Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus de la session > Compte rendu intégral

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Troisième séance du mardi 25 juin 2013

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Marc Le Fur

1. Consommation

Suite de la discussion d'un projet de loi

Discussion des articles

Article 1er

M. Lionel Tardy

M. Gilles Lurton

M. Frédéric Lefebvre

M. Bernard Debré

Mme Laure de La Raudière

Mme Annie Genevard

M. Yannick Favennec

M. Thierry Benoit

M. Damien Abad

M. André Chassaigne

Mme Marie-Christine Dalloz

Amendements nos 197 rectifié, 705

M. Razzy Hammadi, rapporteur de la commission des affaires économiques

M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation

Amendements nos 443, 175, 177, 559, 572, 833, 309, 751

Présidence de Mme Catherine Vautrin

Amendements nos 525, 41, 573, 832

Présidence de M. Marc Le Fur

Amendements nos 540, 694, 307, 141, 568, 8, 830, 905, 414, 660, 752, 744, 924, 429, 828, 139, 389, 428, 827, 829 rectifié, 266, 745, 903, 927 rectifié, 695, 826, 185, 643, 825, 972, 421, 925, 186, 644, 753, 554, 550, 967, 646, 647 rectifié, 697, 181, 183, 964, 968, 649, 648

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Marc Le Fur
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

1

Consommation

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la consommation (nos 1015, 1156, 1116, 1110 et 1123).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de sept heures quarante-cinq pour le groupe SRC, dix heures sept pour le groupe UMP, deux heures cinquante-huit pour le groupe UDI, une heure quarante-deux pour le groupe écologiste, une heure trente-huit pour le groupe RRDP, une heure vingt-six pour le groupe GDR et trente minutes pour les députés non inscrits.

Discussion des articles

M. le président. J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.

Article 1er

M. le président. Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 1er.

La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation, monsieur le président de la commission des affaires économiques, monsieur le rapporteur, je l’ai déjà dit en commission : en matière d’action de groupe, le système idéal n’existe pas. Depuis plusieurs années, ce sujet a fait l’objet de nombreuses propositions et je reconnais que l’équilibre n’est pas facile à trouver.

Pour ma part, j’ai toujours considéré que l’amendement déposé en 2008 par notre regretté collègue Jean-Paul Charié,…

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Excellent collègue !

M. Lionel Tardy. …rapporteur du projet de loi de modernisation de l’économie, était un point d’entrée satisfaisant. À peu de choses près, le présent projet de loi a d’ailleurs retenu la même procédure que celle proposée à l’époque.

Plusieurs questions ne manqueront cependant pas d’être soulevés. D’une part, on pourra contester le fait que seules les dix-sept associations agréées puissent agir. D’autre part, au vu des moyens nécessaires, uniquement quelques-unes de ces associations pourront réellement agir en pratique.

Je m’arrêterai plus spécifiquement sur le manque de garde-fous contre les procédures abusives, et surtout sur la procédure d’action de groupe simplifiée, que le rapporteur a sortie de nulle part en commission – je l’ai déjà dit lors de la discussion générale. Cette procédure apparaît comme une anomalie, à contre-courant du reste de l’article, et n’a fait l’objet d’aucune étude d’impact. J’espère que l’examen des amendements sera l’occasion de revenir sur cette proposition, afin de ne pas détruire ce qui ressemblait à un compromis acceptable. Nous devons faire en sorte que cette partie du texte soit solide, surtout si la procédure est étendue ultérieurement aux domaines de la santé et de l’environnement, comme le prévoit le Gouvernement.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Avant de passer à l’examen des amendements, je veux revenir quelques instants sur l’action de groupe instaurée par l’article 1er. Il ne s’agit pas d’une innovation : l’action de groupe a déjà fait l’objet de réflexions importantes de la part de la Commission européenne, qui a démontré en 2011 que près de 40 % des consommateurs français s’estimaient mal protégés. Une telle procédure existe déjà au Portugal, au Royaume-Uni, en Suède, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Italie : la France est donc restée l’un des seuls pays européens à résister à une demande croissante et pressante, tant des autorités européennes que de l’opinion publique.

Néanmoins, plusieurs questions demeurent. Est-ce le bon moment pour instaurer cette procédure, alors que le moral de nos entreprises est en berne ? Leur imposer une contrainte supplémentaire risque de renforcer le malaise ambiant. Ne serait-il pas préférable d’attendre une amélioration de la situation économique ? Monsieur le ministre, les grands projets de société ne peuvent s’imposer que dans des périodes d’accalmie. Pour être efficaces, les réformes doivent d’abord être comprises par celles et ceux auxquels elles s’appliquent ; à défaut, elles ne servent ni les entreprises, ni les consommateurs.

Je veux aussi revenir sur la question des actions de groupe en matière de santé et d’environnement. Je ne comprends pas pourquoi il n’a pas été possible d’inclure ces deux thèmes dans le projet de loi.

Enfin, en réservant la possibilité de défendre une action de groupe aux associations de consommateurs nationales, vous créez une véritable rente de situation pour ces dix-sept associations et, in fine, pour seulement quelques-unes d’entre elles car, comme vient de le dire mon collègue Lionel Tardy, seulement quelques-unes auront les moyens de prendre en charge ces actions.

M. le président. La parole est à M. Frédéric Lefebvre.

M. Frédéric Lefebvre. La question de l’action de groupe se pose depuis de nombreuses années. Chacun le sait : nous avons eu de très nombreux débats sur ce sujet important. Je remercie le ministre de le traiter dans le cadre de ce texte, à travers un amendement dont j’ai déjà eu l’occasion de souligner publiquement la volonté d’équilibre.

Depuis des années, chacun essaie de trouver le bon équilibre entre deux risques différents : d’une part, celui de ne pas pouvoir protéger les nombreux consommateurs pouvant subir un préjudice important de la part d’entreprises qui, volontairement ou non, violeraient la loi et, d’autre part celui de fragiliser un secteur économique.

Chacun connaît des exemples d’actions de groupe, aux États-Unis notamment : nous en avons vu les dévoiements, les dérapages, les conséquences économiques parfois dramatiques pour les entreprises concernées et pour l’économie tout entière, de même que la faible efficacité de la réparation pour les consommateurs.

Une première tentative a eu lieu en 2008 : le président Brottes s’en souvient…

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Absolument !

M. Frédéric Lefebvre. …et notre collègue Tardy vient d’en parler. Avec le regretté rapporteur Jean-Paul Charié, nous étions un certain nombre, sur tous les bancs de cet hémicycle, à avoir proposé d’instaurer l’action de groupe. Nos textes étaient peu ou prou les mêmes ; les dispositifs étaient un peu plus larges que celui proposé par le ministre aujourd’hui – au vu de l’expérience, ils étaient à mon sens trop larges. C’est pourquoi je salue la volonté du Gouvernement d’essayer d’atteindre un équilibre. D’ailleurs, dans le texte que j’ai eu l’honneur de présenter en tant que ministre il y a un peu plus d’un an, les sénateurs avaient introduit un dispositif assez proche de celui que vous proposez vous-même dans votre projet de loi, monsieur le ministre.

Avant d’entrer au Gouvernement, j’avais expliqué, dans un livre intitulé Le mieux est l’ami du bien, les risques de dérives de l’action de groupe et la nécessité de rechercher un point d’équilibre. J’avais eu l’occasion de travailler avec la DGCCRF pour bâtir un dispositif qui s’apparente, dans son architecture, à celui qui existe en droit de la concurrence. Il s’agit d’une voie possible pour trouver un équilibre.

Nous reviendrons tout à l’heure sur un point très important, auquel mon collègue Tardy vient de faire référence. À ce que l’on pourrait appeler l’action de groupe « Hamon » ou gouvernementale, qui correspond au dispositif contenu dans le texte initial, s’est ajouté aujourd’hui un nouveau dispositif d’action de groupe, que l’on pourrait appeler « Hammadi » et qui résulte des travaux de la commission des affaires économiques. Il y a là un vrai problème d’équilibre : d’un côté, on est dans le opt-in ; de l’autre, on est de fait dans le opt-out.

M. Lionel Tardy. Tout à fait !

M. Frédéric Lefebvre. Monsieur le ministre, si les deux dispositifs existent dans la loi, le seul qui sera utilisé sera en réalité le dispositif dit simplifié ou accéléré. Or, malheureusement, celui-ci ne respecte pas l’équilibre que vous avez cherché à construire.

M. Lionel Tardy. Eh oui !

M. Frédéric Lefebvre. Nous entamons une discussion au cours de laquelle nous aurons largement le temps de nous retrouver. Je le dis avec force : sur un sujet important sur lequel nous travaillons depuis des années, je souhaite que les débats dans notre assemblée et au Sénat ainsi que les échanges avec les acteurs économiques et les associations nous permettent de trouver le bon point d’équilibre.

Vous l’avez dit tout à l’heure, monsieur le ministre, et vous avez parfaitement raison : il faut avancer pas à pas. Sur certains sujets, qu’il s’agisse des questions de santé ou des questions environnementales, l’action de groupe fait l’objet d’une attente forte dans notre pays. Vous avez dit vous-même que le Gouvernement était tout à fait prêt à franchir des étapes à l’avenir ; nous avons donc tous une responsabilité particulière dans la construction du dispositif initial. En effet, c’est ce dispositif initial qui permettra ensuite de créer un droit équilibré, qui respecte les acteurs économiques tout en assurant la défense des consommateurs.

Je ne fais pas de procès d’intention. Je veux simplement insister sur la nécessité de construire tous ensemble, au cours de ces débats, un dispositif véritablement équilibré et efficient, qui ne doit pas se trouver dépassé par une autre procédure qui ouvrirait la voie à la version la plus large de l’action collective, laquelle serait malheureusement porteuse de conséquences potentiellement graves pour l’économie française.

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré.

M. Bernard Debré. L’instauration du dispositif de l’action de groupe est évidemment une bonne initiative pour le consommateur. C’est pourquoi j’aurais aimé qu’il soit étendu à la santé. Certes, nous en avons beaucoup parlé tout à l’heure, et le Gouvernement a fait des promesses à ce sujet. Le ministre a ainsi déclaré que nous pourrions peut-être un jour, dans le cadre d’un PLFSS ou d’un autre texte, étendre ces actions de groupe à d’autres domaines que ceux prévus dans le projet de loi. Mais, au regard des scandales sanitaires actuels, l’attente des consommateurs et des patients est forte. Je prendrai l’exemple du Mediator, mais peut-être pourra-t-on aussi parler des prothèses PIP.

Permettez-moi de citer – même si les États-Unis ne sont pas toujours un modèle – l’exemple de l’Isoméride, un médicament qui est le cousin du Mediator. Fabriqué par Servier et vendu aux États-Unis par le laboratoire White, il a vraisemblablement causé 40 000 morts et a laissé de nombreuses personnes véritablement handicapées. Une action de groupe a abouti à la condamnation du laboratoire, qui a dû payer 14,7 milliards, ce qui a permis d’aider les victimes ou les parents qui avaient perdu des proches.

Le même problème a eu lieu en France avec l’Isoméride. À l’époque, ce produit a été retiré. Vous l’avez dit tout à l’heure : il fallait trouver un lien de cause à effet entre ce médicament et les accidents. Mais il est tout de même extraordinaire, alors qu’il y a eu 40 000 morts aux États-Unis, que l’on n’en ait compté que quatre en France. Ces quatre personnes ont été indemnisées à hauteur de 400 000 euros. La différence n’est pas acceptable.

Face à des affaires comme celles du Mediator, des prothèses PIP ou d’autres, on est très angoissé. Je n’ai rien contre les multinationales, rien contre l’industrie pharmaceutique, mais il n’empêche que ces sociétés ont énormément d’argent et qu’elles peuvent recourir à dix, quinze ou vingt avocats, quand celui qui est seul, à défaut d’action de groupe, ne peut avoir qu’un avocat – et même rencontrer quelques difficultés pour en trouver un – et obtient rarement satisfaction.

C’est pourquoi j’aurais aimé que les actions de groupe soient étendues à la santé dans ce projet de loi. Vous promettez qu’elles le seront un jour ; je regrette que ce ne soit pas aujourd’hui.

Mme Laure de La Raudière. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Laure de La Raudière.

Mme Laure de La Raudière. L’article 1er et l’article 2 introduisent l’action de groupe en droit français, mais j’ai le sentiment que nous passons à côté du vrai problème, tout en infligeant à nos entreprises un handicap qui n’est pas souhaitable.

D’un système particulièrement restreint, tel que vous l’aviez voulu, monsieur le ministre, dans le projet de loi initial, nous sommes passés à une version beaucoup plus ouverte de l’action de groupe, celle qui a été votée par la commission des affaires économiques, qui ne prend pas en considération pour autant les sujets de préoccupation des Français, comme la santé.

La procédure introduite, procédure d’action de groupe simplifiée sur proposition, est une procédure d’opt-out. Ce terme est utilisé pour désigner le mécanisme par lequel l’action en réparation de recours collectif est applicable à toutes les victimes, même celles qui ont gardé le silence, à l’exception de celles qui ont dit expressément ne pas vouloir agir. Cela revient en réalité à adopter les class actions à l’américaine, avec toutes les dérives que nous connaissons.

Sur tous les bancs, lors de la précédente législature, nous avions dit que nous voulions éviter cet écueil, d’autant plus que notre droit de la consommation est un droit écrit, très détaillé, contrairement à ce qui existe aux États-Unis. Cette nouvelle procédure m’inquiète d’autant plus que le rapporteur, pas plus que vous, monsieur le ministre, ne semble prendre la mesure de cette modification. Or, dans le rapport pour avis présenté par M. Denaja au nom de la commission des lois,…

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Excellent rapporteur pour avis !

Mme Laure de La Raudière. …on trouve la définition suivante de l’opt-out : « Présomption d’appartenance au groupe tant que l’intéressé n’a pas manifesté une volonté contraire ». Cette définition correspond exactement, sauf erreur de ma part, à la procédure simplifiée introduite la semaine dernière par le rapporteur de la commission des affaires économiques.

L’analyse juridique de cette procédure conduit donc à la qualifier d’opt-out. Ce n’est pas parce que l’on dit, chers collègues, que la procédure simplifiée est une opt-in qu’elle ne sera pas, dans les faits, d’un point de vue juridique, une opt-out, c’est-à-dire une version très élargie de l’action de groupe. Aussi, je voudrais savoir quel sort vous allez réserver à cette nouvelle procédure qui, bien loin de simplifier la vie des consommateurs et des entreprises, mettrait à mal le tissu économique déjà fragile de la France aujourd’hui.

J’ajoute que le Parlement européen a marqué sa préférence pour l’opt-in. Je voudrais que l’on en reste à sa position, pour les raisons que j’ai évoquées en commission la semaine dernière : il ne faut pas que le droit français soit à l’origine, en matière de consommation, de distorsions de concurrence au détriment de nos entreprises. Il y va de nos emplois, de la compétitivité de nos entreprises, qui sont des enjeux majeurs, comme ne cessent de le répéter le Président de la République, le Premier ministre et l’ensemble du Gouvernement. Je ne voudrais pas que l’on adopte aujourd’hui, dans l’hémicycle, une position différente.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Monsieur le ministre, cet article porte sur la mesure phare de votre projet de loi, l’action de groupe, l’équivalent des class actions anglo-saxonnes, destinée à régler les litiges de consommation de masse. Vous l’avez beaucoup réclamée lorsque vous étiez dans l’opposition et vous la mettez logiquement en œuvre aujourd’hui.

Je rappelle en préambule que le premier droit du consommateur est précisément de pouvoir consommer ; le recul historique du pouvoir d’achat des Français depuis un an est objectivement un mauvais coup porté aux consommateurs. Mais passons.

L’économie anglo-saxonne, et l’économie américaine en particulier, souvent érigée sur vos bancs en contre-exemples, vous fournit en la matière, même si certains juristes pointent le risque d’inconstitutionnalité du recours exclusif à des associations agréées seules habilitées à aller devant le juge, une modélisation. Vous avez certes voulu en gommer les excès possibles en termes de judiciarisation, mais l’esprit est le même : comment punir une entreprise indélicate ou frauduleuse et indemniser les consommateurs victimes ou se jugeant tels ?

J’observe que, dans ce débat on ne peut plus légitime – nous sommes tous des consommateurs désireux d’être prémunis contre un défaut de rationalité ou de concurrence –, il n’est jamais question du risque, peut-être létal, qu’encourent les entreprises. En dépit des propos se voulant rassurants de la présidente de l’association de consommateurs CLCV, le risque est bien réel, tout simplement parce que, malgré les garde-fous que vous souhaitez introduire, il s’agit d’un mouvement irrépressible vers la judiciarisation plutôt que vers la médiation.

En conclusion, je reviendrai sur un amendement qui prévoit qu’un rapport du Gouvernement sera remis au Parlement pour établir un bilan de l’action de groupe…

M. Razzy Hammadi, rapporteur de la commission des affaires économiques. Oui, c’est prévu !

Mme Annie Genevard. …« afin d’étendre son champ d’application ». Dans une démarche intellectuellement équilibrée, je souhaiterais que l’on puisse évoquer l’hypothèse de restreindre le champ d’application si des dérives apparaissent. C’est une question d’équilibre nécessaire.

M. Thierry Benoit. Elle a raison !

M. le président. La parole est à M. Yannick Favennec.

M. Yannick Favennec. Monsieur le ministre, nous ne pouvons que soutenir votre volonté d’améliorer la protection des consommateurs, dans un contexte de baisse historique du pouvoir d’achat des ménages, mais les entreprises, et notamment les PME, moteur de notre économie, doivent être préservées. Il ne faut pas faire peser sur leur activité des charges excessives, alors qu’elles sont confrontées à la crise économique et à une fiscalité déjà très contraignante.

Or votre texte prévoit des procédures administratives très complexes ; de nombreuses dispositions visent à renforcer le pouvoir administratif et instaurent des sanctions. La mesure phare, l’action de groupe, risque de représenter un pas supplémentaire vers une judiciarisation de notre vie économique. Les PME, qui ne disposent pas pour se défendre des mêmes moyens financiers que les grands groupes, en seraient les victimes. Utilisée comme moyen de pression, une telle procédure, si elle n’est pas précisément encadrée, pourrait porter atteinte à leur pérennité.

C’est la raison pour laquelle nous avons déposé des amendements privilégiant la voie de la médiation plutôt que des procédures judiciaires dommageables tant pour les consommateurs que pour les entreprises. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous réserviez le meilleur accueil aux propositions du groupe UDI, qui se veulent avant tout constructives et efficaces.

M. Thierry Benoit. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre, mon propos fera écho à celui de Yannick Favennec : le groupe UDI salue, sur cette question de l’action de groupe, votre pragmatisme et votre précaution. Qui peut le plus peut le moins, chers collègues de l’UMP. L’action de groupe est en France quelque chose de nouveau. Je souhaite, monsieur le ministre, que vous limitiez et encadriez clairement le dispositif, comme c’est le cas avec le texte qui émane de la commission des affaires économiques. Il convient de permettre aux Français qui ont subi un préjudice d’ordre économique, qui ont été victimes de pratiques anticoncurrentielles, de pratiques commerciales déloyales, d’obtenir réparation, mais je souhaite, comme vous l’avez prévu, que l’on borne dans un premier temps cette action de groupe,…

M. Yannick Favennec. Très bien !

M. Thierry Benoit. …avant de voir, sans précipitation, si ce dispositif peut être étendu à d’autres secteurs, par exemple la santé et l’environnement.

Encore une fois, je me réjouis que vous ayez encadré le dispositif d’action de groupe. Nous souhaitons, au groupe UDI, que l’article, travaillé et amendé, permette de le contenir, car, comme l’a rappelé Yannick Favennec ainsi que certains collègues de l’UMP – pas tous –, les entreprises, notamment les constructeurs, les fabricants, les vendeurs, ont besoin aujourd’hui, dans un contexte économique difficile et perturbé, de sérénité. Je pense que c’est votre position, ainsi que celle du rapporteur et du président de la commission des affaires économiques. Ce sera le sens des amendements que nous défendrons, qui privilégient la médiation, et qui surtout permettraient d’éviter tout dérapage et tout excès de ce dispositif, nouveau en France, qu’est l’action de groupe. Tirons les leçons de l’exemple des class actions, qui parasitent parfois les relations commerciales aux États-Unis. Soyons-en éclairés et procédons, en France, par petites étapes.

M. Yannick Favennec. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Tous les orateurs précédents l’ont dit, ce que nous voulons, c’est une action de groupe à la fois encadrée et efficace : le fait qu’elle soit encadrée ne doit pas la rendre inefficace. Or ce que nous constatons, et nous le regrettons, c’est qu’entre le texte initial et aujourd’hui, nous sommes passés d’une à deux actions de groupe, ou bien au remplacement de l’une par l’autre. Sans vouloir souligner d’éventuelles difficultés au sein de la majorité, j’ai le sentiment que l’action de groupe « Hammadi » a remplacé l’action de groupe « Hamon ».

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Nous sommes foudroyés par la force de l’argument !

M. Damien Abad. Vous le savez bien, monsieur Hammadi ! Quand vous parlez d’une action de groupe simplifiée, n’est-ce pas reconnaître que la procédure initiale était trop complexe ? Vouloir une action de groupe simplifiée, dès le stade initial, n’est-ce pas un aveu de faiblesse ? N’est-ce pas reconnaître implicitement que la procédure telle qu’elle a été conçue est inapplicable ?

Qu’est-ce qui différenciera les deux procédures ? Peut-être la discussion des amendements apportera-t-elle quelques éclaircissements sur ce point. Vous le savez comme moi : un groupe de consommateurs clairement identifié, cela ne repose sur aucun fondement juridique. On peut prendre des exemples ici ou là, mais la vérité, c’est que la frontière entre les deux dispositifs est floue, et que vous n’allez pas au bout de vos choix et de vos convictions.

Nous pouvons tous nous retrouver sur le principe de l’action de groupe. À l’UMP, nous vous proposons des solutions. Le Président a une boîte à outils, nous vous en proposons une également.

M. Thierry Benoit. Des outils de marque !

M. Damien Abad. Il y a dedans deux ou trois actions de groupe : à vous de choisir. La différence entre nous, cependant, c’est que nous proposons des actions de groupe substituables l’une à l’autre, alors que vous en proposez qui se surajoutent l’une à l’autre. Nous verrons lors de la discussion des amendements quelles difficultés crée cette juxtaposition.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. On dit souvent que la parole politique est décrédibilisée. Or bien souvent, cela vient de tergiversations semblables à celles que l’on constate aujourd’hui ou que l’on a constatées depuis dix ans. J’ai fait faire un bref historique du serpent de mer de l’action de groupe depuis dix ans.

En 2003, Luc Chatel, alors député, dépose son rapport qui prône très clairement la mise en place d’actions de groupe. Le 4 janvier 2005, à l’occasion de ses vœux aux forces vives, Jacques Chirac annonce son intention de mettre en place les actions de groupe. Le 15 mars de la même année, le garde des sceaux, M. Perben, et le ministre de l’économie, M. Breton, rédigent une lettre de mission et demandent la mise en place d’un groupe de travail ad hoc. En octobre, ce groupe rend un rapport approfondi sur l’action de groupe. Le 26 avril 2006, Luc Chatel dépose une première proposition de loi. Le 8 novembre suivant a lieu le dépôt du projet de loi en faveur des consommateurs présenté par M. Thierry Breton. Je tourne des pages, parce que je ne peux pas tout dire…

M. Thierry Benoit. Mais non ! Le temps est programmé.

M. André Chassaigne. Le 31 octobre 2007 est déposé le projet de loi sur le développement de la concurrence au service des consommateurs. Le 3 juin 2008, Mme Lagarde demande du temps supplémentaire pour introduire dans le droit français l’action de groupe. Les petites étapes ont été franchies, il y a eu suffisamment de tergiversations et il est temps d’en venir aux actes. C’est pourquoi je salue cette première avancée.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Très bien !

M. André Chassaigne. Cela étant dit, j’ai retrouvé un amendement du 19 novembre 2007.

M. Thierry Benoit. C’est vieux, il doit être éventé !

M. André Chassaigne. Cet amendement très clair vise à préciser que l’action de groupe peut être engagée à l’occasion de tout préjudice civil, de nature contractuelle ou délictuelle, en matière de consommation, de santé, d’environnement ou de concurrence. Cet amendement est extrêmement bien écrit, extrêmement précis et son exposé sommaire répond à toutes les interrogations.

M. Damien Abad. Un amendement Ayrault ?

M. André Chassaigne. Cet amendement, rejeté par l’ancienne majorité, était un amendement de M. Montebourg.

M. Damien Abad. C’est la faute de Barroso !

M. André Chassaigne. Vous ne m’empêcherez pas de penser qu’à un certain moment, la parole politique perd de sa crédibilité.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je ne suis pas allée, comme M. Chassaigne, rechercher l’historique de l’action de groupe.

M. Thierry Benoit. Vous avez bien fait. C’est vivre avec son temps !

Mme Marie-Christine Dalloz. J’ai seulement pris en compte ce projet de loi. L’article 1er définit le champ d’application de la procédure d’action de groupe et les conditions d’exercice de ce dispositif. Or je lis, non sans étonnement, que « le droit d’introduire l’action sera réservé aux seules associations nationales agréées de consommateurs ». Plus grave encore : « L’agrément dont [les associations] disposent garantit leur indépendance à l’égard de tout intérêt professionnel et permet d’éviter le risque de procédures dilatoires instrumentalisées par un concurrent. » On croit rêver ! Nous vivons dans un autre monde…

M. Damien Abad. Exactement !

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous venez d’adopter un texte sur la transparence de la vie politique, dans lequel il est longuement question des conflits d’intérêts. Vous ne me ferez pas croire une seule seconde que certaines associations, disposant d’un agrément, ne seront pas au cœur de conflits d’intérêts dans certaines actions de groupe.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. C’est-à-dire ?

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. C’est sous le regard du juge !

Mme Marie-Christine Dalloz. Aussi me semble-t-il qu’un encadrement était nécessaire – sur ce point, je vous rejoins, monsieur Chassaigne. Mais, si une association a le droit d’ester en justice, elle ne peut pas ni ne doit devenir un passage obligé pour un justiciable. Or c’est exactement ce que vous êtes en train de mettre en place.

M. Damien Abad. Exactement !

Mme Marie-Christine Dalloz. Le justiciable doit pouvoir continuer à faire valoir sa cause individuellement ou collectivement, sans être obligé de faire appel à une association : or votre texte l’oublie complètement.

M. Damien Abad et M. Gilles Lurton. Très bien !

M. le président. Nous en venons aux amendements à l’article 1er.

Je suis saisi de deux amendements, nos 197 rectifié et 705, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Frédéric Lefebvre pour soutenir l’amendement n° 197 rectifié.

M. Frédéric Lefebvre. Je vais être rapide puisque j’ai déjà évoqué cet amendement plus tôt. J’ai travaillé avec les services de la DGCCRF sur la base d’une idée que j’avais défendue dans mon livre :…

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Zadig et Voltaire ?

M. Frédéric Lefebvre. …il convient de procéder par étapes, avec une phase de médiation particulièrement importante, compte tenu de la nécessité d’éviter, dans l’intérêt de tous – des consommateurs comme des entreprises –, la judiciarisation de notre économie, comme le disait le groupe UDI. Il s’agirait de délimiter clairement le champ de l’action, la réparation des préjudices matériels, champ qui pourrait être étendu par la suite aux questions de santé ou d’environnement.

Le préalable obligatoire consiste dans cette procédure de médiation fondée sur des informations ou des plaintes de consommateurs suffisamment étayées pour caractériser l’existence d’un dommage causé à un nombre significatif de consommateurs, du fait de l’agissement d’un même professionnel. Les associations de consommateurs agréées au plan national et bénéficiant d’une reconnaissance spécifique – un verrou qui s’apparente au vôtre – se verraient reconnaître, au nom des consommateurs considérés collectivement, la capacité de proposer au professionnel concerné la possibilité d’un accord de règlement à l’amiable. Ce ne serait qu’en cas d’échec de cette phase de médiation que commencerait une phase judiciaire.

L’intérêt et la qualité pour agir ne seraient reconnus à titre principal qu’au ministre de l’économie. Un tel dispositif n’est pas nouveau en droit français, puisqu’il s’inspire de l’action reconnue au ministère de l’économie en application de l’article L.442-6-3 en matière de lutte contre les pratiques restrictives de concurrence. L’action serait introduite devant les tribunaux de grande instance spécialement désignés à cet effet.

Cette action de groupe relèverait ainsi d’un système équilibré. On peut m’opposer la longueur de la procédure, mais si la médiation aboutit, tout le monde y gagnera – les consommateurs comme les acteurs économiques.

Voilà une proposition d’action collective équilibrée que je soumets au débat, tout en reconnaissant que la vôtre recherche aussi une forme d’équilibre. Toutefois, nous devrons nous prononcer clairement sur le bouleversement de l’équilibre général provoqué par l’adoption d’un amendement de la commission des affaires économiques.

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 705.

M. Damien Abad. Cet amendement vise à reprendre le dispositif qui avait été suggéré dans la proposition de loi Chatel : il s’agit de vous donner un certain nombre de pistes et de solutions pour rendre plus effective et plus rapide la procédure d’action de groupe.

L’action de groupe s’impose aujourd’hui, mais il faut la rendre efficace et l’encadrer. Nos conceptions de la procédure – je parle de votre dispositif principal – diffèrent sur plusieurs points. Tout d’abord, nous estimons que les victimes devraient être connues en amont, ce qui permettrait aux entreprises de mieux évaluer le montant qu’elles auraient à rembourser, le cas échéant. De plus, votre dispositif pose la question de la conservation de la preuve, qui doit être améliorée – nous y reviendrons sans doute plus tard. Je ne reviens pas sur le sujet du déclenchement de l’action, que nous examinerons dans d’autres amendements : le restreindre aux associations de consommateurs agréées pose problème, s’agissant notamment du double filtre. Par ailleurs, en matière de liquidation, notre dispositif prévoit de confier cette gestion au tribunal plutôt qu’aux associations qui, elles-mêmes, reconnaissent la difficulté de supporter, tant financièrement que juridiquement, la totalité de la répartition individuelle des préjudices.

Cette solution est une solution alternative, après celle que vient de proposer notre collègue et ancien ministre, Frédéric Lefebvre. Nous voulons vous démontrer qu’au-delà du principe, il faut être attentif à l’efficacité du dispositif pour trouver une procédure qui, tout en respectant les règles de droit, soit la plus efficace et la plus rapide si l’on veut permettre aux consommateurs d’obtenir réparation de leur préjudice.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements soumis à discussion commune ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur de la commission des affaires économiques. Avant toute chose, je veux apporter un éclaircissement pour faire preuve de méthode et de rigueur intellectuelle dans l’accomplissement de notre travail. Puisque vous m’avez directement interpellé sur le dispositif dit accéléré, sachez – nous y reviendrons le moment venu – que le rapporteur défendra un amendement pour que le doute ne puisse être permis sur l’existence d’un opt-out ou la remise en cause d’un dispositif qui est en effet équilibré, sans pour autant – comme nous l’avons vu et discuté en commission – que cela nuise à la rapidité et à l’efficacité, quand le contexte le permet.

Monsieur Lefebvre, je suis heureux que nous nous accordions aujourd’hui sur la nécessité des actions de groupe. Espérons que nous serons encore d’accord à la fin de nos débats sur l’article 1er et que vous n’aurez pas changé d’avis. En effet, le 3 juin 2011, Les Échos titrait : « Frédéric Lefebvre enterre les actions de groupe » : vous considériez alors qu’elles étaient étrangères à la tradition juridique française, quand peu avant, dans votre ouvrage, vous y étiez favorable.

Puisque le principe des actions de groupe est désormais admis, laissez-moi revenir sur le fond de votre amendement. Je me permets de prendre ici un peu de temps, car l’article 1er constitue bien l’essentiel de ce texte. Le dispositif que vous proposez est très restreint, mais surtout très imprécis. Je n’ai trouvé nulle part en effet dans le droit français « l’atteinte sensible à l’ordre public économique ». Il existe l’atteinte à l’ordre public économique, qui relève du droit de la concurrence, mais le sens de l’atteinte « sensible » m’échappe, sauf à considérer que le caractère « sensible » soit défini par le ministre de l’économie, puisque c’est à la condition qu’il veuille bien s’en saisir que l’action de groupe pourrait exister.

Résumons. Selon vous, lorsque des consommateurs lésés pour un petit dommage de cinq ou dix euros voudront lancer une action de groupe, ils devront se regrouper et interpeller M. le ministre de l’économie, qui agira selon son bon vouloir – nous ne sommes alors plus dans le droit. Or si nous créons une telle procédure, c’est pour permettre une réparation effective. Je voudrais à ce propos balayer quelques arguments sur la mise en difficulté des entreprises. Quelle entreprise peut aujourd’hui, lorsqu’elle se donne les moyens de sa compétitivité, se plaindre de ce qu’un législateur se saisisse de la mauvaise concurrence, celle qui trompe à travers les procédés anti-concurrentiels, celle qui lèse et pourrit le marché en vendant des produits défectueux en connaissance de cause ou en trompant le consommateur avec des informations pré-contractuelles biaisées ?

Au contraire, l’action de groupe participe de la fameuse montée en gamme que nécessite le made in France.

Je poursuis, monsieur Lefebvre. Le ministre de l’économie, une fois saisi, mobiliserait ses services pour « procéder aux investigations nécessaires auprès des consommateurs ». Plusieurs centaines, voire plusieurs milliers de consommateurs pourraient être concernés. Une fois que le ministre aurait accepté de se saisir de l’action de groupe, il choisirait l’association agréée – pourquoi celle-ci et pas une autre ? – ; on dépenserait ainsi des millions d’euros pour que les agents de la DGCCRF ou leurs équivalents, plutôt que de traquer la malfaçon ou la tromperie économique, aillent interviewer chaque consommateur et mener les investigations nécessaires auprès de chacun d’entre eux ! On n’est plus dans la machinerie administrative, monsieur Lefebvre : c’est Kafka, pour ne pas citer Brazil.

M. André Chassaigne. Kafka, qui a été traduit par Alexandre Vialatte ! (Sourires.)

M. Razzy Hammadi, rapporteur. J’ai été assez long sur l’amendement n° 197 rectifié. J’ajouterai cependant qu’il présente un point commun avec l’amendement Abad, puisque celui-ci inverse la charge de la publicité et de la responsabilité, ce que nous n’avons pas voulu pour, justement, ne pas faire subir aux entreprises la pire condamnation qui soit : la publicité avant même que leur responsabilité soit fondée en droit.

M. Damien Abad. Vous caricaturez !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Imaginez une entreprise dont on annoncerait dans tous les journaux qu’elle serait responsable ou soupçonnée de l’être sans que cela soit prouvé !

M. Thierry Benoit. Monsieur le président, nous avons compris l’argumentation du rapporteur !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Le pompon, monsieur Lefebvre, c’est que vous contrevenez à un principe constitutionnel fondamental, dont il sera d’ailleurs question à propos d’autres amendements, en précisant que la décision du ministre serait « insuceptible de tout recours ».

M. Thierry Benoit. On a compris !

M. Lionel Tardy. Il y a plus de 70 articles !

M. le président. Seul le rapporteur a la parole, mes chers collègues.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Vous rendez-vous compte, monsieur Benoit ? C’est contraire à un principe constitutionnel inscrit dans le droit français depuis l’arrêt « Dame Lamotte » de 1950 !

M. Pascal Cherki. Cours de droit administratif deuxième année !

M. Thierry Benoit. Monsieur le président, faites quelque chose ! (Sourires.)

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je conclurai sur un point. (« Ah ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. Lionel Tardy. C’est parler pour parler !

M. Thierry Benoit. Enlevez les piles ! (Rires.)

M. le président. Mon cher collègue, si vous pouviez vous dispenser de ce genre de remarque, je vous en saurais gré.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. J’ai dit, monsieur Benoit, que je prendrai du temps pour expliquer la position de la commission sur ces amendements, mais je n’en prendrai pas autant pour démontrer un certain nombre d’autres incohérences.

Monsieur Abad, lors de votre intervention sur l’article, vous avez dit que votre amendement est complémentaire de celui de M. Lefebvre. Mais celui-ci conditionne l’action de groupe au bon vouloir du ministre alors que vous, vous proposez qu’elle soit ouverte à toutes les associations.

M. Damien Abad. Faites un choix, monsieur le rapporteur !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je vous invite à vous mettre d’accord et vous, monsieur Lefebvre, à vous mettre définitivement en accord avec vous-même. Avis défavorable aux deux amendements.

M. Lionel Tardy. À ce rythme-là, il nous faudra deux semaines !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation, pour donner l’avis du Gouvernement sur les amendements n°s 197 rectifié et 705.

M. Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l’économie sociale et solidaire et de la consommation. Avis défavorable pour une raison assez simple que j’ai déjà évoquée tout à l’heure. Tout d’abord, je vous invite à vous mettre d’accord parce que la proposition de M. Lefebvre, qui exclut la concurrence, instaure une médiation obligatoire et le filtre du ministre, et celle de M. Abad cosignée par Mme Vautrin, n’ont rien à voir.

Mme Laure de La Raudière. Et alors ? C’est la liberté d’amendement des parlementaires !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Pour répondre à l’argument de Mme de La Raudière tout à l’heure, je rappelle que le champ que nous proposons pour l’action de groupe n’est pas restreint, puisque c’est celui où il y aura le plus de contestations des rentes économiques.

J’ai énormément de désaccords avec M. Debré sur le plan politique, mais je sais que c’est un grand professeur de médecine, un grand médecin,…

M. Daniel Fasquelle. Attention à ce qui va suivre après les flatteries ! (Sourires.)

M. Benoît Hamon, ministre délégué. …et qu’on ne trouve pas toujours des médecins pour défendre la position qui est la sienne sur l’action de groupe dans le champ de la santé.

M. Gérard Bapt. Il est bien isolé !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je veux donc lui dire que le problème n’est pas d’étendre la procédure que nous allons mettre en place par ce texte, car celle que nous proposerons dans le champ de la santé sera différente et ne relèvera pas exactement de la même logique.

Sur le calendrier, qui est important, je dois à la représentation nationale d’être plus précis que je ne l’ai été aux questions au Gouvernement et dans mon intervention clôturant la discussion générale. L’action de groupe contenue dans le projet de loi « consommation » s’exercera dans le champ où les préjudices économiques ou concurrentiels sont les plus nombreux, y compris les services financiers, bref : dans le monde réel que vivent les Français, avec les litiges du quotidien et de la consommation. Puis, début 2014, la ministre de la santé fera des propositions pour créer une action de groupe adaptée aux préjudices en matière de santé et aux dommages corporels, qui correspondra sur beaucoup de points à l’analyse qui est celle de M. Debré.

Je ne suis pas d’accord avec l’amendement de M. Abad – qui prévoit de mettre en place, en dessous d’un certain seuil, un système équivalent à l’opt-out –…

M. Damien Abad. Ce serait une action de groupe simplifiée !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. …et très défavorable à la vision de M. Lefebvre, qui mutilerait considérablement l’action de groupe.

(Les amendements nos 197 rectifié et 705, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme Laure de La Raudière. Vous êtes défavorables à tous nos amendements !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Mais on vient juste d’examiner les deux premiers, ma chère collègue !

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 443, 175 et 177, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour soutenir l’amendement n° 443.

M. Jean-Pierre Decool. L’agrément administratif est incohérent en ce qu’il rompt le principe d’égalité devant la loi. Une meilleure issue serait celle de l’examen par le juge des conditions définies par la loi. Le renvoi au décret des conditions juridictionnelles de recevabilité de l’action de groupe présente le risque d’une censure pour incompétence négative. En vertu de l’article 34 de la Constitution, selon lequel le soin revient au législateur et non au pouvoir réglementaire de déterminer les « règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens dans l’exercice des libertés publiques », il est en effet recommandé que les critères soient définis par la loi. Cette rédaction permettrait également que l’action de groupe soit ouverte à une association existante ou ad hoc,…

M. Damien Abad. Eh oui !

M. Jean-Pierre Decool. …constituée après la réalisation des premiers préjudices et dont le juge contrôlerait le sérieux, l’objet social en lien avec l’intérêt à agir, le but non lucratif et la représentativité. Juste et conforme à la Constitution, le mécanisme de l’examen juridictionnel de la recevabilité d’une association à introduire une action de groupe se retrouve dans l’ensemble des États étrangers analysés dans l’étude d’impact accompagnant le texte.

Le projet de loi devrait plus largement ouvrir le champ d’application de l’action de groupe. Les illustrations de droit comparé dans l’étude d’impact montrent l’éventail des possibilités, en particulier la nécessité d’inclure les litiges boursiers et financiers pour lesquels l’action de groupe est particulièrement adaptée, et même nécessaire pour obtenir réparation des préjudices.

De plus, en vertu de l’article 4 de la Charte de l’environnement, « toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi ». Cette contrainte constitutionnelle semble donc également imposer d’inclure les préjudices environnementaux.

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement n° 175.

M. Gabriel Serville. Un certain nombre de principes, je l’ai fait remarquer hier soir lors de la discussion générale, auront beaucoup de mal à être mis en œuvre dans les outre-mer, particulièrement en Guyane. C’est pourquoi mon amendement tend à ouvrir à tous la possibilité d’initier une action de groupe.

En effet, dans la version actuelle du projet de loi, l’initiative est réservée aux seules associations de consommateurs agréées. Or ces associations pourraient souvent ne pas être en situation de représenter les consommateurs, et ce pour plusieurs raisons.

La première, c’est l’insuffisance de moyens et d’expertise car la gestion et la poursuite de telles procédures nécessiteront de mobiliser d’importants moyens humains, techniques et financiers. Or les associations agréées ne disposeront ni de la structure ni des moyens adéquats, ce qui comportera un risque réel d’inefficacité de la défense des consommateurs.

La deuxième raison, c’est le risque de conflit d’intérêts…

M. Damien Abad. Il a raison !

M. Gabriel Serville. …puisqu’en réservant à une vingtaine d’associations, peut-être moins, le monopole de l’initiative, on s’expose à l’éventualité qu’aucune d’entre elles n’initie une action de groupe lorsque telle ou telle action se révèlera contraire aux intérêts de l’association, à sa ligne politique, ou encore à la suite de pressions auxquelles elle aurait cédé.

La troisième raison, c’est une capacité de veille insuffisante et le manque de représentativité géographique. Certes, les consommateurs sont parfois très nombreux à subir un préjudice commun né des conditions de formation et d’exécution des contrats de consommation. Toutefois, le nombre de consommateurs risque très souvent de ne pas être suffisamment important pour justifier qu’une association nationale y prête attention ou les détecte. De surcroît, l’éloignement géographique rendra parfois la veille des associations nationales insusceptibles de détecter les problèmes, ce que j’ai fait remarquer concernant les départements d’outre-mer.

En limitant le nombre des acteurs capables d’agir en justice, on empêche le développement de structures spécialisées, réduisant d’autant les capacités d’investigation, la vigilance et donc les opportunités pour les consommateurs d’être représentés et indemnisés.

M. le président. Je vous laisse la parole pour soutenir l’amendement n° 177, monsieur Serville.

M. Gabriel Serville. Cet amendement tend à ouvrir la possibilité aux consommateurs d’être indemnisés de tous types de préjudices, matériels, corporels ou moraux. En effet, rien ne justifie de limiter le champ d’application de l’action de groupe à tel ou tel type de préjudice. Le mérite de l’action de groupe, c’est qu’elle vise à régler dans un seul jugement la question de la faute lorsque des consommateurs sont dans une situation identique ou similaire. Le fait que chaque consommateur ait, en sus d’un préjudice forfaitaire commun, un préjudice individuel ne représente aucunement un obstacle dirimant à la mise en œuvre de l’action de groupe dans un tel cadre.

Il faut savoir que l’ouverture de l’action de groupe aux dommages corporels ou moraux permettrait aux victimes de rechercher l’indemnisation plutôt que de s’engager dans un procès pénal qui risquerait d’être lent, coûteux et extrêmement douloureux. Le procès pénal fait bien souvent perdurer les drames, et il n’apporte pas forcément satisfaction aux victimes.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. S’agissant de l’extension du champ d’application du dispositif, M. le ministre y a répondu précédemment et moi aussi. Les annonces à ce sujet ont été faites notamment par Mme la ministre de la santé et ce matin même par Mme la ministre de l’environnement : nous voulons agir code par code.

Second point dont je tiens à souligner l’importance car nous y avons beaucoup travaillé au sein de la commission : l’article 3 intégrera dans le code de la consommation une définition du consommateur, selon laquelle est consommateur toute personne physique qui agit à titre non professionnel. Il n’y a donc aucune raison pour que l’activité boursière ou financière, à partir du moment où elle n’est pas professionnelle, ne soit pas concernée par l’action de groupe.

Pour ce qui concerne les dommages corporels, monsieur Serville, ils relèvent du domaine de la santé et supposent une individualisation qui poserait beaucoup de difficultés ici parce qu’elle ne saurait répondre aux conditions fixées par le début de l’article 1er qui prévoit le cas de « consommateurs placés dans une situation similaire ». Nous en sommes aux dommages matériels ; viendra, j’en suis convaincu et nous en serons les premiers militants à vos côtés, le temps de l’évaluation des dommages corporels dans le cadre d’une action de groupe réservée à la santé.

L’avis est donc défavorable aux trois amendements.

M. André Chassaigne. C’est dommage !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Si nous réservons aux associations nationales agréées – qui sont au nombre de seize, ce qui représente déjà une grande variété d’interlocuteurs – la faculté de porter des actions de groupe qui pourront être déclarées recevables par un juge, c’est parce qu’il existe une cohérence parfaite entre l’objet social de ces associations et le champ de l’action de groupe : réparer les litiges de consommation et les pratiques anticoncurrencielles.

À celles et ceux qui se préoccupent de préserver les entreprises d’opérations de flibusterie économique, je signale qu’il vaut mieux que nous ayons ce garde-fou plutôt que de nous retrouver dans la situation où une entreprise constituera une association ad hoc de consommateurs pour mener une action de groupe contre un concurrent afin de porter atteinte à sa réputation en assurant la publicité de cette action de groupe avant même qu’elle ait été jugée recevable.

Nous allons donc éviter cette flibusterie judiciaire et essayer de faire en sorte que l’on protège véritablement les intérêts des consommateurs.

Vos remarques sont intéressantes, monsieur Serville, mais je suis défavorable à vos deux amendements, pour les mêmes raisons que le rapporteur. Vous mettez l’accent sur un sujet extrêmement sérieux et mon avis défavorable ne vaut pas désapprobation de la motivation de votre amendement sur la réparation des dommages corporels et des préjudices moraux.

Le travail auquel le Gouvernement associe la représentation nationale et la majorité est de concevoir, étape après étape, des procédures adaptées à la nature du préjudice que l’on veut réparer. On ne répare pas de la même manière et avec la même procédure le préjudice d’un consommateur qui a été trompé sur une barquette de lasagnes et un préjudice moral. Le préjudice et l’expertise ne sont pas de même nature ; la procédure est différente.

Nous devons procéder étape après étape ; l’action de groupe est une sorte de fusée – ce n’est pas à vous, monsieur Serville, que je vais apprendre la manière dont fonctionnent les fusées : vous êtes meilleur expert que moi, étant donné la localisation de votre circonscription. (Sourires.) C’est pourquoi je vous propose de retirer ces deux amendements.

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Monsieur le président, nous ne lancerons pas de fusée ce soir : je vais retirer mes amendements. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Laure de La Raudière. Eh voilà, nous allons les compter !

Mme Marie-Christine Dalloz. Ce n’est pas la peine d’en déposer !

M. Gabriel Serville. Monsieur le ministre, je prends acte de votre réponse. Nous aurons certainement l’occasion de revenir ultérieurement sur ces problématiques, notamment sur celle que j’ai évoquée ce soir : la Guyane étant éloignée de la métropole, nous avons souvent le sentiment d’être totalement en dehors des circuits, et je pense que ce sera le cas dans la relation avec les associations agréées. En tout cas, j’espère que les choses se passeront bien et que nous n’aurons pas de regret par rapport à la décision que nous aurons prise ce soir.

(Les amendements nos 175 et 177 sont retirés.)

(L’amendement n° 443 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 559.

M. Damien Abad. Cet amendement vise à élargir le déclenchement de l’action de groupe aux associations ad hoc. Pourquoi ? Parce que votre dispositif présente un risque réel d’inconstitutionnalité, en ce qu’il porte atteinte aux principes d’égalité et de liberté d’association.

D’ailleurs, j’aimerais savoir ce que dit le Conseil d’État à ce sujet. Vous avez refusé cette demande en commission, monsieur le ministre, mais, vous qui êtes un homme ouvert et pragmatique, acceptez-vous que le rapport du Conseil d’État soit soumis aux parlementaires en séance publique afin de les éclairer ?

Cet amendement vise donc à éviter les risques d’inconstitutionnalité de votre dispositif mais aussi à rendre l’action de groupe efficace. Lors de la discussion générale, je vous ai demandé de ne pas vous contenter d’un affichage, d’effets d’annonce et d’effets de manche,…

M. Germinal Peiro. Ne faites pas de procès d’intention !

M. Damien Abad. …sinon, votre action de groupe ne sera que l’action en représentation conjointe que l’on connaît. Vous savez en effet très bien que seulement deux des seize associations de consommateurs agréées ont pignon sur rue et que les autres seront incapables d’assurer la liquidation et un suivi juridique et financier.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Une association ad hoc en aurait-elle plus les moyens ?

M. Damien Abad. Vous le savez très bien parce que ces associations le reconnaissent elles-mêmes.

Au-delà du problème constitutionnel, nous vous proposons d’étendre et de renforcer l’efficacité de la procédure. En effet, outre les associations de consommateurs agréées, vous mettez un deuxième filtre, qui consiste à laisser à la libre appréciation desdites associations la décision de déclencher ou non une action de groupe.

Ma collègue Dalloz a parlé à juste titre d’un risque de conflit d’intérêt. Que se passe-t-il si une association de consommateurs agréée, seule habilitée à déclencher une action de groupe, refuse de le faire à un moment donné ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Eh oui, c’est exactement cela !

M. Damien Abad. Nous proposons donc de supprimer ce deuxième filtre, de lever certains verrous que vous posez sur vos propres dispositifs.

La philosophie de l’action de groupe n’est pas de défendre les associations de consommateurs, mais de défendre les consommateurs et d’assurer la réparation du préjudice. Or votre dispositif est très bon pour les associations de consommateurs, mais il est très mauvais pour les consommateurs parce qu’il vaut mieux être un consommateur dormant qu’un consommateur qui a envie de déclencher une action de groupe.

Mme Catherine Vautrin. Exactement !

Mme Marie-Christine Dalloz. Très juste !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Nous avons eu, en commission des affaires économiques, un certain nombre de débats sur le sujet. Cela fait trente ans que nous attendons cette action de groupe. Lorsque nous avons voulu faire en sorte qu’elle existe, nous en avons débattu avec les organisations représentatives, notamment au sein du Conseil national de la consommation.

Par ailleurs, rien n’empêche une association quelle qu’elle soit de faire appel à une association de consommateurs.

M. Damien Abad. Ce n’est pas pareil !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Il n’y a qu’une seule association agréée, dites-vous. Il y en a seize !

En outre, pourquoi diable toujours chercher à jeter la suspicion et à opposer les consommateurs aux associations de consommateurs ? En cent ans de mouvement consumériste, je ne crois pas qu’une seule association de consommateurs se soit rendue coupable de conflit d’intérêt.

Maintenant que l’on instaure l’action de groupe, dont vous n’avez pas voulu depuis des années, vous en venez à considérer qu’il pourrait y avoir un conflit d’intérêt selon l’association saisie ! Il faut rester précis et équilibré.

M. Damien Abad. Association ad hoc, c’est précis !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Il y a en effet un filtre : le choix de l’association de consommateur est adapté ; celle-ci est agréée, elle a une expérience, quelquefois dans des secteurs particuliers.

J’émets un avis défavorable à votre amendement, monsieur Abad.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Abad, je vous rassure : « la verte » du Conseil d’État ne contient aucune remarque sur l’action de groupe. Comme nous l’avons demandé, elle concerne spécifiquement le registre national du crédit. Il s’agit de deux sujets différents.

S’agissant des risques d’inconstitutionnalité du texte – et l’avis du Conseil d’État était important sur ce point –, nous avons vérifié que l’action de groupe ne porte pas atteinte à la règle selon laquelle « nul ne plaide par procureur ». De ce point de vue, le fait que nous garantissions l’opt-in permet d’éviter ce risque. De la même manière, il n’y a pas d’atteinte aux exigences en matière de droit de la défense ou de droit à un procès équitable. Nous nous sommes donc entourés de toutes les précautions nécessaires pour que ce texte soit validé par le Conseil constitutionnel.

J’émets donc un avis défavorable à la proposition que vous faites, pour les mêmes raisons que j’évoquais tout à l’heure. Madame Dalloz, je veux vous rassurer sur un point : avec seize associations de consommateurs agréées, il faudrait quand même un parcours du combattant invraisemblable pour que des consommateurs se voient empêchés d’aller au terme de leur démarche.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est possible !

Mme Catherine Vautrin. C’est une rupture d’égalité !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Pour ma part, j’attends aussi des associations qu’elles jouent leur rôle de conseil à l’égard des consommateurs, comme n’importe quel conseil le ferait. Seize associations de consommateurs présentes sur le terrain, c’est la garantie d’un maillage qui nous permettra de répondre à l’essentiel des préoccupations des consommateurs face à des groupes ou des entreprises qui les auraient potentiellement lésés.

J’émets donc un avis défavorable.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est dommage !

M. le président. La parole est à M. Pascal Cherki.

M. Pascal Cherki. Monsieur Abad, nous avons une différence d’approche, qui est d’ailleurs assez saine. Le fait de passer par le filtre des associations de consommateurs agréées – il y en a seize – marque la volonté de garantir que les actions de groupe seront menées dans l’intérêt des consommateurs. Ces associations sont agréées, reconnues au niveau national.

Mme Catherine Vautrin. Pourquoi leur donner le monopole ?

M. Pascal Cherki. Sinon, nous allons aller vers un système bien connu aux États-Unis : nous assisterons au développement de cabinets d’avocats spécialisés dans le domaine des actions de consommateurs, qui vont encourager certaines personnes à monter des associations ad hoc et qui vont se rémunérer au pourcentage sur la base des actions entreprises. Toute la philosophie du projet est justement de redonner de la force aux corps intermédiaires, notamment aux associations de consommateurs agréées.

M. le président. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Au moins, monsieur Cherki, votre intervention a le mérite de la clarté : nous sommes en désaccord sur ce point.

D’abord, je vous signale que les dérives du système américain ne sont pas liées au fait que des associations ad hoc puissent déclencher des actions de groupe, elles sont inhérentes aux particularités du système lui-même. Je pense au système de dommages punitifs, qui – et vous le savez fort bien, monsieur Cherki – existe aux États-Unis et qui n’existe pas chez nous.

Ensuite, vous parlez des corps intermédiaires. Moi, j’avais compris que ce texte était fait pour les consommateurs,…

Mme Catherine Vautrin. Bien sûr !

M. Damien Abad. …non pour les associations de consommateurs. C’est une vision respectable, que vous assumez. Mais j’aimerais que le rapporteur et le ministre l’assument également. Sur ce point, nous avons une vraie divergence de vues.

Revenons sur un point : cet amendement est central, car il apporte la preuve que vous instaurez l’action de groupe sans le vouloir vraiment. En fait, vous voulez faire plaisir à votre majorité, en créant une petite action de groupe portant uniquement sur les préjudices économiques et matériels. Pour la santé, le ministre prend un engagement mais renvoie la question à plus tard, sachant qu’un remaniement interviendra d’ici là et que de l’eau aura coulé sous les ponts. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Mais oui, vous le savez bien !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Restez sérieux !

M. Damien Abad. Monsieur le rapporteur, je voulais vous réveiller un peu parce que j’avais l’impression que le débat vous endormait.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je suis là !

M. Thierry Benoit. Ne réveillez pas le rapporteur !

M. Damien Abad. Monsieur le ministre, répondez franchement, honnêtement. J’habite dans le Bugey, où un promoteur immobilier est coupable d’avoir fait des canalisations défectueuses. Croyez-vous vraiment qu’une association nationale de consommateurs agréée va déclencher une action de groupe dans le Bugey contre un promoteur immobilier qui a construit des canalisations défectueuses ?

Plusieurs députés du groupe SRC. Bien sûr !

M. Damien Abad. Non, trois fois non ! Votre système ne défend pas les consommateurs. C’est un système parisien dont la seule visée est de médiatiser l’action de groupe, sans résoudre les véritables problèmes. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Mais oui !

Mes chers collègues, plutôt que d’être une majorité qui suit sans réfléchir (Protestations sur les bancs du groupe SRC)… Mais oui ! Vous ne pouvez pas, d’un côté, défendre l’extension du champ d’application de l’action de groupe à l’environnement et à la santé, et, de l’autre, refuser de la déverrouiller comme nous vous le proposons. Il faut être logique, assumer ses convictions et aller jusqu’au bout.

Le reniement c’est pour maintenant, et l’action de groupe ce n’est pas pour demain !

Mme Catherine Vautrin. Très bien !

(L’amendement n° 559 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 572 et 833.

La parole est à M. Thierry Benoit, pour défendre l’amendement n° 572.

M. Thierry Benoit. Il est défendu, monsieur le président. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Laure de La Raudière. Ce n’est pas pour cela qu’ils vont l’adopter !

M. Thierry Benoit. Le temps est programmé et compté, il faut préserver ses munitions !

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour défendre l’amendement n° 833.

Mme Annie Genevard. En préambule, je voudrais vous dire, monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, que, depuis un petit moment, vous essayez de nous opposer les uns aux autres.

Je vous dirai une chose. Il y a dix ou quinze jours, nous étions un certain nombre, qui siégeons sur ces bancs, à participer à un dîner du club Produire en France, avec M. le ministre du redressement productif.

M. Germinal Peiro. Excellent ministre !

Mme Annie Genevard. Savez-vous, monsieur le ministre, ce que votre collègue nous a déclaré ce soir-là ? Il nous a dit – et je ne doute pas que cette réflexion très intéressante nourrira le débat et votre réflexion – que, dans notre pays, pendant des années, nous avons plus soutenu le consommateur que le producteur, et, si nous en sommes là aujourd’hui, c’est parce qu’il y a eu un déséquilibre entre la protection du consommateur et celle du producteur. Je soumets cela à votre sagacité.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Précisément, le texte est équilibré !

Mme Annie Genevard. Cet amendement vise à ce que la procédure dite « d’opt-in » soit respectée tout au long de la procédure d’action de groupe. Cela offrirait deux garanties importantes. D’une part, l’association ne saurait, de sa propre initiative, soumettre des cas au juge sans que les consommateurs concernés en aient fait la demande expresse. D’autre part, les consommateurs assumeraient pleinement et collectivement la démarche collective dont ils sont coresponsables.

M. Pascal Cherki. La droite choisit ses victimes !

Mme Annie Genevard. Ce qu’on vous demande, monsieur le ministre, avec cet amendement dont je pense que vous pourriez, sans vous déjuger, l’accepter, c’est de concilier la responsabilité de l’individu avec l’efficacité du groupe.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Ces amendements identiques ont pour objet d’insérer les mots « dûment saisie », mais personne n’imaginerait qu’une association soit indûment saisie. Ils alourdissent donc le texte sans ajouter du sens.

Avis défavorable, donc.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

(Les amendements identiques nos 572 et 833 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Chantal Guittet, pour soutenir l’amendement n° 309.

Mme Chantal Guittet. Le projet de loi prévoit deux conditions cumulatives pour qu’une association de défense des consommateurs puisse agir : l’agrément et la représentativité au niveau national. Ces dispositions me paraissent très restrictives, puisque l’agrément peut être délivré à une association de consommateurs représentative sur le plan local, comme le prévoit le code de la consommation. Une telle association agréée ne pourrait donc pas engager d’action de groupe.

L’agrément est déjà suffisamment encadré. Il est très difficile, pour une association, de l’obtenir, et rien ne justifie, à mon sens, qu’une association agréée par les pouvoirs publics, ce qui est un gage de fiabilité – c’est écrit sur le site du service public –, se voit privée du droit d’engager des actions de groupe.

Nous proposons donc de supprimer la condition de représentativité nationale, afin que toutes les associations agréées par les pouvoirs publics puissent agir au nom d’un groupe de consommateurs.

M. Lionel Tardy. Eh bien, on y arrive !

Mme Catherine Vautrin. Ce n’est quand même pas tout à fait ce qu’on proposait.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Nous avons eu ce débat, madame la députée, en commission des affaires économiques. Il a aussi été abordé, je crois, en commission des lois.

Comme je l’ai dit, de nombreuses concertations, depuis des mois, ont présidé à l’élaboration de ce projet. Avec Annick Le Loch et l’ensemble des parlementaires, dont un grand nombre sont ici présents, nous avons auditionné une multitude d’associations de consommateurs.

Vous considérez que le critère de représentativité au niveau national ne doit pas être retenu et que seul doit être considéré l’agrément, mais l’agrément préfectoral, au niveau local, n’est pas l’agrément au niveau national. Il diffère par sa nature et par les compétences concernées.

Votre amendement est de nature, même dans son esprit, à instiller une confusion à ce stade de la discussion : il accrédite l’idée d’un possible parallélisme des formes. Ce qui est localement agréé serait tout aussi légitime que ce qui est agréé au niveau national. Mais ça n’est pas le même agrément, ce n’est pas la même compétence, ça n’est pas non plus conforme à l’esprit dont procède le texte que nous examinons. Nous avons voulu nous référer à l’état de notre droit, à notre patrimoine juridique, en envisageant notamment la procédure dite conjointe, en considérant la question de l’antériorité de l’association ou encore le motif à agir, prévu par le code civil.

Cela peut justifier la double condition que nous posons.

Instaurant l’action de groupe après trente années d’attente, chère collègue Guittet, nous avons voulu prendre toutes les précautions en retenant ces seize associations nationales agréées, connues et reconnues, et ne pas nous lancer dans l’aventure d’actions qui seraient intentées par des associations locales. Nous ne voulons pas compromettre le succès, la réussite du dispositif, et nous aurions couru ce risque si nous n’avions pas retenu le double filtre de l’association nationale agréée et du juge.

Je vous prie donc, madame la députée, de bien vouloir retirer votre amendement, même si j’entends votre demande. À terme, lorsque l’action de groupe aura fait ses premiers pas, qu’un rapport pourra nous permettre d’évaluer, puisqu’un amendement est déposé en ce sens, nous pourrons à nouveau évoquer la question que vous soulevez.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Qu’est-ce qui justifie aujourd’hui que les associations nationales de consommateurs reçoivent un agrément et jouissent, en contrepartie de cet agrément, outre de la possibilité de siéger au conseil national de la consommation, de celle de recevoir des financements ? L’agrément se justifie par la représentativité : le nombre d’associations locales, le nombre d’adhérents, la réalité des permanences au niveau local. Ce sont ces paramètres qui justifient qu’elles soient jugées représentatives, suffisamment pour qu’elles soient agréées et donc disposent de cette possibilité de représenter le mouvement consumériste.

Je crois que l’action de groupe, telle que nous l’avons pensée, contribuera à la structuration du mouvement consumériste, notamment dans les territoires dans lesquels il est insuffisamment représenté. De ce point de vue, ce sera un outil important pour multiplier les moyens, pour les consommateurs, de faire valoir leurs droits. Le fait que ce soient d’ailleurs des instances spécialisées des TGI qui auront à connaître des actions de groupe facilitera la structuration de ce mouvement consumériste, y compris outre-mer, monsieur Serville.

En l’état, la logique est de réserver aux associations nationales agréées et à leurs relais locaux la possibilité de porter des actions de groupe. C’est pourquoi je vous demande, madame la députée, de bien vouloir retirer cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Chantal Guittet.

M. Damien Abad. C’est l’instant de vérité !

Mme Chantal Guittet. Après ces explications, je veux bien…

M. Damien Abad. Troisième amendement, troisième retrait !

Mme Laure de La Raudière. Trois sur trois !

Mme Chantal Guittet. Me laissez-vous parler ?

Après ces explications, je veux bien retirer cet amendement (Sourires et exclamations sur les bancs du groupe UMP), mais je crois qu’il faut faire attention aux mots qu’on emploie : on parle de fiabilité mais les associations agréées localement sont fiables !

(L’amendement n° 309 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n° 751.

Mme Jeanine Dubié. J’ai bien entendu les explications du rapporteur et du ministre, mais je persiste. Je crois qu’il est dommage de se priver de la possibilité de permettre à des associations locales agréées de conduire une action de groupe. Notre amendement vise à la fois à leur offrir cette possibilité et à définir un périmètre sur lequel elles peuvent porter cette action. Celui-ci correspond au cadre territorial de l’activité conduite par ladite association.

Il nous semble en effet qu’il serait opportun de permettre aux associations locales reconnues pour leur compétence, leur représentativité et leur proximité avec les consommateurs de pouvoir agir devant une juridiction afin d’obtenir la réparation des préjudices individuels subis.

De plus, en ouvrant la qualité à agir aux associations de consommateurs agréées localement, cet amendement permettrait de donner plus d’efficacité aux futures procédures d’actions de groupe, tout en maintenant le principe du filtre.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Avis défavorable, pour les raisons déjà indiquées, à moins que vous n’acceptiez, madame la députée, au regard des explications précédemment données à propos des associations nationales agréées, de retirer l’amendement. Ce ne serait pas un retrait de recul, ce serait un retrait de cohérence, chère collègue.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je suivrai le rapporteur, ce qui ne surprendra pas Mme Dubié, puisque nous avons déjà eu l’occasion d’échanger en commission des affaires économiques.

En dépit des arguments que l’on peut entendre ici ou là, qui ne sont pas toujours très étayés, très charpentés, je pense, même si je comprends votre préoccupation, madame la députée, qu’il faut réserver l’action de groupe aux associations nationales agréées. Cela n’enlève rien à leur capacité de capter des actions de groupe, au contact des territoires, et de les porter et de leur donner un débouché.

C’est la raison pour laquelle la cohérence veut que je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.

M. le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié.

Mme Jeanine Dubié. J’entends l’argument de la cohérence, et je retire mon amendement. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

(L’amendement n° 751 est retiré.)

Une députée du groupe UMP. Quatrième retrait !

(Mme Catherine Vautrin remplace M. Marc Le Fur au fauteuil de la présidence.)

Présidence de Mme Catherine Vautrin
vice-présidente

Mme la présidente. Je suis saisie d’un amendement n° 525, qui fait l’objet d’une demande de scrutin public par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Philippe Nilor, pour soutenir cet amendement.

M. Jean-Philippe Nilor. Cet amendement est essentiel, puisqu’il vise tout simplement à réparer un oubli dont les conséquences peuvent être très graves. L’article 1er, dans sa rédaction actuelle, pose la condition d’une représentativité au niveau national. Or, en outre-mer, il existe des associations agréées au sens de l’article L. 411-1 du code de la consommation qui ont une résonance nationale, comme l’AFOC et l’UC-CLCV en Martinique, et d’autres qui ont une résonance purement régionale, par exemple, pour la Martinique, l’ADCM, l’ADCF, l’ADCBP et l’ADCSM. Ces associations d’outre-mer agréées, qui ont pignon sur rue, qui font leurs preuves au quotidien, qui ont une connaissance et une expertise optimale du terrain local, doivent être pleinement associées au dispositif, y compris – j’y insiste – celles qui ne sont pas affiliées à une organisation nationale.

Le texte ne tient pas compte de la spécificité de l’outre-mer. Or celle-ci a notamment été reconnue par votre propre gouvernement, monsieur le ministre, puisqu’il a fait adopter une loi de régulation économique outre-mer. Si une telle spécificité existe au niveau économique, elle se retrouve certainement au niveau du mouvement consumériste.

M. Marc Dolez. Très bien !

M. Jean-Philippe Nilor. Par ailleurs, les seize associations agréées que vous autoriserez ne sont pas toutes représentées outre-mer. J’appelle votre attention sur ce point. Il existe donc un risque d’accès inégal à l’action de groupe et aux corps intermédiaires.

M. André Chassaigne et M. Marc Dolez. C’est vrai !

M. Jean-Philippe Nilor. Ces corps intermédiaires sont situés à 8 000 kilomètres !

Pour nous, monsieur le ministre, « structuration » ne veut pas systématiquement dire « subordination ». Je suis surpris qu’un jeune ministre comme vous, que je croyais plus ouvert que cela, s’enferme dans une vision, finalement, coloniale des choses. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Régis Juanico. Propos scandaleux !

M. André Chassaigne. Respectez l’orateur. Nous n’avons pas de leçons à recevoir !

Mme Annie Genevard. Ça, on n’aurait pas osé ! (Sourires sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Un peu de calme, mes chers collègues, s’il vous plaît !

M. Jean-Philippe Nilor. Cet amendement relève tout simplement du bon sens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Lorsque j’ai pris connaissance de votre amendement, monsieur le député, en le lisant une première fois très rapidement, comme on le fait lorsqu’on parcourt la liasse d’amendements, j’ai cru que vous évoquiez les cas où il n’y avait pas d’association nationale agréée. J’ai vérifié, et, dans l’exposé sommaire, vous évoquez notamment l’UC-CLCV, qui est affiliée. Je me suis donc dit, relisant votre amendement, que le problème était plutôt celui de la reconnaissance d’associations locales auxquelles vous attribuez, pour des raisons de sensibilité, une dimension nationale ; vous parlez ainsi de résonance nationale.

Je vous réponds donc qu’il n’est interdit à aucune association locale, même si elle n’est pas affiliée à une organisation nationale, de faire appel à une association nationale afin de déclencher une action de groupe. Ainsi, 65 millions de Français, sur 100 % du territoire de la République, auront accès à l’action de groupe.

Je ne vous propose pas de retirer votre amendement, mais je donne évidemment un avis défavorable à son adoption. Je souhaite continuer cet échange avec vous, au-delà de la présente discussion. Je pense en effet que ce sujet mérite d’être creusé, mais pas en ces termes.

M. Damien Abad. Allez ! Il faut accélérer la cadence, un peu !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Vous évoquez un sujet particulier, différent de la question des associations nationales agréées : c’est la raison pour laquelle l’avis de la commission est défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je ne tiendrai pas compte de certains mots que vous avez employés, monsieur le député : dans le débat, j’accepte tout. Cependant, je veux vous montrer la cohérence du dispositif que nous envisageons. Nous voulons confier la possibilité de lancer les actions de groupe à des associations nationales agréées. Pourquoi cela ? Parce que nous voulons que ces associations aient les moyens de porter les actions de groupe : nous voulons qu’elles aient les épaules suffisamment larges pour cela.

Une action de groupe, en outre-mer comme en métropole, ce ne sera pas une petite aventure. Pour mener à bien cette procédure, il faudra faire appel à de l’expertise, à des savoir-faire, à des compétences particulières. Aujourd’hui, les associations représentatives au niveau national – qui ont des bureaux outre-mer – nous paraissent donc les mieux à même de mener les actions de groupe.

J’observe d’ailleurs que la confusion règne dans les esprits des députés UMP. D’un côté, ils nous reprochent de réserver l’action de groupe aux associations nationales, au prétexte que cela priverait les cabinets d’avocats de mener de telles procédures, et donc de traduire les demandes de consommateurs, alors qu’ils en auraient les compétences. D’un autre côté, ils voudraient que nous ouvrions cette possibilité aux associations locales ! Tout cela ne me paraît pas clair.

Je pense qu’il est cohérent de réserver cette possibilité aux associations nationales agréées. Des instances spécialisées des tribunaux de grande instance seront amenées à connaître des actions de groupe – je le redis : je voudrais que l’on m’écoute attentivement sur ce point – et ces TGI n’ont pas vocation à être réservés à la métropole. Demain, le fait que, dans les territoires d’outre-mer, un ou plusieurs TGI pourront connaître des actions de groupe permettra d’y structurer le mouvement consumériste. Ainsi, les associations nationales agréées, qui ont les épaules suffisamment larges, porteront les actions de groupe voulues par nos compatriotes en outre-mer tout aussi bien que dans le Haut-Bugey, dans les Yvelines, à Trappes, ou n’importe où ailleurs en France !

M. Damien Abad. Là n’est pas la question !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. C’est la raison pour laquelle, monsieur le député, je vous demande de retirer votre amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

M. Jean-Philippe Nilor. Après vous avoir entendu, monsieur le ministre, vous imaginez bien que je ne retirerai pas cet amendement ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Mme Brigitte Allain et Mme Laurence Abeille. Très bien !

M. Jean-Philippe Nilor. Vous avez parlé de savoir-faire et de compétence. Mais pourquoi ne pas imaginer que le savoir-faire et la compétence existent aussi au niveau local ? Pourquoi cela serait-il réservé au niveau national ?

Par ailleurs, s’il est vrai que certaines associations locales sont affiliées à des associations nationales, cela n’empêche pas que les seize associations auxquelles vous allez ouvrir l’action de groupe ne sont pas toutes représentées au niveau local, sur le terrain. Il y aura donc de toutes façons un déséquilibre, même si cinq ou six de ces associations sont présentes outre-mer, car la liberté de choix ne sera pas la même.

Vous voyez bien que si les consommateurs ultramarins étaient obligés, pour lancer une action de groupe, de faire appel à une ou deux associations agréées au niveau national et représentées sur le territoire, ils se retrouveraient dans une situation d’inégalité. Cela pourrait même être un motif d’inconstitutionnalité de votre loi.

Mme la présidente. La parole est à M. André Chassaigne.

Mme Marie-Christine Dalloz. La voix de la sagesse !

M. André Chassaigne. Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vous avez vraiment tort d’émettre un avis défavorable à cet amendement. Je pense en effet que les arguments que notre collègue Jean-Philippe Nilor a développés sont imparables.

M. Damien Abad. Ça tangue à gauche !

M. André Chassaigne. Il est vrai que vous avez, en justifiant le fait de réserver l’action de groupe à des associations agréées nationalement, utilisé des mots qui ont pu être mal ressentis par nos collègues d’outre-mer. Vous avez donné l’impression que des associations agréées nationalement, en métropole essentiellement, devaient se décliner en outre-mer. Notre collègue Jean-Philippe Nilor a parlé de subordination : je pense qu’en effet, tout cela sera interprété en outre-mer comme une forme de subordination.

Je voudrais souligner deux autres points. Premièrement, je crois que la rédaction actuelle de l’alinéa 6 de l’article 1er fait peser un vrai risque d’inconstitutionnalité. Une saisine du Conseil constitutionnel avant promulgation de la loi, ou a posteriori par le biais d’une question prioritaire de constitutionnalité, pourrait aboutir à une censure. Il suffirait ainsi qu’une association non agréée au niveau national, mais agréée au niveau régional, en outre-mer, invoque, à l’occasion d’un litige, le grief tiré de la violation des droits et libertés constitutionnelles, pour que le juge transmette – à travers le filtre prévu par la loi organique – la question au Conseil constitutionnel, et que celui-ci en prononce l’abrogation. Je pense qu’il y a là un risque réel.

Deuxièmement, outre l’inconstitutionnalité de la loi, une association non agréée au niveau national, mais agréée outre-mer, pourra invoquer la violation des droits conférés par la Convention européenne des droits de l’homme. Je suis persuadé que le fait de refuser à des associations d’outre-mer le droit d’ester en justice dans le cadre de l’action de groupe est contraire à la Convention européenne des droits de l’homme. Cela conduira à l’annulation de cet article.

Je demande donc à chacun de vraiment y réfléchir : si nous avons demandé un scrutin public sur cet amendement, c’est au regard de l’importance du risque que cette rédaction du texte du projet de loi fait courir. Nous avons déjà vu, depuis le début de la législature, des projets de loi revenir en discussion au Parlement parce qu’une simple maladresse procédurale au moment de leur discussion ou de leur vote avait conduit le Conseil constitutionnel à les censurer. Je pense qu’il faut absolument éviter cela. Il faut aussi éviter que l’on puisse tirer certaines interprétations des propos que vous tenez sur l’outre-mer.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Monsieur Chassaigne, je comprends qu’il y ait des problèmes d’interprétation, mais je ne vois pas en quoi parler d’association représentative au niveau national évoque en quoi que ce soit un lien de subordination. L’outre-mer, c’est la nation française ; l’adverbe « nationalement » englobe, à mes yeux, les outre-mer ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC et plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. Thierry Benoit. La nation est une et indivisible !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je vous dis cela une bonne fois pour toutes. Je ne sais pas comment m’exprimer pour vous faire comprendre que, quand je parle d’association représentative au niveau national, je ne fais pas de différence entre les associations d’outre-mer et les associations de métropole. Je rappelle en outre, comme le Conseil constitutionnel lui-même l’a rappelé, que le principe d’égalité n’est pas synonyme d’uniformité. À nos yeux, cette formulation ne pose aucun risque d’inconstitutionnalité.

Je le redis encore une fois, très simplement : lorsque j’évoque une association nationale, je ne me préoccupe pas de savoir s’il y a un quelconque lien de subordination. La nation, c’est la bation, et elle inclut les outre-mer ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC et plusieurs bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Un de nos collègues députés vient de dire que la nation est une et indivisible. La Constitution a été modifiée : la nation est une, mais elle divisible, par définition. Vu la configuration géographique de la France, il y a effectivement une division physique entre la France hexagonale et l’outre-mer. Cependant, je vous concède tout à fait que l’on ne voudrait pas que cette division apparaisse dans l’administration et dans la gestion des territoires.

La difficulté dans laquelle nous nous trouvons vient de ce que nos collègues Jean-Philippe Nilor et André Chassaigne ont parlé avec raison, mais aussi – et surtout – avec leur cœur. Leurs interventions font écho à ce que j’avais dit en préambule, au cours de la discussion générale. Étant à Paris, vous avez, chers collègues, parfois du mal à percevoir qu’il y a là une vraie difficulté. Nos compatriotes qui vivent dans les outre-mer ont très souvent du mal à comprendre le sens des décisions que nous prenons ici,…

Mme Marie-Christine Dalloz et Mme Anne Grommerch. Ceux qui vivent dans notre circonscription également !

M. Gabriel Serville. …simplement parce que le contexte dans lequel nous évoluons n’a absolument rien à voir avec celui dans lequel vous évoluez, ici, sur le territoire hexagonal.

C’est pour cette raison que j’ai dit hier, au cours de la discussion générale, qu’il aurait été opportun d’accorder un regard très particulier à la manière dont ces associations agréées seraient perçues dans les outre-mer. Il convient également de réfléchir à la manière d’établir une relation de travail efficace avec ces associations : il y a, chez nous aussi, de grandes difficultés, de gros problèmes. Je pressens d’ores et déjà tous les problèmes qui se poseront quand il s’agira de se mettre en relation avec ces associations. C’est la raison pour laquelle j’appuie pleinement la proposition de notre collègue Nilor, et soutenue par notre collègue Chassaigne.

Mme la présidente. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Je suis d’accord avec les propos qu’a tenus M. le ministre : la nation est une et indivisible. On ne peut pas, comme cela, créer des particularités dans les outre-mer, d’autant que les associations nationales elles-mêmes peuvent exercer sur tout le territoire, aussi bien en métropole qu’en outre-mer. Je vous rejoins sur ce point.

Nous aurions pu nous passer d’un débat comme celui qui vient d’avoir lieu si, tout à l’heure, vous aviez accepté notre amendement proposant d’ouvrir l’action de groupe aux associations ad hoc.

M. Marc Le Fur. Bien sûr !

Mme Anne Grommerch. Il ne fallait pas voter contre !

M. Damien Abad. Cela vous aurait évité, monsieur le ministre, une fracture au sein de votre propre majorité. Vous voyez bien que nous essayons de vous aider à améliorer ce projet de loi, d’apporter des réponses aux problèmes qui se posent, de jouer le rôle d’une opposition constructive !

Nous voterons contre cet amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Peut-être serait-il bon que nous nous rappelions le climat qui régnait ici hier lorsque nous rendions hommage à Aimé Césaire. Nous retrouvions alors ce qui fait l’unité entre nous, dans cet hémicycle. Des mots ont été prononcés, qui heurtent le député que je suis. À cet égard, je souscris tout à fait à ce qu’a dit M. le ministre à l’instant.

Je crois qu’il y a, dans ce débat, quelque chose d’un peu stérile. Cela vient d’une confusion introduite tout à l’heure par M. Abad, qui veut opposer les associations ad hoc et les associations agréées de consommateurs qui pourront, effectivement, recourir à l’action de groupe.

M. Damien Abad. Il ne s’agit pas de les opposer : elles sont complémentaires. C’est vous qui les opposez !

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Des associations ad hoc pourront bien entendu être constituées, et saisir les associations nationales de consommateurs agréées pour déclencher l’action de groupe.

De la même manière, des associations implantées outre-mer et localement reconnues pourront, elles aussi, saisir ces mêmes associations nationales pour déclencher une action de groupe. L’action de groupe pourra même – M. le ministre nous a donné des garanties sur ce point – être menée devant un TGI spécialisé qui garantira l’effectivité du droit au recours pour tous les ultramarins.

M. Damien Abad. Ça ne marchera pas, votre truc, et vous le savez très bien !

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Monsieur Chassaigne, même si nous étions d’accord avec vos arguments, nous n’en voterions pas plus pour l’amendement, car c’est malheureusement dans celui-ci que se cache une rupture d’égalité ! Vous visez « les départements d’outre-mer et les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique » : cette rédaction n’embrasse pas tous les outre-mer, puisque vous oubliez notamment la Nouvelle-Calédonie.

M. Thierry Benoit. Tout à fait !

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. M. Benoit, qui siège aux côtés de deux députés néo-calédoniens, ne pourrait que regretter que tous les outre-mer ne soient pas concernés.

Je crois donc que cet amendement, dans sa rédaction actuelle, ne fait que véhiculer une confusion qui n’a pas lieu d’être. Il conduirait de plus à mettre en place une discrimination entre les ultramarins, ce qui me paraît plus que regrettable.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Debré.

M. Bernard Debré. Je dirai juste que j’ai été assez choqué par cette argumentation. Je pense que l’outre-mer fait partie de la France, que la nation est une et indivisible. Si nous nous mettons à la diviser, à considérer séparément la Guyane, la Martinique, la Réunion, la Guadeloupe et Tahiti, pourquoi ne pas considérer séparément la Corse, également ? La Corse aussi est ultramarine ; il y a une rupture territoriale nette avec la France continentale.

Je suis, pour ma part, très attaché à l’unité de la nation. J’ai été, peut-être par atavisme, extrêmement choqué par ce qui a été dit.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

M. Jean-Philippe Nilor. Si, comme vous le dites, il n’y a pas de spécificité des outre-mer, pourquoi donc une loi de régulation économique outre-mer a-t-elle été votée, précisément pour prendre en compte les spécificités économiques de ces territoires ? Parce que les prix et les marges y sont plus élevés, parce que les abus sont toujours plus importants chez nous !

Vous avez pris conscience de cette situation, en adoptant cette loi de régulation économique outre-mer parmi les premières lois adoptées au cours de cette législature. Un sens était reconnu à ce combat, un élan était donné à la reconnaissance de ces spécificités. Aujourd’hui, je constate avec une certaine amertume que cet élan est stoppé. Au nom de quoi est-il stoppé ? Au nom du caractère général et indivisible de la République.

Or, si on ne divise pas, on ne peut pas comprendre la complexité des choses sur le terrain.

Mme Laure de La Raudière. Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent !

Mme la présidente. Seul M. Nilor a la parole, mes chers collègues !

M. Jean-Philippe Nilor. Je vous prends au mot : d’accord pour « une et indivisible », mais je prends le pari avec vous que, sur les seize associations nationales que vous retiendrez, pas une ne sera originaire d’outre-mer…

M. Bernard Debré. Cela n’a rien à voir !

M. Jean-Philippe Nilor. …et n’aura son siège outre-mer. Cela signifie que nous sommes condamnés à passer par une affiliation, par une subordination. À aucun moment, ceux qui connaissent les réalités du terrain, ceux qui en ont l’expertise, ne pourront véritablement défendre les consommateurs concernés. Il me semble qu’il y a une contradiction entre la volonté de décentraliser et la logique centralisatrice qui s’exprime sur tous les bancs ce soir.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Monsieur le député, je n’avais pas entendu le terme que vous avez employé. C’est parce qu’on me l’a répété que j’ai souhaité dire à nouveau quelques mots.

Ce terme n’est, en effet, pas neutre ; il se réfère à beaucoup de sujets, d’ordre collectif ou individuel. Lorsque l’on emploie ce type de mots en s’adressant à un ministre, c’est que l’on a des arguments forts, que l’on veut dénoncer une injustice criante. Pour invoquer ainsi notre histoire, les mots employés doivent une légitimité. Or, je vous le dis franchement, ce n’est pas le cas.

Vous parlez des associations que nous retiendrons. Pourquoi un tel esprit ? Nous ne « retiendrons » pas d’associations. Elles existent déjà et une grande majorité des seize associations mentionnées est représentée outre-mer.

M. Yannick Moreau. Pour une fois, il a raison !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Savez-vous que, depuis 1992, une action en représentation conjointe est réservée à des associations nationales agréées ? Je n’ai jamais vu quelque personne que ce soit, issue ou non de l’outre-mer, crier à la discrimination ou au colonialisme ! Savez-vous – j’anticipe sur le décret – qu’il est prévu qu’un des huit TGI spécialisés soit celui de Fort-de-France, alors que 90 ou 95 % des départements métropolitains n’en possèdent pas ?

M. André Chassaigne. Ce ne sont pas les mêmes !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Savez-vous qu’actuellement, c’est la cour administrative d’appel de Bordeaux qui connaît des litiges en outre-mer ?

Votre propos, de mon point de vue, même si nous ne sommes pas d’accord, dessert votre combat. Je pense que le débat sur ce terme n’a que trop duré.

Plusieurs députés du groupe UMP. Nous aussi !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je ne répondrai donc plus à de tels arguments.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous soutiendrons, pour notre part, sans hésitation l’amendement de M. Nilor, comme nous aurions soutenu celui de Mme Guittet si elle ne l’avait pas retiré.

La question qui est posée par nos collègues est celle de l’effectivité du droit : ne leur opposons pas des principes rigides ! Nous défendons, au nom de la nation, le pire jacobinisme, qui nie les différences et le droit au recours effectif. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Or, ce qui m’intéresse, c’est le recours effectif, le droit effectif. S’arc-bouter, comme vous le faites, sur des principes rigides et jacobins, c’est, en définitive, pousser des gens en dehors de la nation !

Mme la présidente. La parole est à Mme Ericka Bareigts.

Mme Ericka Bareigts. Je ne voudrais pas prolonger les débats, mais j’ai le sentiment que l’on utilise les outre-mer pour traiter de sujets qui dépassent très largement le thème auquel nous devons nous intéresser pour l’heure. Hier, nous avons effectivement rendu hommage à Aimé Césaire et nous avons évoqué la diversité dans l’unité républicaine. Dans certains cas, effectivement, la spécificité est justifiée – il en a été ainsi lorsque nous avons examiné le projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer – mais, dans d’autres, non. Ne nous engageons pas, s’il vous plaît, dans d’autres débats ! La parole de certains a, je l’espère, dépassé leur pensée.

Revenons en tout cas aux questions qui nous occupent. Oui, il y a des spécificités dans la République et nous devons les accepter. Oui, la République est une et indivisible dans la diversité.

M. Thierry Benoit. Très bien !

Mme Ericka Bareigts. Ce n’est pas compliqué, il s’agit juste de l’admettre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Gabriel Serville.

M. Gabriel Serville. Je ne voudrais pas que nous nous trompions de débat. Je répondrai à mes collègues Abad et Debré que c’est, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, que la Constitution a été modifiée et que le qualificatif « indivisible » a été supprimé. La nation n’est plus « une et indivisible », elle est « une », tout simplement parce que l’on s’est référé à un principe de réalité qui démontre que cette République n’est pas divisible parce qu’elle est fondamentalement divisée.

Cela dit, je suis un républicain convaincu et lorsque je parle de nos réalités, de nos vérités, je ne demande pas que les outre-mer sortent du contexte républicain, mais qu’un certain nombre de particularités soient prises en considération lorsque l’on rédige la loi. Ce n’est pas par hasard si, en novembre 2008, les émeutes ont commencé à éclater en Guyane, émeutes qui étaient générées par le coût de la vie, par la misère d’un certain nombre de personnes. Lorsque les consommateurs se trouvaient dans des situations difficiles, il n’y avait pas d’association pour assurer correctement leur défense.

Il est donc nécessaire de débattre sur le fond. Sans doute la forme peut-elle, parfois, ne pas vous convenir – ce que j’entends et ce que je comprends –, mais ce qui importe, ce soir, chers collègues, c’est de prendre le temps d’aborder le fond de la question posée par certains collègues et qui mérite toute notre attention.

Mme la présidente. Je vais maintenant mettre aux voix l’amendement n° 525.

(Il est procédé au scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 126

Nombre de suffrages exprimés 119

Majorité absolue 60

(L’amendement n° 525 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 41.

M. Marc Le Fur. La mode est à l’Amérique. Nous allons donc adopter une procédure qui y est née, puisque M. Hamon et le Gouvernement le veulent.

Que va-t-on faire de ces actions de groupe ? Nous devons, bien évidemment, traiter des rapports entre les consommateurs et les entreprises, mais aussi des rapports entre les consommateurs et les services publics industriels et commerciaux. Que les choses soient claires : la distribution de l’eau ou le transport sont des services publics et commerciaux. Leurs usagers souhaitent, comme moi, que leurs intérêts soient aussi défendus. Prenons les usagers des transports publics. Le provincial que je suis entend régulièrement dire qu’il y a des problèmes sur le RER C. Les usagers de cette ligne doivent pouvoir se regrouper pour, à l’occasion d’une grève qui leur a porté un préjudice conséquent, s’exprimer et se défendre pour obtenir réparation puisqu’il y a rupture du contrat.

À partir du moment où vous acceptez d’intégrer les services publics industriels et commerciaux, vous devez donner la possibilité aux usagers d’intenter une action de groupe. Je propose, par conséquent, sans rouvrir le débat que nous avons eu précédemment, d’ajouter à votre liste, que je trouve pour ma part trop restrictive, les associations d’usagers des services publics. Je souhaite, par ailleurs, rectifier mon amendement en supprimant les mots : « représentatives au niveau national ».

Je citerai d’autres exemples. Dans ma circonscription, des militants du chemin de fer, que M. le député de Fougères connaît, se battent pour une ligne particulière : la ligne conséquente Lamballe-Dol-Dinan. Ces militants sont devenus, au fil des ans, les interlocuteurs des pouvoirs publics ; ils comptent. Je les ai rencontrés récemment lors d’une réunion, au cours de laquelle ils m’ont dit qu’ils allaient bientôt pouvoir utiliser l’action de groupe. Je vais devoir leur répondre que ce sera impossible, puisqu’ils ne figurent pas dans la liste des seize associations. Or ce sont eux qui connaissent le sujet. Dans les réunions, nous entendons nos collègues de gauche louer la vie associative et le monde associatif. Eh bien, ils sont en train de les brider !

Mme Joëlle Huillier. Pas du tout !

M. Marc Le Fur. Je suis le défenseur de tous ces collectifs spontanés qui se constituent et reflètent une réalité ! Il n’y a pas de raison qu’il y ait des monopoles – nous avons eu ce débat tout à l’heure.

Si nous voulons étendre aux usagers des services publics industriels et commerciaux la possibilité de s’organiser pour former des actions de groupe, le travail des seize associations agréées – travail à bien des égards remarquable et que je ne nie pas – doit être complété par celui d’associations d’usagers qui peuvent se constituer pour la circonstance. C’est, me semble-t-il, un élément de bon sens qui, je l’espère, convaincra l’ensemble des députés. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Je tiens, dès à présent, à préciser que cet amendement est devenu l’amendement n° 41 rectifié et qu’il convient de lire : « ainsi que les associations d’usagers des services publics peuvent ».

Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Monsieur le député Le Fur, vous dites avoir rencontré des associations de consommateurs, et je vous crois bien évidemment, mais peut-être la Fédération nationale des associations d’usagers des transports n’en faisait-elle pas partie. Elle a l’occasion, dans la presse spécialisée, de tirer régulièrement la sonnette d’alarme sur les problématiques que rencontrent les usagers et les consommateurs dans le domaine des services de transport, qu’ils soient publics ou privés. Ceux-ci ne seront pas préservés des actions de groupe. Vous dites qu’il faut ouvrir cette possibilité aux associations d’usagers, notamment dans le domaine des transports – je pourrais évoquer également la distribution de l’eau –, mais rien n’empêchera, notamment des fédérations nationales telles que la FNAUT et les associations agréées au niveau national, de procéder à une action de groupe.

Votre amendement est donc à la fois satisfait par le texte et par la réalité. Je vous propose, en conséquence, de le retirer ; à défaut, je donnerai un avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. La FNAUT est une association d’usagers. Le mouvement consumériste a trois origines : le mouvement familial, le mouvement syndical et le mouvement consumériste spécialisé. Chacune de ces familles a elle-même des origines chrétiennes ou plus laïques. Tout cela garantit la diversité et la très grande variété du mouvement consumériste. Des associations d’usagers de transport très efficaces existent d’ores et déjà, qui pourront porter des actions de groupe sur les questions de transport. Mais elles n’en seront pas les porteurs exclusifs : toutes les associations de consommateurs pourront porter de telles actions dans ce domaine.

Je suis donc défavorable à cet amendement, et je vous suggère de le retirer.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Que ce soit bien clair, l’ensemble des services publics industriels et commerciaux sont concernés par l’action de groupe, qu’ils soient concédés, affermés ou en régie, ce qui inclut donc le transport scolaire, la SNCF, les TER. J’aimerais avoir des précisions sur ce point, monsieur le ministre, pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté.

Vous me répondez que les associations peuvent appartenir à des fédérations représentatives. D’abord, il y en a qui ne veulent pas s’inféoder. Ensuite, il y a un problème de fond. Prenons le cas d’associations d’usagers confrontés à une grève qui veulent défendre les intérêts des consommateurs par rapport aux travailleurs faisant grève, ce dont ils ont le droit. Ces associations ne veulent pas nécessairement se rattacher à des associations ayant des liens avec des syndicats pouvant par ailleurs être les promoteurs de ces grèves.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Cela pourrait être contagieux !

M. Marc Le Fur. Ce n’est pas illégitime mais elles ne veulent pas être obligées de passer par des structures rattachées à la CGT ou à un autre syndicat. C’est tout de même leur droit et je me permets donc d’insister.

Je voudrais vous donner d’autres exemples d’usagers de services publics.

J’ai chez moi une association qui s’est constituée autour de questions liées à l’assainissement individuel. Dans le monde rural, c’est un vrai sujet, qui concerne les services publics industriels et commerciaux. Ces usagers se plaignent, avec raison ou sans raison, ce n’est pas le problème. Ils ont droit de mener une action collective. Il y a de très gros enjeux et vous allez leur interdire d’agir directement et les obliger à s’affilier à je ne sais quelle fédération pour avoir le droit de le faire, ce qui prendra du temps et les placera sous une forme de dépendance, qu’ils ne souhaitent pas nécessairement.

Autre exemple, il y a, et pas uniquement dans ma région, des usagers des ports de plaisance. C’est un service public, qui pourra donc donner lieu à une action de groupe. Ces usagers doivent pouvoir agir sans nécessairement se rattacher à je ne sais quelle fédération. On pourrait multiplier les exemples.

Ma crainte, c’est qu’en les obligeant à passer par les fameux seize caciques en quelque sorte, vous interdisiez à des tas de gens de s’exprimer. Vous allez décevoir, M. Abad l’a parfaitement expliqué. Vous vouliez faire quelque chose, vous le faites, mais sans en tirer toutes les conséquences.

M. Damien Abad. Vous allez créer de la frustration !

M. Marc Le Fur. La vie des monopoles est derrière nous, nous sommes dans un monde d’initiatives. Ce n’est pas nécessairement un problème, cela peut être un atout. Ces initiatives, il faut les respecter en tant que telles au lieu de les embrigader en quelque sorte. C’est exactement ce que je vous propose, y compris dans le secteur des services publics.

Mme la présidente. La parole est à M. Gérald Darmanin.

M. Gérald Darmanin. Vous qui êtes un jacobin, monsieur le ministre, vous n’êtes pas timoré d’habitude et vous, monsieur le rapporteur, qui êtes un excellent rapporteur – je parle de vous, pas de votre texte –, vous devriez avoir de l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace.

Ce que dit M. Le Fur est très juste. Il vient au secours du Gouvernement, du rapporteur et des consommateurs. Il a parlé de la SNCF. Je prends l’exemple très concret de ceux qui sont associés dans une association d’usagers pour lutter contre les retards à répétition de la ligne TGV Paris-Lille – ou Paris-Nogent-le-Rotrou, madame de la Raudière. Vous allez les décevoir.

L’amendement de M. Le Fur est frappé au coin du bon sens, comme d’habitude mais, en plus, il serait bon que, dès l’article 1er, nous puissions donner à l’ensemble des consommateurs l’envie de mener une vie associative pour défendre leurs intérêts. M. Le Fur a raison d’aller ainsi au secours du Gouvernement et du rapporteur et nous devrions tous adopter son excellent amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Que l’on s’entende bien, monsieur le ministre, pour une action de groupe, les usagers doivent passer par l’une des seize associations agréées mais ils ne sont pas obligés d’y adhérer.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Très bien !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Très bien ! Il faut lire le texte, monsieur Abad !

M. Thierry Benoit. La question que pose Marc Le Fur est très importante. Je suis tenté à ce stade du débat de soutenir son amendement mais tout dépend de votre réponse, monsieur le ministre.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Vous avez parfaitement compris, monsieur Benoit, il n’y a aucune obligation d’adhérer à l’association, aucune obligation de s’affilier.

De même, peu importe que la personne visée par l’action de groupe soit publique ou privée. Ce qui compte, c’est que le fait générateur de l’action de groupe soit le non-respect de la fourniture d’un service ou des conditions de délivrance d’un bien. On peut donc déclencher une action de groupe contre une personne publique.

Ce qui m’amuse un peu, c’est que, si vous ne souhaitez pas que l’action de groupe perturbe trop le monde économique, vous êtes très pressés par contre d’en mener contre la SNCF… Je laisse à chacun le soin d’en juger.

(L’amendement n° 41 rectifié n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 573 et 832.

La parole est à M. Thierry Benoit, pour défendre l’amendement n° 573.

M. Thierry Benoit. Le groupe UDI souhaite que nous précisions la notion de groupe parce que l’on peut imaginer qu’à partir de deux ou trois personnes, on constitue un groupe.

Nous proposons donc qu’il doive y avoir un nombre significatif de consommateurs concernés par un même préjudice.

(M. Marc Le Fur remplace Mme Catherine Vautrin au fauteuil de la présidence.)

Présidence de M. Marc Le Fur
vice-président

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour défendre l’amendement n° 832.

Mme Annie Genevard. Un grand nombre d’entre nous ont été confrontés à un moment ou à un autre de leur vie d’élu local à des actions conduites par des groupes de personnes, des associations environnementalistes par exemple, qui empêchent l’installation d’une zone d’activité. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Un aéroport !

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. La construction de logements sociaux à Neuilly !

Mme Annie Genevard. Dans cette affaire tout de même sensible, il importe que la référence au groupe de consommateurs soit précisée, et pas de façon bavarde comme nous en avons été accusés tout à l’heure. La taille de ce groupe doit être significative et il doit aussi être identifiable, c’est-à-dire qu’il doit avoir une consistance suffisante et que ses membres doivent être concernés par un même préjudice.

M. Thierry Benoit. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Défavorable. Ce n’est pas l’esprit du texte et nous sommes déjà revenus sur nos arguments.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Défavorable.

M. Thierry Benoit. C’est un peu court comme argumentation, monsieur le rapporteur.

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Je ne veux pas énerver le rapporteur parce qu’il est presque minuit…

Ma collègue de l’UMP, Mme Genevard, et moi-même avons souhaité définir l’action de groupe et cela ne remet pas en cause l’esprit du texte d’origine. C’est une notion très importante et cela répondrait, monsieur le ministre, à la volonté que vous avez affichée au cours de nos travaux en commission et lors de la discussion générale de prendre en compte des amendements des groupes de la minorité.

C’est la raison pour laquelle je trouve décevant qu’à ce stade du débat, vous ne nous donniez qu’un avis défavorable sans développer d’argumentaire.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Monsieur Benoit, je ne veux pas être décevant mais je ne veux pas non plus allonger les débats. Nous en avons discuté longuement en commission, à trois reprises, et vous étiez présent.

M. Thierry Benoit. Tout à fait !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Un groupe significatif, c’est très difficile à juger, même pour un juge, et nous voulons le droit pour tous, le droit précis et rien que le droit. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 573 et 832 ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 540.

M. Damien Abad. Il est défendu. M. Houillon avait déposé un amendement identique. Il s’agit de remplacer le mot « similaire », qui est flou, par « identique », un peu plus solide juridiquement. C’est un débat que nous avons également eu en commission.

Le cœur du débat, franchement, c’est le déclenchement de l’action de groupe uniquement par les associations agréées. Bien sûr, monsieur le rapporteur, qu’il n’y a aucune obligation d’adhérer à ces associations, mais on doit passer par elles. Aucune action de groupe ne pourra être déclenchée en France sans l’accord d’une association de consommateurs agréée au niveau national et, en plus – second filtre –, cette association a toute liberté pour apprécier si elle déclenchera oui ou non l’action de groupe.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Vous n’aviez rien fait !

M. Damien Abad. Monsieur Brottes, vous avez sans doute remarqué que, contrairement à vous, c’est mon premier mandat. Permettez-moi donc tout de même d’avoir un avis sur le sujet.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Vous n’êtes pas le seul signataire de l’amendement. Il y en a d’autres, comme Mme Vautrin !

M. Damien Abad. Elle n’a rien dit !

Mme Catherine Vautrin. Restez calme ! Si ça ne va pas, allez vous coucher, monsieur le président de la commission !

M. Damien Abad. Vous ne voulez pas l’entendre mais le fait de réserver l’exclusivité aux associations de consommateurs agréées crée d’abord un vrai risque constitutionnel, au regard de la liberté d’association, celui de la rupture d’égalité, et vous le savez, mais ce gouvernement n’en est pas à une annulation près par le Conseil constitutionnel…

Au-delà, il y a la question de l’efficacité de la procédure. En fait, vous défendez le corporatisme alors que nous sommes là pour défendre les consommateurs. Si vous voulez défendre les consommateurs, étendez le champ. Franchement, c’est dommage. Si vous aviez accepté notre amendement accordant aux associations ad hoc le droit de déclencher une action de groupe, cela nous aurait évité tous ces débats et nous aurait fait gagner du temps.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Le rapporteur, la majorité sont patients et disponibles pour tout débat, monsieur Abad, mais vous avez donné tous les arguments du monde sauf ceux qui concernaient l’amendement.

M. Damien Abad. J’ai dit qu’il était défendu, que nous avions eu le débat en commission.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je vous ai écouté, soyez attentif. Il y a quelques règles : je vous écoute, vous m’écoutez. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

La commission est défavorable à cet amendement.

(L’amendement n° 540, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 694.

M. Damien Abad. C’est un amendement rédactionnel.

(L’amendement n° 694, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja pour soutenir l’amendement n° 307.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Il reprend un amendement initialement adopté par la commission des lois afin de préciser qu’une seule et même action de groupe peut être intentée contre plusieurs professionnels.

Dans certaines situations, les préjudices subis par les consommateurs placés dans une situation similaire ont pour origine commune un manquement de plusieurs professionnels – et non d’un seul – à leurs obligations. Je vais donner deux exemples pour être peut-être plus clair que je ne l’avais été en commission des affaires économiques.

Le premier, ce sont les ententes anticoncurrentielles, les cartels. Dans cette hypothèse, l’origine du préjudice résulte nécessairement d’un manquement commis par plusieurs professionnels.

Le second a trait au manquement commis par un groupement de professionnels. Or, d’un point de vue juridique, il reste distinct. Je pense notamment au secteur de la grande distribution. Certaines enseignes ont fait le choix du groupement de professionnels tandis que d’autres ont une structure intégrée. En clair, c’est la différence de structuration juridique entre Leclerc et Carrefour.

Obliger l’association requérante à introduire dans ce cas une multiplicité d’actions de groupe tandis qu’une seule serait possible dans l’autre cas contribuerait à créer une distorsion de concurrence selon la structure juridique qui a été retenue par les professionnels concernés.

Dans ces deux hypothèses, il me paraît souhaitable, dans un souci de bonne administration de la justice, de laisser la possibilité au requérant d’introduire une seule et même action de groupe plutôt que de laisser au juge le soin – ce qu’il fera – de procéder à une jonction des requêtes.

Si le ministre nous confirme que le projet de loi dans sa rédaction actuelle n’interdit pas, malgré l’emploi du singulier, de déposer une seule et même action de groupe contre plusieurs professionnels, je suis tout à fait disposé à retirer cet amendement. Nos travaux seront utiles aux acteurs de l’action de groupe.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Dans le prolongement de nos travaux en commission, j’émets un avis défavorable et demande le retrait de cet amendement. Je souhaite cependant entendre les explications du ministre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Votre proposition, monsieur Denaja, est difficilement envisageable dès lors que l’origine commune des préjudices est exigée. Le manquement visé doit être caractérisé à l’occasion de la vente d’un bien ou de la fourniture d’un service, qui nécessite un lien entre un consommateur et un professionnel. Il en va de même s’agissant des pratiques anticoncurrentielles. Si plusieurs opérateurs économiques sont en cause, c’est avant tout à l’égard de l’opérateur avec lequel le consommateur a contracté que le consommateur est fondé à demander la réparation. Il peut y avoir une procédure récursoire de l’opérateur visé dès lors qu’il est mis en cause par un consommateur.

Dans l’affaire dite de la viande de cheval, vers qui le consommateur se serait-il retourné sinon celui auprès de qui en aval de la chaîne de production il a acheté le bien, avec la possibilité pour le distributeur d’engager une action récursoire auprès de son fournisseur ?

Dans un souci de clarté, il convient de conserver le terme générique « même professionnel », mais cela n’empêchera pas l’association d’assigner plusieurs professionnels par le biais de plusieurs actions de groupe si elle les estime responsables du même manquement et le juge de joindre les actions, par exemple dans le cadre d’un cartel.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Cette explication va dans le sens de ce que nous évoquions en commission. J’émets toujours un avis défavorable, mais il faudra poursuivre le débat en deuxième lecture.

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Je n’ai plus l’énergie de faire un double lutz piqué et de retomber sur mes pieds ! (Sourires.) Bien que n’ayant pas été totalement convaincu, je vais retirer l’amendement.

Mme Catherine Vautrin. Cela a le mérite de la franchise.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. J’espère que les explications du ministre éclaireront surtout ceux qui auront engagé cette action. La structuration de certains grands groupes de distribution pose problème même si j’ai bien entendu la réponse du ministre sur la viande de cheval. Entre les deux grands groupes de distribution auxquels j’ai fait allusion, il y aura une distorsion de concurrence. Au Sénat, le Gouvernement pourrait approfondir la question afin d’être sûr que les consommateurs pourront voir leur action prospérer. En tout état de cause, je vous remercie, monsieur le ministre, de la précision de votre réponse.

(L’amendement n° 307 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n° 141.

Mme Marie-Christine Dalloz. L’action groupée ou l’action de groupe n’est pas une nouveauté. ! Elle apparaît pour la première fois aux États-Unis et a été codifiée en 1842. C’est dire que le fait n’est pas nouveau !

Dans ce projet de loi, vous introduisez une procédure spécifique qui correspond à une action de groupe simplifiée. Mais rien n’empêche un ensemble de justiciables de se regrouper autour d’un même mandant pour porter une cause commune devant les tribunaux dès lors que ce mandant est identifié.

Tel qu’il est rédigé, cet article est une atteinte à la liberté d’association. Il y a rupture d’égalité car vos seize associations agréées seront en compétition. Vous empêchez le justiciable de se constituer en association et de faire valoir ses droits.

M. Damien Abad. Eh oui.

Mme Marie-Christine Dalloz. Le rapporteur parlait de principes constitutionnels. Moi, je voudrais parler de stabilité juridique. C’est pourquoi je propose de compléter l’alinéa 6 par les mots : « , sans préjudice des règles existantes d’action en justice : »

Par le biais d’une association, on peut aujourd’hui ester en justice. Avec votre texte, vous supprimez cette possibilité. C’est pourquoi j’appelle votre attention sur le risque d’inégalité devant un préjudice.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Aucune procédure existante n’est remise en cause par l’action de groupe. Et en aucun cas, celle-ci n’annule les potentialités d’intervention des citoyens de manière individuelle ou collective, ou à travers la représentation conjointe ou dans le cadre du pénal ou du civil. Vous n’avez aucune crainte à avoir et je vous invite à retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je veux rassurer Mme la députée par la lecture de l’alinéa 49 de l’article 1er : « L’adhésion au groupe ne fait pas obstacle au droit d’agir selon les voies de droit commun pour obtenir la réparation des préjudices n’entrant pas dans le champ défini par la décision du juge… »

Votre amendement est satisfait, madame la députée, et je vous suggère de le retirer.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je le maintiens.

(L’amendement n° 141 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Michel Lefait, pour soutenir l’amendement n° 568.

M. Michel Lefait. L’amendement tend à introduire les litiges relatifs aux charges locatives dans le champ de l’action de groupe. Il s’agit d’une demande portée de longue date par les associations de consommateurs. Malgré l’aspect récurrent de ces litiges, l’absence d’action de groupe dans notre droit a toujours empêché la réparation systématique des préjudices en découlant.

Monsieur le ministre, lors de l’examen en commission, vous avez estimé que le locataire était effectivement un consommateur aux termes de l’article 1er

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Oui.

M. Michel Lefait. …et que vous pourriez l’inclure dans le champ de l’action de groupe. Pourtant, au regard de la rédaction actuelle de l’article L. 423-1, il nous semble qu’en l’absence de lien contractuel direct entre le fournisseur de fluide et le consommateur locataire, les litiges opposant ce dernier à un professionnel bailleur ne seraient pas considérés comme des litiges de consommation au sens de l’article 1er du projet de loi et échapperaient ainsi à l’action de groupe.

Au moment de l’application du texte, ces ambiguïtés rédactionnelles créeront des difficultés d’interprétation pour les juridictions concernées. Cet amendement vise donc à éclairer une zone d’ombre potentiellement problématique et à lever ces ambiguïtés.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. En commission, vous souhaitiez une réponse du ministre.

M. Michel Lefait. Absolument.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. En tant que rapporteur, je peux vous répondre que, dans ma circonscription, nous travaillons avec des copropriétaires à une première action de groupe qui concerne les fluides. Pour la mettre en place, des principes doivent être rappelés. Le ministre s’est engagé sur ce point.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous en avions parlé en commission, monsieur le député. Je tiens à vous apporter des précisions qui pourraient, le cas échéant, éclairer le juge sur la recevabilité d’une action de groupe déposée par des locataires, comme vous le souhaitez, en cas de facturation abusive de charges locatives s’agissant notamment des fluides consommés.

Nous considérons qu’aucun secteur d’activité n’est exclu du champ d’application du dispositif d’action de groupe. En l’espèce, les locataires sont bien des consommateurs quand ils agissent en tant que personnes physiques. Par l’action de groupe, ils peuvent obtenir réparation des préjudices subis du fait de manquements par un bailleur professionnel ou un syndic de ses obligations légales ou contractuelles en particulier en matière de charges locatives. Votre amendement est satisfait, monsieur le député, et je vous demande de le retirer.

M. le président. La parole est à M. Michel Lefait.

M. Michel Lefait. Compte tenu des explications de M. le ministre, je retire mon amendement.

(L’amendement n° 568 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 8.

M. Damien Abad. Je vais défendre l’amendement de mon excellent collègue Marc Le Fur. (Sourires.)

Afin de donner toute sa portée à l’action de groupe et d’éviter une interprétation restrictive qui exclurait les services publics industriels et commerciaux du champ de l’application du texte, l’amendement vise à préciser que les services publics industriels et commerciaux entrent bien dans le cadre de la procédure d’action de groupe. Vous sembliez d’accord : alors, transcrivons-le dans la loi.

M. le président. J’imagine que l’avis de la commission est favorable... (Sourires.)

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Vous imaginez mal, monsieur le président. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

L’amendement est satisfait, les explications ont déjà été données. Par conséquent, je demande le retrait de l’amendement, sinon, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

M. Damien Abad. Je maintiens l’amendement.

(L’amendement n° 8 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 830.

Mme Annie Genevard. L’amendement tend à limiter l’action de groupe au droit de la consommation et à en exclure la concurrence non parce que le respect de la libre concurrence ne serait pas important, mais parce que l’Autorité de la concurrence peut permettre de sanctionner des comportements anticoncurrentiels. Cette Autorité fonctionne très bien. Elle a permis de dénoncer le caractère anticoncurrentiel de la disposition de l’Accord national interprofessionnel – l’ANI – qui autorisait les clauses de désignation en complémentaire santé, dans la droite ligne de la décision rendue ensuite par le Conseil constitutionnel.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Avant d’en venir à votre amendement, madame la députée, je dois avouer ma perplexité. Je ne sais plus très bien quelle est la position de votre groupe.

Mme Laure de La Raudière. Répondez à Mme Genevard. Ne vous posez pas cette question, mais répondez à la question !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. L’action de groupe est soit trop restreinte, soit trop large. Soit il faut intégrer toutes les associations ou seulement quelques-unes, les associations nationales agréées. La consommation est un champ trop restreint qu’il faut élargir. Maintenant, il faut exclure la consommation. Bref, je ne saisis plus la cohérence de la position de votre groupe.

Mme Laure de La Raudière. Contentez-vous de répondre à la question. Ne vous égarez pas.

M. Germinal Peiro. Calmez-vous, madame de la Raudière !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. S’agissant de votre amendement, madame Genevard, je rappelle que l’action de groupe répond principalement à la nécessité de rendre effective la réparation. Le comportement anticoncurrentiel organisé par l’entreprise lèse l’organisation du marché et l’ordre public économique. Il lèse aussi le consommateur, et pas seulement au plan pécuniaire lorsqu’il va payer un SMS 30 % plus cher. Cela le lésera aussi en termes de compétitivité et d’innovation, ce qui appelle des réparations.

L’action de groupe doit, en cohérence, prendre aussi en compte le champ concurrentiel.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Madame la députée, là il y a cartel, on estime que le consommateur paie un service ou un bien 20 % de plus que le prix du marché. Les cartels sont condamnés à des amendes mais le consommateur ne se voit jamais indemnisé pour ces 20 % de coût supplémentaire. C’est la raison pour laquelle nous voulons maintenir la concurrence dans le champ de l’action de groupe.

Je comprends que vous êtes plutôt action de groupe tendance Lefebvre plutôt qu’action de groupe tendance Abad.

Pour ce qui nous concerne, nous vous demandons de bien vouloir retirer votre amendement. Sinon, nous émettrons un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, je trouve que vous avez une curieuse façon de réagir.

Lorsque ceux des vôtres expriment des opinions légèrement voire nettement divergentes des vôtres, vous les condamnez au silence, vous les faites taire, vous les poussez à retirer leurs amendements. Excusez-nous, mais nous ne fonctionnons pas de cette façon.

M. Damien Abad. Très juste !

Mme Annie Genevard. Nous avons une autre façon d’approcher les choses et nous comptons bien enrichir le débat des nuances qui sont les nôtres.

M. Germinal Peiro. Cela a bien changé !

Mme Annie Genevard. C’est cela le débat parlementaire, monsieur le ministre !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. On a bien vu comme tout fonctionnait démocratiquement dans votre camp !

(L’amendement n° 830 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton, pour soutenir l’amendement n° 905.

Mme Michèle Bonneton. Cet amendement vise à inclure dans les motifs de lancement d’une procédure d’action de groupe la tromperie quant aux engagements pris par un professionnel en matière de respect des droits humains fondamentaux ou des atteintes graves à l’environnement, que ces engagements soient pris de façon légale, contractuelle ou de manière volontaire.

En effet, l’acte d’achat engage indirectement la responsabilité du consommateur quant aux conditions de fabrication et de production du produit dont il se fait l’acquéreur. Le récent effondrement d’un immeuble au Bangladesh, qui a entraîné la mort de plus de mille personnes, a ainsi mis au jour les conditions indignes dans lesquelles des millions de femmes et d’hommes travaillaient. Pensons encore au scandale, révélé en 1996, des ballons de football fabriqués par des enfants.

Le consommateur qui achète un produit, sans être au courant des conditions dans lesquelles il est fabriqué, voit sa bonne foi désavouée et peut subir un préjudice psychologique puisqu’il est rendu en quelque sorte complice des agissements de telles entreprises.

Aussi, chers collègues, nous nous honorerions d’adopter un amendement permettant de mieux protéger les consommateurs ici tout en défendant les droits de l’homme et le respect de l’environnement ailleurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. L’alinéa 6 de l’article 1er, qui porte notamment sur les engagements contractuels des professionnels, satisfait vos préoccupations, madame la députée.

Je vous demande donc de retirer votre amendement ; sinon, avis défavorable de la commission.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, madame Bonneton ?

Mme Michèle Bonneton. Je ne pense pas que l’alinéa 6 concerne exactement les mêmes préoccupations mais je retire mon amendement.

(L’amendement n° 905 est retiré.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 414.

M. Damien Abad. Vous vous rappelez de cette fameuse tirade de François Hollande : « Moi, Président de la République, je m’attaquerai au monde de la finance en en faisant l’ennemi public n° 1. » Eh bien, nous y sommes !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Mais jamais vous ne parlez du texte !

M. Damien Abad. Monsieur Hammadi, ce n’est pas parce que vous êtes rapporteur que vous détenez le monopole de la vérité. Le ministre et le président de la commission ont l’humilité de savoir qu’ils ne l’ont pas, vous feriez bien de prendre une petite leçon auprès de vos anciens.

M. Germinal Peiro. Pas d’agression à l’égard du rapporteur, monsieur le président !

M. Damien Abad. Cet amendement vise à élargir le champ de l’action de groupe aux préjudices liés aux pratiques du droit financier et du droit boursier.

Il importe que ce projet de loi lève les ambiguïtés qui touchent la qualité des épargnants et des investisseurs victimes d’une information trompeuse ou mensongère, de même que pour les victimes de préjudices liés aux services financiers, titulaires de produits d’épargne. Ces petits épargnants, ces retraités, devraient pouvoir, sans aucune ambiguïté liée aux notions nationale et européenne de consommateur, former une action de groupe.

Les investisseurs victimes d’une fausse information sur les marchés financiers semblent totalement exclus du projet de loi alors même que les préjudices qu’ils subissent sont substantiels et que les recours juridictionnels actuellement disponibles ne sont pas effectifs et satisfaisants.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Votre préoccupation est satisfaite par le texte du projet de loi. J’ai déjà répondu sur ce point.

Je vous propose le retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier.

M. Guillaume Chevrollier. L’article 1er de ce projet de loi introduit l’action de groupe dans le droit français. Cette disposition donne la possibilité à des consommateurs s’estimant lésés de demander des réparations des préjudices subis est une avancée dans la défense du consommateur.

M. Germinal Peiro. Bravo !

M. Guillaume Chevrollier. À l’heure où les Français sont si inquiets de leur avenir et de leur pouvoir d’achat, menacé chaque jour par les hausses d’impôt si nombreuses, il est nécessaire d’aider et de protéger les consommateurs.

Il faut dire aussi que plusieurs lois ayant le même but ont été adoptées sous la précédente législature, dont certaines n’ont pas encore donné tous leurs effets. Une pause dans le processus législatif aurait été pertinente.

Vous limitez également le champ de l’action de groupe, ce que j’approuve à titre personnel. Des effets pervers sont en effet observables outre-atlantique en la matière.

M. Pascal Cherki. Très bien !

M. Guillaume Chevrollier. Cependant, vous provoquez l’inquiétude des entreprises qui redoutent une judiciarisation de la vie économique.

Le texte, dans sa globalité, crée beaucoup de nouvelles contraintes pour les entreprises, contraintes agrémentées de sanctions et de contrôles. Il est vrai qu’une loi socialiste est toujours une loi faite de complexités administratives.

M. Guillaume Larrivé. C’est vrai !

M. Guillaume Chevrollier. À l’heure où la situation économique est plus que difficile, où les carnets de commande de nos entreprises sont minces, ce n’est pas forcément un bon message que vous adressez à ceux qui entreprennent et qui créent des emplois.

Renforcer la protection du consommateur, oui, mais sans pénaliser les entreprises car, mes chers collègues socialistes, la France a besoin de ses entreprises pour opérer son redressement.

(L’amendement n° 414 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Debré, pour soutenir l’amendement n° 660.

M. Bernard Debré. Monsieur le ministre, vous avez indiqué que les actions de groupe dans le champ de la santé feraient l’objet d’une loi ultérieure. Pourquoi avoir changé d’avis ?

Je citerai simplement l’exposé des motifs d’une proposition de loi déposée le 2 septembre 2009 : « L’action de groupe peut être engagée à l’occasion de tout préjudice civil de nature contractuelle ou délictuelle, en matière de consommation, de santé, d’environnement et de concurrence. ». Une proposition de loi déposée par Jean-Marc Ayrault.

Pourquoi reculez-vous par rapport à ce texte que nous, majorité d’alors, aurions peut-être dû accepter – vous le voyez, il faut faire quelquefois son mea culpa ?

Je regrette une telle évolution de votre part car j’aurais souhaité que l’action de groupe en matière de santé soit rendue possible par ce projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Nous avons déjà parlé de cette question. Je ne reprends pas l’argument que j’ai déjà utilisé.

Avis défavorable. Je vous renvoie aux déclarations de notre ministre de la santé. Nous avancerons code par code pour que l’action de groupe touche l’ensemble de notre droit.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

Je souhaite, monsieur Debré, que nous puissions très vite débattre de l’action de groupe dans le champ de santé, avec une procédure adaptée aux dommages corporels. Votre désir sera ainsi satisfait. C’est une affaire de mois.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous avons déposé un amendement plus large que celui de M. Debré. Nous partageons son sentiment d’incompréhension devant la non-intégration du champ de la santé. Mais pourquoi ne pas inclure aussi l’environnement ? Ce sera l’objet de l’un de nos amendements.

Qui peut le plus peut le moins.

Nous nous abstiendrons donc sur cet amendement, au profit du nôtre qui est plus large.

(L’amendement n° 660 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n° 752.

Mme Jeanine Dubié. À la suite de nos débats en commission, nous souhaitons qu’une seule et même action de groupe puisse viser plusieurs professionnels lorsque le préjudice résulte de pratiques anti-concurrentielles simultanées impliquant plusieurs entreprises. Nous déplorons qu’en l’état, le projet de loi n’ouvre pas cette possibilité.

Cet amendement ne vise pas les actions de groupe exercées à l’encontre de plusieurs acteurs d’une chaîne de production verticale en cas de dommages matériels mais entend ouvrir la possibilité pour le consommateur d’attaquer plusieurs professionnels lorsque les préjudices qu’il a subis découlent directement de leur action collective en cas de pratique anti-concurrentielle. Pensons au cas du cartel des opérateurs mobiles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Voilà qui prolonge le débat que nous avons eu tout à l’heure sur l’amendement du rapporteur pour avis Sébastien Denaja. Le ministre a répondu. J’ai rappelé qu’il nous fallait continuer à travailler, notamment dans la perspective du retour du texte.

J’estime que la question posée par cet amendement est bonne …

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. En effet !

M. Razzy Hammadi. …et que le champ qu’elle ouvre est pertinent. Il y a matière à débat. Mais en l’état actuel, avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. J’espère qu’il n’y aura pas un troisième amendement analogue car plus ça va, plus le rapporteur trouve que la question est bonne et pertinente. (Sourires.)

Je souhaite que vous retiriez cet amendement, madame la députée, pour les mêmes raisons que celles que j’ai avancées s’agissant du rapporteur de la commission des lois.

M. le président. Retirez-vous votre amendement, madame Dubié ?

Mme Jeanine Dubié. J’entends vos arguments mais je maintiens mon amendement.

(L’amendement n° 752 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 744 et 924.

La parole est à M. André Chassaigne, pour défendre l’amendement n° 744.

M. André Chassaigne. D’un mot, monsieur le président, puisque nous avons eu déjà de nombreux échanges sur ce point : cet amendement propose de ne pas restreindre le champ d’application de l’action de groupe aux seules atteintes matérielles car il peut aussi y avoir des dommages corporels et des répercussions morales.

Nous proposons donc de supprimer l’alinéa 9, que nous estimons réducteur.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n° 924.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous ne comprenons pas la somme des restrictions dont le Gouvernement entoure l’action de groupe.

La première restriction concerne les associations qui peuvent ester en justice pour exercer une action de groupe. Un autre type de restriction concerne le champ d’application, un autre encore le type de procédure. Mais de quoi a-t-on peur ?

J’aimerais vous faire une citation : « Au-delà de ce domaine, il convient d’intégrer les litiges relatifs à la santé ou à l’environnement, d’autant que ceux-ci engendrent souvent des situations bien plus dramatiques au plan humain et surtout plus urgentes pour les victimes ». Il s’agit d’un extrait de texte datant de 2007 signé par Arnaud Montebourg et l’ensemble des membres du groupe socialiste, soit tous ceux qui soutiennent aujourd’hui le projet du Gouvernement et qui tiennent un autre discours.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Ce n’est pas un autre discours.

M. Jean-Louis Roumegas. Je ne comprends pas cette limitation.

Les arguments que vous avez avancés pour exclure les préjudices moraux ou corporels, même dans le champ de la consommation, ne tiennent pas, car si on les retenait, il ne servirait à rien de renvoyer à des lois ultérieures pour étendre cette disposition aux domaines de la santé et de l’environnement, ou pour généraliser l’action de groupe. En effet, si ce type de préjudice relève d’une appréciation individuelle, comme vous le prétendez aujourd’hui, alors cela sera toujours le cas demain.

Les arguments que vous employez pour écarter du champ d’application de l’action de groupe les préjudices corporels ou moraux ne me paraissent donc absolument pas pertinents. Je vous ai entendu les répéter à chaque fois, sans jamais répondre à cette objection.

Nous vous demandons donc de supprimer cet alinéa 9 au profit des amendements que nous déposerons pour étendre l’action de groupe, car même dans le rapport économique et dans le champ de la consommation, il peut exister des préjudices autres que matériels.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Monsieur le député Roumegas, nous ne partageons pas votre état d’esprit sur ce point précis.

Cela fait trente ans – trente ans ! – que l’action de groupe est promise dans ce pays par plusieurs Présidents de la République et plusieurs gouvernements ; des parlementaires de tous bords, de l’Assemblée nationale comme du Sénat, ont fait des propositions ; et la voici ! L’action de groupe existe désormais dans le champ de la consommation.

Pourquoi penser que nous posons des limites ? Nous ne limitons rien ! Vous parlez de restrictions, mais pourquoi faudrait-il restreindre ? C’est une question de méthodologie : aujourd’hui, le projet de loi concerne le code de la consommation et le consommateur. Demain, il concernera le citoyen et l’atteinte à l’environnement, le patient et l’atteinte morale et corporelle.

Nous agirons code par code parce que, contrairement aux Anglo-Saxons, l’habeas corpus n’est pas au centre de notre procédure civile. De même que nous n’avons pas de jury populaire, nous ne pouvons pas transposer ce que vous pensez être transposable à l’identique d’outre-Atlantique en France.

Nos procédures civiles ont leurs propres spécificités, concernant notamment la réparation. Nous les accélérons aujourd’hui et nous les rendons plus effectives dans le code de la consommation en y intégrant le domaine immense de l’anticoncurrentiel. Nous aurions pu en débattre davantage, mais nous l’avons déjà largement fait en commission.

Je suis donc défavorable à votre amendement, sans avoir à aucun moment utilisé le contre-argument que vous anticipiez – à savoir considérer que les préjudices matériels peuvent être similaires tandis que les préjudices moraux ou corporels ne le peuvent pas. Je vous ai répondu avec une certaine rigueur intellectuelle, sans pour autant utiliser cet argument. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Messieurs les députés, et en particulier vous, monsieur Roumegas, je vous lis, je vous écoute, et je sens dans votre argumentation comme une pointe de soupçon…

M. Jean-Louis Roumegas. En effet !

M. Benoît Hamon, ministre délégué. …que j’ai essayé au nom du Gouvernement de dissiper à plusieurs reprises.

Nous n’excluons rien : nous nous efforçons de rendre la procédure efficace. Dans le code de la consommation, l’action de groupe concerne les litiges de consommation et concurrence ; pour ce qui relève de la santé, elle figurera dans le code de santé publique. Enfin, comme l’a indiqué la ministre de l’environnement, nous devrons ouvrir l’action de groupe dans le champ environnemental.

Il sera d’ailleurs utile de travailler sur la notion juridique de l’intérêt à agir au nom de la nature : elle aurait pu se trouver dans ce texte, mais ne s’y trouve pas pour la bonne et simple raison que tel n’est pas son objet.

Plutôt que de raisonner ainsi, en nous suspectant d’avoir toujours en arrière-pensée la volonté d’exclure, je vous invite à partager cette bonne vieille pensée de Gramsci, qui nous appelait tous au pessimisme de l’intelligence mais à l’optimisme de la volonté.

M. Thierry Benoit. C’est bien vu !

M. le président. La parole est à M. Sébastien Denaja.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. À ce stade, j’aimerais apporter une précision sur le champ d’application en matière environnementale : l’environnement est déjà inclus dans l’action de groupe.

Prenons ainsi l’exemple d’un contrat de fourniture de services en matière d’énergie ou de distribution d’eau : j’imagine, mon cher collègue Roumegas, que vous les rangez dans le champ très large de l’environnement. Ainsi, dans certains secteurs tout à fait rattachables à ce que vous appelez le domaine environnemental, l’action de groupe est autorisée.

Même en matière de santé, puisque nous nous sommes hasardés à tenir ce raisonnement, on peut imaginer que dans un cas très grave comme celui des prothèses PIP, rien n’empêcherait juridiquement les personnes victimes de ce scandale d’intenter une action de groupe concernant le seul achat de la prothèse.

Mais vous conviendrez, cher collègue, que le préjudice varie nécessairement entre une femme qui se sera fait implanter une prothèse pour des raisons purement esthétiques – parfaitement légitimes au demeurant – et une femme qui se sera fait implanter ces prothèses parce qu’elle aura été malade d’un cancer. Ainsi, vous comprenez bien que dans ces conditions, l’estimation du préjudice et la réparation doivent nécessairement être individualisées.

De plus, en matière de santé, ce n’est pas une loi sur la consommation qui peut permettre l’articulation juridique nécessaire entre des procédures existant déjà en matière de santé, prévues dans le code la santé, et ce qu’il faudrait prévoir en matière d’action de groupe.

D’un point de vue purement légistique, et je reprends ici ma casquette « commission des lois », il est tout à fait légitime de procéder code par code, pour une bonne intelligence du droit.

Si nous avions présenté un projet de loi « action de groupe », porté par la Chancellerie, sans doute la discussion aurait-elle été tout autre. Mais nous discutons aujourd’hui d’une loi sur la consommation, dans laquelle le ministre chargé de la consommation prévoit une action de groupe, qui sera ensuite étendue à d’autres champs.

Je veux donc répéter ici que ces champs ne sont pas a priori exclus : les quelques exemples que j’ai pris la peine de citer démontrent parfaitement que des actions de groupe pourront déjà être intentées dans le champ environnemental sur la base du texte de Benoît Hamon. De la même manière, des actions de groupe pourront être menées dans le domaine de la santé.

Dernière précision : vous affirmez que les préjudices corporels ou moraux seraient exclus. Là encore, s’ils ne sont pas effectivement embrassés dans le champ de l’action de groupe, ils n’en sont pas pour autant exclus, puisque l’action de groupe n’interdit pas l’action individuelle.

Cette dernière permettra d’agir dans les cas où des préjudices graves et importants s’étendraient à ces champs ou auraient ces caractères. Il appartiendrait alors au requérant non seulement de demander la réparation du préjudice économique dans le cadre d’une action de groupe, mais également de faire valoir à titre individuel le préjudice particulier et spécifique qu’il aurait subi, s’il est d’ordre corporel ou moral.

M. le président. La parole est à Mme Michèle Bonneton.

Mme Michèle Bonneton. Généralement, les préjudices concernant la santé ou même l’environnement sont nettement plus graves que les préjudices purement matériels.

Pour reprendre le cas des prothèses PIP, il est tout de même plus important d’obtenir l’indemnisation du préjudice dû à la mauvaise qualité des prothèses, qui induit des problèmes de santé, plutôt que de se faire rembourser le seul prix d’achat des prothèses – seule possibilité offerte par le projet de loi tel qu’il est rédigé aujourd’hui !

Il y a donc « deux poids, deux mesures » ; c’est pour cela que nous insistons particulièrement, car les Français tiennent beaucoup à protéger leur santé, tout comme ils tiennent également de plus en plus à protéger leur environnement.

Or tous les champs de l’environnement sont très loin d’être couverts. Imaginons qu’une pollution détruise les poissons d’une rivière : même si elle n’atteint la santé de personne, cela constitue un vrai dommage infligé à la nature. Il y a donc là matière à innover.

Par ailleurs, dans un autre registre, il existe d’autres atteintes à l’environnement pouvant simultanément concerner la santé. Ainsi, une entreprise comme Chimirec, qui déverse des PCB, peut porter atteinte à la santé des personnes habitant près de l’usine.

Nous avons bien entendu les réponses que vous nous avez apportées cet après-midi, monsieur le ministre, ainsi que les engagements que vous avez pris dans ce domaine. Nous souhaiterions vraiment que ces engagements deviennent effectifs rapidement.

En effet, il existe déjà, dans plusieurs pays européens, comme le Portugal ou la Suède, des actions de groupe dans le domaine de la santé et de l’environnement. La Commission européenne a par ailleurs réalisé une enquête auprès des États, et a également adopté une résolution en ce sens. Nous souhaiterions donc vraiment que la France ne figure pas parmi les lanternes rouges des pays européens dans la mise en œuvre de ces actions de groupe dans les domaines de la santé et de l’environnement.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas.

M. Jean-Louis Roumegas. Pour répondre à l’objection de M. le ministre et de M. le rapporteur, je m’en tiendrai en toute rigueur à l’acte de consommation ; ce que je vous soumets relève donc bien d’une loi sur la consommation.

L’alinéa 9, tel que vous l’avez rédigé, limite les préjudices pouvant donner lieu à une action de groupe aux seuls préjudices matériels et pécuniaires. Or vous excluez que l’acte de consommation puisse générer un préjudice moral ou corporel. Il va de soi qu’une loi sur la santé publique ou sur l’environnement doit également prévoir l’action de groupe ; mais même dans l’acte de consommation, limiter le préjudice subi à un préjudice matériel revient à exclure du champ d’application de l’action de groupe de nombreux préjudices.

Dans l’exemple des prothèses PIP cité par M. Denaja, il faut naturellement individualiser, car toutes les femmes n’ont pas développé un cancer. En revanche, toutes les femmes ayant eu une prothèse PIP ont dû se la faire ôter : l’action de groupe se justifie donc pleinement dans cette hypothèse pour exiger, non pas le remboursement du morceau de silicone – soyons sérieux ! –, mais l’opération consistant à se faire remplacer ces prothèses.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. C’est de la chirurgie : cela relève d’un autre type de recours !

M. Jean-Louis Roumegas. Or l’alinéa 9 exclut cette possibilité, alors qu’il s’agit bien d’un rapport de consommation impliquant que l’ensemble des requérantes aient le droit d’être indemnisées, non pour le morceau de silicone, mais pour l’opération qu’elles ont toutes dû subir à titre préventif.

Avec votre argumentaire consistant à nous renvoyer à une loi sur la santé publique ou à une loi sur l’environnement, vous laissez passer quelque chose qui relève pourtant bien de l’acte de consommation.

Monsieur le ministre, vous nous avez indiqué que vous ressentiez comme une pointe de soupçon : or c’est bien le cas ! Nous vous soupçonnons d’être resté au milieu du gué et de faire de la demi-mesure.

Je crois que nous souffrons trop de cela en politique. Est-ce le fruit de la pression de je ne sais quelle organisation professionnelle ou d’un lobby ? Je n’en sais rien ; à vous de nous le dire !

Quoi qu’il en soit, je constate dans les faits que nous restons dans la demi-mesure et que la déception est réelle. Je dis cela d’autant plus aisément que, vous le savez, nous voterons ce projet de loi, que nous considérons comme un progrès ; mais nous sommes déçus de cette demi-mesure et de votre incapacité à aller jusqu’au bout de la logique qui était la vôtre.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. J’ai quelquefois du mal à suivre l’argumentation de M. Denaja ; mais peut-être mes neurones sont-ils insuffisamment développés, ou bien mon niveau scolaire est-il insuffisant, ou encore l’heure tardive explique-t-elle mes difficultés.

Je crois vraiment qu’on ne peut pas balayer d’un revers de la main les arguments avancés par les uns et par les autres, même si on intellectualise au maximum.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Vous parlez de couteaux de Thiers, nous de couteaux de Laguiole !

M. le président. Nous vous écoutons, monsieur Chassaigne.

M. André Chassaigne. Monsieur Denaja pourrait peut-être répéter tout haut ce qu’il vient de dire ? Pour une fois qu’il dit une chose très simple, il peut sans doute la répéter ! (Sourires.)

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Quelle condescendance !

M. le président. C’est vous qui avez la parole, monsieur Chassaigne !

M. André Chassaigne. Je vais donc revenir sur l’argumentation que je voulais développer. Quand on exclut le préjudice matériel résultant d’une atteinte au patrimoine des consommateurs, on ne tient donc compte que du préjudice matériel.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. À ce stade, oui !

M. André Chassaigne. J’ai bien noté votre engagement très formel concernant la présentation d’un projet de loi sur les questions de santé et sur les questions environnementales. Nous en prenons acte !

Cela étant dit, concernant les préjudices matériels liés à la consommation, je prends un exemple très concret – ce ne sera pas l’exemple du couteau de Thiers ou du Laguiole – d’une personne consommant un fromage d’Auvergne, de type Saint-Nectaire. (Sourires.)

Le cahier des charges du fromage Saint-Nectaire stipule que les vaches qui produisent le lait servant à la fabrication du Saint-Nectaire ne doivent pas être nourries avec des végétaux contenant des OGM. Cela est bien précisé dans le cahier des charges.

Imaginons qu’un agriculteur voisin, qui n’est pas producteur de lait destiné à la fabrication du Saint-Nectaire, ait des cultures génétiquement modifiées et contamine par ces cultures les prés servant à nourrir les fameuses vaches dont le lait va servir à produire du Saint-Nectaire.

Le consommateur de Saint-Nectaire ne subira pas de préjudice pour sa santé – du moins pas immédiatement ; et encore faudra-t-il le démontrer après plusieurs décennies. Le consommateur en question ne subira pas de préjudice matériel. Certes, son Saint-Nectaire ne correspondra pas au cahier des charges de ce fromage ; mais il n’y aura pas de préjudice matériel.

M. Philippe Folliot. Il sera bon quand même ! (Sourires.)

M. André Chassaigne. Mais l’agriculteur qui aura produit le Saint-Nectaire pourra avoir un préjudice matériel car il sera mis en cause pour n’avoir pas respecté le cahier des charges. Il aura sans aucun doute aussi un préjudice moral parce que sa dignité de producteur de grande qualité pourra être mise en cause.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Ce n’est pas une action de groupe !

M. André Chassaigne. Si, il peut y avoir une action de groupe.

Je prends acte des engagements qui sont pris par le ministre et qui permettent de régler les problèmes en matière de santé et d’environnement, mais il faudra faire vite car indiscutablement il peut y avoir interpénétration des actions de groupe dans des domaines très divers qui peuvent à la fois toucher à l’environnement, à la santé et à la consommation et des préjudices matériels.

(Les amendements identiques nos 744 et 924 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 429 et 828.

La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement n° 429.

M. Thierry Benoit. Il est défendu !

M. Jean-Christophe Lagarde. Remarquablement ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 828.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

M. Jean-Christophe Lagarde. Le ministre ne donne aucun argument ! (Sourires.)

(Les amendements identiques nos 429 et 828 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 139 et 389.

La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n° 139.

Mme Marie-Christine Dalloz. Le fait générateur des manquements au droit de la concurrence qui seront constatés doit être postérieur à la loi relative à la consommation pour intégrer le principe constitutionnel de non-rétroactivité des lois.

J’imagine très bien que vous me répondrez que le principe constitutionnel de la non-rétroactivité des lois ne concerne que le pénal. Certes, mais il faut aussi admettre que l’on peut respecter un principe, celui de la sécurité juridique et qu’il faut impérativement définir à quel moment entrera en œuvre la présente loi relative à la consommation afin d’éviter des procédures à des entreprises qui ne pourraient pas se retrancher derrière la date d’entrée en vigueur de l’article 1er.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour soutenir l’amendement n° 389.

Mme Catherine Vautrin. Effectivement, on peut se poser la question de la sécurité juridique. Dans l’esprit de l’article 2 du code civil, Il serait raisonnable que le texte ne puisse s’appliquer que pour des faits postérieurs à la promulgation de la loi. Ce souci de sécurité juridique est lié à celui de la constitutionnalité dont nous parlons depuis le début de la soirée. Nous n’avons pas l’avis du Conseil d’État. Vous nous répondrez ce que vous nous avez dit à plusieurs reprises, à savoir qu’il ne porte pas là-dessus. Pour autant, nous vous répétons depuis le début de la soirée que nous ne le savons pas puisque nous n’avons pas pu le lire. Nous nous posons un certain nombre de questions sur la rupture d’égalité quant à la liberté d’association. Nous avons déjà eu l’occasion également d’évoquer le risque de connexité.

Il nous paraîtrait plus raisonnable, dans un souci de stabilité juridique, voire économique vis-à-vis de l’ensemble des entreprises, de considérer que, pour que le texte s’applique, les faits doivent être postérieurs à la promulgation de la loi.

M. Damien Abad. Très bien !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Le doute est salvateur. J’aurais pu répondre la même chose qu’en commission, à savoir que la rétroactivité ne s’applique que pour le pénal, et encore il y a des exceptions lorsque la règle pénale est plus « douce », si je puis dire. Dans ce cas, la rétroactivité ne s’applique pas.

Mme Catherine Vautrin. C’est bien pour cela qu’il y a un doute !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Justement, je ne veux pas qu’il y ait un doute dans l’esprit de ceux qui nous écoutent, nous regardent, de ceux qui attendent l’action de groupe ou de ceux qui pourraient la craindre pour de mauvais motifs.

L’action de groupe n’est pas une nouvelle peine,…

Mme Marie-Christine Dalloz. Si !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. …ce n’est pas une nouvelle sanction qui justifierait une absence de rétroactivité ou une rétroactivité. C’est une nouvelle procédure, une nouvelle manière de faire respecter le droit et de rendre effective la réparation.

La commission est défavorable à ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. L’action de groupe s’appliquera à tous les manquements qui ne sont pas prescrits au moment de l’entrée en vigueur de la loi. Telle est la réponse du Gouvernement, validée par le Conseil d’État.

Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. On se plaint constamment, à longueur de textes, de l’instabilité juridique et fiscale dans ce pays.

Mme Marie-Christine Dalloz et Mme Catherine Vautrin. Eh oui !

M. Lionel Tardy. Le Gouvernement nous dit constamment qu’il va améliorer les choses et tout simplifier.

Sur de telles dispositions, le principe de non-rétroactivité de la loi est vraiment la base. Nous l’avions même appliqué sur la mesure concernant les plus-values immobilières alors que nous voulions faire autrement. Ce principe s’impose donc dans tous les textes.

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre, je soutiens ces amendements.

M. Damien Abad. C’est le bon sens !

M. Thierry Benoit. Avec ce texte, vous allez établir de nouvelles règles, de nouvelles relations commerciales entre les consommateurs, les vendeurs et les constructeurs. Dès lors, il est bon de fixer la date à partir de laquelle elles s’appliqueront.

M. Lionel Tardy. Bien sûr !

M. Thierry Benoit. Sinon, ces dispositions seront sources de litige, de contentieux.

M. Lionel Tardy. Il ne faut pas s’étonner que toutes les entreprises s’en aillent !

M. Thierry Benoit. Nous allons mettre en place sur tout le territoire national un nouveau dispositif important mais un peu inconnu pour nous. Comme nous n’en mesurons pas tous les effets – sa perception par les usagers, les associations, les conséquences pour les commerçants, les vendeurs, les constructeurs, les fabricants –, il serait bon que vous fixiez un cap clair, afin d’éviter tout litige, en précisant que le texte s’appliquera à partir de la date de promulgation de la loi.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. C’est le cas !

M. Thierry Benoit. Non !

M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Monsieur le rapporteur, dès lors que vous n’acceptez pas l’idée selon laquelle les actions de groupe ne concerneront que des problèmes intervenus après la promulgation de la loi, vous démontrez que vous voulez sanctionner tout de suite et quelque part de façon rétroactive pour des litiges qui ont déjà eu lieu. C’est la démonstration très concrète que c’est bien la méfiance à l’égard des entreprises qui prédomine dans votre approche…

Mme Marie-Christine Dalloz. Très bien !

Mme Catherine Vautrin. …et que ce texte vise à pointer les difficultés rencontrées avec les entreprises. Il ne s’agit pas d’un dispositif gagnant-gagnant consommateur-entreprise. C’est donc la défiance qui prévaut, et c’est bien ce que nous dénonçons.

M. Lionel Tardy. Ce serait bien que le président de la commission soit présent sur des sujets aussi importants !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je ne peux pas laisser croire ici que la majorité schématiserait un clivage qui n’existerait pas.

Mme Catherine Vautrin. Mais non !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je vous renvoie aux auditions auxquelles nous avons procédé avec les entreprises et les organisations patronales. Ces auditions ont eu lieu dans un climat cordial et productif. Une seule organisation patronale, et pas la plus représentative – cela figure dans le rapport – a demandé cela.

Nous ne pouvons donc pas laisser croire ici qu’il y aurait, d’un côté les pro-entreprises, et de l’autre les anti-entreprises.

Mme Catherine Vautrin. Ce n’est pas le sujet !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. C’est pourtant ce que vous avez dit !

S’agissant de la stabilité juridique, je vous rappelle quelques dates : janvier 2008 loi Chatel, août 2008 LME, juillet 2011 projet de loi Lefebvre. En trois ans, ce ne sont pas moins de trois lois massives et concrètes qui ont été adoptées.

M. Damien Abad. Cela n’a rien à voir !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. La manière dont la présente loi structurera le droit de la consommation pour les années à venir montre qu’il n’y en aura pas de nouvelle avant trois ans, contrairement à ce qui s’est passé entre 2008 et 2011.

M. Lionel Tardy. Hors sujet !

M. Thierry Benoit. C’est la question de la rétroactivité qui est posée !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des lois.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Je vais vous donner un avis qui me semble être d’ordre juridique et qui s’impose puisque nous parlons d’une nouvelle voie procédurale.

Il y a un principe d’application immédiate des règles de procédure. L’action de procédure n’est in fine qu’une nouvelle voie procédurale.

Si nous suivions votre raisonnement, madame Vautrin, nous voterions une loi d’amnistie.

Mme Catherine Vautrin. Non !

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Si, puisque les lois qui fixent les obligations auxquelles doivent se conformer les acteurs concernés en matière de consommation existent déjà.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Tout à fait !

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Vous confondez l’application immédiate d’une règle de procédure avec le fond du droit, c’est-à-dire les règles de fond sur la base desquelles une action de groupe pourrait ensuite être intentée.

Mme Catherine Vautrin. Non !

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Je suis certain de ce que j’avance et j’espère surtout que mon argumentation n’est pas confuse.

L’action de groupe est une règle de procédure qui doit s’appliquer immédiatement. Il serait particulièrement grave et choquant de dire que l’on va faire comme si tous les manquements qui ont été commis avant l’entrée en vigueur de la loi n’existaient pas. C’est pourtant exactement ce que vous êtes en train de dire.

Les manquements auxquels il sera fait éventuellement référence dans le cadre d’actions de groupe peuvent déjà aujourd’hui faire l’objet de requêtes individuelles, voire de requêtes sur le fondement de la loi de 1992, même si seules cinq requêtes ont été formulées depuis vingt et un ans.

Il faut donc distinguer le fond du droit et la procédure. Si vous suivez ce raisonnement, vous ne pourrez qu’y souscrire.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. La question de la date d’entrée en application de la loi est fondamentale. D’ailleurs, elle se posera à nouveau à l’article 62 à propos des contrats.

Mme Catherine Vautrin. Bien sûr !

Mme Annie Genevard. En la matière, on peut citer la loi de modernisation de l’économie et le principe de la convention cadre annuelle. Là, vous serez bien obligés de prendre en compte la date d’application de la loi qui tient compte des contrats de l’année en cours, sinon vous aboutirez à un désordre généralisé.

M. le président. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. Monsieur le rapporteur, une loi d’amnistie ne peut concerner qu’une loi qui existe déjà.

M. Sébastien Denaja, rapporteur pour avis. Elles existent déjà !

M. Damien Abad. En la matière, nous sommes en train de créer les actions de groupe. Au-delà de la question de la rétroactivité se pose celle de la sécurité juridique qui est essentielle pour les entreprises et vous le savez, monsieur le rapporteur. Comme l’a fort justement rappelé le président de la commission des finances, Gilles Carrez, elles subissent déjà l’instabilité fiscale. N’y ajoutons pas l’instabilité juridique. N’ajoutons pas de la confusion à la confusion.

Monsieur le ministre, tout à l’heure, vous nous avez dit que vous étiez un homme ouvert, peut-être même un peu généreux, presque un peu sarkozyste. (Sourires.)

Mme Catherine Vautrin. Ne vous étouffez pas, monsieur le ministre !

M. Damien Abad. Alors, faites un petit effort, acceptez ces amendements raisonnables qui conviennent à tout le monde. Depuis le début de la discussion des articles, aucun amendement de l’opposition n’a encore été adopté sur l’action de groupe.

Soit vous considérez que l’action de groupe n’aura pas d’impact et que votre réforme est une petite réforme : à ce moment-là, la rétroactivité peut se justifier. Soit vous considérez que c’est une vraie réforme, une réforme structurelle comme l’a dit le ministre de l’économie et des finances, et dans ce cas, la rétroactivité n’a pas sa place dans ce texte.

M. le président. La parole est à M. Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Je partage l’avis de Damien Abad. La question n’est pas de créer une amnistie pour des faits qui aujourd’hui sont punissables, mais de dire que cette procédure nouvelle ne peut concerner que des faits postérieurs à la promulgation du texte. Voilà simplement la question qui est posée ce soir.

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit.

M. Thierry Benoit. L’action de groupe permet d’obtenir collectivement réparation, pour un groupe d’usagers ayant subi un préjudice économique. La loi est votée, promulguée : elle s’applique, mais en aucun cas elle ne vaut pour des politiques commerciales ou pour des faits qui ont eu lieu antérieurement à son adoption ! Voilà ce que précise l’amendement de Catherine Vautrin.

C’est pour nous une question de clarification. Comment peut-on voter une loi qui serait source de contentieux ? Bien sûr, comme je l’ai dit en commission, on donnera du travail aux cabinets d’avocats, on encombrera les tribunaux, parce que j’imagine qu’aujourd’hui déjà, il doit y avoir des structures qui n’attendent que cela : l’ambiguïté, la confusion totale, la cacophonie. Nous demandons la clarté, nous demandons un dispositif d’action de groupe qui soit clair, précis et encadré.

M. le président. La parole est à Mme Laure de La Raudière.

Mme Laure de La Raudière. C’est d’autant plus important que vous avez modifié le champ de l’action de groupe en créant l’opt out plutôt que l’opt in. Vous avez donc élargi considérablement le champ possible des plaignants.

Vous élargissez ainsi l’insécurité juridique des entreprises. Je trouve que ce n’est pas raisonnable. Si nous insistons lourdement sur ce point, c’est parce que les discussions que vous avez eues avec les associations de consommateurs et les représentant des entreprises aboutissaient à un équilibre. Il me semble extrêmement important que vous reveniez à un texte qui s’applique aux nouveaux faits générateurs, à partir de sa promulgation, et que l’action de groupe ne puisse être déclenchée pour des petits manquements au code de la consommation qui auraient eu lieu il y a six mois ou un an, d’autant plus que vous avez choisi l’opt out.

Mme Catherine Vautrin. Très juste ! Notre président de commission est bien silencieux…

M. Lionel Tardy. Pour un texte de la commission des affaires économiques, c’est inquiétant !

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Tout à l’heure, j’ai évoqué la notion de conflit d’intérêts. Essayons de raisonner en amont du conflit d’intérêts. On peut imaginer que parmi les seize associations qui ont reçu l’agrément, certaines aient déjà des projets d’actions de groupe.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Oui.

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous le reconnaissez, monsieur le rapporteur. Si vous laissez faire cela sans date d’application…

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Vous avez peur que la réforme serve à quelque chose !

Mme Marie-Christine Dalloz. …c’est simplement pour justifier l’utilité du projet de loi. C’est franchement dommage, parce que vous cassez cette loi sur la consommation : vous vouliez une loi ambitieuse, vous en faites une petite loi de règlement de comptes au profit de certaines associations.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Vous vouliez l’action de groupe !

Mme Catherine Vautrin. Oui, mais pas n’importe comment !

Mme Marie-Christine Dalloz. Je n’ose pas imaginer les difficultés des juridictions pour traiter ces cas-là.

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. Ce n’est pas le tribunal arbitral !

(Les amendements identiques nos 139 et 389 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 428 et 827.

La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 428.

M. Damien Abad. Il est défendu.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 827.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 428 et 827, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 829 rectifié.

Mme Annie Genevard. On voit bien la volonté du Gouvernement de mettre en place ce dispositif d’action de groupe tout en encadrant les dérives possibles. C’est bien le sens de cet amendement, qui vise à spécifier quelques précautions de recevabilité de l’action de groupe.

Tout d’abord, il s’agit de vérifier que les procédures de droit commun ne peuvent pas traiter le litige, afin d’éviter toute redondance. C’était le sens de l’amendement sur la concurrence que j’ai défendu tout à l’heure.

Ensuite, je propose que l’association agréée administre la preuve qu’elle dispose des ressources financières, humaines et de l’expertise juridique nécessaires afin de mener l’action de groupe. Il faut se poser la question de savoir si elle est en capacité d’assurer ce pourquoi elle est agréée.

Enfin, je propose de vérifier que les consommateurs puissent exprimer de façon claire l’acceptation de la procédure mise en œuvre. Je me fonde en cela sur les remarques du professeur de droit Dominique Rousseau, qui a très bien expliqué qu’il convenait d’éviter les dérives du système américain : celles-ci d’ailleurs semblent résulter non du principe même des class actions que de la culture juridique et judiciaire américaine. Il faut également éviter les dérives possibles du système à la française, qui n’est pas vertueux par essence. Il faut donc s’assurer de la capacité de ces associations agréées à remplir les objectifs fixés par la loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Sur le dernier point, à savoir la preuve que l’association dispose de l’expertise et des moyens nécessaires, c’est dans ce but que le projet prévoit des associations agréées nationalement.

Quant à la première partie, j’ai du mal à comprendre ce qu’est une « procédure inadaptée ». Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je considère qu’à bien des égards, l’amendement est satisfait. Je demande son retrait, sinon avis défavorable.

(L’amendement n° 829 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Lionel Tardy, pour soutenir l’amendement n° 266.

M. Lionel Tardy. Dans la création d’une action de groupe à la française, il est nécessaire d’éviter les procédures abusives comme elles peuvent exister dans d’autres pays. C’est pourquoi le filtre des associations de consommateurs a été retenu par le Gouvernement.

Cependant, malgré ce filtre, il y a toujours un risque de recours abusif ou fantaisiste à craindre. Cette hypothèse est sérieuse et ne peut pas être écartée. Même si le texte prévoit des conditions de recevabilité, je maintiens qu’il n’envisage pas suffisamment cette hypothèse. Mon amendement vise donc à ajouter les garde-fous qu’avait imaginés Jean-Paul Charié, à savoir la démonstration par les associations de consommateurs du caractère sérieux de leur action.

En particulier, il permet de s’assurer qu’elles fondent bien leur demande sur un groupe, car en réalité, avec votre formulation, elles pourraient lancer seules une procédure, sans plaignants. On s’éloignerait alors de la notion même d’action de groupe.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Monsieur Tardy, je connais votre exigence dans le débat parlementaire et je vais vous demander de bien vouloir retirer cet amendement.

M. Lionel Tardy. On ne les retire jamais, nous !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. L’existence de préjudice matériel est prévue dans le texte aux alinéas 6 et 9, c’est-à-dire que la deuxième partie de votre amendement est déjà satisfaite.

Vous employez par ailleurs le mot « significatif ». Nous parlons de simplification, au lieu d’un choc de complexification. Que veut dire « significatif » ? On ne le sait pas, personne ne le sait. Nous allons laisser au juge le soin d’estimer. Et pas n’importe quel juge : un juge au tribunal de grande instance. Avec Mme Vautrin, nous connaissons bien ces huit TGI qui devraient être spécifiés par décret.

Mme Catherine Vautrin. Vous les connaissez, mais pas nous !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Il s’agit de juges qui ont déjà l’expérience de ces questions économiques. Laissons le « significatif » à l’appréciation du juge à qui nous pouvons faire confiance. Je crois que le texte répond clairement à votre amendement, monsieur Tardi. Retrait ou avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. De même que le précédent, cet amendement est satisfait : retrait, sinon avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Monsieur le rapporteur, je pense que vous allez pouvoir éclairer la représentation nationale. Vous venez de nous dire que vous connaissiez les huit TGI retenus : merci de nous les donner !

Mme Marie-Christine Dalloz. En voilà une nouvelle, à une heure moins cinq !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Madame Vautrin, nous les avons évoqués en commission et ils sont dans le rapport. Je vous renvoie à la page 97 où les huit TGI sont cités : Marseille, Bordeaux, Lille, Fort-de-France, Lyon, Nancy, Paris et Rennes. Ce n’est pas encore décidé, ce le sera par décret ; mais nous, parlementaires, avons l’ambition de peser sur les décrets. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP.)

Il y a huit TGI compétents en matière économique et nous souhaitons les retrouver, par cohérence, dans les actions de groupe.

(L’amendement n° 266 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 745, 903 et 927 rectifié.

La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement n° 745.

M. André Chassaigne. Il est défendu.

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir les amendements nos 903 et 927 rectifié.

M. Jean-Louis Roumegas. Je les ai déjà défendus en proposant de supprimer l’alinéa 9. Je n’ajouterai qu’une idée, en réponse à ce que disait le ministre dans la discussion générale. Pour justifier l’exclusion des questions de santé et d’environnement, il disait : « Ce sont des sujets qui demandent une appréciation individualisée. » Je trouve que l’argument n’est pas valable. Dans la procédure, il y a une phase où le juge doit apprécier la recevabilité de l’action, son caractère et même l’existence d’un groupe constitué. Nous restons dans le cadre d’une activité économique. Renvoyer à une loi sur la santé ou sur l’environnement n’a pas de sens. Nous sommes bien dans la relation entre un consommateur et un fournisseur. Cette exclusion de la santé et de l’environnement est d’autant moins justifiée que vous défendiez l’inverse dans l’opposition, en 2009 avec la loi Ayrault, en 2007 avec la loi Montebourg. Sauf à avoir cédé à la pression de lobbies, on ne comprend pas cette exclusion aujourd’hui.

(Les amendements identiques nos 745, 903 et 927 rectifié, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 695 et 826.

La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 695.

M. Damien Abad. Il existe un risque de conflit entre les différentes décisions judiciaires si des TGI spécialisés sont saisis par différentes associations au sujet des mêmes sociétés avant que des juges aient eu le temps de statuer. C’est le problème de la connexité. Aussi cet amendement vise-t-il à préciser les conditions dans lesquelles le principe non bis in idem s’applique en vertu duquel nul ne peut être poursuivi ou puni à raison des mêmes faits.

Ce principe répond à une double exigence d’équité et de sécurité juridique et garantit en l’occurrence à une entreprise reconnue responsable dans le cadre d’une action de groupe et qui aurait indemnisé les consommateurs membres du groupe, de ne pas être exposée à une deuxième action de groupe identique à la première.

Voilà un vrai sujet qui mériterait l’éclairage et du rapporteur et du ministre.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 826.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. En ce qui concerne le principe non bis in idem, l’éclairage se trouve à l’article L. 423-15 du code de la consommation. Puisque votre amendement est satisfait, soit vous le retirez soit la commission donne un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces mêmes amendements ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je vous renvoie à l’alinéa 50 de l’article 1er. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 695 et 826 ne sont pas adoptés.)

Mme Catherine Vautrin. Ce qui montre bien que l’idée est de casser les entreprises !

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement n° 185.

M. Gabriel Serville. Comme mes précédents amendements, celui-ci me semble frappé au coin du bon sens. Je ne vous cache pas que notre attention a été appelée par des associations de consommateurs sur les conditions de conservation des preuves. Nous suggérons, à l’alinéa 15, de supprimer les mots « d’instruction » pour ne pas enfermer le juge dans des conditions qui seraient trop restrictives et qui pourraient l’empêcher d’effectuer correctement ses travaux. Il s’agit simplement d’élargir son champ d’investigation et lui permettre d’être plus à l’aise dans la manière de conduire la conservation des preuves.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Les termes « d’instruction » se réfèrent au code de procédure civile et sont nécessaires à la structure de ce texte, notamment dans le cadre de l’action de groupe. Dans les articles 143 à 154 du code de procédure civile c’est le terme d’« instruction » qui est retenu. Il n’est pas isolé mais lui-même relié à la décision ordonnant des mesures d’instruction, notamment à titre conservatoire. Pour des motifs de droit, de cohérence légistique, de respect du code de procédure, nous ne pouvons supprimer ce terme. Donc avis défavorable.

M. André Chassaigne. Quelle réponse brillante !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. J’évoquerai un problème de forme. J’entends bien que M. le rapporteur et M. le ministre nous renvoient à des alinéas du texte comme ils l’ont fait pour mon précédent amendement...

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Il s’agit d’un texte de loi !

M. Damien Abad. …et l’on peut se comporter de la sorte pour tous les amendements, mais alors il n’est plus nécessaire que nous nous réunissions. Votons et n’en parlons plus !

M. Nicolas Sansu. Mais non !

M. Damien Abad. Ce n’est pas un sujet mineur : il s’agit de savoir si une entreprise court le risque ou non de se faire condamner deux fois et de savoir si deux tribunaux différents peuvent être compétents pour une même action de groupe.

Mme Catherine Vautrin. Eh oui !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Ce n’est pas l’amendement en discussion !

M. Damien Abad. Nous avons simplement besoin d’un éclairage sur ce point. Lisez-moi l’alinéa en question et, surtout, donnez une explication.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je vous ai déjà répondu !

M. Damien Abad. Éclairez-nous, sinon à quoi sert l’Assemblée nationale ?

M. François Brottes, président de la commission des affaires économiques. L’alinéa 50 est l’alinéa 50 !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Nous avons tous ici la bonne volonté de faire avancer la loi, avec une exigence intellectuelle, une rigueur morale que nous partageons tous. On ne peut pas être approximatif dans la défense de ses amendements, continuer de soutenir un amendement déjà rejeté ou un amendement qui n’est pas encore appelé tout en nous reprochant notre manque de rigueur.

Mme Marie-Christine Dalloz. Mais qu’est-ce que c’est que ce revanchard !

M. Damien Abad. C’est l’énarchie !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Quant au rôle de l’Assemblée, il est garanti par le président de séance.

Je vous renvoie à nouveau à l’article L. 145-15 et le code de la consommation est à votre disposition si vous en avez besoin.

M. Damien Abad. On ne résout pas un problème en le niant !

(L’amendement n° 185 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement de précision, n° 643, de M. le rapporteur.

(L’amendement n° 643, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 825 de Mme Annie Genevard est défendu.

(L’amendement n° 825, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 972 de Mme Annie Genevard est également défendu.

(L’amendement n° 972, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin, pour soutenir l’amendement n° 421.

Mme Catherine Vautrin. À l’alinéa 16, il nous semble important de substituer au mot « nécessaires », les mots « adaptées et proportionnées ». Il s’agit de faire en sorte que le juge encadre les mesures de publicité. Nous savons tous que c’est très important pour le consommateur afin qu’il sache, dès lors qu’un jugement sera prononcé, quel était le problème posé afin qu’il ne se reproduise plus. Il est de même important pour les entreprises que cette publicité soit proportionnée au préjudice subi par l’ensemble des consommateurs. D’où la nécessité de prévoir un dispositif quelque peu plus normatif que le texte dans sa rédaction actuelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. En général, on parle de proportionnalité pour une sanction. Je comprends que vous souhaitiez utiliser ce terme car, dans votre amendement proposant une alternative à l’action de groupe telle que nous la définissons, vous envisagiez une publicité devant être appliquée avant que ne soit déterminée la responsabilité. Il s’agissait donc d’évoquer une sanction – puisque la publicité est quelquefois la sanction la plus terrible qui puisse toucher une entreprise –…

Mme Catherine Vautrin. Bien sûr !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. …avant même que sa responsabilité soit fondée.

Or il n’est pas question ici de sanction proportionnée mais de mettre à disposition les moyens « nécessaires » pour parvenir à la publicité la plus efficace. Il ne s’agit donc pas d’une publicité-sanction mais de l’information des consommateurs qui pourront se rattacher à l’action de groupe. Le terme « nécessaires », par définition, se suffit à lui-même. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Je comprends parfaitement, madame Vautrin, l’objectif que vous poursuivez mais je partage les remarques du rapporteur. Le mot « nécessaires » suppose qu’on mette en œuvre des moyens appropriés par rapport à l’objectif recherché qui est de faire en sorte que les consommateurs soient informés. De surcroît, le juge a toujours une approche proportionnée à l’objectif, ce qui signifie que votre amendement est satisfait par la rédaction actuelle du texte.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. L’alinéa 16 précise : « Le juge ordonne, aux frais du professionnel, les mesures nécessaires pour informer, par tous moyens appropriés, les consommateurs susceptibles d’appartenir au groupe, de la décision rendue. »

Nous considérons qu’il est important que le juge puisse également disposer de moyens adaptés. Je veux bien rectifier mon amendement et supprimer les mots « et proportionnées », le mot « adaptées » nous apparaissant tout à fait important.

M. le président. Vous proposez donc, à l’alinéa 16, de substituer au mot « nécessaires » le mot « adaptées ».

Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 421 ainsi rectifié ?

M. Razzy Hammadi. Le mot « adaptées » ne me semble pas hors de propos à condition qu’il concerne différents supports : communication numérique, papier, téléphonie. La commission émet un avis favorable à l’amendement tel qu’il vient d’être rectifié. (« Miracle ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Catherine Vautrin. Je n’en crois pas mes oreilles, je vais faire un malaise ! (Sourires.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Même avis. (« Incroyable ! » sur les bancs du groupe UMP.)

(L’amendement n° 421, tel qu’il vient d’être rectifié, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Roumegas, pour soutenir l’amendement n° 925.

M. Jean-Louis Roumegas. Nous défendons très clairement ce que nous appelons l’opt out même si le juge pourra toujours, selon son évaluation du type de dommage, avoir recours à l’opt in. L’opt out est l’option qui permet la réparation effective du préjudice pour le plus grand nombre.

On sait très bien que, souvent, les entreprises indélicates parient sur l’inertie et que, dans la plupart des cas, de 5 à 10 % des personnes lésées seulement engagent des recours de façon volontaire. Si l’on veut vraiment obtenir un effet dissuasif, il faut, comme c’est déjà le cas dans des pays européens comme le Portugal, privilégier l’opt out. Je pense à des cas de consommation à très grande échelle ; ainsi, des milliers et des milliers d’usagers de la téléphonie mobile peuvent être lésés. Ils n’enverront jamais, pour des petites sommes, un mandat individuel à une association, ce serait ingérable. Et, de fait, l’opérateur indélicat se verrait exonéré de la réparation du préjudice parce que, tout simplement, il n’est pas possible de réunir des centaines de milliers de mandats.

Vous avez opposé à cette version qui est beaucoup plus favorable au consommateur, un argument constitutionnel. Or, il n’y a absolument pas unanimité sur cette objection et je vous renvoie à l’avis du professeur Michel Verpeaux qui enseigne le droit constitutionnel à la Sorbonne et qui, au contraire, défend l’opt out comme bien plus valable sur le plan constitutionnel parce qu’il garantit le droit effectif au recours.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. La téléphonie mobile est un mauvais exemple, monsieur Roumegas, parce que, justement, avec la procédure accélérée – ou non –, les fichiers d’abonnement répondent à l’amendement n° 421 rectifié de Mme Vautrin : le juge ordonne les mesures nécessaires et adaptées, y compris celle de diffuser l’information par le biais des fichiers d’abonnés qui seront donc identifiables et, à la suite de l’action du juge, identifiés une fois que la responsabilité aura été déterminée.

M. Jean-Louis Roumegas. Mais non !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Si, monsieur Roumegas, c’est le texte.

Ensuite, à propos de l’opt out, si vous avez cité un professeur de droit constitutionnel, moi je vous cite une décision du 25 juillet 1989 qui nécessite l’accord explicite et non tacite de celui que l’on veut indemniser ou prendre en compte dans le cadre de la réparation comme une condition obligatoire. C’est-à-dire que l’opt out, en l’état actuel du droit français, est anticonstitutionnel. Donc avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. La remarque du rapporteur est frappée au coin du bon sens. Prenez le risque d’introduire l’opt out dans notre droit, monsieur Roumegas, et il n’y aura pas d’action de groupe du tout ; or l’intérêt du consommateur est de pouvoir en bénéficier. C’est la raison pour laquelle il vaut mieux se prémunir d’un risque des plus élevés au regard de notre tradition et de nos principes juridiques, se prémunir, donc, du fait que le Conseil constitutionnel nous censurera en raison du respect du principe du libre accès individuel à la justice.

C’est pourquoi nous n’avons pas retenu l’opt out mais que nous lui avons préféré l’opt in avec publicité et je vous renvoie aux travaux remarquables du CAE, notamment aux conseils juridiques dont il s’était entouré pour faire en sorte que, justement, nous défendions le principe d’une action de groupe qui privilégiait l’opt in avec publicité plutôt que l’opt out. Je préfère cette procédure-là et avoir la certitude ou la quasi-certitude d’avoir une action de groupe que pas d’action de groupe du tout.

(L’amendement n° 925 n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement n° 186.

M. Gabriel Serville. Notre ambition est de garantir une meilleure effectivité de l’action de groupe. Pour cela, nous suggérons d’accorder au consommateur un délai minimal d’adhésion de deux mois plutôt que les trente jours prévus par le texte. De plus, monsieur le ministre, vous avez eu la bonne idée de donner au juge une place importante dans le véhicule législatif proposé. Sa sagesse amènera ce même juge, dans la plupart des cas, et c’est mon souhait, à privilégier un délai relativement important afin de permettre au consommateur d’adhérer au groupe. Cependant, la loi doit imposer un délai minimal que je propose de ramener à deux mois plutôt qu’un.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Je suis d’accord sur l’idée de porter de un à deux mois le délai minimal pendant lequel les consommateurs peuvent adhérer au groupe, d’autant qu’il s’agit d’une nouvelle procédure et que la précaution est donc de rigueur.

Pour donner un avis favorable à votre amendement, je vous demanderai seulement de le rectifier. Vous parlez de la « publicité du jugement » et je ne voudrais pas que cette expression crée une confusion dans l’esprit de la procédure, et surtout dans l’esprit du juge. Nous ne parlons pas de la publicité-sanction, mais de la publicité qui vise principalement et avant tout à informer les consommateurs lésés.

Je suis favorable à votre amendement, à condition que l’expression « la publicité du jugement » soit remplacée par celle-ci : « les mesures de publicité ordonnées par le juge », car elle fait écho à l’alinéa précédent, relatif aux modalités de communication en direction des consommateurs. Cette rectification ne change rien au sens de votre amendement et au passage d’un à deux mois, auquel je suis favorable. Elle évite seulement, de mon point de vue, qu’une confusion puisse survenir dans les procédures à venir.

Si vous acceptez cette rectification, j’émets un avis favorable. Il s’agit, je le répète, si vous en êtes d’accord, de remplacer l’expression « la publicité du jugement » par les mots « les mesures de publicité ordonnées par le juge ».

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. J’aurais été favorable à la première version, telle qu’elle a été proposée par M. Serville, car il a raison : un délai de trente jours aurait sans doute été trop court et deux mois me paraissent constituer un bon socle.

Je retiens les remarques du rapporteur et je donne un avis favorable, à l’une et l’autre des versions de cet amendement.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Vautrin.

Mme Catherine Vautrin. Je ne voudrais pas interrompre cette belle construction et cette coproduction en séance, mais cette nouvelle rédaction, « deux mois ni supérieurs à six mois à compter des mesures de publicité ordonnées par le juge », vous paraît-elle claire ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Comment ?

Mme Catherine Vautrin. Il n’y pas de verbe et vous dites seulement : « six mois, à compter des mesures de publicité ordonnées par le juge ». Qu’est ce que cela veut dire ? Je pense qu’il manque une phrase. Je ne cherche absolument pas à aller contre le travail qui est fait, mais je ne comprends pas comment cela va s’appliquer concrètement.

M. François Brottes, président de la commission. Vous avez raison, madame, et le rapporteur va vous l’expliquer.

Mme Catherine Vautrin. J’ai l’impression qu’il manque un verbe, et il serait bon, pour l’application future de la mesure, que M. le rapporteur apporte des précisions.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Madame la députée Catherine Vautrin, votre exigence n’a d’égal que notre respect. Je vous propose la formule suivante : « deux mois ni supérieurs à six mois à compter de mesures de publicité ordonnées par le juge, telles qu’ordonnées par lui ». Tout simplement.

Mme Catherine Vautrin. Il manque tout de même une phrase !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Mais il y a une phrase avant ! Madame Vautrin, je vous propose la formule suivante, si vous en êtes d’accord, sous le contrôle de M. Serville : « deux mois ni supérieurs à six mois à compter des mesures de publicité ordonnées par le juge telles qu’ordonnées par lui », ou encore : « deux mois ni supérieurs à six mois à compter des mesures de publicité ordonnées par lui. »

Mme Catherine Vautrin. Et la mise en place ? Il n’y a pas le fait générateur !

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Mais il y a une phrase avant, madame Vautrin : « Le juge fixe les délais, qui ne peuvent être inférieurs à deux mois… »

M. le président. Oui, c’est la phrase d’avant, on est d’accord ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Tout à fait, c’est la phrase d’avant. Je répète la formule, afin que les choses soient bien claires pour le service de la séance et pour celui du compte rendu : « deux mois ni supérieurs à six mois à compter des mesures de publicité ordonnées par lui ».

M. le président. Vous supprimez donc les termes « du jugement » ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Tout à fait, et je dis : « ordonnées par lui », c’est-à-dire le juge.

Mme Catherine Vautrin. Si vous comprenez quelque chose, vous avez de la chance. Moi, je ne comprends rien !

(L’amendement n° 186, tel qu’il vient d’être rectifié, est adopté.)

Mme Catherine Vautrin. Je m’abstiens, parce que je ne comprends pas : il manque le fait générateur !

M. le président. Je suis saisi par le rapporteur d’un amendement rédactionnel, n° 644.

(L’amendement n° 644, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n° 753.

Mme Jeanine Dubié. Il nous semble nécessaire que l’association qui peut être désignée par le juge pour se charger de la liquidation des préjudices ait donné son accord au préalable. Dans le cas contraire, le dispositif risque de paralyser les associations de consommateurs, en leur faisant porter le poids de l’indemnisation des victimes, procédure longue et coûteuse.

Lors des auditions, les associations de consommateurs ont exprimé la crainte de se voir paralysées par toutes les démarches administratives et financières relatives à la liquidation des préjudices. Dès lors, elles ont exprimé le souhait de pouvoir refuser d’assurer elles-mêmes l’indemnisation des victimes, lorsqu’elles ne s’estiment pas capables de le faire, et de prévoir un mandataire liquidateur à cet effet.

L’objet de notre amendement, c’est de faire en sorte que lorsque le juge décide que l’indemnisation ne sera pas faite directement par le professionnel, il laisse le choix à l’association de conduire, ou non, la liquidation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Défavorable, pour des raisons de procédure et d’ordonnancement qui ont déjà été évoquées précédemment, notamment au cours de la discussion générale.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. Nous avons déjà eu cette discussion et je voudrais redire à Mme Dubié que c’est le juge qui décidera des modalités d’indemnisation : c’est lui qui décidera, selon les cas d’espèce, si les consommateurs doivent s’adresser au professionnel ou à l’association. Il fixera donc les modalités d’indemnisation, au terme d’un débat contradictoire, au cours duquel l’association et le professionnel donneront leur point de vue.

Il prendra les mesures adaptées et proportionnées – nous avons déjà évoqué cette question avec Mme Vautrin – à la nature de l’affaire et à la capacité de l’association de mener à bien la phase d’indemnisation. Votre préoccupation, que j’entends, me paraît plutôt satisfaite, et je vous demanderai donc de retirer votre amendement. Dans le cas contraire, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. Mme Dubié, retirez-vous cet amendement ?

Mme Jeanine Dubié. Il est retiré.

(L’amendement n° 753 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de trois amendements, nos 554, 550 et 967, pouvant être soumis à une discussion commune, les amendements nos 550 et 967 sont identiques.

La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 554.

M. Damien Abad. Si vous le permettez, je vais défendre en même temps l’amendement n° 550, afin de faire gagner du temps à l’Assemblée.

M. le président. Je vous en prie !

M. Damien Abad. L’amendement n° 554 tend à clarifier la possibilité de faire assurer par un mandataire judiciaire ou un huissier de justice la liquidation des préjudices, en lieu et place du professionnel ou de l’association, et non simplement en soutien de celle-ci. Cela présenterait deux avantages : éviter une monopolisation des services de l’association et renforcer l’impartialité de ces mandataires, plus particulièrement vis-à-vis du professionnel, puisqu’ils interviendraient directement sur désignation du magistrat, et non pas d’une quelconque des parties.

Nous pensons que c’est au juge de désigner un mandataire judiciaire. Cela permettra de certifier la bonne exécution de l’indemnisation, et aussi d’éviter de recourir aux officines privées de recouvrement. Nous pensons aussi que cela évitera de créer une liste de professions judiciaires qui serait prise par décret en Conseil d’État.

Quant à l’amendement n° 550, il s’agit d’un amendement de repli par rapport au premier.

M. le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour défendre l’amendement n° 967.

Mme Jeanine Dubié. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. Razzy Hammadi, rapporteur. L’article L. 423-4 fait déjà référence à une liste de personnes appartenant à une profession judiciaire réglementée. Je pense donc que votre amendement est satisfait. Les officines privées ne pourront pas intervenir, contrairement à ce que vous dites, monsieur Abad. C’est faux, car le texte l’empêche déjà. Je vous demande de retirer votre amendement, sans quoi j’émettrai un avis défavorable. L article L. 423-4 fait déjà référence, je le répète, aux professions judiciaires réglementées.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Benoît Hamon, ministre délégué. On précise déjà que le tiers doit appartenir à une profession judiciaire réglementée et que le juge peut ordonner que soit constituée, par le professionnel condamné, une provision pour couvrir les frais de liquidation. Il me semble donc que le texte offre déjà toutes les garanties que vous semblez rechercher, monsieur Abad. Je vous demanderai donc de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Damien Abad.

M. Damien Abad. J’entends bien qu’une liste de professions judiciaires réglementées sera établie par décret en Conseil d’État. Mais l’idée de cet amendement est de dire que qu’il appartient au juge de désigner un mandataire judiciaire.

M. Razzy Hammadi, rapporteur. Ce n’est pas pareil !

M. Damien Abad. Justement ! Ce n’est pas pareil que la formule que vous proposez. J’entends bien que mes amendements sont en partie satisfaits par ce que vous proposez, mais ils ne le sont pas pleinement. Je les maintiens donc.

M. le président. Mme Dubié, retirez-vous votre amendement ?

Mme Jeanine Dubié. Il est retiré.

(L’amendement n° 967 est retiré.)

(Les amendements nos 554 et 550, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi par le rapporteur d’un amendement rédactionnel, n° 646.

(L’amendement n° 646, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi par le rapporteur d’un amendement rédactionnel, n° 647 rectifié.

(L’amendement n° 647 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 697.

M. Damien Abad. Défendu.

(L’amendement n° 697, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement n° 181.

M. Gabriel Serville. Cet amendement vise à donner la possibilité au juge d’allouer une somme forfaitaire à l’association, lorsque celle-ci aura effectué l’ensemble des démarches pour représenter le groupe. Il ne s’agit pas ici d’instaurer un mode de rémunération des associations, puisque le montant devrait forcément être inférieur à un dixième du montant de l’indemnisation. Ce montant serait donc symbolique et permettrait de participer à la crédibilisation de la représentation par les associations dans des cas restreints.

Cet amendement vise, ni plus ni moins, à réparer le préjudice collectif des consommateurs. Le texte permettra la réparation des préjudices individuels de chaque consommateur. Avec cet amendement, il sera également possible, pour un montant relativement symbolique, de réparer leur préjudice collectif, le plafond étant fixé, je l’ai dit, à seulement un dixième du montant total.

(L’amendement n° 181, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. La parole est à M. Gabriel Serville, pour soutenir l’amendement n° 183.

M. Gabriel Serville. L’action individuelle en exécution forcée existe déjà et fonctionne. Selon moi, il n’y a donc pas de raison que l’action de groupe échappe par principe à l’exécution forcée, dès lors que celle-ci s’insère dans le périmètre retenu à l’occasion de ce projet de loi, à savoir les inexécutions contractuelles. Il y aurait d’ailleurs un vide juridique, si la loi ne précisait pas l’ouverture de cette action en exécution forcée. Tout ceci renvoie naturellement à l’article L. 1144 du code civil.

(L’amendement n° 183, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 964 et 968.

La parole est à M. Damien Abad, pour soutenir l’amendement n° 964.

M. Damien Abad. Il est retiré.

(L’amendement n° 964 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l’amendement n° 968.

Mme Jeanine Dubié. Il est également retiré.

(L’amendement n° 968 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi par le rapporteur d’un amendement rédactionnel, n° 649.

(L’amendement n° 649, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

M. le président. Je suis saisi par le rapporteur d’un amendement rédactionnel, n° 648.

(L’amendement n° 648, accepté par le Gouvernement, est adopté.)

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, mercredi 26 juin à quinze heures :

Questions au Gouvernement sur des sujets européens ;

Proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur le projet de fermeture de l’usine Goodyear d’Amiens-Nord ;

Suite de la discussion du projet de loi relatif à la consommation.

La séance est levée.

(La séance est levée, le mercredi 26 juin 2013, à une heure trente.)