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Edition J.O. - débats de la séance

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Première séance du mardi 19 mars 2013

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Christophe Sirugue

1. Questions orales sans débat

Réalisation du contournement routier d’Évreux

M. Jean-Louis Destans

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Modernisation du réseau ferroviaire en Basse-Normandie

Mme Nicole Ameline

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Aménagement de la RN 31

Mme Catherine Vautrin

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Interdiction du transit de matières dangereuses par la gare de triage de Woippy

M. Gérard Terrier

Présidence de Mme Catherine Vautrin

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Modernisation de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse

M. Nicolas Sansu

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Desserte du Haut-Doubs par des lignes à grande vitesse

Mme Annie Genevard

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Développement du fret ferroviaire dans le nord de la Dordogne

Mme Colette Langlade

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Création d’un centre de développement chorégraphique à Uzès

M. Christophe Cavard

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

Réforme des maisons départementales des personnes handicapées

Mme Françoise Guégot

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Mise en œuvre du projet de refondation de l’école

M. Stéphane Saint-André

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Financement des travaux de prévention des risques technologiques

Mme Laurence Dumont

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques

Mme Marie-Odile Bouillé

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie

Accès aux emplois d’avenir dans les zones rurales

Mme Dominique Chauvel

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social

Adaptation des dispositifs de gestion des risques d’inondation en Île-de-France

M. Arnaud Richard

M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville

M. Arnaud Richard

Suspension et reprise de la séance

Financement des grands équipements sportifs

M. Gérald Darmanin

M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville

M. Gérald Darmanin

Hausse du taux de TVA applicable à la collecte et au traitement des déchets

M. Thierry Lazaro

M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation

M. Thierry Lazaro

Mesures de lutte contre la désertification médicale

M. Jean-Michel Villaumé

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Conséquences de la suppression du forfait annuel pour les bénéficiaires de l’aide médicale d’État.

M. Julien Aubert

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

M. Julien Aubert

Lutte contre l’exclusion menée par les centres communaux d’action sociale

M. Alain Marleix

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Classement de Maubeuge en zone de sécurité prioritaire

M. Rémi Pauvros

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur

Avenir de la sous-préfecture de Villefranche-de-Rouergue

Mme Marie-Lou Marcel

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur

Lutte contre les violences urbaines à Mulhouse

Mme Arlette Grosskost

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur

Statut territorial de Mayotte

M. Ibrahim Aboubacar

M. Manuel Valls, ministre de l

Revalorisation des retraites agricoles et installation des jeunes agriculteurs

Mme Martine Faure

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Mme Martine Faure

Aides à la protection des cultures

M. Franck Reynier

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Construction de retenues d’eau

M. Jean-Charles Taugourdeau

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

M. Jean-Charles Taugourdeau

Situation des artisans du secteur du bâtiment

M. Jean-Louis Bricout

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

M. Jean-Louis Bricout

Suppression de l’obligation d’adhésion aux corporations artisanales en Alsace-Moselle

M. Laurent Furst

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Recours à la main-d’œuvre européenne dans le secteur du bâtiment et des travaux publics

M. Pierre Aylagas

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Régime fiscal des versements aux associations de défense des animaux

M. Marc Laffineur

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

M. Marc Laffineur

Mise en jeu de la responsabilité pénale dans les cas d’exposition à l’amiante

M. Jean-Pierre Decool

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

M. Jean-Pierre Decool

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Christophe Sirugue
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Questions orales sans débat

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions orales sans débat.

Réalisation du contournement routier d’Évreux

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Destans, pour exposer sa question, n° 194, relative à la réalisation du contournement routier d’Évreux.

M. Jean-Louis Destans. Monsieur le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, ma question concerne une opération de contournement de l’agglomération d’Évreux, attendue et espérée depuis longtemps et qui a fait l’objet d’une précédente programmation dans le cadre du contrat de plan État-région 2000-2006 complétée dans le cadre du programme de développement et de modernisation des itinéraires arrêté avec le ministère en 2011. Le coût global pour achever cette opération est de 113,5 millions d’euros, dont 62,2 millions d’euros apportés par l’État et 51,3 millions d’euros par les collectivités : 31,4 millions par la région, 9,9 millions par le département et 10 millions par la communauté d’agglomération d’Évreux. On le voit, monsieur le ministre, les collectivités se sont fortement engagées pour ce projet de déviation qui concerne une route nationale.

Je souhaite aujourd’hui que l’État puisse nous garantir sa mobilisation pleine et entière pour une réalisation rapide de cette opération, la seule retenue pour le département de l’Eure dans le PDMI en cours. À ce jour, les acquisitions foncières sont réalisées, l’enquête ouverte au titre de la loi sur l’eau est achevée et le commissaire enquêteur doit remettre son rapport dans les plus brefs délais ; le déboisement et le diagnostic archéologique préalable peuvent intervenir dès 2013. Les travaux routiers pourraient donc potentiellement démarrer dès 2014.

Aussi, monsieur le ministre, je souhaite que l’État exprime clairement sa volonté sur ce projet et précise ses objectifs de réalisation et son planning, de telle sorte que l’ensemble des parties prenantes et financeurs aient bien l’assurance d’une réalisation désormais rapide de cette opération. Toutes celles et ceux qui se sont mobilisés en faveur ce projet porteur de développement et de nature à améliorer la fluidité et la sécurité du trafic routier – et les Ébroïciens avec eux – attendent de l’État un engagement ferme et précis.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député Jean-Louis Destans, vous avez appelé mon attention sur l’avancement des travaux de la déviation sud-ouest d’Évreux. En effet, l’actuelle RN 13 supporte, dans la traversée d’Évreux, en sus du trafic local, un important trafic de transit et d’échange entre l’ouest parisien et la région de Caen.

Soyez assuré que l’achèvement de cette déviation, dont une première phase est déjà en service – il s’agit de la déviation de Parville – est une priorité de mon ministère et de ses services. Je tiens d’ailleurs à répondre à votre demande en vous apportant des précisions sur le calendrier des opérations.

Entre le carrefour des Fayaux et la déviation de Parville, la poursuite des opérations a été suspendue à la mise en service de nouveaux captages d’eau potable et de la nouvelle usine de Chenappeville pour le traitement des eaux de l’agglomération d’Évreux. Ces équipements sont désormais réalisés et l’opération va donc pouvoir reprendre.

En outre, comme vous l’indiquez, les acquisitions foncières menées au titre de la déclaration d’utilité publique sont désormais achevées. En dehors du champ de la déclaration d’utilité publique, il reste cependant un certain nombre de parcelles à acquérir pour appliquer les mesures de reboisement sur lesquelles l’État s’est engagé à la suite de la déclaration d’utilité publique au titre des mesures compensatoires. L’État dispose aujourd’hui de plus de la moitié de la surface requise et les démarches se poursuivent.

Au-delà de la DUP et des acquisitions foncières, d’autres procédures relevant du code de l’environnement sont à mener pour permettre l’engagement des travaux. Il s’agit de la procédure d’autorisation au titre de la loi sur l’eau et de celle relative aux autorisations de destruction d’espèces protégées.

L’enquête publique préalable à l’autorisation au titre de la loi sur l’eau a été ouverte par arrêté préfectoral le 26 octobre 2012. Elle s’est déroulée en fin d’année dernière, du 22 novembre au 22 décembre 2012, et les conclusions du commissaire enquêteur sont favorables. Celles-ci sont accompagnées de deux recommandations qui portent sur la mise en place d’un comité de pilotage et d’un comité de suivi des travaux. Bien évidemment, ces deux recommandations seront mises en œuvre.

La procédure au titre de la loi sur l’eau va maintenant se poursuivre par un passage obligatoire devant le Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques. L’arrêté préfectoral autorisant les travaux au titre de la loi sur l’eau pourrait être signé à la fin du premier semestre 2013.

Concernant les autorisations de destruction d’espèces protégées, l’examen du projet par le Comité national de protection de la nature devrait intervenir courant septembre 2013.

Dans ce contexte, les fouilles archéologiques préalables à l’engagement effectif des travaux devraient pouvoir être menées d’ici à la fin de l’année et le début des travaux pourrait avoir lieu, selon les résultats, soit à la fin de l’année 2013 soit au début de l’année 2014. Nous nous mobiliserons pour que la première branche de l’alternative soit retenue, en fonction, bien sûr, de la disponibilité des moyens financiers nécessaires.

Je suis bien conscient qu’il s’agit pour vous et pour l’ensemble de l’agglomération d’un enjeu majeur. En effet, c’est un itinéraire qui est très fréquenté et qui a fait l’objet d’aménagements progressifs au fil des années. Il est temps cependant que ce chantier s’achève.

Modernisation du réseau ferroviaire en Basse-Normandie

M. le président. La parole est à Mme Nicole Ameline, pour exposer sa question, n° 213, relative à la modernisation du réseau ferroviaire en Basse-Normandie.

Mme Nicole Ameline. Monsieur le ministre délégué chargé des transports, la Basse-Normandie a besoin d’une ligne ferroviaire nouvelle et, comme vous le savez, l’ensemble des élus et des représentants du monde économique soutiennent ce projet.

Je souhaite appeler votre attention sur le contresens économique qui résulterait de l’abandon d’investissements de croissance tels que le projet de renouvellement de la ligne ferroviaire Paris-Lisieux-Caen, aujourd’hui obsolète et synonyme de retards et d’incidents à répétition. À l’heure où les grandes métropoles mondiales choisissent l’ouverture maritime, notre pays peine à rejoindre les grands projets internationaux. En ne plaçant pas le nord-ouest de la France dans ses priorités d’aménagement, le Gouvernement priverait notre pays d’un formidable potentiel de croissance de niveau international et risquerait, dans une période de crise comme celle que nous connaissons, d’en accuser la précarisation.

Monsieur le ministre, que deviendrait l’égalité des territoires si, alors que notre région porte en elle de formidables capacités de développement en lien notamment avec le Royaume-Uni, elle se voyait ainsi privée de toute perspective crédible de développement ? La crise précipite les territoires éloignés des grandes métropoles urbaines dans une précarité accrue en termes éducatifs ou de filières professionnelles et ce retard ne peut se combler qu’au travers de communications modernes et adaptées.

Le nouveau lien entre Paris et la mer est un projet d’intérêt national qui sert le pays tout entier. La France doit investir dans son avenir et desservir ses grands ports maritimes. C’est pourquoi nous souhaitons connaître l’engagement ferme et précis du Gouvernement sur l’absolue nécessité et l’urgence de desservir efficacement la région nord-ouest et singulièrement la Basse-Normandie.

Nous savons que vous avez décidé de poursuivre les études sur ce projet, mais rien dans le projet d’aménagement de la métropole parisienne ne concerne la concrétisation d’un lien tangible avec l’ouest. Plus inquiétant encore, le projet du Grand Paris nous semble aujourd’hui se rétrécir au Paris conçu d’une manière endogène, sans impact sur l’ensemble du territoire. C’est pourquoi je souhaite que vous puissiez nous apporter ce matin des précisions et surtout nous indiquer si, de votre point de vue, ce projet d’aménagement pourrait être converti en projet d’intérêt général.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la députée, vous le soulignez, et votre constat est presque un bilan : l’état du réseau ferré national, ainsi que l’a démontré l’École polytechnique fédérale de Lausanne, est extrêmement dégradé. Il doit faire l’objet d’efforts soutenus pour offrir le niveau de service que les entreprises ferroviaires et les voyageurs sont en droit d’en attendre.

C’est la raison pour laquelle j’ai demandé dès le mois d’octobre au président de Réseau ferré de France de préparer dans les prochains mois un projet de plan engageant une nouvelle étape de rénovation et de modernisation du réseau ferré national. Il s’agira d’apporter des solutions aux besoins d’amélioration de la qualité de service pour les usagers et de mieux répondre aux enjeux de capacité sur les lignes les plus circulées.

La ligne Paris-Lisieux-Caen-Cherbourg, axe structurant du réseau ferré national qui dessert la région nord-ouest et plus particulièrement la Basse-Normandie, fait bien entendu partie des lignes pour lesquelles ces problématiques doivent être examinées.

D’ailleurs, d’importants travaux de régénération ont commencé d’être réalisés sur cette ligne en janvier dans les tunnels de Bernay et La Motte et devraient s’achever en octobre 2013, pour un montant de 33 millions d’euros. Ces travaux nécessaires sont réalisés de nuit et des ajustements ont été apportés au déroulement de ce chantier pour minimiser autant que possible l’impact sur la circulation des trains de voyageurs. La rénovation et la sécurisation de ces ouvrages participeront à l’amélioration de la régularité et de la sécurité des liaisons entre la capitale et les régions normandes.

En outre, au-delà des interventions sur le réseau existant, le débat public sur la ligne nouvelle Paris-Normandie, qui s’est achevé au début de l’année 2012, a permis de présenter différents scénarios profitant tout à la fois à la Haute-Normandie et à la Basse-Normandie.

Ce projet est, comme bien d’autres projets de lignes à grande vitesse ou de lignes nouvelles, en cours d’examen par la commission Mobilité 21.

Je tiens à vous préciser, à ce stade, qu’il n’a jamais été question d’abandonner quelque structure, infrastructure ou projet que ce soit. Encore faut-il que ceux-ci existent. Dans d’autres régions, nous avons à traiter cette problématique. Le Gouvernement est attentif à assurer le transport quotidien – vous y faites référence – et à faire en sorte que les lignes nouvelles, notamment celles qui font l’objet d’une étude par la commission Mobilité 21, répondent précisément à cette problématique. À cet égard, la ligne nouvelle qui a été annoncée en 2009 et qui devait relier directement Paris au Havre n’a fait l’objet ni d’engagement, ni de financement, ni de calendrier ; elle n’avait d’ailleurs pas pour effet d’irriguer le territoire qui vous est cher. Pour notre part, nous souhaitons faire en sorte que les lignes nouvelles aient aussi une fonction d’aménagement et de desserte du territoire et répondent à l’objectif de qualité du service ferroviaire au quotidien.

Soyez assurée que nous souhaitons faire en sorte de réaliser ce qui n’était que projet, de le rendre concret mais aussi, pour les collectivités comme pour l’État, soutenable financièrement.

Aménagement de la RN 31

M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour exposer sa question, n° 214, relative à l’aménagement de la RN 31.

Mme Catherine Vautrin. Monsieur le ministre délégué chargé des transports, axe routier du grand contournement de Paris reliant Rouen à Reims, ancienne Grande liaison assurant la continuité du territoire – GLAT – dans les années 1970, la route nationale 31 a connu ses premiers plans d’aménagement à une époque où, oserais-je dire, ni vous ni moi n’étions nés.

Depuis lors, des infrastructures autoroutières ont été développées, notamment dans le nord, par exemple entre Amiens et Le Havre. Pour autant, la RN 31 n’a pas beaucoup évolué, en particulier dans le département de la Marne, alors que dans le même temps sa fréquentation n’a fait qu’augmenter.

Le plan de relance a financé des investissements à hauteur de 1,3 million d’euros qui ont permis plusieurs travaux nécessaires comme l’aménagement des carrefours de Prouilly et Branscourt et la réfection du tapis routier au droit de Muizon. Pour autant, les crédits n’ont pas permis d’achever totalement, tout au long de la traversée de cette commune, la réfection de ce tapis routier qui, pourtant, en termes de lutte contre le bruit, apporte toute satisfaction aux habitants de la commune. Depuis, force est de constater que la RN 31 semble être retombée dans l’oubli. La déviation de Jonchery-sur-Vesle, par exemple, a toujours son tapis d’origine, qui date de plus de vingt-cinq ans, et les nids d’autruche ont remplacé depuis longtemps les nids de poule ; c’est dire si la situation devient particulièrement dangereuse.

Les élus locaux, les riverains et les usagers de la RN 31 sont unanimes : pour la sécurité, pour le développement économique de la région – vous savez que cet axe sert notamment aux convois exceptionnels –, il est absolument indispensable que des travaux soient engagés pour rénover le tapis routier, sécuriser les carrefours – nous avons encore des quatre voies avec une voie de tourne-à-gauche – et réaliser les contournements de communes comme Muizon et Fismes.

Nos élus souhaitent aujourd’hui obtenir des engagements de l’État. Monsieur le ministre, je souhaiterais connaître votre politique d’optimisation des axes routiers. Quel soutien pensez-vous apporter, de quel budget disposez-vous et, surtout, quel calendrier envisagez-vous pour un axe comme celui-ci ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la députée, je vous remercie du constat que vous venez de dresser. Il nous permet d’observer que la mobilisation et les volontés politiques n’ont pas permis de régler des problèmes et des difficultés quotidiennes, encore que le paysage des aménagements et des infrastructures ait beaucoup évolué et qu’il faille en tirer les conséquences. C’est vrai pour la RN 31, puisque vous appelez mon attention sur la politique de régénération et d’aménagement que l’État entend mettre en œuvre sur cette route nationale, notamment sur la section entre Soissons et Reims.

Depuis la mise en service des autoroutes A29 et A26, qui établissent une liaison autoroutière continue et performante entre Rouen et Reims via Amiens et Saint-Quentin, la RN 31 a, il est vrai, quelque peu changé de statut, puisque, tout en restant route nationale, elle assure de façon prédominante une desserte locale. Le parti d’aménagement à mettre en œuvre pour cet axe doit donc être cohérent avec sa fonction principale, en discussion avec les collectivités.

Ainsi, la RN 31 a fait l’objet de diverses opérations d’aménagement, principalement au travers de mises à deux fois deux voies de plusieurs sections, en particulier entre Beauvais et Catenoy. Entre Soissons et Reims, des aménagements ponctuels à deux fois deux voies ont été réalisés entre Braine et Courcelles-sur-Vesle, au droit de Magneux ainsi qu’à celui de Jonchery-sur-Vesle, et à l’arrivée à Thillois. En outre, les déviations des trois agglomérations les plus importantes – Beauvais, Compiègne et Soissons – ont été réalisées.

Les PDMI, qui financent les opérations de modernisation du réseau routier national, font porter aujourd’hui l’effort de modernisation sur l’autoroute A304 en Champagne-Ardenne et sur la RN 2 en Picardie, une route nationale qui pose également d’énormes difficultés.

Je suis bien conscient de l’importance de la RN 31 pour la desserte des territoires et pour leurs populations. Je suis tout aussi conscient de la réalité dont vous venez de vous faire l’écho.

La poursuite de l’aménagement de la section entre Soissons et Reims devra donc être examinée avec attention dans le cadre de la préparation de la prochaine génération de PDMI, à partir de 2015.

Cela étant, j’ai d’ores et déjà demandé aux préfets de région de hiérarchiser les opérations de modernisation du réseau routier national. Il convient en effet d’identifier celles pour lesquelles la poursuite ou l’engagement des travaux paraissent nécessaires à l’horizon 2019, afin de préparer la prochaine génération de PDMI. Ces opérations devront répondre prioritairement à des enjeux de sécurité – vous y faisiez référence –, de réduction de la congestion chronique, de désenclavement et d’amélioration nécessaire de desserte des territoires, sans oublier la qualité de vie.

Malgré le nombre d’opérations à mener, nous essaierons de dégager les moyens nécessaires. L’entretien des chaussées doit être une priorité. Je demanderai à mes services que les réparations ponctuelles les plus urgentes soient poursuivies, mais aussi que nous puissions aborder de façon très pragmatique la manière d’assurer des conditions correctes de circulation sur la RN 31.

Enfin, plusieurs carrefours et accès riverains ont été aménagés ou sont en cours d’aménagement. L’aménagement du carrefour de Courlandon en est ainsi au stade des études environnementales. Je me tiens également à votre disposition pour que nous envisagions ensemble l’évolution de ce dossier.

Interdiction du transit de matières dangereuses par la gare de triage de Woippy

M. le président. La parole est à M. Gérard Terrier, pour exposer sa question, n° 196, relative à l’interdiction du transit de matières dangereuses par la gare de triage de Woippy.

M. Gérard Terrier. Ma question s’adresse au ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Monsieur le ministre délégué, je souhaite appeler votre attention sur la gare de triage de Woippy, la plus importante de France, qui voit circuler chaque année 45 000 wagons de matières dangereuses, en particulier du chlore.

Bien qu’elle ne soit pas classée site Seveso, elle est soumise à une étude complémentaire de danger, conformément à la loi qui a été prise à la suite de la catastrophe d’AZF.

L’étude en question a été présentée aux élus le 22 novembre 2012. Elle conclut à l’existence d’un danger potentiel conduisant à un élargissement du périmètre de protection autour de la gare de triage de Woippy à 2,5 kilomètres, c’est-à-dire au-delà du périmètre de protection actuel – délimité en fonction du projet d’intérêt général –, à l’intérieur duquel on ne peut rien construire.

Les études n’ont pas encore abouti, mais l’État a refusé, en vertu du principe de précaution – ce à quoi nous pouvons souscrire –, la délivrance de tout permis de construire. Par la suite, il a reconnu que seul le PIG était opposable.

Nous comprenons l’importance du principe de précaution, mais il ne faut pas oublier qu’une population assez nombreuse vit dans les 2,5 kilomètres de cette zone de danger létal. Ces personnes attendent comme nous les conclusions de l’étude. Le principe de précaution, s’il possède une dimension administrative, concerne aussi la santé humaine. Aussi les sept communes concernées – Woippy, Semecourt, Plesnois, Norroy-le-Veneur, Maizières-lès-Metz, Fèves et La Maxe – demandent-elles une mesure d’interdiction du trafic de chlore jusqu’à ce que la conclusion définitive de l’étude nous permette de voir sereinement les dispositions réglementaires qu’il convient de prendre, aussi bien du point de vue administratif que pour la santé publique.

Devant les hésitations de l’État, je souhaite connaître vos intentions pour assurer la transparence et la cohérence de la décision publique, dans le respect de l’intérêt général.

(Mme Catherine Vautrin remplace M. Christophe Sirugue au fauteuil de la présidence.)

Présidence de Mme Catherine Vautrin
vice-présidente

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Merci, madame la présidente. J’ignore s’il y a un lien entre la réponse que je viens de vous faire et votre accession au perchoir… (Sourires.)

Monsieur le député, vous appelez mon attention sur les contraintes liées au tri de wagons-citernes de chlore à la gare de marchandises de Woippy. Je comprends vos préoccupations pour m’être rendu, encore récemment, dans une gare de triage confrontée à des problèmes similaires, liés à la dangerosité du fret.

Vous le savez, le transport de matières dangereuses est nécessaire au fonctionnement de notre industrie. Cela dit, il doit se faire dans des conditions de sécurité respectant le principe de précaution.

Le ferroviaire est, de loin, le meilleur choix pour le transport des matières dangereuses. En effet, il permet de contourner les zones urbaines denses, ce qui évite d’exposer les populations. Même si les wagons ferroviaires sont plus solides que les camions-citernes, notamment pour le transport du chlore, il n’en est pas moins nécessaire de veiller à la sécurité et de rassurer les populations et les élus.

Par ailleurs, l’importance et l’organisation de la gare de Woippy permettent un tri dans les meilleures conditions de sécurité. Des mesures de restriction du trafic sur ce site risqueraient de conduire à ce qu’une partie du chlore soit transportée par camion, ce qui entraînerait des risques d’accidents supplémentaires, avec les conséquences possibles que cela suppose.

Le Gouvernement ne diminue pas ses efforts, loin s’en faut, pour améliorer, chaque fois que c’est possible, la sécurité du transport ferroviaire. Des améliorations de la sécurité ont été récemment apportées dans la conception même des wagons de chlore. De son côté, la SNCF, en perfectionnant la gestion des flux, fait de plus en plus de trains complets qui traversent la France sans passer par des gares de triage, ce qui ne va d’ailleurs pas sans entraîner pour elles des difficultés économiques. Enfin, RFF et la SNCF, dont j’ai rencontré les présidents hier soir, poursuivent leurs efforts pour réduire encore les risques lors des opérations de triage.

Des éléments prometteurs concernant l’évaluation des risques liés aux wagons de marchandises dangereuses, en particulier de chlore, sont espérés dans le cadre d’une expertise européenne lancée par mes services et qui devrait aboutir à la fin de cet été.

S’agissant du périmètre de protection auquel vous faites référence, du conflit d’usage et de l’autorisation de construction, l’ensemble des paramètres que je viens d’énumérer et les conclusions de l’étude devraient permettre de conclure que le risque d’un accident majeur est suffisamment faible pour que l’on écarte la nécessité d’une maîtrise de l’urbanisation sur un périmètre aussi grand. Le périmètre de précaution devrait ainsi être réduit à 700 mètres, contre 2 500 mètres actuellement. Dans ce périmètre, il s’agit, non pas d’interdire les constructions, mais de les accompagner de mesures de confinement éventuelles. C’est un sujet important auquel le Gouvernement accorde tout son intérêt. RFF et la SNCF sont mobilisés. En tout état de cause et compte tenu des éléments que nous devrions recevoir dans quelques semaines, les perspectives sont favorables à l’aménagement de votre territoire.

Modernisation de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour exposer sa question, n° 191, relative à la modernisation de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse.

M. Nicolas Sansu. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Monsieur le ministre délégué, je souhaite appeler votre attention sur la ligne ferroviaire Paris-Orléans-Limoges-Toulouse et sur l’urgence d’un saut qualitatif dans sa modernisation concernant le matériel, l’infrastructure et les dessertes.

Cette troisième radiale nationale, la plus longue ligne ferroviaire de France, traverse dix départements et en dessert trente-deux. Elle concerne près de 5 millions d’habitants, comporte six carrefours ferroviaires et coupe cinq lignes transversales essentielles, parmi lesquelles la ligne Nantes-Lyon, qui croise la POLT à Vierzon et ouvre le centre de notre pays vers les ports de l’Atlantique. La ligne POLT joue donc un rôle majeur pour irriguer le territoire, tant pour les voyageurs que pour le fret. Elle est incontournable pour l’aménagement du territoire.

Ces spécificités plaident en faveur d’un schéma directeur de cette ligne qui prenne en compte les travaux, la mise en place de nouveaux matériels roulants et une meilleure desserte, dans le cadre d’un partenariat formalisé entre tous les acteurs. Cela rassurerait également les voyageurs, les élus et les cheminots, qui ont spontanément réagi à la lecture d’un courrier, venant du plus haut niveau de votre administration, proposant de supprimer la moitié des dessertes.

Monsieur le ministre, les habitants desservis par cette ligne, notamment ceux du Centre et du Limousin, ont besoin de réponses claires. Les mesures en question ne sont d’ailleurs pas intenables financièrement.

Concernant le matériel, la proposition faite il y a un an par le président de la SCNF d’affecter des rames TGV de première génération sur cette ligne – ce qui assurerait un meilleur confort et une interconnexion plus facile au réseau européen à grande vitesse pour certaines dessertes – est-elle une option que retient l’État, autorité organisatrice de cette ligne ? Cela n’empêcherait nullement, d’ailleurs, de proposer des matériels neuf d’ici à quelques années, dans le cadre des acquisitions engagées pour les trains d’équilibre du territoire.

Concernant l’infrastructure, des travaux de modernisation, que le président Rapoport va d’ailleurs décliner cet après-midi à Orléans, sont en cours. Il conviendra de les compléter pour assurer une parfaite coordination entre la ligne POLT et le réseau à grande vitesse, notamment Paris-Orléans-Clermont-Lyon. Cela devra être confirmé par la mission sur le schéma national des infrastructures de transport.

Toutefois, si ces travaux sont nécessaires et si tout le monde les apprécie à leur juste valeur, leur organisation – avec la fermeture de la voie pendant plus de quatre heures en journée et pendant certains week-ends, comme ce sera le cas à Pâques – a un impact très négatif sur l’image de cette ligne. Pouvez-vous remettre à plat cette organisation des chantiers en utilisant les dispositifs existants – je pense notamment aux installations permanentes de contresens – pour que les voyageurs ne soient pas tentés de trouver un autre mode de transport ?

Enfin, pourriez-vous, dans le cadre du schéma directeur, améliorer la qualité des dessertes, notamment du point de vue de la fiabilité ? Sachant que le principe du schéma directeur a été accepté par RFF et par la SNCF il y a un an, l’État, en tant qu’autorité organisatrice des trains d’équilibre du territoire – dont faire partie la ligne POLT –, montrerait ainsi son ambition en s’appuyant sur une ligne ferroviaire qui est véritablement la colonne vertébrale du réseau national, tant pour le fret que pour les voyageurs.

Mme Colette Langlade. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, je connais votre attachement à la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, qui est importante, voire structurante. Vous organisez d’ailleurs dans deux jours un colloque sur le sujet avec Mme la députée Valérie Rabot. J’essaierai d’y assister, mais le contrôle parlementaire fait que je serai aussi mobilisé dans cet hémicycle. Considérez donc mon intervention d’aujourd’hui comme une contribution à vos débats et à vos réflexions.

Je connais les difficultés sur la ligne POLT. Comme vous le souligniez, personne ne peut être satisfait de la dégradation de la régularité de la ligne – moins douze points entre 2011 et 2012 –, même si une grande part de cette évolution est due à un éboulement à côté de Cahors. Personne ne peut être satisfait du manque de fiabilité des locomotives. L’État, qui est l’autorité organisatrice du service, s’en est inquiété auprès de la SNCF et de RFF. Je le disais encore hier à M. Rapoport et à M. Pepy. J’attends dès à présent des résultats rapides et concrets.

Les difficultés auxquelles sont confrontés les voyageurs, mais aussi les chargeurs pour les trains de marchandises, sont importantes, du fait du vaste programme de travaux qui est réalisé sur cet axe. En effet, depuis plusieurs années, la maintenance de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse s’inscrit dans le plan important de rénovation et de modernisation du réseau ferré national, qui concerne les voies, mais aussi les caténaires, les ouvrages d’art et tous les équipements techniques. Ainsi, entre 2004 et 2016, 460 millions d’euros auront été investis pour renouveler et moderniser les installations de cette ligne, dont 70 millions d’euros en 2013. Il faut tout de même s’en féliciter et souligner l’effort qui est réalisé.

L’organisation des chantiers a été définie et ajustée pour limiter autant que possible leur impact sur la circulation. Ces travaux doivent malgré tout être réalisés pour améliorer la qualité des dessertes.

Vous évoquez également la mise en œuvre d’un schéma directeur sur la ligne POLT. J’entends et je comprends cette demande. L’important, vous en conviendrez, n’est pas tant d’avoir un nouveau schéma que de savoir ce qu’il pourrait contenir. Pour cela, il est nécessaire d’avoir préalablement de la visibilité sur les améliorations complémentaires de l’infrastructure, lesquelles seront examinées dans le cadre du plan de modernisation ferroviaire que j’ai demandé à RFF d’élaborer. La commission Mobilité 21 donnera elle aussi son avis sur la question. Je suis d’accord avec vous pour dire que, une fois les conclusions de ces deux démarches connues, c’est-à-dire d’ici à juin 2013, la question du schéma directeur de cette ligne devra être posée.

S’agissant du renouvellement du matériel roulant, je connais les attentes des élus, mais aussi – et peut-être surtout – des voyageurs. Il est vrai que les voitures corail sont âgées de quarante ans, voire plus pour certaines. Les trains d’équilibre du territoire utilisent environ 2 000 voitures Corail ayant toutes le même âge ; leur renouvellement complet nécessiterait d’engager 3 à 4 milliards d’euros. Tout ne pourra donc pas être fait tout de suite.

Un premier effort a été engagé avec la rénovation en cours des voitures Téoz, qui permettra d’améliorer le confort offert aux voyageurs de la ligne POLT. Cette rénovation est financée dans le cadre du programme d’investissements de 300 millions d’euros prévu dans la convention d’exploitation conclue pour la période 2011-2013 et dont nous sommes en train de négocier avec la SNCF la prorogation pour 2014. Des rames totalement rénovées sont progressivement mises en service depuis janvier 2013 ; les livraisons sont attendues jusqu’en 2015.

Le programme visant à la réutilisation des rames TGV de première génération, que j’ai évoqué hier soir avec Guillaume Pepy, est soutenu par une volonté commune. Il avance, et sans doute pourrons-nous apporter des améliorations sensibles, dans l’attente de la perspective majeure que constitue la réalisation de grands chantiers. Si nécessaires que soient ces grands chantiers, vous conviendrez avec moi que, dans l’immédiat, nous ayons à nous préoccuper du quotidien des voyageurs et des usagers.

Desserte du Haut-Doubs par des lignes à grande vitesse

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour exposer sa question, n° 216, relative à la desserte du Haut-Doubs par des lignes à grande vitesse.

Mme Annie Genevard. Monsieur le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, je souhaite vous alerter sur la possible suppression, d’ici à mi-2013, de l’aller-retour Paris-Berne via le Jura. La société Lyria, dont l’actionnaire principal est la SNCF, exploite cette liaison qui assure la desserte du Haut-Doubs. Chaque jour, un aller-retour entre Paris, Neuchâtel et Berne dessert Pontarlier. Lors du conseil d’administration de la SNCF du 27 septembre 2012 a été évoquée l’évolution de ces dessertes dans le cadre d’une étude sur l’extension du périmètre de la société Lyria. Des annonces récentes semblent acter la suppression, à court terme, du TGV Lyria dans son axe nord, Berne-Neuchâtel-Pontarlier-Frasne-Paris, et, à moyen terme, des études pourraient être programmées concernant son axe sud, Lausanne via Frasne, dans le cadre de la liaison Paris-Frasne-Lausanne.

Ces décisions, si elles étaient mises en œuvre, supprimeraient toute liaison directe à grande vitesse vers Paris depuis Frasne et Pontarlier. La ville de Pontarlier et le Haut-Doubs souffriraient d’un déficit d’infrastructures qui pénaliserait la desserte du massif jurassien. Ces projets provoquent dans le Haut-Doubs une vive émotion auprès de la population et des acteurs politiques et économiques. Dans l’intérêt du développement économique de notre territoire, et afin de favoriser les liens franco-suisses, il est primordial de maintenir les liaisons directes par grande vitesse entre le Haut-Doubs, l’arc jurassien et Paris.

La société Lyria, entreprise non déficitaire, devrait prendre une décision courant 2013. Aussi, face à l’urgence de la situation, est-il nécessaire que vous interveniez au plus vite, monsieur le ministre, et envisagiez une concertation avec la SNCF, actionnaire majoritaire de la société Lyria. L’ensemble des élus du Doubs souhaitent vivement qu’aucune décision définitive ne soit actée en 2013, mais qu’un moratoire de cinq ans soit délivré afin de faire la promotion des liaisons directes à grande vitesse vers Paris.

Monsieur le ministre, je vous sais attentif à cette question, puisque vous me l’avez écrit dans un courrier du 20 décembre dernier, en rappelant que le Gouvernement était garant du maintien d’une desserte équilibrée du Haut-Doubs. Le maintien de cette desserte par les lignes à grande vitesse est effectivement une nécessité. Nous comptons sur vous !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la députée, comme vous l’avez rappelé, les élus locaux du Haut-Doubs m’ont effectivement interpellé, dès la fin de l’année 2012, au sujet des inquiétudes suscitées par l’évolution de la desserte ferroviaire de leur région. J’ai eu l’occasion de m’en entretenir avec Marie-Guite Dufay, présidente de la région Franche-Comté, et Claude Jeannerot, président du conseil général du Doubs. Vous-même m’avez écrit et, comme vous le dites, je vous ai répondu par un courrier en date du 20 décembre 2012. C’est un fait, la mobilisation est grande sur la question que vous évoquez.

Lors du passage au service annuel 2013, aucune modification majeure n’a été apportée aux schémas de desserte des relations à grande vitesse Paris-Lausanne et Paris-Berne sans échange préalable entre la SNCF et les acteurs locaux. Il est important pour moi de réaffirmer devant vous que cette méthode sera appliquée avec la même transparence à l’avenir : la SNCF et ses filiales devront veiller à informer régulièrement les acteurs locaux au sujet de ce dossier.

En ce qui concerne la suppression opérée de l’arrêt en gare de Mouchard, qui résultait de contraintes techniques de circulation, la SNCF et RFF ont répondu favorablement à la demande des élus locaux, consistant à réexaminer la possibilité de son rétablissement au service annuel 2014. À plus long terme, la SNCF admet étudier la possibilité de faire évoluer la circulation de certains trains à destination de la Suisse pour tenir compte des travaux d’infrastructure programmés du côté helvétique et des gains de temps en découlant.

Cependant, aucune décision n’a été prise à ce jour quant à ces éventuelles évolutions, qui suscitent actuellement de fortes inquiétudes au niveau local. Dans l’immédiat, afin de redynamiser la fréquentation de cette relation desservant Pontarlier, la SNCF et sa filiale Lyria ont décidé de prolonger le TGV Paris-Pontarlier-Neuchâtel-Berne jusqu’à Interlaken et poursuivent par ailleurs leurs efforts afin de proposer des tarifs attractifs au plus grand nombre.

Garant du maintien d’une desserte équilibrée des territoires, j’ai pour ma part signalé au président de la SNCF qu’aucun schéma de desserte existant ne saurait être modifié par l’entreprise sans que les conséquences et les alternatives possibles soient auparavant examinées et partagées avec les acteurs du Haut-Doubs et leurs représentants et sans que j’aie été préalablement informé des résultats de cette démarche de concertation.

Développement du fret ferroviaire dans le nord de la Dordogne

Mme la présidente. La parole est à Mme Colette Langlade, pour exposer sa question, n° 202, relative au développement du fret ferroviaire dans le nord de la Dordogne.

Mme Colette Langlade. Monsieur le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche, depuis près de soixante-dix ans, les carrières de Thiviers ont une activité importante dans le domaine de l’extraction de granulats, avec une production dont la qualité est reconnue au niveau régional.

Cependant, depuis 2009, la situation économique des carrières est difficile. Dans ce contexte, la volonté des dirigeants a toujours été de préserver au maximum les emplois, tant au sein de l’entreprise que chez les acteurs économiques locaux. Des chantiers importants étant réalisés à proximité des sites d’extraction, je souhaite vous faire part de certaines difficultés et inquiétudes relatives au maintien et au développement des flux de granulats.

Depuis trente ans, le site de Thiviers a développé un partenariat avec la SNCF : 300 000 tonnes, soit environ 250 trains, ont été ainsi expédiées en 2012, principalement à destination de Bordeaux. Le maintien des marchés des approvisionnements du chantier LGV Sud-Atlantique et de l’autoroute A63 devra conduire à développer les flux ferroviaires vers la Gironde, mais aussi vers les Landes et la Charente.

Les discussions avec la SNCF se sont révélées compliquées fin 2012, au moment du renouvellement des contrats. Une configuration intermédiaire a pu être signée pour une durée limitée à un an, compte tenu de la position de la direction fret, à laquelle remontent systématiquement les engagements pluriannuels.

Ce que les carrières de Thiviers subissent avec la SNCF semble lié à la volonté de la société de transport ferroviaire de facturer non plus une prestation de transport, mais une mise à disposition de moyens à l’année. Ce risque pèse dans les discussions en cours sur le renouvellement de certains contrats. Doit-on accepter que des chantiers importants soient approvisionnés par des carrières de Norvège ou d’Écosse, qui acheminent les granulats par bateau via Bordeaux, Dunkerque, Le Havre et Rouen ? Quelle est la position de la SNCF par rapport à son fret ? Sa politique de désengagement des wagons isolés, qui touche également les papeteries de Condat, mériterait d’être réexaminée.

Monsieur le ministre, la SCNF doit reprendre son rôle de prestataire de transports et garder la responsabilité de l’affectation de ses moyens. Comment peut-elle faciliter l’accès aux différents embranchements ferroviaires, y compris ceux qu’elle maîtrise, pour offrir des solutions ferroviaires ? Les acteurs économiques locaux, véritables porteurs de valeur ajoutée, souhaitent obtenir des réponses pérennes sur des positions durables et commerciales.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la députée, tout comme vous, je suis très attaché au développement du transport ferroviaire de marchandises. Ce mode de transport, qui permet de lutter efficacement contre les émissions de gaz à effet de serre et décongestionne le réseau routier, doit retrouver toute sa place dans nos échanges.

Il ne s’agit pas de faire de grandes annonces sur le fret ferroviaire – il n’y en a eu que trop, d’ailleurs non suivies d’effet –, mais plutôt de lever les blocages réels par des actions pratiques visant le développement de services de fret ou d’autoroutes ferroviaires, ainsi que le suivi régulier de la disponibilité de l’infrastructure au bénéfice des usagers et des chargeurs. Dans ce contexte, il est indispensable, comme vous le soulignez, que la SNCF participe à ces projets et joue pleinement son rôle de premier opérateur de fret. Elle doit fournir aux chargeurs un service de qualité, répondant à leurs besoins. Elle doit aussi respecter un impératif d’équilibre économique de cette activité : il n’y aura pas de développement du fret si l’entreprise ne s’organise pas de façon à retrouver un équilibre qui passe effectivement par une certaine massification des flux.

En parallèle, il faut lutter, comme le Gouvernement s’y emploie, contre la baisse des prix du transport routier due à une libéralisation non contrôlée, dont souffrent les salariés et les petites entreprises de ce secteur. Ainsi, la France s’opposera à une ouverture supplémentaire du marché intérieur, en particulier à la libéralisation du cabotage, tant que les normes sociales ne seront pas harmonisées en Europe. Enfin, la mise en œuvre de la taxe poids lourds, qui fait actuellement l’objet d’un projet de loi adopté à l’unanimité au Sénat, permettra d’envoyer un signal en faveur du transport par rail.

Vous l’aurez compris, la relance du fret ferroviaire constitue une priorité du Gouvernement. S’agissant plus particulièrement de son développement dans le nord de la Dordogne, si l’activité des carrières de Thiviers génère d’ores et déjà un important trafic ferroviaire, des actions sont programmées pour inciter davantage de chargeurs à opérer le report modal en faveur du transport ferroviaire. Alors qu’environ 70 % des volumes extraits sur le site de Thiviers sont transportés à courtes et moyennes distances par route, le reste des volumes est acheminé par le fret SNCF, essentiellement vers l’agglomération bordelaise, sur une distance de plus de 150 km. L’embranchement ferroviaire des carrières de Thiviers est également utilisé par l’entreprise minière IMERYS. Ce flux représente entre cinq et onze wagons quotidiens, également acheminés par fret SNCF.

En termes d’infrastructures, il est nécessaire que les voies bénéficient d’investissements. À la demande du Gouvernement, RFF a investi 500 000 euros dans la réalisation de travaux dédiés aux activités de fret, qui ont permis d’améliorer l’état de l’infrastructure, ce qui répond sans doute aux préoccupations que vous avez clairement exprimées ce matin.

Création d’un centre de développement chorégraphique à Uzès

Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Cavard, pour exposer sa question, n° 190, relative à la création d’un centre de développement chorégraphique à Uzès.

M. Christophe Cavard. Madame la ministre de la culture, je souhaite vous interroger au sujet du projet de centre de développement chorégraphique d’Uzès, d’une envergure au moins régionale. Voilà près de dix ans que l’association Uzès-Danse développe un projet culturel dont l’exemplarité nationale doit être soulignée : exemplarité culturelle par l’articulation des politiques culturelles et de santé, en développant la création chorégraphique au cœur d’un établissement psychiatrique ; exemplarité territoriale, en décentrant la création contemporaine de la métropole montpelliéraine, ce qui constitue une nouvelle étape de la décentralisation culturelle – qui, je le sais, vous est chère.

Vous savez que les politiques artistiques reposent sur la reconnaissance des projets portés par les acteurs eux-mêmes. Notre responsabilité est de reconnaître la qualité de ces projets, afin de leur permettre de se développer en dépit d’une complexité financière et administrative qui leur est trop souvent fatale. Alors que les collectivités territoriales et les acteurs locaux soutiennent ce projet, il relève de la responsabilité de notre majorité gouvernementale de rendre les arbitrages nécessaires à sa réalisation.

Le projet est bouclé, et les travaux devaient commencer fin 2013, début 2014. Les deux acteurs centraux du déblocage du projet sont le ministère de la santé, via l’ARS, dont dépend l’hôpital, et votre ministère, via la DRAC. La réussite ou l’échec de ce qui constitue un projet mixte culture-santé de dimension nationale sera un indicateur de notre capacité à réaliser de véritables politiques transversales.

Madame la ministre, avez-vous pu évoquer ce dossier avec Mme la ministre de la santé et pourriez-vous nous préciser votre position, ainsi que les engagements pris pour débloquer la situation ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le député, vous avez souhaité m’interpeller sur le centre de développement chorégraphique d’Uzès. Le ministère de la culture et de la communication a accompagné ce projet et son installation dans le pavillon Mistral du centre hospitalier Mas Careiron.

Ce très beau projet de réhabilitation prévoyait de créer, dans le pavillon Mistral désaffecté, un studio de danse de 140 mètres carrés, des espaces de travail, des chambres destinées à l’hébergement des artistes chorégraphiques en résidence, ainsi qu’un centre de documentation, l’ensemble étant mis à disposition du centre chorégraphique d’Uzès.

Cette collaboration devait permettre au CDC d’Uzès de mener à bien sa mission de développement de la culture chorégraphique auprès de tous les publics, en particulier ceux du champ hospitalier, conformément à l’engagement du ministère de la culture et de la communication en matière d’accessibilité des œuvres et de la pratique artistique pour les publics a priori éloignés des ressources culturelles – voire des publics empêchés d’y accéder, comme c’est le cas en l’occurrence.

Dans le cadre du contrat de plan État-région, le ministère de la culture et de la communication a pris l’engagement de contribuer à l’investissement prévu à hauteur de 500 000 euros, sur un total estimé à 2,4 millions d’euros. La région Languedoc-Roussillon devait participer au projet à la même hauteur que le ministère ; le département du Gard devait, quant à lui, contribuer à hauteur de 200 000 euros ; le Fonds européen de développement régional, enfin, devait compléter ce plan de financement, avec 150 000 euros.

Malheureusement, le centre hospitalier a fait savoir qu’il ne souhaitait pas persister dans son rôle de porteur du projet, pour des raisons liées aux tensions financières qu’il connaît actuellement, notamment en matière d’investissements. Il a néanmoins fait connaître son souhait de demeurer associé à ce projet. C’est la raison pour laquelle il propose de mettre gratuitement des locaux à disposition.

De ce fait, et faute de pouvoir identifier à ce jour un autre porteur du projet d’installation du CDC au sein de l’hôpital, sa faisabilité n’a pas pu être confirmée en 2013. Compte tenu néanmoins de la qualité du travail réalisé par l’association sur l’ensemble du territoire, la direction régionale des affaires culturelles de Languedoc-Roussillon, en lien avec le centre chorégraphique et les partenaires publics du projet, recherche actuellement d’autres lieux d’implantation possibles, afin que cette structure puisse développer, avec les autres structures du réseau des centres de développement chorégraphique, ses missions chorégraphiques à destination de tous les publics de la région.

Réforme des maisons départementales des personnes handicapées

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Guégot, pour exposer sa question, n° 210, relative à la réforme des maisons départementales des personnes handicapées.

Mme Françoise Guégot. Ma question s’adresse à Mme la ministre déléguée auprès de la ministre des affaires sociales et de la santé, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion. Elle porte sur les conséquences du projet de loi sur la décentralisation pour les personnes handicapées.

La loi du 11 février 2005 a créé les maisons départementales des personnes handicapées, qui, sous la tutelle administrative et financière des conseils généraux, devenaient le guichet unique regroupant l’ensemble des structures d’orientation et d’aide aux personnes handicapées.

Chaque MDPH est aujourd’hui gérée par une commission exécutive, à laquelle peuvent se joindre des citoyens concernés par le handicap. Or votre projet de loi envisage de supprimer les commissions exécutives, et donc la possibilité pour ces personnes de participer à la mise en place des dispositifs publics qui les concernent.

Depuis 2005, les dossiers individuels sont préparés par des équipes pluridisciplinaires, indépendantes du conseil général. Votre projet de loi va remplacer les équipes pluridisciplinaires par une « évaluation pluridisciplinaire » des besoins des personnes handicapées. Sans l’indépendance des équipes, les évaluations peuvent alors dépendre des ressources du département, ce qui risque de créer de fortes inégalités entre les handicapés des différents territoires.

Sur la forme, les associations concernées, acteurs indispensables du monde du handicap, notamment dans mon département, regrettent ces orientations et le manque de concertation en amont de ce projet de loi. En effet, elles ont besoin, comme les professionnels concernés, que leur soient donnés les moyens d’agir concrètement.

Pouvez-vous donc répondre à leurs questions, notamment sur le financement de la prestation de compensation du handicap au titre de la solidarité ?

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la députée Françoise Guégot, Mme Carlotti, qui ne peut malheureusement être présente parmi nous ce matin et m’a demandé de vous répondre en son nom, ce que je fais volontiers.

La participation des personnes handicapées à la gestion des MDPH, comme l’évaluation individualisée, indépendante et pluridisciplinaire sont des principes auxquels nous sommes particulièrement attachés. Elles constituent un pilier de l’engagement du Président de la République pour l’inclusion pleine et entière des personnes en situation de handicap, conformément aux objectifs de la loi du 11 février 2005.

Dans le droit fil des orientations fixées par le Président de la République, plusieurs voies ont été explorées pour clarifier le partage des rôles entre l’État et les conseils généraux dans le domaine du handicap. Parmi ces sujets, figuraient effectivement les MDPH, dont la responsabilité pleine et entière devait être confiée au département, ce changement de statut étant accompagné des garanties nécessaires à la participation des personnes handicapées au fonctionnement des MDPH et au maintien des équipes pluridisciplinaires ; les commissions départementales des droits et de l’autonomie auraient naturellement été maintenues.

Toutefois, ce projet a suscité l’inquiétude des associations de personnes handicapées, avec lesquelles le ministère et Mme Carlotti ont donc engagé de nombreux échanges. Suite à cette concertation, le Gouvernement a décidé de maintenir le statut du groupement d’intérêt public des MDPH. C’est dans ce cadre qu’il nous faut maintenant réfléchir à une amélioration de leur fonctionnement, ainsi qu’à l’équité territoriale.

Vous évoquez enfin le financement de la prestation de compensation du handicap ; c’est une question examinée par le groupe de travail État-départements, mis en place le 28 janvier dernier par le Premier ministre. Il s’agit d’établir un diagnostic partagé et de trouver des solutions pérennes de financement, dans un cadre maîtrisé, pour les trois allocations individuelles de solidarité décentralisées, la PCH, l’APA et le RSA. Le Gouvernement tiendra naturellement la représentation nationale informée des conclusions de ces travaux.

Mise en œuvre du projet de refondation de l’école

Mme la présidente. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour exposer sa question, n° 192, relative à la mise en œuvre du projet de refondation de l’école.

M. Stéphane Saint-André. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale et porte sur trois points.

La laïcité est un pilier de notre République. Elle a prouvé son efficacité. C’est une conception, une idée non négociable de la République. Pourtant, nombreux sont ceux qui ont cherché à l’aménager, voire à l’affaiblir volontairement. Ces dernières années, les budgets de l’éducation nationale ont ainsi fait la part belle à l’enseignement privé. Aussi, souhaiterais-je savoir quels rééquilibrages sont prévus.

J’approuve par ailleurs la réforme des rythmes scolaires, sauf sur un point, car elle prévoit que les écoles privées, comme les écoles publiques, seront éligibles aux mêmes dotations de 50 euros par élève, majorée de 45 euros dans le cadre d’une application rapide. Cela constitue une violation manifeste de l’article L. 212-8 du code de l’éducation, qui limite les dépenses obligatoires des communes envers les écoles privées aux dépenses de fonctionnement, à l’exclusion des activités périscolaires.

Enfin, j’évoquerai une question territoriale. Le classement ministériel considère depuis de nombreuses années que le département du Pas-de-Calais est un département urbain homogène. C’est faux. En effet, le Pas-de-Calais compte près de neuf cents communes pour 1,5 million d’habitants. Il est en fait composé, outre quelques zones urbaines, d’une majorité de communes rurales. Pour mémoire, ce département compte 158 regroupements pédagogiques intercommunaux. Il semble que les dotations de l’État soient plus faibles à cause de ce classement, qu’il convient donc de rectifier. Ces dernières années, en effet, notre académie a subi de plein fouet les réductions de poste à outrance et se trouve bien peu servie en dotations nouvelles.

Monsieur le ministre, pouvez-vous donc nous apporter réponses et éclaircissements sur ces sujets ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député Stéphane Saint-André, je me fais ici porte-parole de M. Vincent Peillon, qui m’a prié de bien vouloir l’excuser et de répondre à sa place.

Vous interpellez le ministre de l’éducation nationale sur trois points qui sont au cœur du projet de loi de refondation de l’école.

Tout d’abord, la laïcité en tant que pilier de notre République. La République et la laïcité sont deux notions indissociables, comme l’ont rappelé les débats qui se sont déroulés il y a quelques jours dans cet hémicycle. La laïcité porte une exigence : celle d’un individu libéré des obscurantismes, habité par l’esprit critique et la raison. Former ce citoyen éclairé, c’est la grande mission de l’école. Vincent Peillon a d’ailleurs confié en octobre dernier à Mme Loeffel, M. Bergounioux et M. Schwartz une mission sur cette question, qui reste au cœur des préoccupations du Gouvernement.

Il incombe donc à l’école de transmettre des savoirs, des savoir-vivre et des savoir-faire, et de faire vivre nos valeurs, tout en s’assurant du bien-être et de l’épanouissement des élèves. C’est guidé par la seule préoccupation de l’intérêt de nos enfants, que Vincent Peillon a souhaité un nouvel aménagement des rythmes scolaires.

Des moyens financiers ont été dégagés pour que toutes les communes, sans distinction, puissent se voir allouer une dotation de 50 euros par élève, dès lors qu’elles mettront en œuvre les nouveaux rythmes scolaires à la rentrée 2013. Les communes urbaines et rurales les plus en difficulté bénéficieront, pour leur part, de 40 euros supplémentaires par élève, soit 90 euros, puis 45 euros par élève.

Nous ne souhaitons pas opposer l’enseignement public et l’enseignement privé sous contrat, qui concourent ensemble au service public de l’éducation. Nous sommes ainsi fidèles à une décision de janvier 1994 du Conseil constitutionnel, qui autorise expressément une aide des collectivités publiques aux établissements qui assument des missions conformes aux principes constitutionnels.

Le projet de loi s’est enrichi, dans son article 47 relatif au fonds pour les activités périscolaires, d’un amendement qui précise que « les aides versées au titre du présent fonds pour les élèves des écoles maternelles et élémentaires publiques ne sont pas prises en compte dans le calcul des dépenses de fonctionnement des classes sous contrat visées à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 442-5 du code de l’éducation ». C’est une précision importante, qui répond aux préoccupations des élus locaux.

Enfin, à propos de la situation plus particulière de votre département, à laquelle je suis bien évidemment très sensible, le classement, établi par la direction générale de l’enseignement scolaire, prend en compte, pour établir la typologie des académies, des critères relatifs à la difficulté sociale, au degré de ruralité du territoire, à la densité de population des deux à seize ans, à la proportion enfin de la population en zone rurale isolée.

Vous rappelez que votre académie a été classée dans la catégorie « urbain homogène ». Quoi qu’il en soit, les fortes difficultés sociales que connaît votre département ont conduit le Gouvernement à mobiliser des moyens exceptionnels dès 2012, et ce malgré un environnement financier contraint.

Dans le premier degré, dès la rentrée 2012, 30 postes de professeurs des écoles et 8 postes de conseillers principaux d’éducation ont été créés dans l’académie de Lille. Pour le département du Pas-de-Calais, cela représente 12 professeurs d’école et 3 CPE. À la rentrée 2013, 130 postes équivalents temps plein vont être créés dans le premier degré dans l’académie de Lille, dont 20 pour le département du Pas-de-Calais dans l’enseignement primaire, améliorant ainsi sensiblement le taux d’encadrement.

Dans l’enseignement secondaire, 122 postes seront créés à la prochaine rentrée dans l’académie de Lille, dont 30 pour les collèges et 92 pour les lycées généraux et professionnels. Là encore, les ratios d’encadrement s’améliorent. Ce département en avait bien besoin, et vous avez raison de l’avoir rappelé ici.

Financement des travaux de prévention des risques technologiques

Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Dumont, pour exposer sa question, n° 199, relative au financement des travaux de prévention des risques technologiques.

Mme Laurence Dumont. Madame la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, les plans de prévention des risques technologiques, les fameux PPRT, issus de la loi du 30 juillet 2003, contribuent à la sauvegarde des personnes et des biens.

Les zonages mis en place au regard des risques générés par la structure industrielle concernée imposent des mesures de sécurité plus ou moins contraignantes pour les communes et pour les riverains. Dans les zones où l’aléa est le moins important, des travaux de renforcement sur les habitations existantes sont accompagnés d’aides financières, selon un dispositif qui repose en partie sur un financement tripartite : collectivités locales, exploitants des structures industrielles et État.

La loi de finances pour 2013 a d’ailleurs amélioré l’aide fiscale en faveur des contribuables confrontés à la réalisation de travaux prescrits par un PPRT, en portant à 40 % le taux de crédit d’impôt.

En revanche, des travaux d’aménagement et de mise en sécurité d’un site industriel menés par son exploitant, en amont de la démarche d’élaboration du PPRT, afin de parvenir au risque le plus faible, n’ouvrent pas droit à un mode de financement équivalent. La réduction du risque à la source permettrait pourtant de diminuer le périmètre des zonages des PPRT et d’en exclure certaines parties de territoires qui pourraient être impactées sans ces travaux dits « complémentaires ».

Le coût de ces travaux préventifs n’est pas disproportionné par rapport aux bénéfices attendus. Il permettrait, grâce à un zonage moins étendu, de redonner aux collectivités la maîtrise de leur foncier, tout en évitant à nombre de riverains d’engager des travaux souvent coûteux.

Aussi, tout en veillant à ce que soit maintenu le principe cardinal selon lequel l’exploitant doit apporter une contribution financière majoritaire, un dispositif d’aides tripartites pourrait-il être envisagé pour des travaux permettant de réduire le risque à la source ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Madame la députée, en ce qui concerne les plans de prévention des risques technologiques et leur financement, je rappelle que, sur 407 PPRT à réaliser, seulement 225 ont été approuvés. L’accident survenu récemment à l’usine Lubrizol de Rouen a mis en lumière la nécessité de se prémunir contre les risques technologiques.

Avant même cet événement, j’avais porté les crédits de l’État de 33,6 millions d’euros en 2012 à 44,6 millions d’euros en 2013, soit une augmentation d’un tiers. Dans le cadre de la loi de finances pour 2013 – vous l’avez rappelé –, le Gouvernement a également porté le plafond du crédit d’impôt pour ces dépenses de 30 à 40 % et a proposé de fixer la clef de répartition entre la part de l’État, celle des collectivités territoriales et celles des industriels. Toutefois, cette seconde disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel pour des raisons de forme. Le Gouvernement souhaite donc la reprendre en l’insérant au projet de loi sur l’urbanisme qui sera présenté prochainement. C’est un point important, puisque cette mesure doit permettre d’atteindre un taux de financement des travaux de 90 %.

J’ai, par ailleurs, annoncé dernièrement un plan de mobilisation pour faire aboutir rapidement la majorité des PPRT – avant la fin de l’année 2013 – et rattraper ainsi le retard qui a été pris.

Concernant plus précisément votre question, madame Dumont, ce sont aujourd’hui les mesures « supplémentaires » qui peuvent faire l’objet de ce financement tripartite. En revanche, la directive Seveso 2 du 9 décembre 1996 impose que les mesures de réduction à la source, dans l’ensemble de l’Union européenne, soient prises en charge par les seuls exploitants. Le cadre européen interdisant toute forme de subvention, la mesure que vous évoquez mettrait la France en infraction par rapport au droit européen des aides.

Toutefois, rien ne s’oppose à ce que les acteurs locaux apportent au cas par cas un soutien aux entrepreneurs voisins qui pourraient en avoir besoin, dans la mesure où, comme vous l’avez dit, des mesures bien menées de réduction à la source peuvent permettre de réaliser ensuite des économies sur les travaux de protection dans le périmètre du site industriel.

Mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Odile Bouillé, pour exposer sa question, n° 193, relative à la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques.

Mme Marie-Odile Bouillé. Madame la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, les plans de prévention des risques technologiques mis en œuvre dans le cadre de la loi Bachelot du 30 juillet 2003 permettent d’agir sur la coexistence peu souhaitable des sites à hauts risques et de leur environnement en résorbant les situations difficiles héritées du passé et en limitant l’urbanisation future.

Mais, pour ceux qui ne sont pas encore prescrits – deux dans ma circonscription –, les rapports entre les services de l’État et les riverains sont pour le moins tendus en raison de l’incompréhension des périmètres, des incidences financières et des prescriptions adressées aux industriels, que les riverains jugent parfois insuffisantes pour réduire les risques à la source. C’est encore plus flagrant pour les propriétaires ayant acquis leur bien avant l’implantation même de ces usines à risques, car ils ont l’impression d’être aujourd’hui les dindons de la farce, si je puis m’exprimer ainsi, en devant supporter une situation qu’ils n’ont aucunement générée.

Des associations d’habitants, comprenant parfois en leur sein d’anciens professionnels de la sécurité de ces entreprises à risques, formulent des propositions pour aménager la loi afin d’avoir une approche moins dogmatique des instructions qui en découlent. Elles souhaitent prendre le temps de la réflexion et vous demandent un moratoire. Je voudrais donc savoir si vous êtes favorable à une remise à plat de la loi Bachelot et, si tel est le cas, si vous êtes prête à promouvoir un tel moratoire.

Si elle n’est pas centrale, la question du financement reste incontournable. Engager des sommes importantes pour renforcer les bâtis ne résoudra pas le problème si les gens se trouvent dans leur jardin ou dans la rue en cas d’accident. Les travaux engagés, parfois coûteux pour des familles modestes, n’auront servi à rien.

Quels engagements pouvez-vous prendre, madame la ministre, pour réduire à zéro le reste à charge des riverains pour le financement des audits de bâtis et des travaux ?

Enfin, j’appelle votre attention sur l’application administrative de la réglementation par les DREAL – les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement – qui ne prend pas suffisamment en compte les situations personnelles, parfois extrêmement difficiles, vécues par des habitants dont certains sont très fragiles et démunis et se trouvent à quelques mètres seulement de la limite du périmètre. N’y aurait-il pas intérêt à laisser une marge d’appréciation aux préfets dans la résolution de ces situations mineures afin d’avoir une approche plus humaine de l’application des PPRT ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Madame la députée, s’agissant du reste à charge, c’est précisément en raison des situations que vous évoquez que nous avons décidé de relever le plafond du financement par l’État et que nous cherchons à mobiliser, en particulier au bénéfice des habitants les plus modestes, des dispositifs de droit commun qui permettraient d’éviter un tel reste à charge pour toute une catégorie d’habitants modestes.

Ainsi, hier, j’ai rencontré la directrice de l’ANAH – l’Agence nationale de l’habitat – pour étudier la manière dont nous pourrions mobiliser le programme « Habiter mieux » relatif aux travaux d’isolation, qui relèvent des mêmes techniques que ceux qui sont nécessaires dans les périmètres de protection.

Quant à la concertation, elle est l’objectif des commissions de suivi. Il est en effet très important que les démarches soient bien comprises localement, que les risques soient expliqués et que l’information à la population ainsi que la concertation locale soient le plus approfondies possible dans le cadre de l’élaboration des PPRT.

Toutefois, dans un certain nombre de situations, un consensus n’a pu être trouvé au terme de longues procédures de concertation. Dans ces cas, il revient à l’État d’assumer sa responsabilité de prévention des risques technologiques malgré certains blocages, car il est de sa responsabilité d’assurer la sécurité des personnes et des biens.

Par ailleurs, je ne suis pas favorable à un moratoire sur les PPRT, mais je suis ouverte à une amélioration de la législation. C’est le travail que fait, sous la houlette de son président, le député Yves Blein, l’association Amaris, qui regroupe les collectivités concernées par ces problèmes. En tout état de cause, un moratoire serait perçu comme un signal de relâchement de l’État, alors que les chiffres que j’ai donnés en réponse à Mme Dumont montrent qu’il convient, au contraire, d’accélérer et de renforcer les mesures de prévention des risques technologiques.

Accès aux emplois d’avenir dans les zones rurales

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Chauvel, pour exposer sa question, n° 200, relative à l’accès aux emplois d’avenir dans les zones rurales.

Mme Dominique Chauvel. Monsieur le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, l’emploi, et notamment l’emploi des jeunes, est une priorité nationale.

Divers outils ont déjà été mis en place, tels que les emplois d’avenir : de leur succès dépendra en partie notre capacité à inverser la courbe du chômage et, avant tout, à rendre espoir à toute une génération, dont l’entrée sur le marché du travail relève davantage aujourd’hui du parcours du combattant que du tremplin vers l’autonomie et l’âge adulte.

Élue d’une circonscription comptant treize cantons et 233 communes, je rencontre bon nombre de maires, de présidents d’intercommunalités et de responsables associatifs de secteurs ruraux. J’ai pu constater que des possibilités d’embauche existent en zone rurale. Cependant, ces employeurs potentiels se heurtent aux critères trop restrictifs et peu adaptés à leur territoire que doit remplir un jeune demandeur d’emploi pour pouvoir bénéficier d’un tel contrat.

En effet, la restriction du critère de recherche d’emploi « pendant au moins douze mois au cours des dix-huit derniers mois » aux seules zones urbaines sensibles et zones de revitalisation rurale exclut de facto des milliers de jeunes qui, bien que cumulant des problèmes liés à la mobilité et à un faible niveau d’études post-bac et confrontés à un marché du travail restreint sur leurs zones d’habitat, ne peuvent prétendre aux contrats d’avenir.

Outre qu’elle est source d’incompréhension et de frustration – les jeunes concernés ont le sentiment de « ne jamais rentrer dans les bonnes cases » –, cette restriction géographique est contre-productive : dans certains secteurs, les emplois existent, mais ne peuvent être pourvus.

Dès lors, j’aimerais savoir s’il serait possible d’étendre le critère géographique à toutes les zones rurales pour les jeunes demandeurs d’emploi en recherche depuis au moins douze mois pendant les dix-huit derniers mois et titulaires du baccalauréat ou ayant le niveau baccalauréat.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

M. Michel Sapin, ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. Madame la députée, nous sommes tous mobilisés pour la réussite des emplois d’avenir.

Le constat qu’ont fait le Gouvernement et le Parlement, notamment la majorité, c’est qu’il n’est plus supportable qu’autant de jeunes – 500 000 – n’aient ni emploi ni formation ni qualification. C’est donc à ces jeunes que s’adressent en priorité les emplois d’avenir.

Nous devons consentir un effort particulier en faveur de ces catégories, qui sont particulièrement concentrées dans certaines parties du territoire, que ce soit dans des zones très urbaines ou dans des zones très rurales, où ces jeunes sont, certes, moins nombreux, mais où leur nombre peut être proportionnellement très important. Si nous ne ciblons pas ces jeunes-là, ils resteront toujours au bord du chemin. Tel est l’état d’esprit qui a présidé à la création des emplois d’avenir. C’est le cœur du sujet qui nous préoccupe : il faut s’attaquer au chômage des jeunes qui sont dans la plus grande détresse.

Songez que, parmi les jeunes qui cherchent du travail, 46 % de ceux qui n’ont pas de diplôme et qui n’ont pas le niveau baccalauréat sont au chômage, contre 9 % de ceux qui ont un diplôme supérieur à la licence. Je ne dis pas qu’il ne faut pas se préoccuper de ces derniers, mais, dans la situation actuelle, il faut donner la priorité aux 46 % de jeunes au chômage sans diplôme. C’est là que nous allons faire porter l’effort, et cet effort doit être fait par tous.

Comme vous, madame la députée, je rencontre des responsables municipaux, des maires ou des responsables d’associations qui me disent que si ces jeunes étaient un peu plus qualifiés, ils pourraient leur offrir une place. Madame Chauvel, je vous demande de partager notre conviction, en participant à l’effort d’accompagnement et de formation. Car, parmi ceux qui cherchent un travail et qui n’ont pas de formation, beaucoup ont énormément de talent et vont pouvoir réussir grâce aux emplois d’avenir et à l’accompagnement que leur offriront les communes, les départements ou les associations.

Je suis sensible à vos remarques, madame la députée. Dans mon propre département, qui est très rural, j’entends ce type d’interrogations. Mais, à chaque fois, je recommande d’aider d’abord les jeunes qui sont le plus dans la détresse. Dans un an, nous ferons le bilan prévu par la loi pour voir où nous en sommes exactement en la matière. C’est au vu de ce bilan que le législateur – car les dispositions auxquelles vous faites allusion relèvent de la loi – pourra éventuellement faire évoluer le dispositif.

Madame la députée, nous avons vraiment besoin de cet effort collectif. Nous n’avons pas le droit de laisser autant de jeunes au bord du chemin.

Adaptation des dispositifs de gestion des risques d’inondation en Île-de-France

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour exposer sa question, n° 207, relative à l’adaptation des dispositifs de gestion des risques d’inondation en Île-de-France.

M. Arnaud Richard. Monsieur le ministre délégué chargé de la ville, je vous remercie de bien vouloir répondre à ma question au nom de votre collègue Cécile Duflot.

De la loi SRU à la loi sur le Grand Paris, les documents qui s’imposent hiérarchiquement au PLU tendent à limiter l’étalement urbain afin de contenir la consommation d’espaces agricoles. Pour autant, une étude du ministère de l’agriculture de juillet 2010 indique qu’en surfaces agricoles et naturelles, il disparaît en France l’équivalent de la surface d’un département moyen tous les sept ans.

Or la territorialisation des objectifs de logement, dans le cadre d’un contrat de développement territorial, par exemple celui de la Seine Aval et de la confluence, prévoit une densité minimum de construction de logements à l’hectare.

Si nous voulons remplir les engagements de construction en Île-de-France tout en respectant les surfaces agricoles et l’ensemble des servitudes d’urbanisme, se posent trois questions de fond.

Première question, qui vaut notamment pour la Seine Aval, que ce soit à Triel-sur-Seine, à Conflans-Sainte-Honorine ou à Verneuil-sur-Seine : ne faut-il pas une révision générale de l’ensemble des plans de prévention des risques d’inondation et une mise en cohérence de ces plans au niveau francilien ?

Deuxième question : ne croyez-vous pas qu’il faille une accélération de l’élaboration des plans de gestion des risques d’inondation, dans le souci de ne pas empêcher la mise en œuvre d’un certain nombre de projets ?

La troisième question peut sembler anecdotique, mais elle se pose depuis longtemps : ne pensez-vous pas qu’il faille, tout en pérennisant l’action des services publics en matière de digues, rénover le cadre fixé par une loi de 1807, qui révisait elle-même une ordonnance de Colbert ?

Voilà les questions que je souhaitais poser au Gouvernement sur les problématiques des zones inondables.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville.

M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Je vous prie, monsieur le député Richard, d’excuser Cécile Duflot au nom de laquelle je m’efforcerai de répondre à votre question.

Le constat d’une consommation excessive des terres agricoles et naturelles à la faveur d’un étalement urbain non maîtrisé fait l’unanimité. Cependant, les politiques mises en œuvre jusqu’à présent ont échoué à empêcher la disparition de l’équivalent d’un département tous les sept ans. Le projet de loi sur l’urbanisme et le logement que Cécile Duflot vous soumettra cette année permettra de freiner l’artificialisation nette des sols et la consommation d’espaces agricoles et naturels à l’échelle nationale, comme le Gouvernement s’y est engagé. Compte tenu des besoins de construction de logements, la maîtrise de l’artificialisation des terres doit être articulée avec les politiques d’urbanisme et avec un effort de densification urbaine et d’optimisation du foncier, en particulier dans les zones d’activités.

Maîtriser l’artificialisation des sols n’est pas contradictoire avec l’impératif de construction, à condition de mener les bonnes politiques d’aménagement durable. Il faut faire preuve d’imagination et d’innovation pour concilier efficacement ces deux impératifs, d’autant plus qu’une partie du territoire est soumise au risque d’inondation. Tel est le cas de l’Île-de-France : à l’heure actuelle, 900 000 Franciliens environ devraient être évacués et relogés en cas de crue centennale et 141 communes sont exposées aux inondations de la Seine et de ses affluents.

La politique de gestion des risques d’inondation en Île-de-France vise à prendre en compte tant le risque d’inondation que les dynamiques territoriales grâce aux outils déjà disponibles, en particulier le plan de prévention des risques, les dispositifs de gestion de crise, les actions de réduction de la vulnérabilité et l’amélioration des performances des ouvrages hydrauliques. Les berges de Seine en aval de Paris comptent de nombreuses digues dont la fonctionnalité, la cohérence, l’autorité de gestion et l’état réel ne sont pas clairs. Nous avons donc un programme de travail sur plusieurs années pour en achever le recensement, les classer et leur appliquer les prescriptions. Le plan de gestion des risques d’inondation, qui sera élaboré pour le bassin Seine-Normandie au plus tard le 22 décembre 2015, améliorera encore l’articulation des outils de gestion des risques d’inondation afin de rendre le développement du Grand Paris respectueux des contraintes naturelles mais aussi des potentialités de son territoire.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Merci de votre réponse, monsieur le ministre ; vous vous en tenez à l’état actuel du droit. Les textes que nous proposera Mme Duflot pourront peut-être faire évoluer les choses, car je ne pense pasque le droit tel qu’il est aujourd’hui permette de mettre en œuvre l’ensemble des programmes prévus dans le cadre du grand Paris.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix heures cinquante, est reprise à dix heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Financement des grands équipements sportifs

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin, pour exposer sa question, n° 221, relative au financement des grands équipements sportifs.

M. Gérald Darmanin. Ma question, monsieur le ministre, porte sur la politique de financement des grands équipements et événements sportifs.

Le gouvernement précédent a obtenu l’organisation de nombreuses compétitions internationales : championnat du monde de patinage artistique en 2012, jeux de la francophonie en 2013, jeux équestres mondiaux en 2014, Euro de football en 2016, championnat du monde de handball masculin en 2017, Ryder Cup de golf en 2018 et bien d’autres. L’organisation de telles compétitions, comme vous le savez, participe au rayonnement international de la France et génère des retombées économiques significatives, notamment pour le développement du sport pour tous via les droits de retransmission. Il en résulte également que de nombreux jeunes, inspirés par les exploits de nos sportifs, ont davantage envie de s’inscrire en club. On remarque en effet, à chaque grande aventure de l’équipe de France, en particulier sur notre territoire, une augmentation du nombre de licenciés dans les disciplines ainsi médiatisées.

Le Gouvernement ayant notifié à la Commission européenne les financements d’État pour la modernisation des stades de l’Euro 2016, pouvez-vous nous dire quand celle-ci rendra sa décision ? Quelles seront les conséquences si elle déclare que les financements publics sont des aides d’État ? Plus généralement, pouvez-vous nous donner la position officielle du Gouvernement sur le financement des grands équipements et événements sportifs, dès lors que vous en avez exclu le CNDS pour l’essentiel ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre déléguéchargé de la ville.

M. François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Je vous prie, monsieur le député Darmanin, d’excuser la ministre Valérie Fourneyron, retenue au conseil d’administration du centre national pour le développement du sport, établissement qu’elle a malheureusement trouvé dans une situation de quasi-faillite. En effet, si aucune mesure n’avait été prise, sa dette aurait atteint près de 500 millions d’euros fin 2012. Quant aux stades de l’Euro 2016, le gouvernement précédent a promis 160 millions d’euros mais n’en a hélas budgété que 120. Ma collègue Valérie Fourneyron a trouvé à son arrivée un dossier loin d’être bouclé, de nombreuses incertitudes pesant sur plusieurs projets.

Vous savez que les aides du CNDS doivent être notifiées à la Commission européenne dans le cadre de la réglementation relative aux aides d’État. La Commission nous a invités à présenter un dispositif global. Valérie Fourneyron y travaille d’arrache-pied depuis plusieurs semaines. Contrairement à ce que vous indiquez, monsieur le député, la notification formelle n’a pas encore eu lieu. Nous sommes actuellement en phase d’échanges techniques avec Bruxelles. Tous les dossiers, dont ceux de Lens et de Lyon, seront examinés en fonction de leur maturité et de la fiabilité de leur montage juridique et financier. La Commission sera alors libre d’exiger des informations complémentaires ou de considérer les financements publics comme relevant d’aides d’État jugées compatibles le cas échéant.

Par ailleurs, à l’exception des jeux de la francophonie, ce n’est pas le gouvernement précédent qui a obtenu l’organisation des compétitions que vous avez évoquées mais les fédérations sportives, qui se sont investies et ont porté le dossier de candidature. Nous nous réjouissons que la fédération française de canoë-kayak et son ambassadeur, notre triple champion olympique Tony Estanguet, aient ainsi obtenu l’organisation des championnats du monde de 2017.

Enfin, vous semblez croire que la simple organisation d’une compétition internationale contribue au financement du sport pour tous. Ce n’est malheureusement pas la réalité. Les 110 millions d’euros de droits de retransmission de l’Euro 2016 ne sont pas concernés à ce jour par la taxe Buffet. Le Gouvernement s’attaquera à ce problème et plus largement à celui de la solidarité entre sport professionnel et sport amateur dans le cadre de la modernisation de l’action publique. Pour l’État, la lutte contre les inégalités d’accès à la pratique sportive est une priorité. C’est la feuille de route du CNDS après les dérives dues à la précédente majorité.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. À propos des 160 millions d’euros, la ministre doit faire erreur, car Nancy n’a pas été retenu et le gouvernement précédent avait suspendu les 10 millions d’euros prévus pour le Parc des Princes. En outre, Nicolas Sarkozy avait prévu un prélèvement spécifique au bénéfice du sport pour tous. Je note que le Gouvernement ne répond pas à ma question et ne dit pas comment il compte financer la construction des stades pour la compétition de l’Euro 2016 si les aides sont qualifiées d’aides d’État par la Commission européenne.

Hausse du taux de TVA applicable à la collecte et au traitement des déchets

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Lazaro, pour exposer sa question, n° 208, relative à la hausse du taux de TVA applicable à la collecte et au traitement des déchets.

M. Thierry Lazaro. Je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur les difficultés que rencontrent les syndicats intercommunaux qui ont passé des marchés de prestation de service avec des entreprises privées pour permettre la collecte et le traitement des déchets.

Les prestations sont soumises au taux réduit de TVA qui, le 1er janvier, est passé de 5,5 à 7 %. Cette hausse, qui représente 100 millions d’euros, n’est pas neutre pour nos collectivités et, en premier lieu, pour les contribuables.

Dans le cadre du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, il est prévu qu’au 1er janvier prochain le taux réduit de TVA augmente encore pour passer à 10 %, entraînant cette fois-ci une hausse de 200 millions d’euros. Seul le taux de TVA applicable aux services et produits de première nécessité sera réduit à 5 %.

Cette hausse de la fiscalité sur le service public des déchets coûtera donc cher aux collectivités. Elles devront immanquablement la répercuter sur les contribuables, qui subiront une forte hausse de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

Dans la « classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé », adoptée par l’assemblée générale de l’Organisation mondiale de la santé en mai 2001 et ratifiée par la France le 18 février 2010, les services de première nécessité sont décrits comme étant les « services et programmes, y compris ceux qui s’en occupent, fournissant à l’ensemble de la population l’énergie, les systèmes d’assainissement, l’eau et autres services essentiels pour les consommateurs des zones résidentielles et commerciales ».

Je rappelle que la compétence de la collecte et de l’élimination des déchets a été transférée aux collectivités locales dans le cadre de la loi du 15 juillet 1975, au titre de la salubrité publique. Ainsi cette responsabilité est-elle nécessaire pour éviter tout effet nocif sur « le sol, la flore et la faune, dégrader les sites ou les paysages, polluer l’air ou les eaux, engendrer des bruits et des odeurs et d’une façon générale, porter atteinte à la santé de l’homme et à l’environnement ».

Pour des raisons écologiques et économiques, mais aussi pédagogiques, maintenir un taux réduit de TVA pour les prestations de collecte, de tri et de traitement des déchets, en tant que services de première nécessité, me paraît participer de l’impératif de justice fiscale dont nous sommes redevables envers nos concitoyens.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation

M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. Je vous prie de bien vouloir excuser Jérôme Cahuzac.

Vous avez fait part, monsieur le député, des inquiétudes des syndicats intercommunaux ayant conclu des contrats avec des entreprises privées pour la collecte et le traitement des déchets quant à l’augmentation du taux de TVA de 7 à 10 % à compter du 1er janvier 2014.

Je veux d’abord vous rappeler que la mesure qui vise à porter le taux normal de TVA de 19,6 % à 20 % et le taux intermédiaire de 7 à 10 % vise, notamment, à financer le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – le CICE –, lequel concernera évidemment les entreprises de collecte et de traitement des déchets. Il convient donc de mettre en regard les répercussions éventuelles de la hausse du taux de TVA avec les économies qui seront réalisées par ces mêmes entreprises grâce au CICE.

Ainsi, le secteur de la production et de la distribution d’eau, de l’assainissement, des déchets et de la dépollution percevra-t-il en régime de croisière un volume de CICE d’environ 230 millions d’euros chaque année, tandis que le supplément de TVA pesant sur les utilisateurs de ces services sera compris entre 50 et 100 millions d’euros.

Dès lors, si les prestataires de service répercutent le CICE dont ils bénéficient dans leurs prix de vente hors taxe – c’est la vocation d’une aide fiscale destinée à doper la compétitivité des entreprises –, le prix toutes taxes comprises facturé aux utilisateurs – en l’occurrence les syndicats intercommunaux – devrait baisser et non augmenter. Certes, cette baisse impliquera, dans certains cas, des renégociations contractuelles entre le donneur d’ordre et le prestataire de services.

Il en va ainsi du secteur des déchets comme de l’ensemble des autres secteurs économiques : le CICE – 20 milliards d’euros pour les entreprises – est beaucoup plus élevé que la hausse du taux de TVA – 6,4 milliards d’euros.

Par ailleurs, le Gouvernement a indiqué qu’il était ouvert à une réflexion sur le périmètre des taux de TVA, en y mettant toutefois un préalable : que celle-ci ne conduise pas à diminuer le rendement global requis pour financer le CICE. Tout transfert d’un secteur d’activité du taux intermédiaire vers le taux réduit requerra donc de proposer un financement équivalent.

Je tenais à vous rassurer sur ce point, monsieur le député : les syndicats intercommunaux sont légitimes à formuler des inquiétudes, mais eu égard à ce que sera le bénéfice du CICE pour les entreprises de collecte et de traitement des déchets et le coût d’augmentation de la TVA, la répercussion devrait être plutôt à la baisse.

M. le président. La parole est à M. Thierry Lazaro.

M. Thierry Lazaro. Je prends acte de cette réponse. Dans un secteur tel celui dont je suis le représentant, la première augmentation de TVA représentera 2 euros par habitant, tandis que la répercussion de la prochaine hausse est évaluée à environ 4 euros. J’ose espérer que votre analyse se vérifiera. Dans l’immédiat, autorisez-moi quelques réserves.

Mesures de lutte contre la désertification médicale

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Michel Villaumé, pour exposer sa question, n° 195, relative aux mesures de lutte contre la désertification médicale.

M. Jean-Michel Villaumé. Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, les déserts médicaux sont devenus source d’angoisse pour de très nombreux Français résidant dans les zones rurales mais aussi dans les quartiers de nos villes.

Dans le monde rural, beaucoup de cantons sont sans médecins et l’attente pour une consultation de spécialiste – en ORL, notamment – peut durer un an. Face à ce drame, nous constatons depuis des années que les incitations financières, hélas, ne suffisent pas. Une refondation du système de santé s’impose : les missions, comme les rémunérations et les conditions d’exercice, doivent être modernisées. Le pacte territoire-santé, que vous avez présenté au mois de décembre, est une avancée qui autorise des espoirs dans la lutte contre ce phénomène.

Le conseil général de Haute-Saône a présenté dernièrement un schéma départemental de l’offre de santé de proximité visant à prévenir la désertification médicale. La population vieillit, la moitié environ des médecins sont âgés de plus de 55 ans : dans les prochaines années, les départs à la retraite risquent de se multiplier et de nombreux concitoyens se retrouveront démunis face à une désertification accrue. La densité des médecins généralistes, de 96 pour 100 000 habitants, est bien inférieure à la densité moyenne nationale, qui est de 109 médecins généralistes pour 100 000 habitants.

Les collectivités territoriales se sont engagées dans la lutte contre ces déserts médicaux. Elles ont notamment investi dans l’ouverture de maisons de santé, afin de mutualiser les moyens. Ces politiques ne suffisent plus et l’État doit intervenir pour pallier l’absence de médecins dans les zones rurales particulièrement délaissées.

Dans ma circonscription, à Saint-Loup-sur-Semouse, une maison de santé doit ouvrir ses portes dans quelques mois. Trois médecins seulement pourront répondre à la demande des quelque 20 000 habitants de ce bassin de vie, où la densité de médecins généralistes est inférieure à 65 pour 100 000 habitants.

Dans les territoires, nous avons le sentiment que les mesures incitatives ne suffiront pas. Le rapport rendu dernièrement par la commission du développement durable du Sénat le confirme d’ailleurs. Nous pensons que des mesures plus coercitives devront être prises dans l’intérêt des territoires et de leurs habitants.

Madame la ministre, quelles mesures compte prendre le Gouvernement pour offrir aux Hauts-Saônois et à l’ensemble des Français une égalité réelle d’accès aux soins et à la santé ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, vous avez raison de souligner que la désertification médicale est un enjeu majeur et qu’il est absolument indispensable de garantir à l’ensemble de nos concitoyens, en Haute-Saône en particulier, la possibilité d’accéder à des professionnels de santé.

C’est la raison pour laquelle j’ai présenté au mois de décembre un plan qui repose sur un ensemble de mesures, dont l’efficacité dépendra de la mobilisation de tous les leviers dont nous disposons.

Vous faites allusion à la nécessité de recourir à des mesures non seulement incitatives mais coercitives, et vous faites référence à un rapport du Sénat, qui reprend dans ses préconisations la quasi-totalité des mesures que j’ai moi-même mises en avant.

Je voudrais faire part des doutes qui sont les miens quant à l’efficacité des mesures coercitives, qui ne concerneraient que les étudiants entamant cette année leur cursus, comme le préconisent le rapport sénatorial et la plupart des observateurs, et ne s’appliqueraient que dans dix ans. Elles seraient donc sans effet sur la situation actuelle, alors que nous avons besoin de faire évoluer l’offre médicale maintenant.

Le Gouvernement propose un plan qui s’articule autour de trois axes. Le premier consiste, grâce à un ensemble de mesures qui ne sont pas financières, à amener les étudiants à privilégier une installation future dans les territoires ruraux.

Le deuxième axe vise à transformer les conditions d’exercice. Ouvrir une maison de santé ne suffit pas, il faut encore faire en sorte qu’existent des coopérations entre professionnels et que les professionnels libéraux entretiennent des relations avec les hôpitaux de proximité ou les centres hospitalo-universitaires.

Là où aucune solution liée à la présence de médecins libéraux ne pourra être trouvée, il faudra réfléchir à la constitution de centres de santé employant des médecins salariés ; c’est le troisième axe.

Notre plan ne fonctionnera que si l’administration se mobilise pleinement – c’est le cas, aujourd’hui, des agences régionales de santé – et si nous sollicitons l’ensemble des leviers dont nous disposons. J’espère, monsieur le député, que grâce à l’engagement des collectivités territoriales – le conseil général de Haute-Saône particulièrement –, nous pourrons répondre aux attentes légitimes des Français.

Conséquences de la suppression du forfait annuel pour les bénéficiaires de l’aide médicale d’État.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert, pour exposer sa question, n° 218, relative aux conséquences de la suppression du forfait annuel pour les bénéficiaires de l’aide médicale d’État.

M. Julien Aubert. Depuis plusieurs mois, on constate un afflux sans précédent de ressortissants venus des pays d’Europe de l’Est, qui viennent se faire soigner gratuitement en France. En effet, une épidémie de tuberculose extra-résistante fait rage dans cette zone du continent. Alors que l’on constatait environ un cas de tuberculose par an entre 1992 et 2006 sur le territoire national, on en compte actuellement 54.

Outre le risque sanitaire important pour notre population, les problèmes de traitement liés à la différence de langue ou le manque de discipline de certains patients – un article du Figaro a révélé que certains, refusant d’être confinés, préféraient rejoindre les couloirs du métro – ces malades, couverts par l’aide médicale d’État, sont soignés gratuitement sur notre territoire.

Tchétchènes, Russes et Géorgiens viennent ainsi suivre des traitements lourds et coûteux : confinement en chambre à pression négative durant plusieurs mois, pose de drains pulmonaires, ablation des poumons. L’occupation d’une chambre d’hôpital coûte 1 050 euros par jour, sans compter les médicaments, les radiographies et les scanners.

Le problème serait tel qu’une cellule de crise interministérielle regroupant des agents de votre ministère, des affaires étrangères et de l’intérieur plancherait sur les façons de contrer cette nouvelle forme d’immigration.

Le Gouvernement ayant supprimé en août le forfait annuel de 30 euros par bénéficiaire de l’AME instauré par la précédente majorité, je souhaiterais savoir quelles sont les conséquences sanitaires et financières réelles pour notre pays de cette mesure. Je souhaiterais aussi vous demander comment le Gouvernement compte s’y prendre pour circonscrire cette épidémie ainsi que l’afflux de malades.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, la réforme de l’Aide médicale d’État menée par le précédent Gouvernement a eu des effets contreproductifs qui ont été soulignés par de multiples rapports. L’instauration d’un timbre ou d’un droit d’entrée dans le dispositif de l’AME s’est révélée à la fois inefficace et injuste. Inefficace, car l’objectif affiché de maîtrise de la dépense n’a pas été atteint. Injuste et problématique en termes de santé, car cette législation a induit des retards dans l’accès aux soins, ce qui a augmenté le coût des soins, plus lourds car plus tardifs.

Vous faites plus particulièrement allusion à l’enjeu que pose aujourd’hui l’arrivée ou l’existence de malades atteints de tuberculose. Il est exact que l’on enregistre environ 5 000 cas de tuberculose en France chaque année, dont 2 % sont des maladies multirésistantes. Sur ces 5 000 cas, on en a constaté 92 en 2012 en provenance du Caucase.

En raison du caractère contagieux de cette maladie et des impératifs évidents de protection collective, le traitement le plus en amont possible des personnes malades est de loin la stratégie la plus efficace. C’est pourquoi, un renforcement des modalités de prise en charge hospitalière en matière de traitement des formes résistantes de la tuberculose est d’ailleurs en cours de déploiement sur le territoire.

Parallèlement, la lutte contre la tuberculose appelle une action sur le plan international. La France est engagée dans cette bataille, en participant chaque année à hauteur de 360 millions d’euros au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme et à hauteur de 110 millions à UNITAID. Cela nous permet d’engager des efforts pour dépister et traiter les tuberculoses multirésistantes dans les pays d’Europe orientale et du Caucase, comme le note le rapport annuel de l’Organisation mondiale de la santé.

Vous le voyez, monsieur le député, notre mobilisation est forte et elle se déploie au niveau tant national qu’international. Grâce à elle, le nombre d’infections diminue chaque année.

Mme la présidente. La parole est à M. Julien Aubert.

M. Julien Aubert. Madame la ministre, l’article de presse en question mentionnait que tous les Géorgiens qui venaient sur notre territoire avaient pour point commun de posséder un téléphone portable. Par conséquent, s’ils sont capables de s’acheter un téléphone portable, ils peuvent payer un droit de timbre de 30 euros !

Lutte contre l’exclusion menée par les centres communaux d’action sociale

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marleix, pour exposer sa question, n° 209, relative à la lutte contre l’exclusion menée par les centres communaux d’action sociale.

M. Alain Marleix. Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, je souhaite appeler l’attention du Gouvernement sur la lutte contre l’exclusion menée par les CCAS, autrement dit par nos collectivités territoriales. Cette question intéresse aussi M. le ministre de l’intérieur.

Période hivernale oblige, les Restos du Cœur, le Secours catholique et les nombreuses autres associations caritatives ont été sous les feux de l’actualité, et ce d’autant plus que l’Europe a, hélas ! diminué les subsides accordés à l’aide alimentaire.

Ces associations et leurs bénévoles se dévouent quotidiennement pour venir en aide aux plus démunis. Des collectes alimentaires ont été organisées encore ces dernières semaines à travers toute la France. Il est indéniable qu’un hommage appuyé doit être adressé à toutes ces personnes qui apportent leur contribution à toutes celles et tous ceux qui souffrent financièrement et moralement.

Si ce bénévolat et l’œuvre de toutes ces associations caritatives doivent être salués comme il se doit, nous ne devons pas oublier, me semble-t-il, le rôle joué tous les ans quotidiennement, dans quasiment toutes les communes françaises, par les CCAS auprès des familles en difficulté et des plus démunis recensés sur leurs territoires.

Si les médias citent le plus souvent en exemple les associations caritatives les plus représentatives ou les plus médiatisées compte tenu de la présence de nombreux artistes dans la lutte constante contre l’exclusion, les CCAS constituent depuis très longtemps un des maillons incontournables de la chaîne mais dont on ne parle, hélas ! que très peu souvent. Cette action, qui apparaît presque souterraine, est néanmoins déterminante par son ampleur sur tout le territoire national.

Je vous demande de bien vouloir apporter des précisions sur l’action menée par ces organismes sociaux et par les quelque 650 000 conseillers municipaux que compte notre pays, qui se dévouent inlassablement. Pouvez-vous nous communiquer le montant alloué chaque année par les collectivités locales et les organismes sociaux à la lutte contre la pauvreté et la précarité ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, je vous remercie de votre question qui me donne l’occasion de saluer le travail remarquable des centres communaux et intercommunaux d’action sociale. Les élus locaux connaissent bien l’engagement des élus et des bénévoles.

Leur rôle dans la mise en œuvre des politiques de lutte contre l’exclusion et dans le travail de proximité qui doit être mené chaque jour au plus près de nos concitoyens est évidemment tout à fait essentiel.

L’action des CCAS et des CIAS mobilise au total 2,6 milliards d’euros de budget consolidé, ce qui est considérable.

Dans le champ de la lutte contre les exclusions, ces organismes ont su développer de nombreux outils. Ainsi, en matière d’aide alimentaire, ils proposent des aides financières, des bons alimentaires, des colis ou des chèques d’accompagnement personnalisé. Certains de ces centres gèrent parfois une épicerie ou un restaurant social.

Leur engagement en matière d’hébergement et de logement, de soutien à la gestion budgétaire, à l’insertion socioprofessionnelle est également important. Ils sont les principaux relais de proximité pour la mise en place des dispositifs légaux d’accompagnement professionnel, que ce soit dans le cadre du RSA ou de l’insertion par l’activité économique.

On a souvent tendance à réduire leur champ d’intervention à l’aide alimentaire ou à l’aide à l’accès au logement, mais il est plus large : accès à la culture et aux loisirs, accès aux droits, micro-crédit personnel, lutte contre l’illettrisme. Ils sont mobilisés sur tous ces fronts alors que ce sont des compétences facultatives, ce qui montre leur volonté de répondre aux difficultés concrètes de la population.

J’ajoute que plus du tiers de ces centres déclare compter dans ses équipes un ou plusieurs travailleurs sociaux. La plupart de ces centres est située dans des communes ou intercommunalités de moins de 10 000 habitants. Les centres jouent ainsi un rôle important en relation avec les conseils généraux mais aussi les autres associations et les caisses de sécurité sociale.

Les travaux préparatoires de la Conférence nationale contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale ont montré l’importance de cette action coordonnée. Le plan de lutte contre l’exclusion présenté par le Gouvernement le 21 janvier dernier a prévu une évaluation de leur rôle, mais en même temps la reconnaissance de leur rôle majeur sur nos territoires.

Classement de Maubeuge en zone de sécurité prioritaire

Mme la présidente. La parole est à M. Rémi Pauvros, pour exposer sa question, n° 198, relative au classement de Maubeuge en zone de sécurité prioritaire.

M. Rémi Pauvros. Monsieur le ministre de l’intérieur, je tiens à saluer l’intervention forte que vous avez engagée hier, non seulement dans le nord de la France mais également à Tournai, en Belgique, où vous avez conclu avec votre homologue belge un accord stratégique qui me concerne directement puisque je suis élu d’un territoire frontalier de 240 000 habitants situé dans l’axe direct de Paris à Bruxelles et où il y a beaucoup de passeurs, de trafics de stupéfiants.

Ces derniers temps, les services de la police, de gendarmerie et de la justice – auxquels je veux rendre hommage – ont enregistré une hausse de 45 % du nombre d’élucidations et d’arrestations. Ce nouvel état d’esprit est moins lié à une politique du chiffre qu’à une culture du résultat et à une coopération plus grande entre les services.

Depuis quelque temps, nous enregistrons par ailleurs une augmentation sensible des actes de violence, avec vol. Des procédés nouveaux sont utilisés comme le home jacking et le car jacking, qui ont d’importantes répercussions sur les victimes, qui sont fortement marquées. À ce propos, je veux également saluer les personnels de santé qui interviennent dans l’ensemble des quartiers : médecins, infirmiers et personnels de secours.

L’augmentation récente de près de 100 % du nombre de faits montre une dégradation de la situation due essentiellement, à notre avis, au trafic souterrain de stupéfiants qui concerne une population jeune. En effet, si nous avons l’un des taux de chômage les plus élevés de France, nous avons aussi l’une des populations les plus jeunes.

L’ensemble de ces éléments nous conduit à porter un dossier de classement de notre territoire, en particulier de la ville centre, en zone de sécurité prioritaire. Cela nous permettrait enfin de conduire dans la durée une politique de fond et stratégique pour mettre à mal ces trafics de stupéfiants à l’origine des actes de violence devenus insupportables.

Monsieur le ministre, je vous remercie de m’apporter des éléments d’information sur cette candidature. Je veux encore saluer la qualité des rapports que nous entretenons avec l’ensemble des services concernés et le travail de coopération effectué dans le cadre du Comité intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Monsieur le député, effectivement je me suis rendu hier à la fois en Belgique et dans le nord de la France pour signer l’accord de Tournai II, afin d’approfondir, d’améliorer la coopération entre les forces de l’ordre et la justice de ces deux pays qui doivent intervenir sur une frontière poreuse de 620 kilomètres. Même si nous sommes dans le cadre de l’Union européenne, des contrôles, des interventions sont nécessaires pour lutter contre les phénomènes que vous avez fort bien décrits et qui se sont multipliés. Je pense aux cambriolages avec violence, au vol de métaux d’or et, bien évidemment, au trafic de drogue. Aujourd’hui, on se rend en Belgique pour se fournir en cocaïne et en héroïne. Tout cela est lié évidemment à une série de politiques qui existent de l’autre côté de la frontière ou aux Pays-Bas et qui préoccupent aussi bien mon homologue belge, Joëlle Milquet, que moi-même. Nous avons d’ailleurs fait la démonstration dès hier après-midi, à Tourcoing, de ces nouvelles dispositions qui permettront à nos polices respectives de mieux travailler ensemble.

Nous avons lancé les zones de sécurité prioritaires qui doivent nous permettre de mieux nous attaquer à cette délinquance enracinée, souvent, trop souvent liée au trafic de drogue, et mobiliser ainsi les forces de l’ordre, police et gendarmerie, en lien avec la justice, avec les maires qui doivent jouer un rôle tout à fait essentiel, et l’ensemble des services publics et sociaux qui participent évidemment de la prévention.

Nous sommes en train de mettre en place ces zones de sécurité prioritaires. Nous aurons l’occasion de faire un premier bilan, dans quelques semaines, des soixante-quatre zones qui ont déjà été lancées et de préparer ainsi la nouvelle vague de zones de sécurité prioritaires. Beaucoup de villes, de départements peuvent être concernés.

Évidemment, ces zones ne pourront pas s’imposer partout, dans toutes les circonscriptions de police ou dans tous les territoires gérés par la gendarmerie. Mais en même temps, les leçons que nous tirons de ces zones de sécurité prioritaires en termes de mission pour la police ou la gendarmerie doivent être utiles à l’ensemble du territoire.

Les zones de sécurité prioritaires s’attaquent à des territoires où la délinquance est davantage ancrée mais la sécurité est une priorité partout, pour tous nos concitoyens. À l’évidence, monsieur le député, votre territoire fait face à un certain nombre de difficultés que vous avez vous-même rappelées et ne doutez pas un instant que votre candidature sera examinée, bien évidemment en lien avec vous-même, avec la plus grande bienveillance.

Avenir de la sous-préfecture de Villefranche-de-Rouergue

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Lou Marcel, pour exposer sa question, n° 197, relative à l’avenir de la sous-préfecture de Villefranche-de-Rouergue.

Mme Marie-Lou Marcel. La précédente législature a été marquée par un recul des services publics dans les territoires ruraux de notre pays. Réforme de la carte judiciaire, privatisation de La Poste, suppressions d’écoles et de services hospitaliers, RGPP : les territoires ont payé un lourd tribut à cette politique d’abandon du monde rural.

Dans mon département, l’Aveyron, la réforme de la carte judiciaire a causé la fermeture du tribunal de grande instance de Millau, des tribunaux d’instance de Villefranche-de-Rouergue, Espalion, Saint-Affrique et du conseil de prud’hommes de Decazeville. Dans cette circonscription, il n’y a plus d’accès direct à la justice.

Les services de maternité et de chirurgie de l’hôpital de Decazeville ne doivent leur survie qu’à la mobilisation d’un collectif réunissant citoyens, élus et professionnels.

Aujourd’hui, monsieur le ministre, des rumeurs insistantes circulent au sujet de la fermeture de la sous-préfecture de Villefranche-de-Rouergue, qui pourrait en effet figurer sur une liste de douze sous-préfectures condamnées dans un proche avenir.

Vous avez confirmé, monsieur le ministre, qu’il y aurait des suppressions de sous-préfecture. Avant de donner le feu vert à ces suppressions, vous avez mandaté une mission tripartite rassemblant la DATAR, l’Inspection générale de l’administration et le Conseil supérieur de l’administration territoriale de l’État, dont vous attendez les préconisations.

Si, à Villefranche-de-Rouergue, la sous-préfecture ne délivre plus les passeports, cartes d’identité et autres cartes grises, elle assure l’indispensable continuité des missions de l’État et garantit leur proximité. L’Aveyron est grand, très grand, monsieur le ministre, vous le savez : c’est le cinquième département le plus vaste de France. Si l’arrondissement de Villefranche-de-Rouergue perdait sa sous-préfecture, les administrés, les élus, notamment ceux des petites communes, ainsi que les acteurs économiques et sociaux perdraient tout interlocuteur garant de la continuité de l’État. Cette présence est plus que jamais nécessaire dans des territoires qui se sentent délaissés par la puissance publique. Aussi, monsieur le ministre, ma question sera-t-elle très précise : pouvez-vous me confirmer que la sous-préfecture de Villefranche-de-Rouergue ne figure pas sur la liste de celles qui sont menacées par un projet de fermeture ? Merci pour votre réponse.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Madame la députée, vous vous inquiétez de l’avenir de la sous-préfecture de Villefranche-de-Rouergue et de sa possible fermeture. Tout comme vous, je partage le souci de garantir, dans tous nos territoires, notamment dans un département comme le vôtre, la continuité de l’État et l’égalité d’accès aux services publics.

Nos concitoyens et les élus qui les représentent sont attachés au réseau des sous-préfectures, car il est un élément de notre cohésion sociale et territoriale. Mais au-delà de ce rôle d’administration de proximité, je suis convaincu que la force de ce réseau tient surtout à l’efficacité de son intervention au profit des acteurs du territoire : élus, acteurs économiques ou usagers. Ma responsabilité est donc de le faire évoluer, afin qu’il réponde avec toujours plus d’efficacité aux attentes de nos concitoyens.

Pour cela, je souhaite agir dans deux directions. J’ai d’abord voulu poursuivre le travail d’évaluation des missions du réseau. La transformation des sous-préfectures d’administrations de guichet en administrations de mission consacrées au développement local est déjà engagée. Une nouvelle étape consistera à mieux adapter les missions des sous-préfectures à la diversité des enjeux selon les territoires, qu’ils soient urbains, périurbains, ruraux, littoraux, frontaliers ou montagnards.

Le secrétaire général du ministère a été chargé d’élaborer, par catégorie de sous-préfecture, une typologie des arrondissements et des tâches assurées autour d’un socle commun d’attributions. Ces différents travaux permettront d’aboutir à un plan d’action dont la mise en œuvre devra être conduite en trois ans et qui s’accompagnera de la formation des agents.

Je souhaite également adapter, dans les cas où cela sera utile, l’organisation du réseau des sous-préfectures. La carte actuelle de nos arrondissements n’a que peu évolué depuis la réforme opérée par Raymond Poincaré avec le décret-loi du 26 septembre 1926. Reconnaissons ensemble que la France de 2013 n’est plus tout à fait celle de 1926… On peut imaginer quelques évolutions !

Pour cela, il y a la mission que vous avez évoquée, qui a conduit une large concertation et qui doit m’adresser prochainement des propositions opérationnelles.

Madame la députée, n’anticipons pas le rapport de cette mission. Pour moi, il ne s’agit pas de supprimer les sous-préfectures ou de réduire drastiquement leur nombre, mais de procéder aux ajustements du réseau pour que chaque arrondissement corresponde bien à un bassin de vie sur lequel une demande d’État s’exprime.

C’est dans ce cadre que la situation de la sous-préfecture de Villefranche-de-Rouergue sera examinée avec le meilleur soin, comme celle de toutes les sous-préfectures de France. Je dois reconnaître que les arguments que vous avancez ne manquent pas de force : ils seront étudiés avec la plus grande attention.

Lutte contre les violences urbaines à Mulhouse

Mme la présidente. La parole est à Mme Arlette Grosskost, pour exposer sa question, n° 212, relative à la lutte contre les violences urbaines à Mulhouse.

Mme Arlette Grosskost. Merci de votre présence, monsieur le ministre. La question a été évoquée par mes collègues, mais je parlerai plus spécifiquement de Mulhouse : depuis plusieurs mois, nous assistons à des actes de violence répétés et les inquiétudes se font de plus en plus vives parmi les forces de l’ordre, les sapeurs-pompiers, les conducteurs de transports publics. L’exaspération est totale.

Malgré plusieurs déplacements de ministres, leurs annonces respectives, les annonces du maire en faveur d’une « tolérance zéro » et le classement de trois quartiers de Mulhouse en zones de sécurité prioritaire, rien ne change. Encore récemment, une voiture de police a été attaquée par des mineurs qui lançaient des cocktails Molotov et un tramway a été de nouveau pris pour cible par un homme armé.

Ces actes provoquent chez les citoyens excédés incompréhension, colère, ras-le-bol face à des auteurs qui défient impunément l’autorité de l’État et s’en amuseraient même.

J’appelle tout particulièrement votre attention sur les effectifs de la police et sur leur formation. Il n’est plus possible de déployer dans les quartiers sensibles des policiers à peine sortis de l’école de police. Il nous faut des forces de police expérimentées et des titulaires qui répondraient immédiatement à des appels à candidature lancés au niveau national. En outre, il me semble approprié d’envisager une valorisation financière – dans le respect des contraintes budgétaires actuelles – au profit des policiers qui seraient soumis à de telles situations, souvent au péril de leur vie.

Des CRS effectuent désormais des patrouilles dans nos quartiers. Pouvez-vous vous engager sur une pérennisation de ces effectifs ?

Le maire de Mulhouse a annoncé que les effectifs de la police municipale seront renforcés, mais auront-ils des capacités supplémentaires d’agir afin de mieux compléter l’action des policiers ?

Vous parlez d’action conjointe avec Christiane Taubira. Devons-nous en conclure que vous êtes favorable à la suppression du tribunal correctionnel pour mineurs et pour la suppression des peines planchers ? À mon sens, c’est une grande erreur, car un signe terriblement négatif et contradictoire est ainsi envoyé aux délinquants. Pour ce qui est de Mulhouse, force est de constater que lors des derniers événements, la majorité de ceux qui ont été interpellés sont justement des mineurs, tout comme dans la situation signalée par M. Pauvros.

Cohésion, fermeté, justice, voilà le triptyque que nous souhaitons voir appliquer, au cœur d’une vision commune et au service d’une même action. Monsieur le ministre, quelles mesures efficientes et immédiates entendez-vous mettre en œuvre ? Je comprends bien l’importance de la prévention, mais pour prévenir, il faut du temps. Qu’allez-vous faire contre les désordres urbains qui explosent à travers le pays ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Madame la présidente, madame la députée, je connais bien Mulhouse pour m’y être rendu à de nombreuses reprises ces derniers temps, suite à des actes de délinquance, de violence, qui ont mis en danger l’intégrité physique de fonctionnaires de police ou d’agents des services publics. Je pense notamment à l’attaque début janvier d’un tramway, comme aux jets d’engins incendiaires sur des policiers, dans le quartier Drouot, fin février. Ce sont des actes insupportables qui doivent être condamnés et qui mettent souvent en cause, vous avez raison de le rappeler, de jeunes majeurs ou des mineurs. Cette violence est évidemment très inquiétante.

Une action déterminée est engagée dans la lutte contre la délinquance à Mulhouse, avec la municipalité, notamment par une occupation accrue de la voie publique. Les forces de police mènent en particulier des actions spécifiques contre la délinquance, les vols à l’arraché, le racket devant les établissements scolaires, afin de garantir la sécurité des bus et tramway et de combattre le trafic de drogue qui mine le pacte républicain, qui détruit le pacte social, pas seulement à Mulhouse d’ailleurs, même si la situation dans votre ville est tout à fait inquiétante.

Ces forces de police bénéficient du renfort de policiers des CRS qui resteront engagés aussi longtemps que nécessaire, madame la députée. Nous déployons souvent dans les zones de sécurité prioritaire, mais pas seulement, ces compagnies républicaines de sécurité ou des escadrons de gendarmes mobiles pour gagner en efficacité et pour venir en appui des forces de police locales. Si cela est possible, madame la députée, je le dis sans esprit de polémique parce que j’ai beaucoup d’amitié et de respect pour vous, c’est que nous avons décidé de remplacer tous les départs à la retraite prévus en 2013, au nombre de trois mille. Cette décision fait suite à la suppression de plus de dix mille postes de policiers et de gendarmes, pour des raisons qu’on peut analyser, liées notamment à la crise des finances publiques, mais il fallait mettre fin à cette saignée : non seulement nous remplacerons les départs à la retraite, mais nous allons créer tous les ans cinq cents nouveaux postes de policiers et de gendarmes.

Vous avez fait une remarque très juste et nous avons parlé de cette question lors des assises de la formation de la police : dans ces territoires, dans ces secteurs où la délinquance est profondément ancrée, il faut, oui, des policiers ou des gendarmes mieux formés, particulièrement expérimentés, compte tenu des difficultés auxquelles ils doivent faire face.

Par ailleurs, comme je l’avais annoncé il y a quelques mois, une zone de sécurité prioritaire a été mise en place le 13 février dernier dans les quartiers Bourtzwiller, Drouot et des Coteaux. Elle va permettre de concentrer et d’optimiser l’action des différents services de police et de gendarmerie, de développer le partenariat avec l’autorité judiciaire et les autres acteurs locaux. Les cibles sont clairement identifiées : le trafic de drogue, les atteintes les plus graves à la tranquillité publique – je pense aux vols avec violences, aux violences urbaines – et le suivi des mineurs délinquants.

Chaque fois que je suis allé à Mulhouse, j’y ai trouvé une institution judiciaire particulièrement réactive, coopérative, conformément à l’esprit des zones de sécurité prioritaires qui sont placées sous l’autorité du préfet et du procureur. Je ne doute pas des résultats que nous obtiendrons, sans polémique, avec le souci partagé des élus et des représentants de l’État de réussir. La détermination de l’État, ma détermination sont totales pour apporter aux habitants de Mulhouse les réponses qu’ils attendent et la tranquillité à laquelle ils ont droit.

Statut territorial de Mayotte

Mme la présidente. La parole est à M. Ibrahim Aboubacar, pour exposer sa question, n° 205, relative au statut territorial de Mayotte.

M. Ibrahim Aboubacar. Madame la présidente, monsieur le ministre, depuis le 31 mars 2011, Mayotte a accédé au statut de département et région d’outre-mer, devant ainsi, outre-mer, la première collectivité unique relevant de l’article 73 de la Constitution.

Au 1er janvier 2014, cette évolution va se prolonger par la transformation de l’île en région ultrapériphérique de l’Union européenne. Ce processus continu, qui répond à une revendication des Mahorais vieille de cinquante-cinq ans, s’est accéléré depuis les accords sur l’avenir de Mayotte du 27 janvier 2000. Il a été conclu en 2009, sur la base du pacte pour la départementalisation de Mayotte du 17 décembre 2008.

Conçu pour être une collectivité unique expérimentale, précurseur des nouveaux modèles de département d’outre-mer, le statut de Mayotte appelle encore des clarifications, qu’il s’agisse de l’organisation administrative ou, dans un certain nombre d’autres matières, du régime applicable. Des questions majeures, comme la fiscalité locale, la structuration des ressources des collectivités locales, la répartition de leurs compétences, la dimension régionale de ce département, le processus d’intégration des agents des fonctions publiques dans le droit commun, restent encore à préciser, car ces questions étaient restées en suspend lors des étapes de 2004 et de 2009. Sur la fonction publique, l’actualité sociale est là pour nous rappeler le problème, avec le mouvement déclenché hier par les instituteurs.

À la veille de l’échéance du 1er janvier 2014 et au moment où vient en débat le projet de loi sur la décentralisation, pouvez-vous nous préciser la conception que les pouvoirs publics ont du département de Mayotte ? Pouvez-vous nous assurer que l’ensemble des administrations de l’État tiendront compte de sa double dimension départementale et régionale, et qu’il sera répertorié par l’ensemble des organismes publics qui dressent les statistiques et qui mènent les expertises des politiques publiques ?

Pouvez-vous nous indiquer selon quel calendrier la situation administrative de ce département-région de Mayotte se décantera et quand le Gouvernement lancera la concertation avec les élus de Mayotte, indispensable pour conduire à bien ce chantier loin d’être achevé ? Concrètement, il y va de l’inscription de ce territoire dans l’ensemble des politiques publiques de notre pays et de la prise en compte à leur juste valeur des défis de son développement économique, social et environnemental.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de lintérieur. Que voilà une question facile, monsieur le député ! Comment répondre en quelques minutes aux défis rencontrés par Mayotte ? Je vous réponds en tout cas avec plaisir car je connais votre souci de défendre l’avenir de Mayotte, devenu département d’outre-mer depuis 2011, et c’est tout à fait légitimement que vous interpellez le Gouvernement pour connaître l’action de l’ensemble des administrations publiques dans la mise en œuvre des politiques publiques en faveur de ce jeune département confronté à de très grandes difficultés et pas seulement celle de l’immigration clandestine.

Vous souhaitez, d’abord, vous assurer que l’ensemble des administrations de l’État tient compte des dimensions départementale et régionale de ce département. Le Gouvernement fournit un effort budgétaire important – 738 millions d’euros en 2013 – qui doit permettre l’évolution statutaire, sociale et économique de Mayotte, en donnant les moyens nécessaires aux administrations pour répondre pleinement aux besoins très importants du département. Je pense aux domaines essentiels que sont la santé, la protection sociale et l’éducation, mais aussi la justice, l’agriculture ou encore les transports. Des référents outre-mer, nommés dans tous les ministères, travaillent en concertation avec les services de mon collègue Victorin Lurel pour mesurer les besoins et mettre en œuvre l’organisation locale la plus adaptée.

Par ailleurs, je puis vous indiquer que les organismes publics chargés de préparer ou d’accompagner les politiques publiques ont pris en compte, dans le cadre de la départementalisation, toutes les informations utiles au développement de Mayotte. Ainsi l’INSEE a mis en place les enquêtes et analyses nécessaires aux administrations de l’État, afin de mieux mesurer les besoins du département et d’adapter leur organisation et le rythme de développement de leurs services. Les résultats du recensement de la population de Mayotte, accompli en 2012, permettront notamment de mieux mesurer l’évolution du département.

Vous souhaitez également avoir des précisions quant au calendrier prévu par le Gouvernement pour traiter de la situation administrative de Mayotte. L’application du droit commun y nécessite un travail exceptionnel d’adaptation des lois et règlements qui, entrepris dès 2011, se poursuivra dans les prochains mois à un rythme soutenu. Par exemple, dès 2014 la fiscalité de droit commun sera étendue à Mayotte afin, notamment, de donner aux collectivités locales les moyens de mener une politique publique efficace, au plus près des besoins des citoyens.

Enfin, vous soulignez à juste titre la nécessaire concertation à mener avec les élus de Mayotte pour avancer sur ce chantier. Je puis vous assurer que c’est une préoccupation constante du Gouvernement, et plus spécialement de Victorin Lurel. Les collectivités locales rencontrent de très grandes difficultés que la solidarité nationale doit prendre en compte. Les recettes des communes seront augmentées à partir de 2014. L’effort de compensation budgétaire en faveur du conseil général de Mayotte afin de permettre la poursuite de la mise en œuvre des politiques publiques produira, je l’espère, ses meilleurs effets par la concertation avec les élus locaux, qui sont associés aux priorités d’actions et à la définition des mesures à entreprendre.

Les défis sont nombreux dans les domaines qui concernent mon ministère, qu’il s’agisse de la sécurité, de l’immigration ou, plus particulièrement, la situation que vivent les clandestins qui se trouvent sur l’île depuis très longtemps. J’aurai l’occasion de me rendre, cette année sans doute, dans ce territoire et d’y évoquer toutes ces questions avec vous. En tout cas, sachez que le Gouvernement est à vos côtés pour affronter ces défis considérables.

Revalorisation des retraites agricoles et installation des jeunes agriculteurs

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Faure, pour exposer sa question, n° 204, relative à la revalorisation des retraites agricoles et à l’installation des jeunes agriculteurs.

Mme Martine Faure. Monsieur le ministre, nul n’est besoin de vous rappeler que l’agriculture revêt une importance particulière, tant du point de vue économique que du point de vue paysager, social ou environnemental, particulièrement en Gironde. Aussi la politique menée en faveur de l’installation des jeunes doit-elle permettre la mise en valeur le milieu rural et participer au maintien de l’emploi dans l’ensemble du territoire national. Si j’appelle votre attention sur cette question, c’est parce qu’il n’y a eu en 2011 que cinquante-six transmissions pour l’ensemble du territoire girondin.

Force est de constater que le problème de la transmission des exploitations est réel. En effet, le manque flagrant d’attractivité du métier et les difficultés financières entraînent une chute vertigineuse des reprises des exploitations agricoles, engendrant une modification de nos paysages et ce, au risque à terme, de ne plus produire en France via nos petites exploitations mais par le biais d’une agriculture industrielle.

Je vous serai reconnaissante de bien vouloir nous préciser quels outils le Gouvernement entend mettre en place pour remédier à ces difficultés et quelles perspectives peuvent être proposées pour venir en aide à nos jeunes agriculteurs.

J’évoquerai ensuite le sort réservé aux retraités agricoles, liaison intergénérationnelle indissociable pour la transmission tant des savoir-faire que des expériences personnelles et des techniques. Ils attendent quant à eux une reconnaissance morale et financière. En Gironde, plus de 28 000 retraités agricoles sont dans la précarité voire, pour certains – et surtout certaines – dans une très grande précarité.

Entre 1997 et 2002, le gouvernement de Lionel Jospin avait agi de façon volontariste pour revaloriser les retraites agricoles. Or, depuis maintenant plus de dix ans, la question de la revalorisation des retraites agricoles a été ignorée par les gouvernements précédents.

Le Président de la République, François Hollande, conscient de ces difficultés, s’est résolument prononcé en faveur d’un plan quinquennal pour les retraites agricoles, pour assurer plus de justice à l’égard du monde agricole et changer la vie quotidienne des retraités de l’agriculture.

Les mesures qu’il s’est engagé à prendre sont particulièrement attendues et espérées par les retraités agricoles. Mme la ministre des affaires sociales et de la santé s’est engagée en octobre dernier à intégrer au débat national à venir sur les retraites, la question des retraités agricoles. Aussi, je souhaite savoir si vous pouvez nous apporter des précisions quant à cette revalorisation.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Madame la députée, en ce qui concerne tout d’abord la question de la revalorisation des retraites agricoles, le Gouvernement est au travail pour la mise en œuvre du plan quinquennal prévu dans un courrier de François Hollande daté d’avril 2012, alors qu’il était encore candidat à l’élection présidentielle, qui énumérait six propositions en faveur de la revalorisation des retraites agricoles.

Il convient de rappeler ici que l’ensemble de ces mesures correspond à un plan d’actions sur cinq ans. L’une des mesures, qui proposait d’accorder le bénéfice de la retraite proportionnelle aux périodes de longue maladie ou d’infirmité grave a déjà été prise dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013.

Pour le reste, il conviendra d’engager une large concertation, en cohérence avec la réforme des retraites qui sera engagée cette année.

Il nous faudra trouver les vecteurs législatifs adéquats et les moyens de financement les meilleurs et les plus durables, dans un contexte budgétaire difficile, en particulier pour porter à 75 % du SMIC le montant des retraites des carrières complètes des chefs d’exploitation. Nous sommes au travail pour permettre le retour à cet objectif inscrit dans la loi.

Vous avez aussi souhaité interroger le ministre de l’agriculture sur la politique de l’installation. Il me paraît utile de rappeler trois éléments importants.

D’abord, le ministre de l’agriculture a obtenu dans le cadre de la loi de finances pour l’année 2013 les dotations nécessaires à l’installation de 6 000 jeunes agriculteurs alors qu’un peu plus de 5 000 jeunes s’étaient installés en 2012.

Ensuite, le ministre est au travail pour développer une politique de l’installation rénovée et renforcée et relever ainsi l’enjeu majeur que constitue le renouvellement des générations en agriculture. Dans ce but, des assises de l’installation ont été lancées qui mèneront notamment à des propositions dans le cadre du projet de loi d’avenir de l’agriculture. Il s’agit de renforcer l’accompagnement de ceux qui souhaitent s’installer et d’améliorer la gouvernance en faisant le lien avec la question de l’accès au foncier, cruciale pour les jeunes installés.

Enfin, le contrat de génération comporte une disposition qui instaure un nouvel outil de transmission des exploitations agricoles. Cette nouvelle incitation devrait permettre d’installer davantage de jeunes, que ce soit dans le cadre familial ou hors cadre pour des jeunes qui ne seraient pas issus du monde agricole par leur famille.

Mme la présidente. La parole est à Mme Martine Faure.

Mme Martine Faure. Je vous remercie, monsieur le ministre.

Aides à la protection des cultures

Mme la présidente. La parole est à M. Franck Reynier, pour exposer sa question, n° 206, relative aux aides à la protection des cultures.

M. Franck Reynier. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt ; elle porte sur la mise en place d’un programme d’aide à la protection des cultures.

L’agriculture fait partie de notre identité. Elle est un élément important de notre patrimoine et avant tout un acteur économique de premier plan pour nos territoires. Dans la Drôme, l’arboriculture représente l’une des activités agricoles dominantes, notamment à travers la production d’abricots, de pêches, de nectarines. Malheureusement, nos arboriculteurs sont confrontés depuis de nombreuses années à des conditions de marché défavorables qui pénalisent leur développement et metttent à mal la trésorerie des producteurs.

Outre un marché particulièrement tendu, nos arboriculteurs ont connu de nombreuses difficultés liées aux aléas climatiques qui ont ravagé leurs récoltes et ont détruit, en quelques minutes, plusieurs mois de travail. Ces orages de grêle, par leur fréquence et leur violence, ont été de vrais coups durs pour la profession et ont entamé le moral de nombreux exploitants.

Ainsi, le 10 juillet 2012, la grêle a dévasté la production de près de 350 exploitations arboricoles dans la Drôme. Certes, les assurances grêle prennent en charge une partie des récoltes perdues mais cela reste minime et tous les exploitants ne sont pas assurés.

Pour ceux qui le sont, face aux importants sinistres survenus ces dernières années, un grand nombre d’arboriculteurs drômois ont vu leur contrat d’assurance résilié de façon unilatérale par leurs assureurs. Une situation incompréhensible et qui nuit à la pérennité des exploitations. Les précédents gouvernements avaient d’ailleurs travaillé à cette question de l’assurance grêle, et, monsieur le ministre, je souhaite connaître votre position sur ce dossier important.

Enfin, dans une logique de prévention des risques climatiques, il apparaît nécessaire d’inciter et d’accompagner nos exploitants agricoles à investir dans des outils de protection comme les filets anti-grêle dont l’efficacité est aujourd’hui reconnue par tous. Malheureusement, le coût d’installation de ces filets reste important, et peu d’arboriculteurs peuvent acquérir de telles infrastructures.

C’est pourquoi, il serait opportun que l’État ainsi que l’Union européenne, dans le cadre d’un programme d’aide à la protection des cultures, soutiennent nos arboriculteurs en leur allouant des aides exceptionnelles leur permettant de s’équiper d’outils de protection des cultures.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le député, une réponse efficace aux risques climatiques auxquels est confrontée régulièrement l’arboriculture, doit reposer sur un juste équilibre entre prévention et indemnisation, ces deux volets devant être complémentaires.

S’agissant des dispositifs d’indemnisation, l’État soutient le développement d’une assurance des cultures contre les risques climatiques, offrant une meilleure couverture que le régime d’indemnisation des calamités agricoles et que les simples contrats d’assurance grêle.

Les dommages liés à la grêle sont assurables et, à ce titre, ils ne peuvent donc bénéficier du dispositif de calamités agricoles. Depuis 2010, le soutien à l’assurance multirisque climatique a été fortement renforcé dans le cadre du premier pilier de la PAC, avec un taux d’aide publique à 65 % pour les agriculteurs. Les arboriculteurs disposent donc d’un accompagnement important des pouvoirs publics.

Cependant, il doit être reconnu que ce soutien s’est traduit par des résultats très hétérogènes entre les filières, en particulier dans celle de l’arboriculture. La progression du taux de couverture reste assez faible et la diffusion de cette assurance est encore limitée.

Parallèlement à ce dispositif, l’organisation commune de marché, cadre européen régissant les filières des fruits et légumes, soutient le recours aux assurances climatiques à hauteur de 50 % pour les agriculteurs mais, là encore, seuls 4 % des vergers sont couverts par ce système, ce qui reste très peu.

Dans la perspective de la future PAC actuellement en négociation, une réflexion est engagée sur les évolutions possibles des différents outils de gestion des risques en agriculture, au vu des résultats contrastés à ce jour.

Il est prévu d’associer pleinement à cette réflexion les professionnels du secteur et les assureurs, afin de dégager des solutions concrètes et valables pour tous. Il faudra réfléchir à la fois à la manière dont l’État peut redéfinir son intervention, mais aussi aux pistes exploitables pour améliorer les produits d’assurance privée.

Quant au volet prévention, la pose de filets anti-grêle est cofinancée, dans le cadre de l’organisation commune de marché « fruits et légumes », afin d’améliorer ou de maintenir une production de qualité.

Il ne s’agit pas d’une mesure de crise, mais bien d’une mesure de prévention ; le recours à des aides exceptionnelles dans ce cadre n’est donc pas envisageable. Le financement de ces mesures entre dans le cadre de programmes d’action définis par les organisations de producteurs. Aucune aide nationale n’est autorisée en complément de l’aide communautaire déjà prévue.

Enfin, un dispositif national existe, dans le cadre de FranceAgriMer, pour aider à la rénovation des vergers. Il est ouvert à tous les producteurs, individuels ou organisés et il peut être abondé par les collectivités locales. Une refonte de ce dispositif est actuellement en cours, afin de le simplifier et de le moderniser, pour une mise en place plus efficace et mieux gérée à partir de la campagne de plantation 2014-2015.

Construction de retenues d’eau

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau, pour exposer sa question, n° 220, relative à la construction de retenues d’eau.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Monsieur le ministre, ma question s’adressait à Mme la ministre de l’environnement, mais je sais que vous allez me répondre.

Le 11 juillet dernier, devant la commission des affaires économiques, la ministre a enterré le décret qui avait été préparé sous la précédente législature, par le précédent gouvernement, sur les réserves collinaires. Quand nous l’avons interrogée à ce sujet, elle nous a dit qu’elle allait engager une discussion avec les agriculteurs, en concertation avec le ministre de l’agriculture. Depuis, nous n’avons eu aucune nouvelle.

Je voudrais rappeler ce qu’est une réserve collinaire, parce que je me suis aperçu, en discutant au Salon de l’agriculture avec des parlementaires – y compris de la majorité – que tout le monde ne sait pas ce que c’est… Une réserve collinaire est un trou bâché où l’on peut stocker le surplus d’eau des ruisseaux, afin de disposer de réserves en été. Nous avions élaboré un décret permettant de créer des réserves collinaires gravitaires : cela consiste, lorsqu’un cours d’eau vient à déborder, à canaliser la quantité d’eau excédentaire correspondant aux capacités de la réserve. Au cours d’une réunion de travail avec le président de la FNSEA, j’ai eu la surprise d’entendre des parlementaires de la majorité s’écrier : « On ne va pas mettre des barrages partout ! ». Or, une réserve collinaire n’est en aucun cas un barrage sur une rivière !

Protéger l’environnement, c’est bien ; gérer strictement l’eau, c’est bien. L’eau, c’est la vie, pour l’homme comme pour les plantes. Être en vie et en bonne santé, c’est aussi pouvoir travailler : je pense en premier lieu aux agriculteurs, dont la mission première est de nourrir les autres êtres humains. Il est temps de leur donner tous les outils nécessaires pour nourrir les 9 milliards d’habitants que la terre comptera en 2050.

En l’absence de décret, les procédures sont plus complexes, surtout pour les petits ouvrages, ce qui nuit à la compétitivité de nos agriculteurs face aux agriculteurs européens. Cela ne va pas dans le sens de ce que nous a annoncé il y a dix jours, à Dijon, le Président de la République, à savoir la nécessité de simplifier les normes et de raccourcir les délais.

Je pense qu’il est urgent d’autoriser les agriculteurs à remplir des petites réserves collinaires en hiver pour arroser leurs terres ou nourrir leur bétail en été.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. L’eau est nécessaire à l’agriculture, et le changement climatique nous conduit à réfléchir à des pratiques plus économes dans la gestion de l’eau.

Sur ces questions, il est important d’avoir une approche différenciée selon les territoires, car le problème ne se pose pas de la même manière partout en France.

En premier lieu, il convient de promouvoir et de développer les systèmes agricoles économes en eau. C’est l’esprit de la démarche « Produisons autrement » engagée par le ministre de l’agriculture, dans le cadre de laquelle il a présenté, en décembre dernier, un ambitieux projet agro-écologique. Par ailleurs, la création de retenues d’eau, auxquelles vous faites référence dans votre question est l’un des leviers possibles pour améliorer l’adéquation entre la demande et la ressource en eau disponible.

Le précédent gouvernement avait engagé un plan d’adaptation de la gestion de l’eau. Toutefois, la nécessaire concertation avec tous les acteurs n’avait pas été suffisante. C’est pourquoi notre gouvernement a décidé de ne pas donner suite aux projets de décrets relatifs aux aménagements hydrauliques.

D’une manière générale, en matière d’irrigation, il s’agit de mobiliser tous les leviers disponibles dans les bassins versants, tant du côté de l’offre que de la demande. La recherche de cet équilibre ne peut se faire que dans la concertation avec l’ensemble des acteurs concernés, qui doivent envisager ensemble les situations locales et les solutions pouvant être apportées.

C’est dans cet esprit que le Premier ministre, sur proposition conjointe des ministres de l’agriculture et de l’écologie, a confié à M. Philippe Martin, député du Gers une mission dont l’objectif est précisément de proposer une nouvelle vision pour la gestion quantitative de l’eau en agriculture, afin de construire un consensus sur les modalités de partage de l’eau. Au terme de cette mission, le Gouvernement pourra dégager des solutions concrètes pour optimiser la gestion de l’eau en agriculture. Il pourra aussi définir une méthodologie permettant, en s’appuyant sur des dynamiques locales, de trouver des solutions adaptées aux différents terrains.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Charles Taugourdeau.

M. Jean-Charles Taugourdeau. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.

Je crois que tout le monde s’accorde pour dire qu’il faut préserver la ressource en eau. En même temps, il faut bien alimenter les cultures. Même si nous avons déjà des cultures extrêmement modernes, nous pourrions, dans le choix des semences, favoriser les variétés qui nécessitent moins d’eau pour pousser.

Le quiproquo vient à mon avis du terme « retenue d’eau », que vous avez employé au début de votre propos. Une réserve collinaire n’est en aucun cas une retenue d’eau ; elle n’est pas, en tout cas, une retenue rigide, c’est-à-dire un barrage, comme l’imaginent certains parlementaires. Il s’agit seulement, lorsque le ruisseau atteint un certain niveau, de prendre le surplus pour le faire couler dans une réserve, de manière gravitaire.

J’espère en tout cas que la concertation ne durera pas trop longtemps, car je rappelle qu’il n’y a que quatre saisons par an…

Situation des artisans du secteur du bâtiment

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour exposer sa question, n° 203, relative à la situation des artisans du secteur du bâtiment.

M. Jean-Louis Bricout. Ma question s’adresse à Mme la ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme et porte sur la situation conjoncturelle difficile dans laquelle se trouvent les artisans du bâtiment.

Dans ma circonscription de l’Aisne, je suis régulièrement alerté par les artisans qui me font part d’une baisse importante de leur carnet de commande. Nous le voyons bien : d’un côté la commande privée est très faible, compte tenu des difficultés auxquelles sont confrontés nos concitoyens en termes de pouvoir d’achat, de l’autre, dans un souci de bonne gestion des comptes publics, la commande des collectivités ne suit plus.

Le crédit d’impôt compétitivité emploi permettra à court terme d’améliorer les marges des artisans et constitue une bonne réponse pour compenser leurs charges. Malgré tout, l’urgence est de booster les carnets de commande. Voilà pourquoi il me paraît urgent d’agir avec l’ensemble des dispositifs fiscaux qui peuvent faire levier sur leur activité.

Mme la ministre a commencé à le faire : dans le cadre de son projet visant à construire 500 000 logements par an, elle a proposé un prêt à taux zéro plus et un dispositif de soutien à l’investissement locatif. Je me félicite que ces mesures aient été prises et il faut poursuivre en ce sens. Je pense par exemple qu’il faut développer, encourager et démocratiser les aides à la rénovation thermique, afin d’accélérer la transition énergétique dans laquelle nous sommes engagés.

C’est dans cet esprit, aussi, que le Premier Ministre a décidé de réunir un groupe de travail interministériel, chargé de formuler des propositions pour la rénovation thermique des logements et la transition écologique.

Dans la continuité du plan artisanat, pouvez-vous, monsieur le ministre, préciser les intentions qui sont les vôtres dans ce groupe de travail ? Quelles sont en particulier vos intentions du point de vue de la fiscalité ? Les artisans s’inquiètent des conséquences de la hausse prochaine de la TVA dans leur secteur. Quelles sont aussi vos intentions dans le cadre de la transition écologique et du plan de rénovation thermique des logements ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le député, vous interrogez Sylvia Pinel sur la situation de l’artisanat du bâtiment et des travaux publics qui, il est vrai, rencontre aujourd’hui des difficultés dans le contexte de crise que vous connaissez. Je vous prie d’excuser la ministre, qui est justement en déplacement, à l’occasion de la semaine nationale de l’artisanat.

Le Gouvernement est particulièrement mobilisé sur cette question et a pleinement conscience de l’importance de ce secteur pour notre économie. C’est la raison pour laquelle un groupe de travail interministériel, associant les organisations professionnelles du bâtiment va être mis en place. Il sera spécialement chargé de coordonner les mesures d’accompagnement du secteur. La ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme aura la charge de piloter ce groupe, auquel participeront le ministre de l’économie et des finances, la ministre de l’égalité des territoires et du logement, la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, ainsi que le ministre du travail. La première réunion se tiendra le 27 mars et des mesures de soutien seront examinées avec les représentants du secteur.

Ceci dit, le Gouvernement a d’ores et déjà agi et pris un certain nombre de dispositions pour soutenir les artisans du bâtiment. Concernant le logement, la loi sur la mobilisation du foncier public et le logement social permettra la mobilisation du foncier de l’État au profit de la réalisation rapide de logements, notamment sociaux, et générera de l’activité pour les entreprises.

Les travaux sur le plan de rénovation thermique des logements ont également été engagés et doivent aboutir très prochainement. Ceci représente un marché important pour les entreprises du bâtiment, et le Gouvernement veillera à ce que les artisans puissent, au même titre que les grandes entreprises, bénéficier de la dynamique de ce plan. D’ailleurs, les ministres concernés travaillent activement sur cette question, en lien avec Sylvia Pinel.

D’autre part, le secteur bénéficie depuis le début de l’année 2013 des mesures prévues dans le Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, notamment du Crédit d’impôt compétitivité et emploi. Les petites entreprises peuvent avoir recours au mécanisme de préfinancement qui a été lancé le 26 février et qui leur permettra de renforcer leur trésorerie à court terme.

Vous mentionniez d’ailleurs les difficultés de trésorerie de ces entreprises. Sur ce sujet aussi, le Gouvernement agit, puisqu’il a présenté un plan spécifique contenant onze mesures. La BPI va permettre à nos TPE et PME d’accéder facilement à des financements. Un travail particulier sera effectué pour le bâtiment et des propositions concrètes seront faites d’ici deux mois pour améliorer la situation de la trésorerie dans ce secteur.

Le Pacte pour l’artisanat, que Sylvia Pinel a présenté en conseil des ministres le 23 janvier, constitue une véritable feuille de route à long terme pour l’artisanat. Il comporte trente-trois mesures qui permettront de replacer l’artisanat et les artisans sur le chemin de la croissance et de l’emploi. Les professionnels du bâtiment en profiteront naturellement.

Enfin, les artisans du bâtiment vont bénéficier des contrats de génération, y compris pour transmettre leurs entreprises. Dans le cadre du pacte pour l’artisanat, il est prévu de lancer rapidement un « kit transmission » pour faciliter la reprise de nos entreprises. Chaque année, en effet, 63 % des 30 000 entreprises concernées par la transmission ou la reprise disparaissent.

Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour soutenir ce secteur. Nous souhaitons agir de manière cohérente et allier transition énergétique, accès au logement et soutien à nos petites entreprises. C’est le sens de notre action.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Bricout.

M. Jean-Louis Bricout. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Ce que je voulais souligner, à travers cette question, c’est la pertinence des différents dispositifs mis en œuvre. Je suis particulièrement attentif à ceux qui font directement levier sur l’activité, et qu’il faut, à mon sens, dissocier des autres. En effet, les problématiques qui concernent les marges des entreprises ou les prix sont directement liées à l’activité : nous le constatons tous, dans nos collectivités, quand nous répondons à des appels d’offre.

Tous les dispositifs qui font levier sur l’activité viennent en amont, et la régulation se fait par la suite, de la manière la plus naturelle qui soit.

Suppression de l’obligation d’adhésion aux corporations artisanales en Alsace-Moselle

Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Furst, pour exposer sa question, n° 215, relative à la suppression de l’obligation d’adhésion aux corporations artisanales en Alsace-Moselle.

M. Laurent Furst. Le 30 novembre dernier, le Conseil constitutionnel a abrogé le caractère obligatoire des corporations artisanales dans les trois départements de l’Est, Moselle, Haut-Rhin et Bas-Rhin.

Répondant à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil a censuré les dispositions de la loi de 1924 qui permettait cette caractéristique en Alsace-Moselle.

Or les corporations sont l’un des fondements du droit local. Elles ont permis à l’Alsace et à la Moselle de doter leurs entreprises d’avantages concurrentiels certains et de résister, mieux que dans de nombreuses régions, aux différentes crises économiques que la France a connues au cours de ces dernières années. C’est notamment à son artisanat bien qualifié que l’Alsace doit sa prospérité économique des dernières décennies.

Essentielles dans la dynamique et la prospérité régionale ainsi que dans la structuration nécessaire de l’artisanat, les corporations contribuent au professionnalisme et au dynamisme des PME en Alsace-Moselle. Elles concourent depuis toujours à la formation professionnelle et à une meilleure qualification des artisans. Elles jouent un rôle d’interface entre la chambre des métiers et les artisans.

La décision du Conseil constitutionnel est donc particulièrement grave pour les économies alsacienne et mosellane, au moment où la France est en recherche de compétitivité.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer les mesures que le Gouvernement envisage de prendre afin de remédier à cette décision et de permettre à nos départements de ne pas perdre le bénéfice de ces magnifiques instruments qui étaient à leur disposition ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le député, il est vrai que le secteur de l’artisanat en Alsace et en Moselle fait preuve d’un dynamisme important.

En 2012, il a connu deux fois plus d’immatriculations de nouvelles entreprises que de radiations. Avec plus de 29 000 entreprises en Alsace, soit une moyenne de 157 pour 10 000 habitants, l’artisanat participe à la vitalité de vos territoires, notamment en matière d’emploi avec plus de 166 600 actifs.

L’Alsace-Moselle doit aussi sa prospérité économique à son artisanat, et à l’organisation toute particulière qui a régi celui-ci grâce à l’accompagnement des corporations, présentes auprès des artisans dès le temps de l’apprentissage et tout au long de la vie économique de leur entreprise.

En supprimant le principe d’une affiliation obligatoire aux corporations des personnes qui exercent localement et à titre indépendant une activité artisanale, et des cotisations obligatoires afférentes à cette affiliation, le Conseil constitutionnel a remis en cause des dispositions du seul code local des professions issu de la loi d’empire du 26 juillet 1900.

Le Conseil constitutionnel a jugé que l’affiliation obligatoire aux corporations était contraire au principe de liberté d’entreprendre. Le Gouvernement ne peut que prendre acte de cette décision. Il s’agit à présent de trouver les moyens pour soutenir au mieux l’artisanat local et lui permettre de garder toute sa compétitivité et son dynamisme.

La ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme est réservée sur les solutions évoquées, qui tendraient à rétablir le caractère obligatoire des corporations, notamment en remplaçant les cotisations obligatoires par une imposition propre. Il semble délicat d’introduire de nouvelles dispositions locales qui ne constituent pas une harmonisation avec les dispositions en vigueur dans le reste du territoire français. C’est également le principe même de l’affiliation obligatoire qui a été remis en cause par le Conseil constitutionnel comme portant atteinte à la liberté d’entreprendre, et non simplement le caractère onéreux de cette affiliation. En revanche, le Conseil constitutionnel n’a pas contesté la légitimité des corporations dans leur action en faveur de l’artisanat, ni remis en cause leur existence.

Les services de Sylvia Pinel travaillent d’ores et déjà au recensement de l’ensemble des dispositions intéressant les corporations qui pourraient être susceptibles d’une remise en cause ultérieure afin de pouvoir proposer nous-mêmes les correctifs nécessaires aux textes en vigueur, stabiliser au plus vite le droit local et mettre fin à toute incertitude juridique vis-à-vis de l’application de ces textes. Le Gouvernement n’a pas l’intention de supprimer les corporations d’Alsace-Moselle, ni de supprimer un outil qui a fait ses preuves en matière d’accompagnement des entreprises.

Il résulte désormais de la décision du Conseil constitutionnel que chaque artisan d’Alsace-Moselle pourra bénéficier de cet accompagnement sur une base volontaire, en maintenant son adhésion à sa corporation de rattachement de son propre gré.

En attendant la stabilisation du droit local, nous travaillerons ensemble avec les institutions régionales pour que l’accompagnement et le soutien des artisans alsaciens et mosellans ne soient pas remis en cause.

La ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme a présenté un pacte pour l’artisanat le 23 janvier. Il contient trente-trois mesures concrètes pour soutenir ce secteur-clef de notre économie et valoriser les métiers et les savoir faire. C’est un enjeu important pour le Gouvernement, car nous savons que l’artisanat est générateur d’emploi. Bien entendu, ce pacte bénéficiera pleinement aux artisans alsaciens et mosellans.

Recours à la main-d’œuvre européenne dans le secteur du bâtiment et des travaux publics

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Aylagas, pour exposer sa question, n° 201, relative au recours à la main-d’œuvre européenne dans le secteur du bâtiment et des travaux publics.

M. Pierre Aylagas. Ma question s’adresse au ministre du redressement productif, et je veux y associer mes collègues Ségolène Neuville et Jacques Cresta.

Monsieur le ministre, je souhaite vous faire part du désarroi de nos entreprises de BTP en prise avec la concurrence européenne dont les coûts de main-d’œuvre sont si bas qu’elles ne peuvent rivaliser. C’est vrai sur l’ensemble du territoire mais plus encore dans les départements frontaliers. Dans les Pyrénées-Orientales, le BTP, acteur économique représentant 10 % du chiffre d’affaires départemental, subit de plein fouet cette concurrence.

Quelques chiffres illustrent ce phénomène : de 10 800 salariés en 2008, le secteur est passé à 8 200 aujourd’hui. Trois cents détachements de salariés étrangers sont déclarés en 2012 mais on estime que le chiffre réel est deux ou trois fois plus élevé. Au troisième trimestre 2012, le nombre de demandeurs d’emploi dans le BTP a augmenté de 23,6 % par rapport à 2011. Le chiffre d’affaires dans le négoce de matériaux a baissé de 10 %. Le nombre de mises en chantier de logements entre 2011 et 2012 a diminué de 37 %. Les liquidations et redressements judiciaires ont augmenté de 12 % entre 2011 et 2012.

Le BTP est une activité de main-d’œuvre : 50 à 60 % du chiffre d’affaires y sont consacrés.

Dans ces conditions, pour réduire les coûts comme les clients l’exigent, le seul levier reste l’aspect social. Les entreprises françaises se voient proposer régulièrement, et de plus en plus fréquemment, de la main-d’œuvre de pays européens à des prix imbattables. Certaines recourent à de telles pratiques et réussissent ainsi à baisser leurs coûts et gonfler leur productivité. Les contrôles opérés ne décèlent pas d’illégalités car une vérification poussée par les services de l’État est quasiment impossible.

En effet il suffit aux prestataires étrangers de bien faire les formalités et de rémunérer le salarié au SMIC pour rendre le contrôle compliqué. Mais ces déclarations cachent souvent une minoration du nombre d’heures réalisées ou encore une sous-qualification du salarié. Par exemple, un maçon très qualifié payé au SMIC se retrouve loin des 1 900 euros prévus par la grille française de salaires.

Aujourd’hui les entreprises françaises employant des salariés français peinent à obtenir des marchés. Les écarts de prix avec certains concurrents avoisinent 30 voire 40 %.

Dans ces conditions, l’emploi de salariés du territoire devient difficile et bon nombre d’entreprises s’interrogent quant à l’utilisation d’une main-d’œuvre de production venant des pays de l’Union européenne.

Sous l’effet de la seule baisse d’activité, nous planifions une perte de 40 000 emplois en France pour 2013. Mais si les entreprises décident de recourir à cette main-d’œuvre de manière amplifiée, le nombre des licenciements pourrait exploser.

Monsieur le ministre, quelles mesures allez-vous prendre pour arrêter ce phénomène qui pénalise nos entreprises en même temps qu’il porte atteinte aux conditions d’emploi de l’ensemble des salariés ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Monsieur le député, vous interrogez la ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme sur la concurrence déloyale et le travail illégal dans le secteur du BTP.

Il s’agit d’une préoccupation centrale pour le Gouvernement, qui partage vos inquiétudes. C’est une problématique sur laquelle les professionnels nous alertent régulièrement : il faut prendre très au sérieux cette question et c’est ce que fait le Gouvernement.

Face aux dérives qui pénalisent nos entreprises, nous avons pris des mesures avec le plan interministériel de lutte contre le travail illégal présenté par le Premier ministre le 27 novembre dernier.

Le Gouvernement a souhaité cibler les opérations sur le secteur du bâtiment de façon à rétablir les fondamentaux d’une concurrence saine et loyale. Tel est l’objectif de trois dispositifs en plein développement : la sous-traitance en cascade, le recours abusif au statut d’indépendant et les procédures de détachement dans le cadre des prestations de services transnationales. En 2011, nous avons compté 45 000 déclarations de détachement par des entreprises étrangères, concernant 145 000 salariés, soit une hausse de 17 %.

Le travail engagé par la commission nationale de lutte contre le travail illégal va dans le sens d’une coordination renforcée de l’ensemble des corps de contrôle, avec comme principal objectif de corriger les dérives à l’origine d’une situation de concurrence déloyale. Cet objectif est porté au plus haut niveau de l’État et la ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme s’engage avec la plus grande détermination.

Par ailleurs, la France soutient fermement le renforcement de la directive « Détachement » au niveau européen pour lutter efficacement contre ces phénomènes préjudiciables de dumping social. Ce texte pourrait faire l’objet d’un vote par le Conseil européen en juin 2013. Il doit aboutir et être équilibré et ambitieux.

Certes, le détachement correspond à l’esprit des libertés instituées au sein de l’Union européenne : libre circulation des biens, des personnes et des services. Mais il est nécessaire de s’assurer que les règles qui l’encadrent sont respectées, afin d’éviter qu’il ne conduise au moins-disant social. Le contrôle effectif du détachement est une nécessité pour lutter contre le dumping social, et à terme, pour maintenir la cohésion sociale en Europe. Il en va de l’intérêt de tous.

Dans ce cadre, la ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme soutient la mise en place d’un mécanisme de responsabilité solidaire des entreprises donneurs d’ordres dans les cas de sous-traitance. Il semble assez naturel que ces entreprises participent à la prévention des fraudes aux règles du détachement, et soient vigilantes lorsqu’elles confient la réalisation d’une prestation à un tiers.

Mais nous pouvons également agir en France. Il est vrai que dans certains secteurs, le régime de l’auto-entrepreneur peut conduire à des dérives et créer une distorsion de concurrence. La ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme a demandé à l’IGAS et à l’IGF un rapport d’évaluation qui devrait être rendu public dans les prochaines semaines. Sur cette base le Gouvernement prendra toutes les mesures qui s’imposent.

Vous pouvez le constater, monsieur le député, le Gouvernement est déterminé sur cette question. Nous avons engagé les travaux nécessaires en France et nous ferons entendre notre voix au niveau européen. Nous comptons sur le soutien de la représentation nationale.

Régime fiscal des versements aux associations de défense des animaux

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur, pour exposer sa question, n° 211, relative au régime fiscal des versements aux associations de défense des animaux.

M. Marc Laffineur. Ma question s’adresse au ministre de l’économie et des finances et porte sur le régime fiscal des associations de défense des animaux.

Les dons reçus par ces associations ne peuvent bénéficier d’une réduction d’impôt de 66 %, parce que le Conseil d’État considère que les associations simplement déclarées de protection des animaux ne peuvent être considérées comme des associations de bienfaisance. Elles doivent donc nécessairement être déclarées d’utilité publique ou d’intérêt général pour recevoir des dons déductibles permettant la délivrance de reçus fiscaux. Or les services de l’État sont souvent très réticents à leur accorder ce statut. Pourtant, ces associations jouent un rôle essentiel dans nos territoires : elles luttent efficacement contre la maltraitance, l’élevage clandestin et le trafic d’animaux et sont des auxiliaires précieux des collectivités locales.

Il semble que cet avantage fiscal soit essentiel pour permettre à ces associations de faire leur travail. Je souhaite connaître la position du Gouvernement sur ce régime fiscal afin que ces associations puissent contribuer à préserver la bonne santé de nos animaux.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Monsieur Marc Laffineur, vous avez souhaité attirer l’attention du ministre de l’économie et des finances sur le régime fiscal des associations de défense des animaux.

Permettez-moi tout d’abord d’excuser Pierre Moscovici qui est actuellement retenu par la remise du rapport de l’OCDE sur la politique économique de la France.

Concernant le sujet que vous venez de rappeler : les versements effectués aux œuvres ou organismes d’intérêt général présentant l’un des caractères mentionnés au chiffre 1 des articles 200 et 238 bis du code général des impôts peuvent bénéficier des avantages fiscaux prévus en faveur du mécénat.

Parmi ceux-ci figure la défense de l’environnement naturel. Cette activité recouvre, notamment, les activités de préservation de la faune, de la flore et des sites et d’amélioration du cadre de vie en milieu urbain ou rural. Plus précisément, la notion de préservation de la faune et de la flore s’entend de la protection de la faune et de la flore sauvages et de la biodiversité.

La condition d’intérêt général implique que l’activité de l’œuvre ou de l’organisme ne soit pas lucrative et que sa gestion soit désintéressée. En outre, l’organisme ne doit pas fonctionner au profit d’un cercle restreint de personnes.

Les actions de protection des animaux sauvages sont susceptibles de relever de la protection de la faune sauvage et, par suite, de la défense de l’environnement naturel.

La prise en charge des animaux errants ou abandonnés à travers la gestion de refuges est également susceptible de relever de la défense de l’environnement naturel au titre de la préservation des milieux naturels et de l’amélioration du cadre de vie, dès lors que cette prise en charge protège les populations et les écosystèmes contre les risques liés à la divagation des animaux.

Les versements effectués au profit des organismes qui exercent ces activités sont donc susceptibles d’ouvrir droit aux avantages fiscaux en faveur du mécénat, sous réserve d’un examen au cas par cas de la situation de chaque organisme, toutes les autres conditions étant par ailleurs remplies, notamment celle tenant au caractère non lucratif de leurs activités.

Enfin, monsieur le député, ces règles doivent être respectées par tous les organismes de défense des animaux, y compris les associations ou fondations reconnues d’utilité publique.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse mais je souhaite la préciser.

J’ai bien entendu que la situation des associations de prise en charge des animaux sauvages ne posait pas de problème, mais aussi que la possibilité de bénéficier de cette déduction concernait également les associations à but non lucratif qui s’occupent dans toutes les communes des divagations de chiens et chats. Ai-je bien entendu, monsieur le ministre ?

Ce sera donc au Journal officiel

Mise en jeu de la responsabilité pénale dans les cas d’exposition à l’amiante

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour exposer sa question, n° 219, relative à la mise en jeu de la responsabilité pénale dans les cas d’exposition à l’amiante.

M. Jean-Pierre Decool. Ma question porte sur la tenue d’un grand procès pénal de l’amiante, que les victimes et leurs familles attendent désespérément depuis des années.

Alors que, lors d’un grand procès de l’amiante en février 2012, la justice italienne a condamné à seize ans de prison deux anciens dirigeants de la Société Eternit jugés responsables de la mort de plusieurs milliers de personnes, les premières plaintes au pénal de travailleurs exposés à l’amiante en France, datant de 1996, n’ont toujours pas abouti.

Les décisions contradictoires de Turin et de Paris ont mis en lumière l’incapacité flagrante et choquante de la justice française à établir des responsabilités pénales dans les affaires liées à l’amiante. Les victimes et leurs familles sont désemparées et doutent de la volonté des pouvoirs publics de garantir un réel traitement judiciaire des dossiers emblématiques de l’amiante.

Madame la ministre, il convient de donner enfin à l’instruction du pôle judiciaire de santé publique de réels moyens pour identifier les chaînes de responsabilités.

En outre, il nous faut défendre vigoureusement le principe constitutionnel de l’inamovibilité des juges, qui est la garantie essentielle de leur indépendance. N’oublions pas : un magistrat qui part, c’est une bibliothèque qui brûle. Or, madame la garde des sceaux, vous avez décidé hier de décharger la juge Marie-Odile Bertella-Geffroy de ses fonctions au pôle santé du tribunal de grande instance de Paris, où elle instruisait les affaires de l’amiante. Je vous demande donc de revenir sur cette décision lourde de conséquences, afin que la juge d’instruction en place, qui connaît parfaitement les dossiers, puisse mener à terme son travail d’investigation.

L’impunité pénale dans les affaires d’amiante ne doit pas être une fatalité dans notre pays. Ma question est donc simple : madame la garde des sceaux, vous engagez-vous à lever tous les obstacles pour la tenue, dans les meilleurs délais, d’un grand procès pénal de l’amiante, et à donner de véritables moyens à la justice française pour mener à bien les enquêtes ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député Jean-Pierre Decool, je partage votre impatience concernant ce procès pénal de l’amiante que nous attendons. Comme vous, je partage aussi l’impatience des familles et des parties civiles, parce qu’elle exprime leurs souffrances et leurs angoisses. Nous savons que l’amiante va encore tuer.

J’ai reçu le mois dernier une délégation conduite par le président de l’association nationale de défense des victimes de l’amiante, à qui j’ai confirmé mon intention de faire en sorte que le pôle santé du tribunal de grande instance de Paris ait les moyens de conduire cette instruction et que nous voyions ce procès pénal se tenir dans les meilleurs délais possibles et raisonnables. Vous savez que nous ne donnons pas d’instructions individuelles, mais je veille à donner à la justice les moyens de fonctionner.

Dans les grands dossiers emblématiques de l’amiante, des personnes morales et physiques ont été mises en examen – quatorze dans le dossier Jussieu, dix-sept dans le dossier Condé-sur-Noireau et six dans le dossier Eternit. Des personnes mises en examen ont choisi de saisir la chambre d’instruction de la cour d’appel de Paris, qui se prononcera le 17 mai prochain. Une fois que la chambre d’instruction aura rendu ces décisions, le procès tant attendu par les parties civiles, par nous-mêmes et par l’opinion publique devrait pouvoir s’ouvrir.

Vous avez raison, monsieur le député : le travail de justice a été long, mais je veille aujourd’hui à ce qu’il avance. La chambre d’instruction a décidé le 10 mai 2012 qu’il n’y avait pas lieu de regrouper les dossiers. Cependant, j’ai tenu à anticiper : depuis septembre, j’ai renforcé le pôle santé du TGI de Paris, en y ajoutant deux magistrats instructeurs – ils sont désormais cinq, assistés de trois médecins – et une inspectrice du travail. Ces assistants spécialisés apportent aux magistrats leur expérience professionnelle.

Concernant Mme la juge d’instruction Bertella-Geffroy, je ne me suis pas contentée de l’avis du Secrétariat général du Gouvernement : à sa demande, j’ai saisi le Conseil supérieur de la magistrature qui a confirmé que les dispositions de l’article 28-3 de l’ordonnance statutaire s’appliquaient à son cas. J’ai donc effectivement transmis un projet de décret de mutation au Président de la République, qui en sera signataire. Cependant, j’ai pris des dispositions : dans le cadre d’un contrat d’objectifs, je consolide le pôle santé en pérennisant les nominations de magistrats instructeurs et en renforçant ceux-ci par des assistants. Ce contrat d’objectifs sans précédent permettra de s’assurer que le pôle santé aura les moyens de faire avancer l’instruction et, je l’espère, d’organiser très vite ce procès pénal.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. Madame la garde des sceaux, je vous remercie et je prends acte de votre volonté de tout mettre en œuvre pour répondre aux attentes des victimes, des familles et des associations.

Vous connaissez les chiffres, mais je veux simplement rappeler que les autorités sanitaires prévoient 100 000 décès liés à l’amiante d’ici dix ans. Aujourd’hui, l’exposition à l’amiante est responsable de près de 20 % des cancers du poumon.

Madame la garde des sceaux, merci de l’attention que vous portez à ces personnes qui sont vraiment dans la douleur.

Mme la présidente. Nous avons terminé les questions orales sans débat.

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Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Questions au Gouvernement ;

Vote solennel sur le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République ;

À dix-sept heures, en salle Lamartine : débat sur le rapport annuel de la Cour des comptes.

La séance est levée.

(La séance est levée à douze heures quarante.)