Accueil > Projet de loi de finances pour 2015 > Les comptes rendus des commissions élargies (plf 2015) > Compte rendu intégral

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Assemblée nationale

commission élargie

Commission des finances,
de l’économie générale
et du contrôle budgétaire

Commission de la défense nationale
et des forces armées

(Application de l’article 120 du Règlement)

Jeudi 23 octobre 2014

Présidence de M. Gilles Carrez,
président de la Commission des finances,
et de Mme Patricia Adam,
présidente de la Commission
de la défense nationale.

La réunion de la commission élargie commence à neuf heures dix.

projet de loi de finances pour 2015

Défense

M. le président Gilles Carrez. Monsieur le ministre de la défense, je suis heureux de vous accueillir, avec Mme Patricia Adam, présidente de la commission de la défense nationale et des forces armées, et Mme Odile Saugues, vice-présidente de la commission des affaires étrangères.

Nous sommes réunis en commission élargie afin d’examiner les crédits du projet de loi de finances pour 2014 consacrés à la mission « Défense ».

Nous donnerons d’abord la parole aux rapporteurs de nos trois commissions, qui interviendront pour une durée de cinq minutes, sous la forme de questions posées au ministre. Les orateurs des groupes s’exprimeront, pour deux minutes chacun, après la réponse du ministre.

Enfin, tous les députés qui le souhaitent pourront interroger le ministre, leur intervention étant également limitée à deux minutes.

Mme la présidente Patricia Adam. Je voudrais d’abord remercier le ministre de nous avoir envoyé le bilan d’étape semestriel, pratiquement conforme à ce qui était prévu, comme l’est ce projet de loi de finances 2015, au titre de la deuxième année de la loi de programmation militaire. Cet exercice est une étape particulièrement importante de la vie de la LPM.

La réserve et les reports de charges restent, chaque fin d’année, une question habituelle. Les documents que vous nous avez fournis, monsieur le ministre, font apparaître, pour le ministère de la défense, un surcoût en fonctionnement de 150 millions d’euros du fait de l’opération Louvois, que l’on peut qualifier de « grand ratage ». Cela affectera le budget de la défense pendant quelque temps encore, compte tenu du fait que le futur logiciel, dont je veux espérer qu’il sera réellement efficient cette fois, est à l’étude. Durant cette période, nous resterons confrontés à de vraies difficultés, avec toutes les conséquences que cela peut avoir, notamment sur le moral des troupes.

Ma deuxième question porte sur la vigilance accrue de notre commission et de celle des finances sur les recettes exceptionnelles et leur date d’arrivée. Elles sont importantes, comme dans la précédente loi de programmation. Vous avez évoqué, lors de votre audition, monsieur le ministre, le travail que vous menez actuellement sur la société de projet. Nous vous accompagnerons dans cette démarche. Si elle pouvait aboutir très rapidement, dès l’année prochaine, si possible avant l’été, cela sécuriserait la trajectoire de l’année 2015 et celle de la LPM.

Cependant, la commission de la défense s’inquiète de savoir si cette société de projet aura une durée de vie bien définie. C’est indispensable si nous voulons être à même d’évaluer correctement ce type de montage et savoir si nous pouvons continuer dans cette voie ou, à l’inverse, s’il faut l’abandonner. Bien entendu, le coût doit être le plus faible possible.

Se pose également la question de l’assurance des équipements, qui aura une importance considérable dans le budget de cette société. Il faudra envisager, chaque fois que ce sera possible, que l’État soit son propre assureur en la matière.

J’en viens à la question de la création de syndicats, posée en langue anglaise – c’est-à-dire dans des termes qui n’ont pas forcément la même acception en français –, par la Cour européenne des droits de l’homme. Nous travaillons sur ce sujet ; une mission de réflexion a été confiée à M. Pêcheur, qui viendra devant notre commission exposer ses conclusions devant notre commission.

Sur le plan financier, quelle que soit l’issue des propositions qui seront faites, nous avions inscrit ce point dans la loi de programmation militaire et nous avons voté un amendement permettant d’améliorer la concertation au sein des armées. Vous avez commencé ce travail, en concertation avec les actuels représentants au sein de nos armées. Mais à l’évidence, si une proposition est faite en réponse à la délibération de la Cour européenne des droits de l’homme, elle aura des conséquences sur les instances de concertation actuelles. Certains militaires estiment en effet que s’ils avaient des représentants syndicaux, ils seraient peut-être mieux entendus concernant leur budget. Je n’en suis pas sûre, car si l’on compare les budgets des pays européens qui ont, pour beaucoup d’entre eux, des syndicats, c’est bien pire chez eux.

M. Guy Teissier, rapporteur pour avis pour la commission des affaires étrangères. Absolument !

Mme la présidente Patricia Adam. Je peux dire aux militaires que la meilleure défense de leurs intérêts, en termes de logistique humaine comme en matière d’équipement, est certainement assurée par le Parlement, avec la commission de la défense et la commission des finances, qui travaillent en parfaite harmonie sur ce point.

M. le président Gilles Carrez. Je tiens à souligner que les préoccupations budgétaires et financières exprimées par la commission de la défense sont totalement partagées par la commission des finances.

M. Jacques Myard. Pour une fois !

M. le président Gilles Carrez. Ce n’est pas si rare, monsieur Myard ! En l’occurrence, il y a totale convergence.

M. Guy Teissier. C’est une cause nationale !

Mme Odile Saugues, vice-présidente de la commission des affaires étrangères. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, la commission des affaires étrangères accorde une grande importance aux crédits de la défense.

Ce budget est cohérent par rapport à la loi de programmation militaire, mais nombreux sont les terrains où nos forces sont engagées, et la France est parfois bien seule –, en République démocratique du Congo ou au Mali, par exemple.

Monsieur le ministre, combien de temps pourrons-nous soutenir cet effort ? Où en est la coopération avec nos partenaires européens, afin de mieux répartir les responsabilités et le fardeau financier ?

M. François Cornut-Gentille, rapporteur spécial de la commission des finances pour le programme « Préparation de l’avenir ». Je concentrerai mes propos sur les recettes exceptionnelles, non sur les 200 millions liés aux recettes immobilières, mais sur les 2,1 milliards qui restent beaucoup plus flous.

Il s’agit d’un enjeu majeur. Si ces recettes n’étaient pas là en temps utile, c’est tout l’édifice de la LPM qui s’effondrerait. Dans la situation où nous sommes, l’absence de ces recettes, et donc, l’écroulement de la LPM, aurait pour conséquences, d’une part, une crise sans précédent dans nos armées, engagées dans un processus difficile depuis un certain nombre d’années et qui ne supporteraient pas le manque de parole de l’État, et d’autre part, une perte de crédibilité totale de la France sur le plan international.

Le paradoxe est double et concerne aussi bien la majorité actuelle que la précédente, qui a mis le doigt dans l’engrenage des ressources exceptionnelles.

Nous élaborons des LPM depuis la période gaullienne. Celles-ci ont vocation à sécuriser le budget de la défense, l’un des points essentiels étant la modernisation des équipements. Or c’est précisément sur les équipements que l’on fait porter les ressources exceptionnelles, lesquelles ont un caractère aléatoire. Tel est le paradoxe d’un texte qui, alors qu’il a été conçu pour sécuriser, introduit une insécurité.

Le second paradoxe, qui découle du précédent, monsieur le ministre, c’est que nous sommes tous, majorité et opposition, amenés à soutenir des mesures que nous réprouvons par ailleurs.

J’en viens à quatre séries de questions portant sur les sociétés de projet.

Pendant un certain temps, on a évoqué les investissements d’avenir, mais aujourd’hui, on n’en parle plus. Il y a deux semaines, en réponse à une question de Jean-François Lamour, M. Macron a évoqué les sociétés de projet, tout en laissant entendre que d’autres solutions étaient possibles. Existe-t-il un plan B ou non ? La seule solution pour ces 2,1 milliards réside-t-elle dans les sociétés de projet ou y a-t-il d’autres pistes ?

Ma deuxième série de questions découle de la visite que Patricia Adam, Jean Launay et moi-même avons rendue à Christian Eckert en juillet dernier à Bercy. Le débat sur les sociétés de projet a été engagé il y a plus de six mois par le ministère de la défense et Bercy. Les courriers que nous avons reçus montrent qu’il y a eu des discussions sur ce sujet, mais ils font apparaître des tensions très fortes et, pour le moins, une absence de convergence de vues. En juillet, nous n’avions pas beaucoup avancé. Aujourd’hui, vous nous dites, monsieur le ministre, que les choses vont avancer. Qu’est-ce qui vous fait penser cela puisque rien ne bouge depuis un an et que les positions sont, au contraire, très tranchées ? Le chef d’état-major des armées, Pierre de Villiers, insiste sur le fait que les recettes exceptionnelles doivent être là en temps utile. Quel est, selon vous, le bon timing pour constituer ces sociétés et enclencher le processus ?

Ma troisième série de questions porte sur le capital des sociétés. On entend dire qu’elles seraient purement publiques ou qu’elles reposeraient éventuellement sur un mix public-privé. N’y aurait-il pas conflit d’intérêts si le secteur privé pouvait entrer au capital de ces sociétés ?

Ma quatrième série de questions concerne les types d’armement qui pourraient entrer dans le cadre de ces sociétés de projet. On parle des ravitailleurs ; mais si l’on s’oriente vers une sorte de leasing pour les questions touchant au nucléaire, cela créera beaucoup de problèmes.

Une dernière série de questions plus générale. L’argument très souvent avancé en faveur des sociétés de projet par le ministère de la défense consiste à dire que ce ne serait plus une dépense au sens maastrichtien du terme. Mais Bercy nous assure que c’en est bien une. N’y a-t-il pas là un risque de fragiliser l’ensemble ?

Par ailleurs, s’agissant du report de charges, monsieur le ministre, comment voyez-vous les choses pour la fin de l’année ? Quelle est la ligne rouge à ne pas franchir en la matière ?

Enfin, j’ai rendu, il y a quelques semaines, un rapport sur l’École polytechnique. Il ne prétendait pas apporter une solution ou promouvoir une idée particulière, mais indiquait qu’il était indispensable pour l’État de se poser certaines questions pour clarifier le projet de l’école. Comptez-vous donner une suite à ce rapport ?

M. le président Gilles Carrez. Je vous confirme que les dépenses militaires, jusqu’à nouvel ordre, sont maastrichtiennes.

M. Jean Launay, rapporteur spécial de la commission des finances pour le programme « Budget opérationnel de la défense ». Monsieur le ministre, je ne reviendrai pas sur la question des sociétés de projet ; François Cornut-Gentille et moi-même venons de commettre une tribune sur le sujet afin de vous aider à sécuriser le processus afin que la recette – et donc la capacité de dépense – tombe bien dès l’année 2015.

Je partage l’ambition que la loi de programmation militaire soit exécutée à l’euro près dès 2015, car c’est une année charnière tant sur le plan de l’activité opérationnelle que pour les équipements.

Notre capacité d’expression en séance publique la semaine prochaine étant désormais limitée, c’est pour nous le moment de vous faire part de nos interrogations concernant cette mission dont vous avez la responsabilité. Chacun d’entre nous, ici, veut vous accompagner. Le président Carrez a bien fait de rappeler le soutien de toutes les commissions aux objectifs que vous vous fixez dans cette mission.

Premièrement, la question du report de charges me paraît cruciale. La solution qui consistait à recourir à des investissements d’avenir pour financer les recettes exceptionnelles en 2015 semblait être une bonne solution – ce qui nous ramène à la question des sociétés de projet. Il faut éviter de voir le report de charges progresser, alors qu’il a déjà atteint un niveau inédit. Pourquoi la solution des investissements d’avenir, recommandée dans le rapport Charpin, n’a-t-elle pas été retenue ? Le rapport indique que la mise en réserve des crédits est une pratique budgétaire courante, mais que si le gel des crédits n’était pas levé, il pourrait mettre en difficulté les responsables de programmes, et donc accroître le report de charges.

Deuxièmement, je m’interroge sur la question du repyramidage au sein du ministère de la défense. Si les crédits de personnel ont diminué pour la première fois en valeur absolue en 2014, l’effort demandé aux armées est sévère. Nous avons pu aborder le sujet avec le chef d’état-major des armées : il est dommage de nous priver prématurément d’officiers supérieurs ayant une longue expérience et pouvant être encore utiles.

Quelle solution pourrait être mise en place à cet égard, afin de rétablir la cohérence de la pyramide des grades, tout en ne prenant pas le risque de gâcher certaines compétences ? La spécificité propre à chaque armée rajoute aux difficultés, s’agissant notamment des pilotes dans l’armée de l’air.

Ma troisième question portera sur les crédits consacrés à la modernisation et à la rénovation des infrastructures. Ils s’élèvent à 1,1 milliard d’euros dans le projet de loi de finances pour 2015. Cet effort est important et, monsieur le ministre, vous avez mis en place un plan d’urgence de 30 millions d’euros dans le second semestre 2013, qui a renforcé cet élan.

Toutefois, de nombreuses difficultés demeurent. À titre d’exemple, la mise à niveau des réseaux électriques, notamment à l’Île Longue ou à Toulon, ou celle des réseaux de distribution d’eau peinent à se concrétiser. La loi de programmation militaire prévoit 6,2 milliards d’euros de crédits pour les infrastructures alors que l’estimation des besoins, effectuée avant la LPM, dépassait les 7 milliards. Monsieur le ministre, comment ressentez-vous cette situation et quelles réponses pourraient être apportées ? Nos militaires sont parfois contraints de vivre dans des conditions difficiles.

Je terminerai par une question un peu plus précise concernant les véhicules de l’avant blindés (VAB). Cette année, je me suis intéressé à la question du maintien en condition opérationnelle des équipements et j’ai pu constater qu’il existait des solutions industrielles pour rénover et prolonger la durée de vie des VAB, comme le prévoit la LPM.

M. Jacques Myard. Ils seront bientôt centenaires !

M. Jean Launay, rapporteur spécial de la commission des finances pour le programme « Budget opérationnel de la défense ». Ces solutions pourraient être portées par des sociétés françaises, ce qui contribuerait à créer ou à maintenir des emplois et des compétences sur le territoire. J’aimerais savoir si le ministère de la défense prévoit de mettre en place des solutions adaptées à la rénovation de ces engins.

M. Jean-Yves Le Déaut, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le programme « Environnement et prospective de la politique de défense ». Le programme 144 « Environnement et prospective de la défense » tient une place singulière dans le budget de la défense : bien qu’il n’en représente que 4,2 %, ce budget a une importance stratégique. Malgré un contexte budgétaire contraint, il connaît une légère hausse de ses crédits, de 1,28 %. L’effort est concentré dans le domaine du renseignement et de la cyberdéfense, avec une augmentation conséquente des autorisations d’engagement.

Les études amont ne connaissent qu’une très faible diminution de leurs crédits. Je me félicite de constater la persistance de l’importance donnée à l’innovation technologique. Cependant, pour la deuxième année, les écoles sous tutelle du ministère de la défense voient leur budget baisser. C’est un sujet de préoccupation, car nous avons pour ainsi dire quinze ministères de l’enseignement supérieur en France, mais ils ne connaissent pas du tout les mêmes baisses et augmentations budgétaires…

J’ai consacré cette année une partie de mon rapport à deux points particuliers : les drones et la lutte contre le bioterrorisme, dont on parle peu.

Les OPEX successives ont démontré l’importance des drones dans notre système de forces actuel. Le bilan des Reaper est positif. Ils sont devenus indispensables aux opérations sur la bande sahélo-saharienne. Cependant, les deux Reaper ne suffisent pas à combler les besoins opérationnels de l’armée de l’air, qui doit compter sur l’aide américaine sur le terrain. Face à cette dépendance dont les effets sont bienvenus, mais qui reste difficilement acceptable sur le fond, la francisation des équipements est-elle hypothétique ou arrivera-t-on à installer certains équipements supplémentaires sur ces Reaper ? Mais avant tout, monsieur le ministre, un drone MALE européen semble de plus en plus indispensable. Il faudrait prendre une décision afin d’être prêts en 2015.

On peut du reste s’interroger, comme Mme la vice-présidente des affaires étrangères, sur l’attitude de Bruxelles qui nous demande, à raison certes, de réduire notre déficit, mais qui, en même temps, fait preuve de nanisme politique en matière de défense, s’agissant notamment de la préparation de l’avenir. Le drone MALE européen, à mon sens, fait partie des priorités qui devraient être données au niveau de Bruxelles. C’est au tour des décideurs politiques de s’engager rapidement.

En ce qui concerne les drones de combat, on peut se réjouir de voir la France, forte de l’expertise acquise lors du programme nEUROn, prendre l’initiative, avec les Britanniques, de développer un drone de combat commun opérationnel à l’horizon 2030. Je me félicite également du lancement d’une consultation pour le renouvellement du drone tactique de l’armée de l’air.

Comme le démontre aujourd’hui l’épidémie d’Ebola, nous sommes vulnérables aux contaminations biologiques. La lutte contre le bioterrorisme ne doit pas faiblir et nécessite des investissements à la hauteur. Au cours de mes auditions, j’ai pu remarquer que des efforts significatifs avaient été réalisés ces dernières années. Il y a sept ou huit ans, j’avais souligné le fait que nous n’étions pas opérationnels en matière de détection rapide. Depuis, j’ai pu me rendre compte que des progrès importants avaient été réalisés au sein de nos armées. Cela étant, le dispositif reste perfectible. Un effort supplémentaire doit être fait dans le domaine de la formation et des entraînements, il faut maintenir les équipements à niveau en dépit des contraintes budgétaires et sensibiliser l’opinion, notamment les chercheurs, à l’importance de la biosécurité. Les scientifiques doivent prendre conscience du danger en adoptant des comportements vertueux et en participant à l’effort de recherche dans les domaines liés à la lutte contre le bioterrorisme.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis globalement favorable aux crédits du programme 144, qui sont préservés.

Permettez-moi enfin, monsieur le ministre, deux questions complémentaires.

En ce qui concerne, d’abord, la lutte contre le bioterrorisme, quel est aujourd’hui, selon vous, l’état de la menace bioterroriste ? Quel est son lien avec les conflits en cours ? Nos forces armées sont-elles bien protégées et comment ?

S’agissant du drone MALE européen, quelle est la réponse politique au projet d’étude du drone MALE européen proposé par Dassault, Airbus et Alenia ? À combien s’élève le financement envisagé pour l’étude de faisabilité ? Quelle est la feuille de route du projet ? Enfin, avez-vous, sur ce dossier, le soutien de la Commission européenne et du Conseil des ministres ?

M. Charles de La Verpillière, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le programme « Soutien et logistique interarmées ». Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, les crédits du soutien et de la logistique interarmées sont répartis dans les programmes 178 et 212, ce qui n’en facilite pas la lecture globale, d’autant que les dépenses de personnel ont été totalement reventilées cette année et figurent pour la première fois en totalité dans le programme 212, ce qui oblige à une petite gymnastique comptable pour effectuer les comparaisons d’une année sur l’autre.

Sous cette réserve de cette méthode, on observe que ces crédits sont globalement orientés à la baisse : moins 3,6 % en crédits de paiement. Vous me direz que c’est un des principes de la loi de programmation militaire que de faire porter autant que possible l’effort d’économie sur les soutiens plutôt que sur l’opérationnel ; mais il faut se rendre compte que la technique consistant à comprimer sans cesse les moyens de soutien atteint ses limites. L’exercice 2013 l’a montré puisque, pour les bases de défense, vous avez dû, monsieur le ministre, lancer en fin d’année un plan de soutien exceptionnel doté de 30 millions d’euros afin de parer au plus pressé.

Comme notre commission en a pris l’habitude depuis 2012, j’ai choisi de consacrer la plus grande partie de mes travaux à l’étude d’un thème, à savoir, cette année, les surcoûts liés aux opérations extérieures, les fameuses OPEX.

On entend souvent affirmer, y compris par vous, monsieur le ministre, que le système de financement de ces surcoûts préserve intégralement le budget des armées. À y regarder de plus près, ce n’est pas exact.

Certes, il existe un mécanisme de financement des surcoûts liés aux OPEX. Depuis la loi de programmation militaire 2009-2014, on inscrit une provision dans la loi de finances initiale. Elle est, cette année, de 450 millions d’euros. Cette provision étant systématiquement dépassée depuis plusieurs années, du fait de l’ampleur et du rythme soutenu de nos opérations, une procédure de refinancement sur la réserve interministérielle de précaution a été mise en place.

En apparence, cette procédure fonctionne bien et permet d’éviter de compenser ces surcoûts par des annulations de crédits d’armement, comme c’était le cas jusqu’en 2003. Mais ce n’est qu’une apparence. Si, comme c’était le cas l’année dernière, il manque 750 millions d’euros pour financer le surcoût des OPEX, en plus de la provision inscrite dans la loi de finances initiale, on prélève sur la réserve de précaution interministérielle. Mais cette réserve est elle-même financée à hauteur de 20 % par le ministère de la défense… Autrement dit, lorsqu’on lui compense 750 millions d’euros, il doit en réalité en financer lui-même un cinquième sur ses propres crédits. On ne compense donc en fait que 80 % du dépassement.

En outre, il n’est pas certain que la méthode de calcul des surcoûts soit la bonne. J’ai relevé, au fil des auditions, qu’on ne compense pas, par exemple, le coût des matériels détruits en opération ou perdus. Il en est de même pour l’usure prématurée des matériels. Au Mali, les blindés, les VAB et surtout les hélicoptères, connaissent une usure accélérée. Ce surcoût n’est pas compensé par le mécanisme de financement des surcoûts OPEX.

Enfin, ce mécanisme de financement par la solidarité interministérielle n’est pas une assurance tous risques. Vous l’avez dit vous-même lors de vos auditions, monsieur le ministre, c’est un combat qu’il faut livrer tous les ans. Quelles assurances pouvez-vous nous donner sur le remboursement des surcoûts OPEX de 2014, qui atteignent 1,150 milliard d’euros ? Êtes-vous certain, alors que la provision a été abaissée à 450 millions, d’obtenir la compensation intégrale des 700 millions qui vont manquer ?

Il y a probablement un lien entre ce mécanisme insuffisant de compensation des surcoûts OPEX et l’annulation, l’année dernière, de 650 millions d’euros de crédits d’armement dans le budget de la défense.

Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable à ces crédits.

M. Joaquim Pueyo, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le programme « Préparation et emploi des forces : Forces terrestres ». Les crédits de l’armée de terre, dont je suis le rapporteur depuis 2012, sont, pour 2015, conformes à la LPM. Comme l’a dit devant la commission le chef d’état-major de l’armée de terre, c’est désormais à l’exécution de ce budget qu’il faudra accorder toute notre vigilance, car l’année 2015 s’annonce comme étant l’année charnière, l’année de vérité de la LPM.

En effet, les crédits de l’armée de terre, même fidèles à la programmation 2014-2019, n’en représentent pas moins une équation budgétaire très serrée, sans marge de manœuvre, tant la LPM est calculée au plus juste.

Il faut néanmoins souligner qu’un effort est consenti au profit de l’entraînement des forces, de façon à mettre un terme à la baisse continue, et ô combien dangereuse, des moyens consacrés à la préparation opérationnelle de nos forces. L’entretien programmé du matériel bénéficiera lui aussi de moyens supplémentaires, ce qui n’a rien de superflu lorsqu’on voit le vieillissement de certains équipements. Il suffit de penser aux VAB pour s’en convaincre.

Le programme SCORPION, crucial pour l’armée de terre, devrait être enfin lancé. Il vise à régénérer nos équipements, dans un programme cohérent et standardisé qui en limite les coûts d’entretien. La loi de programmation militaire a déjà opéré toutes les économies envisageables sur ce programme : les calendriers de livraison ont été étalés dans le temps au maximum et les volumes de commandes réduits au strict minimum. Outre l’opération SCORPION, la LPM a planifié le lancement ou la livraison de plusieurs équipements majeurs pour l’armée de terre : le lance-roquettes unitaire, les véhicules blindés de combat de l’infanterie, le programme FÉLIN, l’armement individuel du futur appelé à remplacer le FAMAS ou les différents types d’hélicoptères de combat, sans compter les drones tactiques. Pourriez-vous, monsieur le ministre, confirmer ces livraisons et leur planification ?

L’année 2015 sera difficile pour l’armée de terre puisqu’elle sera marquée par une déflation conséquente des effectifs. Certes, le choix a été fait de préserver au maximum les capacités opérationnelles de nos forces armées, en faisant peser les deux tiers des suppressions de postes sur les soutiens. Il n’en demeure pas moins que, sur un total de plus de 30 000 suppressions de postes prévues par la LPM pour la période 2014-2019, 15 500 suppressions seront opérées au sein des trois armées. Pouvez-vous préciser le cadencement et la répartition de ces suppressions entre les trois armées ?

J’en viens à la partie thématique de mon rapport : elle porte sur le rôle social de l’armée de terre. Certes, une armée professionnelle se juge à ses résultats opérationnels. Mais il est incontestable que, par son histoire, par les chances qu’elle offre aux jeunes qu’elle forme, voire qu’elle éduque, comme par son volume – plus de 100 000 personnels –, l’armée de terre reste un intégrateur social majeur.

Dans un contexte de déflation d’effectifs, il me paraît important d’éviter les déflations sèches : ce serait indigne envers des hommes qui ont servi la France. Le dispositif de reconversion existant, avec l’agence « Défense mobilité », a fait ses preuves, mais il reste des marges de progrès. Qu’envisagez-vous de faire pour en améliorer le fonctionnement, par exemple en prospectant davantage dans la fonction publique territoriale ?

Les déflations, et la réforme en général, ont un impact sur le moral de l’armée, notamment sur les unités qui vont le moins en OPEX. Dans un contexte de réforme anxiogène, les militaires cherchent avant tout de la considération. Cela passe, bien sûr, par la rémunération, mais pas seulement : la tenue des infrastructures de vie et de travail, la qualité des équipements, la restauration ou l’habillement sont autant de domaines dans lesquels des efforts relativement peu coûteux peuvent redresser le moral. Quelles mesures sont prévues en ce sens ?

Enfin, dans un contexte où le plan de déflation est très compliqué à mettre en œuvre, alors même qu’en toile de fond, la jeunesse de notre pays connaît de plus en plus de problèmes d’insertion sociale et que le Président de la République prévoit de tripler le nombre de jeunes dans le service civique d’ici à 2017, je propose de réfléchir à des structures qui, sous un nom ou sous un autre, correspondraient en métropole à ce qu’est le service militaire adapté outre-mer et présenteraient l’avantage de reclasser des militaires touchés par la déflation des effectifs. Le besoin est là, les hommes sont là, forts de leur savoir-faire et de leur savoir-être. Le financement peut aisément être trouvé dans les 32 milliards consacrés à la formation professionnelle. On pourrait imaginer un système similaire à ce qu’il se passe dans les établissements publics d’insertion de la défense (EPIDE). Qu’en pensez-vous, monsieur le ministre, pour relancer le lien nation armée ?

Pour les raisons que je viens d’exposer, je donne un avis favorable à ces crédits.

M. Gwendal Rouillard, suppléant M. Gilbert Le Bris, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le programme « Préparation et l’emploi des forces : Marine ». Gilbert Le Bris, rapporteur en titre des crédits de la Marine, vous prie de bien vouloir excuser son absence et m’a demandé de bien vouloir le suppléer. Je m’efforcerai donc de vous relayer le plus fidèlement possible ses analyses et ses interrogations.

Je tiens avant tout à saluer l’action de nos forces armées, et notamment de nos marins. Ces femmes et ces hommes, qui ont choisi de consacrer leur vie au service de leur pays et de leurs concitoyens, font preuve au quotidien d’un grand courage, d’un extrême professionnalisme et d’un sens aigu du devoir, qu’ils agissent en métropole, dans nos territoires ultramarins ou en opérations extérieures. Je tiens à leur manifester ici tout mon soutien et toute ma reconnaissance.

Je souhaite également rassurer quiconque s’intéresse aux débats budgétaires et à l’effort financier de la nation au profit de nos forces armées. La diminution constatée pour 2015 des crédits de la Marine est en réalité purement optique et résulte d’un changement de maquette budgétaire, puisque l’ensemble des crédits du titre II du ministère de la défense sont dorénavant concentrés au sein d’un programme unique.

En dehors de ces mesures techniques, l’effort financier en faveur des forces navales est maintenu à hauteur de 3 milliards d’euros en autorisations d’engagement et de 1,96 milliard d’euros en crédits de paiement.

Ces niveaux de ressources traduisent notamment, pour la deuxième année consécutive, la priorité accordée à l’entretien programmé des matériels, conformément à votre engagement, monsieur le ministre, ce qui est particulièrement bienvenu. Une telle dynamique est conforme à la loi de programmation militaire, qui a fait de la remontée de l’activité opérationnelle des forces un axe majeur.

L’augmentation de près de 55 % des autorisations d’engagement assurera ainsi le renouvellement d’importants contrats pluriannuels relatifs à l’entretien des sous-marins, des bâtiments de surface et des aéronefs. Ils permettront la nécessaire régénération des matériels et des équipements et prépareront ainsi la remontée de l’activité opérationnelle vers les standards OTAN à partir de 2016.

Monsieur le ministre, mes premières questions auront trait aux ressources humaines et à la rationalisation des implantations.

L’an prochain, 7 500 suppressions de postes sont prévues. Quelle sera exactement la contribution de la Marine dans ce domaine, sachant qu’elle reste l’armée la moins dotée en hommes ?

Cette nécessaire participation à l’effort global va-t-elle se limiter aux personnels présents dans les deux organismes qu’il est prévu de fermer : la base navale de l’Adour à Anglet, dans les Pyrénées-Atlantiques, et le commandement maritime de Strasbourg ?

Par ailleurs, est-il prévu d’adapter le cadencement des déflations afin de le synchroniser avec les flux d’entrée et de sortie des bâtiments dans les forces ? En effet, la cible de diminution des effectifs a été déterminée, compte tenu de l’entrée en service de nouveaux bâtiments aux équipages optimisés, tels que les frégates multimissions (FREMM). Or ces matériels ne seront effectivement disponibles qu’en fin de programmation. Il ne faudrait pas que la Marine soit contrainte de consentir l’essentiel des efforts de déflation de manière trop prématurée. En somme, il s’agit d’honorer le contrat dans le domaine d’emploi des ressources humaines, sans pour autant dégrader la tenue du contrat opérationnel.

J’en viens à quelques questions concernant les bâtiments qui seront désarmés en 2015.

J’ai cru comprendre que les deux patrouilleurs de surveillance des sites, Athos et Aramis, pourraient être reversés à la gendarmerie maritime. Pourriez-vous nous donner quelques précisions à ce sujet ?

Qu’adviendra-t-il des autres navires, Sirocco et Albatros ? Seront-ils démantelés ou bien seront-ils revendus ?

Mes dernières questions porteront sur l’Adroit. Conçu par l’entreprise DCNS, ce navire avait été mis à la disposition de la Marine le 21 octobre 2011, pour une durée de trois ans. Alors qu’il devait être restitué cet automne par la Marine, la convention avec DCNS a été reconduite. Quelle est la durée de cette nouvelle mise à disposition ? Que se passera-t-il une fois l’accord parvenu à échéance ? Puisqu’il n’est pas interdit d’espérer, pourrait-on envisager une intégration pleine et entière du bâtiment à nos forces navales ? Ou, plus probablement, espère-t-on une vente à l’export puisque le navire peut désormais se prévaloir du label « sea proven » (éprouvé en opérations) et d’une utilisation par la Marine française ?

M. Christophe Guilloteau, rapporteur pour avis de la commission de la défense pour le programme « Préparation et emploi des forces : Air ». Monsieur le ministre, le projet de loi de finances pour 2015 que vous nous avez présenté correspond à un budget tendu, dans une loi de programmation militaire taillée au plus juste. Je dirais qu’il est juste cohérent, voire juste suffisant, avec les choix de réduction des formats et des contrats opérationnels, que nous avons décidés dans le cadre du Livre blanc de 2013 et de la LPM.

Je salue l’effort particulier fait cette année pour augmenter de 5,96 % les crédits de l’entretien programmé des matériels (EPM), gage d’une meilleure disponibilité technique des matériels.

S’agissant du programme « Préparation et emploi des forces : Air », je tiens à signaler que, cette année encore, l’armée de l’air va poursuivre la réduction de ses effectifs. À cet égard, j’appelle votre attention sur la réduction du nombre d’officiers, qui a certainement atteint ses limites. Comme vous le savez, les missions spécifiques de l’armée de l’air nécessitent un taux d’encadrement important. L’essentiel est de maîtriser la masse salariale.

Vous avez annoncé, monsieur le ministre, le 15 octobre dernier, un plan de restructuration pour l’armée de l’air. J’aimerais que les restructurations à venir puissent être annoncées avec suffisamment de préavis afin que les militaires et leurs familles puissent les anticiper dans les meilleures conditions.

L’enjeu du projet de loi de finances pour 2015 est de maintenir la cohérence et l’équilibre du modèle d’armée que nous avons choisi, ce qui implique un plein et entier respect de la loi de programmation militaire. Or cette cohérence est fragile. Le 2 octobre 2013, vous avez déclaré devant la commission de la défense : « nous avons atteint un équilibre tel que si on enlevait une brique de l’édifice, il s’effondrerait ». Le général Denis Mercier, chef d’état-major de l’armée de l’air, a quant à lui déclaré que l’armée de l’air avait atteint aujourd’hui la dernière étape où la pleine souveraineté est maintenue sans abandon de compétence.

Je ne reviendrai pas sur les craintes légitimes de certains, que je partage, sur l’obtention en 2015 des recettes exceptionnelles prévues par la LPM ni sur la faisabilité de mettre en place une société de projet avant le mois de septembre 2015.

Je voudrais vous interroger sur un élément déterminant, qui conditionne la cohérence du nouveau modèle de l’armée de l’air : la préparation opérationnelle différenciée et le projet « Cognac 2016 » visant à moderniser la formation des pilotes. Les auditions que j’ai menées ont montré que nous pourrions au mieux espérer un projet « Cognac 2017 » voire 2018 ou 2019… Comment expliquer le retard pris pour s’équiper d’avions de type Pilatus, indispensables à la réalisation de l’entraînement différencié ?

Dans la partie thématique de mon avis, j’ai souhaité mettre l’accent sur les forces spéciales de l’armée de l’air, qui me semblent trop souvent oubliées, au regard de la capacité de premier plan qu’elles ont prise dans les opérations récentes. Je tiens à rendre hommage aux hommes et aux femmes que j’ai rencontrés à l’occasion d’un déplacement récent auprès des forces spéciales dans la bande sahélo-saharienne. Leur implication, leur dévouement et leur abnégation forcent l’admiration.

Les militaires que j’ai rencontrés m’ont fait part de leur inquiétude sur un risque de « trou capacitaire » en matière de transport tactique des forces spéciales, entre l’extinction progressive de la flotte de C-160 et la lente montée en puissance de l’A400M. Qu’est-il prévu pour le transport tactique des forces spéciales ? Où en est le programme de rénovation du C- 130 qui, d’après mes informations, se limite à un traitement des obsolescences ? Ne pourrait-on pas, dans le cadre de l’Europe de la défense, envisager un partenariat avec l’Allemagne, qui dispose de C-160 à mi-vie ?

Pour ce qui concerne les équipements, où en est le programme à effet majeur relatif aux véhicules des forces spéciales, qui tarde à se mettre en place et qui est particulièrement attendu par les acteurs de terrain ? Comment comptez-vous relever le défi de la LPM du « + 1 000 effectifs » dans les forces spéciales, sans sacrifier la qualité à la quantité ? Ne pensez-vous pas qu’il serait opportun de réfléchir à la mise en place d’un système qui prendrait mieux en compte la prise de risque des forces spéciales et qui répondrait à leur besoin de reconnaissance ?

Pouvez-vous préciser le calendrier d’acquisition du troisième vecteur et d’un deuxième système de drone Reaper, dont j’ai pu mesurer l’efficacité sur le théâtre de l’opération Barkhane ?

Enfin, j’aimerais que vous indiquiez à la représentation nationale où en est le projet, prévu par la LPM, de rapprochement de la flotte de Caracal sur un seul site, ainsi que le projet d’intégration de tout ou partie de l’escadron « Pyrénées » dans le commandement des forces spéciales ?

M. Jean-Jacques Bridey, rapporteur pour avis sur l’équipement des forces – dissuasion. L’année 2015 sera, nous en avons tous conscience, une année décisive, « une année de vérité », selon l’état-major, et sa réussite sur le plan budgétaire conditionnera la bonne exécution de l’ensemble de la LPM 2014-2019.

Le projet de loi de finances pour 2015 traduit l’engagement du Président de la République de préserver les ressources affectées au ministère de la défense. Les 31,4 milliards d’euros prévus par la LPM permettront de franchir une étape clé de la modernisation de nos armées, qui se traduira par le passage au stade de la réalisation de 11 programmes, pour un montant de 2,75 milliards d’euros. On peut citer le système de drones tactiques, le système de commandement de gestion de crise DESCARTES, les satellites CERES, les bateaux de soutien et d’assistance hauturiers (BSAH), la rénovation de nos croisières de missiles longue portée SCALP ou encore les véhicules des forces spéciales.

À l’instar de mes collègues, je relèverai le niveau élevé de ressources exceptionnelles (REX), porté à 2,3 milliards d’euros en 2015 par la programmation triennale des finances publiques. C’est pour nous un risque de fragilisation de la trajectoire financière de la LPM.

Le calendrier de la cession de la bande des fréquences des 700 mégahertz, qui constitue l’essentiel des REX inscrites pour 2015, est en effet très ambitieux. Nous avons interrogé l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) sur ce point et, si elle a assuré être en ordre de marche pour la réaliser au plus vite, cette cession implique la réalisation d’un certain nombre de consultations, de procédures qui elles-mêmes nécessiteront de la part du Gouvernement une mobilisation sans faille tout au long de l’année qui vient. Je sais que le Gouvernement est prêt à relever ce défi mais les recettes ne devraient pas être disponibles au profit de la mission « Défense » avant le mois de décembre 2015, ce qui ne paraît pas compatible avec l’exécution budgétaire. Or la direction générale de l’armement (DGA) et l’état-major des armées nous ont fait savoir qu’il était fondamental pour eux de disposer de ces ressources dès l’été, au plus tard en septembre-octobre.

Il ne serait naturellement pas possible de faire supporter ce décalage calendaire par une augmentation du report de charges, qui est déjà aujourd’hui, pour le seul programme 146, proche du seuil critique de 2,1 milliards d’euros si la réserve de précaution était levée – sinon, nous en serions à 2,6 milliards d’euros –, tandis que la renégociation des contrats en cours a également atteint ses limites. C’est pourquoi vous envisagez d’utiliser la palette des outils mis à votre disposition par la clause de sauvegarde de la LPM qui vous permet de mobiliser le produit de cessions additionnelles de participations d’entreprises publiques en cas de décalage calendaire des REX. La difficulté restant de définir les modalités d’utilisation du produit de ces cessions, mais aussi de les intégrer dans un calendrier compatible avec l’exécution budgétaire.

Plusieurs hypothèses ont été envisagées. Une nouvelle sollicitation du programme d’investissements d’avenir, à l’image du schéma déjà utilisé en 2014, a été écartée. Seuls deux opérateurs de la défense, le commissariat à l’énergie atomique et le centre national d’études spatiales, sont en effet éligibles à ces crédits et il leur aurait été difficile d’absorber 2 milliards d’euros de nouvelles dépenses en 2015 alors que d’après leurs propres estimations ils n’auraient pu aller au-delà de 500 millions d’euros. Il aurait pu être envisagé d’ajouter la délégation générale à l’armement à la liste des opérateurs éligibles mais cette solution n’a pas été retenue. Pouvez-vous nous en dire un peu plus, monsieur le ministre ?

On aurait pu affecter ces 2 milliards d’euros directement à la mission « Défense ». Il aurait alors fallu prévoir une dérogation expresse dans le cadre du PLF pour 2015. Une autre solution aurait été de consacrer cette somme au désendettement et d’abonder d’autant le budget de la mission « Défense ». Ces deux solutions ont été écartées car elles présentaient l’inconvénient de dégrader le solde public.

Conformément à ce que vous laissiez entendre ces derniers mois, vous vous engagez donc, monsieur le ministre, sur une troisième voie, celle de la société de projet (SPV). Ce projet est très volontariste car il doit respecter des contraintes calendaires très fortes. Il convient rapidement de dresser la liste des équipements entrant dans son périmètre. L’état-major des armées m’a indiqué être attentif non seulement à la nature de ces équipements mais aussi à la cohérence entre les équipements qui pourraient être propriété de l’État ou propriété de cette SPV.

La création de la SPV et son fonctionnement engendreront des coûts supplémentaires liés à la rémunération du capital investi, aux différentes garanties et assurances, sans oublier les frais de gestion et les loyers qui lui seront versés : autant de coûts qui seront à la charge du ministère de la défense. C’est pourquoi l’opération, si elle devait être menée à bien, doit viser un débouclage rapide, à l’horizon de deux ou trois ans, à la fin de la LPM au plus tard.

Enfin, des interrogations demeurent sur l’impact d’un tel projet sur la dégradation du solde public.

Compte tenu de ces contraintes, pouvez-vous, monsieur le ministre, nous apporter des éléments complémentaires sur la création de cette ou de ces SPV et nous indiquer si le calendrier prévu est compatible avec l’exécution budgétaire ?

Si le projet n’aboutissait pas d’ici à l’été prochain, serait-il envisageable d’affecter le produit des cessions directement au profit de la mission « Défense » ? Cela rassurerait les parlementaires ainsi que nos soldats et notre état-major.

En attendant, j’émets un avis favorable sur les crédits de la mission.

M. Guy Teissier, rapporteur pour avis pour la commission des affaires étrangères. La France peut être fière de ses armées. À une époque où les rapports de force économiques et politiques ne sont pas forcément à notre avantage, personne ne conteste que la France porte haut son statut de grande puissance militaire. Le courage, l’audace et le savoir-faire de nos armées suscitent partout l’admiration, y compris chez nos grands voisins américains. Nos militaires sont d’excellents ambassadeurs de la France dans le monde, et ils sont fiers de ce qu’ils sont. Ce constat, le Président de la République le partage puisqu’il n’hésite pas à déployer nos armées pour contrer les menaces, nombreuses et inquiétantes, de notre environnement international. Mali et Centrafrique en 2013, mise en place de Barkhane au Sahel et campagne aérienne en Irak en 2014 : nos militaires sont très engagés, sur des théâtres risqués et dans des conditions difficiles et, on l’a mentionné, ils sont trop souvent trop seuls.

Mais notre outil militaire atteint ses limites. Les équipements, fortement sollicités en OPEX, peinent à se régénérer, et les livraisons de nouveaux matériels, étalées dans le temps pour faire face à la baisse des budgets, sont trop lentes au regard des besoins. De manière plus inquiétante encore, les savoir-faire militaires menacent de s’éroder, en raison de l’insuffisance de l’entraînement générique. Pour le moment, nos armées vivent sur leurs acquis, mais cela ne pourra durer qu’un temps.

Tout cela, monsieur le ministre, vous en êtes conscient. Vous avez estimé que le budget de la défense ne devait pas descendre en dessous de 31,4 milliards d’euros. Le Président de la République avait d’ailleurs lui-même pris un engagement en ce sens l’année dernière. Le budget que vous nous présentez pour 2015 affiche nominalement ce montant. Mais, sauf votre respect, ce budget reste à mes yeux insincère et, comme aurait dit un syndicaliste bien connu, le compte n’y est pas : il vous manque 2,1 milliards d’euros de ressources, et vous ne pouvez pas nous dire précisément comment vous allez les trouver. Le pouvoir budgétaire du Parlement implique que nous puissions voter en connaissance de cause ; or tel n’est pas le cas aujourd’hui. La question des sociétés de projet n’est pas un détail purement technique que vous pourriez régler vous-même en cours d’exercice budgétaire : elle a des implications sur l’avenir de notre outil militaire et devrait pouvoir être débattue concrètement dès le vote du budget. Comment comptez-vous associer le Parlement à cette réflexion ?

Même dans l’hypothèse où vous parviendriez à réunir les 31,4 milliards d’euros promis pour 2015, il est plus qu’improbable que la défense bénéficie de l’intégralité de son budget en 2014. En effet, la défense participera à hauteur de 20 % au financement des dépenses soumises à la solidarité interministérielle, dont les surcoûts OPEX, pour 1,1 milliard d’euros. Les 450 ou 500 millions d’euros de la clause de sauvegarde de la loi de programmation militaire – que j’avais créée à l’époque où je présidais la commission de la défense et des forces armées – ayant déjà été intégralement consommés pour compenser la gestion 2014, vous n’aurez plus de marge de manœuvre pour amortir les nouvelles annulations de crédits qui seront décidées inéluctablement en fin d’année. Aussi suis-je inquiet parce que les efforts de rationalisation et l’inventivité des militaires ne pourront pas indéfiniment compenser le manque chronique de ressources.

J’en viens aux questions. Vous avez récemment annoncé un plan de restructurations qui se traduit par un nombre limité de fermetures de sites, dans un souci louable d’en réduire l’impact territorial – on a pu constater les dégâts que peut occasionner une fuite dans la presse. Pour cela, de nombreuses unités vont perdre certaines de leurs composantes et voir leurs effectifs réduits : un bataillon n’a pas l’efficacité d’un régiment. Ne craignez-vous pas d’affaiblir notre outil militaire par ce que les états-majors appellent communément l’« échenillage » ? Par ailleurs, vous avez évoqué l’annonce d’un plan de restructuration pluriannuel dès le début de l’année 2015 afin de donner une meilleure visibilité aux familles et aux territoires : pouvez-vous confirmer cette hypothèse ?

J’ai rencontré les forces spéciales qui se trouvent en première ligne au Sahel – et dont les opérations, souvent tenues secrètes, sont remarquables. Ces hommes sont passionnés par leur métier. Cependant, en raison des déflations d’effectifs, ils sont soumis à un rythme opérationnel excessif au regard de leurs possibilités d’entraînement et de leur vie de famille. Ce déséquilibre ne vous paraît-il pas dangereux, étant donné le profil extrêmement risqué des missions confiées à ces forces ?

Pour ce qui est des crédits de la mission, je m’en remettrai à la sagesse de la commission.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Je remercie les différents rapporteurs pour la qualité de leurs exposés et pour leurs remarques que, globalement, je partage.

Ainsi que l’article 8 de la loi de programmation militaire m’en fait l’obligation, je me dois d’abord de vous faire un point sur son exécution pour le second semestre de l’année en cours.

L’ensemble de la trajectoire de la LPM, pour 2014, est respecté. J’aborderai trois aspects : la trajectoire en matière de ressources humaines, la trajectoire capacitaire et la trajectoire financière.

Pour ce qui est des ressources humaines, une déflation de 7 880 emplois était prévue par le projet de loi de finances pour 2014. La cible est parfaitement tenue. La manœuvre RH a fait la preuve de son efficacité puisqu’elle s’est appuyée sur un dispositif d’accompagnement social personnalisé, un plan d’accompagnement des restructurations, avec des incitations financières et des aides à la mobilité au profit du personnel civil et militaire.

Dans le même temps, je me suis attaché à renforcer les moyens humains affectés à certaines missions prioritaires prévues par le LPM, comme les services du renseignement, la cyberdéfense ou les forces spéciales. La LPM prévoit une augmentation des effectifs des forces spéciales qui doivent passer de 3 000 à 4 000 personnes. Ils auront crû cette année de 200 personnes par rapport à 2013. Le processus est identique pour la cyberdéfense. Aussi le chiffre de 7 880 emplois tient-il compte des recrutements opérés dans les secteurs prioritaires mentionnés.

L’effort de « dépyramidage », quant à lui, se poursuit. Cet effort, qu’il faut conduire avec précaution, est nécessaire. Nous avons pris l’engagement de réduire la part des officiers au sein de la population militaire de 16,75 % à 16 % en fin de programmation – soit une déflation significative mais pas exceptionnelle. Il s’agit en particulier de sortir de la contradiction à laquelle j’ai été confrontée en arrivant au ministère : les effectifs diminuaient, mais la masse salariale augmentait… Or, pour la première fois, en 2014, la masse salariale aura baissé de 340 millions d’euros. Cette opération exige une gestion très pointue des ressources humaines ; elle devra se prolonger en ce sens à moins de remettre en cause le maintien en condition opérationnelle (MCO) qui est l’une de mes priorités.

Reste le poison que constitue le logiciel Louvois – un fardeau dont je me serais bien passé. Ses dysfonctionnements, par définition, ne cesseront que lorsque le nouveau système sera opérationnel. À la fin de l’année dernière, face à l’impossibilité de transformer le dispositif Louvois, j’ai brutalement décidé de l’arrêter. Le prototype du nouveau modèle sera connu à la fin 2014 et sa mise en œuvre définitive sera effective dès que nous serons assurés que nous ne serons pas exposés à de nouvelles complications ; en attendant, nous resterons en double pilotage. Louvois nous a coûté en 2014 quelque 150 millions d’euros. On compte 90 millions d’euros d’indus nets versés qui ne sont pas récupérés et 35 millions d’euros d’avances non récupérées.

Pour ce qui est de la trajectoire capacitaire et industrielle, elle est intégralement respectée. Nous sommes convenus, avec les chefs d’état-major, des contrats opérationnels préconisés par le Livre blanc. J’ai insisté sur la nécessité de maintenir la qualité et le niveau de la préparation et de l’activité opérationnelle. Or c’était souvent auparavant, pour des raisons de facilité, la variable d’ajustement. J’ai décidé, fin 2013, d’enrayer la diminution, constante depuis de nombreuses années, des crédits affectés à l’ensemble de la préparation opérationnelle. Nous y sommes parvenus en 2014. J’ai souhaité que chaque exercice budgétaire prévoie une augmentation de 4,5 % pour le maintien en condition opérationnelle et pour la préparation opérationnelle des forces, cela afin que nous respections à nouveau les normes OTAN – ce qui sera le cas à la fin de la période couverte par la LPM. Je pense en particulier à la réforme de maintien en condition opérationnelle aéronautique.

Par ailleurs, les programmes d’armement prévus pour 2014 sont intégralement respectés eux aussi : commande du quatrième sous-marin nucléaire d’attaque Barracuda, développement d’une nouvelle version du missile balistique M51, engagement du programme SCORPION, lancement du projet Airbus A330 Multi-Role Tanker Transport (MRTT).

Pour ce qui est de la trajectoire financière, il y a toujours, au moment de l’examen du budget, des interrogations sur les REX, et je dois bien m’arranger avec la réalité à laquelle je suis confronté. Mais en 2014, toutes les ressources exceptionnelles sont au rendez-vous : 1,8 milliard d’euros au titre du PIA et 500 millions d’euros à raison de 250 millions d’euros ouverts dans le cadre de la loi de finances rectificative du 8 août et 250 millions d’euros via une mobilisation supplémentaire du PIA.

En ce qui concerne les OPEX de 2014, sujet de préoccupation – légitime – pour M. de La Verpillière, le surcoût prévisionnel total pour l’ensemble des théâtres est estimé à 1,128 milliard d’euros. Près des deux tiers de ce montant sont imputables aux seules opérations de la bande sahélo-saharienne, pour 487 millions d’euros, et de la République centrafricaine, pour 249 millions d’euros. Au regard de la dotation de 450 millions d’euros prévus par la loi de finances initiale, le différentiel s’élève à 624 millions d’euros. C’est bien en application de l’article 4 de la LPM que nous devons bénéficier d’un financement interministériel : il a été réglé, l’année dernière rubis sur l’ongle. Mais il est vrai qu’il s’agit d’une manœuvre, pour reprendre un terme militaire, qu’il faut démarrer tôt et poursuivre tard. Elle est entamée de mon côté en tout cas, monsieur de La Verpillière. Certains députés se sont demandé s’il fallait consacrer aux OPEX, en dotation initiale, davantage que 450 millions d’euros. Je maintiens que ce montant est plus sécurisant pour le budget de la défense que s’il était plus élevé – et je sais pouvoir compter sur votre soutien.

En outre, nous pouvons poursuivre en 2014 tous les objectifs de la LPM malgré un report de charges prévisionnel de 3,3 milliards d’euros. Ce montant est élevé mais il est gérable, pour peu que soit levée la somme de 1,4 milliard de réserve de précaution ministérielle et que l’on soit assuré de l’application de la clause de sauvegarde.

J’en viens au projet de loi de finances pour 2015.

Je veux d’abord insister sur la cohérence du texte. Les ressources de la mission « Défense » s’élèveront à 31,4 milliards d’euros en crédits de paiements dont 2,3 milliards d’euros de recettes exceptionnelles. Le montant, je le répète, est le même qu’en 2014 et le même qu’en 2013. Quant aux ressources exceptionnelles, je n’ai pas de raison de penser qu’en 2015 elles seraient moins au rendez-vous que les années précédentes, tout simplement parce que c’est une nécessité. La LPM est une loi d’équilibre dans tous les sens du terme : équilibre entre les missions, équilibre de celui qui marche sur un fil. Il ne doit rien manquer ; sinon, c’est toute la logique de l’ensemble qui s’écroule.

Logiquement, l’article 3 et l’annexe V.1 de la LPM prévoient la manière de mobiliser les 2,3 milliards de recettes exceptionnelles pour 2015. Le fruit de la cession de la de la bande de fréquences autour de 700 mégahertz doit être affecté aux REX. La procédure est engagée mais j’ai une interrogation sur la possibilité de disposer des REX liées à la mise aux enchères de ces fréquences avant la fin de l’année et donc une interrogation sur la capacité de passer des commandes puisque ces REX portent sur les équipements et non le fonctionnement. C’est pourquoi j’ai engagé une réflexion sur la mobilisation du produit de la cession des participations d’entreprises publiques.

J’y insiste : ces cessions sont prévues par l’article 3 de la LPM qui offre cette possibilité au ministère de la défense pour alimenter les REX, mais elles ne permettent pas une utilisation directe de ces ressources, qui doivent être réutilisées dans des opérations d’investissement en capital. Aussi avons-nous pensé utile d’investir le produit de ces cessions dans une société de projet grâce à laquelle nous aurions une propriété différée de certains équipements. Vous connaissez le principe : une société rachète des équipements aux armées – certains pouvant même être en cours de construction –, avant remboursement.

Ce projet n’est pas une nouveauté et je n’ai à cet égard aucune vanité d’auteur. Dans la LPM 2003-2008, mon prédécesseur avait également engagé ce processus.

M. Pierre Lellouche. Cela ne veut pas dire que c’était intelligent…

M. Yves Fromion. Heureusement, nous l’avions arrêté en cours de route !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Je constate seulement qu’on avait alors tenté de lancer une société de projet à capitaux privés et envisagé un dispositif, avec la société Armaris, permettant une acquisition patrimoniale à paiement différé. Je n’innove donc pas : des prédécesseurs illustres s’y sont essayés.

M. Pierre Lellouche. Pas du temps du général de Gaulle, en tout cas !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Il n’y a pas très longtemps, en effet, monsieur Lellouche.

M. Yves Fromion. L’expérience nous commande de ne pas aller plus loin, monsieur le ministre !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Je vais aller légèrement plus loin pour M. Fromion afin de lui rappeler – il était là – que le rapporteur du budget de la marine avait alors déclaré à Mme Alliot-Marie que c’était une très bonne idée. Ce rapporteur, c’était votre serviteur. Et je suis aujourd’hui d’autant plus déterminé à aboutir que j’ai un mandat du Président de la République.

La société de projet est la seule solution pour mobiliser les cessions de participation. Il n’y en a pas d’autre. Nous avons donc engagé la réflexion sur le sujet. Je suis tout à fait disposé à ce que cette société de projet soit préparée dans la plus grande transparence.

M. Yves Fromion. Encore heureux !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Nous avons lancé deux appels d’offres pour une assistance externe, l’un pour recruter un conseiller juridique, l’autre pour recruter un conseiller financier, afin de compléter nos analyses internes et d’être au rendez-vous mi-2015. Nous verrons alors si la mise aux enchères de la bande de fréquences autour de 700 mégahertz permettra de garantir les ressources exceptionnelles. Dès que le schéma sera établi, je reviendrai et devant la commission des finances et devant la commission de la défense pour faire le point et vous dire le sens de la manœuvre. Je vais recevoir, avec mon collègue Emmanuel Macron, dans quelques jours, les principaux patrons des industries de défense – car nous avons retenu également l’hypothèse d’une participation, dans ces sociétés de projet, d’industriels français, certes pas sur les sujets les plus sensibles, mais sur l’acquisition de certains matériels. Chacun perçoit bien les perspectives à l’exportation que peut dégager ce type de dispositif. Le débat est ouvert et j’ai mandat pour le faire aboutir.

Avant d’en revenir aux OPEX, je réponds à M. Cornut-Gentille sur l’École polytechnique. Après lecture de son rapport, je vais proposer au Premier ministre de mettre en place une commission pour instruire chacun des points qu’il a évoqués car ils sont importants. Nous avons réformé la gouvernance de l’école l’année dernière et je viens de signer le décret réformant le régime dit de la pantoufle, qui va dans le sens de ce que vous souhaitez.

M. de La Verpillière m’a interrogé sur le financement des surcoûts des OPEX. La rationalisation de nos forces stationnées à l’étranger a permis de ne pas dépasser les 450 millions d’euros initialement prévus. Nous avons mis fin à l’opération Kosovo. Nous nous sommes quasiment désengagés de l’Afghanistan : à la fin de l’année, il nous restera une cinquantaine de militaires uniquement affectés à l’application du traité franco-afghan et nous ne participons pas à la nouvelle mission de l’ONU Resolute Support. Nous avons réduit notre part dans l’opération Atalante puisqu’elle a donné des résultats. Nous avons prépositionné des forces qui étaient, auparavant, des forces OPEX – c’est le cas pour la Côte d’Ivoire : l’opération Licorne étant terminée, une base opérationnelle avancée a été installée à Abidjan.

Cela étant, sont venues s’ajouter en décembre l’opération en République centrafricaine, puis l’opération en Irak – qui n’est pas aujourd’hui une opération onéreuse dans la mesure où les avions de chasse mobilisés étaient prépositionnés sur la base d’Al-Dhafra à Abou Dabi, auxquels nous avons ajouté trois Rafale. Si cette opération était amenée à durer, son coût s’en ferait bien sûr ressentir.

Par ailleurs, nous sommes perplexes concernant le dispositif Athena : lorsque l’Union européenne mène une opération à l’extérieur, la prise en charge des coûts est si faible – autour de 8 ou 10 % – qu’elle n’incite pas du tout les États membres à participer : c’est le cas de l’EUFOR (Force de l’Union européenne) en République centrafricaine où nous sommes assez présents en termes d’effectifs, contrairement à l’EUTM-Mali (European Union Traning Mission) où nous ne représentons plus que 10 % de l’effectif. Un des moyens de renforcer l’Europe de la défense, serait de faire en sorte que le dispositif Athena couvre plus largement les frais des déploiements. Nous menons à ce sujet une bataille, avec le renfort de quelques alliés – peut-être pourrons-nous aboutir.

Contrairement à ce qu’a affirmé M. de La Verpillière, à ma connaissance, les coûts de « remétropolisation » des matériels envoyés en OPEX sont bien pris en compte dans le remboursement. En revanche, l’attrition ne l’est pas.

Au total, le PLF pour 2015 permet de financer toutes les priorités fixées par la LPM.

M. Launay est revenu sur la dégradation des conditions de vie et de travail en base de défense, évoquant l’état de certains bâtiments. J’entends bien remédier à cette situation. Les principes qui président à l’organisation des bases de défense sont sains. On peut toutefois déplorer une trop grande précipitation dans leur mise en œuvre. On peut également regretter une trop grande complexité des procédures qui parfois provoque désespérance et situations proprement ubuesques. J’ai décidé de rendre plus lisible le fonctionnement des bases de défense, clarification qui passe notamment par le double « casquettage » afin d’obtenir la cohérence de commandement et la maîtrise de gestion de l’ensemble des filières de décision et de soutien.

J’avais déjà augmenté, en 2014, le budget des bases de défense car il avait été sous-évalué ; je poursuivrai cet effort en 2015. J’avais décidé la mise en place d’un plan d’urgence pour 2013, 2014 et 2015, visant à y améliorer les conditions de vie et de travail. Il est souvent question de petites réparations urgentes qui traînent depuis des années parfois, en raison non d’un budget insuffisant, mais de l’incapacité à trouver le bon lieu de décision – pour acheter des matelas, des rideaux… Le dispositif que j’ai mis en place est très incitatif pour les chefs de corps : il prévoit 30 millions d’euros à dépenser dans l’immédiat, car ils ne sont pas reconduits.

Pour ce qui concerne les infrastructures, monsieur Launay, j’ai lancé un plan d’urgence destiné à traiter 700 points noirs, dont 300 devraient être éliminés en 2015. Là aussi, je vérifierai sur place. Ces dysfonctionnements ne sont pas forcément spectaculaires, mais ils traînent et leur réparation est essentielle pour le moral des forces.

M. Yves Fromion. Pouvez-vous nous en communiquer la liste ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Tout à fait. Je n’ai aucune réserve à vous la transmettre, monsieur Fromion : tout doit être transparent.

Le maintien en condition et d’entretien programmé des matériels tout comme les conditions de vie et de travail dans les bases de défense participent de la priorité qu’est la préparation opérationnelle globale.

En ce qui concerne la recherche et le développement, je rappelle que, dans la continuité des années 2013 et 2014, 3,6 milliards d’euros y seront consacrés en 2015. J’ai souhaité que les crédits destinés aux études menées en amont – 750 millions d’euros –, dont les effets ne se feront sentir que dans dix ans, soient reconduits. Ces études sont essentielles pour le maintien du niveau d’excellence de la France. Si l’on rogne sur ces crédits, nous ne serons plus à la hauteur.

M. Le Déaut a fait référence à deux sujets très concrets : les drones et le bioterrorisme – menace ancienne mentionnée d’ailleurs dans le Livre blanc précédent avec une menace nouvelle, le cyber-terrorisme. Nous affectons 15 millions d’euros par an aux études amont consacrées au bioterrorisme, en particulier dans le laboratoire biologique confiné P4 sur le site de Vert-le-Petit, pour nous assurer de notre bon niveau d’expertise en une matière où sommes parmi les meilleurs au monde. J’invite les membres de la commission de la défense à visiter ce site exceptionnel.

J’en viens aux drones et en particulier aux drones Reaper : nous disposons de deux machines à Niamey, en attendant l’affectation d’une troisième – je suis allé aux États-Unis pour m’assurer de sa livraison. En 2015, nous commanderons un autre système – la LPM prévoit l’utilisation de 12 drones et je tiens le tempo –, qui a vocation à être « francisé » puisqu’ils ne seront pas appelés à servir sur le territoire africain. Puisque nous jouissons d’une autonomie européenne et bénéficions d’un savoir-faire français, je fais de l’acquisition de ce dispositif une priorité majeure.

Nous avons engagé, pour la génération de drones qui suivra le Reaper, à l’horizon 2025, des discussions avec les Allemands et avec les Italiens qui devraient se terminer au moment du Conseil européen de juin 2015. Nous avons décidé de cette orientation au Conseil européen de décembre 2013, le premier depuis cinq ans à s’être préoccupé de questions de défense. L’Agence européenne de défense a été mandatée pour mener à bien les études, en particulier sur l’intégration des drones dans le ciel européen. Ma détermination est entière sur le sujet. Après le vaste débat public qui s’est instauré en Allemagne autour du drone Euro Hawk notamment, nous allons mettre en place une coopération active dans le domaine des drones d’observation : cela nous permettra de disposer de drones de nouvelle génération, ce qui paraît indispensable.

J’en viens aux drones de combat. Le nEUROn deviendra peut-être un outil de combat à l’avenir. J’ai signé un accord avec mon collègue britannique pour engager un programme de Système de combat aérien du futur (FCAS) : cette coopération avec les Britanniques est sans précédent. La première phase de ce projet est en cours ; il devrait se dérouler jusqu’en 2030.

Conformément à la LPM, le renouvellement des drones tactiques – également tout à fait indispensables – est engagé, et la compétition en cours : je ne ferai donc aucun commentaire sur ce sujet.

Monsieur Bridey, en 2015, la loi de programmation militaire sera intégralement respectée dans le domaine des équipements de l’armée de terre. La masse budgétaire affectée aux équipements nouveaux est plus importante en 2015 qu’en 2014.

Les derniers VBCI (véhicules blindés de combat d’infanterie) seront livrés en 2015. En ce qui concerne les hélicoptères, quatre Tigre, quatre NH90 et cinq Cougar rénovés seront affectés. Je souligne la montée en puissance du porteur polyvalent terrestre (PPT), qui remplace des appareils très anciens : vingt-cinq véhicules supplémentaires seront livrés cette année.

J’engagerai dans les jours qui viennent le programme SCORPION, ce qu’il n’a pas été possible de faire plus tôt pour des raisons techniques. Le processus de renouvellement des matériels blindés de l’armée de terre – les VBMR (véhicules blindés multirôles) qui remplacent les VAB (véhicule de l’avant blindé), les EBRC (engins blindés de reconnaissance et de combat) qui remplacent les AMX 10RC – commence.

La modernisation des VAB se poursuit, malgré leur grand âge, pour les maintenir à un niveau suffisant jusqu’à l’arrivée des VBMR – la livraison d’un millier de ces véhicules étant prévue dans la période de la LPM. L’armée de terre sera ainsi fortement modernisée.

Monsieur Rouillard, cinq bâtiments seront effectivement désarmés ; les vedettes Athos et Aramis, qui armaient la base navale d’Anglet, seront affectées à la gendarmerie nationale – dont une au moins très certainement dans une ville qui vous est chère. Le Siroco peut être revendu, puisque son potentiel opérationnel est intéressant. Nous étudions l’affectation des autres bateaux.

La mise à disposition de l’Adroit a été étendue. Il faut prêter une grande attention à ce patrouilleur, car c’est une bonne vitrine à l’exportation : ce modèle, qui se situe en dessous des FREMM sur le plan du coût et de la technologie, intéresse aujourd’hui une dizaine de pays.

Vous m’interrogez également sur la déflation des effectifs dans la marine. Vous avez évoqué la suppression de la base d’Anglet et du commandement maritime de Strasbourg, mais la déflation touchera l’ensemble des ports. Cela étant, les effectifs de la marine étant inférieurs à ceux des autres armées, et ses efforts antérieurs ayant déjà été significatifs, elle est moins touchée, à hauteur de 660 emplois en 2015.

L’ensemble de la loi de programmation militaire est respecté pour la marine nationale, qu’il s’agisse de la livraison des Rafale Marine ou de la livraison en 2015 de la troisième FREMM, équipée, pour la première fois, de son lot de missiles de croisière navals (MdCN).

Monsieur Guilloteau, pour ce qui concerne Cognac, j’ai tranché le débat : ce sera 2017, avec une obligation de résultat.

Vous m’interrogez sur les forces spéciales. Je vous confirme que l’escadron « Pyrénées », basé à Cazaux, sera placé sous les ordres du Commandement des opérations spéciales (COS). Nous ferons le point dans dix-huit mois.

M. Guy Teissier, rapporteur pour avis pour la commission des affaires étrangères. En sus du « Poitou », donc ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Absolument.

Il faut partout trouver des cohérences et simplifier. La réforme du MCO aéronautique était une nécessité : le maintien en condition opérationnelle d’hélicoptères identiques doit se faire au même endroit, même s’ils appartiennent à des armées différentes… Le rôle de l’autorité politique est de définir les responsabilités de chacun et de bousculer les corporatismes. Cela ne va pas toujours sans mal, mais par la suite, la situation s’en trouve améliorée. C’est dans cet esprit que les commandements ont été fusionnés à Bordeaux.

S’agissant des forces spéciales, le recrutement de nouvelles unités est engagé. J’ai répondu plus tôt sur les drones Reaper, et je vous confirme ici le lancement de la rénovation des avions de transport C-130 dans le courant de l’année 2015.

Plusieurs questions ont porté sur la suite des déflations d’effectifs. J’ai essayé, pour 2015, de m’en tenir au principe que j’indiquais déjà lors de la discussion de la loi de programmation militaire : pas plus d’un tiers de déflation dans les unités opérationnelles et le moins possible de dissolutions d’unités opérationnelles. Par conséquent, les deux tiers des suppressions se font dans le soutien, les états-majors, les services annexes.

L’échenillage n’est pas la solution – même si les annonces que j’ai faites il y a quelques jours ont pu donner l’impression que nous nous engagions dans cette voie. Il y a eu un plan de l’armée de l’air, qui s’appliquera entièrement. Il y a eu un plan de la marine, qui s’applique. Le plan de l’armée de terre est en cours de mise en œuvre, mais il ne reposera pas sur l’échenillage : il tirera les leçons des opérations que nous avons menées depuis une dizaine d’années, ce qui aboutira sans doute à modifier certains dispositifs. J’essaierai à l’avenir, autant que faire se peut, d’annoncer les décisions plus en amont, en conservant les mêmes principes. Ceux-ci sont exigeants, puisqu’ils supposent une analyse fonctionnelle de l’ensemble de nos dispositifs, ce qui prend beaucoup plus de temps.

Monsieur Pueyo, je suis très vigilant sur la question de la réinsertion. L’action de Défense Mobilité donne des résultats très significatifs. Vous m’interpellez sur le rôle du service militaire adapté. J’ai moi-même visité deux centres du SMA et j’ai été comme vous frappé des compétences réunies et de la qualité de la réinsertion. Ce dispositif relève du ministère des outre-mer. Vous souhaitez l’élargir : l’idée me paraît bonne.

S’agissant enfin du récent jugement de la Cour européenne des droits de l’homme, madame la présidente Adam, l’interdiction générale et absolue en droit français des associations de militaires à but de défense des intérêts professionnels a été jugée contraire à l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme de 1950. Ce même article dispose toutefois explicitement que des « restrictions légitimes » de leurs droits syndicaux notamment peuvent être imposées aux membres des forces armées… À la demande du Président de la République, nous avons demandé un rapport sur ce sujet à un conseiller d’État, M. Pêcheur. Ce rapport devrait nous être rendu avant la fin de l’année.

Sans anticiper sur ses conclusions, je peux dire que nous serons certainement amenés à infléchir notre dispositif de concertation. En tout cas, la syndicalisation des armées n’est pas à l’ordre du jour.

M. Guy Teissier, rapporteur pour avis pour la commission des affaires étrangères. Ouf !

M. Jacques Myard. Très bien !

M. Christophe Guilloteau. On revient de loin !

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. J’espère avoir répondu à toutes les questions posées.

M. le président Gilles Carrez. Avant que nous n’entendions les porte-parole des groupes, je me permets une première question.

Pour les ressources exceptionnelles, le plus simple n’est-il pas de passer par le Programme d’investissements d’avenir (PIA) ? Celui-ci pourrait devenir un compte d’affectation spéciale, ce qui lui permettrait de recevoir des recettes issues par exemple de cessions de participations ou de fréquences. Le PIA intervient notamment par le biais de dotations non consomptibles, c’est-à-dire de dotations dont le bénéficiaire ne peut utiliser que le produit financier. La technique budgétaire du PIA semble donc être une solution aux problèmes que vous exposez. Le plan B ne serait-il pas là ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Nous avons, en 2014, mobilisé le PIA à une hauteur très significative. On peut donc tout à fait réfléchir à la proposition que vous formulez.

Si j’ai souhaité obtenir le mandat du Président de la République pour tenter la société de projet, c’est parce que celle-ci me permet de mobiliser les cessions d’actifs. Je ne veux donc pas écarter cette hypothèse, qui présente d’autres avantages encore, notamment pour l’exportation. Le rapport Charpin penchait, lui, pour un PIA bis. Se poseraient toutefois deux problèmes qui ne sont pas simples : la nature des dépenses éligibles au PIA – on ne pourrait pas financer de frégates, par exemple – et celle des opérateurs.

L’essentiel, c’est d’arriver aux 31,4 milliards, dans des délais qui permettent de passer les commandes en temps utile – c’est ce que nous avons fait avec le PIA en 2014. Mais je veux tenter la société de projet : il n’y a pas de raison que cela n’aboutisse pas. Cela n’empêche nullement de disposer de plusieurs outils.

Mme Geneviève Gosselin-Fleury. Le budget de la mission « Défense » pour 2015 est conforme à la trajectoire prévue par la loi de programmation militaire : les ressources s’élèveront à 31,4 milliards d’euros, ce qui concrétise l’engagement du Gouvernement de maintien d’un effort militaire significatif dans un moment économique difficile.

Ce budget permettra la transition vers une armée plus efficace et mieux adaptée au contexte international. Les analyses du Livre blanc de 2013 ont été corroborées par les évolutions géopolitiques récentes, et l’engagement de nos forces sur plusieurs fronts confirme que nous devons maintenir nos moyens de défense à un très haut niveau de capacité et d’efficacité militaires. Ce projet de loi de finances prévoit ainsi une hausse des crédits d’entraînement des forces, et les ressources consacrées à l’entretien programmé des matériels progressent de 4,5 %. Ces mesures nous permettront d’atteindre dès 2016 les standards de l’OTAN en matière d’activité opérationnelle.

La défense française est résolument tournée vers l’avenir : une priorité forte est donnée à l’équipement des forces, mais aussi à la recherche et développement et à l’industrie. Une industrie forte est en effet la garante de notre souveraineté et de notre autonomie stratégique. Enfin, une place majeure est accordée à la connaissance et à l’anticipation, et en particulier à la cyberdéfense et au renseignement. L’année 2015 sera charnière puisque, conformément à l’article 6 de la LPM, il faudra actualiser la programmation.

Au nom du groupe socialiste, républicain et citoyen, j’apporte mon soutien à ce budget, construit dans un souci d’équilibre pour moderniser notre armée tout en respectant l’objectif de redressement des finances publiques.

M. Philippe Meunier. Au nom du groupe UMP, lors la discussion dans l’hémicycle de la loi de programmation militaire pour 2014-2019, je vous avais déjà mis en garde contre les dangers qui guettaient notre outil de défense, compte tenu des efforts supplémentaires que vous demandez à nos armées et du risque que lui fait courir l’instabilité des ressources exceptionnelles anticipées.

Nos craintes étaient fondées. Nous vous voyons sans cesse, monsieur le ministre, partir à la recherche de vos centaines de millions confisqués, voire perdus. Vous nous annoncez un montant de 250 millions de ressources exceptionnelles qui restent à mobiliser ; des financements interministériels devraient arriver ; des ventes de fréquences sont prévues mais non réalisées.

Conscient de ces difficultés, avec la volonté de Breton qui vous caractérise, vous tentez de les pallier en recourant à des solutions de financement innovantes avec la création d’une société de projet – tout en reconnaissant que de nombreuses questions techniques, industrielles, juridiques financières demeurent. Monsieur le ministre, il est inutile d’essayer de vous protéger derrière je ne sais quelle réflexion précédente : si réflexion il y a eu, ces solutions n’ont jamais été mises en œuvre, en raison de leurs effets délétères.

Je ne remets pas en cause votre volonté de tenir les engagements déjà insuffisants pris par le Gouvernement à l’égard de nos armées. Mais force est de constater que le compte n’y est pas. Cela est d’autant plus dommageable que nos armées sont engagées sur différents théâtres d’opérations, avec l’honneur, le courage et l’efficacité qui les caractérisent. Les réductions budgétaires qui leur sont imposées sont trop fortes, et trop d’incertitudes pèsent sur les recettes de votre budget.

Vous nous rétorquerez que vous n’avez pas d’autre choix. C’est faux : dans le même temps, le Gouvernement recrute 60 000 fonctionnaires supplémentaires pour le ministère de l’éducation nationale. Monsieur le ministre, alors que notre nation est menacée de dangers de plus en plus forts, alors que nos forces sont de plus en plus longuement engagées, nos armées méritent un autre budget. Vous comprendrez dès lors que le groupe UMP ne votera pas celui que vous nous présentez.

M. Philippe Folliot. Au nom du groupe UDI, je veux commencer par rendre hommage aux hommes et aux femmes qui consacrent toute leur énergie à la mission régalienne de défense.

Mais ce projet de budget suscite beaucoup d’interrogations, et de tous ordres.

Pour 2014, vous aviez prévu 1,15 milliard d’euros pour les OPEX ; le surcoût sera de 700 millions environ, dont la défense supportera 20 %. Comment seront-ils financés ?

Nous nous interrogeons aussi sur la baisse des effectifs, qui représente 60 % des suppressions de postes dans la fonction publique d’État. Le choix de l’échenillage suscite aussi des questions : l’efficacité opérationnelle sera-t-elle maintenue ?

Nous nous interrogeons encore sur les recettes exceptionnelles : ce projet de budget n’est finalement pas conforme à la LPM, et notamment à son article 3. Nous savons combien il est difficile de toucher effectivement les recettes exceptionnelles. Je ne reviens pas sur ce qui a été dit sur les cessions immobilières, les ventes de fréquences, ni sur les exportations de Rafale.

Quant à votre société de projet, elle nous laisse très dubitatifs.

Au vu de tous ces éléments, vous comprendrez, monsieur le ministre, que le groupe UDI ne pourra pas voter ce budget.

M. François de Rugy. Monsieur le ministre, lorsque nous avons reçu le général Henri Bentégeat, il nous a dit avoir, en tant que chef d’état-major des armées, passé son temps « à taper sur l’édredon pour le faire rentrer dans la valise ». Au nom du groupe écologiste, je salue vos efforts pour l’y faire à votre tour rentrer… Je vous remercie aussi de toutes les réponses précises que vous avez déjà apportées aux rapporteurs.

La France a du mal, reconnaissons-le, à satisfaire aux besoins les plus urgents de son armée, et donc à rester cohérente avec l’ambition de sa diplomatie. Nous encourons le risque de voir grandir l’écart entre des capacités de pointe, très coûteuses mais peu utilisées, et des forces du quotidien suremployées : nous aurions ainsi une armée à deux vitesses. Pour utiliser une image réductrice mais parlante, on pourrait dire que nous aurions la bombe et le gendarme…

Nous sommes, vous le savez, en désaccord sur la question du nucléaire militaire : le groupe écologiste considère très concrètement la dissuasion nucléaire comme chère et inopérante, alors que vous la qualifiez d’assurance-vie. Par-delà cette opposition « culturelle », la donne est en train de changer puisqu’un nombre croissant de généraux redoutent qu’une sanctuarisation des budgets alloués au nucléaire n’entraîne la dégradation de nos forces conventionnelles. Ce budget confirme ces craintes : la dissuasion représentera 33 % de nos crédits d’équipements, en augmentation de onze points par rapport à l’année dernière.

C’est avec un esprit critique, mais constructif, que le groupe écologiste aborde la discussion de cette mission. Nous vous présenterons des propositions concrètes de réorientation.

M. le président Gilles Carrez. Nous n’avons aucun orateur inscrit comme porte-parole des groupes GDR et RRDP.

Mme Marie Récalde. Monsieur le ministre, vous avez annoncé l’acquisition, en 2015, d’un troisième drone Reaper. Votre arrivée au ministère de la défense a d’ailleurs permis de relancer ce dossier majeur, dans lequel vous vous investissez personnellement. Quel est à votre sens l’apport tactique et opérationnel de ces matériels ? Quels sont les motifs pour lesquels vous choisissez de poursuivre leur acquisition ?

M. Jean-François Lamour. La mécanique budgétaire que vous nous présentez, monsieur le ministre, est d’une rare complexité – reports de charge, recettes exceptionnelles, PIA…

Vous avez évoqué l’exécution du budget 2014. Malheureusement, comme l’a remarqué la Cour des comptes dans son rapport sur l’exécution du budget pour 2013, publié en mai 2014, 400 millions issus du PIA ont servi à financer les salaires du CEA pour 2013 ! Je crois savoir que 200 millions ont été versés pour rembourser cette avance ; mais l’autre moitié a-t-elle également été versée, et le PIA va-t-il effectivement abonder les ressources exceptionnelles comme c’était prévu ?

Quant aux sociétés de projet, pouvez-vous nous confirmer qu’elles ne compteront aucun investisseur étranger ? Sinon, qui seront-ils, et dans quelles conditions pourront-ils être admis ? Ces sociétés de projet pourront faire appel à l’emprunt : allez-vous ainsi laisser filer notre déficit ?

Enfin, vous aviez expliqué devant la commission des finances que les forces prépositionnées étaient plus opérationnelles. Y a-t-il aujourd’hui un transfert de charges entre les OPEX et ces forces prépositionnées ? Le cadre budgétaire des unes et des autres est bien différent : que doit supporter exactement le budget du ministère de la défense ?

M. Philippe Nauche. Je me félicite, comme beaucoup de mes collègues, de la conformité de ce projet de budget pour 2015 avec les objectifs fixés par la loi de programmation militaire. Cela traduit la volonté du chef de l’État, chef des armées, de sanctuariser les moyens alloués à notre défense nationale. Nous essayons aussi de remédier aux manquements du précédent quinquennat en matière de pilotage des ressources humaines, et la réforme que vous engagez permettra une meilleure gestion tant des effectifs que de la masse salariale.

Il demeure néanmoins des scories du « désastre Louvois », pour reprendre votre formule. Ce logiciel avait été mis en place à marche forcée à partir de 2011, au moment même où les personnels en charge de la gestion de la solde des militaires étaient invités à prendre la porte, sous l’effet de la RGPP. Cela a causé aux militaires et à leurs familles de grands désagréments, comme chacun le sait ici. Vous avez décidé d’abandonner Louvois, mais le système de remplacement ne pourra être déployé avant le mois de décembre 2015, et ne sera complètement opérationnel qu’en 2017. Pendant ce temps, des problèmes continueront de survenir. Combien ont coûté les dysfonctionnements de Louvois en 2014 ? Quels crédits devront être prévus pour 2015 ? Peut-on d’ores et déjà évaluer le coût total de ces dysfonctionnements depuis 2011 ?

Par ailleurs, vous avez lancé au début de l’année 2014 le « Pacte Défense Cyber 2016 », avec trois priorités : la recherche, la formation et les entreprises. Sur le plan industriel et opérationnel, où en est-on ?

M. Pierre Lellouche. Monsieur le ministre, vous savez l’estime que je vous porte, et nul ne doute du respect que je porte à nos armées.

Mais le monde n’a jamais été aussi dangereux : les Russes ont augmenté leur budget de défense de 30 %, les Algériens de 15 % ; les Chinois l’augmentent de 15 % par an depuis plusieurs années ; les Américains augmentent à nouveau leurs dépenses. Nous, en revanche, nous sommes en disette budgétaire, et les Européens en plein désarmement collectif…

Votre budget essaye de le masquer. Mais, sur 31,4 milliards, il y a 2,1 milliards de recettes exceptionnelles, 3,5 milliards de reports de charges, 1,2 milliard de surcoût des OPEX. Au total, 23 % de l’annuité, et 80 % du budget d’équipement, sont fictifs.

Pour le cacher, vous avez inventé un outil extraordinaire, un OVNI juridique : la société de projet. On avait les portiques d’Écomouv’, on avait les concessions d’autoroutes, mais ça, c’est vraiment formidable ! Pour mettre en œuvre cette invention, il vous faudra de toute façon une loi : vous donnez la propriété d’armes – le cœur du régalien – à on ne sait trop quelle entreprise privée. Vous rencontrerez des problèmes de propriété, mais aussi d’assurance – le matériel de guerre étant fait pour être utilisé, il peut être détruit – et d’affectation. Tout cela me paraît surréaliste. Écoutez le président de la commission des finances, qui vous veut du bien : revenez aux investissements d’avenir.

Non, le compte n’y est pas. Et vous ne pouvez pas dire que vous allez faire avec : votre boulot, c’est de présenter à la nation des comptes sincères. Vous êtes en déroute et vous tentez de le dissimuler. Je suis triste de voir ce désarmement budgétaire, alors que jamais la France n’a couru de si grands dangers.

M. le président Gilles Carrez. Nous allons tous essayer d’aider le ministre à utiliser les outils les plus fiables.

M. Pierre Lellouche. Ce sont des choix généraux, monsieur le président : il faut trouver ailleurs des milliards, ce que le Gouvernement refuse de faire !

M. Guy Delcourt. Monsieur le ministre, en février 2013, la Cour des comptes a émis différentes recommandations sur la gestion des hôpitaux militaires. Quelles sont les perspectives de rapprochement entre les hôpitaux d’instruction des armées et les centres hospitaliers universitaires (CHU) ? Où en est le programme d’échange entre hôpitaux civils et militaires ?

Je prends acte du projet de fermeture du Val-de-Grâce. L’histoire de cet établissement nous oblige à témoigner notre grande reconnaissance à tous ceux qui ont fait de ce centre hospitalier militaire un des fleurons de la médecine – dont bon nombre de personnalités civiles ont d’ailleurs bénéficié.

M. Jacques Myard. Monsieur le ministre, lors du dernier sommet de l’OTAN, les États, et la France en particulier, se sont engagés à dépenser 2 % de leur PIB pour leur défense. Souscrire un tel engagement alors que nous n’en sommes qu’à 1,5 %, c’est un peu fort de café !

Nous jouons avec le feu et nous allons le payer cher, car la situation internationale se dégrade. Vous connaissez ma position : la purge budgétaire maastrichtienne nous conduit à la récession et à la déflation ; nous allons dans le mur, et il est urgent de changer de politique macroéconomique.

Je souhaite vous interroger sur nos capacités dans le domaine des satellites. Il est impératif d’avoir nos yeux et nos oreilles nationaux. Souvenez-vous des paroles du poète : « jamais de confiance dans l’alliance avec un puissant » ! Avec les Américains, cette formule est plus que jamais d’actualité. Or nous risquons un trou noir entre les satellites en fin de vie et le programme CERES (capacité de renseignement électromagnétique spatiale) : cela va-t-il se produire ?

D’autre part, un drone vient semble-t-il de s’écraser à Niamey. Est-ce exact ? L’un des drones français est-il allé au tapis ?

Enfin, pour ce qui est de la CEDH, soyons clairs : il n’appartient pas aux juges d’assurer la défense de la France ! Il faudra bien un jour tirer les conséquences de nos erreurs diplomatiques et nous poser la question de la CEDH – ce que font déjà de nombreux juristes. Un jour, nous ferons comme les Anglais : nous dénoncerons le protocole additionnel !

M. Daniel Boisserie. Monsieur le ministre, je note avec satisfaction que c’est vous qui avez engagé le plan de réhabilitation des espaces de vie du personnel de nos armées ; ce plan se poursuivra en 2015. Le projet de loi de finances permet la poursuite des grands projets lancés par la précédente loi de programmation, ainsi que la création ou l’adaptation des infrastructures d’accueil des nouveaux matériels, et les indispensables rénovations du patrimoine immobilier.

Il subsiste aujourd’hui environ 600 points sensibles. En visite récemment dans un groupement de gendarmerie, j’ai pu y constater l’état pitoyable du patrimoine immobilier : certains logements n’ont même pas de chauffage ! Cela me conduit à une réflexion plus globale sur nos schémas directeurs immobiliers. La massification des marchés a son intérêt pour des fournitures de bureau ou pour l’habillement, mais beaucoup moins pour la maintenance, du chauffage par exemple. Certaines entreprises finissent par être en situation de quasi-monopole et ne font pas toujours bien leur travail : il y a là quelque chose à faire.

Pouvez-vous par ailleurs nous préciser le coût d’entretien du projet Balard, comparé à celui cumulé des emprises actuelles ?

Enfin, nous assistons aujourd’hui à une prolifération anarchique de petits drones, qui peuvent se révéler très dangereux pour notre sécurité – pour nos installations nucléaires, par exemple. Quelle analyse faites-vous de cette situation ?

M. Olivier Audibert Troin. Monsieur le ministre, nous souhaitons tous vous aider à maintenir un effort de défense conséquent, dans une période très troublée. Mais, au moment de voter le budget pour 2015, il nous faut des éléments clairs et précis, notamment sur les recettes. Il manquera, nous le savons déjà, 2 milliards de recettes exceptionnelles. Ce n’est pas une surprise. Vous nous proposez donc de créer des sociétés de projet, et vous parlez de transparence.

La transparence, c’est maintenant : quels types de matériels seront acquis par des sociétés de projet ? Le directeur général de l’armement a indiqué qu’il s’agirait de matériels non létaux, mais, en matière militaire, tout est létal, à part les véhicules non armés ! Vous évoquez des cessions de participations dans des entreprises publiques, qui abonderont ces sociétés de projet : à quelles entreprises pensez-vous ? Vous espérez que ce montage soit opérationnel avant le mois de juin 2015. Ce délai ne nous paraît pas réaliste : des livraisons de matériels seront-elles mises en péril s’il n’était pas tenu ?

Au moment de voter le budget, nous attendons vos réponses à ces questions : il n’est pas possible de faire un chèque en blanc.

Mme Catherine Coutelle. Ma question porte sur le programme 212. En 2015, une nouvelle architecture du titre II a pour objet un pilotage renforcé des effectifs et une maîtrise de la masse salariale. Cette réorganisation des crédits ne sera pas sans conséquence sur la politique des ressources humaines. Dans un contexte de fort renouvellement du personnel et de baisse des effectifs, conforme à la LPM, nous devons nous montrer attentifs aux politiques des ressources humaines visant à renforcer non seulement la formation – c’est l’objet de la mission d’information sur la formation des militaires conduite par Jean-Michel Villaumé et Francis Hillmeyer, dont je fais partie – mais aussi l’accompagnement et l’aide à la reconversion. Comment, en 2015, faciliter la reconversion des personnels militaires et civils quittant l’armée ? Quels sont les financements des dispositifs accompagnant cette reconversion ?

La question de la formation continue est cruciale pour maintenir le niveau d’excellence de nos armées et la reconversion qui valorise au mieux les compétences acquises.

Monsieur le ministre, vous avez reçu mardi dernier le rapport de l’Observatoire de la parité hommes-femmes de la défense portant sur la mobilisation de la culture de la parité dans nos armées. Vous avez également reçu le premier rapport, lié à la loi Sauvadet, de situation comparée pour les personnels civils. L’avez-vous reçu pour les personnels militaires ? C’est un outil indispensable de pilotage de l’égalité entre les femmes et les hommes au sein des armées comme dans toutes les autres grandes administrations de l’État. Quelle suite lui donnerez-vous ?

Vous avez enfin reçu le bilan de la mission sur la lutte contre le harcèlement sexuel dans nos armées, sujet sur lequel vous avez réagi très rapidement au mois de mai.

M. Philippe Vitel. Un budget de la défense, c’est comme une danse à trois temps : au temps de la programmation sur six ans, puis trois ans, succède le temps du projet annuel de la loi de finances puis celui de l’exécution. Le dernier trimestre est toujours très sensible puisqu’il conditionne la réalité de l’exécution d’une année et préfigure celle de l’année suivante.

L’année 2013 s’est terminée sur un report de charges de 3,4 milliards d’euros sur la mission Défense, dont 2,4 milliards sur le seul programme 146, ce qui représentait plus de 20 % de ce programme. Vous venez de nous informer que le report des charges à la fin de 2014 se situera à un niveau quasi similaire, nous donnant le sentiment de banaliser ce comportement qui peut être assimilé à de la cavalerie.

Envisagez-vous de vous efforcer de réduire, à l’avenir, ces reports de charges qui ne sont pas sans poser de problèmes à nos industriels, quelle que soit la taille de leur entreprise ?

Fin 2013, nous avions également subi une annulation de 650 millions d’euros, adoucie par la perspective d’en récupérer une part importante, de l’ordre de 500 millions en recettes exceptionnelles sur l’année 2014. Pouvez-vous confirmer que ces 500 millions ont bien été récupérés dans leur totalité ?

Des gels ou des annulations sont-ils envisagés d’ici au 31 décembre 2014 ?

Enfin, pouvez-vous nous garantir que Bercy donnera l’autorisation, avant le 31 décembre, d’utiliser l’intégralité du 1,4 milliard de réserves budgétaires que la LOLF oblige chaque année de constituer à hauteur de 6 % des crédits hors rémunération ?

Mme Émilienne Poumirol. Je tiens tout d’abord à souligner l’excellence de notre service de soins de santé des armées (SSA), en particulier sur l’opérationnel : nous sommes les seuls à avoir un personnel médical qui soit situé au plus près des combattants, ce qui est un gage de qualité et de survie pour nos soldats.

Le projet « SSA 2020 », fondé sur un retour d’expérience de dix ans, s’inscrit dans le cadre d’une évolution majeure de notre système de défense caractérisée par une forte contrainte financière. Pour relever ce défi, le SSA doit s’appuyer sur un dispositif réactif et performant à la fois centré sur l’opérationnel et ouvert sur son environnement et ses partenaires avec, pour principe, la concentration sur la mission associée à une densification des moyens. Il nous apparaît nécessaire d’accroître la contribution de la réserve opérationnelle, ce qui pose la question de la formation, mais également de la sensibilisation des médecins civils aux spécificités de la population militaire.

Le projet « SSA 2020 » réaffirme la nécessité d’aider les populations civiles : pourriez-vous nous donner des précisions sur le dispositif mis en place à Macenta en République de Guinée pour lutter contre la propagation du virus Ebola ? Je rappelle que des réservistes ont été appelés pour relever le personnel du centre de traitement Ebola (CTE).

La question de l’ouverture du SSA au service public de santé a été soulevée par M. Delcourt : quel lien le SSA doit-il entretenir avec les agences régionales de santé et les hôpitaux civils dans les territoires ?

Il nous paraît enfin nécessaire d’accentuer le caractère interarmées du SSA.

M. Patrice Martin-Lalande. Monsieur le ministre, dans le cadre de la réforme du service interarmées des munitions, vous avez annoncé le 15 octobre dernier la programmation de la fermeture du site de Salbris pour 2017-2018. La suppression de 123 emplois et la stérilisation d’un site industriel de 369 hectares sont une catastrophe pour une commune de 6 000 habitants qui a perdu en deux décennies la quasi-totalité de ses 2 000 emplois de défense, comme le souligne le maire de Salbris, M. Olivier Pavy.

Ce site, qui fait partie des gros dépôts de munitions, emploie plus de trente-deux militaires et quatre-vingt-onze personnels civils de la défense, sans compter les trois salariés d’une entreprise prestataire assurant le service de la restauration.

Quelles sont les raisons qui ont motivé votre décision ?

Quel avenir sera proposé aux quatre-vingt-onze personnels civils et de quelles mesures d’accompagnement bénéficieront-ils ?

De quelle réutilisation ce site classé peut-il fait l’objet ? Quelle dépollution pyrotechnique sera réalisée par l’État pour permettre sa réutilisation, et avec quel soutien financier de l’État, s’agissant notamment du retrait des installations ferroviaires ?

Enfin, quelle compensation l’État prévoit-il de garantir au bassin d’emploi de Salbris, qui a déjà payé un lourd tribut à la restructuration des industries de la défense avec la disparition, je le répète, de plus de 2000 emplois ces dernières années ?

À proximité de Salbris, l’État a heureusement renforcé depuis plusieurs années les missions et donc la place de la base aérienne 273 de Prunay-en-Sologne dans notre système de défense. Pouvez-vous confirmer la stabilisation de l’avenir de cet établissement ? Ce site pourra-t-il accueillir les personnels de Salbris perdant leur emploi, comme le maire de cette ville et moi-même le demandons ?

M. Alain Chrétien. Est-il possible de tirer un premier bilan des contrats de redynamisation de sites de défense (CRSD), régulièrement mis en place après la vague de fermetures ou de restructurations de sites engagée dans les années 2012-2013 ? De quels types et de quelle ampleur sont les mesures compensatoires ?

M. Frédéric Lefebvre. Vous me permettrez tout d’abord, alors que la démocratie canadienne a été attaquée en son cœur, le Parlement, d’exprimer ma solidarité, notamment avec nos compatriotes qui sont très nombreux à travailler sur la colline parlementaire – ils sont des dizaines dans l’administration canadienne.

Monsieur le ministre, connaissant à la fois le soin que vous apportez à défendre les crédits et les investissements de nos armées et le chemin qui vous est imposé par le ministère des finances, je tiens à insister sur la difficulté qu’il y aura à concilier la multiplication des OPEX et le respect de la LPM. Il est nécessaire d’assurer la lisibilité financière en la matière. Je tiens à rappeler les propos du chef d’état-major des armées : « Le costume est taillé au plus juste. Les marges de manœuvre sont inexistantes. Avec la révision générale des politiques publiques puis la modernisation de l’action publique, toutes les pistes d’optimisation ont été explorées et mises en œuvre. »

Nous avons un contrat moral à l’égard des hommes et des femmes qui risquent leur vie au nom de la France. Vous aviez bien voulu accepter mon amendement à la LPM visant l’organisation d’un débat sur l’exécution de celle-ci en dehors de l’examen du projet de loi de finances. Nous devons en effet nous assurer que la LPM peut être exécutée.

C’est la raison pour laquelle je vous propose, dans un délai de six mois, l’organisation d’un tel débat, sous la présidence du président de la commission des finances et de la présidente de la commission de la défense. Dans cette perspective, il conviendrait que notamment les rapporteurs Jean Launay, François Cornut-Gentille et Jean-Jacques Bridey travaillent sur les solutions qui ont été évoquées ce matin, à seule fin de nous rassurer sur l’exécution de la PLM. Il s’agit pour nous de vous aider à résister à la pression du ministère des finances.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous donner votre engagement sur ce point ?

M. François de Rugy. Une légère baisse de la masse salariale apparaît dans le PLF, qui correspond aux réductions des effectifs – tel n’avait pas toujours été le cas ces dernières années. Un arbitrage semble toutefois avoir été rendu pour reporter les réductions du nombre d’officiers et de sous-officiers prévues dans la LPM ; l’objectif visant à réduire le taux d’encadrement de 16,75 % à 16 % des effectifs globaux était pourtant bien modeste. Je rappelle que l’armée de terre compte 170 généraux pour quinze brigades.

Quelles mesures envisagez-vous de prendre pour rendre homothétiques les réductions des effectifs d’officiers et de sous-officiers aux réductions d’effectifs globaux ? Je tiens à saluer les efforts très importants fournis par nos armées pour réduire leurs effectifs : ils sont sans commune mesure avec ceux fournis par les autres administrations de l’État ou d’autres services publics. Ils correspondent au reformatage des armées engagé sous la précédente majorité.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Madame Récalde, nos drones fonctionnent très bien. La différence entre le Harfang et le Reaper est considérable. Nous avons fait le bon choix, si l’on en croit les utilisateurs et le centre de planification et de conduite des opérations (CPCO). Nos drones nous permettent de mener des opérations significatives dans le cadre de la mission Barkhane.

Nous n’avons perdu aucun drone, monsieur Myard. Le troisième s’ajoutera aux deux existants.

Les drones d’observation permettent d’accélérer le raccourcissement de l’action et du renseignement.

Il ne reste plus qu’à souhaiter la construction d’une nouvelle génération de drones européens et français : je regrette que nous ayons manqué ce rendez-vous.

Messieurs Lamour, Audibert Troin et Lellouche, j’attends tout d’abord les recettes des enchères de cession des fréquences 700 mégahertz, qui devront être affectées à la défense avant décembre 2015 pour me permettre d’engager des achats d’armement. Si tel n’était pas le cas et pour parer à toute éventualité, j’ai engagé un plan B qui répond scrupuleusement à la LPM : celle-ci prévoit que le produit des cessions d’actifs ne pourra être mobilisé que dans des investissements en capital. Donc, loin d’être une usine à gaz, la société de projet traduit une application stricte des textes. C’est pourquoi j’ai demandé au Président de la République son accord pour travailler à cette hypothèse. C’est dans ce cadre que les cessions d’actifs serviront au financement de la LPM – mesure à laquelle vous étiez favorables.

L’État, quant à lui, peut investir en capital soit seul soit aux côtés d’industriels : la question n’est pas encore tranchée. La réponse, qui sera publique, ne sera pas prise sans vous.

Enfin, je ne suis pas opposé à la mobilisation des programmes d’investissement d’avenir, à partir du moment où les contraintes en matière d’opérateurs et de types de programmes seront respectées.

Les décisions en la matière, je tiens vous à le confirmer, seront prises en toute transparence. C’est notre intérêt commun. C’est pourquoi, monsieur Lefebvre, je suis favorable à votre proposition : préparons en amont les différents scénarios possibles. Les enjeux de défense doivent être partagés. Et j’ai trouvé auprès des sénateurs la même volonté de travailler en commun, monsieur Vitel.

Des expériences similaires ont été menées à l’étranger : certaines ont été performantes, d’autres l’ont moins été. Pourquoi nous priver des dispositifs dont les Américains se sont dotés pour favoriser leurs exportations ?

Mon obsession demeure les 31,4 milliards d’euros.

M. Jean-François Lamour. Une partie du PIA 2014 a servi à financer les salaires du CEA pour 2013. C’est de la cavalerie. Une première tranche de 200 millions a été remboursée : la seconde l’a-t-elle été ?

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Rubis sur l’ongle.

Les installations prépositionnées ont toujours fait partie intégrante du budget de la défense et non de celui des OPEX, du fait qu’elles assurent une fonction de base du ministère de la défense. Lorsque la mission Licorne a achevé ses missions extérieures, j’ai estimé nécessaire la présence d’une base de soutien à Abidjan, pour soutenir l’opération Barkhane. Il s’agit d’une force prépositionnée, à l’exemple de celles de Dakar et de Libreville. En raison de la situation militaire, nous avons diminué celle de Libreville pour renforcer celle d’Abidjan.

Monsieur Nauche, Louvois coûtera 150 millions d’euros en 2014 et en coûtera probablement autant en 2015. Disons-le : c’est épouvantable. J’ai décidé de donner aux chefs de corps les moyens financiers de remédier aux délires de Louvois entraînant des insuffisances de soldes. Ce dispositif, qui a permis d’éviter un scandale d’État, se traduit par des dépenses qui devraient pouvoir être recouvertes lorsque Louvois aura été remplacé. Il n’est pas certain en revanche que nous recouvrions tous les trop-perçus que certains militaires doivent progressivement rembourser, en raison notamment des départs.

Je n’ai pas voulu polémiquer sur le sujet. En effet, si, comme vous l’avez souligné, monsieur Nauche, le dispositif Louvois a été trop rapidement mis en œuvre, il est en revanche très difficile et savoir réellement qui a fait quoi et de dégager avec précision les responsabilités. La gestion du dispositif était contraire aux grands principes de la défense : un chef, une mission, des moyens. C’est la raison pour laquelle j’ai remis de l’ordre, y compris dans le titre II : il n’y a plus qu’une seule masse salariale, un seul patron. Chaque armée ne peut plus créer ses postes comme elle l’entend, car cette pratique entraînait une augmentation de la masse salariale en dépit de la diminution du nombre des postes.

Le plan de cyberdéfense a été lancé en février 2014 à l’école des transmissions de Rennes : il est doté d’1 milliard d’euros sur l’ensemble de la LPM, qu’il s’agisse du secteur industriel, de la recherche, du recrutement ou du réseau réserve citoyenne « cyber », initiative très originale qui connaît un grand succès. Cette réserve permet en effet de mobiliser les compétences nécessaires. La DGA Maîtrise de l’information, située à Bruz, est dotée du nouvel équipement. La LPM prévoit de recruter 400 personnels de haut niveau – c’est une de mes priorités. Les recrutements ont d’ores et déjà débuté. Nous devons être les premiers dans ce domaine – nous le sommes déjà en Europe. Cette urgence, que nous avons prise à bras-le-corps, sera un des pôles d’excellence de nos forces à la fin de la LPM.

Monsieur Myard, que les choses soient claires : à Newport, les États membres de l’OTAN se sont engagés à consacrer 2 % de leur PNB à la défense à l’échéance de dix ans : nous en sommes aujourd’hui, je vous l’assure, à 1,89 %. J’estime que, dans dix ans, nous serons passés à 2 %, d’autant que la LPM prévoit en 2016 une augmentation de 500 millions du budget de la défense.

Madame Poumirol et monsieur Delcourt, si nous révérons tous le Val-de-Grâce, il faut savoir qu’il était nécessaire d’y faire deux tranches de travaux de 260 millions d’euros pour le remettre aux normes. Or le besoin militaire en matière de santé est essentiellement assuré par les hôpitaux d’instruction des armées de Bégin et de Percy, qui répondent aux normes et où se trouvent les compétences d’excellence, alors que le Val-de-Grâce ne répond à aucun besoin militaire avéré. De plus, l’offre civile de soin publique et privée dans le quartier et alentour est suffisante. Ce n’est pas parce que des personnalités françaises et étrangères, parfois après être passées par Bégin ou Percy, viennent se faire soigner au Val-de-Grâce ou s’y reposer, qu’il convient de consacrer 500 millions d’euros de travaux à la rénovation de cet établissement. Il fallait prendre une décision douloureuse mais conforme à la bonne gestion des comptes publics : je l’ai prise. Toutefois, afin de préserver la référence défense, il sera créé au Val-de-Grâce un pôle de recherche et un pôle majeur de formation du SSA. Le sort du reste des bâtiments sera négocié avec des partenaires tels que la mairie de Paris. La fermeture du Val-de-Grâce sera progressive.

Les huit autres hôpitaux du SSA seront maintenus pour assurer deux fonctions différentes. La vocation opérationnelle des plateformes hospitalières militaires constituées, pour l’Île-de-France, par Bégin et Percy, et, pour le Midi, par Lavéran et Saint-Anne, sera prioritaire, voire exclusive, avec une capacité de projection à l’extérieur. Quant aux hôpitaux militaires de Metz, Brest, Bordeaux et Lyon, outre qu’ils compléteront les besoins opérationnels des plateformes hospitalières, ils signeront un partenariat avec les hôpitaux publics ou privés de leur territoire ; c’est ce qui s’est fait à Bordeaux, où cela fonctionne très bien. Les discussions sont engagées. Elles se révèlent fructueuses. L’objectif du projet « SSA 2020 » est de garantir la performance opérationnelle.

La défense participe par ailleurs au plan d’action mis en œuvre par le Gouvernement pour lutter contre la propagation du virus Ébola. L’action à mener dans les trois pays les plus concernés – Sierra Leone, Liberia et République de Guinée – a été répartie entre les États-Unis, le Royaume-Uni et la France. Le ministère de la défense assure sur le territoire national l’accueil de malades avérés ou potentiels – c’est ce qu’il a fait à Bégin avec bonheur –, procède aux évacuations, participe à la mise en œuvre et au soutien du centre de traitement Ébola de Macenta en Guinée forestière et armera un centre de formation et de soins des soignants, qui sera probablement installé à Conakry.

Monsieur Myard, il n’y aura aucun trou en matière de renseignement satellitaire, puisque le PLF pour 2015 prévoit le lancement du programme de détection électromagnétique CERES, de compétence française : alors que nous ne disposons pour l’instant que des quatre microsatellites du projet ELISA, trois satellites seront mis en service en 2020. Nous n’aurons plus besoin d’aller chercher des informations ailleurs.

Monsieur Boisserie, le loyer annuel pour Balard s’élèvera à 154 millions d’euros pour un investissement de 3,5 milliards d’euros. Ce loyer comprendra l’ensemble des dépenses liées à la redevance immobilière, aux services et à l’énergie. Ce lieu unique permettra de regrouper les compétences et de réduire les personnels affectés. Le déménagement devrait normalement avoir lieu courant juin 2015.

Madame Coutelle, j’ai mis en œuvre une feuille de route relative à la parité et à l’égalité hommes-femmes. L’armée française est la plus féminisée d’Europe. Il convient d’assurer l’égalité entre les hommes et les femmes à l’intérieur de chaque armée, qu’il s’agisse de l’accès aux grades ou du déroulement de carrière. L’Observatoire de la parité hommes-femmes de la défense, que j’ai mis en place, s’est réuni avant-hier sous ma présidence. Nous assistons à l’émergence d’une véritable culture de l’égalité.

J’ai également mis en place la cellule Thémis, qui est une cellule d’appels, de veille et de prévention des violences faites aux femmes, que j’ai visitée au mois de décembre dernier : elle donne des résultats. Je veux que le ministère de la défense soit exemplaire en la matière. Je suis frappé de la détermination des chefs d’état-major et de l’encadrement à mettre en œuvre cette feuille de route.

Monsieur Vitel, le report de charges est une de mes préoccupations majeures. Il passera probablement de 3,4 milliards en 2013 à 3,1 en 2014, si je suis suivi – je donne ce chiffre avant l’arbitrage de fin de gestion. Lorsque je suis entré à la Commission de la défense de l’Assemblée nationale, en 1978, cette bosse existait déjà… Je vous confirme par ailleurs que 250 millions ont déjà été versés et que les 250 millions restants le seront dans le cadre de la loi de finances rectificative.

Je vous remercie de votre soutien dans les négociations de fin de gestion.

Monsieur de Rugy, s’agissant du dépyramidage, la défense est au rendez-vous : nous sommes bien passés de 16,75 % à 16 % d’encadrement. La règle ne peut pas être d’application stricte, du fait que le pourcentage d’officiers est différent selon les armées. Aussi les situations doivent-elles être appréhendées de manière très précise. La DGA et le SSA ont besoin d’un nombre d’officiers bien supérieur à celui de l’armée de terre. Il convient de conserver les compétences. Si, en 2014, il n’y a eu que 850 suppressions au lieu des 1 000 prévus dans la LPM, ce fut en raison de la mise en place des outils d’aides au départ : il faut savoir que le dégagement n’est pas autoritaire mais repose sur le volontariat. Et il faut faire en sorte que ce ne soient pas seulement les meilleurs qui partent…

Monsieur Martin-Lalande, l’avenir de la base aérienne 273 de Prunay-en-Sologne, qui profite de regroupements, ne doit vous donner aucun sujet d’inquiétude. La fermeture du site de Salbris, quant à elle, répond à notre volonté de concentrer les sites de services en conformité avec le plan de stationnement des forces. Le dépôt de munitions devrait être dissous dans les années 2017 et 2018. Les personnels qui ne seront pas partis à la retraite d’ici là bénéficieront des dispositifs d’accompagnement prévus. Chacun doit savoir que l’accompagnement social est très sérieux : il y a les aides à la mobilité géographique, qui vont de 1 300 à 32 000 euros, les indemnités volontaires de départ, qui peuvent atteindre quelque 100 000 euros, les aides pour l’acquisition d’un nouveau logement ou le maintien de la rémunération garanti sur sept ans avec une indemnité complémentaire d’accompagnement lorsque le déplacement conduit à occuper un emploi nettement moins bien rémunéré que le précédent. Les personnels de Salbris profiteront de cet arsenal de mesures très performant, que les organisations syndicales nous demandent de maintenir et d’améliorer encore. Pour avoir été maire d’une ville qui a connu la suppression de 4 000 emplois de la défense, je connais les difficultés et les souffrances qu’une restructuration entraîne. C’est pourquoi la parcimonie et la vigilance président à mes choix.

Monsieur Chrétien, depuis que je suis ministre, quatre CRSD ont été engagés à la suite des mesures que j’ai annoncées en 2013 pour 2014 : ils concernent Luxeuil, Châteaudun, Varennes-sur-Allier et Orange. Mais le CRSD pour Orange est désormais caduc puisque, comme vous le savez, le transfert de la formation des commandos de l’air de Dijon à Orange compense le départ du 1er régiment étranger de cavalerie pour Carpiagne.

Les comités de site ont été mis en place. Je n’ai pas avec moi le déroulé des mobilisations financières engagées ; sachez seulement que, dans le cadre de la LPM, 150 millions d’euros peuvent être mobilisés au profit des CRSD.

M. le président Gilles Carrez. Je tiens à vous assurer, monsieur le ministre, du soutien des différentes commissions.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense. Je l’ai senti ainsi, monsieur le président.

M. le président Gilles Carrez. Je vous remercie, monsieur le ministre.

La réunion de la commission élargie s’achève à douze heures vingt.

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