent Wauquiez, il est bon de temps en temps de rappeler les raisons de ces textes pour ne pas s’éloigner de l’objet du débat : ces lois, ce sont les lois Cahuzac. Cela ne vous fait pas plaisir qu’on le dise, mais c’est ainsi.

M. Pascal Popelin. Vous faites moins bien que M. Wauquiez : vous en parlez moins souvent !

M. Guy Geoffroy. Je n’interviendrai pas systématiquement sur les amendements miroirs, mais je voulais revenir sur une information que nous a donnée hier le ministre : il a dit que notre demande à être informés des personnes qui s’intéressent à notre patrimoine sera satisfaite par la tenue d’un registre. Mais je voudrais vraiment savoir pourquoi le Gouvernement souhaite ne pas aller au-delà. Nous devons être transparent jusqu’au bout. Je veux bien que des électeurs, de ma circonscription aujourd’hui et de ma commune demain – puisqu’elle fait plus de 20 000 habitants, j’aurai une seconde série de déclarations à rédiger !–, viennent consulter ; cela ne me dérange pas. Mais pourquoi ne pas établir un équilibre naturel et transparent entre celui qui veut savoir, et auquel la loi donne la légitimité d’y parvenir, et celui dont on veut tout connaître, mais qui n’aurait pas la légitimité pour savoir qui est intéressé par son patrimoine ?

M. Laurent Wauquiez et M. Christian Jacob. Tout à fait !

M. Guy Geoffroy. Vous avez trouvé un biais : le registre, J’en ai pris acte, monsieur le ministre ; mais pardonnez-moi l’expression, c’est jouer petit bras. Vous seriez beaucoup plus crédible si vous acceptiez le principe de la transmission systématique à l’élu concerné du nom – puisqu’il faut, vous l’avez dit, donner son nom – des personnes qui demandent à consulter ses déclarations de patrimoine. Cela me semble tout simplement la plus élémentaire des équités et des transparences. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

(L’amendement n° 190 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 16.

M. Lionel Tardy. Il est défendu, monsieur le président.

(L’amendement n° 16, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n° 54.

Mme Isabelle Attard. L’objet de cet amendement est de préciser que les informations contenues dans la déclaration d’intérêts peuvent être réutilisées s’il ne s’agit pas d’éléments relevant de la vie privée, afin de lever les blocages éventuels et contreproductifs de la CNIL.

Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, si notre désaccord n’est que rédactionnel, l’amendement pourrait être ainsi rectifié : « Les informations qui sont publiées sont réutilisables au sens de l’article 10 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978. »

Ce projet de loi portant sur la transparence, il importe, M. Tardy ne me désavouera pas, que les informations contenues dans les déclarations d’intérêts soient sous format ouvert et réutilisable.

M. Lionel Tardy. Le débat là-dessus, c’était hier !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Mme Attard n’était pas là hier quand nous avons longuement débattu de ce point. Nous y avons passé vraiment beaucoup de temps.

M. Laurent Wauquiez. Mais c’était intéressant, et il n’est pas inutile de s’assurer de la compatibilité des deux projets !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Par cohérence, la commission émet un avis défavorable comme elle l’a fait sur l’amendement présenté hier.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le rapporteur l’a expliqué : nous retrouvons ici un amendement miroir que l’Assemblée a refusé au moment de l’examen du projet de loi organique. C’est donc une question de cohérence. Cela dit, madame Attard, je tiens à redire que le Gouvernement est favorable à votre démarche, et que nous la reprendrons devant le Sénat. Les difficultés signalées par le rapporteur au regard de l’équilibre des droits des uns et des autres par rapport à l’utilisation des données publiées par la Haute autorité ne doivent pas nous dissuader de trouver une solution. On ne comprendrait pas très bien une éventuelle restriction à cet égard. Je connais l’avis de la CNIL qui a généré certaines réticences à la suite du vote de la loi sur les lanceurs d’alerte et la sécurité sanitaire, mais je maintiens que cette démarche mérite d’être à nouveau envisagée. Si la cohérence par rapport au projet de loi organique doit l’emporter à ce stade, je réitère que le Gouvernement est favorable sur le fond à l’objectif de ces amendements.

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Je sais pertinemment que ce thème a déjà été débattu hier, et c’est pour cette raison que j’ai proposé une légère modification rédactionnelle.

(L’amendement n° 54 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 101 rectifié.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Simple parallélisme avec un amendement adopté lors de l’examen du projet de loi organique.

(L’amendement n° 101 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 17 et 203.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 17.

M. Lionel Tardy. Au coeur du débat, il y a la question de la vérification, du contrôle. Nous nous en sommes expliqués hier : il est permis de douter que la Haute autorité aura les moyens de pouvoir exercer un réel contrôle, sachant qu’elle aura plus de 7 000 déclarations de patrimoine à examiner.

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin, pour soutenir l’amendement n° 203.

M. Hervé Morin. Je le redis une nouvelle fois au Gouvernement et à la majorité : si l’on veut la transparence, celle-ci doit être totale. Or la procédure que vous avez choisie va au contraire alimenter la rumeur, la délation, les campagnes d’insinuation. J’aurais largement préféré que nous allions vers une déclaration totalement transparente : après tout, c’est ce qu’on fait les membres du Gouvernement, et passée la curiosité des premiers jours, depuis tout le monde s’en fout…

M. Lionel Tardy. Tout à fait !

M. Hervé Morin. Je ne vois donc pas pourquoi on mettrait en place pour les parlementaires un dispositif différent.

J’ajoute à l’intention de notre rapporteur que s’agissant de ces délateurs en puissance dont j’ai oublié la dénomination dans le texte…

M. Guy Geoffroy. C’est tout à fait cela ! Vous vouliez parler des lanceurs d’alerte ?

M. Hervé Morin. Les lanceurs d’alerte, merci, monsieur Geoffroy !

M. Guy Geoffroy. Disons les délateurs d’alerte !

M. Gérard Bapt. Non, les lanceurs d’alerte ne sont pas des délateurs !

M. Christian Jacob. Si ! Ils ont un statut de délateur !

Rappelons au passage que la délation n’est désormais plus utilisée par l’administration fiscale – tout au moins quand elle est anonyme. Quoi qu’il en soit, j’aimerais que l’on précise bien que lorsqu’un citoyen alerte la Haute autorité, l’anonymat ne sera pas accepté. Je vous signale ensuite que, compte tenu de l’ampleur du dispositif que vous vous préparez à adopter, ce ne sont pas vingt fonctionnaires qui suffiront !

M. Lionel Tardy. C’est vrai !

M. Hervé Morin. Quand vous êtes maire, vous constatez qu’il n’y a pas de semaine où vous ne recevez des délations, où tel citoyen ne vous alerte sur le voisin.

M. Guy Geoffroy. Souvent des amis d’ailleurs !

M. Hervé Morin. Souvenons-nous qu’au moment de Vichy, il y avait quarante millions de délateurs. Partis comme on est, il va falloir des centaines de fonctionnaires !

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Je vais tout à fait dans le sens de ce que vient de développer M. Morin. Il est regrettable que vous vous arrêtiez à mi-chemin, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur. Il y a des bonnes intentions, mais ce compromis bancal que l’on retrouve dans un très grand nombre de vos articles aboutit à une transparence très compliquée à gérer ; c’est de la transparence de coffre-fort, de la transparence de tractations de fond de préfecture, avec des conséquences qu’on n’aura beaucoup de mal à maîtriser. Il aurait bien mieux valu aller jusqu’au bout de votre raisonnement ou, au contraire, admettre de n’avoir aucune transparence. À cet égard, le raisonnement suivi pour les conflits d’intérêts est beaucoup plus simple et permet une limpidité d’exposition qui va beaucoup plus loin. Tant qu’à faire de la transparence, il ne faut pas le faire au rabais.

(Les amendements identiques nos 17 et 203, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 157, 162 et 232.

La parole est à M. Jacques Myard, pour soutenir l’amendement n° 157.

M. Jacques Myard. Il est évident que cet article institue le droit à la rumeur, surtout avec son alinéa 3 qui dispose que « ces déclarations de situation patrimoniale sont, aux seules fins de consultation, tenues à la disposition des électeurs inscrits sur les listes électorales ». On sait très bien que la démocratie est en train de mourir de la rumeur, et comment fonctionne la désinformation : une chose fausse répétée à satiété devient une vérité. On ouvre ici la porte aux propos du genre : « Je connais quelqu’un qui a consulté, et je peux t’affirmer que ce qu’a dit l’élu n’est pas vrai. » Je m’étonne qu’il y ait au parti socialiste des gens qui laissent la loi aller dans ce sens. Il faut manifestement s’attendre, surtout avec internet, à une explosion de comportements de ce genre ; vous courrez à longueur de temps après la rumeur, qui est véritablement la cause de la perdition de la démocratie. Je demande donc la suppression des alinéas 2 à 8 de cet article 11 qui est véritablement un coup bas contre la République !

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n° 162.

M. Gilles Lurton. Cet amendement va sans doute vous apparaître quelque peu miroir, monsieur le ministre, après ceux que j’ai défendus ces deux derniers jours ; mais comme l’ont dit mes collègues, ce projet de loi est une véritable intrusion dans la vie patrimoniale des députés et, pire encore, dans celle de leur famille. Je suis très choqué que vous obligiez les familles des députés, lesquelles n’ont pas forcément soutenu leur choix de faire de la politique, à faire connaître leur patrimoine.

M. Laurent Wauquiez. Vous avez raison !

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 232.

M. Damien Abad. Je ne vais pas refaire le débat d’hier…

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Mais un peu tout de même ! (Sourires.)

M. Damien Abad. …par charité chrétienne pour ce gouvernement qui est déjà en proie à tant de difficultés et de souffrances internes…

Mme Chantal Guittet. Et l’esprit de laïcité ?

M. Damien Abad. Mais je tiens à dire que les dispositions prévues dans cet article sont le cœur et le corps du projet de loi, mais aussi de là où vous auriez pu aller mais là où vous n’avez pas voulu aller, par refus, par absence de choix ou par hésitation. Je vous le vous garantis, au-delà de toute étiquette politique : le pire des systèmes, c’est celui que vous avez choisi, la « publication non publiable », comme disait M. de Rugy, c’est-à-dire la consultation sans publication. Vous aurez tous les inconvénients du système sans en avoir les avantages.

M. Jacques Myard. Eh oui !

M. Damien Abad. Vous auriez mieux fait d’aller jusqu’au bout, comme l’a dit mon collègue Wauquiez, en retirant purement et simplement cet article. Mais ce que vous proposez n’a pas de sens, n’a ni queue ni tête. C’est vraiment dommage : vous méritiez mieux que cela. La consultation sans publication, c’est l’institutionnalisation de la délation, à votre détriment et au détriment de l’ensemble des parlementaires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le principe du débat démocratique ne peut se limiter à faire des commentaires sur les propositions des autres. À mon tour de le faire de manière miroir : le Gouvernement et sa majorité auraient aimé savoir d’une manière claire et nette quelles sont les propositions cohérentes et globales de l’UMP dans cette affaire. Cela nous aura beaucoup manqué dans ces débats.

M. Matthias Fekl. Absolument !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Mais tout le monde l’a compris depuis des jours : vous vous livrez à une polyphonie absolument remarquable, ce qui explique du reste que vous en soyez réduits à faire des commentaires : certains d’entre vous pensent qu’il fallait aller beaucoup plus loin tandis que d’autres soutiennent que c’est une horreur, que l’on est en train de détruire la République !

On voit bien qu’en réalité, vous êtes extrêmement gênés, parce que votre bilan est très faible en matière de transparence. Tous vos arguments sont recevables, évidemment, mais dans le désordre. Nous sommes parfois d’accord avec certains, parfois avec d’autres. C’est le même débat qu’hier. Mais je pense à M. Geoffroy. Je connais ses grandes capacités intellectuelles et son esprit de synthèse. Pour faire l’explication de vote au nom de l’UMP, il faudra au moins son talent pour arriver à n’en faire qu’une seule.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. J’ai bien relevé les déclarations véhémentes de M. Morin contre ce que l’on appelle les lanceurs d’alerte.

Je voudrais simplement lui rappeler que cette procédure a été mise en place dans notre pays par un gouvernement auquel il appartenait, ainsi que M. Wauquiez. C’est en octobre 2007, à la suite d’un amendement de Michel Hunault – qui était aussi un membre de votre majorité –, que le garde des sceaux a accepté que cette procédure de lanceur d’alerte soit mise en place pour le secteur privé. Avec ce texte, nous étendons au secteur public une procédure que vous avez mise en place pour le secteur privé.

M. Jacques Myard. Ça n’a rien à voir !

M. Hervé Morin. Il s’agissait de protéger ceux qui dénonçaient des délits de corruption !

M. René Dosière. Je vous rappelle aussi, monsieur Morin, que l’article 40, alinéa 2, du code de procédure pénale prévoit – naturellement, dans le secteur public – la possibilité pour toute une série de personnes de faire les remarques justifiées. Cette procédure, pour des raisons diverses, est d’ailleurs mal appliquée.

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy.

M. Guy Geoffroy. Monsieur le ministre, avec tout le respect que je vous dois, vos propos me font penser à l’hôpital qui se moque de la charité.

M. Damien Abad. C’est vrai !

M. Jacques Myard. Quand il y a une crise sanitaire, c’est grave !

M. Guy Geoffroy. Quelques rappels. Le rapporteur général du budget qui, à ma connaissance, ne fait pas partie de l’UMP…

M. Damien Abad. Pas encore !

M. Guy Geoffroy. …a dit le 24 avril dernier qu’il ne voterait pas pour le projet de loi adopté par le conseil des ministres et qu’il était défavorable à la publication des patrimoines.

Notre président de la commission des lois et rapporteur : « On peut concrétiser l’engagement du Président de la République sans tomber dans l’exhibition. La transparence, ce n’est pas une vertu, c’est un moyen. » Je suis totalement d’accord avec lui – monsieur le ministre, cela vous permettra de réfléchir aux propos que vous entendrez dans ma bouche, mardi prochain – quand il conclut : « L’important, c’est l’absence d’enrichissement illicite et de conflit d’intérêts. » Nous sommes d’accord, cela résume tout et ce n’était pas la peine de monter cette usine à gaz qui va dysfonctionner à la première occasion.

L’occupant du perchoir quand notre excellent ami Marc Le Fur n’y est pas, le président Bartolone dit : « Cet affichage ne permet pas de démasquer les fraudeurs. Cet exhibitionnisme n’éteint pas les doutes des citoyens. »

M. Jacques Myard. Ça fait mal, hein, monsieur le ministre ?

M. Guy Geoffroy. Je vais plus loin en prolongeant son propos : ce que vous faites va aggraver les doutes des citoyens.

Je conclus mes citations – j’en ajouterai d’autres si vous ne les trouvez pas suffisantes – avec le très sage Dominique Raimbourg, qui dit qu’à partir du moment où cette machine a été lancée, « on est piégé : si vous n’avez rien, vous êtes des menteurs, et si vous avez beaucoup, vous êtes un voleur. » En plus ça rime, c’est très beau, c’est la vérité.

Vous faites une publication, sans publier, tout en publiant. Vous rendez possible la lecture de documents qui seront eux-mêmes expurgés par la Haute autorité, qui deviendront pour le citoyen qui les lira totalement ubuesques et incompréhensibles. En plus, et c’est le plus important, monsieur le ministre, vous ne donnez pas les moyens à votre délateur de pouvoir faire la comparaison – alors que c’est elle qui rend justement intéressant le travail que nous faisons – entre le document qu’il a sous les yeux et le document précédent et qui permet de répondre à la question : oui ou non, y a-t-il un enrichissement qui mérite de s’y intéresser ?

J’en arrive à ma conclusion et je vous remercie, monsieur le président, de me laisser ces quelques secondes. Puisque vous créez une Haute autorité, puisqu’elle va être formée de gens compétents, puisqu’elle va avoir des pouvoirs étendus, laissez-la, elle et elle seule, vérifier qu’il n’y a pas d’enrichissement personnel, pas de conflit d’intérêts. Vous n’avez pas besoin de mettre en piste les délateurs anonymes, ces clandestins de la fausse transparence que vous voulez mettre en place. Ce n’est que la sauvegarde de vos apparences de vertu et, dans ce domaine, vous n’avez aucune – aucune ! – leçon à donner à la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jacques Cresta. Vous non plus !

M. le président. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Pour prolonger l’intervention de mon collègue Geoffroy, je dirais que vous avez inventé la transparence infernale, celle qui est intenable et qui repose entièrement sur des délateurs.

Je vous repose une question à laquelle vous n’avez pas répondu hier : d’autres pays européens ont-ils instauré la consultation sans publication ? Si oui, lesquels, à quel coût et combien de personnes ont été embauchées dans les autorités de contrôle ? Il s’agit de savoir si vous mettez les moyens en cohérence avec votre volonté.

Vous ne répondez pas à cette question. Alors, de deux choses l’une : soit c’est encore une exception française, que vous devez nous justifier, soit c’est parce que vous n’avez pas mis les moyens et alors il s’agit juste d’un texte d’affichage, d’un paravent derrière lequel il n’y aura rien d’extraordinaire. Donnez-nous des informations concrètes sur ces points. C’est la quatrième fois que je vous le demande. L’Assemblée mériterait d’être éclairée par des éléments concrets et chiffrés.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Je voudrais revenir sur trois points qui me semblent vraiment être dans l’intérêt de notre débat. D’abord, ne soyez pas dans une posture consistant à faire croire que seuls les socialistes auraient fait avancer l’exemplarité et la transparence. M. Vidalies – et je rends hommage à son honnêteté tout au long de ce débat – a rappelé à intervalles réguliers ce qui a été fait avant vous par des gouvernements de gauche comme de droite.

M. Hervé Morin. Philippe Séguin !

M. Laurent Wauquiez. Philippe Séguin a permis des avancées considérables sur le financement de la vie politique, après des scandales qui, vous le reconnaîtrez, ont malheureusement entaché des partis d’origines diverses.

Même le quinquennat précédent, que vous vous acharnez à vouloir nier, a permis certaines avancées. Le déontologue sur lequel vous-même, monsieur Urvoas, vous vous êtes appuyé pour rejeter certains amendements, a été mis en place sous le quinquennat précédent. La déclaration de conflit d’intérêts que vous avez dû remplir en tant que ministre, monsieur Vidalies, a été créée par Nicolas Sarkozy. Le contrôle de l’Élysée par la Cour des comptes, monsieur Dosière, a été instauré sous le précédent quinquennat. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. On écoute M. Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Votre approche est à mon avis trop restrictive. L’exemplarité n’est pas un sujet d’affrontement qui doit être utilisé de façon politicienne ou partisane par la gauche contre la droite. C’est un défi pour la démocratie, d’ailleurs très bien résumé par Montesquieu, qui disait qu’un régime démocratique avait besoin de quelque chose de plus qu’un régime autoritaire : la vertu.

Nous essayons ici de nous doter d’un minimum de systèmes qui nous permettent d’organiser la vertu. Votre loi fait progresser les choses sur certains points, comme les conflits d’intérêts ou la mise en place de la Haute autorité. Nous parlons ici de thématiques sur lesquelles la France est dramatiquement en retard. Je rappelle que nous sommes avant-derniers dans le classement de l’OCDE, que nous sommes dans une situation catastrophique dans les statistiques sur la transparence et l’intégrité politique, que parmi les démocraties européennes, seuls deux pays n’ont toujours pas instauré la publication des déclarations de conflits d’intérêts : la France et la Croatie.

Nous avons effectivement un travail conjoint à mener pour améliorer la démocratie. Mais, de grâce, n’en faites pas un sujet d’affrontement entre la gauche et la droite parce que ce sujet mérite mieux. Convenez que l’on peut parfaitement souligner des angles morts de votre texte, tout en reconnaissant des avancées que nous pouvons construire ensemble.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je suis d’accord !

(Les amendements identiques nos 157, 162 et 232 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n° 55.

Mme Isabelle Attard. Dans le projet de loi du Gouvernement, les représentants français au Parlement européen étaient inclus avec les titulaires de fonctions exécutives locales dont la déclaration patrimoniale était rendue publique. En commission, nous avons séparé les élus locaux des parlementaires européens mais nous n’avons pas remis ces derniers dans la liste des personnes dont les déclarations de situation patrimoniale sont publiées, y compris avec restrictions.

Cet amendement vise à corriger cet oubli.

M. Jacques Myard. Il n’est pas mal, cet amendement !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Contrairement à ce qui vient d’être dit, il n’a jamais été question, dans le projet de loi initial, de soumettre les députés européens à la publicité de leur déclaration de leur patrimoine.

M. Jacques Myard. C’est bien dommage !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Attendez, je vais tenter d’expliquer ce que je peux, avec mes moyens. Seuls étaient visés, à l’article 11, les présidents d’exécutifs locaux. C’est justement pour éviter toute ambiguïté que la commission a décidé de traiter les députés européens dans un alinéa distinct alors qu’ils étaient auparavant mélangés – si je puis me permettre l’expression – avec les présidents d’exécutifs locaux. Mais cette modification purement formelle n’a rien changé au fait que les déclarations de patrimoine sont confidentielles.

Sur le fond, il ne paraît pas opportun de les soumettre à publicité, dans la mesure où ils sont déjà régis par d’autres règles spécifiques au Parlement européen,…

M. Jacques Myard. Et voilà !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. …notamment par des déclarations d’intérêts financiers rendues publiques sur le site internet du Parlement européen. Je peux entendre que, pour Jacques Myard, ce n’est pas un argument suffisant,…

M. Jacques Myard. Non !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. …mais il n’en demeure pas moins qu’il l’est pour les parlementaires européens. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. M. le rapporteur nous a expliqué que la simple consultation des déclarations, à la différence de la publication, prémunirait contre le fait qu’elles reçoivent une très large publicité auprès de tout le monde. Or je lis dans un hebdomadaire paraissant le mercredi des propos tenus par le plus haut responsable de l’Élysée : « Les informations sur le patrimoine des élus ne seront pas diffusables, c’est un fait. Mais qui empêchera un citoyen de les faire circuler sous la forme d’un tract anonyme ou depuis un site internet situé à l’étranger ? »

M. Guy Geoffroy. C’est ce que nous avons toujours dit ! Retirez votre projet de loi, monsieur le ministre !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Cette analyse assez exacte, qui émane du sommet de l’État, montre bien que la procédure que vous proposez n’est pas protectrice comme vous le pensez.

M. Guy Geoffroy. C’est accablant !

M. Jacques Myard. C’est un droit à la rumeur !

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Je voulais revenir sur un point que je n’arrive pas à comprendre à propos des parlementaires européens.

Monsieur Urvoas, dans votre argumentation assez habile, vous commencez par dire que la modification est purement formelle avant d’expliquer que les parlementaires européens vont bien être soustraits à l’obligation de déclaration de leur patrimoine. Vous nous expliquez que, bien sûr, ils ont des obligations propres au niveau du Parlement européen, mais j’aurais envie de dire que ce n’est pas notre problème. Nous – et, de ce point de vue, la subsidiarité pourrait jouer –, nous devons nous assurer que les parlementaires européens français respectent des obligations de déontologie imposées chez nous.

J’ai même tendance à considérer que c’est encore plus important s’agissant du Parlement européen, qui est soumis à la pression de lobbies dont nous connaissons le poids et l’importance. Pour avoir bien connu le Parlement européen, Damien Abad peut témoigner qu’il s’agit d’un univers où nous devons surveiller les situations potentielles de conflit d’intérêts.

Comment expliquer que les parlementaires nationaux soient soumis à des obligations qui ne sont pas imposées aux parlementaires européens français ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. C’est une confusion !

M. Laurent Wauquiez. Si c’est une confusion tant mieux, mais j’aimerais qu’elle soit levée.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le débat porte uniquement sur la publicité de la déclaration. Pourquoi y a-t-il cette distinction ? Vous connaissez le fonctionnement des structures gouvernementales et nous avons interrogé le secrétariat général des affaires européennes à ce sujet. Du point de vue juridique, en vertu des traités, le législateur national – c’est-à-dire vous – n’est compétent que pour définir le régime électoral et les inégibilités des députés européens. Voilà pourquoi nous avons pris cette précaution. C’est ce qui explique, au moins juridiquement, la distinction.

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard. L’interprétation du secrétariat général des affaires européennes est légèrement biaisée. Pourquoi ? Parce que cette loi, que je sache, va être une loi d’ordre public. Jusqu’à nouvel ordre, les membres français du prétendu « Parlement » européen sont des citoyens français. – sinon, ils ne pourraient pas siéger dans cette assemblée. Par conséquent, les lois de la République s’appliquent à eux. En l’occurrence, ils relèvent du code pénal, puisque ce texte comporte des sanctions pénales.

L’argument que vous mettez en avant est donc parfaitement nul et non avenu. Il faut donc inclure les représentants français au Parlement européen. Ils sont soumis à cette loi. Le reste n’est que littérature ou billevesées.

M. Laurent Wauquiez. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Je retire l’amendement n° 55.

M. Jacques Myard. Je le reprends !

M. le président. L’amendement n°55, retiré par Mme Attard, est repris par M. Myard.

(L’amendement n° 55 n’est pas adopté.)

M. le président. Mes chers collègues, il reste 187 amendements. Au début de la séance, nous avancions assez vite. Maintenant, nous avançons nettement moins vite. On pouvait imaginer, il y a encore un moment, que nous allions achever ce soir l’examen du texte ; cette perspective s’éloigne.

J’invite donc les uns et les autres à tenir compte de tout cela, sachant que, si nous ne terminions pas cette nuit, c’est demain, dans le courant de l’après-midi, que nous reprendrions nos travaux sur ce texte. Que chacun arbitre donc en fonction des informations que je viens de vous donner.

M. Hervé Morin. Il y a séance demain matin, monsieur le président !

M. le président. Oui, et c’est pourquoi nous ne pouvons pas travailler trop tard ce soir, mais la séance de demain matin porte sur deux autres textes, qui nous reviennent du Sénat. Dans l’hypothèse où nous n’achèverions pas ce soir l’examen du texte, nous ne le reprendrions donc que dans le courant de l’après-midi.

La parole est à M. le ministre délégué, dont j’imagine qu’il confirmera mon propos.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Je rappelle que la Conférence des présidents a inscrit des textes en points fixes à l’ordre du jour de la séance de demain matin. On ne peut en repousser l’examen, notamment parce que tous les députés sont convoqués pour les examiner. Il faudrait une réunion de la Conférence des présidents pour pouvoir poursuivre, peut-être demain après-midi, peut-être vendredi après-midi, l’examen du présent texte. La conférence sociale se tenant demain, il faudrait trouver un autre ministre pour me remplacer. Franchement, je pense que sur ce texte, il nous reste encore quelques débats importants : nous devrions pouvoir achever son examen ce soir, même assez tard,…

M. Guy Geoffroy. Tout à fait !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. …tout en tenant compte du fait qu’il y a séance demain matin.

Je constate que nous refaisons certains débats, alors qu’il y en a d’autres que nous n’avons pas eus. Pardon d’intervenir ainsi sur le déroulement de la séance, mais, franchement, je pense que nous pouvons avancer, en consacrant, pour l’essentiel, le temps qui reste à deux ou trois débats nouveaux et importants.

M. le président. Nous sommes d’accord.

La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Je voudrais une précision, monsieur le président : puisqu’il y a séance demain matin, nous aurons bien levé la séance, au plus tard, à une heure du matin, c’est bien cela ?

M. le président. Oui, sauf si nous pouvons terminer ce soir, auquel cas nous pourrions prolonger un peu au-delà d’une heure. Mais uniquement pour terminer, nous sommes bien d’accord.

M. Hervé Morin. Oui, nous pouvons prolonger la séance si c’est pour achever l’examen du texte. Mais je voudrais quand même que nous respections les conditions de travail des personnels de l’Assemblée.

M. le président. Vous avez la parole, cher collègue, pour soutenir l’amendement n° 213.

M. Hervé Morin. Il est défendu.

(L’amendement n° 213, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 87.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il est défendu.

(L’amendement n° 87, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Puis-je considérer que l’amendement n° 313 de M. de Rugy et plusieurs de ses collègues membres du groupe écologiste est défendu ?

Mme Isabelle Attard. Oui, monsieur le président.

(L’amendement n° 313, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 84 et 100, pouvant être soumis à une discussion commune.

L’amendement rédactionnel n° 84 est-il défendu, monsieur Schwartzenberg ?

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Oui, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 84 et soutenir l’amendement n° 100.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. La commission est défavorable à l’amendement n° 84 et favorable à l’amendement n° 100.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis.

(L’amendement n° 84 n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 100 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin, pour soutenir l’amendement n° 223.

M. Hervé Morin. Il est défendu.

(L’amendement n° 223, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 306.

M. Damien Abad. Il est défendu.

(L’amendement n° 306, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 136 et 159, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 136.

M. Guy Geoffroy. Il est défendu. Je renvoie à ce que je disais tout à l’heure.

(L’amendement n° 136, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Myard, pour soutenir l’amendement n° 159.

M. Jacques Myard. Puisque vous organisez la transparence à travers le trou de la serrure et qu’ensuite le droit à la délation fera florès sur la toile, il me semble que, puisque la démocratie – ne l’oubliez jamais –, c’est d’agir à visage découvert, les noms de celles et ceux qui viennent consulter les déclarations de patrimoine doivent être consignés. On doit pouvoir savoir.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable. Il n’y a pas lieu d’inscrire une telle disposition dans la loi. Je renvoie aux arguments que j’ai exposés hier, à propos des engagements du Gouvernement.

(L’amendement n° 159 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 137.

M. Guy Geoffroy. Il est défendu.

(L’amendement n° 137, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 307.

M. Damien Abad. Il est défendu.

(L’amendement n° 307, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 7.

M. Lionel Tardy. Je propose que la Haute autorité soit tenue d’informer le lanceur d’alerte du sort qui a été réservé à son alerte. Sinon, cela ne sert pas forcément à grand-chose.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Je crois me souvenir que nous avons bien parlé de cela hier, même si ce n’est peut-être pas M. Tardy qui s’exprimait ; peut-être était-ce l’un de ses collègues. Nous avions émis un avis défavorable, puisqu’il s’agissait d’une obligation sans sanction.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

(L’amendement n° 7 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Urvoas, pour soutenir l’amendement n° 99.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de précision.

(L’amendement n° 99, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 308.

M. Lionel Tardy. Il est défendu.

(L’amendement n° 308, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 11, amendé, est adopté.)

Après l’article 11

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 47 rectifié et 169 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n° 47 rectifié.

Mme Isabelle Attard. Cet amendement en reprend un autre que nous avions déposé en commission des lois, qui avait été repoussé sans trop d’explications. Il ne vise pas à faire la transparence sur l’IRFM, l’indemnité représentative de frais de mandat, dont nous avons discuté lorsque nous avons examiné le projet de loi organique, il vise à combler un vide juridique qu’ont souligné trois décisions du Conseil constitutionnel du mois de mars dernier. Le Conseil a effectivement constaté que trois candidats députés sortants avaient utilisé des sommes assez importantes, provenant de leur IRFM, pour financer leurs campagnes électorales, mais il n’a pas pu sanctionner par une peine d’inégibilité ce détournement de l’IRFM, faute de législation suffisante.

L’IRFM est faite pour financer les frais de mandat des parlementaires, et non pour financer les campagnes électorales, d’autant que cela engendre une inégalité entre les candidats.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 47 rectifié et soutenir l’amendement n° 169 rectifié.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Je suis favorable sur le fond, car cet amendement vient clarifier les éléments qui méritaient de l’être. Je vous suggère néanmoins, ma chère collègue de retirer votre amendement, au profit de l’amendement n° 169 rectifié que j’ai déposé. Je n’ose pas dire qu’il est mieux rédigé, mais il me semble qu’il est mieux placé dans le code électoral.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le Gouvernement est favorable à l’amendement du rapporteur. Il est également favorable, sur le fond, à l’amendement présenté par Mme Attard, mais la rédaction de celui-ci n’est pas totalement satisfaisante. Nous en souhaitons donc le retrait.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, madame Attard ?

Mme Isabelle Attard. Oui, car l’amendement du rapporteur est nettement mieux rédigé.

(L’amendement n° 47 rectifié est retiré.)

(L’amendement n° 169 rectifié est adopté.)

Article 11 bis

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 115 de M. Urvoas. Il s’agit d’un amendement de précision, auquel la commission est favorable.

(L’amendement n° 115, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 114 de M. Urvoas. Il s’agit d’un amendement de précision, auquel la commission est favorable.

(L’amendement n° 114, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 11 bis, amendé, est adopté.)

Article 11 ter

M. le président. La parole est à Mme Axelle Lemaire, inscrite sur l’article 11 ter.

Mme Axelle Lemaire. J’espère, monsieur le président, que vous ne m’en voudrez pas de prendre un peu de temps pour appeler l’attention de la représentation nationale sur l’importance de cet article 11 ter. Jusqu’à présent, nous avons beaucoup parlé de transparence de la vie publique sous l’angle des élus, moins sous celui des structures et des partis politiques qui animent aussi la vie politique. Or l’article 11 ter marque une avancée fondamentale dans la transparence du financement de la vie politique. Il reprend une proposition de loi qui avait été déposée par Jean-Marc Ayrault au mois de septembre 2010. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Christian Jacob. Ça, ce n’est pas une référence, pour nous !

Mme Axelle Lemaire. Si je vous dis « Premier Cercle », à quoi pensez-vous ? Si je vous dis « micro-parti », à quoi pensez-vous ? Moi, cela m’évoque une fumée opaque, mais peut-être que certains collègues, dans cet hémicycle, auront une idée un peu plus précise du contenu de ces notions.

Jusqu’à présent, la loi de 1988 prévoit que les dons de personnes physiques sont plafonnés à 7 500 euros par an et par parti. Ces dons doivent être versés au mandataire financier du parti et ils ouvrent droit à une déduction fiscale. Or ce plafonnement peut être contourné par le versement de plusieurs dons de 7 500 euros à différents partis politiques ou micro-partis, qui les reverseront ensuite à un même parti politique. Accessoirement, ce détournement permet d’obtenir une réduction d’impôt plus élevée.

Dorénavant, grâce à cet article 11 ter adopté en commission des lois, le plafonnement de 7 500 euros s’applique au total des dons faits aux partis politiques, et non plus au montant de chaque don fait à un parti. Il met ainsi un terme au contournement de l’esprit de la loi de 1988, en interdisant qu’une personne physique puisse donner plusieurs fois 7 500 euros à des partis et groupements politiques différents.

Il supprime également la distinction entre cotisations et dons, puisque les cotisations aux partis politiques – dont on s’acquitte quand on est encarté, quand on est membre d’un parti politique – entrent dans le champ de ce plafonnement. Plus possible, donc, désormais, d’acheter sa place au fameux « Cercle ». Si vous êtes riche, eh bien, vous êtes traité comme tout le monde en tant que donateur ou adhérent à un parti politique. Plus de « Tapis rouge, cher ami », plus de bingo pour les riches ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 113 de M. Urvoas. Il s’agit d’un amendement rédactionnel, auquel la commission est favorable.

(L’amendement n° 113, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 85.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je comprends bien qu’il serait opportun de plafonner les dons faits aux partis politiques, dans le sens qui vient d’être indiqué. Cette disposition risque cependant d’être contraire au principe constitutionnel énoncé à l’article 4 de la Constitution, relatif à la liberté d’organisation des partis et groupements politiques : « Les partis et groupements politiques se forment et exercent leur activité librement. » L’on peut être sensible, légitimement, à la liberté des syndicats, légitimement à la liberté des magistrats, légitimement à la liberté de la presse, légitimement, aussi, à la liberté des partis.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. L’argumentation du président Schwartzenberg est tout à fait pertinente. Avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le Gouvernement partage aussi cette analyse, et émet un avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Nous sommes très contents que cet article permette effectivement de limiter les financeurs multirécidivistes. Au top du palmarès, il y a M. Bergé, qui doit financer non seulement le PS mais aussi à peu près tous les micro-partis rattachés au PS. Je suis donc très heureux de voir que vous pouvez balayer devant votre porte aussi. C’est très bien.

M. Pascal Popelin. Ça ne nous gêne pas, nous !

(L’amendement n° 85 est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir l’amendement n° 56.

Mme Isabelle Attard. Il est défendu.

(L’amendement n° 56, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 11 ter, amendé, est adopté.)

Après l’article 11 ter

M. le président. Nous en venons à l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 11 ter.

La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 178.

M. Lionel Tardy. Si l’exemplarité doit s’imposer au sein des cabinets d’exécutifs locaux, elle ne doit pas moins s’appliquer aussi en matière de gestion, d’attribution de logements sociaux et de recrutement de collaborateurs par les offices publics de l’habitat. Cet amendement propose donc une coprésidence de ces offices publics et empêche le recrutement, par leurs dirigeants, de proches et membres de la famille d’élus de la collectivité dont dépend directement l’office public. Nous connaissons quelques exemples de ce type de pratiques.

(L’amendement n° 178, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Attard, pour défendre l’amendement n° 48.

Mme Isabelle Attard. Il est défendu, monsieur le président.

(L’amendement n° 48, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 176.

M. Lionel Tardy. Cet amendement élargit les cas d’inéligibilité aux élections municipales aux collaborateurs des cabinets des collectivités territoriales.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Nous n’avons pas évoqué cet amendement, mais nous avons évoqué les raisons pour lesquelles je donnerai un avis défavorable.

Le régime des inéligibilités ne peut en effet être étendu pour un simple motif d’opportunité. Le Conseil constitutionnel a rappelé à plusieurs reprises que le législateur ne saurait priver un citoyen du droit d’éligibilité dont il jouit en vertu de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen que dans la mesure nécessaire au respect du principe d’égalité devant le suffrage et à la préservation de la liberté de l’électeur. De plus, en portant de six mois à un an la durée de prise en compte de cette inéligibilité, cet amendement rendrait inéligibles des personnes qui pensaient pouvoir se présenter aux élections prévues en mars 2014 en quittant leurs fonctions avant septembre prochain. Cela serait donc contraire au principe de sécurité juridique.

M. Pascal Popelin. Les députés UMP avaient déjà déposé cet amendement sur un autre texte, maintenant ils recommencent !

(L’amendement n° 176, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 321.

M. Guy Geoffroy. Je ne serai pas trop long, monsieur le président.

Avec cet amendement, nous souhaitons attirer l’attention de l’Assemblée nationale sur un problème qui concerne certaines collectivités territoriales, en particulier les régions. En effet, aux côtés des services propres à ces collectivités, se sont développés depuis un certain temps de nombreux organismes financés en tout ou partie par des subventions régionales, ou, à tout le moins, par des subventions publiques. Leur statut les place à l’extérieur du champ de la collectivité régionale : elles échappent donc en grande partie au contrôle des élus de la collectivité.

On pourrait prendre, à cet égard, l’exemple de la région Île-de-France, où la part de crédits consacrée à ces établissements est en constante augmentation. Ces crédits ont augmenté de 37 % ces dernières années.

Il n’est donc pas normal que ces organismes continuent d’échapper au contrôle démocratique des assemblées locales. Cet amendement a pour objet d’y remédier, et de renforcer la transparence dans la gestion de ces organismes par la publication d’un rapport annuel donnant lieu à un débat public.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Il est vrai que, pour le coup, cet amendement-ci n’a jamais été discuté. Je suis heureux d’exposer les raisons pour lesquelles j’y suis défavorable.

Cet amendement demande donc la publication d’un rapport…

M. Guy Geoffroy. Et un débat !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. …donnant lieu à un débat : j’ai bien compris.

L’exposé sommaire donne un exemple : l’Île-de-France. Il précise également un certain nombre des éléments que devrait contenir ce rapport. Il serait donc nourri d’éléments tirés du rapport du président de la commission des finances du conseil régional d’Île-de-France – qui est M. Karoutchi, il me semble. Cela montre bien que l’opacité que vous dénoncez est toute relative !

Sur le fond, je n’ai pas de raison d’approuver cet amendement. La commission l’a rejeté. De plus, je crois vraiment qu’il s’agit d’un cavalier législatif.

(L’amendement n° 321, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. Laurent Wauquiez. Le concept d’opacité relative me paraît assez étrange !

M. Guy Geoffroy. Ce n’est plus la transparence, c’est la translucidité !

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 324.

M. Lionel Tardy. Il s’agit encore d’un très bon amendement de notre collègue Valérie Pécresse.

Dans de nombreux organismes où les régions sont représentées, cette représentation n’est assurée que par des membres de la majorité régionale, y compris lorsque plusieurs sièges sont à pourvoir. Le présent amendement vise donc à assurer davantage de transparence dans la vie publique – c’est le sujet du jour – en renforçant les droits de l’opposition régionale dans les organismes où le conseil régional est représenté.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. La commission estime qu’il s’agit d’un cavalier législatif. Cet amendement prévoit la présence d’un membre de l’opposition régionale dans ces organismes : cela n’a pas grand-chose à faire dans ce texte.

(L’amendement n° 324, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 320.

M. Pascal Popelin. Si au moins Mme Pécresse était là pour défendre ses amendements !

Mme Marie-Anne Chapdelaine. C’est vrai qu’elle n’est pas là souvent !

M. Guy Geoffroy. Ces amendements, chers collègues, n’ont pas été déposés uniquement par Mme Pécresse : ils sont également signés, entre autres, par M. Tardy et par votre serviteur. Je vous remercie de bien vouloir le constater.

Cet amendement vise à alerter la représentation nationale sur une pratique de plus en plus fréquente dans les collectivités territoriales : l’achat d’espaces publicitaires aux fins de vanter l’action de ces mêmes collectivités auprès des électeurs. Nous connaissons des précédents éloquents : un arrêt du Conseil d’État a ainsi condamné la région Île-de-France à réintégrer dans le compte de campagne des frais relatifs à l’utilisation de tels moyens à des fins électorales.

L’objet de cet amendement est d’interdire, par la loi, tout achat d’espace publicitaire par les régions. Cela permettrait ainsi de clarifier le droit et d’offrir la transparence nécessaire pour garantir l’équité entre les différents candidats aux élections.

Nous souhaitons la transparence, quand vous ne nous proposez que de la translucidité ! Or on ne voit pas au travers de ce qui n’est que translucide !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. À cette heure, je me contenterai simplement de lire ce que l’on me propose. Dans le cas d’espèce, votre argumentation a bien montré que la législation actuelle suffit : l’exemple que vous avez donné, à propos de la région Île-de-France, a conduit le Conseil d’État – sauf erreur de ma part – à rendre une décision concernant M. Jean-Paul Huchon.

M. Guy Geoffroy. Si on peut éviter d’aller au Conseil d’État, c’est mieux !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Par ailleurs, je trouve étonnant de parler des dépenses de l’« exécutif régional »,…

M. Guy Geoffroy. Pourtant, c’est le cas !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. …car ce sont les dépenses de la collectivité tout entière.

Par ailleurs, si l’on suivait votre raisonnement, pourquoi interdire cette pratique aux régions, et pas aux autres collectivités ?

M. Hervé Morin. C’est vrai. Pourquoi seulement les régions ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Fidèle à ma pratique constante, je ne porterai pas de jugement sur telle ou telle collectivité. À l’occasion de la discussion de cet amendement, qui porte sur les dépenses de communication des collectivités territoriales, je voudrais simplement signaler un fait à M. le ministre : le logiciel comptable actuellement utilisé par les collectivités territoriales ne permet pas de connaître, pour la totalité d’entre elles, le montant exact des dépenses de communication. Ces dépenses sont réparties dans plusieurs chapitres. Elles peuvent être mélangées à d’autres dépenses.

M. Hervé Morin. Il a raison !

M. René Dosière. Il serait quand même souhaitable que chaque citoyen puisse connaître le montant des dépenses de communication de chaque collectivité. Il faudrait pour cela que le ministère de l’intérieur modifie ce logiciel comptable pour que soit précisé, dans chaque collectivité, le montant des dépenses de communication.

Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien !

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. J’appuie ce que vient de dire René Dosière. Je voudrais également dire que la question des dépenses de communication des collectivités, y compris sous la forme d’achat d’espaces publicitaires – mais pas seulement sous cette forme-là –, pose des problèmes qu’il faudra régler un jour.

On voit bien, en effet, que des moyens publics sont utilisés pour peser sur des débats publics, y compris, parfois, sur des débats qui doivent être tranchés par des élections. Évidemment, cela se fait souvent par l’intermédiaire de collectivités qui ne sont pas elles-mêmes renouvelables à ce moment-là, mais cela se fait tout de même. Je suis bien placé pour le savoir, car je suis élu d’une région où cela se pratique, sur un sujet en particulier.

M. Guy Geoffroy et M. Hervé Morin. Ça alors ! S’agirait-il de Notre-Dame-des-Landes, par hasard ?

M. François de Rugy. Je crois que ce problème mériterait d’être traité, mais l’amendement présenté par nos collègues de l’opposition ne convient pas. Il est d’abord fort mal rédigé : en effet, la question ne porte pas que sur l’achat d’espaces publicitaires. Cela pose un autre problème, celui des liens que cela pourrait créer avec la presse, qui devrait rester indépendante. Enfin, la question ne concerne pas que les régions. Vous avez dit, monsieur Geoffroy, qu’il ne s’agit pas uniquement d’un amendement de Mme Pécresse ; mais enfin, nous avons bien compris que c’est le cas, car Mme Pécresse fait une fixation sur la région Île-de-France.

Plusieurs députés du groupe UMP. À raison !

M. François de Rugy. Nous légiférons pour l’ensemble de la France. Je pense par ailleurs que ces questions mériteraient d’être abordées dans le cadre du projet de loi de décentralisation.

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Cette discussion ne porte pas du tout sur le projet de loi que nous examinons ce soir. Cela étant, je soutiens à la fois l’opinion de M. Dosière et celle de M. de Rugy : toutes ces publicités sur papier glacé commandées par les collectivités territoriales coûtent au total des centaines de millions d’euros. C’est du fric claqué pour rien ! Cela entraîne, de plus, des inégalités entre les forces politiques. Il est donc temps, en effet, d’y mettre bon ordre. Le meilleur moyen pour cela, c’est déjà d’indiquer clairement la totalité des dépenses de communication dans le budget des collectivités.

(L’amendement n° 320 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 323.

M. Guy Geoffroy. Défendu.

(L’amendement n° 323, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 59, présenté par M. de Rugy et plusieurs de ses collègues du groupe écologiste, est défendu.

(L’amendement n° 59, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 58, présenté par M. de Rugy et plusieurs de ses collègues du groupe écologiste, est défendu.

(L’amendement n° 58, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 46, présenté par M. de Rugy et plusieurs de ses collègues du groupe écologiste, est défendu.

(L’amendement n° 46, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. Hervé Morin. Que se passe-t-il ? Les écolos sont épuisés ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 177.

M. Lionel Tardy. Cet amendement a pour but d’interdire l’embauche d’un membre de la famille ou d’un proche d’un élu au sein du cabinet d’un exécutif local, au même titre que celle d’un responsable de parti politique.

(L’amendement n° 177, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Axelle Lemaire, pour soutenir l’amendement n° 388.

Mme Axelle Lemaire. Je retire cet amendement que j’ai déposé avec mon collègue Matthias Fekl. En effet, un amendement déposé par nos collègues du groupe écologiste a été adopté par la commission des lois, intégrant ainsi à l’article 11 bis, alinéa 5, la modification que propose cet amendement.

Je rappellerai simplement que l’attribution de l’aide publique aux partis politiques dépend du rattachement des parlementaires à ces partis. Dorénavant, les déclarations de rattachement des élus devront être rendues publiques. C’est le cas à l’Assemblée nationale depuis l’an dernier, du fait d’une décision de son président. Cette obligation est désormais inscrite dans la loi, et s’étend au Sénat.

(L’amendement n° 388 est retiré.)

M. le président. L’amendement n° 57, présenté par M. de Rugy et plusieurs de ses collègues du groupe écologiste, est défendu.

(L’amendement n° 57, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 130 deuxième rectification, 234 et 371 deuxième rectification, pouvant être soumis à une discussion commune.

L’amendement n° 130 deuxième rectification, présenté par M. de Rugy et plusieurs de ses collègues du groupe écologiste, est défendu, de même que l’amendement n° 234 de M. Abad et l’amendement n° 371 deuxième rectification de M. Wauquiez.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Nous sommes marqués par l’héritage de la fiction de la démocratie rousseauiste : nous faisons comme si, chez nous, les groupes d’intérêt n’existaient pas. Or ils existent : les lobbyistes sont bien présents, y compris à l’intérieur du Parlement. Mais on préfère ne pas en parler, ne pas réguler ce secteur, et faire comme si rien d’autre n’existait que la relation pure et parfaite entre les représentants du peuple et les citoyens. L’adoption d’un code de déontologie relatif aux groupes d’intérêts, aux lobbyistes, à leur action dans l’enceinte du Parlement fait partie des adaptations auxquelles nous devons procéder.

M. le président. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Je suis d’accord avec ce que vient de dire M. Wauquiez. Je pense que, contrairement à la situation qui prévaut au Parlement européen, il y a une vraie hypocrisie quant aux groupes de pression, aux lobbies, et à leur rôle ici, à l’Assemblée nationale. Un travail a été engagé à ce sujet. Je crois qu’il est important de le poursuivre : il y a encore beaucoup d’efforts à faire pour que les lobbyistes soient soumis à l’obligation de s’inscrire à un registre. Cela permettrait de renforcer la transparence. On sait que ces groupes de pression apportent parfois une aide utile à la prise de décision ; en tout cas, il est important de pouvoir les reconnaître.

(Les amendements nos 130 deuxième rectification, 234 et 371 deuxième rectification, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Article 12

M. le président. Sur l’article 12, je suis saisi de deux amendements, nos 227 et 164, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 227.

M. Damien Abad. Défendu.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n° 164.

M. Gilles Lurton. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable. Nous avons eu le débat lorsque nous avons examiné le projet de loi organique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

(L’amendement n° 227 n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 164 n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 129 est-il défendu, monsieur de Rugy ?

M. François de Rugy. Notre contribution à l’accélération des débats est réelle, mais ne doit tout de même pas conduire à la suppression de l’examen des amendements !

M. le président. J’interroge tout le monde !

M. François de Rugy. Vous ne nous laissez même pas le temps de dire si nos amendements sont défendus, vous le dites à notre place !

M. Hervé Morin. Le président vous aide ! (Sourires.)

M. François de Rugy. Oui, c’est une aide un peu forcée !

Cet amendement vise à modifier le mode de nomination des magistrats membres de la Haute autorité de la transparence de la vie publique. Le dispositif retenu par le Gouvernement existe pour d’autres structures. Il pourrait être considéré comme une élection – même si on sait que ce n’en est pas vraiment une – au sein des juridictions. Ce dispositif est, en réalité, assez élitiste. Nous proposons, pour notre part, que, comme dans le texte du Gouvernement, deux membres des juridictions de l’ordre administratif, judiciaire et financier soient nommés, mais après avoir été tirés au sort parmi les candidats, lesquels se seront portés volontaires et compteront au moins dix ans d’ancienneté. Nous pensons que cela permettra une plus grande ouverture du recrutement des membres de cette Haute autorité. Je considère, pour ma part, que le système des élections n’est pas très satisfaisant, s’agissant des juridictions. Doit-il y avoir des espèces de campagnes électorales internes à ces juridictions ou des sortes de cooptations ? Cela ne me paraît pas très sain.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cette idée est originale. Toutefois, nous avons souhaité, dans ce domaine, être tristement convenables et conformistes et je confesse que nous n’avons pas cherché l’originalité. En effet, les hautes autorités qui fonctionnent dans ce pays, à la satisfaction générale, sont un peu toutes composées sur le même modèle.

La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Je suis très favorable à l’amendement de M. de Rugy. Faire élire les membres des juridictions de l’ordre administratif, judiciaire et financier, cela aboutira en réalité à une représentation syndicale. Prévoir un système de tirage au sort, comparable à celui des cours d’assises, parmi des personnes ayant exercé leurs fonctions depuis un certain nombre d’années, garantissant ainsi que celles et ceux qui siégeront au sein de cette Haute autorité auront une certaine expérience, cela me semble beaucoup plus sain que de voir siéger au sein de cette instance un représentant du Syndicat de la magistrature qui aura collé trois photos, dont celle de Manuel Valls, sur le mur des cons !

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Je ne partage pas les propos d’Hervé Morin. Ma proposition n’est absolument pas liée au syndicalisme des magistrats. Comme l’a souligné M. Urvoas, le système qui a été retenu est un « copier-coller » de ce qui se pratique au sein d’autres hautes autorités. Or ce n’est pas parce que cette méthode existe depuis un certain temps qu’elle est forcément satisfaisante. Je crois d’ailleurs savoir, monsieur le rapporteur, que vous avez déposé une proposition de loi constitutionnelle visant à modifier la composition et le mode de désignation des membres du Conseil constitutionnel, institution qui existe pourtant depuis 1958. Nous serions, en conséquence, parfaitement fondés à faire évoluer les règles. Ce que nous proposons est totalement transparent.

(L’amendement n° 129 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 168.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cet amendement tient compte des débats que nous avons eus en commission. Nous avons souhaité modifier la composition de la Haute autorité, non pas en changeant le mode de désignation des magistrats, mais en ajoutant des personnalités qualifiées, lesquelles seront élues à la majorité des trois cinquièmes positifs par les commissions compétentes, dans le cas d’espèce, évidemment, les commissions des lois du Sénat et de l’Assemblée nationale.

C’est la deuxième fois que nous inversons la règle de la majorité. La Constitution prévoit la règle des trois cinquièmes négatifs. Nous pouvons le faire, puisqu’il ne s’agit pas, ici, d’une disposition constitutionnelle, mais d’une loi ordinaire.

Nous avions prévu, initialement, deux personnalités qualifiées. Or il a été fait état du risque que l’opposition et la majorité s’entendent pour avoir, chacune, un représentant. Loin d’être le système le plus vertueux, cela aboutirait à un accord a minima. En ne nommant qu’une personnalité qualifiée, on contraindra la majorité et l’opposition à s’accorder pour atteindre les trois cinquièmes, ce qui sera vertueux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. C’est exactement la position que j’avais défendue, au nom du Gouvernement, en commission. Je remercie le rapporteur de se rallier à une position qui rencontre, en plus, ses propres préoccupations sur les conditions de désignation.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Cet amendement me surprend. C’est, en effet, en commission qu’il a été suggéré que quatre personnalités qualifiées – deux fois deux – soient désignées pour éviter l’entre-soi. Par ailleurs, nous comptons deux conseillers d’État, deux conseillers à la Cour de cassation et deux conseillers maîtres à la Cour des comptes. S’il n’y a plus, au total, que deux autres personnalités qualifiées, le poids des hauts magistrats deviendra encore plus considérable. Ils sont parfaitement respectables, mais enfin, ils représentent une culture particulière, qui pourrait peut-être être davantage diversifiée dans le cadre de cette Haute autorité.

M. Hervé Morin. Il a raison !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. L’argument selon lequel l’opposition et la majorité pourraient se mettre d’accord, s’il y avait la nomination de deux fois deux personnalités qualifiées, ne me paraît pas pouvoir être retenu. En effet, il peut en aller de même s’il n’y a plus que deux personnalités qualifiées. L’opposition et la majorité peuvent se mettre d’accord et décider que l’opposition aura une personnalité qualifiée et que la majorité aura l’autre. L’argument est, à cet égard, réversible. Il est essentiel que cette institution, laquelle aura des pouvoirs de contrôle considérables, ce qui est d’ailleurs souhaitable, compte un nombre de membres assez important pour qu’elle soit efficace, représentative et puisse délibérer de manière collégiale.

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Je ne doute pas des bonnes intentions du rapporteur en la matière. Je tiendrai les mêmes propos que Roger-Gérard Schwartzenberg. Rien n’empêche qu’il y ait un accord entre la majorité et l’opposition, entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Cela s’est déjà produit des centaines de fois dans la vie parlementaire.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Non !

M. Hervé Morin. Je souhaiterais au contraire que les personnalités qualifiées soient davantage représentées. Le monde judiciaire est un monde clos. J’aimerais, par conséquent, qu’il y ait un peu d’oxygénation au sein de cette Haute autorité.

Par ailleurs, je ne comprends pas pourquoi les personnalités qualifiées ne sont pas rémunérées. Je pense que, lorsque l’on exerce une fonction aussi importante que celle-ci, il est malsain de ne toucher aucune indemnité. Il est normal que ceux qui rendent service à la République perçoivent une indemnité afin d’exercer leurs fonctions dans la plénitude de leur responsabilité. Je n’ai pas déposé d’amendement en la matière, car il aurait été déclaré irrecevable en vertu de l’article 40. Ne pas prendre en compte cette proposition donnerait le sentiment que, décidément, la démocratie ne doit plus rien coûter.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Quand on connaît l’indépendance de chacune des assemblées et la volonté de chacun de leurs présidents de manifester leur indépendance – surtout par rapport à l’autre assemblée –, je ne suis pas persuadé qu’il pourrait y avoir des accords du type de ceux que vous avez évoqués.

M. Hervé Morin. Cela se passe ainsi pour les nominations au Conseil constitutionnel !

M. René Dosière. Je tiens à souligner que le fait d’avoir, dans cette instance, deux personnalités élues à la majorité des trois cinquièmes, c’est-à-dire par l’opposition et par la majorité – ce qui veut dire, en général, quasiment l’unanimité –, leur donne une force considérable. On le voit bien à l’étranger, lorsque des personnalités sont ainsi désignées, elles ont une force considérable. Le fait qu’elles ne soient que deux face à un plus grand nombre de magistrats ne me paraît pas être un argument fondamental, monsieur Schwartzenberg.

(L’amendement n° 168 est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 192.

M. Lionel Tardy. Défendu.

(L’amendement n° 192, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 9.

M. Lionel Tardy. Je défendrai très brièvement les amendements nos 9 et 8. Ma lecture est un peu plus terre à terre. On nous dit que le fait de désigner les membres de la Haute autorité à la majorité des trois cinquièmes oblige la majorité à trouver un accord avec l’opposition. Pour moi, c’est une fausse bonne idée. En effet, le rôle de l’opposition dans nos démocraties est de surveiller le travail de la majorité, de dénoncer ses erreurs, de mettre en lumière ses choix et de la contraindre à les assumer publiquement plutôt que de les faire en catimini.

Avec cette majorité des trois cinquièmes, l’opposition n’aura plus intérêt à jouer son rôle de vigie et d’alerte, puisque son silence aura été acheté en échange de quelques postes. Je crains qu’avec ce système, elle ne joue pas son rôle de contrôle et de surveillance.

(L’amendement n° 9, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 8 a été défendu.

(L’amendement n° 8, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 86.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il s’agit d’un problème arithmétique. Chacun est, bien entendu, favorable à la parité. Nous sommes passés de onze à neuf membres – et j’espère que ce nombre ne va pas continuer à régresser. Diviser neuf par deux est tout de même assez difficile. L’égale représentation pose un peu problème dans ce cas particulier.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. L’argument du président Schwartzenberg est fondé. C’est la raison pour laquelle un prochain amendement proposera une adaptation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je retire cet amendement !

(L’amendement n° 86 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 167 de M. Urvoas. Il s’agit d’un amendement de conséquence, auquel la commission est favorable.

(L’amendement n° 167, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n° 80.

M. François de Rugy. Défendu.

(L’amendement n° 80, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 193.

M. Lionel Tardy. Défendu.

(L’amendement n° 193, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 166 de M. Urvoas. Il s’agit d’un amendement de conséquence, auquel la commission est favorable.

(L’amendement n° 166, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 194.

M. Lionel Tardy. Défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cet amendement est déjà satisfait.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis.

(L’amendement n° 194 n’est pas adopté.)

(L’article 12, amendé, est adopté.)

Article 13

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n° 49.

M. Guy Geoffroy. Encore un amendement n° 49 !

M. François de Rugy. Oui, mais celui-ci n’a pas la même portée et ne devrait pas susciter les mêmes débats qu’hier soir.

Il s’agit, par cet amendement, de permettre à tout élu ou membre du Gouvernement de saisir la Haute autorité pour une question d’ordre déontologique susceptible de concerner l’un des membres de leurs cabinets. Faut-il rappeler que des questions de conflits d’intérêts se posent parfois dans ce genre de cas ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. La commission est défavorable. Elle considère que le texte existant, l’alinéa 4 notamment, satisfait cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis !

(L’amendement n° 49 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 10.

M. Lionel Tardy. Cet amendement propose que la Haute autorité ait en charge la question du lobbying, non pas de manière annexe mais avec une compétence pleine et entière.

On voit bien que, dès que nous abordons la question de la transparence et des conflits d’intérêts, l’on arrive très vite sur celle du lobbying, sur celle des relations entre les parlementaires et les intérêts privés.

À défaut d’avoir une autorité spécifique sur les questions de lobbying, que j’appelle de mes vœux, on ne peut pas laisser ce sujet en déshérence. La mission confiée à la Haute autorité resterait limitée aux lignes directrices mais serait explicitement inscrite dans ses missions officielles, ce qui serait une avancée certaine.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. Laurent Wauquiez. Si nous pouvions avoir un mot sur le lobbying, ce serait bien !

(L’amendement n° 10 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 11.

M. Lionel Tardy. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Il est déjà satisfait par le 4° de l’article.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez.

M. Laurent Wauquiez. Il est vraiment important que la Haute autorité s’intéresse dans la durée au lobbying. C’est un angle mort de la démocratie. Elle doit mener un travail plus sérieux sur cette question, en parallèle à ce qui devra être fait dans le règlement intérieur de l’Assemblée.

(L’amendement n° 11 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 12.

M. Lionel Tardy. Cet amendement propose que la Haute autorité mette en place un réseau de correspondants dans les administrations et les collectivités locales, à l’image de celui de la CNIL. Ce sera un outil efficace pour diffuser les bonnes pratiques et une culture de lutte contre les conflits d’intérêts, mais aussi pour faire remonter l’information auprès de la Haute autorité sur les difficultés rencontrées sur le terrain.

M. Laurent Wauquiez. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. L’animation d’un réseau de correspondants est une notion non normative – du « droit souple », comme pourrait dire le Conseil d’État, puisqu’il est en train de préparer un rapport sur ce point –, la Haute autorité n’ayant pas de pouvoir sur eux. L’amendement ne prévoit d’ailleurs pas qu’elle puisse les saisir officiellement.

Si nous sommes défavorables à cet amendement, c’est surtout parce que rien n’empêchera la Haute autorité de maintenir des relations privilégiées avec les déontologues qui existent et, notamment, celui de l’Assemblée nationale. J’ai dit combien nous pensions utile de maintenir la déontologue, qui m’a d’ailleurs transmis une copie d’un courrier adressé à l’un d’entre nous qui l’avait mise en cause hier en prétendant qu’elle ne lui avait pas répondu.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Votre idée n’est pas mauvaise, monsieur Tardy, mais, à une époque où il faut réduire la dépense publique, il n’est probablement pas judicieux de créer un réseau de correspondants.

Cela dit, j’aimerais bien que le Gouvernement réponde à la question que j’ai posée : pourquoi ceux qui vont siéger dans la Haute autorité en tant que personnalités qualifiées ne sont pas rémunérés et indemnisés ? Je trouve que c’est une erreur.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. La question se pose effectivement et le Gouvernement prendra une initiative pour améliorer le texte dans le sens que vous souhaitez lorsqu’il passera devant le Sénat.

(L’amendement n° 12 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 139.

M. Guy Geoffroy. Cet amendement, que je présente avec M. Houillon, pose tout de même un vrai problème et j’espère que la commission et le Gouvernement vont nous suivre.

La version du texte telle qu’elle a été élaborée par la commission des lois confie à la Haute autorité, et non pas au pouvoir exécutif, comme il est d’usage, la tâche d’agréer les associations de lutte contre la corruption qui seront ensuite habilitées à la saisir.

L’agrément doit relever du pouvoir réglementaire ou, en tout cas, d’une autre autorité que celle qui est ensuite saisie.

La Haute autorité va choisir ceux qui auront la possibilité de travailler à ses côtés. Ce n’est pas à elle d’agréer les associations habilitées ensuite à la saisir. Si vous laissez le texte tel qu’il est, vous êtes suspect a priori de vouloir introduire un manque de transparence dans la manière dont les associations de lutte contre la corruption seront amenées à travailler aux côtés de la Haute autorité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable, évidemment, parce que l’argument est parfaitement réversible. Que dirait-on d’un pouvoir chargé d’accréditer les associations qui pourraient ensuite aller contre lui ?

M. Guy Geoffroy. Je parle du pouvoir exécutif, pas du pouvoir législatif !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Nous souhaitons, nous, que ce soit la Haute autorité qui puisse habiliter les associations qui la saisissent.

M. Guy Geoffroy. Ses experts !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. C’est une manière de reconnaître une indépendance. Nous ne lui dictons pas le nom des associations avec lesquelles elle aura à travailler.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. C’est un choix assumé. On pourrait retenir votre argumentation, monsieur Geoffroy, en considérant que la Haute autorité ne peut tout de même pas agréer les associations qui la saisiront. Sauf que, si ce n’est pas elle, vous n’avez plus d’autre choix que de les faire agréer par ceux qui, pour l’essentiel, seront les contrôlés.

Le Gouvernement a préféré aller vers la transparence et, surtout, l’indépendance pour qu’il n’y ait pas de contestation. Voilà pourquoi nous nous sommes rangés à la formule de l’agrément par la Haute autorité.

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. En vérité, quand on entend le président de la commission et le ministre, on se dit que c’est une disposition inutile. Vous avez déjà les délateurs. Pourquoi, en plus, agréer des associations ? L’association d’Arnaud Montebourg il y a vingt ou vingt-cinq ans, « TV carton jaune », sera-t-elle considérée comme une association luttant contre la corruption ?

Compte tenu des moyens d’investigation dont dispose la Haute autorité et du système de délation que vous avez mis en place, pourquoi aller, en plus, agréer des associations, qui demanderont ensuite de l’argent public et des collaborateurs, avec encore des coûts inutiles ? Supprimez-moi tout simplement cette disposition.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. J’ai écouté avec attention le ministre, qui a exposé le dilemme, mais je trouve assez difficile que la Haute autorité puisse choisir elle-même ses correspondants, c’est-à-dire les structures qui pourront la saisir, en favorisant éventuellement telle ou telle association par rapport à telle ou telle autre. C’est vivre totalement en vase clos.

Actuellement, et cela restera le cas, la Haute autorité peut être saisie par très peu de personnes, mais le nombre d’associations de lutte contre la corruption, lui, n’est pas limité. Si elles sont agréées ou sélectionnées par la Haute autorité elle-même, on est totalement en vase clos. L’on pourrait concevoir, pour lever l’objection, qu’elles soient habilitées à agir par l’autorité judiciaire. Dans ce cas-là, ce ne serait plus le pouvoir exécutif.

(L’amendement n° 139 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 173 rectifié.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cet amendement vise à permettre à la Haute autorité de contrôler ou de faire contrôler la véracité du contenu des déclarations soumises à son examen.

(L’amendement n° 173 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 13, amendé, est adopté.)

Article 14

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 134.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il s’agit de compléter la liste, dont un élément fait défaut. On commence par le Premier ministre lorsqu’il s’agit d’un membre du Gouvernement mais, lorsque c’est lui qui est concerné, c’est le Président de la République qui doit intervenir.

Ce n’est pas capital mais ce serait une harmonisation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. Hervé Morin. Pourquoi ?

(L’amendement n° 134 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 152.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il est défendu.

(L’amendement n° 152, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 14 est adopté.)

Article 15

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 88.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Son objet est simple. Il est de rendre obligatoire l’expression d’un avis par la Haute autorité en excluant tout avis implicite.

Le texte actuel prévoit que son silence vaudrait consentement, selon la règle habituelle : « Qui tacet consentire videtur… ». Il nous paraît préférable de ne pas maintenir un tel système et de ne pas écrire que l’absence d’avis dans le délai donné vaut avis de compatibilité. Le silence de la Haute autorité, qui peut résulter d’une sorte d’inertie ou de retard, ne peut être considéré comme un avis favorable implicite.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je comprends le souci que nous avons d’aller vite, quitte à précipiter l’examen de ce texte déjà déposé dans des conditions redoutablement rapides, mais il ne serait pas totalement désagréable d’entendre les contre-arguments du ministre et du rapporteur quand nous faisons des propositions qui ne sont pas totalement insensées.

(L’amendement n° 88 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 172 rectifié.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. C’est un amendement de simplification.

(L’amendement n° 172 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Pour éclairer les travaux de l’Assemblée nationale et notre vote de mardi prochain, j’aimerais simplement savoir, monsieur le ministre, pourquoi le Premier ministre n’est pas soumis aux mêmes règles que l’ensemble des membres du Gouvernement. Il n’est qu’un parmi les autres. Pourquoi refusez-vous ce que propose l’amendement de Roger-Gérard Schwartzenberg à l’article 14, que la Haute autorité puisse informer le Président de la République si le Premier ministre n’a pas rempli ses obligations ? Je voudrais comprendre quel est le ressort, la mécanique intellectuelle qui vous amène à rejeter cet amendement.

(L’article 15, amendé, est adopté.)

Après l’article 15

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n° 50.

M. François de Rugy. Il est défendu.

(L’amendement n° 50, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 16

M. le président. Nous arrivons à l’article 16.

M. Hervé Morin. Je voudrais une réponse. Faut-il que je demande une suspension de séance ?

M. le président. Je n’ai pas de pouvoir d’injonction à l’égard du ministre ou du président de la commission pour leur demander de répondre.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Nous en avons discuté pendant des heures. Et vous n’étiez pas là, monsieur Morin.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Depuis lundi !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 171.

M. Jean-Jacques Urvoas. C’est un amendement de simplification et de précision.

(L’amendement n° 171, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 19.

M. Lionel Tardy. C’est un petit amendement sympa.

Le texte propose de placer les fonctionnaires élus au Parlement en disponibilité. Je propose d’étendre cette disposition aux fonctionnaires occupant des fonctions en cabinet ministériel. C’est un signal pour marquer le territoire de la politique, trop souvent envahi par la haute fonction publique. Il n’y a pas que sur les bancs du Parlement qu’il y a trop de fonctionnaires.

Un poste en cabinet ministériel est un poste politique et ne doit pas être considéré comme une étape normale dans une carrière administrative pour un énarque. Si un fonctionnaire choisit d’aller en cabinet ministériel, cela doit avoir un coût dans la progression de sa carrière et il ne doit pas pouvoir bénéficier pendant ce temps d’une promotion dans son corps d’origine.

M. Hervé Morin. Très bonne idée !

M. Lionel Tardy. Récemment, dans le Bulletin quotidien, on a vu passer un rectificatif concernant un directeur adjoint de cabinet qui venait d’être promu conseiller maître à la Cour des comptes. La promotion avait été annoncée dans l’édition de la veille, et la rectification précisait que ce promu continuait bien à exercer ses fonctions en cabinet et n’avait pas réintégré la Cour des comptes.

Mon amendement, mes chers collègues, ne videra pas les cabinets ministériels de leurs énarques, mais il vise à envoyer un signal et à rappeler qu’un poste en cabinet est un poste politique, et non un poste en administration centrale comme un autre.

M. Hervé Morin. Excellente idée !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Avant de répondre sur cet amendement, je veux dire, afin que le compte rendu en porte foi, que si le Gouvernement et la commission ne répondent pas à chaque fois au fond sur les arguments, c’est parce que nous sommes dans cet hémicycle depuis lundi, seize heures, et que nous avons déjà étudié de nombreux d’amendements. Nous avons beaucoup travaillé sur les amendements du projet de loi organique, qui contenaient exactement les mêmes questions : nous sommes allés au fond le lundi soir et le mardi soir jusqu’à deux heures du matin.

M. Laurent Wauquiez. Et alors ? Nous faisons notre travail !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Nous considérons donc que les explications ont déjà été largement données. Ce n’est donc pas de l’incorrection vis-à-vis des parlementaires, naturellement, mais un souci de rationalisation du temps de chacun.

Pour ce qui est de l’amendement n° 19 à l’article 16 de M. Tardy – je me rattache à l’article de façon à mettre mes propos en perspective –, je rappelle que l’article ne prévoit la mise en disponibilité des fonctionnaires élus parlementaires que dans le cadre d’une incompatibilité entre leur fonction et leur mandat. Un amendement que j’ai eu l’honneur de déposer prévoit d’étendre cette disposition aux ministres ; cependant, les élus locaux conserveront cette possibilité.

Concernant les fonctionnaires nommés en cabinet, ils sont détachés ou mis en disponibilité suivant les statuts de leur corps d’origine. Lorsqu’ils restent dans leur ministère de tutelle, il n’existe aucune raison constitutive d’un risque de conflit d’intérêts qui justifierait qu’ils soient mis en disponibilité.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Exactement le même avis. Vous voulez appliquer aux agents publics, avec enthousiasme, les règles applicables aux élus ; or leurs situations sont différentes. Les agents publics ne sont pas élus et leur statut en cabinet n’est pas le moins du monde protecteur, puisqu’il peut être mis fin quasiment à tout moment à leur fonction ; ils retournent alors dans leur corps d’origine. L’assimilation qui est faite entre les membres de cabinet et ceux qui sont visés par le texte me paraît donc un peu extensive.

Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement. Il souhaite que les membres de cabinet conservent leur statut d’origine, c’est-à-dire le détachement, d’autant qu’il y a souvent beaucoup de turn-over, de mouvements, dans les cabinets.

(L’amendement n° 19 n’est pas adopté.)

(L’article 16, amendé, est adopté.)

Article 17

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 132.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Il s’agit de la question des lanceurs d’alerte, que l’on appelle les whistleblowers aux États-Unis.

M. Christian Jacob. On appelle ça des délateurs !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. À l’origine, cela désignait un policier soufflant dans son sifflet pour mobiliser l’attention ou appeler ses collègues. Le terme de « lanceur d’alerte » est peut-être plus solennel que celui de whistleblower.

Monsieur Wauquiez, vous préférez sans doute Tocqueville, qui a un peu connu l’Amérique : c’est bien là votre idée ?

M. Laurent Wauquiez. Oui, c’est l’idée !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Nous considérons que, quel que soit l’intérêt de l’existence des lanceurs d’alerte, le régime qui leur est réservé par cet article 17 – j’anticipe également sur l’amendement n° 89, de manière à ne pas allonger la séance – est très dérogatoire du droit commun.

Je veux en effet parler de la charge de la preuve : quand un lanceur d’alerte, ainsi qu’il est prévu dans ce texte, relate des faits relatifs à ce qu’il pense être un conflit d’intérêts, il est présumé de bonne foi, et c’est à la partie défenderesse qu’il incombe d’apporter la preuve du contraire.

C’est donc contraire à un principe général de droit commun, qui s’énonce en latin – cela fait un peu cuistre, mais chacun le connaît : actori incumbit probatio, la preuve incombe au demandeur, et non pas au défendeur mis en cause par celui-ci.

Il nous paraît très grave d’inverser la charge de la preuve. Je sais que cela existe de façon tout à fait exceptionnelle, par exemple en matière douanière, ou dans le texte inspiré par Mme Dati en 2007 ; mais cela reste extrêmement exceptionnel et limité à des cas particuliers.

Il ne nous paraît pas normal que, au bénéfice de cette présomption de bonne foi et de cette inversion de la charge de la preuve, il existe comme une incitation éventuelle faite à ces lanceurs d’alerte, à ces informateurs, pourrait-on dire – pour ne pas dire autre chose –,…

M. Guy Geoffroy. À ces délateurs !

M. Christian Jacob. À ces mouchards !

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. …d’affirmer des faits qui ne sont pas toujours fondés sur des éléments exacts, en pensant bénéficier d’une sorte d’immunité liée à la bonne foi, notion très difficile à apprécier.

Introduire tout cela dans notre droit serait une singulière innovation. Je n’ai rien contre l’innovation en général : si elle est positive, tant mieux ! Mais si elle s’avère dangereuse ou risquée, évitons de choisir une telle solution.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Là encore, c’est un sujet sur lequel nous avons déjà beaucoup échangé. Je comprends que cela puisse désarçonner, puisque cette construction juridique est en grande partie l’aboutissement d’un raisonnement conduit dans plusieurs rapports.

Pour autant, il ne s’agit pas d’une totale innovation. Cela existe déjà dans notre droit positif, notamment dans le code de la santé publique depuis la loi du 16 avril 2013, mais aussi dans le code du travail, pour protéger des salariés ayant dénoncé des faits de discrimination ou des faits de corruption dont ils auraient eu connaissance dans l’entreprise.

M. Damien Abad. Ce n’est pas la même chose !

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Bien sûr que ce n’est pas la même chose : si c’était la même chose, on ne referait pas une loi supplémentaire !

Cette protection ne sera cependant accordée, j’insiste sur ce point, qu’à une personne de bonne foi. De plus, une déclaration de mauvaise foi l’exposerait aux sanctions prévues à l’article 226-10 du code pénal relatif à la dénonciation calomnieuse, soit cinq ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Il n’est donc pas à craindre une culture de la dénonciation.

Par ailleurs, l’alinéa que vous proposez de supprimer dans votre amendement n° 89 est évidemment au cœur du dispositif. Il va de soi qu’une décision de sanction prise contre un lanceur d’alerte serait annulée par le tribunal administratif.

Cependant, reste le cas où le motif de la sanction n’est pas explicitement le lancer d’alerte, mais des faits distincts. Il importe que l’autorité qui prend la sanction ait à la justifier par des faits extérieurs ; dans le cas contraire, il n’existerait plus de protection effective du lanceur d’alerte contre des sanctions déguisées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Beaucoup de fausses interprétations ont été faites sur ce point.

Tout d’abord, il ne s’agit évidemment pas d’une immunité. Vous avez vous-même utilisé les mots qui convenaient, à savoir une présomption de bonne foi : c’est tout à fait différent. Cela existe dans un certain nombre de cas, qui ont été cités : l’inversion de la charge de la preuve a été instaurée par certains textes de lois – sous toutes les majorités, d’ailleurs – lorsqu’il était nécessaire d’assurer la protection des gens ; c’est même devenu la règle en matière de discrimination. Nous sommes donc bien loin de concepts juridiques qui seraient totalement « hors sol ».

Je rappelle que cette notion de lanceur d’alerte a fait l’objet d’une résolution du Conseil de l’Europe en 2008. De plus, nous reprenons exactement les termes qui figurent dans les propositions du rapport Sauvadet – du rapport Sauvé, pardon –…

Plusieurs députés du groupe UMP. Ah !

M. Laurent Wauquiez. Cela remonte le niveau !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. …et du projet de loi Sauvadet, qui n’a jamais été inscrit…

M. Laurent Wauquiez. M. Sauvadet est bien au-dessus !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. En effet, M. Sauvadet est bien au-dessus. L’objectif de ce projet de loi Sauvadet, dont personne n’a discuté, figurait déjà dans le rapport Sauvé et fut repris dans le rapport Jospin.

M. Christian Jacob. C’est faux : cela n’a jamais été repris !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Enfin, comme l’a rappelé le rapporteur, celui qui serait de mauvaise foi encourt le risque d’être condamné pour dénonciation calomnieuse.

J’ajoute qu’aucun d’entre vous ne s’est jamais offusqué de ce que figure à l’article 40 du code de procédure pénale une obligation de dénoncer, sous peine de sanction, pesant sur les seuls agents publics. Cette disposition n’a d’ailleurs jamais donné lieu à aucun abus. Quand vous vous opposez à un nouveau droit, vous n’en voyez que les risques !

Que le système mérite d’être amélioré à l’usage, il en sera peut-être ainsi. Sans être en avance, nous ne partons pas forcément de loin : nous sommes plutôt en train de combler un retard.

Nous pensons que ce statut de lanceur d’alerte, que vous avez d’ailleurs utilisé en 2007 dans la loi Dati, et que nous avons de nouveau utilisé il y a quelques mois lors du vote de la loi sur la sécurité sanitaire, trouve normalement sa place dans le présent texte. Ce concept n’est ni nouveau, ni effrayant, au contraire : ce concept sera peut-être amélioré dans le temps, mais son champ s’élargira avec les exigences de la transparence et de la démocratie.

M. le président. La parole est à M. Hervé Morin.

M. Hervé Morin. Je dirai simplement deux mots, puisque nous avons déjà eu ce débat.

Tout d’abord, je conteste l’idée, monsieur le ministre, que le lanceur d’alerte serait devenu un dispositif communément utilisé dans le droit positif. Il l’est dans des situations extrêmement particulières, sur des problématiques particulières, pour lesquelles on estimait qu’il s’agissait d’un moyen de rendre plus efficace tel ou tel objectif que nous nous étions fixé, comme la lutte contre les discriminations.

Par ailleurs, vous évoquez la possibilité d’une procédure pénale dans l’hypothèse où la dénonciation serait de mauvaise foi. Imaginez un peu le système ! Il va falloir saisir le tribunal correctionnel pour engager avec un avocat une procédure contre un lanceur d’alerte quelconque, qui lui-même pourra engager une procédure, faire appel de la décision rendue en première instance, etc. Vous vous rendez compte du dispositif !

Enfin, avec le lanceur d’alerte, cumulé avec l’absence de transparence réelle liée au fait que la déclaration de patrimoine n’est consultable qu’à la préfecture, vous créez un véritable risque.

Si cette déclaration est publique, accessible à tous, alors chaque citoyen pourra vérifier si le lanceur d’alerte s’est engagé à la légère ou de façon dangereuse. Mais quand l’information même est tenue par un dispositif comme celui que nous avons inventé, alors vous mettez les élus en grand danger d’être victimes de rumeurs ou de procédures réitérées par certains opposants politiques.

M. Damien Abad. Exactement !

M. le président. La parole est à M. Guy Geoffroy.

M. Guy Geoffroy. Je ne voudrais pas que nous nous laissions abuser par les propos très ouatés de notre rapporteur et du ministre à propos des lanceurs d’alerte.

Les lanceurs d’alerte dont nous parlons ici n’ont absolument rien à voir avec ceux auxquels vous faites référence. En effet, dans le cas présent, le lanceur d’alerte interviendra avant que la Haute autorité, dont c’est le travail, fasse son travail. De toute façon, le travail devra être fait : cela a été l’objet d’une partie de nos débats sur les moyens de cette Haute autorité. Celle-ci devra pouvoir disposer des moyens lui permettant de vérifier l’intégralité des évolutions de patrimoine et des déclarations d’intérêt de toutes les personnes publiques concernées par vos lois.

Dans les autres cas, si les lanceurs d’alerte n’existaient pas, l’alerte ne serait pas donnée ! Cela n’a donc absolument rien à voir ! C’est pour cela que nous estimons que l’utilisation du terme « lanceur d’alerte », en référence aux « bons » lanceurs d’alerte existant dans d’autres domaines, est spécieuse. C’est tout à fait spécieux. Vos lanceurs d’alerte ne sont que des délateurs.

Que va-t-il se passer ? Le lanceur d’alerte, le délateur, mettra sur la place publique ce qu’il estimera devoir mettre sur la place publique et qui pourra être complet ou non, vérifiable ou non. Le buzz va tourner autour de cela. L’élu sera mis en cause et suspect a priori. Puis, la Haute autorité fera son travail. Mais quand elle aura établi, dans 99,9 % des cas, que l’alerte était fallacieuse et que les déclarations sont bien sous tout rapport, le mal aura été fait. Vous aurez voulu faire la transparence, mais vous aurez détruit une parcelle supplémentaire déjà bien fragile de la représentation nationale au travers des élus de la République.

M. Christian Jacob. Très juste ! Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose !

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Je veux rassurer mon collègue Schwartzenberg. Je crois que l’on se crée des inquiétudes inutiles, surtout parce que l’on mélange tout.

Nous défendons le principe des lanceurs d’alerte. Ce sont des personnes qui, dans leur très grande majorité, prennent des risques au regard de leur hiérarchie. Il suffit de regarder l’histoire récente pour s’en convaincre. Des personnes ont été sanctionnées dans leur travail parce qu’elles avaient divulgué des choses qui se sont révélées justes. Souvenez-vous de cette affaire des éthers de glycol. La personne qui avait révélé la toxicité de ce produit a été sanctionnée – cela se passait dans un organisme public.

Monsieur Morin, à l’article 17 il ne s’agit pas de parler des déclarations de patrimoine, mais de signaler les situations de conflits d’intérêts.

Monsieur Schwartzenberg, vous dites que l’on renverse complètement le principe général selon lequel c’est celui qui accuse qui doit apporter la preuve que ce qu’il dit est vrai et non celui qui est accusé. En la matière, on ne change rien. L’alinéa 3 précise seulement que si un employeur ou une autorité hiérarchique veut prendre des sanctions, il devra apporter la preuve que celles-ci sont justifiées. Il ne s’agit pas de la personne qui est accusée d’être en situation de conflit d’intérêts, mais uniquement du litige qui oppose le lanceur d’alerte et ses supérieurs hiérarchiques. Voilà pourquoi je considère que cet article mérite d’être voté.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je veux revenir sur un point très important, en ce qui concerne la charge de la preuve.

Je sais qu’il existe quelques exemples exceptionnels de renversement de la charge de la preuve : le code des douanes, le délit de contrefaçon et la loi du 13 novembre 2007 qui avait été initiée par Mme Rachida Dati. Ces quelques cas sont tout à fait exceptionnels. En droit français, c’est le demandeur qui doit apporter la charge de la preuve et non le défendeur. Si nous conservons cette disposition, ce sera à la personne mise en cause de prouver sa non culpabilité, ou sa non implication dans un conflit d’intérêts. C’est un renversement extrêmement préoccupant. Je ne crois pas que les peines contenues à l’article 226-10 du code pénal sur la dénonciation calomnieuse soient très dissuasives à cet égard.

Monsieur le ministre, je n’ai pas parlé d’immunité, j’ai dit que certains pouvaient penser bénéficier d’une immunité par l’application de la notion de présomption de bonne foi. Quand on est présumé de bonne foi et qu’on sait qu’on n’a pas à apporter la preuve mais simplement à affirmer, à alléguer, on peut être tenté de procéder à des allégations qui ne comportent pas toujours des fondements exacts.

(L’amendement n° 132 n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 89 a déjà été défendu.

(L’amendement n° 89, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 17 est adopté.)

Après l’article 17

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 23.

M. Lionel Tardy. Monsieur le président, je vous rassure je ne défendrai pas tous mes amendements l’un après l’autre. Il est une heure moins dix, et nous en sommes déjà à notre troisième séance de nuit.

M. le président. Nous vous en remercions, mon cher collègue.

M. Lionel Tardy. La série d’amendements que j’ai déposés visent à unifier les règles concernant les déclarations d’intérêts des autorités administratives indépendantes. Suivant leur date de création, et les différentes réformes qui ont eu lieu, on trouve des situations très différentes, qu’il convient d’unifier. Pour cela, j’ai pris comme modèle l’article relatif au traitement des conflits d’intérêts de l’ARJEL, en explicitant clairement que la déclaration d’intérêts est publique. Il est nécessaire d’aller plus loin dans les textes législatifs et de ne pas se contenter d’articles généraux, comme ceux que l’on trouve au début de ce texte.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Ces amendements ont tous déjà été évoqués dans le projet de loi organique. La commission y est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis.

(L’amendement n° 23 n’est pas adopté.)

M. le président. Les amendements, nos 28, 29, 24, 26, 25 et 20 ont été défendus par M. Tardy.

(Les amendements nos 28, 29, 24, 26, 25 et 20, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour soutenir l’amendement n° 160 rectifié.

Mme Catherine Lemorton. On peut penser que cet amendement, qui a été repoussé en commission, n’est pas en lien direct avec le texte dont nous discutons ce soir. Nous souhaitons juste envoyer un signe au réseau qui demandait plus de transparence sur les agents publics, notamment dans le domaine sanitaire et médico-social dès lors qu’il s’agit de promouvoir un médicament au nom d’une industrie pharmaceutique et qu’à ce titre des rémunérations – et elles ne sont pas faibles – leur sont accordées. Au regard du décret d’application paru dernièrement et suite à la loi Bertrand, il s’avère que ces montants sont parfois assez exorbitants et qu’il n’est pas obligatoire de les déclarer. Or pour la plupart, ce sont des agents publics puisqu’ils sont souvent praticiens hospitaliers ou professeurs des universités. Il a donc semblé à mon collègue Bapt et à moi-même qu’il fallait envoyer un signe, pour dire qu’on ne les avait pas oubliés suite à l’affaire du Médiator.

Je demande donc au rapporteur et au ministre si cet amendement doit être maintenu, s’il a lieu d’être et si un texte de loi est en préparation, auquel cas nous le retirerions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Mme la présidente Lemorton sait mieux que personne que la santé publique est l’un des domaines dans lequel il existe déjà des règles sur les déclarations d’intérêts, que la loi organique et la loi ordinaire dont nous discutons ne concernent que les obligations générales et non pas spécifiques à un secteur donné. Nous pensons que si cet amendement était intégré dans ce texte, il serait qualifié de cavalier. Par contre, il aura toute sa place dans le texte qui a déjà été annoncé par le Gouvernement sur la fonction publique puisqu’il concernera la déontologie de la fonction publique. Nous retrouverons là le sujet des conflits d’intérêts dans le domaine de la santé. Je ne peux donc que vous conseiller de le retirer, sous réserve que le Gouvernement confirme ce que je viens de dire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Madame Lemorton, vous avez donné la réponse à votre question dans votre propre démonstration. Il est légitime que cette expression ait lieu dans ce débat, mais la disposition que vous proposez pourra éventuellement se concrétiser dans le texte qui sera présenté en conseil des ministres dans le courant de l’été.

Pour les raisons que je viens d’évoquer et pour celles qui ont été indiquées par le rapporteur, le Gouvernement vous suggère de retirer cet amendement.

M. le président. Madame Lemorton, retirez-vous l’amendement ?

Mme Catherine Lemorton. Oui, monsieur le président.

(L’amendement n° 160 rectifié est retiré.)

M. le président. Les amendements, nos 21, 27, 22 et 30 ont été défendus par M. Tardy.

(Les amendements nos 21, 27, 22 et 30, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Article 18

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 135, 224 et 309.

La parole est à M. Guy Geoffroy, pour soutenir l’amendement n° 135.

M. Guy Geoffroy. Monsieur le président, je serai bref, connaissant déjà le résultat du vote puisque le ministre et le rapporteur seront défavorables à cet amendement.

Malgré tout, je souhaite vous alerter sur deux termes qui ont été longuement discutés lors de l’examen de la loi organique et sur lesquels nous n’avons pas réussi à obtenir de votre part que vous modifiiez votre position. Je veux parler du terme « substantiel », très difficile à définir dans son volume, et du terme « sciemment » – ou « volontairement » – que vous refusez d’introduire.

J’insiste beaucoup, malgré l’argumentaire que pourrait soutenir le rapporteur sur le caractère naturellement intentionnel d’un délit, sur le fait que ce que vous avez accepté d’un côté et refusé de l’autre fragilise encore davantage la présomption d’innocence des élus de la République.

M. le président. L’amendement n° 224 est-il défendu ?

M. Hervé Morin. Oui, monsieur le président.

M. le président. Et l’amendement n° 309 ?

M. Damien Abad. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable. Nous les avons déjà vus dans le projet de loi organique.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Même avis.

(Les amendements identiques nos 135, 224 et 309 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Matthias Fekl, pour soutenir l’amendement n° 143.

M. Matthias Fekl. Nous sommes là au cœur du sujet, à la fois sur le contrôle de l’évolution des patrimoines, et sur la question de l’enrichissement. La question n’est pas tellement celle de la richesse intrinsèque de tel ou tel, mais son enrichissement éventuel en cours de mandat, au gré du mandat. D’où l’idée de proposer la création d’un nouveau délit, le délit d’enrichissement illicite dont il a déjà abondamment été question en commission. J’ai déposé un nouvel amendement qui reprend des éléments que j’avais déjà eu l’occasion d’aborder en commission, enrichi par un amendement semblable qui avait été déposé par notre président rapporteur. Il s’agit, donc, de créer un délit d’enrichissement en punissant d’une peine d’emprisonnement et de 40 000 euros d’amende le fait de s’enrichir en cours de mandat sans être capable de prouver l’origine licite, légale, légitime de ses revenus.

Je précise que la création de ce délit est recommandée par la convention des Nations unies de 2003 de lutte contre la corruption, et qu’elle est demandée par un certain nombre d’associations de lutte contre la corruption. De grands noms du monde judiciaire se sont engagés en ce sens. Tel est le sens de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cet amendement nous crée bien du souci. Nous en comprenons l’intention. D’ailleurs Matthias Fekl, avec un peu de malice, a repris la rédaction que votre serviteur avait lui-même proposée en commission des lois.

Cet amendement ne vise pas à sanctionner l’enrichissement inexpliqué, ce qui serait une infraction non intentionnelle comme vous l’avez dit, mais le fait de ne pas apporter de justification devant la Haute autorité.

La pénalisation de l’enrichissement inexpliqué serait une infraction non intentionnelle. On constaterait que la personne se serait enrichie sans pouvoir le justifier, sans qu’elle doive en être la source. C’est donc un délit non intentionnel ce qui, en droit pénal, constitue quand même une petite difficulté.

Cependant, nous ne pouvons pas donner un avis favorable sur cet amendement. Nous prenons le problème dans un autre sens. Comme j’ai longuement réfléchi sur cette affaire mais que je ne suis pas parvenu à une rédaction convenable, je n’ai pas proposé à nouveau, au titre de l’article 88 du règlement, un amendement relatif à l’enrichissement inexpliqué. Je pense que votre amendement n’est pas conforme au principe constitutionnel de la nécessité des délits et des peines. La définition d’une incrimination doit être précise pour que son interprétation soit stricte. Si, de fait, ont disparu les notions « d’augmentation substantielle » ou de « revenu légitime » qui sont trop sujettes à interprétations, reste le caractère subjectif d’une explication qui serait jugée suffisante.

Dans le doute, je préfère m’abstenir. La commission m’a suivi en donnant un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. C’est un débat qui vient tardivement, mais qui est important, qu’il s’agisse de ses principes ou de ses conséquences.

Le Gouvernement est vraiment très défavorable à l’adoption de cet amendement.

Dans le dispositif que nous examinons, l’élu ou l’agent public qui fait une déclaration risque, au plan pénal, un certain nombre de sanctions par rapport à des délits qui sont parfaitement identifiés tout au long du texte. Celui que ne fait pas de déclaration s’expose à une sanction lourde. Celui qui fait une déclaration mensongère sur son patrimoine est sanctionné. Celui qui ne répond pas à une injonction de la Haute autorité s’expose à une sanction pénale immédiate. Nous sommes là au bout du bout : il y a une incrimination, un fait objectif, on peut mettre une qualification pénale.

Il faut que chacun comprenne la démarche proposée : il s’agirait de créer un nouveau délit pénal, qui serait celui d’enrichissement inexpliqué. Il suffirait que la Haute autorité constate des problèmes pour expliquer la constitution d’un patrimoine.

M. Christian Jacob. C’est inconcevable !

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le dossier serait alors transmis au parquet. Du fait qu’une personne se trouve dans cette situation, on aurait les éléments constitutifs du délit.

Notre droit pénal n’est pas vierge de délits plus opérationnels, que ce soit la corruption, la fraude fiscale, la prise illégale d’intérêts, l’abus de bien social, bref tout ce qui viendra au bout de l’enquête.

On nous propose un nouveau délit, dont les éléments constitutifs ne seraient pas établis, qui échapperait donc aux canons du droit pénal. Puisque je m’exprime ici au nom du Gouvernement tout entier, y compris la Chancellerie, nous avons les plus grandes réserves sur cette rédaction. Cela ne nous paraît pas du tout nécessaire. Je crains même que si nous mettions en œuvre ce principe, si difficile à appliquer et qui risque d’être caricaturé, ceux qui sont en réalité contre l’ensemble du texte s’en serviraient pour démonter l’édifice.

Pour ces raisons de droit pur que sont l’absence d’éléments constitutif et la difficulté à créer un délit non intentionnel – il en existe d’autres dans notre droit, mais ils sont extrêmement limités –, il vaudrait mieux retirer cet amendement. Le Gouvernement émet un avis très défavorable.

M. le président. La parole est à M. Matthias Fekl. Pour retirer l’amendement ?

M. Matthias Fekl. Pour le retirer, non. Il y a là un vrai sujet. Peut-être la rédaction pourrait-elle être améliorée. Je sais qu’un amendement semblable est à l’ordre du jour dans le texte qui va venir sur la fraude fiscale. La commission de transparence de la vie publique a été saisie au cours des dernières années d’un certain nombre de cas – quatorze, de mémoire –, dont aucun n’a donné lieu à une condamnation judiciaire, précisément parce que, quand on est dans une zone grise, comme c’est souvent le cas en matière de corruption, on ne peut pas prouver l’origine des fonds.

Or, il est simple et même banal, pour chacun d’entre nous, de prouver la provenance de fonds gagnés de manière légale. Si vous gagnez au Loto, recevez un héritage ou percevez des revenus, il est extrêmement simple d’en justifier ; c’est plus compliqué quand l’argent provient de sources moins avouables.

Sur la conformité juridique, je n’ai pas lu d’analyse qui m’ait convaincu, ni au plan constitutionnel, ni au plan international, puisque c’est l’ONU elle-même qui recommande la création de ce délit. Tout en entendant que cet amendement n’est pas banal, qu’il soulève des difficultés juridiques et que sa constitutionnalité n’est pas absolument certaine – comme à chaque fois, d’ailleurs, qu’on propose une avancée, quelque chose de nouveau et d’audacieux –, je souhaite néanmoins le maintenir. Il me paraît vraiment pointer quelque chose d’extrêmement important.

(L’amendement n° 143 n’est pas adopté.)

M. Laurent Wauquiez. Dites-nous merci, monsieur le ministre !

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 195.

M. Lionel Tardy. Il est défendu.

(L’amendement n° 195, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 18 est adopté.)

Après l’article 18

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n° 60 portant article additionnel après l’article 18.

M. François de Rugy. Cet amendement est relatif à la durée des peines : il est proposé de porter de cinq à dix ans la durée de la peine complémentaire d’inéligibilité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Avis défavorable. Il paraît disproportionné, pour l’ensemble des délits n’intéressant pas directement les élus, de porter à dix ans la peine de privation des droits civiques, civils et de famille.

(L’amendement n° 60, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Article 19

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n° 219.

M. Arnaud Richard. Il s’agit de renforcer la portée et l’efficacité de la peine d’inéligibilité visée dans cet article, en prévoyant que l’inéligibilité est prononcée à titre principal et est encouragée par l’obligation d’une motivation si la juridiction décide de l’écarter.

Le délit de parjure est par ailleurs institué, afin de compléter l’arsenal juridique des infractions pénales visant les élus et les membres du Gouvernement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Défavorable. Cet amendement a déjà été vu lors de l’examen de la loi organique.

(L’amendement n° 219, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour soutenir l’amendement n° 382.

M. Laurent Wauquiez. Je serai très bref, mais cet amendement me donnera une dernière fois l’occasion de regretter que le Gouvernement ait réduit la voilure.

Je maintiens que la rédaction « allant jusqu’à l’inéligibilité à vie » est compatible avec la jurisprudence du Conseil constitutionnel. À défaut, devant le Sénat, vous pourriez la modifier en introduisant dans le texte une incompatibilité de fonctions, ce qui existe dans d’autres domaines.

(L’amendement n° 382, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 394.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Cet amendement concerne un point sur lequel nos débats en commission ont fait apparaître un désaccord : le rétablissement de la possibilité pour le juge judiciaire de prononcer une peine complémentaire d’inéligibilité à titre définitif en cas de condamnation grave pour des faits de corruption.

Cette peine à durée indéterminée reste susceptible de relèvement et de réhabilitation. C’est cette situation qui lui confère son caractère constitutionnel, puisqu’elle n’est pas perpétuelle. Ce qui est interdit, c’est une peine perpétuelle, c’est-à-dire une peine à vie. Une peine à durée indéterminée, mais qui est susceptible d’être relevée ou réhabilitée, est constitutionnelle, d’autant qu’il ne s’agit évidemment pas d’une peine automatique : c’est une décision qui est prise par le juge.

M. Laurent Wauquiez. C’est habile.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. On ne peut pas m’opposer la décision du Conseil constitutionnel qui concernait l’article L. 7 du code électoral, puisque c’était le caractère automatique de la peine que le Conseil constitutionnel avait censuré, et non pas sa durée.

À ce stade, et seulement si la personnalité de l’auteur la rend nécessaire, une telle peine à durée indéterminée pourrait être prononcée.

Ce type de peine existe déjà, y compris dans cette rédaction, dans notre code pénal. L’interdiction de détenir un animal – c’est l’article L. 131-31-2 – est une peine indéterminée : cela peut être pour toujours, et le juge peut vous en relever.

M. Laurent Wauquiez. Le parallèle est piquant…

M. Alain Vidalies, ministre délégué. L’interdiction du territoire français est une peine qui peut être prononcée et il n’est pas nécessaire, pour qu’elle soit constitutionnelle, que le juge la limite ou prévoie une date de retour.

Le Gouvernement, conformément à un engagement précis, exprès, du Président de la République, souhaite l’adoption de la rédaction qui était prévue dans le texte initial, c’est-à-dire la possibilité d’une telle peine de durée illimitée. Il s’agit d’une rédaction dont la constitutionnalité est garantie : la peine n’est pas automatique, des peines perpétuelles sont déjà prévues pour d’autres délits, et le juge pourra à tout moment, en fonction des circonstances, prononcer soit le relèvement, soit la réhabilitation.

Dans ces conditions, le Gouvernement demande à l’Assemblée d’adopter cet amendement n° 394.

M. Laurent Wauquiez. C’est un compromis, mais un compromis habile.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Mes chers collègues, c’est le dernier vrai débat sur ce texte.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Il y en aura un autre.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Ah bon. Pour moi, c’était le dernier.

C’est, en fait, une question de vocabulaire, pour tous ceux qui ne sont pas spécialistes du droit pénal, c’est-à-dire la majorité des Français. Quand ils entendent que quelqu’un est condamné à une peine d’inéligibilité définitive, ils entendent : « Cette personne ne sera plus jamais candidate devant les électeurs. » C’est cela qu’ils entendent.

M. Laurent Wauquiez. Oui.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. La réalité juridique, pénale, c’est que, même prononcée par un juge à titre définitif, une peine d’inéligibilité n’aura jamais d’effet perpétuel. Pourquoi ?

Je vais essayer d’être clair, sachant qu’à la fac, déjà, le droit pénal n’était pas ce qui m’amusait le plus. Une peine d’inéligibilité est une peine dite « complémentaire ». Or une peine complémentaire peut toujours être relevée, c’est-à-dire effacée par le juge. Il y a trois moyens pour cela.

Le premier, peu usité, figure à l’article 17 de la Constitution : c’est la grâce présidentielle.

Le second est ce qu’on appelle le régime de réhabilitation. Il y en a deux. Le régime de réhabilitation judiciaire peut être accordé sur demande adressée au procureur de la République : c’est la chambre de l’accusation de la cour d’appel qui se prononce. Cela suppose que la peine principale a été exécutée ou qu’elle est prescrite depuis au moins trois ans.

Il y a par ailleurs une autre voie, dite légale, qui se réalise de plein droit. Elle intervient quand un délai s’est écoulé depuis l’exécution de la peine principale. Il faut naturellement que la personne n’ait pas été condamnée entre-temps par une nouvelle décision à une peine criminelle ou correctionnelle. Depuis la loi de 2007, le délai est de trois ans en cas de condamnation à une peine d’amende, de cinq ans en cas de condamnation à une peine d’emprisonnement inférieure à un an, de dix ans en cas de condamnation à une peine d’emprisonnement inférieure à dix ans.

Pour être concret, une personne condamnée à une peine principale d’amende et à une peine complémentaire d’inéligibilité à titre définitif sera en réalité tout à fait capable de revenir devant les électeurs au bout de trois ans, si elle n’a pas été condamnée entre-temps pour un autre délit. C’est la réalité du droit pénal : en droit français, les peines complémentaires définitives ne sont pas des peines à vie.

Je n’ai donc pas de désaccord avec le Gouvernement : nous disons la même chose. C’est seulement un effet de présentation. Quand on dit : « inéligibilité à titre définitif », les Français entendent « à vie ». En droit pénal, c’est un mensonge. C’est la raison pour laquelle je plaide pour une inéligibilité de dix ans qui serait une réalité.

La commission est donc défavorable à l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Comme notre collègue Urvoas, j’ai fait des études de droit et donc de droit pénal auquel, pour avoir redoublé, je me suis de fait intéressé. (Sourires.) Je suis assez sensible à votre argument, mon cher collègue, car je vois bien la symbolique d’une interdiction à titre définitif pour frapper les esprits,…

M. Guy Geoffroy. Cela aurait un effet désastreux !

M. Pascal Cherki. …mais je m’en méfie : je ne suis pas un grand amateur de la symbolique des peines perpétuelles, même si elles peuvent être relevées – encore que j’attends de voir comment un juge reviendrait sur une décision prononcée par un de ses collègues dans ces cas-là.

Ensuite, et l’argumentation de notre collègue Urvoas me semble assez pertinente, je pense qu’une peine de dix ans est assez significative. Je ne vois pas comment un élu qui aurait été condamné pour les faits dont il est ici question, pourrait, après une inéligibilité de dix ans, revenir sur la scène politique. On obtiendrait donc le même effet, tout en préservant les principes. Je suis donc tout à fait d’accord avec notre collègue Urvoas.

M. le président. La parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Quelle que soit la qualité de l’argumentation développée par le ministre, il y a tout de même une certaine contradiction dans les termes. Jean-Jacques Urvoas a très bien expliqué que cette peine définitive ne le serait en réalité pas du tout. Aussi, si nous votions l’amendement, cela reviendrait à afficher une sorte d’illusion : les Français auraient l’impression qu’il s’agirait réellement d’une inéligibilité définitive. Or le rapporteur nous rappelle à très juste titre qu’il n’y a pas de caractère définitif puisque des possibilités de relèvement, de réhabilitation, existent. Nous entrerions donc, je le répète, dans un système un peu illusoire si nous adoptions cet amendement.

De surcroît, sur le fond, les délais cités par Jean-Jacques Urvoas sont brefs parce qu’il a pris l’exemple d’une amende qui sanctionne des délits peut-être importants mais pas les plus graves. Dans le cas de délits plus graves, la peine d’emprisonnement prononcée a une durée importante et les délais peuvent donc être plus longs.

Enfin, la réhabilitation judiciaire – les instances concernées agissant à travers le procureur puis la chambre d’accusation de la cour d’appel – paraît quelque peu aléatoire, comme l’est la justice en général, me direz-vous. Mais enfin, peut-on être sûr que la chambre d’accusation de la cour d’appel prononcera cette réhabilitation même si elle nous paraît, à nous simples observateurs, justifiée ? Le dispositif proposé crée énormément de contraintes et d’aléas.

Je sais bien que le Conseil constitutionnel a statué sur un sujet légèrement différent, mais j’ai le sentiment que sur le problème qui nous occupe, qui est un peu voisin, il statuerait de la même manière. En somme, je n’approuve pas l’amendement du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. René Dosière.

M. René Dosière. Comme l’a souligné le rapporteur, ce point est la dernière divergence qui subsiste entre le Gouvernement et la commission. Toutes les discussions – et non pas de petites négociations comme l’opposition a tendance à l’affirmer – portant sur un travail législatif approfondi, n’ont pas permis, contrairement à ce qui s’est passé pour l’ensemble des autres dispositions, de parvenir à un accord.

Nous avons bien entendu l’argumentation très solide en droit du président de la commission des lois. Elle ne nous surprend d’ailleurs pas : elle est conforme à sa manière de travailler. Cependant, nous avons aussi entendu l’argumentation du ministre, qui n’est pas non plus sans fondement. L’un et l’autre ont bien précisé qu’il fallait tenir compte d’un effet de perception de la part de l’opinion publique.

C’est la raison pour laquelle j’invite le groupe socialiste à suivre la position du Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. François de Rugy.

M. François de Rugy. Comme l’a dit le rapporteur, il s’agit d’un débat important. Les membres du groupe écologiste en ont beaucoup discuté. Nous ne sommes pas favorables, par principe, aux peines définitives. D’autres collègues l’ont rappelé : le droit français n’est pas conçu sur l’idée qu’on puisse prononcer le bannissement définitif de quelqu’un, mais sur l’idée qu’on peut purger une peine et reprendre ensuite une vie normale – c’est, j’y insiste, un principe tout à fait important.

Mais en même temps, si le Gouvernement a proposé cet amendement, c’est qu’il cherche à répondre à une attente forte en raison de cas un peu choquants. Certains n’ont été condamnés qu’à une année pour des affaires assez graves d’emplois fictifs, de détournement d’argent public, et sont ensuite revenus, aussitôt leur peine purgée, exercer leur mandat – en ayant reçu, il est vrai, l’onction du suffrage universel.

L’amendement du Gouvernement ouvre donc une possibilité, laisse au juge son pouvoir d’appréciation, respectant par là le principe général de notre droit. C’est pourquoi nous voterons cet amendement.

(L’amendement n° 394 n’est pas adopté.)

M. Guy Geoffroy. Il n’est pas adopté, tant mieux !

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n° 52.

M. François de Rugy. Il est défendu.

(L’amendement n° 52, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 380 rectifié.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Cet amendement vise à compléter la réglementation existante. Il y a, selon l’expression assez classique, « des trous dans la raquette », qu’il s’agit de combler.

(L’amendement n° 380 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n° 225.

M. Arnaud Richard. Cet amendement vise à compléter la sanction d’inéligibilité prévue par cet article. Il s’inspire du statut de la fonction publique, qui prévoit que « nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire, le cas échéant, si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l’exercice des fonctions ». Il prévoit ainsi, non pas une peine mais une condition d’aptitude, admise par le Conseil constitutionnel et dont le champ est plus large que l’inéligibilité.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Nous avons de multiples fois déjà discuté de cet amendement : avis défavorable.

(L’amendement n° 225, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 386.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Il s’inscrit dans la même logique que l’amendement n° 380 rectifié.

(L’amendement n° 386, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

(L’article 19, amendé, est adopté.)

Article 19 bis

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement n° 392, tendant à la suppression de l’article 19 bis.

M. Alain Vidalies, ministre délégué. J’appelle l’attention de l’Assemblée sur l’adoption en commission d’un amendement modifiant le texte qui punit la prise illégale d’intérêt. Le code pénal prévoit qu’il faut avoir « un intérêt quelconque ». Pour des raisons qui m’échappent, il a été décidé qu’on allait remplacer les mots « un intérêt quelconque » par toute une série d’éléments : un intérêt particulier, un intérêt de nature à compromettre l’impartialité…

Dans le cas qui nous occupe, la notion d’intérêt quelconque permet au juge de procéder à une mise en examen ou de prononcer une condamnation.

Comprenez bien qu’il s’agit ici de la définition à partir de laquelle un juge va pouvoir poursuivre quelqu’un pour prise illégale d’intérêt. On passe donc, avec l’article 19 bis, d’« un intérêt quelconque » à « un intérêt de nature à compromettre » son indépendance, son impartialité ou son objectivité. Il me semble qu’il y a eu une confusion entre les textes relatifs à la définition du conflit d’intérêts et la répression pénale de la prise illégale d’intérêt.

Le Gouvernement insiste particulièrement sur le point suivant. Même s’il n’y a pas eu de commentaire, pour le moment, sur cette affaire, il est évident qu’un jour ou l’autre, et cela pourra arriver très rapidement, on se demandera pourquoi donc un texte relatif à la transparence, à la moralisation de la vie publique a modifié l’article du code pénal qui constitue le principal fondement des poursuites en assortissant la nouvelle définition du délit de prise illégale d’intérêt de conditions aussi draconiennes ! Il faudra que le juge, avant de poursuivre quelqu’un, ait la conviction et surtout la preuve, non plus d’un « intérêt quelconque » – ce qui est une définition assez large –, mais d’un intérêt qui soit de nature à compromettre l’indépendance, l’impartialité ou l’objectivité. Je dois dire qu’on n’est pas loin de la preuve impossible. En tout cas, on nous reprochera l’introduction de ces précisions, qui sera interprétée comme une volonté déguisée d’éviter les poursuites contre les élus.

Aussi cet article, tel qu’il résulte des travaux de la commission, est en réalité en contradiction avec la démarche générale que nous avons engagée. Chacun peut commettre une erreur – et j’espère que le débat va se poursuivre – mais le Gouvernement pense qu’il s’agit d’une erreur profonde. C’est pourquoi il souhaite demander très solennellement à l’Assemblée de revenir à la rédaction antérieure qui incriminait la prise illégale d’intérêt.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. La commission soutient le Gouvernement.

(L’amendement n° 392 est adopté et l’article 19 bis est supprimé.)

Article 20

M. le président. À l’article 20, la parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 170.

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.

(L’amendement n° 170, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. François de Rugy, pour soutenir l’amendement n° 53.

M. François de Rugy. Il est défendu.

(L’amendement n° 53, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

(L’article 20, amendé, est adopté.)

Article 21

M. le président. À l’article 21, la parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg, pour soutenir l’amendement n° 92.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg. Je le retire, monsieur le président.

(L’amendement n° 92 est retiré.)

(L’article 21 est adopté.)

Articles 22, 22 bis et 23

(Les articles 22, 22 bis et 23 sont adoptés.)

Après l’article 23

M. le président. La parole est à M. René Dosière, pour soutenir l’amendement n° 95 rectifié portant article additionnel après l’article 23.

M. René Dosière. Il s’agit d’assurer la transparence, dans les collectivités locales, pour l’attribution d’avantages en nature aux élus et aux fonctionnaires.

(L’amendement n° 95 rectifié, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.)

Article 24

M. le président. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n° 145.

M. Arnaud Richard. Cet amendement a été déposé par nos collègues de Nouvelle-Calédonie, M. Philippe Gomes et Mme Sonia Lagarde. Il fait pendant à ceux qui ont été débattus dans le projet de loi organique.

L’article 24 prévoit l’application de la loi sur l’ensemble du territoire de la République, mais il nous semble nécessaire d’apporter des précisions sur les conditions d’application du texte en Nouvelle-Calédonie, qu’il s’agisse de la référence à l’administration fiscale, au code général des impôts et au livre des procédures fiscales, ou de l’assimilation de la Nouvelle-Calédonie à une collectivité territoriale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Jacques Urvoas, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable, parce que cet amendement a été satisfait par un amendement adopté dans la loi organique, mon cher collègue.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Alain Vidalies, ministre délégué. Défavorable.

(L’amendement n° 145 n’est pas adopté.)

(L’article 24 est adopté.)

M. le président. Nous avons achevé l’examen des articles du projet de loi.

Je rappelle que la Conférence des présidents a décidé que les explications de vote et le vote par scrutin public sur l’ensemble du projet de loi auront lieu le mardi 25 juin, après les questions au Gouvernement.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, jeudi 20 juin à neuf heures trente :

Deuxième lecture du projet de loi habilitant le Gouvernement à légiférer pour accélérer les projets de construction ;

Deuxième lecture de la proposition de loi portant déblocage de la participation.

La séance est levée.

(La séance est levée à une heure trente.)