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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Deuxième séance du jeudi 18 avril 2013

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de Mme Sandrine Mazetier

1. Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe

Deuxième lecture (suite)

Discussion des articles (suite)

Article 1er bis B

M. Philippe Meunier

Mme Annie Genevard

M. Marc Laffineur

Amendements nos 6, 258, 658, 1125, 1435, 1995, 3207, 3455

M. Erwann Binet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Amendements nos 1132, 2387, 3460, 7, 87, 107, 162, 387, 491, 692, 1107

Rappel au règlement

M. Hervé Mariton

Article 1er bis B (suite)

Amendements nos 1136, 1403, 1856, 2282, 2312, 3057, 3297, 3405, 3932, 1443, 1996, 2133, 2227, 3208, 3456, 89, 111, 172, 396, 494, 674, 695, 1409, 1607, 2283, 2313, 3300

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Suspension et reprise de la séance

Amendements nos 8, 260, 3251, 3888

Rappel au règlement

M. Christian Jacob

Mme la présidente

Article 1er bis B (suite)

Article 1er bis CA

Amendements nos 9, 261, 1153, 3851

Article 1er bis C

Amendements nos 10, 92, 1998, 3406, 3853, 1156, 1690, 3091 rectifié, 3841 rectifié, 11, 3

Rappel au règlement

M. Christian Jacob

Suspension et reprise de la séance

Rappel au règlement

M. Marc Laffineur

Mme la présidente

Article 1er bis C (suite)

Amendements nos 4, 2, 1994

Article 1er bis D

Amendements nos 12, 2288, 2000, 3855, 2689, 1163, 1691, 2390, 3092, 3558

Article 1er bis

Amendements nos 14, 3859, 15, 267, 738, 22, 2010, 3072, 16, 3071, 3471, 17, 2008, 24, 3073, 28, 3075, 26, 30, 3891, 2012, 2245

Article 1er ter

Amendements nos 2246, 2228

Rappels au règlement

Mme Laure de La Raudière

Mme la présidente

M. Christian Jacob

Suspension et reprise de la séance

Article 1er ter (suite)

Amendements nos 2013, 3863, 2407

Article 1er quater

Amendement no 2220

Article 1er quinquies

Mme Elisabeth Pochon

Amendements nos 45, 448, 751, 938, 1444, 2014, 2247, 2293, 2319, 3476, 3564, 3610, 48, 457, 529, 939, 1133, 1448, 1677, 2294, 2320, 2887, 3076, 3477, 3566, 3632, 3900, 2222, 50, 940, 2924, 3077, 3864

Article 2 A

Amendements nos 52, 767, 941, 1202, 2016, 2248, 53, 462, 530, 942, 1138, 1455, 1679, 2296, 3079, 3478, 3569, 3890, 3928

Article 2

M. Nicolas Dhuicq

Amendements nos 3570, 2015, 54, 3867, 55, 944, 1207, 3480, 3901, 3903

M. Olivier Dussopt

M. Christian Jacob

2. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de Mme Sandrine Mazetier
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe

Deuxième lecture (suite)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe (nos 920, 922).

Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de 6 heures 15 minutes pour le groupe socialiste, républicain et citoyen, 5 heures 57 minutes pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire dont 3 239 amendements restent en discussion, 2 heures 36 minutes pour le groupe Union des démocrates et indépendants dont 31 amendements restent en discussion, 41 minutes pour le groupe écologiste dont quatre amendements restent en discussion, 1 heure 10 minutes pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste, 1 heure 7 minutes pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine et 2 minutes pour les députés non inscrits.

Discussion des articles (suite)

Article 1er bis B

Mme la présidente. Ce matin, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’article 1er Bis B.

La parole est à M. Philippe Meunier, inscrit sur l’article.

M. Philippe Meunier. Mes chers collègues de la majorité, vous êtes aux ordres d’une minorité agissante.

M. Razzy Hammadi. Ça va !

M. Philippe Meunier. La preuve : vous protégez le Palais Bourbon des manifestants qui sont aujourd’hui les représentants du peuple.

M. Gérard Sebaoun. Ça commence bien !

M. Philippe Meunier. Il faut vous ressaisir, il en est encore temps.

M. Marc Le Fur. Ils se bunkérisent !

M. Philippe Meunier. Je suis très surpris par votre attitude. En première lecture, vous nous avez abreuvés de sondages favorables à votre projet de loi. Les députés de l’opposition – UMP, UDI et non inscrits – ont démontré aux Français que le problème n’était pas le mariage mais l’adoption des enfants. C’est la raison pour laquelle les Français sont désormais contre votre projet de loi car ils ont compris que l’enjeu est l’enfant, sa place dans notre société.

Faites preuve d’un peu de cohérence. Si vous avez défendu ce projet de loi parce que les sondages étaient favorables en première lecture, maintenant qu’ils sont défavorables, retirez-le et soumettez le sujet au référendum. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Je voulais réagir à l’un de vos propos de ce matin, madame la garde des sceaux. Vous nous avez expliqué que l’opposition était toujours parfaitement entendue, comme le prouve le fait que certains de nos amendements ont été acceptés. C’est vrai, mais je voudrais quand même rappeler que sur les quelque 5 000 amendements que notre groupe avait déposés en première lecture, ceux que vous avez acceptés se comptent sur les doigts d’une main. Vous avez accepté moins de cinq amendements sur 5 000, ce qui relativise un tout petit peu votre affirmation de ce matin.

L’un des amendements que vous avez acceptés portait sur le lieu de résidence. Déposé par Jacques Pélissard, le président de l’Association des maires de France, et cosigné par certains d’entre nous, cet amendement visait à mettre en conformité la loi et l’usage. L’usage veut que le mariage peut avoir lieu chez les futurs époux ainsi que chez leurs parents respectifs. Même si j’entends bien les arguments pertinents que développera Marc Le Fur, il me semble souhaitable de rester sur cette position.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Ce midi, j’ai entendu plusieurs déclarations venant des uns et des autres, appelant au calme et à l’apaisement dans ce débat. Bien sûr, toute l’opposition est de cet avis et pour l’apaisement, ce qui ne nous empêche pas d’argumenter avec détermination.

L’apaisement doit aussi venir du Gouvernement et de la majorité.

Quand il y a 700 000, 800 000, un million de personnes dans la rue et qu’on dit qu’il n’y en a que 150 000, c’est bien considéré comme une violence.

M. Marc Le Fur. Parfaitement !

M. Marc Laffineur. Quand on condamne des jeunes à plusieurs centaines d’euros d’amende simplement parce qu’ils se promènent avec un T-shirt représentant un homme et une femme tenant par la main deux enfants, ce qui représenterait un trouble à l’ordre public, c’est bien considéré comme une violence.

Quand on met en garde à vue plus de soixante jeunes simplement parce qu’ils chantent la Marseillaise et qu’on en met vingt-cinq dans une cellule de quinze mètres carrés en disant qu’on a « reçu l’ordre » de les mettre dans cette salle, c’est bien considéré comme une violence.

Quand on change le calendrier de l’Assemblée nationale pour tout accélérer sans tenir compte des gens qui manifestent dans les rues, c’est bien considéré comme une violence.

Quand on balaye d’un revers de main une pétition de 750 000 signatures, c’est bien considéré comme une violence.

Dans un débat tel que celui-ci, la responsabilité du Gouvernement, du Premier ministre, du Président de la République, de la garde des Sceaux serait de ne pas se livrer à des provocations en permanence. Ce serait de tenir compte, d’écouter, d’entendre ce que dit le peuple de France qui manifeste de façon très pacifique.

Il faut l’écouter. Vous ne l’écoutez pas. Essayez au moins, par des gestes, par des mots, de donner l’impression d’entendre ce que dit la rue ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques de suppression de l’article.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 6.

M. Marc Le Fur. Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, chers collègues, cet amendement qui porte sur le lieu de célébration du mariage n’est pas l’un de plus conflictuels et je comprends parfaitement que les avis puissent être partagés sur ce sujet, y compris dans notre groupe.

Nous modifions les règles sur le lieu de la célébration à l’occasion d’un texte qui devrait concerner très peu de mariages mais qui s’appliquera à tous, homosexuels comme hétérosexuels.

Il existe deux conceptions du lieu du mariage. L’une, qui consiste à laisser toute facilité aux personnes qui se marient de choisir le lieu qui leur convient, ne correspond pas à la philosophie du mariage républicain. L’autre, qui lui correspond, envisage le mariage non pas comme un contrat entre deux personnes mais comme une cérémonie publique qui doit se faire sous le contrôle de tiers susceptibles de constater des difficultés – liées à l’inceste, la polygamie, à l’âge des personnes qui se marient, etc. – et les signaler le cas échéant.

Si l’on admet cette logique, le mariage doit être célébré dans un lieu où les personnes sont connues, afin que ces manifestations de la vérité par des tiers puissent intervenir. Il ne faut donc pas disperser à l’excès les lieux du mariage. Or les dispositions que vous nous proposez permettront en fait le choix entre six endroits potentiels : les lieux de résidence de chacune des personnes qui se marient et de leurs quatre parents potentiels. C’est un cas extrême, j’en conviens, pour justifier mon raisonnement.

Avec cet amendement qui ne doit pas prêter à des conflits objectifs, je veux réaffirmer un principe clair de la loi et de la tradition de notre mariage républicain : ce mariage est public ; il doit se faire au vu et au su de tout le monde ; il doit permettre aux gens qui connaissent l’un des membres du couple de dire leur opposition éventuelle au mariage.

Dans ces conditions, l’on ne peut pas se marier où l’on veut mais dans le respect de règles qui doivent être bornées. Comment faut-il les borner ? Cela peut se préciser, se discuter. Je ne prétends pas avoir la vérité, mais je me devais de poser le problème.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 258.

M. Philippe Gosselin. Je voudrais souligner encore une fois les approximations de ce texte et son caractère bricolé.

M. Razzy Hammadi. Le temps passe !

M. Philippe Gosselin. L’objectif de la navette parlementaire, normalement, est d’améliorer le texte, de le soupeser afin que l’insécurité juridique soit la moins grande possible, bref que le texte à tout le moins établisse des situations claires et certaines.

Ici, ce n’est pas le cas. La volonté est d’ouvrir le choix du lieu de célébration du mariage le plus largement possible pour les futurs époux. Mais ce qui pourrait sembler une idée généreuse ayant pour objet de simplifier les choses et de briser certains carcans aurait un effet très pervers, puisqu’elle risquerait de rendre inefficace la publication des bans.

Pas au sens matériel du terme, bien sûr : les bans pourront être publiés. Mais à quoi bon ? L’intérêt de cette publication, c’est la publicité faite autour du mariage. Si les lieux de résidence sont déterminés quasiment au choix, on se prive de toute l’efficacité de la publicité. Le mariage sera célébré dans l’anonymat. Je rappelle que les bans ne sont pas publiés simplement pour faire joli sur le panneau d’affichage municipal, mais pour que ceux qui sauraient quelque chose qui compromettrait le cas échéant la célébration du mariage puissent le dire.

Une fois encore, ce texte est du bricolage.

M. Thomas Thévenoud. C’est laborieux !

M. Philippe Gosselin. Une deuxième lecture, c’est bien, mais seulement à condition d’avoir le pouvoir d’amender le texte ! Et ce n’est pas le cas, puisque le Gouvernement a fait le choix du temps guillotine. Je vois déjà la grande faucheuse venir priver de ses droits l’opposition !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 658.

M. Philippe Meunier. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1125.

M. Jean-Frédéric Poisson. Philippe Gosselin et Marc Le Fur ont dit tout l’impact que cet article pourrait avoir sur la publicité du mariage. C’est l’argument que je souhaitais développer. Mon amendement est donc défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Cochet, pour soutenir l’amendement n° 1435.

M. Philippe Cochet. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 1995.

M. Nicolas Dhuicq. Il fut un temps où le français était la langue de la diplomatie, utilisée dans le monde entier pour sa précision. Aujourd’hui, nous voyons bien dans quelle difficulté ce texte met le Gouvernement. Vous avez déjà dû avouer, à demi-mot, que vous aviez bien supprimé les mots de père et de mère du texte qui nous est soumis, contrairement aux textes britanniques qui, eux, conservent les termes husband and wife. Dès la première lecture, vous avez introduit cette novation juridique qui veut que les officiers d’état-civil, lorsqu’ils célébreront un mariage, devront interpréter le code civil. Et là, nous nous trouvons encore dans cette incongruité.

En laissant un os à ronger à l’opposition, en laissant ouverte la possibilité de s’inscrire dans des communes de plus en plus variées, vous poursuivez votre œuvre de destruction du mariage, déracinant les époux de leurs liens d’attache.

M. Razzy Hammadi. Rien de moins !

Mme la présidente. La parole est à M. François de Mazières, pour soutenir l’amendement n° 3207.

M. François de Mazières. Cet amendement illustre bien pourquoi nous contestons votre procédé, cette accélération extraordinaire de l’examen en deuxième lecture devant l’Assemblée nationale. Il donne l’occasion aussi de rappeler un certain nombre de choses.

Le premier alinéa de cet article ne nous pose pas de problème : c’est l’ouverture de la possibilité de se marier dans le lieu de résidence des parents. Le second est un alinéa de terminologie à propos duquel il faut rappeler l’analyse brillante faite tout à l’heure par Hervé Mariton. Tout au long de la première lecture, vous nous avez démontré que vous ne touchiez pas à la notion de mari et femme, à laquelle les Français sont très attachés – tous ceux ici qui ont célébré des mariages le savent. Et Hervé Mariton a très bien montré que vous avez été obligés, après la première lecture au Sénat, de revenir sur ces positions, notamment s’agissant de ces mots que nous devons lire devant tous les mariés de France. Cette question de terminologie est bien sûr lourde de sens.

Enfin, nous avons été accusés, au cours de la discussion, de faire de la manipulation. Mais Christian Jacob, dans sa motion de rejet préalable, vous a rappelé l’avis défavorable de la CNAF sur ce texte, l’avis très réservé du Conseil supérieur de l’adoption, l’hostilité de l’Académie des sciences morales et politiques. N’y a-t-il pas de la manipulation à s’asseoir sur tous ces avis émanant des instances les plus concernées par la question de l’adoption ? La véritable manipulation, au-delà des mots, qui peuvent certes parfois être un peu excessifs… la véritable manipulation est bien là, madame la garde des Sceaux.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n° 3455.

Mme Marie-Christine Dalloz. Cet article 1er bis B soulève une interrogation légitime pour l’ensemble des maires : quel besoin y a-t-il de publier des bans pour connaître les oppositions potentielles à la célébration d’un mariage si l’on peut se marier pratiquement partout en France ? Les maires s’interrogent sur cette situation, qui pose un véritable problème. Vous modifiez quelque chose de la notion d’opposition potentielle. Voilà la dérive que nous dénonçons par ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Erwann Binet rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements de suppression.

M. Erwann Binet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. J’ai déjà du mal à comprendre la démarche de l’opposition lorsqu’elle utilise sa part du temps législatif programmé, dans les discussions relatives aux articles, pour parler de tout sauf de l’article en question. Mais quand elle l’utilise pour demander, en deuxième lecture, la suppression d’un article qu’elle avait adopté en première lecture, je n’y comprends plus rien ! C’est une disposition que, comme l’a dit Mme Genevard, vous aviez vous-mêmes proposée ! La logique aurait peut-être voulu, dans le cadre de ce temps législatif programmé que vous critiquez, que vous agissiez autrement.

Cependant, je voudrais répondre aux objections faites notamment par M. Le Fur, qui a fort justement rappelé la signification de la publication des bans. Il a tout à fait raison, je ne m’y étends pas. Mais cet article ne fait que reprendre une pratique courante, vous le savez, et qui a notamment été maintes fois relevée par l’Association des maires de France ! Je précise qu’une disposition identique avait déjà été introduite dans le projet de loi sur la répartition des contentieux – vous l’aviez votée à l’époque également – et qu’elle avait été censurée par le Conseil constitutionnel en 2011.

La modification que nous proposons ne fait qu’entériner une pratique courante dans nos mairies. Nous acceptons assez volontiers que des jeunes gens viennent se marier dans la commune où vivent leurs parents. La plupart du temps du reste, et c’est pourquoi je ne partage pas votre souci concernant la publication des bans, les jeunes mariés sont davantage connus dans cette commune que dans celle où ils vivent, souvent depuis peu ! Je n’y vois donc pas de problème pour la reconnaissance par la communauté de leur couple et éventuellement le contrôle des conditions du mariage.

Vous avez rappelé, madame Genevard, les raisons pour lesquelles nous avions adopté tous ensemble cet amendement en première lecture. Je n’y reviens pas. Le Sénat n’a apporté qu’une modification rédactionnelle, juste une précision, et la commission n’y a pas vu de difficulté. Contrairement aux signataires des amendements, elle reste cohérente et demande qu’ils soient rejetés.

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner son avis sur ces amendements.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Défavorable. J’ai cru comprendre que Mme Genevard était elle aussi défavorable à la suppression de cet article. C’est parfaitement cohérent, puisqu’il résulte d’un amendement qu’elle avait présenté avec d’ailleurs beaucoup d’ardeur. Nous l’avions sous-amendé afin que cette modification du lieu ne puisse intervenir qu’à la demande exclusive des époux. En effet, nous voulions très clairement éviter d’envoyer un signal qui pourrait permettre de penser que le maire pouvait refuser de célébrer le mariage et donc renvoyer les époux ailleurs.

L’amendement ainsi sous-amendé avait été adopté à l’unanimité. Le rapporteur a eu raison de le rappeler.

Vous avez dit, madame Genevard, que le nombre d’amendements de l’opposition adoptés était relativement faible. C’est exact. Je pourrais vous citer le nombre de textes sur lesquels aucun amendement de l’opposition, lorsque vous étiez au pouvoir, n’a été adopté. Dans certains cas, d’ailleurs, deux ministres siégeaient au banc du Gouvernement, dont l’un, celui chargé de défendre le projet de loi, était plus fermé que l’autre. Ce n’est pas un sujet de débat – sauf si vous voulez en faire un – mais nous avons quand même été très attentifs à vos amendements. Simplement, lorsque des milliers d’amendements se répètent, si nous en rejetons un, cela vaut pour les autres. Nous n’en avons pas moins fait preuve d’attention, notamment sur un certain nombre de sujets tels que l’exercice de l’autorité parentale et la possibilité pour un salarié de refuser sa mutation que nous inscrivons dans le code du travail. Cette dernière question a donné lieu à un débat nourri, de même que celui du nom patronymique. Notre attitude vis-à-vis de l’opposition n’a donc pas été obtuse.

M. Xavier Breton. Si !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Sur le fond, rappelons que, si l’article 74 du code civil dispose que le mariage sera célébré dans la commune de résidence, il précise que la résidence est établie « par un mois au moins d’habitation ». J’entends l’argument selon lequel la publication des bans vise à permettre de s’opposer au mariage, mais, selon le droit actuellement en vigueur, les bans sont publiés dans la commune où l’un des époux occupe une résidence pendant un mois continu avant la date du mariage. Je ne critique pas cette disposition, ancienne, mais cette règle n’est pas la plus satisfaisante si l’on veut s’assurer que toute personne, dans la commune concernée, est en capacité de s’opposer au mariage.

Nous ouvrons le choix de la commune de célébration du mariage à six communes. Cela inclut notamment les communes de résidence de l’un ou l’autre des époux. Bien sûr, pour des personnes qui ont une résidence secondaire, une résidence tertiaire, etc., ce nombre peut augmenter.

Mme Marie-Christine Dalloz. Et dans le cas des familles recomposées !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Oui, mais, en ce qui concerne les communes de résidence des parents, vous savez parfaitement que les jeunes sont de moins en moins sédentaires. Cette disposition avait un sens à l’époque où ils l’étaient vraiment.

Mme Claude Greff. Vous ne connaissez pas la France, ce n’est pas possible !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Ce n’est plus la même époque.

Vraisemblablement, dans la commune de résidence des parents, les futurs époux sont plus connus et les possibilités objectives d’une opposition sont sans doute plus nombreuses.

Le choix du lieu de célébration est donc ouvert à six communes au plus : les communes de résidence de l’un et l’autre des futurs époux, les communes de résidence de l’un et l’autre des deux parents des futurs époux. Cela peut aussi faire moins de six communes : un époux peut être issu d’une famille monoparentale, auquel cas il n’y a plus que quatre possibilités.

En tout cas, six possibilités parmi nos trente-sept mille communes, je ne crois pas que ce soit abusif. Le Gouvernement est donc défavorable.

(Les amendements identiques nos 6, 258, 658, 1125, 1435, 1995, 3207 et 3455 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Nous en venons à une autre série d’amendements identiques.

La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1132.

M. Jean-Frédéric Poisson. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 2387.

M. Philippe Meunier. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n° 3460.

Mme Marie-Christine Dalloz. Défendu.

(Les amendements identiques nos 1132, 2387 et 3460, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Nous en venons à une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 7.

M. Marc Le Fur. Nous abordons là des points beaucoup plus essentiels.

Par cet amendement, je propose, avec bon nombre de collègues, de substituer aux mots « des époux » les mots « du futur mari et de la future femme » de façon à ce que nous revenions à la logique qui est la nôtre, celle de l’altérité ; je sais que vous ne la partagez pas. Le mariage, c’est un homme, une femme. Tout le monde le sait. Toutes les civilisations le savent, et depuis longtemps.

Simplement, vous nous avez bercé de mots, en particulier du mot « égalité », avec cette idée du mariage pour tous. Le « mariage pour tous », cela ne veut rien dire. En utilisant cette expression, vous essayez de répandre l’idée que certaines personnes n’auraient pas le droit de se marier et qu’il faudrait y remédier. Or c’est faux, car le mariage est déjà ouvert à tous. Tout homme, toute femme peut se marier, quelle que soit son orientation sexuelle, et les conditions de mariage sont exactement les mêmes pour tous. Effectivement, parmi ces conditions, il y a, bien évidemment, l’altérité. Le droit ne prend pas en considération l’orientation sexuelle des personnes, donnée subjective, mais uniquement leur sexe. La société n’a pas à connaître leur désir homosexuel ou hétérosexuel. Le mariage est donc bel et bien ouvert à tous. Simplement, nul ne peut épouser n’importe qui ; c’est la règle.

Vous nous objectez aussi l’amour. Mais la société n’institue pas le mariage pour reconnaître l’amour. Je l’ai dit en première lecture : les amoureux n’ont pas besoin de certificat, d’autorisation, et l’amour ne sera pas contenu par je ne sais quelle institution. C’est même, me semble-t-il, une attitude, pour le coup, très réactionnaire que de vouloir cela. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Thomas Thévenoud. N’importe quoi ! Même M. Jacob en rit !

M. Marc Le Fur. Cela voudrait dire que l’amour doit être organisé. Non, l’amour n’a pas à être organisé ! Ce qui doit être organisé, c’est la société, le fait d’avoir des enfants, leur protection. C’est cela, l’organisation qui doit nous occuper.

La société institue le mariage non pour reconnaître l’amour, qui relève, je l’ai dit, de la vie privée, mais dans l’intérêt bien compris des personnes les plus fragiles, et c’est cela qui nous différencie, très clairement. Notre priorité, c’est l’enfance, ce sont les personnes les plus fragiles. Parmi les enfants, sont plus fragiles encore ceux qui sont privés de père, ceux qui sont privés de mère, ceux qui sont orphelin, ceux qui sont susceptibles d’être adoptés mais, parfois, ne le sont pas parce qu’ils sont rejetés par les uns et par les autres. C’est cela que nous défendons.

La logique du mariage est connue des anthropologues depuis toujours.

Mme Ségolène Neuville. Ah oui ?

Mme Brigitte Bourguignon. Allez donc au bout de leur logique !

M. Marc Le Fur. Relisez Lévi-Strauss ! Se marier, c’est épouser quelqu’un de sexe opposé, issu d’un clan distinct du sien.

M. Nicolas Dhuicq. C’est l’exogamie !

M. Marc Le Fur. C’est là une constante. Se marier, c’est aller vers les autres. La logique que veulent pousser certains, c’est, au contraire, une logique inverse, une logique narcissique : on se regarde, on recherche l’équivalent de soi-même, on recherche l’auto-engendrement.

M. Thomas Thévenoud. N’importe quoi !

M. Marc Le Fur. C’est cela, la logique qui est derrière ce projet. C’est l’idée que l’on s’associe, que l’on s’accouple parce qu’on se ressemble, alors que la logique de l’accouplement, répétons-le encore une fois, toutes les grandes civilisations, tous les courants de pensée le disent, c’est d’aller vers quelque chose de différent pour s’enrichir de cette différence. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Thomas Thévenoud. Comment peut-on dire autant de bêtises ?

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Goasguen, pour soutenir l’amendement n° 87.

M. Claude Goasguen. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Gorges, pour soutenir l’amendement n° 107.

M. Jean-Pierre Gorges. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Cochet, pour soutenir l’amendement n° 162.

M. Philippe Cochet. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 387.

M. Frédéric Reiss. Effectivement, en première lecture, nous avions voté l’amendement de M. Pélissard, qui avait été défendu par Annie Genevard et sous-amendé. On nous dit que le Sénat a adopté des amendements de précision ; c’est pourquoi figurent les mots « au choix des époux ». Il me semblerait donc plus approprié de parler « du futur mari et de la future femme » ou, du moins, et je défends également là l’amendement n° 396, « des futurs époux ».

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l’amendement n° 491.

Mme Laure de La Raudière. Défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Kert, pour soutenir l’amendement n° 692.

M. Christian Kert. Cet amendement a pour objet de substituer aux mots « des époux » les mots, formidables, « du futur mari et de la future femme ». Nous ne nous faisons pas trop d’illusions, vous n’approuverez pas notre proposition, et vous avez tort car, en réalité, nous faisons appel à une notion essentielle, fondamentale dans notre droit et dans notre humanité : l’altérité. Vous vous souvenez qu’au temps de Rome l’époux et l’épouse échangeaient quelques gouttes de sang.

M. Erwann Binet, rapporteur. Quelle nostalgie !

M. Christian Kert. C’est dire toute la puissance de l’union entre un homme et une femme. C’est cette idée-là que nous voulons défendre. Vous ne la faites peut-être pas vôtre parce que vous finissez par vous persuader du contraire. Eh bien, nous ne vous suivons pas, chers collègues de la majorité, et nous persistons à défendre l’altérité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 1107.

M. Philippe Meunier. Mes chers collègues, Marc Le Fur et ceux de mes collègues qui sont intervenus ensuite pour défendre ces amendements identiques ont raison : le mariage, c’est un homme et une femme. Et la famille, c’est quoi ? C’est un père et une mère, avec un enfant, ou des enfants.

Une députée du groupe SRC. Et un chien ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Elisabeth Pochon. Et deux canaris !

M. Philippe Meunier. C’est ça, la famille.

M. Thomas Thévenoud. Ringard !

M. Philippe Meunier. Vous voulez satisfaire le caprice de bobos, c’est votre droit le plus absolu, mais vous êtes minoritaires, et vous défendez les minorités agissantes au détriment du peuple, qui défilera encore une fois le 26 mai prochain. Et ils seront nombreux à défiler une fois de plus pour vous faire entendre raison. En tout cas, ils feront entendre raison au Président de la République, parce que celui-ci, comme François Mitterrand, comme Jacques Chirac, sera bien dans l’obligation d’écouter le peuple quand il sera massivement descendu dans la rue. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Thomas Thévenoud. Ringard !

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton, pour un rappel au règlement.

M. Hervé Mariton. Madame la président, notre collègue a dit qu’une famille, c’est un père, une mère et des enfants. Cela ne paraît pas extraordinaire ; pourtant, nos collègues de la majorité ont ajouté : un chien ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Ollier. C’est scandaleux !

M. Bernard Roman. Nous avons aussi dit : des canaris !

M. Thomas Thévenoud. Et un poisson rouge !

Mme la présidente. Cela n’a rien à voir avec un rappel au règlement, monsieur Mariton. Cela concerne plutôt la série d’amendements identiques que votre groupe défend.

M. Patrick Ollier. Mais si ! Cela concerne le déroulement de la séance !

M. Xavier Breton. C’est scandaleux !

M. Hervé Mariton. Si, madame la présidente !

Mme la présidente. Vous avez tout loisir de développer vos arguments, monsieur Mariton, mais cela sera considéré comme une intervention en défense de l’amendement de M. Meunier.

M. Hervé Mariton. Madame la présidente, je serai bref.

Pour la bonne tenue de nos débats, nous avons convenu ce matin que le respect de la dignité de notre discussion est nécessaire. C’est d’autant plus nécessaire sur des sujets aussi sensibles. Cela a été dit par M. le président de l’Assemblée nationale, qui était au perchoir, à tous les députés : aussi bien les membres de la majorité que ceux de l’opposition. Cet impératif s’applique à tous, y compris aux membres du Gouvernement.

Il n’est pas convenable, lorsqu’un député dit qu’une famille, c’est un père, une mère et leurs enfants, que la majorité ajoute : et un chien ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Article 1er bis B (suite)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1136.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. André Schneider, pour soutenir l’amendement n° 1403.

M. André Schneider. Effectivement, nous avons convenu ce matin de reprendre le chemin du respect mutuel, que nous n’aurions jamais dû quitter. À présent, on nous traite de chiens, de ringards, et cætera. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mes chers collègues, cela fait seize ans que je suis député, et jamais je ne vous ai insultés ! Arrêtez donc ! Nous avons encore le droit de dire qu’une famille, pour nous, c’est un père, une mère, et des enfants ! Je ne vois pas ce qu’il y a de ringard à dire cela. Je ne pense pas que vous-mêmes soyez nés autrement que d’un père et d’une mère, mes chers collègues !

Nous défendons ce principe, il est donc logique que nous l’affirmions et le défendions jusqu’au bout. Notre opinion est au moins aussi respectable que la vôtre. Si vous voulez que l’on vous respecte, apprenez à nous respecter : tout se passe comme si, depuis quelques mois, vous l’aviez oublié ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-François Copé. Très bien !

M. André Schneider. Je pense qu’il s’agit là d’un amendement de bon sens. Voilà pourquoi nous vous invitons à réfléchir et à l’approuver.

Mme la présidente. La parole est à Mme Claude Greff, pour soutenir l’amendement n° 1856.

Mme Claude Greff. Je tiens à exprimer mes convictions de manière respectueuse. J’invite les nouveaux collègues socialistes à apprendre les usages en vigueur sur les bancs de cette assemblée. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Marietta Karamanli. On ne peut pas dire que vous en donniez l’exemple !

Mme Claude Greff. Sachez qu’un vrai débat ne peut avoir lieu que dans un climat de respect des convictions de chacun.

Madame la garde des Sceaux, je m’adresse particulièrement à vous, car vous êtes la seule à pouvoir nous répondre. Aujourd’hui, Mme la ministre de la famille est inexistante. Il s’agit pourtant d’un problème qui concerne la famille. Ce matin, elle n’a pas pris la parole. Hier…

Plusieurs députés du groupe écologiste. La voilà ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme Claude Greff. Voilà en effet Mme la ministre de la famille qui entre dans l’hémicycle. Cette entrée n’est guère glorieuse : arriver à cette heure-ci ne traduit rien de moins qu’un profond mépris pour le Parlement !

Une députée du groupe SRC. Pas d’attaque personnelle !

Mme Claude Greff. Certains d’entre nous ont déjà eu l’occasion d’être ministre : ils savent que, quand il s’agit de sujets aussi importants que celui qui nous occupe, les ministres concernés doivent rester présents sur les bancs de l’Assemblée nationale. (Exclamations persistantes sur les bancs du groupe SRC.)

Si cela ne vous intéresse pas, mesdames et messieurs les députés de la majorité, vous pouvez aussi bien sortir de l’hémicycle et prendre un café. Les choses iraient sans doute mieux ensuite ! Je vous l’ai déjà dit à l’instant : avant de donner des leçons, apprenez donc ce qu’est le Parlement !

Mme Elisabeth Pochon. Vous êtes de bien mauvais professeurs !

Mme Claude Greff. L’article 1er bis B est très important. J’ai entendu les différentes interventions sur les amendements à cet article. Au cours des échanges sur les deux séries d’amendements identiques que nous avons examinées, n° 6 et suivants et n° 1132 et suivants, la volonté du Gouvernement est clairement ressortie : il s’agit de faire en sorte que le mariage puisse être célébré dans l’anonymat.

La préoccupation dont je voudrais vous faire part aujourd’hui ne porte donc même pas sur la définition du mariage comme union d’un homme et d’une femme, mais sur celle de l’anonymat du mariage. Non, l’anonymat ne sert pas à protéger les personnes les plus fragiles ! Vous savez comme moi, Madame la ministre – je m’adresse à Mme la garde des Sceaux, qui me paraît la plus concernée – que les personnes les plus fragiles font bien souvent partie de familles monoparentales. 80 % des parents seuls élevant leurs enfants sont des femmes. Ces femmes ont besoin de connaître la personne avec qui elles vont s’unir ! Cela n’est d’ailleurs pas spécifique aux femmes : les personnes les plus fragiles doivent pouvoir connaître la personne avec qui elles veulent s’unir. C’est pourquoi il convient de ne pas permettre l’anonymat lors du mariage.

Vous savez aussi bien que moi, madame la ministre, que les mariages gris existent. Cela n’est pas une illusion. Il y a des mariages blancs, des mariages mixtes – auxquels je suis extrêmement favorable – mais aussi des mariages gris. (Murmures sur les bancs du groupe SRC.) Ne riez pas, monsieur le rapporteur, ce n’est pas drôle ! Savez-vous ce qu’est, aujourd’hui, le mariage gris ? Savez-vous combien de femmes en souffrent ? (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Ségolène Neuville et M. Thomas Thévenoud. Honte à vous !

M. François André. C’est ridicule !

Mme Claude Greff. Quand vous proposez l’anonymat, vous ne protégez pas les personnes les plus fragiles.

Avec cet article, vous contribuerez plus que jamais à fragiliser ces personnes. En effet, en remplaçant les notions de « mari » et de « femme » par le seul mot « époux », vous englobez ces deux notions sous un même terme, ce qui ne protégera pas les femmes !

Avant le mariage, les bans pourront être affichés aux murs de la mairie d’une commune où aucun des deux époux n’a sa résidence. Les personnes qui pourraient soupçonner l’un des futurs époux de ne pas vouloir se marier par amour, mais pour nuire à l’autre conjoint, n’en auront donc pas connaissance.

J’invite les nouveaux députés membres du groupe socialiste à se pencher sur ce sujet fondamental, qui touche de plus en plus de femmes souffrant de grandes difficultés économiques et sentimentales. Je pense notamment aux familles monoparentales. Je ne l’invente pas, c’est la réalité !

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 2282.

M. Patrick Hetzel. Pour défendre cet amendement, je reviendrai sur ce qu’a écrit Pierre Delvolvé, professeur de droit et membre de l’Institut. Il expose que « la Constitution comporte des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République et solennellement réaffirmés par son préambule, auxquels la loi ne peut porter atteinte. Parmi eux, le Conseil constitutionnel a rangé notamment la liberté d’association, la liberté de l’enseignement, l’indépendance de la juridiction administrative et sa compétence et, tout récemment, la particularité de la législation d’Alsace-Moselle », inscrite dans le droit français en 1924.

« Ces principes », poursuit-il, « peuvent être révélés par une ou plusieurs lois et aussi par l’esprit des institutions qu’elles aménagent. Tel est le cas du mariage. De manière constante, les différentes lois de la République sur le mariage l’ont conçu exclusivement et uniquement comme l’union d’un homme et d’une femme, et l’ont doté d’un statut à la base duquel se trouve la liberté du consentement de l’un et de l’autre », c’est-à-dire le respect de l’altérité. « Le projet de code civil adopté par la Convention le 22 août 1793 définit clairement le mariage comme une convention par laquelle un homme et une femme s’engagent, sous l’autorité de la loi, à vivre ensemble, à nourrir et à élever les enfants qui peuvent naître de leur union ».

C’est la raison pour laquelle la question de l’altérité est absolument essentielle. Nous défendons donc ces amendements pour que le mariage soit conclu entre un futur mari et une future femme.

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob, pour soutenir l’amendement n° 2312.

M. Christian Jacob. Il est défendu, madame la présidente.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3057.

M. Xavier Breton. Cet amendement nous donne l’occasion de rappeler l’importance de l’altérité sexuelle. Quand nous évoquons l’altérité sexuelle, cela vous fait penser à la race canine ; pour nous, c’est au contraire quelque chose d’important. La complémentarité entre un homme et une femme dans un couple est belle ; elle s’exprime notamment par la procréation.

Votre logique égalitariste ne parvient pas à articuler la différence sexuelle et l’égalité. Nous l’avons vu en première lecture, et cela n’apparaît que trop clairement dans les débats actuels. Pour parvenir à l’égalité, vous niez la différence, vous niez l’altérité sexuelle. Dans cette logique, vous ôtez l’altérité de nos institutions, et notamment du mariage. C’est pour cela que nous souhaitons rappeler que l’altérité sexuelle est au fondement du mariage comme de la famille. Les mots malheureux employés par notre collègue il y a quelques instants traduisent le dédain que vous inspire cette altérité. Nous défendons…

Mme Ségolène Neuville. Le patriarcat !

M. Xavier Breton. …cette belle complémentarité, dans laquelle vous ne voyez qu’un sujet de moquerie. Il y a bel et bien une grande différence entre nous sur ce point !

M. Patrick Ollier. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur, pour soutenir l’amendement n° 3297.

M. Marc Laffineur. En présentant ces amendements, nous vous donnons une chance de vous reprendre, de revenir sur vos errements. Cela dit, nous voyons bien que la stratégie adoptée par la majorité consiste à ne rien dire et à se laisser complètement manipuler par le Sénat. Le Sénat vous a pourtant donné une leçon en vous disant que le texte adopté par l’Assemblée nationale n’était pas bon. Vous avez donc choisi de voter le texte dans les mêmes termes que le Sénat, pour raccourcir la durée de l’examen du texte au Parlement et empêcher que le débat ait lieu dans le pays. Nous avons bien compris cette stratégie : cela aussi, c’est une violence ! Cette violence explique les manifestations ayant lieu actuellement dans toutes les villes de France, rendant plus difficiles les déplacements de membres du Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Bernard Roman. Ne justifiez pas l’injustifiable !

M. Claude Goasguen. Un peu de discrétion, monsieur Roman !

M. Marc Laffineur. Nous vous donnons l’occasion de revoir ce texte. Dans le même temps, cela nous permet de vous montrer notre détermination : quand nous reviendrons au pouvoir, nous reviendrons sur ce texte ! Voilà la signification de cet amendement ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. François André. Ce n’est pas vari !

M. Marc Laffineur. Nous mettrons en place, bien sûr, une union civile, pour faire en sorte que la situation juridique des couples de personne du même sexe soit aussi sûre que celle des autres couples en cas de séparation ou de décès. Mais nous reviendrons sur l’ouverture du mariage aux couples homosexuels, dans l’intérêt des enfants.

M. Bernard Roman. Tout le monde chez vous n’est pas d’accord ! Vous devriez demander une suspension de séance ! (Sourires sur les bancs du groupe SRC.)

M. Marc Laffineur. Ce que nous voulons, en effet, c’est protéger l’intérêt des enfants, dont il est très peu question ici, et dont vous ne parlez jamais. Ce sont ces êtres, qui sont les plus fragiles et que vous ne défendez pas, que nous protégeons.

M. Erwann Binet, rapporteur. C’est faux !

M. Marc Laffineur. Tel est le message que nous voulons vous faire passer par cet amendement. Nous espérons bien que vous le voterez : cela vous permettrait de vous reprendre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 3405.

Mme Annie Genevard. Cet amendement pose des questions de deux ordres : de forme et de fond.

Pour ce qui est de la forme, d’abord : nous proposons de remplacer les mots « des époux » à l’alinéa 3 par les mots « du futur mari et de la future femme ». À tout le moins, nous pourrions les remplacer par les mots « des futurs époux » : la rédaction actuelle de cet article considère que les époux sont mariés avant qu’ils n’aient pu le faire ! De notre point de vue, cette formulation est donc juridiquement incorrecte.

Sur le fond, comme mes collègues l’ont déjà dit, nous considérons que le mariage est fondé sur l’altérité. En dépit de vos moqueries et de vos propos outranciers, je vous rappelle que cela n’exclut pas l’union de deux hommes ou de deux femmes : pour cela, nous proposons de mettre en place une union civile.

M. Bernard Roman. C’est un déni d’égalité !

Mme Annie Genevard. Le mariage, en revanche, nous le réservons aux couples respectant l’altérité sexuelle. C’est la raison pour laquelle nous proposons la formulation « du futur mari et de la future femme ». À défaut, nous avons déposé un amendement de repli proposant la formulation « des futurs époux ».

M. Patrick Ollier. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n° 3932.

M. Gilles Lurton. L’amendement n° 3932 est le dernier de cette série des amendements identiques. Il vise à remplacer les mots « des époux » par les mots « du futur mari et de la future femme ». Cette proposition relève de la même logique que nous défendons depuis le début. Elle est cohérente avec ce que nous avons défendu en première lecture lors de la discussion de l’article 1er : le mariage est l’union d’un homme et d’une femme. Tel est le fondement de notre position.

Nous sommes donc logiques jusqu’au bout. C’est ce que vous voulez remettre en cause. C’est ce que nous voulons, pour notre part, préserver ! Et vous irez expliquer aux millions de personnes qui défilent dans la rue que nous sommes des ringards ! (« Très bien ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. J’espère que vous m’excuserez, madame Greff, d’avoir ri après vous avoir entendue déclarer que vous étiez extrêmement favorables aux mariages mixtes. Mais, et vous le savez, les couples n’ont pas besoin de nos faveurs et de notre accord pour se mettre ensemble et c’est heureux ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Votre amendement est évidemment totalement contradictoire avec l’article 1er que notre assemblée n’a pas eu à examiner puisqu’il a été adopté conforme par le Sénat.

M. Lurton a rappelé que ces amendements étaient déposés dans la logique de votre combat contre l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe, mais ils sont, je le rappelle, contradictoires avec l’article 1er, disposition essentielle de ce texte.

La commission est donc défavorable à ces amendements.

M. Bernard Roman. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Madame la ministre Greff, je n’ai pas bien compris ce que vous appeliez l’anonymat. Est-ce que c’est le fait qu’on puisse choisir entre plus de communes pour le lieu du mariage ?

Mme Claude Greff. Non, ce n’est pas le fait qu’il y ait plus de communes, c’est parce que le nom n’est pas inscrit et que la famille ne peut pas être protégée ! Et cela n’a rien à voir avec la question du mariage mixte, comme l’a dit le rapporteur !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Quelle disposition du texte interprétez-vous ici ?

Mme Claude Greff. Je vais vous expliquer !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Ce serait bien aimable de votre part et je vous en remercie par avance !

Mme Claude Greff. Savez-vous ce qu’est un mariage gris ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Oui, madame Greff. Ce sont même les procureurs de la République qui procèdent aux enquêtes nécessaires pour confirmer ou infirmer !

Mme Claude Greff. Et alors ? Ce n’est pas le problème !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Les mariages gris seront-ils possibles dans ce cas ? La procédure sera la même que pour les mariages hétérosexuels, madame ! Il n’y a rien de nouveau sous le soleil !

Mme Claude Greff. Vous ne protégez pas les femmes !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Le problème est quelque peu compliqué, mais je dois être lente en ce moment !

Le Gouvernement est défavorable à ces amendements. Nous discutons actuellement des termes « mari et femme ». C’est la conséquence de l’adoption par votre assemblée puis dans les mêmes termes par le Sénat, de l’article 1er. Le mariage est donc bien ouvert aux couples de même sexe. Le bon sens appelle donc que les termes « mari et femme » soient remplacés par « époux ». Je me souviens que nous avons eu, ici, à l’Assemblée nationale, ce débat lors de la première lecture. Je vous avais alors précisé que le mot « époux » portait quelque chose de plus beau.

M. Christian Jacob. Mais vous avez enlevé les mots « père et mère » !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je rappelles, depuis plusieurs mois, monsieur le ministre Jacob, que les mots « père et mère », figurant au titre VII du code civil, n’ont pas été modifiés. Ce titre est, en effet, consacré à la filiation. Nous n’avons pas cessé de le dire !

M. Christian Jacob. Et l’article 171-1 du code civil !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous avons toujours affirmé que, partout où cela serait nécessaire, nous le ferions…

M. Hervé Mariton. Vous n’avez pas osé le faire en première lecture !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …parce que nous ne rédigeons pas les lois de façon à ce qu’elles soient incohérentes et insensées ! Nous faisons des lois pour qu’elles soient applicables ! Les lois sont des règles qui s’appliqueront aux citoyens !

Vous avez passé votre temps à critiquer les dispositions proposées par le Gouvernement. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. Marc Le Fur. Oui, c’est vrai !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Lorsque la commission des lois a fait un autre choix, vous avez également trouvé à redire ! Lorsque le Sénat, tirant les conséquences de vos critiques, a fait un autre choix, non seulement vous avez critiqué sa rédaction, mais vous avez exprimé explicitement que vous regrettiez profondément la rédaction proposée par le Gouvernement ! (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Cela s’est passé en commission des lois !

M. Jean-François Copé. Tout cela confirme qu’il faudra revenir sur ce texte !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. On ne fera jamais votre bonheur. Je l’ai, pour ma part, compris et je m’en suis fait une raison !

En tout état de cause, le Gouvernement est défavorable à ces amendements. Il est cohérent de remplacer « mari et femme » par « époux » qui est, de plus, un très beau générique, dont le sens renvoie à une promesse solennelle. Cela n’a rien de choquant !

Mme Isabelle Attard. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Je reviendrai, tout d’abord, sur les droits des enfants. Ces droits ne se résument pas simplement au fait d’avoir un père et une mère, car ce n’est pas la condition absolue pour qu’ils soient satisfaits. Je vous conseille, d’ailleurs, de parcourir la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989. Elle reconnaît que « l’enfant, pour l’épanouissement harmonieux de sa personnalité, doit grandir dans le milieu familial, dans un climat de bonheur, d’amour et de compréhension. » C’est tout ce qui représente les droits des enfants.

Madame Greff, vous avez parlé avec beaucoup de conviction des familles monoparentales qui, comme vous l’avez dit, sont, dans la plupart des cas, composées de femmes avec des enfants. J’insisterai sur ce point, parce qu’un autre de vos collègues a fait référence à la définition du mariage sous la Révolution française. Mais la société a évolué. La famille a évolué. Aujourd’hui, le mariage doit évoluer.

M. Claude Goasguen. Vous régressez !

Mme Marie-George Buffet. Aujourd’hui, on parle de la famille traditionnelle, des familles monoparentales, des familles recomposées, mais il y a également les familles homosexuelles qui veulent bénéficier des mêmes droits : le droit au mariage, à l’adoption…

Si je prends la parole tout particulièrement à ce moment, c’est parce que j’ai entendu un collègue de l’opposition résumer le problème en parlant des « bobos », comme si être homosexuel était être bobo et être bobo était être homosexuel ! (« Non ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme Laure de La Raudière. Nous n’avons pas dit cela !

Mme Brigitte Bourguignon. Si ! « D’une poignée de bobos » !

Mme Marie-George Buffet. Laissez-moi terminer ! J’insiste sur ce point. Ce n’est pas une affaire de « bobos », comme vous dites.

M. Marc Le Fur. Vous oubliez les « prolos » !

Mme Marie-George Buffet. C’est peut-être justement dans les milieux les plus populaires, dans les milieux les plus en difficulté que vivre sa vie d’homosexuel en toute transparence et obtenir des droits est parfois le plus difficile.

M. Claude Goasguen. C’est ce que disait Maurice Thorez ?

Mme Marie-George Buffet. Sur tous les territoires, dans toutes les catégories sociales, des hommes et des femmes aspirent à construire leur vie en tant qu’homosexuels. Nous devons donner des droits à toutes ces femmes et à tous ces hommes et ne pas résumer cela à une question de bobos ! Ce n’est pas digne ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

(Les amendements identiques, n°s 7, 87, 107, 162, 387, 491, 692, 1107, 1136, 1403, 1856, 2282, 2312, 3057, 3297, 3405 et 3932, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux séries d’amendements identiques pouvant être soumis à une discussion commune.

Dans la première série, la parole est à M. Philippe Cochet, pour soutenir l’amendement n° 1443.

M. Philippe Cochet. Défendu !

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 1996.

M. Nicolas Dhuicq. Notre excellent collègue Marc Le Fur vous a rappelé la simple règle de l’exogamie et l’enlèvement des Sabines.

Faisons un peu de prospective ensemble. Dans trente années, madame la garde des sceaux, des mariages auront été célébrés et certains se seront soldés par un divorce. Les brèches auront été ouvertes dans le mur que vous semblez vouloir édifier autour de la France et on assistera à des gestations pour autrui, des procréations médicalement assistées « dans tous les sens ». Des personnes riches pourront même se faire fabriquer des bébés par n’importe quel ventre de femme qui sera loué. En effet, vous n’arrêterez jamais le progrès technique, puisque, avec ce texte, vous aurez brisé les digues de l’éthique.

M. Marc Le Fur. Exactement !

M. Nicolas Dhuicq. Que va-t-il se passer ? Il y aura des enfants, puis des divorces. À leur tour, ces enfants penseront peut-être, comme les anciens représentants de feu la classe ouvrière qui la méprisent tant dans leurs propos, la considérant comme décérébrée et incapable de réfléchir. Je trouve, madame Buffet, que votre intervention est relativement triste, parce qu’elle laisse entendre que le prolétariat n’est pas capable de réfléchir et d’être tolérant ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme Marie-George Buffet. Je n’ai pas dit cela !

M. Nicolas Dhuicq. Je suis désolé, je trouve que cette vision montre que vous avez rompu les amarres et coupé les ponts avec ce qui faisait auparavant votre foi !

M. François André. Ce n’est pas ce qu’elle a dit !

M. Nicolas Dhuicq. Les enfants voudront, à leur tour, se marier. Que se passera-t-il ? Il y aura les parents dits biologiques et les parents dits sociaux, donc trois ou quatre parents par enfant, comme c’est le cas dans les pays qui ont adopté ce type de réglementation ou de loi, mais qui, parfois, et nous l’avons dit, reviennent en arrière. Il y aura publication des bans, publication des mariages. Quels parents seront concernés : les parents biologiques ou les parents sociaux ? Vous entrez dans un argumentaire sans fin qui poursuit votre œuvre de destruction de la famille ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. François André. Quel salmigondis !

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 2133.

M. Hervé Mariton. Cette série d’amendements est assez modeste. Il s’agit simplement, ici, de conseiller humblement le Gouvernement et notre assemblée s’agissant de la qualité de la rédaction du texte. Il convient ainsi de parler de personnes qui vont se marier. Nous suggérons, donc, ce qui est tout de même assez logique, de parler des futurs époux.

Nous avons compris que le Gouvernement et la majorité s’interdisaient de rédiger une loi qui tienne debout. Non seulement vous cassez les principes, mais vous ne voulez même pas le faire proprement ! Nous pensons, pour notre part, que vous pourriez rédiger ce texte convenablement. Vous ne voulez pas parler de mari et femme. Cependant, parler d’époux pour des personnes qui ne sont pas encore mariées nous pose une petite difficulté. Ainsi, comment se nomment les gens avant et après ? En effet, s’ils ont la même qualité après qu’avant et avant qu’après, il n’y a plus de mariage du tout ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 2227.

M. Xavier Breton. Défendu !

Mme la présidente. La parole est à M. François de Mazières, pour soutenir l’amendement n° 3208.

M. François de Mazières. Nous avons assisté tout à l’heure à une scène assez surréaliste, madame la ministre. Christian Kert et Philippe Meunier ont soutenu que l’altérité était essentielle et que la complémentarité homme-femme permettait de construire le couple, ce à quoi nous sommes attachés. À ce moment, des cris « ringards ! » ont émané de vos rangs. Nous n’entendions que cela ! Imaginez quelle sera la perception des Français ! Des millions de couples hétérosexuels sont traités de ringards parce qu’ils s’aiment entre hommes et femmes !

Mme Suzanne Tallard. Mais non ! Les ringards, c’est vous !

M. François de Mazières. C’est ce que nous avons entendu ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Tous ceux qui regardent la télévision l’ont perçu ! Il y a tout de même là une anomalie absolument extraordinaire !

M. Xavier Breton. C’est cela qui est scandaleux et que vous ne comprenez pas ! Vous êtes des bobos aveugles !

M. François de Mazières. Madame la ministre chargée de la famille, je me souviens de votre phrase. Je vous ai, en effet, interrogée à deux reprises sur ce point en première lecture. Vous avez dit que les couples homosexuels et les couples hétérosexuels faisaient famille de la même façon grâce à la PMA. Entre ces hurlements de « ringards », considérant ces millions de couples de Français, et une vision pour le moins futuriste, pardonnez-moi de vous dire que nous nous demandons où nous sommes !

M. Jean-Marc Germain. Passéistes !

M. François de Mazières. Vous nous traitez de passéistes !

M. Jean-François Copé. Voilà pourquoi les Français défilent dans la rue !

M. François de Mazières. Assumez devant tous les Français cette phrase de Mme la ministre chargée de la famille ! Dites qu’effectivement les couples homosexuels et hétérosexuels feront famille de la même façon grâce à la PMA ! Assumez ! Allez jusqu’au bout ! C’est ce que nous vous demandons ! (« Très bien ! » et applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Je vous signale qu’il existe tout de même des plaidoyers extraordinaires !

Je me souviens des écrits de Sylviane Agacinski.

M. Jean-François Copé. Quel courage ! Ils n’ont pas voulu l’auditionner !

M. François de Mazières. Elle disait des choses essentielles, touchant à l’humanité. Nous sommes les représentants du peuple, nous avons un devoir d’honnêteté.

Cela me fait penser à ce que Molière fait dire à Philinte : « La parfaite raison fuit toute extrémité et veut que l’on soit sage avec sobriété. » Je vous en prie, soyez sages avec sobriété. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n° 3456.

Mme Marie-Christine Dalloz. Comme l’a très bien rappelé Hervé Mariton, lorsqu’il y a mariage, il y a une situation antérieure au mariage et une situation postérieure.

Lorsque vous arrivez au mariage, vous êtes célibataires. Des personnes qui ne seraient pas divorcées ne pourraient d’ailleurs pas se marier, c’est très clair. Après le mariage, on a affaire à des personnes mariées. Il y a donc bien un changement de statut.

Plusieurs députés du groupe UMP. C’est du bon sens !

Mme Marie-Christine Dalloz. Oui, et il faut le rappeler de temps en temps.

Ce n’est pas parce que vous vous présentez comme les chantres du progrès que cela vous exonère de parler correctement le français. Le texte devrait faire référence aux futurs époux. C’est un amendement de cohérence a minima, qui me semble assez crédible.

M. Bernard Lesterlin. Toutes les lois sont écrites au présent de l’indicatif !

Mme la présidente. Nous abordons la seconde série d’amendements identiques de cette discussion commune.

La parole est à M. Claude Goasguen, pour soutenir l’amendement n° 89.

M. Claude Goasguen. Quand on suit le débat, on voit bien que, de toute façon, nous n’arriverons jamais à nous entendre et que des millions de manifestants…

M. Jean-Marc Germain. Des milliards !

M. Claude Goasguen. …vous expliqueront en pure perte que vous vous trompez. La vraie réflexion que nous avons en ce moment, c’est quand et comment nous allons supprimer cette loi, ce qui, ne vous inquiétez pas, viendra plus tôt que prévu. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vu l’état dans lequel est votre gouvernement, préparez-vous tout de même à ce que les majorités changent rapidement, et soyez modestes.

Ce ne sera pas difficile, je vous assure, de réformer cette loi. Nous ne prendrons pas de mesures rétroactives mais nous sommes capables de créer des régimes juridiques spéciaux pouvant être rétablis dans le droit normal de la famille. Nous ne changerons rien, nous garderons votre loi pour une période déterminée, qui s’étendra peut-être sur quelques mois, parce que je ne vous vois pas aller plus loin, mais, ne vous inquiétez pas, les droits de chacun seront rétablis, et notamment ceux de l’enfant. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Mme Elisabeth Pochon. Et les droits des homosexuels ?

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 111.

M. Hervé Mariton. Je reprends la question : Le mariage est-il une institution suffisamment importante pour entraîner un changement d’état ? On est époux après avoir été marié, on ne l’est pas avant. Dans la confusion terminologique du projet, il y a une espèce de négation du mariage, qui, d’ailleurs, signe bien votre projet.

En réalité, il n’y a pas chez vous, on le sait, plus de conviction que cela quant à cette institution, et vous instrumentalisez depuis le début les couples de même sexe dans une projection de la famille totalement différente de celle que portent nos concitoyens et que nous défendons.

Vous ne croyez pas en la famille, vous avez une vision individualiste du monde, et l’extension du mariage aux couples de même sexe est un prétexte pour mettre en cause le mariage et la famille. Mais votre finalité sourd dans votre texte puisque vous en êtes à décrire les personnes de la même manière, que ce soit avant ou après le mariage, comme si le mariage avait peu d’importance. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Cochet, pour soutenir l’amendement n° 172.

M. Philippe Cochet. On ne peut que rebondir sur les propos très constructifs de M. Mariton. C’est vrai qu’à un moment ou à un autre, on ne peut pas être marié à l’insu de son plein gré. Dès l’instant où la rédaction n’est pas claire, il est nécessaire d’adopter cet amendement.

Si vous refusez, cela montrera bien que vous n’attendez absolument rien de l’opposition, ce qui est bien dommage sur un sujet qui engage fortement notre société.

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Reiss, pour soutenir l’amendement n° 396.

M. Frédéric Reiss. Comment peut-on parler d’époux alors que les deux personnes concernées ne sont pas encore mariées ? Cet amendement permettant de préciser qu’il s’agit des futurs époux devrait être voté à l’unanimité de notre assemblée, mais on voit bien, chers collègues de la majorité, quelles sont les consignes. Verrouiller totalement le texte en niant l’évidence pour avoir un vote conforme ne vous honore pas.

Nous pensons, nous, que la rédaction de ce texte doit être très précise.

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour soutenir l’amendement n° 494.

Mme Laure de La Raudière. Selon vous, madame la ministre, l’opposition préfère presque l’article balai issu de la première lecture à l’Assemblée nationale à la version issue du Sénat. Non, nous ne voulons ni de l’un ni de l’autre.

Nous dénonçons le fait de recourir à des ordonnances pour supprimer les mots de père et de mère de façon très large dans de très nombreux codes, ce que vous nous proposez dans la version issue du Sénat.

Cela montre clairement que le texte majeur que vous allez faire adopter mardi prochain par un vote solennel n’est pas un projet de loi terminé. Vous avez besoin de six mois supplémentaires pour rédiger les ordonnances. Le texte n’est pas non plus rédigé proprement, comme viennent de le démontrer mes collègues, et en particulier, de façon très éclairante, M. Mariton. Mais, comme vous voulez un vote conforme, députés de la majorité comme députés de l’opposition, circulez, il n’y a rien voir.

Ce n’est pas ainsi que l’on doit voter un texte de loi. Nous voulons pouvoir améliorer le projet dès aujourd’hui, et en particulier adopter cet amendement permettant d’avoir un texte propre qui concerne des futurs époux et non des époux puisqu’ils vont se marier. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 674.

M. Philippe Meunier. Comme vous ne l’avez apparemment pas compris en dépit des siècles, voire des millénaires qui nous précèdent, pour avoir un enfant, il faut un père et une mère. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je vous le répète encore une fois parce que vous semblez l’oublier.

C’est vrai que le sens de l’histoire marxiste vous aveugle. Madame Buffet, je resterai toujours un anti-communiste primaire, secondaire et tertiaire. Nous avons pu dans l’histoire, à travers nos courants de pensée, nous rejoindre,…

Mme Marie-George Buffet. Dans la résistance.

M. Philippe Meunier. …mais la frontière entre nous est suffisamment épaisse.

Cela dit, mes chers collègues, il y a une chose que vous semblez oublier, c’est le pays réel. Vous oubliez que, dans ce pays, il y a encore des familles, il y a encore des pères, des mères, des enfants.

Mme Sandrine Hurel. Il y en aura toujours.

M. Philippe Meunier. Certes, comme les salonards, vous êtes dans votre petit milieu, déconnectés du peuple (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR) mais le peuple, je vous rassure, vous allez l’entendre. Vous allez l’entendre le 21 avril, le 5 mai, le 26 mai, et cela ne va pas s’arrêter car vous touchez à l’essentiel.

Ressaisissez-vous donc et retrouvez vos chemins. Madame Buffet, retrouvez votre idéal, défendez les ouvriers et arrêtez de défendre les bobos. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

M. François André. Il récidive !

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Kert, pour soutenir l’amendement n° 695.

M. Christian Kert. Madame la ministre, vous êtes tellement dans la précipitation que vous voulez que les gens soient mariés avant même que ce ne soit le cas.

Vous vous souvenez sans doute qu’avant, dans l’archéologie de nos histoires respectives, pour éviter de telles ambiguïtés, il existait les fiançailles. Peut-être fûtes-vous vous-même fiancée à l’époque. Cela permettait de faire montre d’une volonté de se marier. Ce doit être ringard de dire que l’on se fiançait, mais M. Jacob, par exemple, a été fiancé,...

M. Christian Jacob. Oui !

M. Christian Kert. …et il s’en porte fort bien. (Sourires.)

Pour éviter l’intemporalité que vous avez inscrite dans cet article, existaient les fiançailles. Aujourd’hui, il faut peut-être respecter la temporalité et se dire qu’avant d’être marié, on souhaite l’être mais on ne l’est pas encore.

Acceptez donc le principe que cet amendement est juste et doit être adopté. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. François André. Rétablissez la dot !

Mme Elisabeth Pochon. Et les mariages arrangés !

Mme la présidente. La parole est à M. André Schneider, pour soutenir l’amendement n° 1409.

M. André Schneider. Au fond, c’est un amendement de précision. On précise qu’avant le mariage, nous sommes des futurs époux. Vous ne diriez pas avant d’être élus que vous êtes élus. Je ne vois pas vraiment où est le fond du débat si ce n’est une volonté déterminée de rejeter tout ce qui vient de l’opposition. C’est d’ailleurs ce que vous faites depuis six mois, contester, contester, contester.

M. François André. Mais c’est vous qui contestez !

M. André Schneider. Je voudrais m’adresser à mon tour à nos nouveaux collègues, qui sursautaient en entendant parler de la beauté de notre langue française. La précision en fait partie. Acceptez donc que l’on parle de futurs époux, quel que soit d’ailleurs leur sexe cette fois-ci, et, s’il vous plaît, arrêtez de nous traiter de tous les noms. Nous en entendons pas mal. Cela ne vous concerne pas, madame Buffet. Nous nous connaissons depuis assez longtemps et il n’y a pas de problème. Vous défendez vos idées, nous défendons les nôtres.

Il y a un mot que vous devriez répéter tous les matins comme nous faisions notre prière du matin, c’est le mot respect. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Gérard, pour soutenir l’amendement n° 1607.

M. Bernard Gérard. Parler d’époux avant le mariage, de qui se moque-t-on ? Nous sommes ici en plein divorce, le divorce des socialistes avec le peuple français. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Vous êtes totalement à côté de la plaque dans notre société, et tous ceux qui manifestent sont en phase avec ce que je vous dis, madame la ministre. Il faut écouter le peuple de France, qui ne comprend vraiment pas ce que vous faites.

En réalité, vous êtes en train de nous préparer ce que vous allez écrire dans vos ordonnances, et je voudrais bien savoir si, dans le code de la santé publique, vous allez aussi remplacer les mots d’homme et de femme par le mot d’époux, pour que la PMA soit immédiatement possible.

On sent bien toutes les manœuvres auxquelles vous êtes en train de recourir…

M. Philippe Meunier. Il a raison !

M. Bernard Gérard. …et toute l’hypocrisie de la gauche dans ce dossier. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 2283.

M. Patrick Hetzel. On ne peut pas être marié avant de l’avoir été, et c’est donc un amendement de bon sens que nous proposons, cela a déjà été souligné par mes collègues.

De quoi s’agit-il alors ? De toute évidence, l’œuvre que vous poursuivez est purement idéologique, et vous êtes prêts à tout pour que ce texte que nous examinons en deuxième lecture soit voté conforme.

Nos collègues de la majorité devraient se poser la question. Nous sommes le législateur, et nous devons faire en sorte que le texte soit le plus parfait possible. On nous fait d’ailleurs souvent le reproche contraire. Dans le cas présent, ne pas adopter ces amendements signifierait que vous placez des questions idéologiques avant les questions juridiques, et que vous êtes prêts à adopter un texte approximatif.

D’ailleurs, vous êtes extrêmement gênés. Vous ne pouvez vous exprimer, vous êtes bâillonnés. (Rires sur les bancs du groupe SRC.) Ce n’est pas digne de la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Vous devriez travailler avec nous, pour que la loi, toute loi qui s’élabore dans l’hémicycle soit juridiquement satisfaisante.

J’attends des explications, à la fois de M. le rapporteur et de Mme la garde des sceaux. Un garde des sceaux doit défendre des textes sérieux. Imaginez-vous un instant les juges s’appuyer sur des textes approximatifs ? Vous prenez une lourde responsabilité. Il est indigne de procéder de cette manière. Les juges apprécieront. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob, pour soutenir l’amendement n° 2313.

M. Christian Jacob. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur, pour soutenir l’amendement n° 3300.

M. Marc Laffineur. Ces amendements devraient nous prendre cinq minutes.

M. Bernard Lesterlin. Là-dessus, nous sommes d’accord !

M. Marc Laffineur. Ce sont de simples amendements de coordination, que chacun devrait voter.

Nous vous sentons gênés : comment parler d’époux alors qu’il n’y a pas eu de mariage ? Il va de soi qu’il faut parler de « futurs époux ».

M. André Schneider. Bien sûr ! Où est le problème ?

M. Marc Laffineur. Vous n’osez d’ailleurs même pas prendre la parole, tellement vous êtes gênés par la situation inimaginable dans laquelle vous vous trouvez. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Ce qui montre votre coupure totale avec la société et les Français, c’est que chaque fois que nous parlons d’époux, de mariage, de personnes hétérosexuelles, vous nous traitez de ringards, d’hommes du passé, et même de « neuneus ». Tout cela parce que nous parlons d’un homme et d’une femme ! C’est inimaginable, et vous comprenez pourquoi des millions de personnes sont dans la rue, parce que vous exaspérez les Français.

Vous devriez réfléchir à ce que vous a dit Claude Goasguen. Passer de la majorité à l’opposition, cela se fait très vite.

M. Christian Jacob. Vous êtes sur le toboggan !

M. Marc Laffineur. Ne pas arriver à comprendre, ne pas même écouter ce que vous disent les Françaises et les Français, c’est extrêmement grave, et c’est aussi ce qui peut entraîner des violences dans la rue. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux séries d’amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Voilà deux jours que vous vous plaignez, chers collègues de l’opposition, de n’avoir que dix heures de temps de parole, et voilà une heure et demi que nous vous entendons exprimer des reproches à un article que vous avez proposé vous-mêmes et voté en première lecture. J’avoue ne pas saisir la cohérence.

M. Frédéric Reiss. Le Sénat a changé l’article dans le mauvais sens !

M. Erwann Binet, rapporteur. Au demeurant, l’amendement de M. Pélissard qu’avait défendu Mme Genevard en première lecture ne corrigeait pas l’article 74 du code civil. « Le mariage sera célébré dans la commune où l’un des deux époux aura son domicile ou sa résidence établie » ; vous n’avez pas changé cela. C’est une loi du 21 juin 1907 qui a rédigé cet article, et, depuis 1907, il n’y a eu aucune difficulté d’interprétation.

Je me suis rendu sur quelques sites internet de mairie, notamment celui de la belle ville de Crest – M. Mariton n’est pas là –…

M. Jean-Frédéric Poisson. Il vous entend sûrement !

M. Erwann Binet, rapporteur. …eh bien, ces sites reprennent cet article. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) C’est le cas pour Rambouillet également. (Mêmes mouvements.) Cet article ne posant aucun problème depuis 1907, un changement ne se justifie pas. La commission a donc émis un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille, pour donner l’avis du Gouvernement sur ces deux séries d’amendements.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille. Depuis l’ouverture de ce débat, c’est comme s’il y avait d’un côté ceux qui défendent les enfants et de l’autre ceux qui n’en tiendraient pas compte et ne verraient que l’intérêt des adultes.

Plusieurs députés du groupe UMP. Eh oui !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Je pense que nous pouvons nous mettre d’accord au moins sur un point : pour avoir un enfant, il faut un géniteur et une génitrice. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Dites un père et une mère !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Je dis cela parce que vous savez bien qu’il ne suffit pas d’accoucher pour devenir mère…

Mme Fanélie Carrey-Conte. Très bien !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. …ni d’être marié et de bénéficier de la présomption de paternité pour devenir père. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.) Les fonctions de père et mère sont tout à fait autre chose que le simple fait d’engendrer.

Certains propos m’ont été prêtés. La filiation sociale existe déjà, parmi les couples hétérosexuels. En effet, lorsqu’un couple hétérosexuel a recours à la procréation médicalement assistée,…

M. Marc Le Fur. On y arrive !

M. Philippe Meunier. Lâchez-vous !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. …le donneur renonce à toute forme de paternité sur l’enfant à naître. De sorte que l’enfant né par PMA a, dans un couple hétérosexuel, que cela vous plaise ou non, à la fois un parent biologique et un parent social. Il peut évidemment appeler ses parents sociaux père et mère. Vous voyez bien que les fonctions d’engendrement et d’éducation ne vont plus systématiquement de pair. Il vous faut l’admettre.

M. Bernard Roman. Eh oui !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Je n’ai jamais utilisé le terme de « ringard ». Il ne s’agit pas de dire qu’il est mieux d’être homosexuel ou hétérosexuel ; ce n’est pas le problème. Ce qu’il faut, c’est reconnaître à tous les mêmes droits et devoirs, quelle que soit leur orientation sexuelle.

Quand je vous entends dire que vous créeriez des régimes juridiques spéciaux, je doute que cela soit conforme aux valeurs qui structurent notre République. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

À Mme Greff, qui m’a précédé dans les fonctions que j’occupe, je souhaite répondre en lui posant à mon tour deux questions. Chère madame, qu’avez-vous fait, quand vous étiez en exercice, pour les familles monoparentales ? Rien. Nous avons au moins eu le mérite, quant à nous, d’augmenter de 25 % l’allocation de rentrée scolaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. Philippe Meunier. En prélevant sur la branche famille !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Notre Premier ministre s’engage à revaloriser l’ASF et le complément familial, qui bénéficieront essentiellement aux familles monoparentales. Je n’appelle pas cela de l’idéologie mais du pragmatisme et un véritable intérêt pour les familles monoparentales.

De même, qu’avez-vous fait pour les familles homoparentales ? Rien,…

M. Bernard Roman. Rien de rien !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. ...et je le comprends, car je vais vous citer les propos tenus par Nicolas Sarkozy en avril 2012 sur le contrat d’union civile : « En 2007, j’ai pensé qu’on pouvait faire un contrat d’union civile en mairie. » C’est ce que vous nous proposez aujourd’hui. Je poursuis : « Après analyse, les juristes ont indiqué qu’il était anticonstitutionnel de réserver ce contrat d’union civile aux seuls homosexuels, qu’il devait être aussi ouvert aux hétérosexuels. Du coup, ce n’était plus le mariage des homosexuels, entre guillemets, mais un substitut au mariage. Dans ces conditions, j’ai estimé, à tort ou à raison, qu’une telle disposition aurait vidé le mariage de tout son sens. » Méditez cette dernière phrase !

M. Bernard Roman. Applaudissez Nicolas Sarkozy, quand même !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Vous qui voulez être les défenseurs du mariage,…

M. Christian Jacob. Les défenseurs de la famille !

M. Philippe Cochet. Et des enfants !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. …eh bien, en instaurant un contrat d’union civile que vous seriez obligés d’élargir à tous, c’est-à-dire en créant un quatrième statut, vous videriez le mariage, auquel vous êtes si attachés, de sa substance. C’est Nicolas Sarkozy qui vous le dit. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. C’était très bien, madame la ministre.

M. Philippe Gosselin. Vous aurez un bon point et une image !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous avez été écoutée avec attention, car tout le monde s’est bien rendu compte que vous apportiez des éléments pertinents.

M. Marc Le Fur. C’est un peu « maternaliste » – puisqu’il ne convient pas de dire paternaliste !

M. Bernard Roman. Et vous, vous êtes macho !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Qu’est-ce qui est « maternaliste », monsieur le député ? Ces mots que j’ai dits témoignent d’une amitié et d’un respect qui ne supposent pas de hiérarchie. Il n’y a d’ailleurs pas de hiérarchie entre Mme la ministre et moi. Il ne nous est pas interdit d’être agréables entre nous.

Plusieurs députés du groupe UMP. C’est rare !

Mme la présidente. S’il vous plaît !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je sens bien que cela vous perturbe, mais cette relation d’amitié est quotidienne. Pour être claire, j’ai entendu quelques propos déplaisants à l’égard de Mme la ministre ; ne voulant pas y répondre directement, j’ai eu ces quelques mots.

Vous faites un tollé quand, de temps en temps, un commentaire vous est adressé.

M. André Schneider. De temps en temps !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous surjouez, même, beaucoup. Pour notre part, nous laissons passer beaucoup de ce que nous entendons.

M. Claude Goasguen. Vous ne jouez pas mal non plus !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je suis moins talentueuse que vous à cet égard, monsieur Goasguen. J’ai encore beaucoup à apprendre mais je suis tout à fait disposée à vous observer longuement. (Rires.)

M. Philippe Gosselin. Nous avons parlé ce matin de cinéma : la dernière séance n’est peut-être pas loin !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Que voulez-vous encore, monsieur Gosselin ? Vous recherchez constamment le dialogue !

M. Philippe Gosselin. Le dialogue singulier avec vous ! (Rires.)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je sais que vous en redemandez ! (Rires.)

Comme l’a dit le rapporteur, « les époux », c’est déjà le code. Il a cité l’article 74, article extrêmement important, sur lequel vous avez longuement discuté à propos des amendements sur l’extension du lieu de mariage à la résidence des parents. C’est cet article qui permet de valider la publication des bans dans la commune. Il y est question des époux, et cela n’a jamais créé d’incident.

Il est également question des époux à l’article 165, concernant lui aussi les formalités de célébration du mariage. Il s’agit bien des futurs époux et ils apparaissent dans le code civil sous la qualification d’« époux ».

Convenez-en : il n’y a pas d’ambiguïté possible.

M. André Schneider. Qu’est-ce que cela changerait si vous acceptiez l’amendement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous pouvons aussi balayer tout le texte ! Vous discutez a posteriori d’un amendement de M. Pélissard – il est donc dit que nous citerons tous les amendements que nous avons approuvés.

M. Patrick Ollier. Bien peu !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Il y en a désormais davantage, monsieur Ollier, mais vous oubliez que certains de vos arguments ont permis d’enrichir le texte au Sénat. Ne boudez pas ce plaisir-là !

M. Hervé Mariton. On aimerait qu’il fût complet !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Considérez cela comme une conquête ! Reconnaissez que vous avez été capables de nous conduire à réfléchir et à débattre avec vous. Aussi n’est-il pas nécessaire, à moins de vouloir se livrer à un exercice de recensement puis de réécriture de ces concepts dans tout le code civil, d’opérer ici cette modification spécifique. L’avis du Gouvernement est donc défavorable.

Mme la présidente. Sur les amendements identiques n° 89 et suivants, appartenant à la deuxième série d’amendements identiques soumis à discussion commune, je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Patrick Ollier. Je ne suis pas d’accord avec ce qui vient d’être dit, pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, pour revenir au fond du débat, les quolibets de la majorité ne sont pas des arguments. L’arrogance dont vous faites preuve, mes chers collègues, ne vaut pas argument. Ce n’est pas parce que vous continuerez à lancer ces quolibets que vous parviendrez à convaincre les millions de Français qui nous soutiennent. Un public nombreux assiste à cette séance sans pouvoir comprendre de quoi nous parlons. Au-delà de votre obsession égalitaire qui vous conduit à pousser à faire voter ce texte, ce que nous pouvons comprendre et admettre, convenez que vous devez comprendre et admettre à votre tour, que nous ne soyons pas d’accord, madame Buffet, et que nous manifestions notre opposition. Sans quolibets, sans arrogance, sans moqueries.

M. André Schneider. Sans mépris.

M. Patrick Ollier. Cette vision égalitaire vous conduit à vouloir supprimer, au nom de l’égalité, la différence des sexes. Si nous nous battons contre cette vision des choses, ce n’est pas ce dont il s’agit dans cet article : il s’agit ici d’une aberration juridique. Le Sénat a en effet écrit : « Le mariage sera célébré, au choix des époux, dans la commune où l’un d’eux… ». Mais ils ne sont pas encore mariés ! Nous proposons donc : « au choix des futurs époux ». Vous nous répondez par l’article 74, monsieur le rapporteur qui n’êtes pas là…

Pardon, je ne vous avais pas vu monter sur les hauteurs.

M. Erwann Binet, rapporteur. J’ai rejoint ma place pour voter.

M. Patrick Ollier. Cela va vous faire du bien de vous oxygéner là-haut : cela vous permettra peut-être de mieux réfléchir. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Ce n’est qu’une réflexion sur la bonne forme physique.

Madame la garde des sceaux, on lit à l’article 74 : « Le mariage sera célébré dans la commune où l’un des deux époux aura son domicile. » La différence est dans cet « aura ».

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Ils ne sont pas encore époux.

M. Patrick Ollier. Le futur marque qu’il s’agit du domicile qu’ils auront après avoir été mariés. Dans cet article 74, la logique du futur implique que l’on se marie avant de choisir un domicile. Mais dans la rédaction que vous nous proposez, le futur disparaît. Vous établissez qu’ils sont mariés avant même la célébration de l’union. Comprenez simplement qu’il faut corriger un hiatus juridique en ajoutant « futurs ». Or même cela vous ne voulez pas l’accepter.

M. Bernard Roman. Eh non !

M. André Schneider. Ça ne mange pas de pain.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous assignez les époux à résidence ?

M. Patrick Ollier. Non ! « Aura » a disparu dans le nouveau texte.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. Madame Taubira, nous nous réjouissons de vos agréables propos à l’égard de votre collègue, car nous n’en avons pas l’habitude... (Sourires.) Voyez plutôt comment Arnaud Montebourg s’est adressé au Premier ministre dans des termes que je n’oserais même pas répéter ici, tant ils sont injurieux, ou ces autres ministres qui font des déclarations dans la presse pour remettre en cause sa politique.

Mme Catherine Quéré. Hors sujet !

M. Marc Laffineur. Aussi avons-nous été surpris de constater que la courtoisie avait encore sa place entre les membres du Gouvernement.

M. Patrick Hetzel. Plus pour longtemps !

M. Marc Laffineur. Madame Bertinotti, ne vous étonnez pas, quand vous tenez de tels propos, de la colère qui se lève dans le pays. Cela vous écorcherait tellement la bouche de parler de « père », de « mère » ou d’époux, que vous parlez de « géniteur » et de « génitrice » à propos des enfants.

Mme Annie Genevard. C’est terrible !

M. Marc Laffineur. Comment voulez-vous que l’on puisse s’y retrouver, alors qu’il s’agit avant tout d’amour quand on parle de la famille, des enfants, de la procréation ou de la naissance ? Voilà ce qui nous importe et ce que les Français attendent. Or vous, vous leur parlez de « géniteur » et de « génitrice ». Un fossé immense se creuse entre vous et le peuple.

De plus, vous nous parlez de politique familiale, quand vous voulez revenir sur ses fondements (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP). Alors que l’ancienne majorité avait créé des dizaines de milliers de places de crèche, vous voulez remettre en cause les allocations familiales, la PAJE, le quotient familial, tout ce qui a fait la caractéristique de la France et ce qui fait encore que la France a une démographie supérieure à celle des autres pays européens. Comment voulez-vous que nous ne combattions pas une telle politique et que les Français comprennent ce que vous voulez leur dire ? (Mêmes mouvements.)

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. Nicolas Dhuicq. Je veux revenir sur les propos de Mme Bertinotti : que de non-dits dans ses déclarations ! Que d’embarras !

Vous avez effectivement parlé de « géniteur » et de « génitrice ». Nous ne sommes pas à Rome, mais le terme a tout de même une connotation animale. Je sais que vous voulez rabaisser l’espèce humaine au rang d’une espèce vivante comme les autres… Un principe de précaution délétère nous empêche d’avancer, mais dans le même temps, vous libéralisez totalement l’expérimentation sur l’humain dans votre texte. Il ouvre le droit à l’eugénisme et à la manipulation des êtres humains. Mais s’agissant des fonctions paternelle et maternelle, vos propos, madame la ministre, montrent que vous êtes extrêmement embarrassée.

De fait, si nous prenons un couple d’hommes, quelle sera la dyade primitive ? Autre exemple : dans un couple de femmes, qui assurera la fonction paternelle, nécessaire au travail de séparation entre la mère et l’enfant ? Quel sera le roman familial de ces enfants conçus de manière de plus en plus découplée des voies biologiques ? Quelle sera leur scène ? Vous n’apportez à ces questions aucune autre réponse que celle de votre toute-puissance et de votre hubris.

Il est vrai que vous appartenez à un Gouvernement dont le ministre de l’éducation nationale a déclaré que la Révolution française n’était pas achevée. Il est vrai que vous voulez créer un homme nouveau, comme je l’ai déjà dit, coupé de son territoire, coupé de ses racines, coupé de sa généalogie et que vous embrigaderez le plus tôt possible dans cette école que vous appelez « de la République ».

Mme Julie Sommaruga. N’importe quoi !

M. Nicolas Dhuicq. Par des moyens démocratiques, vous allez réaliser ce rêve fou que tous les systèmes totalitaires, grâce à Dieu, ont échoué à mettre en place. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Réfléchissez un peu et reprenez-vous ! Pensez à ces fonctions paternelle et maternelle pour lesquelles vous n’apportez pas d’autre réponse que celle de votre toute-puissance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Roman. Merci, docteur !

(Les amendements identiques nos 1443, 1996, 2133, 2227, 3208 et 3456 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Parmi les amendements soumis à discussion commune, je mets aux voix dans la deuxième série les amendements identiques nos 89, 111, 172, 396, 494, 674, 695, 1409, 1607, 2283, 2313, 3300.

(Il est procédé au scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 154

Nombre de suffrages exprimés 154

Majorité absolue 78

(Les amendements identiques nos 89, 111, 172, 396, 494, 674, 695, 1409, 1607, 2283, 2313, 3300 ne sont pas adoptés.)

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures dix.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 8, 260, 3251 et 3888.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 8.

M. Marc Le Fur. Mesdames les ministres, monsieur le rapporteur, mes chers collègues de gauche, vous faites un texte mauvais, mais en plus vous le faites médiocrement : vous ne respectez pas des règles élémentaires de rédaction. Nous, nous vous proposons des choses simples, des évidences, contre lesquelles vous n’avez aucun argument. Au moins, faites les choses correctement, faites illusion devant l’opinion, essayez, faites un effort.

Ce qui est aussi un peu pénible, ce sont les mots utilisés dans ce débat. Les mots « géniteur », génitrice », ne me conviennent pas, madame la ministre, parce que l’on a l’impression qu’ils ravalent une fonction humaine, que celle-ci est tellement médiocre qu’elle pourrait demain être confiée à d’autres qu’aux parents, à des salariés susceptibles de porter les enfants d’autrui.

Non, la fonction de mère, de père, ça compte, y compris dans ce mélange extraordinaire entre la chair, le désir physique, le désir sexuel et l’affection. C’est ça, la fonction parentale. Vous la niez, et j’en suis très triste.

Un autre mot est apparu dans le débat ; tandis qu’un collègue évoquait « papa », « maman », « les enfants », un député socialiste a osé dire : « Et le chien ? ».

M. Bernard Roman. Et les canaris ?

M. Marc Le Fur. Je trouve cela triste, parce qu’on a vraiment le sentiment que chez vous, il y a les animaux de compagnie et les enfants de compagnie, que l’enfant est un luxe que l’on se paye, que l’enfant ne compte pas, qu’il est un objet et pas un sujet en soi. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Voilà qui est bien triste.

Puisque l’on parle d’animaux, je vais en évoquer un autre : le caïman. Il a donné son nom à des îles lointaines qui accueillent des fonds divers et variés, en particulier ceux de M. Augier. Certains d’entre vous doivent le connaître, M. Augier : il a exercé une fonction majeure, celle de trésorier de campagne. Ce n’est pas une petite fonction, elle impliquait la proximité et la confiance du futur Président de la République. M. Augier devrait dès lors être plus respectable que quiconque.

M. Bernard Roman. Les comptes ont été approuvés !

M. Marc Le Fur. Or quelque mois après, M. Augier, trésorier de la campagne, devenait le propriétaire d’un journal qui s’appelle Têtu (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC), très engagé pour que ce projet de loi passe !

M. Xavier Breton. Tout à fait ! Les faits sont têtus !

M. Marc Le Fur. Tout cela est cohérent : trésorier de campagne ; propriétaire du journal qui porte ce texte ; enfin, utilisateur des comptes aux Îles Caïmans. Tout cela, hélas, est révélateur de ce que les Français ne veulent plus ! Ils exigent…

M. Philippe Meunier. La moralité !

M. Marc Le Fur. …une moralisation, mais pas une apparence de moralisation, une vraie moralisation, qui soit l’anti-Cahuzac, l’anti-Augier ! Sachez vous dissocier de ces tristes personnages, sachez revenir à vos fondamentaux. Mais non, vous êtes des exécutants, vous êtes des godillots ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Des godillots en souliers vernis, mais des godillots tout de même ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Meunier. Des moutons bêlants !

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 260.

M. Philippe Gosselin. On va revenir à nos moutons… Je veux, une fois encore, démontrer combien ce texte est bancal. La première lecture a permis de mettre en avant des incertitudes, le bricolage, des incohérences. Le Sénat, s’inspirant de nos travaux et les faisant siens pour une part, a souhaité, sans doute à juste titre pour certains éléments, corriger tout cela. L’amélioration aurait pu se poursuivre hier, aujourd’hui et demain, et nous aurions fait une œuvre davantage utile. Le Gouvernement a fait le choix – et c’est là un aveu de faiblesse – du temps programmé, un temps guillotine. Et je sens évidemment le sablier se vider, le sable s’écouler inexorablement, grain après grain. La grande faucheuse des droits du Parlement fait son œuvre. C’est notre première difficulté.

Et puis, il y a cet autre aveu du Gouvernement, un aveu sinon d’incompétence en tout cas de bricolage, puisqu’il aura recours aux ordonnances. Si ce n’est pas en lien direct avec cet amendement, celui-ci me donne tout de même l’occasion de souligner une fois de plus, et l’article 1er bis B en est la démonstration, que ce projet de loi manque d’une vision d’ensemble du droit. Son enchaînement est plutôt limité et on va, par ordonnances, traficoter, bidouiller, bricoler – j’aurais aimé dire « consolider », mais on ne le fera pas – quatorze codes différents. Vous comprendrez donc mon dépit.

De plus, mesdames les ministres, vous le savez, le Conseil constitutionnel aura à examiner tous ces éléments.

Dans ces conditions, vous comprenez aussi pourquoi les gens sont encore si nombreux dans la rue. Et si, une fois encore, je condamne tout acte de violence contre les personnes et les biens, vous comprenez pourquoi notre détermination reste pleine et entière. Nous avons le sentiment que ce texte est juridiquement inachevé, mais surtout que la révolution anthropologique, le changement de civilisation qu’on nous propose n’est définitivement pas la vision que nous avons de la société. Nous voulons bien sûr une société ouverte, généreuse. Nous n’avons pas une vision passéiste de la famille qui renverrait au XIXsiècle et qui, du reste, était parfois largement idéalisée ; non, nous voulons une famille moderne, pleinement inscrite dans le XXIsiècle. Nous défendons l’idée que l’amour entre deux personnes peut être reconnu comme entraînant des effets juridiques, y compris lorsqu’elles sont du même sexe ; cette reconnaissance aurait pu prendre la forme d’une union civile. En revanche, nous disons non à tout ce qui concerne la filiation, l’adoption et les dévoiements liés à la PMA et aux mères porteuses.

Je ne relancerai pas ce débat ici puisqu’il a déjà eu lieu, mais je voulais profiter de l’occasion pour répéter avec force et solennité qu’il n’est pas trop tard pour améliorer les choses. Il n’est pas trop tard pour que le Président de la République prenne une initiative qui l’honorerait : le retrait de ce texte.

Je continuerai néanmoins à défendre les amendements qui ont été déposés. Et si la messe est dite ici, dans ce temple de la République, le Conseil constitutionnel a encore beaucoup de choses à dire.

M. Claude Goasguen. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3251.

M. Hervé Mariton. Nous devons démontrer, ce que nous faisons amendement après amendement, les problèmes de cohérence, de rédaction ou tout simplement de sens, posés par ce texte. Chers collègues de la majorité, franchement, vous faites un mauvais travail parlementaire et je regrette que vous ne vous efforciez pas de garantir une meilleure qualité de la loi.

D’autres dispositions de ce texte sont sans doute plus graves encore, et nous en reparlerons bientôt.

Madame la ministre de la famille, voilà quelques minutes, vous avez dit – cela a été repris, par exemple, par le site de la Chaîne parlementaire – qu’il ne suffit pas d’accoucher pour être mère.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Tout à fait !

M. Hervé Mariton. Et vous le confirmez. Vous opinez du chapeau.

M. Xavier Breton. Et elle est ministre de la famille !

M. Hervé Mariton. Mesurez-vous la gravité de votre propos, madame ? Au fond, puisque vous n’arrivez pas à défendre ne serait-ce que l’aspect technique de votre texte, au demeurant totalement bancal, vous développez dans l’hémicycle, alors qu’en réalité rien ne vous y obligerait, votre vision de la famille.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Ce n’est pas uniquement ma vision !

M. Hervé Mariton. Vous dites que nos positions sont difficilement conciliables ; en l’occurrence, c’est assez vrai. En effet, une mère a sûrement beaucoup d’engagement, d’énergie et d’amour à déployer. Mais l’accouchement fait une mère, je crois. D’autres ici le diraient sans doute mieux que moi mais, en tant que père de famille, je pense pouvoir affirmer que c’est l’accouchement qui fait la mère,…

Mme Chantal Berthelot. Ce n’est pas vrai !

M. Hervé Mariton. …même si cela ne la résume pas et ne la dispense pas de beaucoup d’énergie et d’efforts, de beaucoup d’amour aussi.

Ces propos montrent votre volonté de nier la nature, de définir l’enfant de manière purement culturelle, ce qui est évidemment cohérent avec votre idée d’une parenté exercée par des couples de même sexe, puisque vous voulez que l’enfant soit l’enfant de ceux qui ne sont pas ses parents.

L’adoption plénière est une richesse de notre droit, parce qu’elle traduit, comme Napoléon l’avait bien souligné, une volonté aussi proche que possible de l’enfantement. Avec l’adoption plénière, c’est comme s’il y avait accouchement. Or ce n’est pas ainsi que vous défendez l’homoparenté, puisque vous la défendez au nom du seul choix culturel,…

M. Bernard Roman. Mais non !

M. Hervé Mariton. …au nom d’une toute-puissance et de l’absence de limite au désir d’enfant. C’est donc en cohérence avec cette vision que vous affirmez que l’accouchement ne fait pas la mère.

Cette distance par rapport à la nature, par rapport à la vie est effrayante. Mesurez, madame, le poids de vos propos ; mesurez combien ils vous portent à nier la famille. Et si l’accouchement ne fait pas la mère, comment alors refuserez-vous la gestation pour autrui ?

M. Xavier Breton. Elle est pour !

M. Hervé Mariton. On me rappelle d’ailleurs que vous êtes pour, en effet. Mais si l’accouchement ne fait pas la mère, il y a alors tant de manières d’être mère que votre logique vous entraîne vers l’acceptation de la procréation médicalement assistée et de la gestation pour autrui.

Monsieur Roman, vous qui êtes aussi sensible, laissez-vous passer cette phrase ?

M. Bernard Roman. Oui !

Mme Chantal Berthelot. Absolument !

M. Hervé Mariton. Il est intéressant pour nous de le savoir. La phrase « l’accouchement ne fait pas la mère » a-t-elle le soutien de la majorité ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Vous dites oui : les Français le sauront.

M. Marc Le Fur. C’est que leur monde est un monde artificiel !

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n° 3888.

M. Arnaud Richard. Nos collègues ont presque tout dit sur cet amendement. J’ajouterai quelques éléments.

L’amendement vise à remplacer les mots : « l’un des époux » par les mots : « le futur mari ou la future femme, ou l’un de leurs parents ».

Ainsi que l’a rappelé Mme la ministre, cet article a été inséré dans le texte à l’initiative de nos collègues du groupe UMP et il est bien utile. Il répondait à la demande de l’Association des maires de France et de leur président, Jacques Pélissard, dont le souci était de faire coïncider les règles de droit avec le souhait souvent exprimé par les futurs époux de se marier dans la commune où l’un d’eux avait grandi. Cette disposition avait d’ailleurs été adoptée par nos assemblées sous la précédente législature, mais censurée par le Conseil constitutionnel. En parlant de Conseil constitutionnel, je tiens à saluer notre ex-collègue Corinne Narassiguin, qui est présente aujourd’hui dans les tribunes et qui avait fait un gros boulot en première lecture. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Comme vient de le dire notre collègue M. Mariton, nos positions sont difficilement conciliables. Nous devons surtout être capables de nous respecter les uns les autres. Nous ne sommes pas d’accord, mais nous pouvons nous montrer respectueux les uns envers les autres, ainsi que je viens de le faire à l’égard de notre ex-collègue.

Cet amendement est l’occasion d’introduire davantage de souplesse dans notre droit afin qu’un mariage puisse être célébré ailleurs qu’à la mairie du domicile de l’un des futurs époux.

Une telle précision nous paraît de bon aloi parce que, selon nous, l’altérité doit demeurer un élément fondamental du mariage. À ce titre, nous aurions également aimé que soit ajoutée dans l’amendement précédent la précision « futurs » devant le terme « époux », ce qui aurait permis de corriger une erreur présente dans le code civil, comme l’a démontré la garde des sceaux.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Selon la même logique que pour les amendements précédents, la commission a émis un avis défavorable.

Monsieur Ollier, concernant votre question sur l’article 74 du code civil, sachez que nous conservons le futur. Le nouvel article disposera en effet : « Le mariage sera célébré, au choix des époux, dans la commune où l’un d’eux, ou l’un de leurs parents, aura son domicile ou sa résidence […]. »

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Avis défavorable, madame la présidente.

(Les amendements identiques nos 8, 260, 3251 et 3888 ne sont pas adoptés.)

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement.

M. Christian Jacob. Je souhaite faire un rappel au règlement sur la base de notre article 58, relatif à l’organisation de nos débats.

Nos collaborateurs me font savoir qu’il reste moins de cinq heures de temps de parole pour le groupe UMP. Je voulais donc vous informer de la façon dont nous allons procéder dans la suite de nos débats, madame la présidente. Nous allons nous concentrer sur quelques articles qui nous paraissent particulièrement importants : l’article 4, puisqu’il fait référence à l’article 371-1 du code civil et supprime les mots « père » et « mère » ; l’article, dont le numéro m’échappe à l’instant, qui supprime du code civil les mots « mari » et « femme ».

Je ne reviendrai pas, s’agissant des mots « père » et « mère », sur ce qu’a évoqué mon collègue Hervé Mariton. S’agissant de l’article 4 bis qui, au cours de la navette parlementaire, a permis que les codes concernés par le projet de loi soient modifiés par ordonnance, il dépossède notre assemblée de son pouvoir législatif. Il sera donc intéressant de vous interroger sur les quatorze codes que vous envisagez de modifier par voie d’ordonnance, madame la garde des sceaux. Cela n’avait en effet pas été prévu dès la première lecture, ce qui est très exceptionnel. Il n’existe d’ailleurs pas à ma connaissance – s’il en existe, je ne les ai pas en mémoire – d’autres cas où l’on a utilisé la navette parlementaire pour introduire la possibilité de prendre des mesures d’ordre législatif par voie d’ordonnance.

J’espère enfin que nous aurons le temps d’arriver à la discussion de l’article 16 bis. Nous l’avons évoqué dans la discussion générale : tout le monde peut se satisfaire des droits que crée cet article et de la protection qu’il permet ainsi de garantir, mais il oblige le salarié à révéler son orientation sexuelle, ce qui est particulièrement choquant.

Je souhaitais que cela soit bien clair pour tout le monde. À l’exception des quelques amendements que certains des membres du groupe souhaiteraient pouvoir défendre sur d’autres articles, nous envisageons de nous concentrer essentiellement sur les articles que je viens de mentionner. Cela aurait d’ailleurs largement justifié le temps exceptionnel qui, au mépris de notre règlement, m’a pourtant été refusé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) J’espère qu’il sera fait droit à cette demande. Pour l’heure, nous en sommes réduits à limiter nos interventions pour pouvoir nous concentrer sur l’essentiel.

Mme la présidente. Monsieur le président Jacob, votre intervention n’était pas exactement un rappel au règlement mais elle sera considérée comme telle. Elle ne sera donc décomptée ni du temps de parole du groupe UMP, qui, pour être extrêmement précise et répondre à vos préoccupations, s’élève en cet instant à quatre heures et quarante-deux minutes – cela vous laissera donc la possibilité de vous exprimer sur les articles que vous venez de mentionner – ni de votre temps personnel, un temps supplémentaire, qui est de quarante-deux minutes.

Article 1er bis B (suite)

(L’article 1er bis B est adopté.)

Article 1er bis CA

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 9, 261, 1153 et 3851 tendant à la suppression de l’article 1er bis CA.

L’amendement n° 9 est défendu.

La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 261.

M. Philippe Gosselin. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1153.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n° 3851.

M. Arnaud Richard. Cet article, que nous proposons de supprimer, a été introduit par la commission des lois du Sénat. Le débat sur cette disposition a eu lieu lors de la discussion d’une proposition de loi relative à la simplification du fonctionnement des collectivités territoriales.

L’article 220 du code civil, dont l’officier de l’état civil doit aujourd’hui donner lecture lors de la célébration du mariage, est relatif à un sujet très important dans notre société de consommation : la solidarité des époux concernant les dettes contractées pour l’entretien du ménage. Il dispose que toute dette contractée par l’un des époux oblige l’autre solidairement et que la solidarité n’a pas lieu pour des dépenses excessives.

Il est assez surprenant que le Gouvernement, au travers de ce texte, supprime la lecture de cet article issu de la loi du 1er juillet 2010 portant réforme du crédit à la consommation. Cette précision visait à responsabiliser les futurs époux à une époque où le taux de surendettement des ménages et des futurs ménages est très important. L’argument qui consiste à dire que la lecture de cet article « ne contribue pas à la joie et à la bonne humeur qui doivent présider à la cérémonie du mariage », comme on a pu l’entendre en commission, nous semble extrêmement faible et falot par rapport à la situation d’un certain nombre de ménages.

En outre, lors de la discussion de la proposition de loi relative à la simplification du fonctionnement des collectivités territoriales, le Gouvernement lui-même avait supprimé cette disposition, prétextant qu’il fallait d’abord vérifier qu’il était inutile de procéder à la lecture de cet article 220 du code civil. Un amendement sénatorial réintroduit cette disposition. Il faut donc considérer que le Gouvernement n’a pas procédé à cette vérification préalable, ce qui nous paraît tout à fait dommageable.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Nous avions déjà évoqué le sujet en première lecture, à l’occasion d’une discussion que nous avions eue avec M. Accoyer, me semble-t-il, sur le caractère solennel du mariage. J’avais alors donné lecture de l’article 220 du code civil pour souligner son caractère à la fois fastidieux et inadapté au caractère festif de la célébration du mariage.

Suivant la demande des maires, des époux eux-mêmes et de l’association des maires de France, l’article 1er bis CA, introduit par les sénateurs, vise à supprimer cet article de la liste des articles lus par l’officier d’état civil. C’est une bonne chose car les inconvénients qui découlent de sa lecture l’emportent probablement sur les avantages. L’efficacité que pourrait avoir la lecture de cet article sur le couple, à ce moment-là, reste à prouver. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur les amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Même avis. Je me souviens parfaitement du débat que nous avons eu en première lecture, et je reste sur la même position.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Sur le fond, les avis du rapporteur et du Gouvernement s’entendent. Il est vrai qu’en tant que maires, nous nous sentons extrêmement mal à l’aise lorsque nous lisons l’article 220 du code civil.

Cela étant, monsieur le rapporteur, votre explication pose une difficulté, car vous dites que la lecture de cet article rompt avec le caractère festif du mariage. Le mariage n’est pas qu’une fête, il n’est pas qu’un droit, contrairement à votre vision de ce projet, qui serait la conquête d’un « droit au mariage ». Le mariage est un ensemble de droits, de devoirs et d’obligations !

La lecture de l’article 220 du code civil pose problème. D’autres moyens d’atteindre l’objectif qu’elle vise sont possibles. Dans ma ville – comme dans celle de Claude Greff –, nous proposons aux futurs conjoints une préparation au mariage civil,…

Mme Brigitte Bourguignon. Une retraite ?

M. Hervé Mariton. …qui est l’occasion d’expliquer aux futurs conjoints les engagements liés au mariage, et en particulier cette disposition de l’article 220.

Les mots ont leur importance, monsieur le rapporteur. La question n’est pas tant que la lecture de cet article nuise au caractère « festif » du mariage, mais qu’elle soit inadaptée à son caractère solennel. Nous devons lire des articles très bavards et très techniques, d’autres très solennels. Il me semble d’ailleurs qu’une partie du problème tient à l’ordre dans lequel nous lisons les articles du code civil. Il m’arrive de le modifier, afin de conclure sur une tonalité plus heureuse pour les conjoints, accentuant ainsi, non pas le caractère festif, mais la solennité de l’acte. Le mot « festif », monsieur le rapporteur, ne me semble pas adapté au sujet.

Ne plus avoir à lire cet article est plutôt une bonne chose, mais les futurs conjoints doivent en prendre conscience. Mais il y a une autre manière d’y parvenir que de leur donner lecture de cet article.

(Les amendements identiques nos 9, 261, 1153 et 3851 ne sont pas adoptés.)

(L’article 1er bis CA est adopté.)

Article 1er bis C

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 10.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Goasguen, pour soutenir l’amendement n° 92.

M. Claude Goasguen. Cet article, même s’il paraît mineur, est très intéressant car il s’inscrit dans la ligne « festive » dont nous parlions à l’instant.

Alors que la loi de 1907 prévoyait simplement qu’un officier d’état civil procédait au mariage, l’article 1er bis C précise qu’il s’agit d’une « cérémonie républicaine ». Cela signifie-t-il que le côté festif doive être renforcé ? Faut-il comprendre, a contrario, que c’est grâce à la nouvelle loi que le mariage sera désormais considéré comme festif ? Si je prolonge le raisonnement, cela voudrait dire que les mariages antérieurs ne l’étaient pas…

Il faudra m’expliquer en quoi le mariage n’était pas festif autrefois et pourquoi l’on se croit obligé, par cette loi remarquable, qui concerne tellement de gens, d’ajouter une « cérémonie républicaine » à une procédure qui, depuis 1907, ne semblait pas comporter tant de difficultés.

Mais le plus intéressant, c’est cette notion de « cérémonie républicaine ». Moi, je ne sais pas ce que c’est. Si vous pouviez me dire ce que vous entendez par là, j’en serais très heureux. Cela peut être la fanfare de Trifouilly-les-Oies,…

Un député du groupe SRC. N’attaquez pas la ruralité !

M. Claude Goasguen. …dont la présence ferait du mariage une cérémonie. Cela peut être aussi la cérémonie du culte de l’Être suprême – dont la première occurrence, chers collègues, fut parisienne. Et au fond, je me demande si ce n’est pas cela qui est en filigrane. Si c’est cela, votre idée, n’oubliez pas que le culte de l’Être suprême a précédé de quelques mois la fin de la dictature de Robespierre, lequel a fini guillotiné. Simple remarque.

Monsieur le rapporteur, je souhaiterais que vous nous expliquiez ce que vous entendez par « cérémonie républicaine ».

Mme la présidente. Sur le vote de l’amendement n° 10 et des amendements identiques, je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 1998.

M. Nicolas Dhuicq. Votre projet de loi, outre qu’il veut fabriquer un homme nouveau, est, me semble-t-il, d’inspiration profondément puritaine. C’est le nouveau puritanisme.

Vous déniez la différence des sexes. Vous niez éros, vous mélangez éros et agapè. Les Grecs avaient quatre mots pour l’amour, nous n’en avons qu’un seul. Et votre démarche est d’inspiration puritaine. Lorsque l’on dénie la différence des sexes, il n’y a plus ni homosexualité ni hétérosexualité, il y a un sexe indifférencié. Au bout du compte, puisque nous sommes dans un monde ouvert, vous ne limiterez pas l’évolution de la technique, vous aboutirez à une vision de la reproduction coupée de la sexualité. Vous arriverez, en fait, à la reproduction de soi par l’amour d’un même, en miroir. C’est Narcisse. La parthénogenèse, en fin de compte, est le culte de l’immortalité. Vous êtes en plein délire, en plein hubris ! Et le peuple de France le sait pertinemment. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.) Monsieur Roman, un peu de tenue !

Vous êtes en plein délire. Vous êtes en train de couper l’homme de sa nature profonde, vous êtes en train de faire cet homme nouveau, sans sexualité, sans corps, désincarné. Bravo ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Bernard Roman. Merci, docteur !

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement n° 3406.

Mme Annie Genevard. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Actuellement, l’article 165 du code civil prévoit que « le mariage sera célébré publiquement devant l’officier de l’état civil ». L’article 1er bis C, introduit par l’Assemblée nationale à l’initiative d’Alain Tourret, a modifié cette rédaction afin d’affirmer le caractère républicain du mariage célébré par l’officier de l’état civil. Il prévoyait que le mariage serait « prononcé lors d’une célébration publique et républicaine ». Le Sénat a apporté une modification purement rédactionnelle, qui a le mérite de maintenir dans le code civil la notion de célébration publique et de supprimer le terme inadapté de « prononcé ». La commission a adopté cet article sans modification. Avis défavorable sur l’ensemble des amendements de suppression.

Mme la présidente. Je présente toutes mes excuses au groupe UDI, qui a déposé un amendement identique que je n’ai pas appelé. La parole est donc à M. Arnaud Richard, pour soutenir l’amendement n° 3853.

M. Arnaud Richard. Parler après le rapporteur, madame la présidente, me permettra de souligner le caractère fantasque de cet article, qui ne fait qu’introduire dans le code civil une évidence.

Il n’est aucunement besoin de consacrer dans le code civil le caractère républicain d’une célébration. Le mariage civil revêt déjà le caractère de rite républicain, bien distinct du rite religieux. Il est célébré dans la maison commune, par l’officier d’état civil, et il est une institution laïque.

Je vous ferai d’ailleurs remarquer, mes chers collègues, que les rapporteurs, dans leur grande sagesse, ont souligné dans leurs rapports le fait que les services de la Chancellerie avaient fait savoir qu’ils n’avaient pas été alertés de situations où le caractère républicain de la célébration du mariage aurait été remis en cause.

Objectivement, cela prouve bien que vous êtes mal à l’aise avec ce texte et que ce n’est que du bavardage inutile. Nous espérons bien que le code civil a déjà un caractère républicain !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Avis défavorable. Le débat a eu lieu en première lecture lors de l’examen de l’amendement de M. Tourret.

La modification de l’article 165 du code civil ajoute encore au caractère solennel du mariage, que soulignait tout à l’heure M. Mariton à propos de la suppression de la lecture de l’article 220 du code civil, laquelle correspondait, je le précise au passage, à une demande de l’Association des maires de France – elle avait d’ailleurs été adoptée, puis censurée par le Conseil constitutionnel comme cavalier législatif, si ma mémoire est bonne.

Le présent article ajoute au caractère solennel du mariage, auquel vous êtes très attachés.

M. Hervé Mariton. On pourrait peut-être parler de « cérémonie républicaine et socialiste » ? Qu’en pensez-vous ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Pourquoi pas ? (Sourires.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je ne suis pas tout à fait convaincu par les explications que viennent de donner la garde des sceaux et le rapporteur, alors que j’étais tout à fait en phase avec les propos de M. Goasguen.

Aucun motif visible ou compréhensible ne justifie qu’il faille préciser qu’une cérémonie se tenant dans un lieu de la République, devant un représentant de l’État portant sur lui les symboles de sa charge d’officier d’état civil, dans des conditions matérielles assurant sa publicité – à peine de nullité –, et ayant la solennité habituelle pour une telle manifestation, est « républicaine ». Ce terme n’ajoute d’ailleurs aucun caractère solennel particulier. Il ne fait ni référence à un protocole existant ni à des cérémoniaux spéciaux.

Pour quelles raisons, une fois encore, prend-on le soin d’ajouter un adjectif qui, de notre point de vue, ne sert absolument à rien, sinon à faire référence à des symboles ou à une philosophie qui se cache relativement mal derrière cet adjectif ?

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Quelques mots sur cet amendement qui doit sans doute sa précision à l’équerre et au compas. Voilà une nouvelle pierre apportée à un édifice qui préoccupe beaucoup les maires que nous sommes. J’ai le sentiment, madame la garde des sceaux, que l’on ne cesse de porter atteinte à la fonction de maire. Dire que l’on doit préciser que la cérémonie de mariage est de nature républicaine revient à dire qu’elle ne l’était pas auparavant.

M. Hervé Mariton. C’est l’invention de la République !

Mme Annie Genevard. Il faudra m’expliquer en quoi cette cérémonie n’était pas républicaine jusqu’à la rédaction de cet amendement.

Quand on corrèle cet amendement avec le fait que vous souhaitiez soumettre les maires à la tutelle du procureur, que vous rabotiez les dotations aux collectivités de 4,5 milliards d’euros dans les années qui viennent et que s’accumulent ainsi tout un tas d’offenses faites à la fonction de maire, nous sommes véritablement inquiets, nous les maires, et je souhaite qu’il y ait longtemps encore dans cet hémicycle des députés-maires pour pouvoir le dire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Arnaud Richard.

M. Arnaud Richard. Soit on écrit la loi, soit on bavarde. Si vous vouliez préciser les choses objectivement, il faudrait écrire « cérémonie républicaine, civile et laïque ». Voilà au moins qui serait clair, mais vous n’allez pas au bout de votre démarche.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur.

M. Marc Laffineur. La philosophie de votre texte est la même depuis le début ! C’est le même mépris. C’est la même coupure avec le peuple de France et les élus. Comme si les maires de France n’exerçaient pas leurs fonctions depuis des siècles, en faisant des mariages qu’ils célèbrent une cérémonie républicaine ! Mais, selon vous, ils ne savaient pas ce qu’ils faisaient, et il faut leur expliquer !

Cette coupure s’ajoute à toutes les violences que vous avez déjà commises en refusant d’admettre qu’il y avait du monde dans les rue, en verbalisant des jeunes qui se promenaient en tee-shirt ou en les mettant en cellule simplement parce qu’ils chantaient La Marseillaise. Voilà comment vous mettez des centaines de milliers de personnes dans les rues !

M. Philippe Meunier. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Au fond, cette disposition ne traduit-elle pas simplement votre prétention à inventer un nouveau mariage ? (Approbations sur les bancs du groupe UMP.) Le mariage existe, il est compris de tous, mais il ne vous convient pas et, non seulement vous voulez le modifier selon les termes de votre projet de loi, mais vous voulez aussi l’inventer différemment. C’est ce que vous appelleriez alors un « mariage républicain » ? C’est assez prétentieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin.

M. Jean-Christophe Fromantin. Cette proposition est un aveu du fait que, pour vous, le mariage a perdu son sens. Je rappelle en effet que le mariage est une institution, parce qu’il correspond à une présomption de paternité – nous avons largement évoqué le sujet en première lecture, lors de nos débats sur l’article 1er.

Or on a le sentiment qu’avec cet article, qui ne veut rien dire puisqu’il n’ajoute rien à ce qui existe déjà, vous tentez de compenser artificiellement le renoncement à cette valeur sur laquelle se fondait le mariage : la présomption de paternité.

Mme la présidente. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements de suppression identiques nos 10, 92, 1998, 3406 et 3853.

(Il est procédé au scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 157

Nombre de suffrages exprimés 157

Majorité absolue 79

(Les amendements nos°10, 92, 1998, 3406 et 3853 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 1156, 1690, 3091 rectifié, et 3841 rectifié.

La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1156.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 1690.

M. Philippe Gosselin. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3091 rectifié.

M. Xavier Breton. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Myard pour soutenir l’amendement n° 3841 rectifié.

M. Jacques Myard. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Il s’agit, avec ces amendements, d’ajouter le terme « public » dans l’article 165 du code civil, ce qui entraînerait la rédaction suivante : « Le mariage sera célébré publiquement lors d’une cérémonie publique. » Il y évidemment là une redondance inutile. Avis défavorable de la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Avis également défavorable, pour les mêmes raisons esthétiques et sémantiques.

(Les amendements identiques nos 1156, 1690, 3091 rectifié et 3841 rectifié ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 11.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Même avis.

(L’amendement n° 11 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 3.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Même avis.

(L’amendement n° 3 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous en venons à une série d’amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

Plusieurs députés du groupe UMP. Mais nous n’avons ni les liasses d’amendements ni la feuille jaune !

Mme la présidente. Il s’agit de la liasse comprenant, entre autres, l’amendement n° 2545, qui n’est pas défendu…

Plusieurs députés du groupe UMP. Nous ne les avons pas !

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement.

M. Christian Jacob. Madame la présidente, nous n’avons pas les liasses. Pourriez-vous décider d’autorité de faire une suspension de séance, le temps que l’on nous distribue les liasses ?

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue pour deux minutes.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-trois, est reprise à dix-sept heures cinquante-cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Plusieurs députés du groupe UMP. Mais nous n’avons toujours pas les liasses !

Mme la présidente. Je suis désolée, mais vous les avez ! Quant à la feuille jaune, nous en sommes à la page 7. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Rappel au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laffineur, pour un rappel au règlement.

M. Marc Laffineur. Madame la présidente, nous avons bien compris que vous voulez aller le plus vite possible et que la majorité veut empêcher toute discussion. Elle ne prend d’ailleurs jamais la parole, et ce afin d’accélérer nos débats. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Mais quand même, il y a un minimum ! Il serait quand même normal que nous puissions avoir les liasses avant de présenter nos amendements.

Ça ne peut pas continuer comme ça, madame la présidente, je vous le dis avec beaucoup de gentillesse mais avec beaucoup de fermeté. On ne peut débattre ainsi d’un sujet aussi important. Vous avez peur de la rue, vous avez peur des manifestations, vous avez peur du peuple de France (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), et vous essayez en permanence d’empêcher le débat : c’est intolérable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Monsieur Laffineur, votre intervention n’était pas un rappel au règlement.

Chers collègues, j’ai suspendu la séance deux minutes pour que la liasse d’amendements et la feuille jaune vous soient distribuées, ce qui a manifestement été fait. Je vous invite donc à prendre connaissance, si ce n’est déjà fait, de l’amendement n° 4, que M. Le Fur va défendre.

M. Patrick Ollier. Sur quelle page se trouve-t-il ?

M. Marc Le Fur. Madame la présidente, plus personne ne sait où on en est. On ne peut pas travailler dans ces conditions, et vous pourriez prendre l’initiative de nous accorder quelques minutes pour régler tout ça. Merci d’avance. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Ce qui me surprend, mes chers collègues, c’est que nous avons examiné tout à l’heure les amendements nos 10 et suivants, qui se trouvent exactement dans la même liasse que l’amendement n° 4.

Article 1er bis C (suite)

Mme la présidente. J’appelle donc l’amendement n° 4. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour le défendre.

M. Nicolas Dhuicq. Nous abordons ici l’un des nœuds du problème que vous posez à la société française. En effet, nous avons passé une nuit, en première lecture, à débattre de la clause de conscience des élus de la République.

On l’a dit, vous avez mis ces élus sous tutelle renforcée ; vous ne leur faites aucune confiance, surtout lorsqu’ils sont élus de communes rurales ; vous leur imposez une loi bavarde. Comme si les élus de la République n’étaient pas suffisamment républicains et ne faisaient pas suffisamment acte d’allégeance à l’actuel gouvernement, lequel persévère dans sa volonté de détruire la VRépublique, qui a pourtant survécu a de nombreuses alternances et assuré la pérennité de la nation et de la République !

Nous demandons donc instamment au Gouvernement d’ouvrir les oreilles et d’entendre la clause de conscience des élus de la République.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. J’avoue ne pas avoir fait de lien entre ce que vient de dire M. Dhuicq et l’amendement lui-même. À vrai dire, je ne suis pas sûr qu’il y ait de lien.

M. Philippe Gosselin. Le lien est évident !

M. Erwann Binet, rapporteur. On ne peut évidemment pas permettre à un officier de l’état civil de refuser de célébrer un mariage. Nous en avons suffisamment exposé les raisons en première lecture ; nous le confirmons en deuxième lecture, de manière générale et dans le cas particulier du mariage qui va s’ouvrir aux couples de même sexe. Avis défavorable de la commission.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. Nicolas Dhuicq. Nos débats sont particulièrement intéressants : les jeunes qui nous écoutent, qui sont de futurs citoyens, entendent combien l’actuel Gouvernement ne fait aucune confiance aux élus de la République et de la nation.

(L’amendement n° 4 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n°2.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 1994.

M. Nicolas Dhuicq. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Il s’agit d’un amendement à peu près identique au précédent. Par conséquent, avis défavorable, pour les mêmes raisons.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Même avis, pour les mêmes raisons.

(Les amendements identiques nos 2 et 1994 ne sont pas adoptés.)

(L’article 1er bis C est adopté.)

Article 1er bis D

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques tendant à la suppression de l’article 1er bis D.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 12.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement n° 2288.

M. Patrick Hetzel. Je voudrais revenir sur un point essentiel. Ce que nous constatons cet après-midi montre, de toute évidence, que le travail législatif est bâclé. Lorsque, à plusieurs reprises, l’opposition a voulu attirer votre attention sur ce qui n’allait pas dans votre texte, elle s’est entendue répondre que le texte devait rester conforme.

Quel simulacre ! Nous ne rendons pas service au Parlement en fonctionnant ainsi. L’image que nous renvoyons à nos concitoyens du travail parlementaire n’est pas bonne du tout. Le rapporteur et le président de la commission des lois, qui est parmi nous, devraient y réfléchir avec la majorité pour que le travail législatif puisse se faire de manière cohérente. Tout cela est bâclé.

Par ailleurs, nos concitoyens sont bien conscients d’une rupture. Vous clivez là où vous auriez dû au contraire rassembler. Tout cela n’est vraiment pas de très bonne politique. Nous aurions besoin de concorde en la matière. Nous avions demandé à ce qu’un référendum soit organisé. Vous l’avez refusé. Nous avons demandé que ce texte donne lieu à un véritable débat. Vous le refusez en muselant l’opposition et en voulant nous contraindre à un temps réduit.

Tous ces éléments prouvent bien que vous êtes gênés et que vous essayez de fuir vos responsabilités vis-à-vis de nos concitoyens.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 2000.

M. Nicolas Dhuicq. Vous créez une inégalité entre les couples résidant dans des pays qui n’autoriseraient pas le mariage entre des personnes de même sexe et ceux résidant des pays qui l’autoriseraient, quant au choix du lieu de la célébration désormais républicaine puisqu’elle ne l’était pas auparavant. Dont acte. Nous étions dans l’ignorance, mais la lumière est venue.

M. Claude Goasguen. C’est le cas de le dire.

M. Nicolas Dhuicq. J’attire l’attention de la représentation nationale sur les effets pervers de ces dispositions. Vous allez créer, madame la garde des sceaux, un appel d’air, avec des mariages de complaisance entre personnes de même sexe, qui amèneront inéluctablement, à terme, des reconnaissances de nationalité incontrôlées et des abus.

Dans le même ordre d’idée, vous créerez ainsi un appel d’air pour des mariages entre personnes de même sexe elles-mêmes incarcérées, qui pourront ainsi profiter de ces dispositions. C’est déjà le cas entre personnes de sexes différents. Certaines visiteuses de prison se sont retrouvées épousées par des détenus, lesquels ont profité de ce mariage, non seulement pour sortir mais aussi pour laisser tomber, une fois sortis de prison, leur nouvelle épouse. J’attire clairement l’attention de la représentation nationale sur l’appel d’air à des mariages de complaisance dans les deux cas que vous allez créer.

M. Marc Le Fur. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Nous avons longuement débattu de ce sujet en première lecture. Un amendement de notre collègue Corinne Narassiguin, que je salue, sous-amendé par Mme Claudine Schmid, tendait à permettre, comme l’a rappelé M. Dhuicq, le mariage en France par dérogation aux règles habituelles de compétence territoriale des officiers d’état civil. Le Sénat a allégé la rédaction du dispositif que nous avions prévu en première lecture. Il a tout d’abord supprimé la référence à la commune de résidence des grands-parents, qui était superflue dans la mesure où nous avions, grâce au sous-amendement de Mme Schmid, permis à ces Français expatriés de se marier dans la commune de leur choix s’ils n’avaient pas de commune de naissance dans notre pays ou s’ils n’avaient pas de commune de dernière résidence. Rappelons, monsieur Dhuicq, qu’ils sont français et qu’aucun problème de nationalité ne se pose en l’espèce. En tout cas, je ne comprends pas vraiment le problème que vous soulevez.

Par ailleurs, le Sénat a déplacé le dispositif au sein du code civil, ce qui est une très bonne initiative.

Avis défavorable de la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n° 3855.

M. Jean-Christophe Fromantin. Attention, madame la présidente, cela fait la deuxième fois que l’UDI est oubliée dans les amendements de suppression. La précipitation peut aussi nuire à la qualité de nos débats.

M. Philippe Gosselin. L’accélération nuit gravement à la qualité des débats.

M. Jean-Christophe Fromantin. L’objectif de cet article n’est pas, en soi, contestable, puisqu’il vise à permettre le mariage, en France, de couples de personnes de même sexe dont l’une au moins est française et qui résident dans un pays où leur union est interdite ou bien dans un pays où les autorités diplomatiques et consulaires françaises ne sont pas autorisées à célébrer le mariage.

Pour autant, il s’agit d’introduire une dérogation aux règles habituelles de compétence territoriale des officiers de l’état civil. Cette dérogation crée, de fait, une rupture d’égalité entre couples homosexuels et couples hétérosexuels. Alors que le mariage ne peut aujourd’hui être célébré que devant l’officier de l’état civil de la commune où l’un des époux aura son domicile ou sa résidence à la date de la publication prévue, les couples homosexuels pourront se marier dans la commune de leur choix.

De surcroît, la disposition écarte, sous condition de résidence en France ou de nationalité française de l’autre époux, la loi de l’époux étranger en tant qu’elle fait obstacle au mariage entre personnes de même sexe. Cette exception déroge à la règle traditionnelle du droit international privé français en matière de mariage et sera donc privée d’effet lorsqu’une convention bilatérale comporte des dispositions contraires.

L’ouverture du mariage entre personnes de même sexe aux étrangers risque de favoriser des mariages qui produiront des effets en France mais s’avéreront nuls selon la loi étrangère des époux. Dans des hypothèses exceptionnelles mais qui doivent être prises en considération, ces mariages peuvent même exposer certains des étrangers concernés à des sanctions pénales dans leur pays d’origine.

C’est la raison pour laquelle nous sommes favorables à la suppression de cet article.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements de suppression ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Avis défavorable. En première lecture, la discussion avait été riche – elle s’est encore enrichie au Sénat – grâce à un sous-amendement de l’opposition. Il s’agit de permettre à des couples de personnes de même sexe de se marier alors qu’elles résident dans des pays qui ne reconnaissent pas ce mariage. Vous comptiez parmi vous, mesdames et messieurs les membres du groupe UMP, en première lecture, une députée qui avait été sensible à cette question et qui avait défendu cette disposition à travers un sous-amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado.

M. Sergio Coronado. Je sais que nos débats durent depuis très longtemps mais je suis surpris que, d’une lecture à l’autre, l’opposition change de point de vue et d’argumentation sur un amendement de Mme Narassiguin qu’elle a enrichi par un sous-amendement de Mme Schmid,…

M. Jacques Myard. Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis !

M. Sergio Coronado. …pour tenir compte de la situation de Français établis dans des pays qui ne reconnaissent pas le mariage entre des personnes de même sexe ou lorsqu’il est interdit à un officier consulaire de célébrer des mariages, comme c’est le cas aux États-Unis. Et c’est dans un élan assez consensuel que nous avons pu adopter ce dispositif.

Chère collègue Schmid, le président de votre groupe, Christian Jacob, avait permis que l’opposition soutienne cet amendement. Je m’étonne que d’une lecture à l’autre, les arguments qui avaient permis à l’opposition de se joindre à nous pour adopter ce dispositif que le Sénat n’a pas modifié mais simplement clarifié et déplacé dans le code civil, s’évanouissent pour revenir à un débat totalement caricatural, qui ne tient pas compte de la situation des Français établis hors de France.

Je vous appelle donc à soutenir cet article. Je dirai même plus : parce qu’il s’agit d’une revendication très ancienne de l’Assemblée des Français de l’étranger, je souhaite que ce dispositif puisse s’élargir à l’ensemble des Français établis hors de France car ils rencontrent parfois des difficultés, parfois en raison de problèmes interreligieux ou de sécurité, pour se marier dans les pays où ils résident. Ils n’ont pas toujours une résidence secondaire en France ou des parents proches qui y habitent. Ils sont français comme vous et moi mais ils sont établis depuis fort longtemps, depuis plusieurs générations, dans les pays qui les accueillent. Ils ont d’ailleurs assez souvent la double nationalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen. Nous sommes tous d’accord sur ce qui vient d’être dit, mais ce n’est pas le point essentiel. Le problème est que l’article n’est pas protecteur. Votre mesure relève de la procédure civile, mais le civil n’emporte pas le pénal.

Mme Marie-Christine Dalloz. Eh non !

M. Claude Goasguen. Quand des États sanctionnent pénalement le mariage homosexuel, et il y en a beaucoup, il faudrait accorder immédiatement la nationalité à la personne homosexuelle pour qu’elle échappe à la loi pénale de son propre pays. Ce n’est pas ce qui est prévu. Il faudrait compléter le texte sur le plan pénal.

Cela étant, je suis d’accord pour élargir cette disposition à tous les pays où résident les Français de l’étranger. Mais vous faites courir un risque, si vous ne les prévenez pas, aux personnes qui se marient. Le mariage ne leur permettant d’acquérir la nationalité française que quelques années plus tard, elles pourraient être pénalement sanctionnées si, d’aventure, elles retournaient dans leur pays. Car, en droit international, le civil n’emporte pas le pénal.

(Les amendements identiques nos 12, 2288, 2000 et 3855 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n° 2689.

M. Sergio Coronado. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous avons entendu vos arguments, monsieur Coronado, et nous en avons pris acte. Ils sont fondés mais par rapport au champ du texte, nous vous proposons de retirer cet amendement.

M. Sergio Coronado. Je le retire.

(L’amendement n° 2689 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1163.

M. Jean-Frédéric Poisson. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 1691.

M. Philippe Gosselin. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 2390.

M. Philippe Meunier. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3092.

M. Xavier Breton. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Myard, pour soutenir l’amendement n° 3558.

M. Jacques Myard. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 1163, 1691, 2390, 3092 et 3558, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

(L’article 1er bis D est adopté.)

Article 1er bis

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques tendant à la suppression de l’article 1er bis.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 14.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n° 3859.

M. Jean-Christophe Fromantin. L’article 1er bis touche à un élément essentiel qu’est l’adoption plénière. C’est un point extrêmement important et il mérite qu’on s’y attarde un peu.

S’agissant de l’adoption et de son interprétation, il y a un principe essentiel. L’adoption est-elle faite pour donner une famille à un enfant ou pour donner un enfant à une famille ? Cette question mérite d’être rappelée. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article 1er bis, qui change complètement l’interprétation de ce qu’un enfant peut attendre de l’adoption et de l’équilibre dont il a besoin dans une famille.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

Le Sénat n’a apporté à cet article, qui avait été introduit par l’Assemblée, qu’une modification rédactionnelle. Je rappelle que l’article 1er bis a pour objet d’autoriser expressément l’époux à adopter en la forme plénière l’enfant que son conjoint a antérieurement adopté de manière plénière.

Cette disposition ne figurait pas expressément dans le code civil. Nous avions préféré, en première lecture, l’y faire figurer. Nous confirmons ce souhait.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Défavorable, pour les mêmes raisons.

(Les amendements identiques nos 14 et 3859 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une autre série d’amendements identiques.

La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 15.

M. Nicolas Dhuicq. Nous avons déjà eu ce débat. Je rappelle que nos collègues britanniques, concernant seulement l’Angleterre et le Pays de Galles – pas l’Écosse ni l’Irlande du Nord – ont conservé dans leur texte les termes de « mari » et de « femme », que vous voulez supprimer.

Cet amendement vise à rétablir la langue française dans sa plénitude. Les mots ont un sens et la novlangue que vous essayez d’imposer est un charabia qui opprimera les plus faibles. En effet, ceux-ci n’ont plus, aujourd’hui, que 300 mots de vocabulaire à leur disposition parce que vous ne vous occupez plus de l’instruction civique, mais seulement des rythmes scolaires. Vous ne vous occupez plus de l’instruction nationale, mais simplement de transformer la langue française et de lancer un texte qui est une bombe juridique qui vous explosera très rapidement à la figure. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 267.

M. Philippe Gosselin. Le nombre d’agréments est très important en France. Malheureusement, le nombre d’enfants adoptables et adoptés est en forte diminution. On sait qu’un certain nombre d’États étrangers, en cas de mariage entre personnes de même sexe, ne veulent plus permettre l’adoption de leurs enfants par ces couples étrangers. Il est important de réserver l’adoption aux couples constitués d’un mari et d’une femme. Tel est l’esprit de cet amendement.

Il vise aussi à rappeler que l’adoption, ce n’est pas donner un enfant à des parents, mais des parents à un enfant. Cela a été dit, mais j’estime qu’il faut vraiment graver cet élément dans le marbre.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 738.

M. Philippe Meunier. C’est très important. Tout enfant a le droit d’avoir un père et une mère. Je ne vois pas qui, ici ou ailleurs, peut empêcher un enfant orphelin d’avoir un père et une mère. Même après l’adoption de cette loi, vous allez nous trouver sur votre chemin, car, comme cela a été dit ce matin par Philippe Cochet, nous sommes là pour défendre les plus faibles.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Ces séries d’amendements ont pour objectif de limiter l’adoption aux couples hétérosexuels. Manifestement, ce n’est ni l’objet ni du projet de loi ni la volonté politique portée par la majorité. C’est évidemment sans surprise que la commission a rejeté l’ensemble de ces amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Même avis que celui de la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Patrick Ollier. Si nous avons voulu rétablir les termes de « mari » et de « femme », c’est pour plusieurs raisons.

Je peux comprendre, compte tenu de votre obsession égalitaire, que vous n’acceptiez plus de faire de différence entre les sexes. Mais en l’occurrence, il s’agit de l’adoption et nous considérons qu’il faut un papa et une maman. C’est, pour nous, une évidence sur laquelle nous ne voulons pas revenir. Mais vous pourriez au moins tenir compte de plusieurs autres éléments.

Pour ce qui est du nombre d’enfants adoptables, c’est une réalité à laquelle vous allez être très rapidement confrontés. Vous ne faites pas non plus attention aux conséquences pour les pays où il y a actuellement des enfants adoptables et où l’homosexualité fait l’objet de condamnations pénales. Monsieur le rapporteur, ces pays ont déjà prévenu qu’ils allaient fermer la porte à la France pour l’adoption.

M. Patrick Hetzel. Bien sûr ! C’est évident !

M. Patrick Ollier. Je parle des pays extérieurs à l’Europe, madame la garde des sceaux. Vous allez créer un vrai problème pour des parents hétérosexuels qui veulent adopter des enfants dans ces pays, car votre texte va leur fermer la porte de l’adoption.

C’est un problème douloureux pour ces parents. Je voulais le signaler pour que vous en teniez compte, car jusqu’à présent, on ne vous entend parler que de la peine – et on peut la comprendre –, du problème sentimental des personnes de même sexe. Mais nous avons aussi le droit, nous, de nous préoccuper de la peine, de la souffrance, de la douleur des parents, papas et mamans hétérosexuels qui souhaitent adopter et qui, à cause de ce texte, ne pourront pas le faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Cécile Untermaier. En quoi y a-t-il compétition ?

Mme la présidente. La parole est à M. Claude Goasguen.

M. Claude Goasguen. En première lecture, nous avions souligné le fait que l’adoption allait en diminuant dans presque tous les pays. Par conséquent, la disposition que vous voulez ajouter va encore réduire le nombre d’enfants à adopter. Par conséquent, certaines familles vont en être réduites à trouver des moyens de substitution concernant leur désir légitime d’adopter un enfant. C’est très simple : comme je vous l’ai dit en première lecture, votre texte conduit implicitement à la GPA.

Il y aura de moins en moins d’enfants à adopter. Ils seront vraisemblablement sélectionnés et les couples homosexuels seront probablement défavorisés. Alors, les couples passeront la frontière pour aller en Belgique où la GPA est pratiquée. Et comme vous avez autorisé, dans une décision récente, l’obtention de certificats de nationalité pour les enfants nés d’une GPA à l’étranger, vous savez très bien que nous sommes sur le chemin qui conduira à reconnaître la GPA. En effet, que sera la deuxième étape ? On se demandera pourquoi il faut franchir la frontière pour avoir le droit de recourir à la GPA. Alors, il y aura des Américains, des Néerlandais qui viendront faire de la pub en France et l’on dira qu’il vaut mieux pratiquer la GPA en France, car il y a plus de protection.

Enfin, on se demandera pourquoi la GPA coûte si cher et pourquoi elle serait réservée à ceux qui ont les moyens de se l’offrir. La troisième étape sera donc le remboursement de la GPA. Il n’est pas nécessaire d’être grand clerc ou Cassandre pour le deviner ! Il est évident que cette disposition conduit à cette évolution, que nous refusons et que, malheureusement, vous ne refusez pas explicitement. Quels que soient les dénis que vous avez exprimés, vous savez très bien que, dans cette disposition législative, il y a une évolution, qui correspond à l’évolution du monde, et vous y allez !

Pour ma part, j’attends de vous que vous n’ouvriez pas la boîte de Pandore.

M. Xavier Breton. Démonstration imparable !

(Les amendements identiques nos 15, 267 et 738 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 22.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 2010.

M. Nicolas Dhuicq. Seuls un quart des enfants adoptés en France sont de nationalité française. La Fédération de Russie, quoi que vous en pensiez, a clairement dit, avant l’examen du texte, qu’elle fermerait la porte à l’adoption. Car qui dit mariage dit divorce et certains pays refuseront l’adoption à des parents hétérosexuels qui vivent en couple, parce que, le divorce existant, rien ne garantira que ces couples ne divorceront pas et que monsieur parte avec un autre homme – ce qui est son droit – ou que madame parte avec une autre femme. Vous allez donc fermer inéluctablement le robinet de l’adoption. Dites franchement que vous voulez la PMA et la gestation pour autrui ! Dites-le franchement aux Françaises et au Français, afin qu’ils puissent choisir ! Et que ce gouvernement du maquillage tombe le masque ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3072.

M. Xavier Breton. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

Je précise qu’il s’agit, dans cet article, du cas de l’adoption intrafamiliale. Par conséquent, les remarques que vous avez pu faire, les uns et les autres, sur l’adoption plénière dans son ensemble ne sont pas directement liées au présent article.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Défavorable.

Je précise que la raréfaction de l’adoption internationale ne se résume pas à la simple question que vous posez. Elle est beaucoup plus complexe et n’a rien à voir avec la question de l’homosexualité. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Ollier. Cela va aggraver le problème !

M. Claude Goasguen. Essayez dans les pays musulmans, vous allez voir !

(Les amendements identiques nos 22, 2010 et 3072 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 16.

M. Marc Le Fur. Pour répondre aux propos de Mme la ministre, j’ai dans ma circonscription un couple qui aspire à adopter un enfant originaire du Vietnam. Il sait qu’aujourd’hui cette adoption est menacée par les évolutions juridiques susceptibles d’intervenir en France.

M. Bernard Roman. Ce n’est pas vrai !

M. Marc Le Fur. En tout cas, eux le savent ! Arrêtez de dissimuler les choses !

J’en viens à l’amendement n° 16.

Notre souci est la protection de l’enfant susceptible d’être adopté. C’est une situation difficile, délicate. Nous considérons que l’enfant doit être protégé. Pour ce faire, l’une des solutions, lorsqu’il a dépassé l’âge de treize ans – je parle sous le contrôle d’éminents spécialistes – est qu’il puisse au moins s’exprimer, dire son souhait, être entendu. Ce serait l’un des éléments, peut-être pas le seul, mais l’un des éléments de la décision.

Que les choses soient bien claires : beaucoup de couples souhaitent adopter, mais peu d’enfants, au moins en France, sont susceptibles d’être adoptés. Cela exige donc que les services compétents fassent le choix le plus adapté. Encore faut-il tenir compte de l’enfant.

Il y aura d’autres amendements pour protéger l’enfant, mais celui-ci me semble devoir recueillir l’assentiment de tous.

À partir du moment où l’enfant a atteint l’âge de raison, dès lors qu’il a plus de treize ans et qu’il est donc capable de donner son sentiment, il doit au moins pouvoir être entendu avant qu’une décision d’adoption qui peut être redoutable pour lui ne soit prise.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3071.

M. Xavier Breton. Il est défendu.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement n° 3471.

Mme Marie-Christine Dalloz. J’insiste sur ce que vient de dire Marc Le Fur : quand ses parents divorcent, un enfant de plus de treize ans peut être entendu par la justice et donner son avis sur son choix de vie. Je ne comprendrai pas que, dans le cadre d’une adoption plénière, le traitement puisse être différent. Il est donc fondamental qu’un enfant ayant atteint l’âge de treize ans puisse avoir un entretien avec un psychologue sur son avenir, et qu’il puisse s’exprimer.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. C’est une très bonne idée. Sauf que cela existe déjà dans le code civil : l’enfant de treize ans doit déjà donner son accord. Ces amendements identiques sont donc redondants. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 16, 3071 et 3471 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 17.

M. Marc Le Fur. À un moment donné, il faut hiérarchiser ses souhaits. Il y a deux objectifs : l’intérêt de l’enfant et le désir des adoptants. Celui-ci n’est pas illégitime en soi, on comprend parfaitement la demande des parents, surtout s’ils sont privés d’enfants. Il n’en demeure pas moins, j’y insiste, qu’il faut établir une hiérarchie. Nous, nous disons clairement que la priorité, c’est l’intérêt de l’enfant. Et nous l’explicitons. Je ne vois pas très bien comment vous pouvez être contre cela. Nous ne suivons pas une logique du droit à l’enfant ; il s’agit pour nous de faire le maximum pour que l’enfant puisse être accueilli dans les meilleures conditions possible.

Il s’agit donc, après l’article 342-8 du code civil, d’insérer un article 342-9 ainsi rédigé : « Les décisions prononçant adoption plénière ou simple d’un enfant sont prises dans l’intérêt de l’enfant pour réparer le fait qu’il ne peut grandir en relation avec ses parents biologiques. Le désir des adoptants n’est pris en compte que lorsqu’il est compatible avec l’intérêt de l’enfant. »

Il y a une hiérarchie. Le désir d’enfant n’a rien d’illégitime, il est parfaitement compréhensible, mais la priorité, pour nous, je le répète, c’est la défense du plus faible, en particulier de l’enfant fragile puisque soumis à une procédure d’adoption.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 2008.

M. Nicolas Dhuicq. Un de mes maîtres avait l’habitude de dire que l’adoption était opérante et fonctionnait, non pas lorsque les parents avaient adopté l’enfant, mais lorsque l’enfant avait adopté ses parents adoptifs. Encore une fois, comme vient de le souligner notre collègue Le Fur, vous êtes en train de substituer le désir d’adulte – derrière lequel point, selon moi, le désir d’immortalité par reproduction infinie (Murmures sur les bancs du groupe SRC) – à la volonté, à l’individuation des enfants qui ont besoin de cet espace de sujétion.

Mme Chantal Berthelot. Il n’y a pas un divan, ici ?

M. Patrick Ollier. Écoutez-le, il sait de quoi il parle !

M. Nicolas Dhuicq. Vous êtes en train de dénier aux enfants cette capacité en en faisant des objets de désir des adultes.

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Pas du tout !

M. Nicolas Dhuicq. Vous pouvez nier, madame la ministre de la famille. Vous pouvez nier mais vous êtes en train d’ouvrir une boîte de Pandore. Vous n’en mesurez absolument pas les conséquences. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Je rappelle que la procédure d’adoption est longue ; l’agrément est très long à obtenir. Le conseil de famille doit ensuite intervenir, qui place un enfant dans une famille. La réunion d’apparentement du conseil de famille nécessite la constitution de plusieurs dossiers. On choisit une famille pour un enfant et, à chaque fois, c’est l’intérêt de l’enfant qui prime. Et, au final, le jugement est toujours prononcé dans l’intérêt de l’enfant. C’est déjà le droit en vigueur et il n’y a pas de raison objective de le rappeler de nouveau dans notre code. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 17 et 2008 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 24.

M. Marc Le Fur. J’imagine que l’amendement n° 24 ne va pas vous plaire, mes chers collègues, puisque nous disons clairement que, dans l’hypothèse de l’adoption, il vaut mieux donner toutes ses chances à l’enfant : lui donner la possibilité de vivre avec un père et une mère adoptifs de façon qu’il puisse se construire dans un cadre plus favorable, plus protégé. La vie est suffisamment compliquée, difficile, peut-être plus encore pour lui. Priorité doit donc être donnée à des couples qui nous semblent plus susceptibles d’accueillir des enfants.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3073.

M. Xavier Breton. Quels critères vont être établis pour l’« attribution » d’enfants à telle ou telle famille ? Nous en proposons un, qui est lisible, consistant à privilégier les couples de personnes de sexes différents car nous pensons que l’altérité sexuelle est au cœur de la construction de la famille. Si ce n’est pas le cas, quels vont être les critères ? Nous attendons sur ce point la réponse de Mme la ministre déléguée chargée de la famille.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Avis défavorable. Plus le législateur souhaitera déterminer à l’avance quel est l’intérêt de l’enfant – en l’occurrence celui d’être élevé par un couple hétérosexuel – et plus il rendra difficile le travail des personnes, notamment des juges, qui ne doivent avoir en tête que l’intérêt de l’enfant.

M. Marc Le Fur. C’est le contraire !

M. Erwann Binet, rapporteur. Notre rôle de législateur n’est évidemment pas d’anticiper sur un intérêt de l’enfant qui doit être déterminé selon le cas d’espèce et en fonction d’éléments concrets.

M. Bernard Roman. Excellent !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Les services sociaux apprécient d’une façon générale la qualité du projet parental. Et la qualité du projet parental n’a rien à voir avec la sexualité des parents.

M. Xavier Breton. Nous ne parlons pas de sexualité ! C’est une obsession chez vous ! Nous parlons de différence des sexes !

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Le Gouvernement émet donc le même avis défavorable que la commission.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Patrick Ollier. Mme la ministre déléguée chargée de la famille vient de parler de sexualité. Nous ne parlons pas de sexualité, nous. Nous parlons de différence des sexes.

M. Xavier Breton. Eh oui, ce n’est pas pareil !

M. Patrick Ollier. Il est logique que vous vous obstiniez, dans votre position égalitaire, à vouloir supprimer la différence des sexes, mais il est normal que nous qui défendons l’altérité, nous pensions qu’il faille donner la priorité à l’adoption par un père et une mère. C’est tout ce que nous demandons.

Puisque vous pensez à l’intérêt de l’enfant, ne pourriez-vous pas aller jusqu’à penser que l’intérêt de l’enfant est de se retrouver dans une famille telle qu’elle a été prévue par la vie, tout simplement, par la création qui est issue de la rencontre d’un homme et d’une femme ? Cela n’empêchera pas, dans un deuxième temps, aux termes d’un texte auquel nous nous opposons, les couples de personnes de même sexe d’adopter. C’est une question de priorité, madame la ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Meunier.

M. Philippe Meunier. Mes chers collègues, j’ai juste une question à vous poser. Qui êtes-vous pour interdire à un enfant orphelin d’avoir un père et une mère ?

(Les amendements identiques nos 24 et 3073 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 28.

M. Marc Le Fur. Cet amendement a le même objet que les précédents. Si nous ne fixons pas, nous, législateurs, des critères, que se passera-t-il ? De fait, des pressions s’exerceront sur les services sociaux, sur les présidents de conseil général – dont certains sont dans vos rangs d’ailleurs. En fixant des critères, nous protégeons les services sociaux, nous protégeons les élus, nous protégeons les juges. Sans cela, nous aurons très vite une logique de quotas.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3075.

M. Xavier Breton. Il est défendu.

(Les amendements identiques nos 28 et 3075, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 26.

M. Marc Le Fur. Il est défendu.

(L’amendement n° 26, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux séries d’amendements identiques pouvant être soumises à une discussion commune. J’appelle votre attention, mes chers collègues, sur le fait qu’au cours de l’examen de ces amendements, nous allons passer de la page 14 à la page 15. (Sourires.)

Dans la première série d’amendements identiques, la parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 30.

M. Marc Le Fur. Je n’ose pas dire, madame la présidente, que vous êtes une mère pour nous, cela pourrait être mal interprété.

Mme la présidente. Surtout par mes enfants ! (Sourires.)

M. Xavier Breton. C’est une présidence maternelle !

M. Marc Le Fur. Je ne serai pas long car nous devons échanger sur d’autres sujets. Il n’en demeure pas moins que cet amendement me paraît important. Il met en relation l’adoption avec la gestation pour autrui. Si nous autorisons l’adoption d’un enfant né d’une mère porteuse, nous risquons d’autoriser de fait la gestation pour autrui. Nous devons très clairement poser cette question.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n° 3891.

M. Jean-Christophe Fromantin. Cet amendement me donne une bonne occasion de clarifier la situation sur ce risque régulièrement évoqué ici d’introduire la PMA et la GPA dans le texte ou, du moins, d’y arriver rapidement, et sans débat. Il est bien précisé qu’on ne l’autorise pas en France, mais il faut ajouter qu’on ne l’accepte pas non plus comme un principe dans d’autres pays.

Nous avons ici une très bonne occasion d’être clairs sur ce risque, qui correspond à une crainte partagée par beaucoup, de l’autorisation de la PMA et de la GPA, en affirmant que nous n’acceptons pas le principe de ces techniques médicales en France et donc à l’étranger. Il est important de le préciser.

Mme la présidente. Toujours dans le cadre de la présente discussion commune, nous allons examiner une seconde série de d’amendements identiques.

La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 2012.

M. Nicolas Dhuicq. Ces amendements sont de simples garde-fous. (« Ah ! » et sourires sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Si vous êtes honnêtes avec vous-même, madame la ministre, et que vous croyez que la métropole et les territoires d’outre-mer sont imperméables aux progrès de la technique, alors acceptez cet amendement. Cela ne vous coûtera rien et montrera aux Français que vous êtes contre la réification du corps de la femme et contre le fait que l’enfant soit considéré comme un bien de consommation.

M. Patrick Ollier et M. Marc Le Fur. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 2245.

M. Xavier Breton. Nous attendons avec impatience une réponse de votre part, madame la ministre. Vous vous rappelez qu’au dernier jour de nos débats en première lecture, nous vous avions invitée à faire en sorte que la France soit à la tête, au niveau international, de la lutte contre la gestation pour autrui, qui est une atteinte à la dignité humaine et en particulier à la dignité de la femme.

Vous avez ici une nouvelle occasion d’adopter une position claire, de dire très nettement non à la gestation pour autrui, non à l’assistance à la procréation pour convenances personnelles. Nous attendons donc votre réponse, je le répète, avec impatience.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces deux séries d’amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Les auteurs de ces amendements souhaitent que soit interdite l’adoption par une famille d’un enfant conçu par GPA ou par PMA pratiquée à l’étranger.

Pour ce qui est de la GPA, l’interdiction que vous demandez existe déjà. La Cour de cassation a toujours été très ferme sur ce principe, et les enfants nés par GPA n’ont jamais pu être adoptés.

M. Marc Le Fur. La jurisprudence, ça peut évoluer !

M. Jean-Frédéric Poisson. Ce n’est pas la loi !

M. Erwann Binet, rapporteur. C’est une jurisprudence, mais en l’occurrence, le droit ne change pas, et je ne pense pas qu’il soit nécessaire de légiférer sur ce point. En tout état de cause, vous savez très bien que ce n’est pas le sujet de notre texte, monsieur Le Fur.

En ce qui concerne la PMA pratiquée à l’étranger, je trouve assez singulier que nos collègues qui, depuis ce matin, nous donnent des leçons sur le fait que nous ne nous soucierions pas de la situation des tout-petits, des plus faibles, puissent avoir l’idée de créer des orphelins inadoptables dans notre pays. Une telle chose n’est évidemment pas imaginable dans notre droit. La commission est donc défavorable à ces deux séries d’amendements.

M. Bernard Roman. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Je ne ferai que reprendre les propos du Président de la République, qui a repoussé on ne peut plus clairement l’ouverture du débat sur la gestation pour autrui.

La Gouvernement est défavorable à ces deux séries d’amendements.

M. Patrick Ollier. Faire référence à l’avis du Président de la République, ce n’est pas ce qui va nous mettre en confiance !

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson.

M. Jean-Frédéric Poisson. Qu’il nous soit permis de douter très fortement de la clarté des engagements du Président de la République (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Ses changements de pied sont si nombreux que nous sommes fondés à penser que son point de vue d’hier n’est pas nécessairement celui de l’avant-veille – et, comme dit le poète, encore moins celui de demain.

Pour ce qui est de la GPA et des mères porteuses, je vous rappelle que nous sommes ici pour faire la loi, monsieur le rapporteur. Avec tout le respect que nous avons pour la Cour de cassation, cette juridiction établit « seulement » une jurisprudence, mais elle ne fait pas la loi. Si votre volonté est si claire que vous le dites, pourquoi ne pas l’inscrire très formellement dans la loi ? C’est tout à fait possible et ce serait clair pour tout le monde.

Enfin, il me semble que vous confondez deux choses. Si notre intention n’est pas de créer des orphelins inadoptables, comme vous le dites, il faut tout de même reconnaître que ces enfants, s’ils existent – et ils existent –, sont mis en difficulté par les actes de leurs parents. Pour nous, et c’est une différence entre nous, il n’est pas nécessaire que la France consacre légalement des situations qui sont illégales dans leur origine. Cette différence entre nous explique que nous ayons déposé ces amendements. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. Nicolas Dhuicq. Mesdames les ministres, monsieur le rapporteur, vous êtes placés face à une alternative. Soit vous créez une inégalité entre les couples d’hommes et les couples de femmes, et vous adoptez notre amendement. Soit vous êtes finalement pour l’égalité entre les couples de femmes et les couples d’hommes – dont rien ne me dit qu’ils ne sont pas meilleurs que les couples de femmes pour élever un enfant –, et dans ce cas, vous êtes pour la GPA.

Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Breton.

M. Xavier Breton. J’insiste, monsieur le rapporteur, sur le fait que c’est vous qui faites de ceux qui sont nés dans le cadre d’une GPA des orphelins inadoptables.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Erwann Binet, rapporteur. Je précise que la jurisprudence de la Cour de cassation s’appuie sur l’article 16-7 du code civil, selon lequel « toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle ». Il est évident que, doté de cette nullité d’ordre public, notre corpus législatif est suffisamment solide et ne risque pas de donner lieu à une modification de la jurisprudence de la Cour de cassation, ni demain, ni après-demain : la juridiction suprême s’appuie déjà sur des dispositions législatives extrêmement solides et d’ordre public.

Pour ce qui est de la PMA, l’un de vos amendements est ainsi rédigé : « L’adoption n’est pas permise lorsque l’enfant a été conçu dans le cadre d’une gestation pour le compte d’autrui ou d’une technique de procréation médicale assistée interdite par la législation française. » Mais les PMA en Belgique ne sont pas interdites par la législation française. Elles sont librement pratiquées. Si une mère légitime décède après avoir pratiqué avec sa conjointe une PMA en Belgique, en Espagne ou aux Pays-Bas,…

M. Jean-Frédéric Poisson. C’est illégal !

M. Erwann Binet, rapporteur. …vous aurez bien créé un enfant orphelin inadoptable. Je répète que l’accès à la PMA en Belgique n’est pas interdit en France. Je confirme l’avis défavorable de la commission.

(Les amendements identiques nos 30 et 3891 ne sont pas adoptés.)

(Les amendements identiques nos 2012 et 2245 ne sont pas adoptés.)

(L’article 1er bis est adopté.)

Article 1er ter

Mme la présidente. Nous en venons à une série d’amendements de suppression de l’article 1er ter. Que ceux qui souhaitent défendre leurs amendements lèvent la main.

M. Xavier Breton. L’amendement n° 2246 est défendu.

Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Larrivé, pour soutenir l’amendement n° 2228.

M. Guillaume Larrivé. Nous sommes au cœur du désaccord entre ceux qui, comme nous, sont favorables à une union civile entre les couples de même sexe afin de renforcer les droits des personnes de même sexe, et ceux qui souhaitent, en plus de ce renforcement, ouvrir l’adoption. C’est là que se situe la ligne de partage fondamentale.

Pour ma part, si je suis contre ce projet de loi et voterai contre avec beaucoup de détermination, c’est précisément parce qu’il ouvre droit à l’adoption.

Rappels au règlement

Mme la présidente. La parole est à Mme Laure de La Raudière, pour un rappel au règlement.

Mme Laure de La Raudière. Madame la présidente, il me semble que, plutôt que de nous demander de lever la main pour défendre nos amendements, il serait de bon ton que, conformément au règlement, vous appeliez chaque amendement, afin que nous vous disions si nous souhaitons les défendre ou non.

M. Christian Jacob. En outre, cela permet que les numéros de ces amendements figurent au compte rendu !

Mme la présidente. Madame de La Raudière, pouvez-vous m’indiquer l’article du règlement sur lequel est fondé votre rappel ? Je crains que ce soit impossible, car il n’existe pas.

Si vous souhaitez défendre un amendement de suppression, je vous demande de me le signaler, car il m’est impossible d’appeler des séries de 70 amendements identiques, surtout que chacun d’entre vous ne se trouve pas présent dans l’hémicycle à tout moment, ou ne souhaite pas forcément s’exprimer sur chaque amendement.

M. Patrick Ollier. Eh bien, appelez-les !

Mme la présidente. Nous pouvons aussi, si vous le souhaitez, faire application de la proposition de répartition du temps de parole qu’avait suggérée par M. Jacob.

La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement.

M. Christian Jacob. Mon rappel au règlement se fonde sur l’article 58, alinéa 3, de notre règlement, madame la présidente.

Je rappellerai tout d’abord que le droit d’amendement est un droit individuel, comme chacun le sait. Par conséquent, ce que je souhaite, c’est que chaque amendement soit appelé.

M. Bernard Roman. C’est nouveau !

M. Christian Jacob. Non, cela n’a rien de nouveau : les amendements doivent être appelés, à charge pour chaque député concerné de préciser s’il souhaite ou non le défendre. L’intervention que j’ai faite tout à l’heure était destinée à éclairer notre assemblée, mais elle ne remet évidemment pas en cause le caractère individuel du droit d’amendement. Par ailleurs, le fait d’appeler les amendements permet que ceux-ci soient inscrits au compte rendu.

Mme la présidente. Vous ne m’avez toujours pas indiqué quel article de notre règlement prévoit un appel de chaque amendement identique par son numéro. Force est de constater qu’il n’existe pas.

M. Patrick Ollier. C’est l’article 95, alinéa 3 !

M. Christian Jacob. Je vous demande une suspension de séance de cinq minutes afin de réunir mon groupe, madame la présidente.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à dix-neuf heures cinq.)

Article 1er ter (suite)

Mme la présidente. La séance est reprise.

La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 2013.

M. Nicolas Dhuicq. Comme on le voit, votre texte crée la confusion. Vous mélangez, d’une part, l’amour entendu comme celui unissant deux adultes, ou comme celui d’un adulte pour un enfant, et d’autre part le tissage affectif qui se noue entre la mère et l’enfant, le portage de l’enfant – au sens que lui donne Winnicott – et les soins qui lui sont portés. Vous semblez penser que ce tissage affectif est interchangeable quel que soit l’adulte concerné.

Par cet article, à nouveau, vous créez une fiction : vous allez imposer à des enfants, qui peuvent avoir un lien affectif avec l’adulte qui vit avec le parent survivant, une adoption qu’ils ne demandent pas forcément. Cette obligation est en elle-même porteuse d’une grande violence.

Vous êtes réellement dans la confusion, car vous voulez inscrire dans la loi des mots et des concepts qui n’ont pas à y figurer. Vous n’avez de cesse de parler d’égalité alors que, comme cela a été dit, vous êtes dans l’uniformisation et le déni de la différence des sexes.

Ce texte manifeste une grande violence, je le répète, envers les enfants, nés et à naître, de ce pays.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin pour soutenir l’amendement n° 3863.

M. Jean-Christophe Fromantin. Tous ces amendements relatifs à l’adoption plénière sont au cœur des inquiétudes et des risques induits par cette loi.

Lors de la première lecture, nous avons eu l’occasion, à plusieurs reprises, de rappeler notre opposition à l’adoption plénière. Ce projet de loi aurait pu faire l’objet d’un consensus si l’on avait, comme cela a déjà été évoqué, fait le choix de l’union civile plutôt que du mariage et si l’on s’était contenté de l’adoption simple.

L’adoption simple permet sans doute de répondre, à l’heure actuelle, à la demande de la très grande majorité des couples homosexuels puisque, comme cela a été dit plusieurs reprises, la plupart d’entre eux demandent à pouvoir exercer cette forme d’adoption en faveur d’un enfant de l’un des conjoints.

C’est la raison pour laquelle cet article 1er ter, qui permet l’adoption d’un enfant ayant déjà fait l’objet d’une adoption simple, mérite d’être supprimé.

Cet article aurait par ailleurs des conséquences majeures, principalement dans le cas où une personne a eu un enfant d’une précédente union hétérosexuelle.

En outre, il n’est pas justifié de modifier, au détour de ce projet de loi, la législation relative à l’adoption. Cette réforme de la législation, qui concernera potentiellement tant les couples homosexuels que les couples hétérosexuels, a en réalité pour objet d’accorder le droit d’adopter au conjoint d’une personne de même sexe.

Cet article a donc la même visée que l’article 1er bis : il anticipe l’ouverture de l’adoption aux couples de même sexe. C’est la raison pour laquelle nous sommes favorables à sa suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

M. Erwann Binet, rapporteur. L’article 1er ter, qui concerne l’adoption simple, relève de la même logique que l’article 1er bis. En toute logique, la commission a donné un avis défavorable à ces amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Madame la présidente, pourriez-vous considérer que l’amendement n° 3408 est également défendu ?

Concernant cet article 1er ter, j’aimerais connaître votre avis, madame la garde des sceaux, sur la tournée de promotion de la GPA effectuée très récemment à Paris par une clinique américaine, située en Illinois, qui a réservé des salons dans un grand hôtel parisien pour mener cette activité connue des milieux intéressés.

Vous n’avez cessé de nous dire en première lecture que nous étions dans l’élucubration, qu’il n’était pas question de cela. Pourtant, on sait que l’adoption par les couples homosexuels raréfiera, tarira le nombre d’enfants adoptables, ce qui encouragera fatalement la GPA : la loi n’est pas encore votée que l’on voit fleurir sur notre territoire des promoteurs de cette méthode. J’aimerais, madame la garde des sceaux, que vous nous donniez votre sentiment sur ces agissements illégaux en France…

M. Patrick Ollier. Qui devraient être poursuivis !

Mme Annie Genevard. …et qui, pourtant, se déroulent au vu et au su de tous.

Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Dubois.

Mme Françoise Dubois. Je ne comprends pas du tout l’accusation qui nous est faite de ne pas protéger l’intérêt de l’enfant, ni la demande de suppression de cet article, qui contribue à instaurer un cadre légal au profit du parent social en ouvrant au conjoint la faculté de l’adoption simple.

Nous avons aujourd’hui le devoir de protéger de façon identique tous les enfants de la République, quelle que soit l’orientation sexuelle de leurs parents. Il s’agit également d’éviter les drames provoqués par une séparation ou un décès. L’opposition demande la suppression de cet article alors qu’il est essentiel au renforcement de la sécurité juridique de l’adoption intrafamiliale.

Comment peut-on refuser de combler le vide juridique actuel, alors que cet article devrait rassembler tous les députés, quelle que soit leur sensibilité politique ? Au-delà de la sécurisation juridique du parent social, l’enfant adopté en sera le premier bénéficiaire.

Pour nous, les enfants doivent tous être traités et protégés de la même façon. Au nom de la République, nous leur devons cette égalité.

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard. Nous sommes au cœur d’un débat qui ne pourra déboucher sur aucun accord entre nous car, que vous le vouliez ou non, l’adoption est un exercice extrêmement difficile. Pour réussir un projet d’adoption, il faut un père et une mère, même si l’on sait que, dans certains cas, il est nécessaire de composer avec les principes.

Poser d’une manière générale qu’il peut y avoir adoption simple quelle que soit l’orientation sexuelle de l’adulte concerné, je suis désolé de devoir le dire, ce n’est pas aider véritablement l’enfant : dans les premières années de sa vie, celui-ci a besoin d’un père et d’une mère.

Je voudrais, madame la garde des sceaux, que vous répondiez à la question que vient de vous poser ma collègue sur cette propagande outrancière en faveur de la GPA, menée sur le sol national, dans un grand établissement hôtelier parisien, tristement connu, pour qui a un peu de mémoire, comme ayant abrité des activités d’une autre nature aux temps où la France était occupée. Je souhaiterais que vous demandiez au procureur de Paris d’ouvrir une information judiciaire.

(Les amendements identiques nos 2013, 2228, 2246, 3863 et 3408 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq.

M. Nicolas Dhuicq. J’avais sollicité la parole juste avant le vote pour exprimer une interrogation : quelle place est faite à l’enfant dans les arguments que nous venons d’entendre ? On n’entend parler que de l’adulte adoptant, de sa sécurisation, comme si, à nouveau, l’enfant était secondaire dans cette problématique.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin.

M. Jean-Christophe Fromantin. Je m’associe à la demande de mes collègues s’agissant de cette entreprise qui assure la promotion de la GPA en France : au nom du groupe UDI, je vous demande, madame la garde des sceaux, de faire toute la lumière sur ce type d’actions.

J’avais également eu l’occasion, au cours de la première lecture, de relever sur internet une série d’offres commerciales qui évoquaient votre circulaire et l’appel d’air qui semblait venir de France au bénéfice de la GPA. Je pense qu’une fois de plus un éclaircissement est vraiment nécessaire. Beaucoup attendent une position ferme du Gouvernement sur ce sujet.

On comprend votre intention et vos propos quand vous dites ne pas vouloir de cela en France, mais concrétisez-les par des actes juridiques, des enquêtes, des moyens. Montrez-nous qu’au-delà de cette intention, vous avez le courage d’affronter ces pratiques qui semblent se diffuser en France. Dans des grands hôtels et sur internet, on va chercher le client, on va chercher les Français pour leur proposer ce type de procédé.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 2407.

M. Philippe Gosselin. Il est défendu.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Patrick Ollier. Nous avons posé une question précise à Mme la garde de sceaux, et je souhaiterais qu’elle nous réponde, car cette affaire de clinique américaine est un vrai problème, qui perturbe l’esprit des parlementaires de l’opposition et celui de beaucoup de Français.

L’article 227-12 du code pénal réprime la mise en contact d’une personne ou d’un couple avec une mère porteuse. Or cette clinique a organisé une rencontre en France, ailleurs que dans l’hôtel évoqué précédemment et qui l’a refusée. Il revient donc au parquet de conduire une enquête et de poursuivre ce qui est un acte illégal.

Il n’y aura jamais de GPA, le Président de la République et vous-même en avez pris l’engagement, dites-vous, madame la garde des sceaux. Si c’est la vérité, comme nous pouvons le croire, il faut poursuivre ceux qui viennent sur le territoire français promouvoir la GPA, au vu et su de tout le monde, ce qui donne lieu ensuite à des articles dans la presse quotidienne comme celui que j’ai sous les yeux.

Êtes-vous d’accord pour engager des poursuites au titre de l’article 227-12 du code pénal ? Si vous ne le faites pas, cela nous laissera penser, malheureusement, que vous êtes favorable à la GPA et que vous ne voulez prendre aucune initiative contre ceux qui veulent la promouvoir. Dans ce cas, les Français qui doutent de la parole de l’État en douteront encore plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Que les choses soient claires : je vous réponds à vous, madame Genevard, parce que, dans votre propos, j’ai bien entendu une question. Les autres font des procès d’intention au Gouvernement. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Ollier. Ça alors !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Oui, y compris vous, monsieur Ollier.

M. Jacques Myard. On se calme !

M. Patrick Ollier. J’ai le droit de vous interroger !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Malgré toutes les réponses que nous avons pu apporter, comme tout à l’heure lorsque Mme la ministre de la famille vous a rappelé l’engagement formel pris par le Président de la République pour toute la durée du quinquennat, vous vous relevez à nouveau pour dire que vous n’avez aucune confiance dans sa promesse.

M. Patrick Ollier. Allez-vous engager des poursuites ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. La question est de savoir si vous voulez que l’on vous réponde, ou si vous voulez faire un feuilleton circulaire, tournant sur lui-même.

Je réponds donc à Mme Genevard, car M. Fromentin et les autres font un procès d’intention, ils manifestent un refus de savoir. Mme Genevard, elle, a posé une question, je lui réponds.

M. Christian Jacob. Répondez gentiment !

M. Patrick Ollier. Je n’accepte pas ces propos !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Eh bien n’acceptez pas, cela ne change rien à rien !

M. Patrick Ollier. Cela devient de l’arrogance !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Pour vous, même quand on se tait, on est arrogant. Quoi qu’on fasse, on vous méprise. On vous répond, la réponse ne vaut rien. On vous répond cinquante-six fois, vous reposez la question.

M. André Schneider. On est au Parlement !

M. Patrick Ollier. Je vous demande d’engager des poursuites !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous élevez le ton (Protestations sur les bancs du groupe UMP) et c’est moi qui suis arrogante !

M. Jacques Myard. On se calme !

M. Philippe Meunier. Ça commence à bien faire !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Alors que j’essaie de répondre à Mme Genevard, je ne peux pas dire une phrase car vous ne cessez de m’interrompre, mais c’est nous qui sommes arrogants !

M. Philippe Meunier. Nous ne sommes pas à l’école ! Nous sommes la représentation nationale !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je tremble de peur ! Je suis absolument effrayée, terrorisée, terrifiée ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. André Schneider. Madame la présidente, il faut calmer les choses !

Mme la présidente. Mes chers collègues, monsieur Meunier, s’il vous plaît.

M. Philippe Meunier. On vous interpelle !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Prenez le micro, ça criera un peu plus fort. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Monsieur Meunier, arrêtez de hurler !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Moi, j’aime bien quand vous êtes plus sincères et plus vrais. J’aime que vous vous révéliez tel que vous êtes.

Pour en revenir à votre question, madame Genevard, dès que le ministère a eu connaissance de cette réunion qui devait se tenir et qui a été annulée…

M. Marc Le Fur. Vous devriez la mettre en muleta, votre écharpe !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux.… j’ai demandé que soient rappelées publiquement les dispositions du code civil qui établissent très clairement, d’une part, l’indisponibilité du corps humain, et, d’autre part, qu’il s’agit d’un principe d’ordre public c’est-à-dire qu’il n’y a pas d’exception possible. C’est un principe absolu.

Les dispositions du code pénal doivent aussi être rappelées puisque cette société vient faire, disons-le clairement et trivialement, du rabattage pour cette technique qui n’est pas admise en France. J’ai demandé à la direction des affaires criminelles et des grâces d’interroger le parquet pour savoir quelles dispositions prendre.

Monsieur Myard, le parquet ne peut pas ouvrir d’information judiciaire mais il peut engager une enquête préliminaire.

M. Jacques Myard. Bien sûr !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Il n’y a pas la moindre exception possible, il n’y a pas la moindre tolérance de la part du Gouvernement. Il n’est pas question que l’on vienne organiser des réunions de recrutement sur le sol français

Avant de donner ces consignes, j’ai d’ailleurs fait étudier le tract que l’on m’a remis pour voir quelle assise juridique permettait d’aller le plus loin possible contre les organisateurs de cette réunion. Une ligne du tract précisait « prise de rendez-vous possible », signe d’une démarche très active. S’il n’est pas possible d’interdire une simple réunion d’information, qui pourrait d’ailleurs tout aussi bien être organisée par des opposants à la GPA, il apparaît, vérification faite, ne serait-ce qu’à la lecture de cette ligne proposant des rendez-vous, que c’était manifestement une réunion de promotion et de mobilisation.

Des dispositions ont donc été prises, et la direction des affaires criminelles et des grâces a étudié le dossier qui est désormais entre les mains du parquet. Ce que je peux faire, c’est demander au parquet quelles dispositions il a déjà prises ou envisage de prendre.

M. Patrick Ollier. Il y aura donc des poursuites ?

M. Philippe Gosselin. Ce serait bien d’en engager !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous passez votre temps à dire que les Français ne nous croient pas sur la GPA parce que nous mentons, parce que le Président de la République a une parole qui ne vaut rien, parce que ceci, parce que cela.

M. Patrick Ollier. Il faut poursuivre, c’est tout !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. En tout état de cause, profitez de la réponse si vous en voulez. Madame Genevard, c’est à vous que je répondais et je le faisais avec grand plaisir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jacques Myard. Je proteste !

Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Myard.

M. Jacques Myard. Madame la ministre, je suis tout à fait désolé de devoir vous dire…

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous avez le droit de tout dire, de tout faire, de tenir les propos les plus désagréables sans qu’on ait celui de vous répondre !

M. Christian Jacob. On se calme !

M. Jacques Myard. …qu’il y a justement des gens qui rabâchent et qui ont raison de le faire sur un sujet aussi grave.

De plus, si notre collègue Mme Genevard est députée de la nation, nous le sommes aussi. En conséquence, lui répondre à elle et pas à nous qui avons posé la même question, c’est soit de la polémique, soit une insulte envers certains parlementaires, et ce n’est pas acceptable (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Ne balayez pas mes propos d’un revers de main, madame. Nous sommes ici au même titre que vous.

M. Bernard Roman. Pas au même titre !

M. Jacques Myard. Vous êtes la ministre d’un gouvernement légal, nous sommes ici parce que le peuple nous y a envoyés.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. J’ai très peur !

M. Jacques Myard. Que cela vous plaise ou non, vous devez répondre à chacun des députés, et cesser de faire des procès d’intention comme vous venez de le faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(L’amendement n° 2407 n’est pas adopté.)

(L’article 1er ter est adopté.)

Article 1er quater

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n° 2220 tendant à rétablir l’article 1er quater.

M. Sergio Coronado. Nous avons décidé de retirer cet amendement, estimant pouvoir aborder la question dans le cadre de la future loi sur la famille.

(L’amendement n° 2220 est retiré.)

Mme la présidente. L’article 1er quater demeure donc supprimé.

Article 1er quinquies

Mme la présidente. La parole est à Mme Elisabeth Pochon, inscrite sur l’article 1er quinquies.

Mme Elisabeth Pochon. Cet article a trait à l’intérêt supérieur de l’enfant. Depuis plusieurs heures, nous entendons dire que nous ne savons pas nous préoccuper de l’intérêt de l’enfant. Pourtant, des enfants vivent dans des situations où leur deuxième parent n’est pas reconnu par la loi. Ce deuxième parent, présent depuis le début auprès de l’enfant, a parfois assisté à sa naissance, a aidé à le nourrir et pourvoit à son éducation. Il n’a pas de statut légal pour l’accompagner à l’école, pour lui transmettre un patrimoine, pour signer des papiers à l’hôpital si une opération est nécessaire.

En cas de séparation de ce type de couple, l’enfant peut perdre toute possibilité de maintenir son lien affectif avec ce second parent. Cet article entend préserver ce droit, commun à l’enfant et aux parents, car celui des deux qui n’est pas reconnu légalement conserve bien entendu une relation affective avec l’enfant.

L’article sur la délégation-partage de l’autorité parentale dont vous parlez dans vos amendements ne donne pas cette garantie sur tout le territoire. Il dépend entièrement de l’appréciation du juge, appréciation qui connaît des différences d’un endroit à l’autre.

Le parent privé de reconnaissance légale ne demande qu’une seule chose : conserver des devoirs par rapport à l’enfant envers qui il s’est engagé. Après tout, être parent, est-ce seulement faire un enfant ou est-ce aussi s’engager envers lui ? C’est là-dessus que nous ne sommes pas d’accord. Vous ne voulez reconnaître que la filiation biologique ; nous voulons reconnaître que faire un enfant, ce n’est pas seulement le mettre au monde, c’est aussi l’élever, s’engager, en assumer la responsabilité jusqu’au bout de sa vie.

Je voulais vous lire un témoignage que je viens de recevoir d’un couple d’hommes.

Mme Marie-Christine Dalloz. Nous recevons aussi beaucoup de témoignages ! Nous ne les lisons pas tous !

Mme Elisabeth Pochon. Ils écrivent : « L’autre parent ne doit pas devenir un étranger. Nous avons deux enfants. Ils n’ont été volés à personne. Ils n’ont été retirés à personne. Ils ont été rêvés, réfléchis, souhaités. On ne leur ment pas. On leur raconte leur histoire, comment ils ont été fabriqués. »

M. Xavier Breton. Fabriqués ! Ce sont des produits !

Mme Marie-Christine Dalloz. L’embryon est une marchandise !

M. Xavier Breton. C’est ce qui nous sépare !

Mme Elisabeth Pochon. « L’adoption plénière feint la filiation biologique et il est temps de fonder la filiation sur l’engagement parental plutôt que sur la nature. » Je vous engage à nous suivre sur ce terrain. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques de suppression, nos 45, 448, 751, 938, 1444, 2014, 2247, 2293, 2319, 3476, 3564 et 3610, tendant à supprimer l’article 1er quinquies.

(Les amendements identiques nos 45, 448, 751, 938, 1444, 2014, 2247, 2293, 2319, 3476, 3564 et 3610, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une nouvelle série d’amendements identiques, nos 48, 457, 529, 939, 1133, 1448, 1677, 2294, 2320, 2887, 3076, 3477, 3566 et 3632, qui visent à supprimer l’alinéa 1er, et qui sont défendus.

(Les amendements identiques nos 48, 457, 529, 939, 1133, 1448, 1677, 2294, 2320, 2887, 3076, 3477, 3566 et 3632, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n° 3900.

M. Jean-Christophe Fromantin. Cet amendement fait partie d’une série de propositions visant à créer un véritable statut du beau-parent partageant ou ayant partagé la vie de l’enfant.

Le droit de l’enfant au maintien des relations personnelles, s’il est clairement consacré concernant les ascendants, l’est beaucoup moins s’agissant des autres tiers. Parmi ces tiers, qu’ils aient ou non un lien de parenté avec l’enfant, certains ont occupé une place importante dans sa vie. Il ne s’agit pas de n’importe qui, mais d’un tiers avec qui l’enfant a partagé la vie quotidienne, et qui a souvent contribué de manière effective à sa prise en charge, à son éducation ou à son bien-être. De ce fait, il s’agit surtout d’un tiers avec qui l’enfant a tissé des liens affectifs étroits, dont la rupture peut lui être préjudiciable.

Pourtant, on peut considérer qu’en l’état actuel des textes l’enfant n’a pas de droit particulier à conserver des liens avec ce tiers qui l’a élevé pendant des années. L’article 1er quinquies du projet de loi ne fait que compléter la disposition selon laquelle le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l’enfant et le tiers. L’amendement va plus loin puisqu’il vise à consacrer explicitement un droit de l’enfant à entretenir des relations personnelles avec ce tiers, en créant un nouvel alinéa à l’article 371-4-1 du code civil.

En consacrant le droit de l’enfant à entretenir des relations personnelles avec le tiers, il serait alors présumé qu’il est de l’intérêt de l’enfant de conserver une telle relation, dans la mesure où ces liens ont contribué à une période donnée, parfois longue, de sa vie à sa construction et à son équilibre. L’intérêt de l’enfant, apprécié cas par cas par le juge, doit toujours venir justifier une opposition à ce maintien des liens.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable. L’article tel qu’il a été modifié par le Sénat remplit tous les objectifs que M. Fromantin a développés.

(L’amendement n° 3900, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Sergio Coronado, pour soutenir l’amendement n° 2222.

M. Sergio Coronado. Il vise à permettre au juge de maintenir les liens entre un enfant et un tiers. Il s’agit de tenir compte du rôle que peuvent jouer les parents sociaux, en faisant référence à l’arrêt du 20 octobre 2011 de la cour d’appel de Paris. Cette disposition avait déjà été évoquée au Sénat et nous la présentons à notre tour, mais, au regard des réactions qu’elle a suscitées, nous la retirons. Nous la redéposerons dans le cadre du projet de loi sur la famille.

(L’amendement n° 2222 est retiré.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une nouvelle série d’amendements identiques, nos 50, 940, 2924, 3077 et 3864, qui sont défendus.

(Les amendements identiques nos 50, 940, 2924, 3077 et 3864, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

(L’article 1er quinquies est adopté.)

Article 2 A

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements, nos 52, 767, 941, 1202, 2016 et 2248, qui tendent à supprimer l’article 2 A et qui sont défendus.

(Les amendements nos 52, 767, 941, 1202, 2016 et 2248, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements identiques, parmi lesquels les amendements nos 53, 462, 530, 942, 1138, 1455, 1679, 2296, 3079, 3478, 3569 et 3890, qui sont défendus.

La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement n° 3928.

M. Gilles Lurton. Cet amendement vise à remplacer les mots « Chacun des époux » par « Le mari ou la femme ».

Le nom, c’est ce qui détermine l’être. Nommer quelqu’un est fondamental, c’est lui donner son existence. Or, cet article bouleverse les règles de transmission du nom de famille.

Traditionnellement, l’enfant porte le nom du père. Depuis quelques années, il est également possible d’accoler le nom de la mère.

M. Jacques Myard. Ça va être un beau bordel !

M. Gilles Lurton. La filiation va de pair avec l’intérêt de l’enfant. Elle détermine son attachement à son père et à sa mère et repose sur le principe de protection familiale, mais aussi civile.

Avec cet article et en l’absence de démarches particulières, l’enfant prendra le nom de chacun des deux parents, qu’ils soient de sexes différents ou non, accolés dans l’ordre alphabétique, sauf déclaration conjointe et formelle des deux parents. Les complications engendrées par ces dispositions ne sont pas suffisamment mesurées. Ainsi, les enfants adoptés par des couples de même sexe n’auront plus de filiation symbolique à laquelle se rattacher et l’état-civil deviendra donc asexué. Or, l’état-civil est par définition la traduction administrative du lien de filiation et donc du fait d’être né d’un père et d’une mère.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable. Cet article a été introduit par la commission des lois du Sénat. Il élève au rang législatif des règles qui figurent dans la circulaire du 26 juin 1986, qui est venue avec le temps en contradiction avec d’autres dispositions législatives. Il était donc nécessaire de procéder ainsi et le Défenseur des droits l’avait réclamé, notamment lors d’auditions au Sénat. Notre commission des lois a donc naturellement adopté la même position.

M. Jacques Myard. Cela va créer de la confusion !

(Les amendements identiques nos 53, 462, 530, 942, 1138, 1455, 1679, 2296, 3079, 3478, 3569, 3890 et 3928, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

(L’article 2 A est adopté.)

Article 2

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, inscrit sur l’article 2.

M. Nicolas Dhuicq. Si l’on est sûr de sa mère, on ne l’est jamais de son père. C’est pourquoi la majorité des sociétés ont choisi une filiation patrilinéaire et la transmission du nom par le biais du patronyme, même si le rapporteur a évoqué les évolutions récentes qui permettent en particulier de sauvegarder des noms de famille rares.

Le présent texte procède différemment. Il est d’ailleurs assez curieux de voir que le premier paragraphe de cet article, alors qu’on vient d’entendre parler à l’envi de parenté, de parentalité, de parent, de parent social, de parent adoptif, de parent biologique, de géniteur ou de génitrice, commence par prévoir le désaccord entre les parents. Où est le projet parental, où est le « portage » de l’enfant si les parents ne sont pas au départ capables de se mettre d’accord sur le nom qu’ils vont lui donner, qui était jusqu’à présent, j’en suis désolé, mesdames qui hurlez au loup lorsqu’on parle de paternité, le patronyme, avec la possibilité d’y accoler le nom d’origine de la mère ?

Dans ce texte, vous jouez au bonneteau, vous mélangez les noms, vous les classez par ordre alphabétique – comme si l’ordre alphabétique avait un sens rationnel !

Vous avez inventé le mariage quantique. On a déjà vu les conseillers départementaux quantiques, qui forment une paire lors de leur campagne électorale mais peuvent avoir des positions différentes en fonction des moments. Voilà les parents quantiques, qui peuvent être d’accord ou non. L’enfant peut porter un nom ou un autre, deux enfants d’une même fratrie peuvent avoir des noms dans un ordre inverse parce que c’est le choix des parents, ou l’un peut porter le nom seulement du père ou de la mère même s’ils sont issus des mêmes parents biologiques ! C’est insensé.

À moins d’avoir un conflit d’intérêt, mesdames les ministres, avec les généalogistes, qui ont certainement en vue de nombreuses heures de travail, et à moins d’avoir voulu rompre avec l’histoire de France, il serait raisonnable d’abroger cet article.

M. Jacques Myard. Très bien !

Mme la présidente. Je suis saisie d’une série d’amendements tendant à supprimer l’article 2.

La parole est à M. Jacques Myard, pour soutenir l’amendement n° 3570.

M. Jacques Myard. Je veux tout de même revenir sur un point que j’ai déjà évoqué en première lecture.

Mettre par terre la transmission du nom du père est une grave erreur. Il s’agit, dans notre pays, d’une pratique multiséculaire, dont les traces remontent effectivement à plus de dix siècles.

On va créer plus qu’une confusion : une confusion pour les généalogistes, bien sûr, mais surtout une confusion pour la psychologie de l’enfant. Certains continueront à porter le nom du père. Pour d’autres, il y aura ce que mon ami Dhuicq appelle des mélanges quantiques. Je crois que l’on va créer institutionnellement la confusion. Or vous savez que les lois qui perdurent dans la société sont les lois structurelles les plus simples.

Je suis donc intimement convaincu que l’on reviendra sur ce genre de confusion institutionnelle. Elle ne servira pas les enfants, elle ne servira pas les familles, elle conduira certains à demander : « Mais toi, tu es le fils de qui ? Pourquoi tu ne portes pas son nom ? etc. » On est en pleine confusion.

C’est pourquoi il faut supprimer cet article.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Dhuicq, pour soutenir l’amendement n° 2015.

M. Nicolas Dhuicq. J’avais rappelé, en première lecture, qu’il n’y a pas si longtemps que l’ensemble des citoyens de ce pays ont le droit de porter un patronyme. Nous connaissons aussi l’exemple du Japon, où c’est au cours de l’ère Meiji que les patronymes ont été autorisés.

Autrefois, seuls les puissants avaient le droit de porter un patronyme. Aujourd’hui, tous les citoyens de ce pays portent un nom qui les situe dans une généalogie et dans une histoire.

Madame la ministre de la famille, je crois que votre plan est tout à fait cohérent. Vous voulez construire un homme nouveau, qui n’ait ni père ni mère, qui soit pour ainsi dire issu du Saint Esprit,… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Henri Emmanuelli. Ah, non ! C’est vous, ça !

M. Nicolas Dhuicq. …sans corps, sans incarnation, puisque vous niez le sexe, vous niez la différence des sexes dans ce puritanisme froid qui, malgré les apparences, vous porte. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.) Vous êtes des êtres froids, dénués d’affectif, dénués d’histoire, dénués de généalogie, et vous ne pensez en rien à ces enfants à venir, qui se retrouveront sans lien affectif, sans rapport avec leur histoire et avec les générations qui les ont précédés. Ils seront confrontés, au moment de devenir à leur tour pères et mères, à un vide sidéral qu’ils ne pourront combler.

M. Bernard Lesterlin. Connaissez-vous le système patronymique de Mayotte ?

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 54.

M. Marc Le Fur. Le nom, mes chers collègues, c’est une référence, pas simplement par rapport au père et à la mère, mais aussi par rapport à toute une lignée ; chacun doit se situer dans le temps et dans l’espace.

M. Jacques Myard. Exactement !

M. Marc Le Fur. Mais votre conception de l’enfant, votre conception à vous, c’est celle d’une page blanche, sur laquelle vont s’imprimer l’éducation, l’école, etc. Tout cela compte, certes, mais nous sommes aussi les héritiers des générations et des générations qui nous ont précédés, qui ont fait des efforts, qui nous ont marqués, même si, de fait, nous les ignorons.

Ce qui me choque, dans cet article, c’est que, à l’occasion de l’examen d’un texte qui vise – j’adopte là votre point de vue – à résoudre le problème de quelques centaines, de quelques milliers de personnes, on modifie complètement les règles de notre système, pour l’ensemble des familles. Nos compatriotes l’ont compris : il ne s’agit pas simplement de régler l’affaire de quelques-uns, il s’agit de bouleverser l’organisation du nom patronymique pour l’ensemble.

De ce point de vue, c’est vrai, le Sénat a un petit peu atténué les choses. J’avais moi-même contribué – peut-être vous en rappelez-vous, monsieur le rapporteur – à dénoncer en première lecture les excès de ce texte. Il n’en demeure pas moins que, dans certains cas, on aboutira à des aberrations, c’est-à-dire à l’association de deux noms classés par ordre alphabétique. C’est, me semble-t-il, une aberration.

Un individu, ce n’est pas quelqu’un d’isolé, c’est aussi une personne humaine – je l’ai dit hier soir – qui doit se situer par rapport à autrui, par rapport à sa famille, par rapport à sa région, par rapport à son voisinage, par rapport à sa nation. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Son nom y concourt. On n’est pas des personnes isolées ! Rappelez-vous la première décision des adeptes de Pol Pot. Je ne vous confonds surtout pas avec ces gens-là, mais, malgré tout… Leur première décision, après la prise de Phnom Penh, a été d’interdire l’utilisation des noms. Cela voulait dire quelque chose ! Et l’on remplaçait le nom par le matricule.

Donc, le nom, ça compte, ça pèse, c’est déterminant et, pour la plupart de nos compatriotes, c’est une fierté. C’est même la seule fierté de beaucoup d’entre eux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n° 3867.

M. Jean-Christophe Fromantin. Avec cet article, effectivement, on gomme une référence, une référence qui donne à un enfant, à un adolescent, à un adulte, une identité dans une lignée, dans une famille, dans un cadre, ce qui est fondamental. Isoler l’individu de ce cadre, le considérer simplement dans un lien social ou affectif avec deux parents, c’est casser cette histoire, casser ces lignées, casser ce qui a fait une partie de l’identité de nos régions, de nos territoires, de notre pays. C’est aussi ce qui fait le plaisir de retrouver des ancêtres et de se projeter dans une culture.

C’est une rupture extrêmement grave, extrêmement importante que de casser cette appartenance à une lignée, ce repère, cette balise sur laquelle mes collègues ont très justement insisté et qui, au-delà de son aspect culturel, est fondamentale dans la construction d’un être humain.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Tout d’abord, monsieur Dhuicq, quand des parents attribuent à leur aîné un nom de famille, il s’impose à la fratrie dans son ensemble. Vous ne pouvez pas changer le nom de famille de vos enfants.

De quoi s’agit-il ? L’Assemblée nationale a introduit cet article par voie d’amendement pour harmoniser l’attribution du nom de famille en cas de désaccord entre la filiation adoptive et la filiation par le sang. Il y avait effectivement une différence de traitement entre les enfants. Dans le cas de la filiation adoptive, en cas de désaccord, il y avait adjonction du nom du père et du nom de la mère, alors que, dans le cas de la filiation par le sang, il n’y avait adjonction que du nom du père. Nous avons voulu harmoniser les choses. Lors de nos débats en première lecture, l’absence de choix a été considéré comme étant aussi un désaccord. Le Sénat a fort justement précisé les choses, en soumettant l’adjonction du nom du père et de la mère à la condition de la manifestation expresse, par l’un des deux parents, d’un désaccord sur le nom attribué à l’enfant. C’est évidemment une bonne chose. La commission s’y est montrée favorable, et cela répondait aux interrogations que vous vous êtes fait fort, monsieur Le Fur, d’exprimer en première lecture.

J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements de suppression.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Il n’en demeure pas moins, monsieur le rapporteur, que l’ordre alphabétique demeure. Et certains avaient dénoncé son absurdité, y compris dans vos rangs, mes chers collègues de gauche. Peut-être que le nombre de personnes concernées sera moindre, mais la logique demeure.

Ensuite, vous prétendez que, dans une fratrie, tout le monde portera toujours le même nom. Non. Se pose déjà le problème des demi-frères. Et que se passera-t-il lorsque la loi entrera en vigueur ? Le premier d’une fratrie aura-t-il déterminé l’ensemble des noms de ceux qui naîtront après la promulgation de la loi ? J’ai posé cette question en première lecture à Mme la garde des sceaux, et il n’y a pas été répondu. Soyons donc précis. Le nom, ça compte !

Un exemple me revient. À bien des égards, le Québec, le Canada français, les Canadiens français, dont je suis convaincu que certains d’entre vous les connaissent, est une nation orpheline, une nation orpheline de nous, de la France, abandonnée qu’elle a été au dix-huitième siècle, parce que certains intellectuels n’en avaient pas compris l’importance. Eh bien, dans cette nation orpheline, les gens sont extrêmement attachés à leur nom, à leur généalogie. Combien d’entre eux parcourent, qui la Bretagne, qui le Maine, qui la Normandie, pour retrouver des racines ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Cela veut dire quelque chose, et ce qui vaut pour cette nation est une réalité pour les individus : chacun a besoin de se rattacher à l’histoire, chacun a besoin de se situer. Priver les gens de cela, c’est constituer une amnésie, une amnésie sociale, une amnésie historique. Ne soyez donc pas surpris que nos jeunes ne sachent plus rien de l’histoire !

M. Jacques Myard. Très bien !

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Je veux vous lire deux articles de la Convention internationale des droits de l’enfant qui montrent à quel point cette question du nom est fondamentale : « L’enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a dès celle-ci le droit à un nom, le droit d’acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux. » L’article 8 stipule quant à lui : « Les États parties s’engagent à respecter le droit de l’enfant de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales. » Vous voyez bien que la question du nom est extrêmement importante dans la constitution de l’histoire d’un enfant et dans son parcours le plus intime. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(Les amendements identiques nos 3570, 2015, 54 et 3867 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Nous en venons à une nouvelle série d’amendements identiques, nos 55, 944, 1207 et 3480, qui sont défendus.

(Les amendements identiques nos 55, 944, 1207 et 3480, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je veux rappeler que j’ai posé une question. Si l’on considère une fratrie dont l’aîné porte un nom, que se passera-t-il après la promulgation de la loi ?

M. Erwann Binet, rapporteur. J’ai répondu !

M. Marc Le Fur. Non, vous avez répondu in abstracto, à propos de fratries dont tous les membres naîtront après la promulgation de la loi. Que se passera-t-il pour le frère et la sœur d’un enfant né avant la promulgation ? À ma connaissance, la loi ne dit rien.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.

M. Erwann Binet, rapporteur. Je vous ai répondu, monsieur Le Fur. Le nom porté par l’aîné s’imposera à l’ensemble de la fratrie, à l’ensemble de ceux qui auront la même filiation, même si l’aîné est né avant la promulgation de la loi. Je crois que cela répond à votre question.

Par ailleurs, il n’est pas question, madame Genevard, d’attribuer un matricule à l’enfant. L’enfant aura un nom.

Mme Annie Genevard. Je n’ai jamais parlé d’attribuer un matricule !

M. Erwann Binet, rapporteur. La lecture des stipulations de la Convention relative aux droits de l’enfant et l’allusion à Pol Pot m’ont fait douter un instant.

Le présent article stipule…

M. Guillaume Larrivé. La loi ne stipule pas, elle dispose !

M. Erwann Binet, rapporteur. …que, lorsque la mère exprime un désaccord sur le nom de famille attribué à son enfant, ce qui arrive, le nom du père ne s’impose pas exclusivement et que la mère a aussi la possibilité de donner son nom. L’enfant aura un nom, en l’occurrence à la fois le nom de son père et celui de sa mère.

Mme la présidente. Sur l’article 2, je suis saisi par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n° 3901.

M. Jean-Christophe Fromantin. L’article 2 prévoit que, en cas de désaccord entre les parents, signalé par l’un d’eux à l’officier d’état civil, l’enfant prend leurs deux noms, dans la limite du premier nom de famille de chacun d’eux, accolés dans l’ordre alphabétique. La rédaction retenue n’est pas satisfaisante, car elle ne prend pas en compte certaines situations particulières.

Nous pensons qu’il est préférable, dans l’intérêt de l’enfant, que les parents fassent conjointement la démarche, devant l’officier de l’état civil, de démontrer leur désaccord, afin d’éviter une initiative individuelle de l’un des deux parents qui irait à l’encontre des intérêts de l’enfant.

(L’amendement n° 3901, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour soutenir l’amendement n° 3903.

M. Jean-Christophe Fromantin. En l’état actuel du droit, l’enfant adopté reçoit, en l’absence de décision commune des conjoints, par application de la règle subsidiaire, le nom du père adoptif. Cette disposition ne peut, par principe, s’appliquer en cas d’une adoption par un couple de personnes de même sexe. En conséquence, le texte – plusieurs fois amendé – prévoit qu’en cas de désaccord entre les parents, l’enfant prend leurs deux noms dans la limite du premier nom de famille pour chacun d’eux, accolés selon l’ordre alphabétique. Nous sommes opposés au fait de ranger les deux noms dans l’ordre alphabétique. Cela aurait pour conséquence de concentrer les noms sur les treize premières lettres de l’alphabet.

(L’amendement n° 3903, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Au titre des explications de vote sur l’article 2, la parole est à M. Olivier Dussopt, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Olivier Dussopt. Nous voterons bien évidemment, et avec plaisir, pour cet article.

Nous souscrivons pleinement à toutes les réponses apportées par M. le rapporteur aux amendements de l’opposition portant sur la question du nom de famille. Nous savons que, derrière la discussion sur la transmission du patronyme, se cache un autre débat. Un certain nombre de nos collègues sous-entendent en effet que les enfants qui grandiront – certains grandissent déjà – dans des familles homoparentales seront plus sujets à des confusions et des difficultés dans la construction de leur personnalité. Nous devons les rassurer, même si je ne suis pas certains que nous y parviendrons.

Pour cela, et en réponse à leurs arguments, je les renvoie au compte rendu des auditions réalisées par M. le rapporteur. Je pense notamment aux contributions d’Irène Théry et d’Élisabeth Roudinesco…

Plusieurs députés du groupe UMP. Ce n’est pas cela qui nous convaincra !

M. Olivier Dussopt. …qui ont montré que ces enfants ne souffrent pas plus que les autres de problèmes de construction de leur personnalité, ni de confusion. La question du nom de famille n’est qu’un alibi, un prétexte à votre opposition à ce texte et à l’homoparentalité. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Nous voterons donc l’article 2 de ce projet de loi !

Mme la présidente. La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob. Je souhaite réagir aux propos tenus par notre collègue. Voilà un sujet éminemment important, sur lequel il aurait été utile de réaliser une étude d’impact ! On voit bien, pour de nombreuses questions soulevées par ce texte, la difficulté dans laquelle nous place l’absence d’étude d’impact : nous devons réagir à des présupposés militants. Je connais bien Mme Roudinesco : elle est militante. Son avis n’est pas fondé sur une étude scientifique !

M. Jacques Myard. Les études américaines disent exactement le contraire de Mme Roudinesco !

M. Christian Jacob. Mme Roudinesco milite : elle n’intervient que dans ce cadre-là.

Le Conseil constitutionnel sera attentif à cette absence d’étude d’impact. Sur des sujets aussi importants que celui-là, il aurait été vraiment nécessaire d’en réaliser une ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 2.

(Il est procédé au scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 112

Nombre de suffrages exprimés 112

Majorité absolue 57

(L’article 2 est adopté.)

Mme la présidente. Mes chers collègues, en votre nom à tous, je remercie les fonctionnaires de la séance, qui vous ont distribué les liasses d’amendements à une vitesse impressionnante. (Applaudissements.)

2

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la deuxième lecture du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)