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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIVe législature
Session ordinaire de 2012-2013

Compte rendu
intégral

Première séance du mercredi 5 décembre 2012

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Claude Bartolone

1. Questions au Gouvernement

Accusations portées à l’encontre de M. Jérôme Cahuzac

M. Daniel Fasquelle

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget

Inégalités territoriales en matière de santé

Mme Marie-Lou Marcel

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Comité interministériel aux droits des femmes : entreprenariat des femmes

Mme Dominique Orliac

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement

Politique énergétique

M. Jean-Jacques Candelier

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Lutte contre les stéréotypes sexistes

Mme Pascale Crozon

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement

Site de Florange d’ArcelorMittal

Mme Anne Grommerch

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Problèmes industriels dans le Soissonnais

Mme Marie-Françoise Bechtel

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif

EADS

M. Jean-Luc Moudenc

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

M. Éric Alauzet

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances

Débat sur le mariage entre personnes du même sexe

M. Hervé Mariton

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

Gaspillage alimentaire

M. Dominique Potier

M. Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l’agroalimentaire

Distorsions de concurrence

M. Thierry Benoit

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé des affaires européennes

Mariage entre personnes du même sexe

Mme Annie Genevard

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Réunion du comité des signataires de l’accord de Nouméa

Mme Sonia Lagarde

M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer

Victimes du terrorisme

M. Gérald Darmanin

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur

Suspension et reprise de la séance

Présidence de Mme Sandrine Mazetier

2. Fonctionnement des services de renseignement dans le suivi et la surveillance des mouvements radicaux armés

Explications de vote

M. Christophe Cavard, M. Alain Tourret, M. Jean-Jacques Candelier, M. Dominique Raimbourg, M. Alain Marsaud, M. Éric Ciotti, M. Philippe Folliot

Vote sur la demande de création de la commission d’enquête

Suspension et reprise de la séance

3. Projet de loi de finances rectificative pour 2012 (suite)

Rappels au règlement

M. Charles de Courson

M. Hervé Mariton

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget

M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

M. Charles de Courson

M. Hervé Mariton

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

M. Charles de Courson

M. Daniel Goldberg

Mme la présidente

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances

Seconde partie (suite)

Après l’article 24 (suite)

Amendements nos 5 rectifié, 372 (sous-amendement), 364 (sous-amendement), 107 (sous-amendement), 355 (sous-amendement), 365 (sous-amendement), 366 (sous-amendement), 108 (sous-amendement), 367 (sous-amendement), 350 (sous-amendement), 336 (sous-amendement), 356 (sous-amendement), 112 (sous-amendement), 113 (sous-amendement), 115 (sous-amendement)

Suspension et reprise de la séance

Amendements nos 5 rectifié, 93

Présidence de Mme Laurence Dumont

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances

M. Christian Eckert, rapporteur général

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances

M. Christian Eckert, rapporteur général

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances

M. Charles de Courson

M. Patrick Hetzel

M. Philippe Vigier

4. Ordre du jour de la prochaine séance

Présidence de M. Claude Bartolone

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

Questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Accusations portées à l’encontre de M. Jérôme Cahuzac

M. le président. La parole est à M. Daniel Fasquelle, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Daniel Fasquelle. Ma question s’adresse à M. Jérôme Cahuzac, ministre du budget.

Monsieur le ministre, vous voulez faire de la lutte contre la fraude fiscale un axe prioritaire de votre action gouvernementale. Vous avez, dans ce combat, notre plein et entier soutien. Vous êtes aussi pris aujourd’hui dans une polémique depuis les révélations de Mediapart. À juste titre, les Français s’interrogent et vous demandent la plus grande transparence.

Pour dissiper tous les doutes, dans l’intérêt de tous, Pouvez-vous répondre précisément, cet après-midi, aux trois questions suivantes ?

Première question : est-il exact, monsieur le ministre, que vous avez eu un compte non déclaré à l’Union des banques suisses de Genève pendant de longues années ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Deuxième question : est-il exact que vous vous êtes déplacé en Suisse début 2010 et que vous avez clôturé ce compte à la veille de votre élection à la présidence de la commission des finances ?

M. Philippe Martin. Pauvre type !

M. Daniel Fasquelle. Troisième question : est-il exact que les avoirs ont ensuite été transférés dans un paradis fiscal en Asie ? (Mêmes mouvements.)

Monsieur le ministre, ces accusations sont d’une extrême gravité. Il est essentiel que vous disiez toute la vérité, cet après-midi, devant la représentation nationale et devant les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget. (Les députés des groupes SRC, écologiste et RRDP se lèvent et applaudissent.)

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Monsieur le député, j’appartiens au gouvernement de Jean-Marc Ayrault, qui a été investi par la représentation nationale. Votre question est donc légitime et il est normal que j’y réponde.

Je démens catégoriquement les allégations figurant sur le site Mediapart. Je n’ai pas, monsieur le député, je n’ai jamais eu de compte à l’étranger, ni maintenant, ni auparavant. Je démens donc ces accusations, et j’ai saisi la justice d’une plainte en diffamation, car ce n’est que devant la justice, hélas, que les accusateurs doivent prouver la réalité des allégations qu’ils avancent.

Et c’est donc devant la justice que je m’expliquerai face à ces contradicteurs, en attendant d’eux des éléments probants qui, à ce jour, font manifestement défaut. Merci, monsieur le député, de m’avoir permis de le dire devant la représentation nationale. (Les députés des groupes SRC, écologiste et RRDP se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UDI et sur quelques bancs du groupe UMP.)

Inégalités territoriales en matière de santé

M. le président. La parole est à Mme Marie-Lou Marcel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Marie-Lou Marcel. Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Élue d’un territoire rural, l’Aveyron, je constate au quotidien la dure réalité de l’accessibilité aux soins. Les chiffres sont éloquents : 30 % des généralistes partiront à la retraite d’ici cinq ans ; leur moyenne d’âge frôle les 54 ans. Il existe une très grande disparité entre les départements, mais aussi à l’intérieur des départements. C’est une vraie menace pour la médecine générale dans les dix ans qui viennent.

Face à ce problème de répartition territoriale, les gouvernements de droite successifs n’ont rien fait, ou si peu. Il en résulte une triple fracture : une fracture sociale, qui n’a pas été réduite mais au contraire aggravée par la droite ; une fracture sanitaire, qui fait que beaucoup de nos concitoyens renoncent aujourd’hui à se soigner ; une fracture territoriale, qui rend l’accès aux soins de plus en plus inégalitaire.

La loi HPST a manqué cruellement d’ambition en ce domaine. Face à ce renoncement, François Hollande a pris, lui, des engagements forts pour lutter contre les déserts médicaux : meilleure répartition des médecins ; création de pôles de santé de proximité ; délai maximum d’une demi-heure pour accéder à des soins d’urgence.

Je souligne au passage le rôle déterminant de nos hôpitaux de proximité dans cette prise en charge. Vous-même, madame la ministre, avez déclaré, lors de l’examen du PLFSS pour 2013, que le Gouvernement allait s’attaquer avec résolution aux déserts médicaux, sans contrainte ni pression.

Vous avez ajouté que tout n’avait pas été tenté en matière d’incitation. Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous dire quelles mesures vous comptez prendre pour rétablir une égalité médicale territoriale qui garantisse à chacun un égal accès aux soins ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministredes affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, madame la députée, vous avez raison de souligner l’importance de garantir à chacun de nos concitoyens, où qu’il habite, un accès à des soins de qualité. Il n’est pas acceptable que des cabinets médicaux ne puissent pas trouver de successeur aujourd’hui. Il n’est pas acceptable que certains de nos concitoyens aient à effectuer de longs trajets pour consulter un médecin, généraliste ou spécialiste, ou qu’ils aient à attendre de longs mois avant d’obtenir un rendez-vous pour une consultation.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement s’est fermement engagé à prendre en compte la situation de ce que l’on appelle désormais, malheureusement, des déserts médicaux. J’aurai l’occasion d’annoncer le 13 décembre un plan global sur cette question. Sans attendre, nous avons proposé dans le PLFSS pour 2013, adopté il y a quelques jours, la création de 200 postes de praticiens territoriaux de médecine générale, des médecins libéraux dont le revenu sera garanti pendant deux années. Il ne s’agit pas de créer une nouvelle incitation financière, mais de sécuriser le moment de l’installation des jeunes médecins. Les internes en médecine générale ont marqué leur approbation et leur soutien à cette mesure. Il y va de notre capacité à permettre à de jeunes praticiens de s’installer dans de bonnes conditions, alors même qu’ils sont confrontés aux charges de leur profession.

M. Bernard Roman. Très bien !

Mme Marisol Touraine, ministre. Cette mesure, à elle seule, ne suffira pas. C’est la raison pour laquelle j’annoncerai dans quelques jours au nom du Gouvernement un plan global et cohérent de prise en compte des déserts médicaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Comité interministériel aux droits des femmes :
entreprenariat des femmes

M. le président. La parole est à Mme Dominique Orliac, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

Mme Dominique Orliac. Madame la ministre des droits des femmes, un comité interministériel aux droits des femmes s’est tenu à Matignon vendredi dernier, pour la première fois depuis douze ans. C’est un événement majeur, que je tiens à saluer publiquement dans cet hémicycle. Le sujet fait d’ailleurs consensus, par-delà les appartenances politiques.

Toute une série de mesures ont été annoncées : certaines peuvent être mises en place immédiatement, d’autres exigent des réformes en profondeur. Ambitieuses et souvent originales, elles concernent tous les pans de la société : école, culture, médias, sports, mais aussi universités, égalité professionnelle, santé, diplomatie ou parité politique.

L’un de ces sujets attire particulièrement mon attention, tant le chemin à parcourir est encore long : celui de l’accompagnement de l’entreprenariat féminin. Je pense que nos concitoyennes se retrouveront dans mes propos, car beaucoup d’entre elles doivent faire face à des difficultés considérables lorsqu’elles se lancent dans l’aventure entrepreneuriale.

Cela se ressent dans les chiffres : les femmes ne représentent que 30 % des créateurs et repreneurs d’entreprises en France, seulement 12 % des chefs d’entreprise de plus de 50 salariés et 10 % des chefs d’entreprises innovantes. Pourtant, 46 % des femmes sortent diplômées de l’enseignement supérieur contre 34 % des hommes. C’est donc que notre système présente des lacunes qui pénalisent notre activité économique. Nous devons les pallier, afin de mieux exploiter ces potentialités.

Une étude de l’Union européenne a montré que si la France arrivait à un taux d’emploi des femmes équivalent à celui des hommes, elle pourrait accroître jusqu’à 40 % son potentiel de croissance. C’est dire tout l’enjeu que recouvre la question de l’entreprenariat féminin. Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous faire part de propositions concrètes dans ce domaine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, madame la députée, ce que vous dites est fort juste. Les inégalités entre les sexes sont décidément partout, y compris dans la création d’entreprises. La réussite tient à la confiance que les femmes ont en elles-mêmes ou qu’on leur donne lorsqu’elles construisent leur projet professionnel. Les inégalités résident dans l’accès au crédit et dans l’accès au financement des collectivités publiques ou de la Caisse des dépôts.

J’étais encore il y a deux jours avec les femmes des Atelières, qui ont créé cette SCOP à Lyon autour de la bonneterie, une aventure incroyable dont elles m’ont raconté les détails. Dans ce parcours du combattant, être femme et mère n’a pas été pour elles une sinécure : il a fallu deux fois plus d’énergie, deux fois plus de force de conviction, deux fois plus d’inventivité.

Eh bien, le Gouvernement répond qu’il faut deux fois plus d’égalité ! C’est pourquoi nous avons adopté, dans le cadre du comité interministériel aux droits des femmes, un large plan pour le développement de l’entreprenariat féminin.

Ce plan prévoit un appel à projets, qui sera lancé courant 2013 pour promouvoir l’entreprenariat auprès des filles comme des garçons, en utilisant des réseaux d’appui dédiés. Il prévoit aussi de renforcer les moyens du fonds de garantie à l’initiative des femmes, le FGIF. Par ailleurs, l’entreprenariat féminin fera l’objet de démarches de promotion auprès des banques. Nous créerons des réseaux afin de permettre aux femmes d’échanger leurs expériences, à la manière des réseaux de grandes entreprises. Surtout, les femmes font leur entrée dans les dispositifs de droit commun : la banque publique d’investissement, qui voit le jour, doit permettre aux femmes, comme aux hommes, de créer leur entreprise. C’est pourquoi nous avons insisté pour que la composition de ces instances soit paritaire. Nous veillerons à ce que les chambres de commerce et d’industrie tendent aussi vers cette parité. Enfin, l’égalité filles-garçons sera l’une des priorités du nouveau service public d’orientation.

La société que nous voulons construire, madame la députée, est une société de l’égalité et de la performance. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, RRDP et écologiste.)

Politique énergétique

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour le groupe de la gauche démocrate et républicaine.

M. Jean-Jacques Candelier. Monsieur le Premier ministre, le groupe E.ON réalise des milliards de profit. Il compte pourtant fermer plusieurs de ses centrales et licencier des centaines de salariés. Dès aujourd’hui, l’État doit intervenir. Il est intolérable qu’E.ON ne respecte pas les accords de 2010, où il s’engageait à ne pas fermer les tranches charbon avant 2015. De même, à Hornaing, le projet de tranche 4 au gaz est finalement abandonné, alors que près de 30 millions d’euros de travaux ont été réalisés dans ce but. À cela s’ajoute un chantage cynique, E.ON faisant miroiter aux salariés un échelonnement des fermetures de centrale, moyennant des « efforts d’économies et d’organisation ».

Le Gouvernement ne peut se satisfaire de soutenir le seul projet biomasse de Gardanne. Ce projet de reconversion ne doit pas cacher le désengagement massif d’E.ON, sa réalisation étant d’ailleurs soumise à une négociation effectuée sous la pression intense de la direction.

Une politique nationale ne peut pénaliser le Douaisis, secteur durement touché par la fermeture de la gare de triage de Somain ou les craintes qui pèsent sur Saint-Gobain à Aniche. Pour Hornaing, la CGT porte le projet d’une centrale au charbon avec captage de CO2.

Une part de production d’électricité thermique est indispensable pour couvrir les besoins en période de pointe, si l’on veut éviter de subir des pannes gigantesques en hiver. Elle est aussi nécessaire pour développer les énergies renouvelables. Comme la sidérurgie, l’énergie est une industrie stratégique, qui conditionne les autres secteurs : le Gouvernement ne peut laisser les calculs financiers des actionnaires décider de la vie du pays !

Monsieur le Premier ministre, contrairement à ce que vous avez fait pour ArcelorMittal, où vous avez cédé au diktat du MEDEF, comptez-vous nationaliser dans l’urgence la société E.ON, afin de planifier la production d’électricité, ou trouver un repreneur sérieux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le député, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Mme Delphine Batho, retenue à la conférence de l’ONU sur le climat.

La question que vous posez est essentiellement une question de stratégie énergétique. Les engagements du Président de la République en matière de transition énergétique sont clairs, ils ont été rappelés à la Conférence environnementale des 14 et 15 septembre derniers. Il s’agit de faire de la sobriété et de l’efficacité énergétique la pierre angulaire de la politique énergétique du Gouvernement, de réduire la part d’origine nucléaire de 75 à 50 % d’ici à 2025 et de faire que, d’ici là, la France s’engage résolument sur la voie des énergies renouvelables. En cela, nos engagements sont conformes aux engagements européens en matière de lutte contre le changement climatique ainsi qu’à l’objectif d’une réduction de 20 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020.

Le débat national sur la transition énergétique a été lancé ; il se conclura en juin prochain, avec une loi de programmation examinée fin 2013. D’ici à 2025, les émissions de CO2 devront être résolument réduites par rapport à 2011.

Pour ce qui concerne E.ON ou tout autre opérateur, la situation devra être évaluée à l’aune de nos objectifs énergétiques et environnementaux, mais également en veillant à prendre en compte les situations économique et sociale. Nous restons ouverts à toute solution industrielle durable, dès lors qu’elle est conforme aux objectifs que nous avons précisés, en particulier dans votre région, où les conséquences de la désindustrialisation sont particulièrement sensibles.

Par ailleurs, la proposition de loi de François Brottes traite de cette question, et il faudra résolument s’en inspirer.

Enfin, il est important que la transition énergétique s’effectue dans des conditions sociales exemplaires ; tel est l’engagement d’Arnaud Montebourg et de l’ensemble du Gouvernement.

Lutte contre les stéréotypes sexistes

M. le président. La parole est à Mme Pascale Crozon, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Pascale Crozon. Ma question s’adresse à Mme la ministre des droits des femmes. Le 6 mars 2011, le gouvernement précédent repoussait l’idée d’un ministère des droits des femmes de plein droit, au motif que tous les ministères devraient s’en préoccuper. En réunissant vendredi dernier le premier comité interministériel sur la question depuis douze ans, le Premier ministre a fait la démonstration que les deux approches n’étaient pas nécessairement contradictoires. Bien au contraire, votre ministère joue désormais un rôle déterminant pour impulser une dynamique collective et mobiliser l’ensemble du Gouvernement sur des objectifs communs.

Je salue l’ambition de la feuille de route adoptée à l’issue de ce comité interministériel. Au-delà de la nécessaire correction des inégalités femmes-hommes dans le monde professionnel ou en matière d’exposition aux violences, le Gouvernement entend en effet les prévenir à la racine, en s’attaquant à la formation des préjugés sexistes dans notre éducation et dans les représentations que notre société se donne d’elle-même.

Je pense en particulier aux médias et aux stéréotypes inégalitaires qu’ils véhiculent, notamment dans les mondes culturel et sportif. L’essentiel des lieux de culture sont toujours dirigés par des hommes – c’est le cas de 84 % des théâtres et de 89 % des institutions musicales –, tandis que les réalisatrices de cinéma sont sous-représentées dans l’accès aux subventions publiques, aux réseaux de diffusion ou à la programmation télévisée. De la même façon, comment ne pas s’étonner que le sport télévisé soit à 80 % masculin, lorsque les femmes représentent 50 % des licenciés et que nos athlètes féminines obtiennent des titres prestigieux ?

Ma question, madame la ministre, est donc la suivante : de quels leviers le Gouvernement dispose-t-il pour rééquilibrer ces représentations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement.

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, porte-parole du Gouvernement. Madamela députée, les chiffres que vous citez sont éloquents, en effet, et reflètent la triste réalité de notre pays en 2012. Ces inégalités, cette reconduction, ce confort des stéréotypes sont présents dans tous les secteurs, mais dans les médias et le sport, ils sont peut-être plus préoccupants encore, dans la mesure où ces domaines véhiculent des images, des représentations, qui produisent ensuite des effets sur le reste de la société.

Concrètement, qu’allons-nous faire et qu’a décidé le comité interministériel ? Nous allons renforcer les pouvoirs de régulation du CSA, afin qu’il puisse veiller à la promotion de l’image des femmes et qu’il lutte contre la diffusion de stéréotypes sexistes ou d’images dégradantes dans les programmes audiovisuels. Nous avons décidé que, dans les conventions signées avec France Télévisions et Radio France, notamment par ma collègue chargée de la culture et de la communication, nous veillerions à introduire des clauses pour promouvoir une meilleure image des femmes dans le service public, notamment en augmentant le nombre d’expertes qui interviennent, car le manque est criant en la matière.

Toujours en lien avec le ministère de la culture, la parité sera recherchée dans les nominations des dirigeants des établissements publics culturels. Enfin, une clause de promotion de l’égalité sera mise en œuvre dans toutes les conventions de financement conclues avec les acteurs de la politique culturelle.

S’agissant du sport, domaine sur lequel vous avez été nombreux – et sur tous les bancs – à attirer mon attention, nous avons travaillé, avec Mme la ministre des sports, Valérie Fourneyron, à ce que la parité dans la composition des instances fédérales soit désormais un objectif et à ce que des conventions sur la promotion du sport féminin soient signées avec les instances fédérales. Ces conventions feront l’objet d’un suivi, notamment par Laura Flessel dans le cadre de la mission qui lui a été confiée. Voilà quelques-unes des mesures que nous avons adoptées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Site de Florange d’ArcelorMittal

M. le président. La parole est à Mme Anne Grommerch, pour le groupe Rassemblement – Union pour un mouvement populaire (Applaudissements sur les bancs des groupes Rassemblement-UMP et UMP.)

Mme Anne Grommerch. Monsieur le Premier ministre, mercredi dernier, votre ministre du redressement productif recevait les élus mosellans et les syndicats d’ArcelorMittal afin de leur confirmer l’existence d’un repreneur pour le site de Florange, moyennant 400 millions d’euros d’investissement. Cette nouvelle a fait naître beaucoup d’espoir.

Vendredi soir, vous le désavouez publiquement en indiquant qu’il n’y aurait pas de nationalisation parce que, je vous cite, « elle n’est pas efficace face à un problème de débouchés pour une entreprise ou face à un problème de compétitivité ».

Vous annoncez vous-même qu’un accord secret a été trouvé avec M. Mittal, lequel garantirait la pérennisation des activités liées à la filière froide, et qu’il n’y aurait pas de plan social sur le site de Florange. C’est un écran de fumée ! Vous savez parfaitement que ces 629 emplois ne seront pas sauvegardés, avec des départs à la retraite non remplacés, des mesures de départs volontaires et des mutations vers les autres sites du groupe.

De surcroît, vous ne dites pas un mot des 130 salariés de GEPOR ni de tous les sous-traitants, directement touchés par l’arrêt définitif des hauts-fourneaux et dont les emplois sont menacés. Que comptez-vous faire pour eux ?

M. Jacques Valax. Et vous, qu’avez-vous fait ?

Mme Anne Grommerch. Ici même, hier après-midi, vous déclariez avoir obtenu 180 millions d’euros d’investissement au cours des cinq prochaines années. Depuis hier soir, ce ne sont déjà plus que 53 millions. Quelles explications pouvez-vous nous fournir ? Comment comptez-vous contraindre M. Mittal à investir dès 2013 et non pas en 2014 comme cela a été annoncé ?

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous présenter à la représentation nationale, qui aurait aimé en prendre connaissance autrement que dans un grand journal du soir, le contenu de l’accord que vous avez signé avec M. Mittal ?

M. Jean-Claude Perez. Vous étiez occupés !

Mme Anne Grommerch. Pourquoi la piste du repreneur, annoncée par votre ministre, a-t-elle été écartée ?

Enfin, quelles garanties pouvez-vous nous donner sur le projet Ulcos alors même que les coupeurs des hauts-fourneaux vont être fermés, avec les conséquences que l’on connaît ?

Les salariés de Florange, les Lorrains et tous les Français ont droit à la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe Rassemblement-UMP et sur plusieurs bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. Madame la députée Anne Grommerch, votre nouveau groupe m’avait informé que vous alliez me poser cette question. (Exclamations sur les bancs des groupes Rassemblement-UMP et UMP.) Je suis sensible à votre courtoisie, je reconnais là la marque de la création de ce nouveau groupe et j’en remercie son président. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je constate que l’autre groupe proteste ! (Mêmes mouvements.)

Madame la députée, l’affaire que vous évoquez est suffisamment sérieuse pour ne pas vous laisser aller à répéter des inexactitudes, à commencer par l’existence d’un accord secret. Il n’y a pas d’accord secret (« Si ! » sur les bancs des groupes Rassemblement-UMP et UMP), mais il y a, de ma part et de celle du Gouvernement, du respect pour les représentants du personnel que je recevrai tout à l’heure et à qui je montrerai et donnerai l’accord qui a été signé entre le Gouvernement et le groupe Mittal. (« Et nous ? » sur les bancs des groupes Rassemblement-UMP et UMP.)

C’est bien la moindre des choses.

Pour ce qui concerne les élus, je m’occuperai d’abord des élus de la région, toutes sensibilités politiques confondues, que je recevrai demain matin.

Quant au Parlement, la commission des affaires économiques, présidée par François Brottes que je remercie, a souhaité jouer son rôle et vérifier que l’accord signé serait bien respecté. Vous serez associés et je fais confiance à la représentation nationale pour que les engagements pris soient pleinement tenus.

Je dois également la vérité aux salariés. Je ne suis pas le chef d’un Gouvernement qui tiendrait de fausses promesses ! (Exclamations sur les bancs des groupes Rassemblement - UMP et UMP.) Je ne suis pas comme ceux qui, voici cinq ans, promettaient de sauver Gandrange mais qui ont finalement fait de ce site une friche industrielle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Nous, nous avons obtenu un investissement de 180 millions sur le site de Florange, dans la partie « aval », dans la partie du froid, dans l’emballage, qui était soumis à un risque d’abandon.

Parallèlement, nous avons obtenu qu’il n’y ait pas de plan social à Florange. Beaucoup d’autres salariés, en France, soumis aujourd’hui à des plans sociaux, voudraient bien en bénéficier aussi. C’est cela, l’acquis du Gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Quant à l’avenir industriel, celui d’une industrie moderne, d’une industrie qui s’inscrit dans la transition énergétique, nous avons obtenu que soit repris, parce qu’il était à l’abandon, le projet Ulcos…

M. Alain Marty. Menteur !

M. Jean-Marc Ayrault, Premier ministre. …qui nécessite des investissements très importants pour la recherche et le développement, la captation de CO2. Cela ne s’improvise pas.

Le Gouvernement, lui, est prêt à engager de l’argent public : 150 millions ont été réservés. Le Gouvernement prend ses responsabilités : il agit pour l’emploi d’aujourd’hui, il agit pour l’emploi de demain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC, exclamations sur les bancs des groupes Rassemblement-UMP et UMP.)

Problèmes industriels dans le Soissonnais

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Bechtel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen

Mme Marie-Françoise Bechtel. Monsieur le ministre du redressement productif, vous avez souligné l’importance de la mobilisation nationale autour de l’industrie et vous savez que nous sommes nombreux à soutenir cet objectif, de même que nous attendons beaucoup de la négociation conduite par le ministre du travail sur la sécurisation de l’emploi.

Dans l’attente de dispositifs législatifs pouvant rendre de l’oxygène à une industrie qui s’asphyxie lentement, des salariés sont durement touchés dans des zones où l’affaissement industriel atteint ses limites. C’est le cas du Soissonnais, où deux des dernières entreprises industrielles, Focast, producteur de pièces de fonte et Baxi, spécialiste de chaudières, sont en voie de liquidation judiciaire mettant en cause la vie de 300 travailleurs et de leurs familles, sans compter les emplois qui leur sont liés, et malgré les efforts déployés depuis de longs mois par les élus locaux et les salariés avec l’appui, très apprécié, de vos services.

D’autres entreprises sont aujourd’hui menacées dans ce même bassin d’emploi qui a perdu près de 40 % de son activité économique en dix ans. Nous en arrivons à une situation dramatique et ce n’est sans doute pas, hélas, un cas isolé.

De quels moyens l’État dispose-t-il pour aider les entreprises et les territoires qui traversent de telles crises ? Lorsqu’une zone d’activité en arrive à une telle situation, n’y a-t-il pas urgence à revoir notre dispositif d’aides publiques ? Ne doit-on pas envisager de tenir un comité interministériel d’aménagement du territoire pour revoir les conditions mêmes dans lesquelles un territoire qui a des ressources industrielles et des compétences humaines pourrait renouer avec l’activité économique ?

Je pose ces questions au nom des salariés qui manifestent aujourd’hui à Paris et je vous suis d’avance reconnaissante, monsieur le ministre, de l’attention que vous leur porterez. En participant à cette mobilisation nationale dont vous avez su exprimer avec force la nécessité, ils montrent toute leur détermination à reconstruire un avenir pour eux, pour leur territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre du redressement productif. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC – Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et écologiste et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Madame la députée Marie-Françoise Bechtel, vous soulignez à juste titre que l’ensemble du territoire est aujourd’hui affecté par l’affaissement de l’économie. En temps normal, notre pays connaît 40 000 faillites ; nous en sommes à 62 000 ou 63 000. Notre pays est en difficulté et la Picardie n’échappe pas à cette loi cruelle.

Vous citez deux entreprises dont l’une est en liquidation judiciaire et l’autre a accepté de mettre en suspens le plan social en attendant que soient dégagées des solutions industrielles avec l’entreprise, le commissaire au redressement productif et l’ensemble des partenaires locaux, puisqu’il s’agit d’une mobilisation nationale et locale.

Nous voyons bien, malheureusement, que certains territoires, comme le Soissonnais, sont particulièrement affectés. C’est une des raisons pour lesquelles, en sus des aides particulières à la réindustrialisation qui permettent de financer de nouveaux projets sur la base de nouvelles technologies, de nouvelles créations industrielles, nous envisageons de dresser la cartographie des régions les plus touchées par la crise pour qu’elles puissent bénéficier d’un traitement prioritaire.

C’est tout le sens du travail que Mme Cécile Duflot, ministre de l’égalité du territoire, a engagé pour redéfinir cette carte des aides à finalité régionale.

Mme Claude Greff. Ah ! Mme Duflot !

M. Arnaud Montebourg, ministre. Un comité interministériel se tiendra bientôt sous son égide et celle de M. le Premier ministre. Soyez assurée que nous sommes attentifs à ces régions plus touchées que d’autres et qui ont plus besoin que les autres du soutien de la nation tout entière. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

EADS

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Moudenc, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Jean-Luc Moudenc. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Des négociations franco-allemandes sur la modification du capital d’EADS sont en cours. Un accord serait imminent. Cette recomposition intervient en raison, notamment, du désengagement de Daimler et de Lagardère, dont le président a montré peu d’intérêt pour EADS.

Selon plusieurs sources, la France deviendrait actionnaire direct d’EADS à hauteur de 15 % du capital – avant de passer à 12 % – et l’Allemagne à hauteur de 12 %.

Dans le même temps, EADS réfléchirait au rachat de plusieurs millions de ses propres actions pour soutenir le cours de bourse.

Pourtant, Tom Enders, président d’EADS, déclarait le 8 novembre dernier que « jusqu’à la fin de l’année, générer de la trésorerie sera l’une des principales priorités d’EADS ».

Or les trésoreries d’EADS et d’Airbus, n’ont pas vocation à permettre à Daimler et à Lagardère d’optimiser leur gain financier en raison de leur sortie du capital.

Alors, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous indiquer quels seront la place et le rôle de l’État français au sein d’EADS et de son conseil d’administration ? Quelle va être la répartition du capital d’EADS ?

Pouvez-vous nous assurer que vous influerez afin que la trésorerie d’EADS soit sanctuarisée pour la stabilité, la croissance et l’avenir du groupe ? Je pense aux 133 000 salariés d’EADS, d’Eurocopter, d’Astrium, de Cassidian et, naturellement, d’Airbus.

Pouvez-vous, enfin, nous assurer que vous avez suffisamment et prioritairement pris en considération toute la mesure des intérêts souverains, stratégiques et économiques d’EADS et d’Airbus pour la France ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le député, je veux d’abord rappeler – mais c’est une évidence que tout le monde partage – l’importance fondamentale que l’État attache à EADS. Nous avons fait le choix, en 2000, de créer cette grande entreprise. Nous pouvons nous en féliciter, car elle marche bien. Son carnet de commandes est plein. Il concerne aujourd’hui 4 000 appareils. Nous disposons, avec EADS, de tous les atouts pour être au premier rang de la compétition mondiale. Et j’ai, comme vous, le souci des 133 000 salariés du groupe.

Il est exact que Daimler, qui est l’un des actionnaires fondateurs du conseil d’actionnaires, souhaite se désengager, ce qui est son droit. Dans ce contexte, l’État français, qui est actionnaire indirect à hauteur de 15 %, est en discussion avec l’État allemand pour anticiper la sortie de ce partenaire industriel.

Les discussions ont lieu de façon évidemment discrète, voire secrète, avec un objectif premier, qui est de préserver les intérêts de la France et de l’Allemagne, et la parité franco-allemande. Cet équilibre est fondamental pour nous, puisque nous sommes fondateurs, au premier rang, de cette entreprise.

Les discussions avancent bien. Je disais qu’elles sont discrètes : chacun peut comprendre ici que, s’agissant d’une société cotée, je n’ai pas à commenter des informations de presse ou à donner des détails. Mais enfin, je veux vous dire que nous sommes évidemment attachés aux intérêts stratégiques, industriels et financiers d’EADS, ainsi qu’aux sites en France – je pense notamment au site de Toulouse.

Vous pouvez faire confiance au Président de la République et au Gouvernement…

M. Philippe Meunier. C’est bien le problème ! Peut-on leur faire confiance ?

M. Pierre Moscovici, ministre. …pour conduire ce dossier à bonne fin. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi

M. le président. La parole est à M. Éric Alauzet, pour le groupe écologiste.

M. Éric Alauzet. Monsieur le ministre de l’économie et des finances, nous partageons une obsession : la création d’emplois, pour redonner de l’espoir aux Français.

La politique libérale relayée par le précédent gouvernement a conduit au déclin de notre industrie et au chômage massif, en progression constante depuis deux ans. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC. - Exclamations sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.) Oui, deux ans, mesdames et messieurs de l’opposition !

Pour répondre à cette urgence, nous allons créer, avec les emplois d’avenir et les contrats de génération, 300 000 emplois d’ici à la fin 2013, pour un coût équivalent aux 4,5 milliards engloutis par la précédente majorité au profit des heures supplémentaires. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Hier, le crédit d’impôt compétitivité emploi a été adopté. Nous souhaitions un dispositif plus concentré sur nos TPE, PME et ETI, notamment dans l’industrie. Nous avons proposé, comme pour la BPI, mais cette fois sans succès, des critères écologiques et énergétiques pour préparer la mutation vers une économie moderne, robuste et plus compétitive.

Le financement passe en partie par l’augmentation de la TVA. Nous n’avons pas d’objection sur le principe. Vous avez souhaité faire vite, fort et simple. Dont acte. Néanmoins, les créations d’emplois ne sont pas assurées. En revanche, avec une éventuelle augmentation de la TVA de 7 à 10 % dans le secteur du bâtiment, le risque de perte d’emplois est réel. Il est évalué à 18 000, ce qui irait à l’encontre de nos objectifs. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)

Tout aussi réel est le risque de ralentissement de la construction de logements sociaux, ou d’atteinte au pouvoir d’achat des habitants bénéficiaires des services publics écologiques primaires de l’eau, de l’assainissement, des déchets et des transports.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer que le travail va reprendre prochainement avec le Parlement pour définir les moyens qu’il convient de mettre en œuvre afin de financer définitivement le crédit d’impôt, notamment avec la TVA ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.

M. Pierre Moscovici, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le député, ici même a eu lieu hier soir le débat sur l’amendement au projet de loi de finances rectificative créant le crédit d’impôt compétitivité emploi, qui a été voté par une large majorité.

Les préoccupations que vous exprimez, c’est-à-dire faire en sorte que ce soient les entreprises de taille intermédiaire, les petites et moyennes entreprises qui soient les fers de lance de notre économie, ont été et seront prises en compte.

Il est évident – cela n’a pas été dit parce que c’eût été redondant – que tout ce qui va dans le sens de la transition écologique et énergétique est au cœur de la politique du Gouvernement, et le crédit d’impôt va y contribuer.

Mais vous m’interrogez sur les taux de TVA. Nous avons souhaité, par souci de transparence, en débattre ici même. Nous allons proposer un nouveau triptyque, qui est simple : 5 %, 10 %, 20 %.

Ce qui a été dit hier – c’était notamment la position du rapporteur général du budget –, c’est que nous avons du temps pour travailler sur ce sujet, puisque c’est au 1er janvier 2014 que cette nouvelle modulation sera applicable. Nous n’avons pas souhaité entrer tout de suite dans une typologie trop étroite. Nous faisons confiance au Parlement, tout au long de l’année 2013, pour élaborer le dispositif.

Des préoccupations légitimes ont été exprimées, par exemple sur le logement social. Elles seront entendues, et c’est le Parlement tout entier qui pourra en débattre, notamment dans le cadre de la commission des finances.

J’ajouterai deux points.

Premièrement, nous devons veiller à ce que si l’on augmente ici, on diminue là, et réciproquement. Autrement dit, il faut que le rendement de la mesure soit constant.

Deuxièmement, nous devons aussi tenir compte de la vigilance de l’Union européenne, qui exigera trois taux et que le dispositif ne soit pas trop subtil, afin que nous ne soyons pas accusés de distorsion de concurrence.

En tout cas, je veux vous dire notre totale confiance dans le Parlement et la disponibilité du Gouvernement à travailler avec vous sur cette question. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Débat sur le mariage entre personnes du même sexe

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire

M. Hervé Mariton. Ma question s’adresse à Mme Filippetti, ministre de la culture.

Jeudi dernier, lors d’un débat organisé par France Télévisions, un sénateur maire socialiste de Paris a fait le choix de couper le courant pendant l’intervention d’une personne défavorable au projet de loi sur le mariage et l’adoption pour les personnes du même sexe. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Cet acte inqualifiable m’amène à vous demander quel message vous comptez adresser aux journalistes, à France Télévisions, aux téléspectateurs et aux Français.

M. Jean Glavany. Politicien !

M. Hervé Mariton. Madame le ministre, vous êtes aussi une ministre socialiste. Lorsqu’un parlementaire socialiste a un comportement de ce type, nous aimerions savoir si c’est votre vision, à vous aussi, de la dignité du débat.

Nous, parlementaires UMP, organisons sur le terrain des réunions publiques pluralistes. Nous participons aussi, c’est notre droit, notre devoir, à des manifestations. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs des groupes Rassemblement-UMP et UDI.) Ce fut le cas le 17 novembre, ce sera le cas le 13 janvier, et nous sommes toujours attentifs au respect des personnes et à la liberté de choix de chacun.

M. Jean-Claude Perez. Tu parles ! Menteur !

M. Hervé Mariton. Si la position de notre groupe y est très majoritaire, celui-ci reconnaît aussi la liberté de vote de chacun de ses membres, ce que malheureusement vous ne faites pas. Est-ce là votre vision de la dignité du débat ?

Enfin, le 15 octobre dernier, plus de 200 parlementaires ont adressé un courrier au Président de la République… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Merci !

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication. Monsieur le président, monsieur le député Mariton, la liberté d’expression est une valeur fondamentale de la République et je la défends. Elle a évidemment cours sur l’ensemble des chaînes du service public. Il est donc regrettable qu’un débat sur un sujet de société important ait pu être perturbé par une interruption intempestive. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP, Rassemblement-UMP et UDI.)

Néanmoins, ce débat démocratique, légitime, porte sur le sujet majeur de l’égalité, en l’occurrence dans l’accès au mariage pour des gens qui s’aiment.

M. Philippe Meunier. Ce n’est pas la question !

Mme Aurélie Filippetti, ministre. Ce débat a été organisé par le Gouvernement, y compris au sein de cette assemblée où sont conduites des auditions, entre autres de représentants des cultes. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Chacun peut s’y faire entendre et faire connaître ses positions. C’est cela, l’organisation d’un débat démocratique. Ce débat a par ailleurs déjà eu lieu pendant la campagne présidentielle.

Plusieurs députés du groupe UMP. Non ! Non !

Mme Aurélie Filippetti, ministre. Défendre l’égalité dans le droit au mariage pour les personnes de même sexe est un engagement fort du président Hollande.

M. Claude Goasguen. Ce n’est pas une réponse !

Mme Aurélie Filippetti, ministre. En conclusion, la liberté d’expression est en effet une valeur fondamentale et nous garantissons l’expression des différentes sensibilités, y compris des oppositions au projet de loi que nous portons. Mais nous demandons aussi le respect des positions de la majorité et des associations qui se battent pour une forme d’égalité importante, l’égalité dans le droit au mariage. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

Gaspillage alimentaire

M. le président. La parole est à M. Dominique Potier, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Dominique Potier. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué à l’agroalimentaire.

Un tiers de la production alimentaire mondiale est aujourd’hui gaspillé entre la fourche et la fourchette. La bonne nouvelle, c’est que la moitié peut être valorisée si nous changeons nos habitudes et si nous investissons intelligemment. C’est crucial, car nous serons neuf milliards d’êtres humains en 2050 et, pour paraphraser Edgar Pisani, « le monde aura besoin de toutes les ressources du monde pour se nourrir ».

Au Sud, c’est la capacité à transporter et stocker qui est la source principale des pertes après récolte. Oui, donc, à une aide au développement bien ciblée vers les infrastructures dans les grandes régions pour pallier les aléas climatiques et lutter contre la spéculation !

Ici, l’essentiel du gaspillage est lié aux excès de nos modes de consommation. Ma question porte sur le lien entre ce million de tonnes gaspillé et le souci partagé de l’équilibre alimentaire, qui peut être un facteur discriminant dès le plus jeune âge. Soixante ans après le verre de lait à l’école de Mendès France et avec un pouvoir d’achat quatre fois supérieur, n’est-il pas révoltant d’observer dans une classe d’âge les signes portés comme un mauvais héritage par des gamins issus de milieux sociaux fragilisés ?

Dans la restauration publique, nous pouvons éduquer et même corriger en partie les inégalités. Ici et là, des collectivités ont fait un pari ambitieux, celui d’une meilleure qualité, à coût égal pour les contribuables et les familles, par la réduction de la nourriture actuellement jetée dans les cantines.

Monsieur le ministre, pouvons-nous sortir des modèles économiques désinvoltes et redonner à tout un chacun le goût du repas ? Pouvons-nous, au cœur de cette crise, faire de l’alimentation une ambition commune de santé publique ? Au nom de l’intérêt général, l’État peut-il inciter les opérateurs locaux, publics ou privés, à ouvrir ce cercle vertueux : lutter contre le gaspillage alimentaire pour offrir à tous une restauration de qualité… (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Merci !

La parole est à M. le ministre déléguéchargé de l’agroalimentaire.

M. Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l’agroalimentaire. Monsieur le député Potier, vingt à trente kilos de nourriture jetés chaque année par chacun de nous, telle est la réalité du gaspillage alimentaire ! C’est d’abord un enjeu économique, un enjeu de pouvoir d’achat, puisque cela équivaut à une perte de 400 euros par an et par famille. Mais c’est aussi un enjeu éthique, vous l’avez dit : lutter contre le gaspillage alimentaire, c’est lutter contre les dérives de la société de surconsommation au moment où tant de citoyens dépendent de l’aide alimentaire et où tant d’êtres humains meurent de faim dans le monde. C’est enfin un enjeu de justice sociale.

Nous nous sommes fixé un objectif ambitieux, dans le sillage du Parlement européen : réduire de moitié le gaspillage alimentaire d’ici 2025. Pour réussir, nous avons besoin de tous : des producteurs, des transformateurs, des distributeurs, des associations d’aide alimentaire, des restaurateurs et, bien évidemment, des citoyens eux-mêmes.

Nous lançons ce mois-ci des opérations pilote sur le terrain qui seront évaluées. Par exemple, nous travaillons avec le conseil général de Dordogne sur la taille des portions dans la restauration scolaire. Nous travaillons par ailleurs sur l’extension de la vente à l’unité dans la grande distribution. Nous améliorons aussi le don à l’aide alimentaire, notamment avec les banques alimentaires.

Pour quelle finalité ? Eh bien, nous signerons tous ensemble, en juin 2013, un pacte national contre le gaspillage alimentaire. Ce pacte sera solide et durable. C’est ensemble que nous devons mener ce combat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Distorsions de concurrence

M. le président. La parole est à M. Thierry Benoit, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

M. Thierry Benoit. Monsieur le ministre chargé des affaires européennes, l’UDI, l’Union des démocrates et indépendants, est le parti de l’Europe, une Europe lucide, une Europe vigilante, mais aussi une Europe exigeante vis-à-vis de ses partenaires.

Je souhaite vous interpeller sur deux points précis : les taxes anti-dumping et les droits de douane.

La direction générale du commerce de la Commission européenne s’apprête à prendre, le 12 décembre prochain, une décision très importante concernant l’abandon d’une taxe anti-dumping.

M. Jacques Myard. C’est scandaleux !

M. Thierry Benoit. Je pense au granit breton,…

M. Marc Le Fur. Bravo !

M. Thierry Benoit. …mais aussi à celui du Sidobre, extrait dans le Tarn, et au granit des Vosges. Je pense aussi plus particulièrement aux briquets fabriqués en Europe, en France, en Ille-et-Vilaine : les briquets Bic.

Monsieur le ministre, je sais que le Gouvernement a agi. Bic fabrique en France, a choisi de faire travailler des Français, mais cette entreprise lutte à armes inégales avec ses concurrents, notamment ses concurrents chinois.

Je veux aussi vous interpeller sur la question des droits de douane. Lorsqu’une entreprise française ou européenne exporte en Chine, elle acquitte des droits de douane s’élevant à 25 %.

M. Yannick Moreau. Très juste !

M. Thierry Benoit. Lorsqu’une entreprise chinoise exporte vers l’Europe, et notamment vers la France, ces droits s’élèvent à 2,7 %. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UDI, UMP et Rassemblement-UMP.)

M. Jacques Myard. C’est scandaleux !

M. Thierry Benoit. Le groupe UDI demande que la France se porte à la tête d’une coalition des membres de l’Union européenne afin d’œuvrer pour que l’Europe prenne les bonnes décisions et permette à ses entreprises de lutter à armes égales avec la concurrence internationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI, UMP et Rassemblement-UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le député, je vous remercie pour votre question. Elle est fondée, et nous sommes aujourd’hui déterminés à faire en sorte que les règles du juste échange puissent prévaloir au sein de l’Union européenne.

Quelles sont ces règles du juste échange, qui dépendent essentiellement de la compétence de la Commission européenne ?

Elles visent par exemple à faire en sorte que nos entreprises puissent avoir accès aux marchés publics d’un certain nombre de pays dont les entreprises ont elles-mêmes accès à nos marchés publics. Cette règle d’équilibre contribue au juste échange ; elle doit prévaloir.

Elles se sont également traduites par des mesures anti-dumping, auxquelles nous sommes favorables, dans les cas où la pratique d’une concurrence déloyale était établie. C’est pour cette raison qu’en 1991, une taxe a été instaurée sur les briquets à pierre, qui s’élevait à un peu plus de six centimes par briquet importé. Comme vous l’avez souligné, cette mesure arrive à expiration le 12 décembre. C’est pourquoi le groupe Bic, implanté en Ille-et-Vilaine, a saisi la Commission européenne au mois de septembre. Au mois de novembre, Mme Bricq – qui aurait aimé répondre à votre question mais qui est en déplacement en Amérique latine –, M. Montebourg et moi-même avons saisi M. Karel de Gucht, commissaire européen au commerce, sur la nécessité de proroger ces mesures anti-dumping.

La décision sera prise le 12 décembre prochain. Nous espérons que nous serons entendus. Si nous ne l’étions pas, nous poserions devant la Commission européenne la question des mesures à prendre pour assurer en Europe le juste échange qui est la garantie d’un libre-échange assurant la prospérité des industries européennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mariage entre personnes du même sexe

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard, pour le groupe Rassemblement - Union pour un mouvement populaire.

Mme Annie Genevard. Monsieur le Premier ministre, il y a quelques jours, la commission des lois recevait les représentants des cultes (Murmures sur plusieurs bancs du groupe SRC) pour qu’ils s’expriment sur le mariage homosexuel, comme elle avait reçu des associations de protection de la famille, ainsi que des psychiatres. J’invite chacun, s’il n’a pu y assister, à en visionner l’enregistrement

Cette audition passionnante n’a pas suscité les réactions ni les questions qu’elle aurait méritées.

M. Jean Glavany. En tout cas, il y a bien un débat !

Mme Annie Genevard. Songez que certains de nos collègues ont osé inviter ces hommes érudits, professeurs de philosophie, comme le grand rabbin Bernheim, à faire, je cite, « un effort intellectuel » pour accepter le mariage homosexuel ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Songez que certains de nos collègues ont évoqué l’histoire du fascisme pour dire en substance au cardinal Vingt-Trois : « L’église catholique s’est presque toujours trompée, donc, aujourd’hui encore, vous vous trompez sur cette question. » C’est honteux ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Un député du groupe SRC. À bas la calotte !

Mme Annie Genevard. Tout cela révèle finalement la volonté de votre majorité d’escamoter ce débat que vous avez pourtant souhaité mettre sur la table.

Toutes les religions se sont exprimées contre ce projet. Que vous le vouliez ou non, le mariage homosexuel intéresse toute la société, tous les Français, car c’est un sujet qui a trait à des valeurs fondamentales.

Nous avons bien perçu le pas de deux du Président de la République sur la question de l’objection de conscience, mais, en réalité, il n’y a pas eu de véritable débat avec les maires. Malgré la mobilisation sur tout le territoire, vous semblez rester sourd aux appels d’un très grand nombre de nos concitoyens.

Monsieur le Premier ministre, adopter une telle loi à la va-vite sur un sujet aussi majeur est inacceptable. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Comme nous l’avions fait sur un autre sujet majeur, celui de la fin de vie, allez-vous prendre le temps de la consultation ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Rassemblement-UMP et UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la députée, j’avoue que je suis quelque peu surprise par la préoccupation qui semble envahir cet hémicycle, depuis la séance d’hier, concernant les positions des cultes. (Murmures sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)

M. Michel Herbillon. C’est incroyable d’entendre des choses pareilles ! Ce n’est pas au Gouvernement de nous dicter nos questions !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vous avez raison lorsque vous dites que ce sujet concerne toute la société. C’est effectivement un sujet de société, et le Gouvernement s’apprête à présenter devant les deux chambres du Parlement une très belle réforme (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP)

M. Hervé Mariton. Oh, non !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …sur l’égalité des droits, sur le respect du droit à la vie familiale (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste), qui est d’ailleurs inscrit dans de nombreuses conventions internationales signées et ratifiées par la France.

Madame la députée, vous savez que le débat a lieu (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP) et qu’il se poursuit ici, à l’Assemblée nationale, puisque la commission des lois et les rapporteurs prennent le temps d’auditionner toutes les personnes, y compris les cultes qui, au-delà de leur compétence sur les questions théologiques, ont une opinion, effectivement, sur le mariage civil que nous sommes en train de réformer et que nous ouvrons, à égalité, à tous les couples. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Madame la députée, le débat a lieu : Mme Bertinotti, la ministre chargée de la famille, et moi-même avons déjà conduit des auditions. Il a lieu ici même, à l’Assemblée nationale. Il aura lieu – et je comprends votre impatience – dans l’hémicycle. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)

Un député du groupe UMP. Il aura lieu dans la rue, aussi !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Les députés auront l’opportunité d’apporter de la sécurité juridique aux couples concernés, ainsi qu’aux enfants qui grandissent déjà au sein de ces couples et qui ont le droit d’avoir une stabilité familiale. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.) Oui, nous portons cette réforme avec beaucoup de fierté, et c’est avec dignité que le Parlement la votera. (Les députés des groupes SRC, RRDP et écologiste se lèvent et applaudissent. Exclamations sur les bancs des groupes UMP, Rassemblement-UMP et UDI.)

Réunion du comité des signataires de l’accord de Nouméa

M. le président. La parole est à Mme Sonia Lagarde, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Mme Sonia Lagarde. Monsieur le Premier ministre, pour la première fois depuis votre accession à Matignon, vous réunirez, demain, le comité des signataires de l’accord de Nouméa. À cet égard, je voudrais, en premier lieu, saluer l’important travail de concertation mené en Nouvelle-Calédonie la semaine dernière par le ministre des outre-mer, Victorin Lurel, qui, dans un climat politique quelque peu tendu, a réussi à faire naître le consensus, tant sur la date du comité que sur son ordre du jour.

Depuis douze ans, ce comité a pour mission de réunir autour de l’État les représentants de toutes les composantes politiques calédoniennes pour un moment privilégié d’écoute et de dialogue, afin d’avancer ensemble sur la voie tracée par l’accord de Nouméa vers cet avenir commun qu’il appartient aux Calédoniens de bâtir, un avenir que, pour ma part, je souhaite voir s’inscrire dans la République.

Pour autant, monsieur le Premier ministre, ce comité des signataires ne peut se satisfaire d’acter uniquement des points de consensus ; notre responsabilité commune est aussi d’évoquer des sujets qui font débat dans la société calédonienne. Parmi ces sujets, il y a les signes identitaires, en particulier la question du drapeau, la lutte contre la vie chère et la mise en place d’une autorité de la concurrence, qui doit être réellement indépendante pour être efficace. Nous devrons également évoquer l’état d’avancement des comités de pilotage, notamment celui sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, dont la réflexion doit être poursuivie, voire intensifiée, alors que nous approchons du terme de l’accord de Nouméa.

Monsieur le Premier ministre, sur tous ces sujets, la parole de l’État compte et elle est attendue. Pouvez-vous, devant la représentation nationale, nous indiquer quel sera le message du Gouvernement aux représentants des différentes forces politiques calédoniennes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs des groupes Rassemblement-UMP et UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.

M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer. Madame la députée, vous interrogez le Gouvernement sur le sens du message que le Premier ministre délivrera, demain, lors de la réunion du comité des signataires. Je puis vous assurer qu’il rappellera la position qui a toujours été celle de l’État et, singulièrement, celle du Gouvernement : l’accord de Nouméa, rien que l’accord de Nouméa, mais tout l’accord de Nouméa.

Vous avez bien voulu rappeler que j’étais en Nouvelle-Calédonie, il y a peu, et c’est pour moi l’occasion de remercier tous les acteurs que j’y ai rencontrés. Vous avez raison : il y avait des points de désaccord. Mais nous avons pu nous entendre, tous, sur une date, ce qui n’est pas rien, et sur un ordre du jour. Ainsi, nous avons élargi, voire considérablement augmenté le contenu de l’agenda. Y sont inscrits les points que vous avez évoqués : l’autorité de la concurrence, la lutte contre la vie chère et les signes identitaires – un véritable sujet, qui peut être passionnel – seront examinés.

Le Président de la République, qui m’a reçu à mon retour de mon séjour en Nouvelle-Calédonie, vous recevra ce soir au palais de l’Élysée et le Premier ministre, qui m’a demandé un compte rendu de mon voyage, dira, demain, quel sera le message de l’État. Croyez-moi, il est réjouissant. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Victimes du terrorisme

M. le président. La parole est à M. Gérald Darmanin, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Gérald Darmanin. Monsieur le ministre de l’intérieur, en janvier 2011, deux jeunes habitants de la circonscription dont je suis l’élu ont été enlevés à Niamey par les terroristes d’AQMI, puis tués au Mali lors de l’intervention des forces spéciales françaises. Antoine de Léocour et Vincent Delory n’étaient pas des aventuriers. Le Quai d’Orsay considérait alors Niamey comme une zone sûre. Ils ont été, à vingt-cinq ans, victimes de la folie meurtrière du terrorisme. Depuis, une commune, Linselles, et tout un territoire, Tourcoing et la vallée de la Lys, sont en deuil. Les familles, avec une grande dignité, demandent la levée du secret défense et la reconnaissance du statut de victime du terrorisme, sachant que celui de mort pour la France est réservé aux militaires.

Monsieur le ministre, la semaine dernière, lorsque nous avons examiné, au cours d’une séance de nuit, le projet de loi relatif à la sécurité et à la lutte contre le terrorisme, j’ai déposé un amendement afin que soit reconnu le statut de victime du terrorisme. Le Gouvernement a repris cet amendement, que la représentation nationale a voté à l’unanimité. Je tiens donc ici à saluer la bonne volonté du Gouvernement et à remercier l’ensemble de mes collègues.

A la veille de la réunion de la commission mixte paritaire, qui devrait entériner ce statut, que compte faire le Gouvernement pour accompagner les familles des victimes du terrorisme, qu’elles soient civiles ou militaires, qu’elles aient été tuées sur le sol national ou à l’étranger ? Comment la solidarité nationale peut-elle désormais s’exprimer auprès de ces familles meurtries par la barbarie ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP, Rassemblement-UMP et UDI et sur de nombreux bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Monsieur le député, vous avez eu raison de souligner le vote unanime qui est intervenu il y a quelques jours. Souhaitant, avec Jean-Yves Le Drian, rendre hommage à ceux et à celles qui sont victimes du terrorisme et de la barbarie, nous avons proposé la création de deux nouvelles mentions, en plus de celles de « Mort pour la France » et de « Mort en déportation ».

La mention « Mort pour le service de la nation » doit permettre de témoigner de l’hommage national rendu aux agents publics, qu’ils soient civils ou militaires. Je pense aux militaires victimes de Mohamed Merah ou aux agents tués sur d’autres terrains, notamment les militaires tués en Guyane dans le cadre de l’opération de lutte contre l’orpaillage clandestin et à qui Jean-Yves Le Drian a rendu hommage, dans ce département, il y a quelques jours.

La mention « Victime du terrorisme » s’adressera, quant à elle, aux victimes de la violence terroriste. Nous avons eu raison de nous retrouver sur ce point, lorsque vous avez déposé votre amendement. Le Gouvernement a souhaité, parce que c’était la volonté du chef de l’État, après qu’il a reçu des familles de victimes du terrorisme, leur rendre hommage.

La nation, la France, est forte quand elle se rassemble, comme nous l’avons fait il y a quelques jours et aujourd’hui encore à l’occasion de votre question, sur l’essentiel : la lutte contre la violence, le terrorisme, la barbarie. Nous répondons ainsi à l’attente des familles et je suis convaincu que la commission mixte paritaire confirmera le choix de l’Assemblée nationale. La France est forte quand elle est rassemblée. (Applaudissements sur tous les bancs.)

M. le président. Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Sandrine Mazetier.)

Présidence de Mme Sandrine Mazetier,
vice-présidente

Mme la présidente. La séance est reprise.

2

Fonctionnement des services de renseignement dans le suivi et la surveillance
des mouvements radicaux armés

Discussion d’une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de résolution de M. Noël Mamère et plusieurs de ses collègues tendant à la création d’une commission d’enquête sur le fonctionnement des services de renseignement français dans le suivi et la surveillance des mouvements radicaux armés (nos 340 rectifié, 471).

Je rappelle que la discussion est organisée en application de l’article 141, alinéa 3, du règlement. Elle comprend uniquement une phase d’explications de vote à l’exclusion de toute autre prise de parole.

Explications de vote

Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Cavard, pour le groupe écologiste.

M. Christophe Cavard. Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, chers collègues, le groupe écologiste, et plus particulièrement Noël Mamère, ainsi que des collègues du groupe SRC, dont Gérard Bapt, ont souhaité proposer à la représentation nationale la création d’une commission d’enquête parlementaire sur le fonctionnement des services de renseignements français dans le suivi et la surveillance des mouvements radicaux armés.

Cette demande de commission d’enquête est une réponse aux interrogations qui ont parfois pris des dimensions nationales lors d’événements récents et qui concernaient les moyens et le fonctionnement de nos services de renseignement. Je pense bien sûr à l’affaire Merah, qui a confronté notre pays à l’expression d’une violence sourde et sans visage pendant les interminables journées du printemps. Mais je pense également à d’autres affaires comme Tarnac ou Karachi, où les zones d’ombres restent importantes et nous renvoient, nous élus, à notre devoir de contrôle et d’évaluation des politiques publiques.

Enfin, je me permets de rappeler que le droit de tirage réactualisé en 2009 vient renforcer l’exercice pluraliste des missions de contrôle et d’évaluation des politiques publiques par la représentation nationale. Comme le rappelait très justement M. Valls dans Le Monde : « À l’instar de grands pays, le Parlement doit pouvoir exercer un véritable contrôle sur les services. C’est la garantie de la légitimité de leur action ». Je partage totalement cette analyse.

Il vous appartient donc, chers collègues, d’apprécier également cette proposition de résolution sous l’angle des pouvoirs étendus du Parlement et de leur mise en œuvre réelle qui constitue, vous en conviendrez, une avancée non discutable pour la démocratie.

Cette résolution porte sur le fonctionnement de nos services de renseignement et non sur des affaires que seule la justice, qui en est aujourd’hui saisie, aura à juger.

Les services de renseignement intérieur organisés jusqu’en 2007 en deux grands pôles historiques – DCRG et DST – ont connu une réorganisation qu’il conviendra d’évaluer en profondeur. En effet, la création de la DCRI, que le gouvernement précédent nous présentait alors comme le FBI à la française, a suscité de nombreuses interrogations. La DCRI est censée assurer des missions de renseignement tout autant que de police judiciaire dans les domaines du contre-espionnage ou de l’antiterrorisme. Notre enquête aura notamment pour but d’améliorer le fonctionnement de ce service aux missions fusionnées. Cette amélioration s’entend certes à l’aune de la protection des citoyens : le drame du printemps engage notre assemblée à y répondre sans délai. Mais elle s’entend aussi à l’aune de l’évolution démocratique de notre société et du respect nécessaire des droits de l’individu.

Parce qu’il est trop facile de pointer les agents publics en charge de ces services sans s’interroger sur le contexte politique et administratif, la mission devra en particulier s’interroger sur les moyens alloués, sur l’organisation choisie ou encore sur les priorités fixées.

Aujourd’hui, notre assemblée a déjà engagé un certain nombre de travaux sur ces questions. Ils sont réalisés par la délégation parlementaire au renseignement, qui joue pleinement son rôle, par la commission du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, qui devrait rendre son rapport début 2013, et enfin par la mission d’information, présidée par notre collègue Jean-Jacques Urvoas, qui s’est donné pour mission d’évaluer le cadre juridique applicable aux services de renseignement.

M. Guillaume Larrivé. Ce qui prouve que votre commission d’enquête est inutile !

M. Christophe Cavard. Cette commission qui respectera j’espère une composition pluraliste doit être conçue en complémentarité des travaux menés par les autres missions et groupes de travail. Elle doit nous amener à réfléchir collectivement pour répondre aux interrogations légitimes des citoyens.

Mes chers collègues, une commission d’enquête, ce n’est pas anodin. Ses prérogatives ne sont pas à minimiser même si le sujet abordé nous obligera à traiter avec doigté les auditions. C’est pourquoi je souhaiterais que notre assemblée vote cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Tourret, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Alain Tourret. Madame la présidente, mes chers collègues, nous sommes saisis d’une proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur le fonctionnement des services de renseignement dans le suivi et la surveillance des mouvements radicaux armés.

Une telle proposition s’inscrit dans le cadre du renforcement des droits du Parlement. Dès lors qu’elle émane d’un parti ami et allié, elle ne peut qu’être reçue favorablement. Mais un certain nombre d’études et d’auditions sont actuellement menées par notre excellent président de la commission des lois, Jean-Jacques Urvoas – chacun rend hommage à la qualité de son travail. Et il ne faudrait pas que ces différentes études s’entrechoquent.

M. Olivier Falorni et M. Paul Giacobbi. Très bien !

M. Alain Tourret. Le président de notre groupe, Roger-Gérard Schwartzenberg, dont je salue la présence, a tenu à me dire qu’il approuvait la création de cette commission d’enquête.

Depuis toujours, les services de renseignement ont posé problème à la nation. Ce n’est pas aux historiens qui se trouvent parmi nous que je rappellerai les actes de Joseph Fouché qui, en tant que ministre de la police, manipulait les services de renseignement contre l’ensemble des services de l’empereur Napoléon. Mais faisons un bond dans l’histoire et regardons ce qui s’est passé avec les gaullistes, puisqu’il y en a quelques-uns dans cet hémicycle.

M. Olivier Falorni. Pas beaucoup ! Où sont-ils ?

M. Alain Tourret. Rappelez-vous la responsabilité des services de « barbouzes », ainsi qu’on les appelait à l’époque, dans l’affaire Ben Barka ; c’est alors qu’on s’est rendu compte qu’il était utile de les contrôler.

Autre exemple, les États-Unis, l’une des grandes démocraties, qui auraient pu mourir à cause des méfaits de leurs services de renseignement. Qui peut affirmer que le président Kennedy n’a pas été assassiné par les services de renseignement ? Personne. La commission Warren a été dans l’incapacité de trancher dans un sens ou dans l’autre.

Vous avez, monsieur Cavard, cité trois affaires : Tarnac, Karachi, Montauban-Toulouse. Pourquoi pas ? Permettez-moi cependant de vous dire que j’ai été gêné par la rédaction de votre exposé des motifs. Je sais qu’il n’était pas facile à rédiger dans la mesure où il fallait éviter de toucher à des affaires qui font actuellement l’objet d’une instruction. Mais écrire « Des crimes “ont pu être commis” qui ont bouleversé toute la société française… » ne correspond pas à la réalité car ces crimes « ont été commis ». Votre rédaction est choquante, chers amis écologistes. Vous ne pouvez pas écrire cela même si c’est pour une question de recevabilité. On ne peut tordre ainsi la réalité. Je voulais vous le dire en toute franchise, chers collègues : vous devez être beaucoup plus précis dans la rédaction de votre exposé des motifs.

Ces réserves faites, nous ne refuserons pas cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine..

M. Jean-Jacques Candelier. Madame la présidente, mes chers collègues, cette proposition de résolution de nos collègues écologistes vise à « examiner le fonctionnement des services de renseignement français dans le suivi et la surveillance des mouvements radicaux armés et, notamment, des filières jihadistes existant sur le territoire français ».

En vertu de l’article 141 de notre règlement, les députés communistes et du Front de Gauche ne participeront pas au scrutin : cela signifie que nous ne nous opposons pas à la création de cette commission d’enquête.

Les drames de Toulouse et Montauban ont ému la France en ce qu’ils constituaient une attaque contre les institutions de la République, puisqu’il ont eu pour cibles des militaires, les enfants d’une école et un enseignant. Ces crimes bouleversants suscitent de sérieuses interrogations sur les défaillances des services de renseignement dans leurs opérations de suivi et de surveillance, défaillances établies par le rapport de l’inspection générale de la police nationale, l’IGPN, rendu public le 23 octobre dernier.

M. le ministre de l’intérieur a déclaré qu’il fallait renforcer la coordination des services de renseignement, en particulier ceux de la direction centrale du renseignement intérieur, critiquée dans l’affaire Merah.

L’Assemblée nationale est habilitée à exercer son contrôle sur les « failles incontestables » du système de renseignement. La commission des lois travaille déjà sur ce sujet. Une mission d’information portant sur le cadre juridique applicable aux services de renseignement en France a été créée.

Cependant, il n’y a pas d’opposition de principe à ce qu’une commission d’enquête soit créée également, si telle est la volonté de nos collègues écologistes. Selon la jurisprudence, l’existence de poursuites judiciaires n’interdit pas la création d’une commission d’enquête lorsqu’elle est souhaitée mais restreint son champ d’investigation aux faits n’ayant pas donné lieu à des poursuites. Ainsi, la souplesse d’interprétation de cette règle n’a pas empêché la création de commissions d’enquête portant sur le Service d’action civique, les sectes, le Crédit lyonnais ou encore le régime étudiant de la sécurité sociale.

La création d’une commission d’enquête serait en l’occurrence d’une utilité incontestable, eu égard au déroulement des travaux de certaines missions d’information, je pense notamment à la mission Karachi sous la précédente législature. Les députés bénéficieraient en effet d’un droit de citation directe des protagonistes. L’importance du sujet réclame que l’on lève le verrou d’une possible mauvaise volonté des différents acteurs.

Les membres de la commission d’enquête auraient la faculté d’exercer leur mission sur pièces et sur place et d’obtenir tous les renseignements de nature à faciliter leur travail. Ils seraient habilités à se faire communiquer tout document de service – à l’exception de ceux revêtant un caractère secret – concernant la défense nationale, les affaires étrangères, la sécurité intérieure ou extérieure de l’État, sous réserve du respect du principe de séparation de l’autorité judiciaire.

Ces facultés ne seront pas un luxe, compte tenu de l’extrême légèreté dont a fait preuve le précédent gouvernement dans ses réponses aux parlementaires. J’ai parlé de Karachi, souvenons-nous aussi du refus des ministres UMP Claude Guéant et Gérard Longuet de faire auditionner au Sénat les patrons de la DGSE et de la DCRI.

Nous attendons donc un changement d’attitude de l’exécutif, qui pourrait utilement briser la posture d’enfermement absurde et contreproductive adoptée par le précédent gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Raimbourg, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Dominique Raimbourg. Madame la présidente, chers collègues, le groupe SRC s’abstiendra, ce qui veut dire qu’il ne s’opposera à cette proposition de résolution : la commission d’enquête dont la création est sollicitée pourra donc voir le jour.

Pour quelles raisons ?

C’est un sujet incontestablement difficile et extrêmement douloureux que cette commission d’enquête devra traiter puisque sa création fait suite, vous l’avez dit, monsieur Cavard, aux affaires de Montauban et de Toulouse, qui ont vu l’assassinat de sept personnes dans des conditions dramatiques.

Tout a été dit sur cette proposition de résolution.

Elle est juridiquement recevable, comme nous avons pu l’établir, et elle est utile puisque, vous l’avez souligné, monsieur Tourret, elle va dans le sens d’un renforcement des droits du Parlement, et tout renforcement des droits du Parlement est bon car il est synonyme de renforcement de la démocratie.

Elle s’expose à quelques difficultés liées à son opportunité. Certains ont déjà souligné qu’elle risque de se heurter au secret défense, mais il peut y avoir des avancées sur ce sujet-là. Elle se heurte à une autre difficulté : la nécessité de ne pas se télescoper avec l’enquête judiciaire en cours. Sur ce point, vous avez avancé, chers collègues, en établissant que la commission d’enquête n’examinerait pas des faits faisant l’objet de poursuites judiciaires.

Elle peut enfin se heurter à la concurrence avec diverses instances qui travaillent déjà sur le même sujet : la délégation parlementaire au renseignement, un groupe de travail sur le Livre blanc, une mission d’information de la commission des lois coprésidée par Jean-Jacques Urvoas et Patrick Verchère qui vise à donner un cadre juridique au renseignement. Les signataires de la proposition de résolution ont toutefois admis que la commission d’enquête viendrait compléter les structures déjà existantes.

Dans ces conditions, la création d’une telle commission d’enquête paraît utile et nécessaire. C’est la raison pour laquelle, le groupe SRC, par son abstention, ne s’opposera pas à sa création. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Marsaud, pour le groupe UMP.

M. Alain Marsaud. Madame la présidente, mes chers collègues, permettez-moi de m’exprimer ici, si je puis dire, en qualité d’ancien combattant. Ancien combattant parce qu’il y a quelques années, en 2006-2007, j’ai fait partie de ceux, rares dans cette assemblée, encore plus rares dans l’exécutif, qui se sont intéressés au fonctionnement des services de renseignement. J’avais été ainsi amené à proposer la création d’une commission parlementaire de contrôle des services de renseignement, car ils n’étaient ni contrôlés ni suivis.

Le verdict des urnes ne m’ayant pas été favorable, il se trouve que je n’ai pas pu poursuivre dans cette voie. La majorité de 2007 a décidé de créer une délégation, dont on ne sait pas trop l’objet : pas le contrôle, peut-être le suivi. Certains d’entre vous ici ont fait semblant d’en être satisfaits. Disons qu’elle permet au moins d’examiner le budget des services de renseignement et de passer quelques instants avec leurs responsables.

Aujourd’hui, je constate que tout le monde s’intéresse aux services de renseignement. Voici une vraie révolution ! C’est peut-être cela, le sens du « changement, c’est maintenant ».

Les maux dont souffrent nos services de renseignement ne datent pas de l’affaire Merah, ils remontent à une cinquantaine d’années. Cela a commencé avec l’affaire Ben Barka : le pouvoir politique a décrété que les services de renseignement, c’était sale et qu’on n’avait pas intérêt à mettre le nez dedans. Depuis, qu’il s’agisse des présidents de la République, des premiers ministres, des ministres de l’intérieur, des ministres de la défense ou du Parlement, personne n’est allé voir ce qui s’y passait. Ce, nonobstant la demande qu’ont pu formuler les responsables mêmes de ces services. Je peux vous l’assurer : en tant que rapporteur de la proposition visant à créer une commission de contrôle, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec nombre d’entre eux, et dans différentes autres fonctions, il m’est arrivé de fréquenter beaucoup de chefs de service.

Le renseignement en France est considéré comme suspect, à la différence des pays anglo-saxons où il est perçu comme une activité qui, à défaut d’être noble, est tout à fait avouable car elle sert l’intérêt général.

Je vous l’avoue, monsieur Cavard, je suis gêné car hésitant. Pour toutes les raisons que j’ai évoquées, j’aurais bien aimé que cette commission d’enquête soit créée mais il se trouve que je suis aussi magistrat.

M. François de Rugy. Il n’y aucun risque d’empiètement !

M. Alain Marsaud. Si, j’estime qu’il y a un risque d’une forte collision avec les enquêtes judiciaires en cours sur l’affaire Merah et d’autres affaires – vous avez évoqué Karachi. Je vais vous dire une chose : bienheureux sera le président de cette commission, si elle est créée, qui réussira à se tenir à l’écart des enquêtes judiciaires et à ne pas violer le secret de l’instruction. Je ne sais pas où tout cela pourrait mener.

Et puis, il y a une chose que vous n’avez pas évoquée, monsieur Cavard : vous nous parlez de la DCRI, mais qu’en est-il de la DGSE ? Les services du renseignement extérieur concourent aussi à la surveillance des mouvements radicaux armés.

Votre demande, je dirai qu’elle m’est sympathique. Elle m’est sympathique mais, parce que je suis précautionneux, je ne voterai pas cette proposition de résolution et au nom du groupe UMP, je demanderai à ce qu’elle ne soit pas votée.

J’ai toutefois de bonnes raisons de penser qu’elle sera adoptée.

M. François de Rugy. Alors ?

M. Alain Marsaud. Écoutez, nous participerons éventuellement à ses travaux et, si j’ai la chance d’en être membre, je ferai surtout en sorte que soit évité le danger que je viens d’exposer devant vous, à savoir qu’elle n’empiète pas sur les prérogatives de l’institution judiciaire.

M. François de Rugy. Mais non !

M. Alain Marsaud. Si tel était le cas, nous commettrions une grave erreur.

Je suis bien conscient des réalités politiques : le groupe écologiste va obtenir gain de cause grâce à la majorité qui va le soutenir. Dans le meilleur des cas, elle s’abstiendra pour lui faire plaisir. Fort bien ! Sachez toutefois que j’observerai avec beaucoup d’intérêt la manière dont seront menés les travaux de cette commission et surtout à quoi ils aboutiront. Je crains, hélas, que tout cela ne se termine en eau de boudin ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Ciotti, pour le groupe Rassemblement-Union pour un mouvement populaire.

M. Éric Ciotti. Madame la présidente, mes chers collègues, plusieurs raisons fondamentales nous conduisent à rejeter cette initiative de création d’une commission d’enquête sur le fonctionnement des services de renseignement : nous l’estimons mal fondée en droit, inopportune sur le fond et malheureusement animée seulement par un mobile politicien.

Certes, les auteurs de cette proposition de résolution ont modifié son intitulé pour tenter de contourner l’interdiction figurant au cœur de l’article 6 de l’ordonnance de 1958 qui prive le Parlement de toute capacité d’action si une instruction judiciaire est en cours. Mais le but de cette commission d’enquête reste le même. Il suffit d’en lire l’exposé des motifs : il fait explicitement référence aux « drames de Toulouse et de Montauban » et aux « crimes qui ont pu être commis ».

Ensuite, l’outil de la commission d’enquête ne nous semble pas adapté à l’ambition prétendument poursuivie, si tant est qu’elle ne soit pas dénuée d’arrière-pensée. Même si elle était créée, cette commission se verrait nécessairement opposer le secret défense ou le secret de l’instruction, ce qui lui interdirait toute capacité d’investigation. Dès lors, loin de contribuer à dissiper des interrogations légitimes, elle ne ferait qu’alimenter les procès d’intention et contribuerait tout simplement à jeter le discrédit sur nos services de renseignement.

M. Jacques Myard. Bien sûr !

M. Guillaume Larrivé. Exactement !

M. Éric Ciotti. Mais peut-être, au fond, est-ce là l’objectif poursuivi par les promoteurs de cette commission d’enquête ?

Le cadre adéquat reste la délégation parlementaire du renseignement, créée à l’initiative de la précédente majorité. C’est dans ce cadre, et uniquement dans ce cadre, que la représentation nationale doit pouvoir être informée du fonctionnement de nos services de renseignement.

Sur le fond, mes chers collègues, avons-nous besoin d’une commission d’enquête ? Le ministre de l’intérieur n’a-t-il pas déjà diligenté une enquête administrative sur le fonctionnement des services de renseignement ?

M. Jacques Myard. Très juste !

M. Éric Ciotti. La vérité est beaucoup plus simple : cette proposition de résolution cherche à faire le procès des services de renseignement et de notre législation contre le terrorisme.

M. Jacques Myard. Évidemment !

M. Éric Ciotti. Elle dénote un esprit de suspicion sans fondement à l’égard de nos services et un aveuglement idéologique qui vise à refuser la réalité : toutes choses que je condamne. (Exclamations sur les bancs du groupe écologiste.)

M. François de Rugy. Procès d’intention !

M. Éric Ciotti. Quelle est la réalité ? Depuis 1986, à l’initiative du gouvernement de Jacques Chirac, la France s’est progressivement dotée d’un cadre juridique efficace et performant de lutte contre le terrorisme, présenté à l’étranger comme un modèle d’efficacité. Nos services sont reconnus mondialement. La meilleure preuve en est que, depuis l’attentat du RER à Port-Royal en 1996, et en dépit d’une menace permanente et grandissante, nous n’avons plus connu d’attentat en France, contrairement à d’autres pays – du moins jusqu’aux terribles drames de Montauban et de Toulouse.

M. Charles-Ange Ginesy. C’est exact !

M. Éric Ciotti. Nous avons été jusqu’ici préservés parce que nous avons déjoué nombre de projets et arrêté ceux qui comptaient les commettre. Ainsi, depuis 2007, 1 473 terroristes ont été interpellés et 392 écroués. Cet effort s’est poursuivi avec le récent démantèlement d’une cellule jihadiste à Cannes et à Torcy.

Aussi, plutôt que de chercher la polémique stérile et de tenter de juger a posteriori dans le confort d’une énième commission « Théodule », permettez-moi de rendre hommage aux militaires de la DGSE ainsi qu’aux fonctionnaires de la police judiciaire et de la DCRI, engagés, dans la plus grande discrétion et l’anonymat, dans la lutte contre le terrorisme pour la sécurité de tous les Français.

Nous condamnons donc avec force cette opération de dénigrement, et plus encore la réécriture des événements passés. Les services de renseignement et d’enquête ont réalisé un travail considérable pour identifier Mohamed Merah en moins de 48 heures après l’attentat de Toulouse contre l’école juive Ozar Hatorah ; le rapport de l’inspection générale de la police nationale ne dit pas autre chose.

Enfin, concernant l’amélioration de notre dispositif de surveillance, le projet de loi récemment adopté – qui s’inspirait du texte déposé en mars 2012 par le gouvernement de François Fillon, sous l’autorité de Nicolas Sarkozy – répond aux attentes des services et des magistrats ; c’est la raison pour laquelle nous l’avons voté. Plutôt que de nourrir des querelles idéologiques d’un autre âge, vous devriez au contraire vous réjouir qu’un consensus ait pu être trouvé, permettant l’adoption d’une loi qui renforce nos capacités de lutte contre le terrorisme.

Nous le devons aux Français, car nous devons assurer leur sécurité. Pour toutes ces raisons, le groupe du Rassemblement-UMP votera contre cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs des groupes Rassemblement-UMP et UMP.)

Mme la présidente. Sur le vote de la demande de création de la commission d’enquête, je suis saisie par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Philippe Folliot, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

M. Philippe Folliot. Madame la présidente, chers collègues, il y a de cela neuf mois, les tueries de Toulouse et de Montauban faisaient sept victimes, provoquant dans tout le pays émoi et indignation.

Dans de telles circonstances, lorsque pareille tragédie se produit, nul d’entre nous ne souhaite contester le droit des victimes et de leurs familles à connaître les faits et à réclamer justice et vérité.

Je tiens à rendre hommage à l’ensemble des victimes et à leurs familles pour le courage et la dignité dont elles ont fait preuve dans des circonstances aussi difficiles. Élu de Midi-Pyrénées, je mesure l’ampleur du drame qui a frappé au cœur même de ma région.

L’adoption par l’Assemblée nationale, dans un élan de rassemblement unanime souligné aujourd’hui même lors des questions d’actualité, du projet de loi créant le statut de victime du terrorisme, constitue l’un des éléments forts du processus de reconstruction des victimes et surtout de leurs familles.

Nous avons pu constater, sous les précédentes législatures, que les commissions d’enquête constituent des instruments d’information et de contrôle efficaces. Le droit de tirage, créé en 1988 puis renforcé en 2009 après être tombé en désuétude, s’inscrit dans la perspective d’une revalorisation du rôle du Parlement, à laquelle nous sommes, en tant que groupe minoritaire et qui plus est d’opposition, particulièrement attachés.

Est-ce pour autant le rôle du Parlement, alors même qu’une enquête est en cours, de tenter de faire la lumière sur la manière dont une affaire a pu être menée ? Un groupe politique, quel qu’il soit, peut-il décider dans ces conditions qu’il reviendrait à des membres de la représentation nationale de constater d’éventuels manquements en cours d’enquête ?

Avec cette proposition de résolution, nos collègues écologistes engagent le débat sur la création d’une commission d’enquête relative au fonctionnement des services de renseignement dans le suivi et la surveillance des mouvements radicaux armés, avec au fond l’intention mal dissimulée de mettre directement en cause l’action des services de renseignement dans le déroulement de l’affaire Merah.

Je profite de l’occasion pour souligner le rôle des services de renseignement, qui est important et essentiel pour notre démocratie. Tout l’enjeu est de trouver un juste et fragile équilibre entre le secret, gage d’efficacité, le respect des libertés individuelles et la protection de nos concitoyens.

Je souhaite également rendre hommage à l’ensemble des agents de nos services de renseignement, qu’ils travaillent à la DGSE ou à la DCRI, ces hommes et ces femmes pour lesquels la notion de service de la nation est ancré au plus profond de leur engagement. Cela mérite le respect de l’ensemble de la représentation nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI, UMP et Rassemblement-UMP.)

M. Jean Lassalle. Très bien !

M. Philippe Folliot. J’aurai enfin une pensée particulière pour M. Denis Allex, agent de la DGSE détenu comme otage en Somalie à la suite d’une opération menée dans le cadre de son travail et réalisée dans des conditions particulièrement difficiles.

Notre législation est claire sur les conditions entourant la création de commissions d’enquête. L’article 6 de l’ordonnance de 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dispose qu’« il ne peut être créé de commission d’enquête sur des faits ayant donné lieu à des poursuites judiciaires et aussi longtemps que ces poursuites sont en cours. Si une commission a déjà été créée, sa mission prend fin dès l’ouverture d’une information judiciaire relative aux faits sur lesquels elle est chargée d’enquêter. »

La proposition de nos collègues écologistes ne dissimule pas la finalité de leur action. L’exposé des motifs fait ainsi clairement allusion aux drames de Toulouse et de Montauban, et soulève de sérieuses interrogations concernant d’éventuelles défaillances des services de renseignement dans leurs opérations de suivi et de surveillance, telles qu’elles ont été établies par le rapport de l’IGPN.

En conséquence, l’UDI estime que la création d’une commission d’enquête, alors qu’une instruction judiciaire est en cours, n’est pas souhaitable, non seulement parce qu’elle serait contraire au droit, mais également parce que seule la justice peut faire la lumière sur l’enchaînement des faits dans cette dramatique et terrible affaire.

Vous le savez, une mission d’évaluation du cadre juridique applicable aux services de renseignement a été créée en juillet dernier. Nous devons donc attendre que les membres de cette mission établissent leur rapport et remettent leurs recommandations, ce qui sera chose faite au printemps 2013.

Par conséquent, le groupe UDI ne peut s’associer à cette demande et votera contre la proposition de résolution.

Vote sur la demande de création de la commission d’enquête

Mme la présidente. Aux termes de l’article 141, alinéa 3, du règlement, la demande de création d’une commission d’enquête est rejetée si la majorité des trois cinquièmes de l’Assemblée nationale s’y oppose, soit 345 voix.

En outre, seuls les députés défavorables à la création de la commission d’enquête participent au scrutin.

Je vais maintenant mettre aux voix la demande de création de la commission d’enquête.

(Il est procédé au scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin :

(La majorité requise pour le rejet n’est pas atteinte.)

Mme la présidente. Afin de permettre la constitution de la commission d’enquête dont l’Assemblée nationale vient de décider la création, les présidents des groupes devront faire connaître, conformément à l’article 25 du règlement, avant le 12 décembre 2012 à 17 heures, le nom des candidats qu’ils proposent.

La nomination prendra effet dès la publication de ces candidatures au Journal officiel.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

3

Projet de loi de finances rectificative pour 2012 (suite)

Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2012 (nos 403, 465).

Rappels au règlement

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson, pour un rappel au règlement.

M. Charles de Courson. Fondé, madame la présidente, sur l’alinéa 1 de l’article 58.

Monsieur le ministre délégué chargé du budget, il se passe ici des choses tout à fait anormales.

M. Marc Le Fur. C’est vrai !

M. Charles de Courson. On vient de découvrir, grâce à un article paru aujourd’hui dans Les Échos, que le Gouvernement avait déposé un amendement visant à majorer la fiscalité sur les plus-values immobilières. Cet amendement devrait rapporter 300 millions d’euros.

M. Marc Le Fur. Bagatelle !

M. Charles de Courson. Il paraît que quatorze autres amendements gouvernementaux sont en train d’arriver : certains sont déjà en ligne sur le site de l’Assemblée nationale tandis que d’autres sont occultés puisqu’ils sont soumis au contrôle de recevabilité.

La commission ne s’est pas réunie pour examiner ces amendements que l’on découvre en séance. On ne peut pas continuer à légiférer de cette manière. Le groupe UDI se demande si le Gouvernement est conscient des conditions dans lesquelles nous devons travailler et attend des explications sur la façon dont il gère ses amendements.

De surcroît, comme le Sénat vote dorénavant contre tous les textes, le Gouvernement dépose ici en catastrophe les amendements qu’il n’a pas pu présenter là-bas. Monsieur le ministre, l’Assemblée nationale n’est pas la séance de rattrapage des problèmes que le Gouvernement rencontre au Sénat. Il faut donc suspendre la séance et réunir la commission afin d’y examiner tous ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Mon rappel au règlement est également fondé sur l’article 58, alinéa 1.

Je pense que le Gouvernement pourra nous rassurer assez facilement, ainsi que le rapporteur général.

Il est nécessaire que la commission se réunisse avant que les amendements dont vient de parler M. de Courson ne viennent en discussion. Certes, on ne réunit pas la commission chaque fois qu’un nouvel amendement est déposé, mais il est nécessaire de le faire quand il s’agit de dispositions aussi massives dans leur montant. J’espère que le ministre et le rapporteur général comprendront que c’est naturel.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du budget. Madame la présidente, je comprends parfaitement les remarques des deux orateurs qui viennent de s’exprimer : ils auraient souhaité être informés plus avant de la nature de ces amendements, d’autant que certains portent sur des montants élevés.

Monsieur de Courson, vous déplorez d’apprendre certaines choses par la presse. Certains journalistes font bien leur travail, d’autres moins bien. On apprend souvent beaucoup de choses par la presse. Certaines sont plaisantes, d’autres ne le sont pas, certaines même sont surprenantes voire erronées. La presse est totalement libre. Aussi, ne reprochez pas à quiconque, à la majorité ou au Gouvernement, ce que la presse a pu relater.

Vous jugez tardif le dépôt de certains amendements. S’agissant de celui qui porte sur 300 millions d’euros, cela s’explique – sans peut-être l’excuser – de la façon suivante. Vous savez que la loi Duflot a supprimé le prélèvement sur le potentiel financier et que seule une loi de finances ou de financement peut désormais prendre des dispositions qui créent de nouveaux prélèvements ou relèvent des prélèvements existants. Il n’était donc pas possible, dans la loi Duflot, de compenser la suppression du prélèvement sur le potentiel financier par une recette d’un montant équivalent, puisqu’il est bien évident que la situation des finances publiques ne permet pas des pertes de recettes de ce niveau-là sans une compensation intégrale. Si la compensation n’a pas eu lieu immédiatement, c’est précisément parce que cette règle existe, dont, je crois, vous approuvez le principe puisqu’elle assure une bonne gestion des finances publiques. Cette compensation est donc présentée au Parlement dans le cadre d’une loi de finances rectificative. J’espère que l’Assemblée nationale votera ce que le Gouvernement propose.

Quant à votre demande concernant la réunion de la commission, le Gouvernement n’a pas à interférer dans une décision qui vous revient. Les parlementaires sont maîtres de l’organisation de leurs travaux, et je comprendrais, sans m’en formaliser ni être choqué, que la commission se réunisse pendant une demi-heure ou une heure, sous le contrôle du président et du rapporteur général de la commission des finances, pour examiner ces amendements.

Quant au principe qui veut que le Gouvernement puisse déposer des amendements, il n’est pas contestable. Vous sembliez estimer que les amendements du Gouvernement étaient partis au contrôle de recevabilité. C’est sans doute votre agacement qui l’emportait sur votre expérience puisque, vous le savez, les amendements du Gouvernement n’ont pas à passer le filtre de la recevabilité, ils ne sont pas soumis à la censure de l’article 40, c’est-à-dire du président de la commission des finances qui l’exerce par délégation pour le président de l’Assemblée nationale.

Sans solliciter quoi que ce soit, ni rejeter a priori une décision de la commission quant à l’organisation de ses travaux, le Gouvernement pourrait comprendre qu’elle se réunisse. J’ai été président de la commission des finances. Le souvenir n’est pas si lointain que j’en aie oublié les nécessités.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Madame la présidente, je ne reviendrai pas sur les propos du ministre et je m’en remettrai aux décisions que pourrait prendre le président de la commission des finances sur l’organisation de nos travaux.

Permettez-moi de vous dire très amicalement, monsieur le ministre, que je ne suis pas dans les conditions les plus optimales pour examiner ces amendements, dont certains nous sont parvenus assez tard dans la nuit.

Mais, avant de suspendre nos travaux, peut-être pourrions-nous, madame la présidente, purger les sous-amendements à l’amendement n° 5 rectifié du Gouvernement, ceux qui concernent les taux de TVA. Cela laisserait un peu de temps à nos collaborateurs pour analyser les choses.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre, je me suis mal exprimé, il est vrai, sur la procédure. Mais on nous a parlé de quatorze amendements : c’est la rumeur qui court. Je me suis reporté au site de l’Assemblée et l’amendement sur les plus-values dont fait état le journal Les Échos y figure, mais il y a une série d’amendements occultés, auxquels nous n’avons pas accès. Le rapporteur général vient de nous faire comprendre qu’il ne s’agissait pas seulement d’un ou deux amendements : y en a-t-il quatorze comme on le dit ? Pourriez nous préciser cela ?

Et si le président Carrez en est d’accord, il faudrait que nous puissions au moins les examiner en commission avant de les discuter en séance publique. Comment examiner directement ici des amendements à 150, 200 ou 300 millions, sans possibilité de correction au Sénat qui, aux dernières nouvelles, vote contre tout ? En commission mixte paritaire, souvent il est trop tard. Il y a un problème de dysfonctionnement de l’action gouvernementale et il est urgent, encore une fois si notre président en est d’accord, que la commission se réunisse.

Mme la présidente. Je précise que tous les amendements déposés, quels qu’ils soient, sont en ligne sur le site de l’Assemblée.

M. Charles de Courson. Non !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Si !

M. Charles de Courson. Depuis dix minutes ?

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton

M. Hervé Mariton. Il s’agit d’amendements d’augmentation des impôts, alors même que le Gouvernement s’était montré très insistant en commission pour dire que les augmentations d’impôts seraient limitées au collectif de l’été et au projet de loi de finances, mais qu’il n’y en aurait pas dans le collectif de fin d’année. Sans doute est-ce plus commode de procéder par voie d’amendements…

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Monsieur Mariton, plutôt que des impôts, il me paraît plus honnête de parler des prélèvements obligatoires. En effet, dès lors que cette augmentation compense une baisse à due concurrence, il n’y a pas d’augmentation des prélèvements obligatoires.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Je fais partie, à l’image du rapporteur général, des députés qui ne connaissent pas ces amendements.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Ce n’est pas exactement ce que j’ai dit.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Mais, si j’ai bien compris, l’un d’entre eux majore la taxation des plus-values immobilières sur les résidences secondaires pour compenser un manque à gagner concernant le financement du logement social, suite à la suppression du prélèvement qui devait être opéré sur les « dodus dormants ». Je ferai donc observer au ministre que cette majoration constitue un prélèvement net sur les ménages, alors qu’elle vient compenser un mouvement interne aux organismes HLM. Il s’agit donc bien d’un impôt supplémentaire sur les ménages, et compte tenu des montants évoqués, il me paraît indispensable que nous examinions ces amendements en commission des finances.

La semaine dernière, le Gouvernement a accepté d’être auditionné – c’était la moindre des choses –à propos de l’amendement relatif au crédit d’impôt compétitivité. Je ne pense pas utile qu’on demande en l’occurrence une nouvelle audition du Gouvernement ; en revanche il nous faut regarder entre nous cet amendement. S’il y en a une douzaine d’autres, que pour ma part je ne connais pas, raison de plus pour les examiner.

Cependant, ce que je vous propose, c’est que nous terminions l’examen des amendements après l’article 24. Ensuite, je demanderai une suspension de séance pour que nous nous réunissions en commission, mais il faut entre-temps que nous vérifiions, monsieur le rapporteur général, que nous avons bien à notre disposition tous les amendements du Gouvernement.

Mme la présidente. Merci, monsieur le président, pour la clarté de ces explications. La commission des finances se réunira donc à l’issue de l’examen des amendements après l’article 24.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre, je vous confirme ce que je vous ai dit : les amendements ne sont toujours pas sur le site, je viens de le faire vérifier par les collaborateurs de mon groupe.

Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Goldberg.

M. Daniel Goldberg. Le rapporteur du budget relatif au logement que je suis est content d’avoir eu accès au site des Échos hier soir pour découvrir ce nouveau dispositif. Cela mis à part, la difficulté est que l’amendement n° 409 dont nous parlons vient en discussion après l’article 24.

Mme la présidente. Il me semble que le rapporteur général et le président de la commission des finances proposaient que nous « purgions », pour reprendre cette expression élégante, les amendements et sous-amendements déjà inscrits sur la feuille jaune, sans aborder aucun des nouveaux amendements du Gouvernement, dont le rapporteur général et le président de la commission des finances n’ont pris connaissance que très récemment : suis-je fidèle à leur pensée ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Parfaitement fidèle, madame la présidente.

Mme la présidente. Nous allons donc reprendre la discussion des sous-amendements à l’amendement n° 5 rectifié du Gouvernement.

Seconde partie (suite)

Mme la présidente. Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles de la seconde partie du projet de loi, s’arrêtant au sous-amendement n° 372 à l’amendement n° 5 rectifié portant article additionnel après l’article 24.

Après l’article 24 (suite)

Mme la présidente. Je rappelle que l’amendement n° 5 rectifié fait l’objet d’une discussion commune avec l’amendement n° 93, que nous examinerons après les sous-amendements.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir le sous-amendement n° 372.

M. Marc Le Fur. Monsieur le ministre, nous le disions hier soir à propos du cinéma, vous n’aimez pas le peuple et vous n’aimez pas les loisirs populaires. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) La preuve en est faite aujourd’hui encore concernant les parcs de loisirs.

Les parcs de loisirs, ce sont les distractions du dimanche, pour bien des familles de chez nous qui y vont avec leurs enfants. Papa, maman, les enfants : chacun aura compris. (Même mouvement.) Ils vont se distraire, ils vont prendre un peu de bon temps : il faut qu’ils sachent qu’ils vont acquitter un taux de TVA de trois points supérieur à ce qu’il est actuellement. En plus, quand ils consommeront au restaurant dans ces mêmes parcs de loisirs, ils paieront plus de TVA, cette dernière passant aussi de 7 à 10 %.

Vous allez ainsi mettre en danger l’équilibre de bon nombre d’activités économiques. Nous vous l’avons dit hier : quitte à augmenter la TVA, il fallait insister sur le taux normal et non sur le taux intermédiaire : vous pénalisez le logement, vous pénalisez aussi des activités économiques de proximité, dont les parcs de loisirs.

Mes chers collègues, ressaisissons-nous : avec un peu de bon sens, faisons en sorte que cette augmentation soit différée et réfléchie, sinon nous allons mettre en danger de nombreuses activités.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je vais vous donner satisfaction, monsieur Le Fur : vous demandez que l’augmentation soit différée, elle l’est. Si elle devait intervenir, elle prendrait effet au 1er janvier 2014.

Je confirme que le ministre Pierre Moscovici, il l’a indiqué en réponse à une interpellation de M. Alauzet, est en plein accord avec le rapporteur général. Je peux même vous dire que le Premier ministre est lui aussi parfaitement d’accord avec ce dispositif, comme l’ensemble du Gouvernement. Nous proposons une modulation des taux de TVA pour compenser le tiers de la dépense liée à la création du crédit d’impôt compétitivité emploi, mais le Gouvernement souhaite – il est même demandeur – que tous les députés et particulièrement ceux de la commission des finances s’attachent, pendant les premiers mois de l’année 2013, voire au-delà, à lui faire des propositions qui, en respectant les deux conditions qu’il a rappelées – le produit constant, la compatibilité avec les règles européennes – permettront de répondre peu ou prou à l’ensemble des préoccupations légitimes exprimées dans l’ensemble des sous-amendements que nous examinons et à propos desquels nous risquons d’assister à la répétition des débats que nous avons pu avoir il y a quelques mois.

Je demanderai donc à l’Assemblée de ne retenir aucun des sous-amendements visant à moduler les taux de TVA, pour que nous puissions par la suite prendre une décision d’ensemble qui respecte les deux règles posées par le Gouvernement. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement,

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Le Gouvernement partage l’appréciation du rapporteur général. Ce qui est défini dans ce projet de loi de finances rectificative, c’est un cadre, une méthode, qui seront complétés en cours d’année par un travail qui réunira l’ensemble des commissions concernées, afin que, dans ce cadre, avec cet objectif de recettes, les parlementaires décident quelles modulations des taux de TVA il conviendra d’opérer pour financer le crédit d’impôt compétitivité emploi et privilégier ou non tel ou tel secteur ou activité économique. Le Gouvernement soutient cette vision des choses. Il y a donc entre nous, monsieur Le Fur, une divergence de méthode.

Il y a peut-être aussi une autre divergence, que je ne dirai pas de bon sens car le vôtre est bien connu et je ne voudrais pas le mettre en cause, mais il me semble que considérer qu’une modification du taux de TVA fin 2012, dans un sens ou dans l’autre, mais s’appliquant dans plus d’un an, pourrait inciter ou désinciter les familles à aller l’an prochain dans les parcs d’attraction, c’est peut-être exagérer les capacités d’anticipation des agents économiques, et en l’occurrence des familles. Je ne crois pas qu’on les empêchera d’aller dans ces parcs en 2013, au motif qu’en 2014 la TVA serait augmentée. Il n’y a donc ni urgence, ni nécessité de préserver des comportements : les familles qui souhaitent profiter de ces loisirs doivent pouvoir continuer à le faire. Il y a en revanche à travailler dans l’année qui vient : c’est ce à quoi le Gouvernement engage le Parlement, en le laissant naturellement libre de son organisation et des choix finaux qui seront opérés dans le respect de l’enveloppe prescrite.

Au bénéfice de ces arguments, monsieur Le Fur, peut-être comprendrez-vous que le Gouvernement appelle au rejet de votre sous-amendement.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Woerth.

M. Éric Woerth. Une fois n’est pas coutume, monsieur le ministre, je suis doublement d’accord avec le Gouvernement.

D’accord, d’une part, pour que vous utilisiez la TVA sociale : c’est une bonne idée que nous avions proposée et nous ne saurions vous contredire à ce sujet car c’est un instrument efficace pour asseoir une politique de compétitivité. Elle est mal organisée, votre TVA sociale, parce que faire peu sur le taux normal et beaucoup sur les taux réduit et intermédiaire, ce n’est pas de bonne pratique. Gilles Carrez l’a dit, vous exonérez ainsi beaucoup de biens importés – certes c’est le même consommateur qui paie, mais il y a du dumping social de la part des pays qui n’ont pas les charges sociales que nous avons – et puis vous matraquez un peu, en passant de 7 à 10 %, les biens de consommation classiques des Français. Mais nous aurons ce débat.

D’accord, d’autre part, sur la méthode. Il y a aussi un parc de loisirs dans ma circonscription, mais je ne crois pas qu’il faille légiférer secteur par secteur : il faut une vision globale et générale. Nous avons un peu de temps, puisque vous avez programmé pour 2014 l’augmentation des taux, mais il faudra une proposition sérieuse, solide, du Gouvernement sur les taux définitifs à l’issue de cette bonne réforme qu’est la TVA sociale.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Je rebondis sur l’idée du ministre. Pourquoi ne retire-t-il pas l’amendement n° 5 rectifié ? Il ne sert à rien, puisque le rapporteur général nous dit qu’il faut voter contre toute modification de la classification des biens et services entre les différents taux. C’est donc un simple affichage, la mesure ne s’appliquant qu’au 1er janvier 2014. Retirez votre amendement, cela nous fera gagner une heure et demie de débats !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Retirez vos sous-amendements, vous gagnerez autant de temps !

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. Je suis tout à fait d’accord pour retirer mon sous-amendement à condition que l’amendement n° 5 rectifié soit lui-même retiré. C’est logique et cohérent: dès lors qu’on me refuse de fixer un taux de TVA, je ne vois pas pourquoi nous adopterions des dispositions générales sur l’ensemble des taux.

(Le sous-amendement n° 372 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir le sous-amendement n° 364.

M. Nicolas Sansu. Ce sous-amendement vise à exclure de la hausse de la TVA les produits d’origine agricole, de la pêche, de la pisciculture et de l’aviculture n’ayant subi aucune transformation, le bois de chauffage et les produits assimilés, ou encore les aliments simples et composés utilisés pour la nourriture du bétail.

J’insisterai sur le bois de chauffage parce qu’il s’agit d’un produit de première nécessité. De plus en plus de foyers modestes se chauffent au bois, notamment en milieu rural. Le taux de TVA appliqué au bois de chauffage – et j’interpelle ici nos collègues de l’opposition – est passé à 7 % du fait de l’ancienne majorité et, en le portant à 10 % aujourd’hui, on aboutira à une réelle distorsion avec les autres moyens de chauffage.

J’ai bien entendu le rapporteur général et le ministre mais je pense que notre façon de fonctionner pose problème. Douze, treize ou quatorze amendements du Gouvernement viennent d’arriver en séance alors qu’on affirme, et cela me semble tout de même bizarre, qu’on reverra l’architecture complète de la TVA courant 2013, le présent dispositif ne devant s’appliquer qu’au 1er janvier 2014. J’ai peur qu’on ne revienne pas, alors, sur tout ce qui aura été adopté. Je sais qu’un certain nombre de secteurs dont on promet d’examiner le cas dans le cadre d’une discussion globale ne trouveront pas satisfaction lors de cette discussion en 2013.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Même avis que précédemment.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Au-delà du sous-amendement n° 364, l’erreur, monsieur le ministre, était d’introduire volontairement et rapidement le crédit d’impôt compétitivité emploi, avec l’intégration des trois nouveaux taux de TVA, sans pour autant aborder le fond. On ne peut ouvrir un chantier aussi large pour aussitôt le fermer en annonçant qu’on le reprendra dans le courant de l’année 2013. C’est un rendez-vous manqué et nous aurions dû pouvoir discuter sereinement de tous ces dispositifs, et notamment du taux de TVA sur les produits d’origine agricole : bien évidemment, nous sommes sensibles à l’amendement du groupe communiste.

M. Nicolas Sansu. Il s’agit du groupe GDR !

M. Marc Le Fur. Je demande la parole.

Mme la présidente. Votre groupe s’est déjà exprimé, monsieur Le Fur.

M. Marc Le Fur. La discussion des amendements ne se fait pas par groupe, madame la présidente, c’est ridicule !

(Le sous-amendement n° 364 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois sous-amendements, nos 107, 355 et 365, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir le sous-amendement n° 107.

M. Éric Alauzet. Nonobstant les remarques du rapporteur général, du ministre délégué et la réponse que M. Moscovici m’a faite tout à l’heure dans l’hémicycle, nous allons proposer plusieurs sous-amendements que nous maintiendrons parce qu’ils contribuent au débat promis par le Gouvernement sur l’épineux problème du financement du crédit d’impôt.

Pour ce qui est du logement, il s’agit tout de même d’une affaire à 600 millions d’euros, soit trois points de TVA, sur une dépense globale de 20 milliards, et cette hausse va avoir un fort impact sur toute l’activité économique autour du logement social.

D’une certaine manière, ces 600 millions effacent les 500 que le ministère du logement a pu obtenir pour développer sa politique. Nous avons donc l’impression que ce qu’on donne d’une main, on le reprend de l’autre. Je ne suis pas sûr que nous ayons totalement conscience de ce qui se passe en réalité : il s’agit d’une opération à somme nulle concernant une politique que la majorité considère pourtant comme prioritaire. Le logement est en effet l’alpha et l’oméga du développement durable du point de vue économique, social et environnemental.

L’augmentation du taux de TVA implique le ralentissement des programmes de construction de logements destinés à héberger des personnes âgées, ou encore le ralentissement de l’ouverture d’hébergements temporaires d’urgence – bref, tous les secteurs seront touchés. Elle va en outre peser sur les collectivités locales, déjà tant mises à contribution ces dernières années par les reculs successifs des financements du logement public organisés par la précédente majorité – nous nous en sommes tous émus. Les collectivités ont fait des efforts importants ; elles ne le pourront plus, d’autant qu’on va leur demander de contribuer au remboursement de la dette et qu’on va sans doute diminuer leurs dotations de fonctionnement et d’investissement.

Tout cela confine donc à une certaine incohérence et l’objectif de 150 000 logements neufs fixé pour les années à venir se trouve totalement remis en cause. Pour ces raisons, nous proposons le maintien de la TVA à 7 % pour le logement social, et même l’application du taux réduit à 5%.

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir le sous-amendement n° 355.

M. Charles de Courson. Laissez-moi auparavant vous montrer la liasse d’amendements du Gouvernement qui viennent d’être déposés : il y en a plus de quatorze. C’est incroyable ! Ils viennent d’être mis en ligne. Voyez-vous de quelle façon nous travaillons ?

M. Daniel Goldberg. On a déjà connu ça !

M. Charles de Courson. Comment cela ? Il est vrai, mon cher collègue, que vous avez une si longue expérience parlementaire… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Pour moi, c’est du jamais vu !

M. Daniel Goldberg. Si, au cours de la dernière législature !

M. Charles de Courson. Plus de quatorze amendements alors que nous nous trouvons dans la dernière phase du vote d’un projet de loi de finances rectificative ; je n’ai, j’y insiste, jamais vu cela et j’ai, moi, vingt ans d’expérience parlementaire. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Arrêtez donc de défendre l’indéfendable !

M. Thomas Thévenoud. Vos propos sont inadmissibles !

M. Charles de Courson. Arrêtez d’humilier le Parlement, mes chers collègues. (Mêmes mouvements.) Vous vous humiliez vous-mêmes par votre comportement. Faites preuve d’un peu d’indépendance d’esprit !

Mmes Marie-Christine Dalloz et Annie Genevard. Bravo !

M. Thomas Thévenoud. Pour qui vous prenez-vous ?

M. Charles de Courson. Je me prends pour un représentant de la nation française qui en a assez de l’humiliation du Parlement ! Vous aimez l’humiliation, pas moi ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. Poursuivez, monsieur de Courson, il vous reste peu de temps.

M. Daniel Goldberg. Vous vous êtes tu pendant cinq ans, monsieur de Courson, et j’étais bien là pour le constater !

M. Charles de Courson. Vous dites n’importe quoi !

J’en viens, madame la présidente, au sous-amendement de mon groupe.

Mme la présidente. Vous avez trente secondes.

M. Charles de Courson. Lorsque le taux réduit de TVA a été porté de 5,5 à 7 %, il y a eu un grand débat sur le logement, comme vous vous en souvenez peut-être, et notamment sur les dispositifs temporaires. Cette mesure représentait un surcoût de l’ordre de 225 millions d’euros. Surcoût que vous entendez doubler et qui atteindra donc cette fois environ 450 millions d’euros.

Les amendements que le Gouvernement vient de déposer prévoient toute une série de mesures concernant le logement. Vous menez donc une politique complètement incohérente : vous augmentez le coût du logement pour ensuite favoriser des prêts à taux zéro !

Nous réaffirmons que, dans le cadre d’une politique globale du logement, il ne faut pas augmenter le taux de TVA sur les logements sociaux de 7 à 10 %. Vous, vous faites du bricolage avec une petite mesure par ci, une petite mesure par là…

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir le sous-amendement n° 365.

M. Nicolas Sansu. Ce sous-amendement a le même objet que ceux avec lesquels il est en discussion commune, même si je préfère celui de Mme Sas et de M. Alauzet puisqu’il propose de repasser au taux réduit de 5 % pour les opérations d’investissement réalisées dans le secteur du logement social. Comme l’a si bien dit notre collègue Jean-Louis Dumont hier soir, le logement social est un produit de première nécessité. Voilà ce qui doit nous guider.

Nous pourrions montrer dès aujourd’hui au Gouvernement que la représentation nationale veut commencer à travailler pleinement sur la question de la TVA. Puisqu’on nous propose un grand débat, partons, en matière de logement social, avec un acquis et nous aurons ensuite d’autant plus de poids dans le cadre de la discussion sur l’architecture de la TVA. J’en veux pour preuve que c’est un ministre du Gouvernement qui demande un aménagement de la TVA sur le logement. Mme Duflot, ce matin, sur une radio bien connue, a déclaré que, pour elle, l’augmentation du taux de TVA telle qu’elle est prévue allait mettre en péril la politique du logement social.

Puisque, de toute façon, on va revoir tout le dispositif de la TVA et qu’il n’est pas nécessaire de disposer de l’enveloppe prévue – ledit dispositif ne s’appliquera qu’en 2014 –, je vous propose de réaliser ce geste symbolique en faveur du logement et donc de faire en sorte que nous nous retrouvions pleinement sur ce dossier.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission sur ces trois sous-amendements ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je ne répéterai pas ce que j’ai dit tout à l’heure, donc avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces mêmes sous-amendements ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.

M. Nicolas Sansu. Scandaleux !

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Pierre-Alain Muet. Nous avons défini la bonne méthode. Le Gouvernement a raison d’annoncer les modalités de financement du crédit d’impôt, et en particulier une modulation des trois taux de TVA. Il a déclaré qu’il reviendrait aux parlementaires de réfléchir au périmètre de ces taux, notamment le taux de 5 % et celui de 7 %. Ce travail mérite d’être fait.

On a bien entendu que le logement social ou la billetterie des cinémas étaient des sujets auxquels les parlementaires tenaient. Nous avons, j’y insiste, défini une méthode et nous devons nous y tenir. C’est la seule position cohérente.

Mme Marie-Christine Dalloz. La méthode, c’est vous qui l’avez définie !

M. Pierre-Alain Muet. Oui, c’est nous. C’est aussi le rôle d’une majorité de s’exprimer. Les députés de mon groupe, en tout cas, s’en tiendront à cette méthode quelle que soit leur appréciation sur les choix qu’il conviendra de faire.

M. Charles de Courson. Mon Dieu…

Mme la présidente. La parole est à Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas. J’irai dans le même sens que notre collègue Éric Alauzet. Je rappellerai seulement que nous avons pris devant les Français l’engagement de construire 150 000 logements sociaux par an. Or porter de 7 à 10 % la TVA sur le logement social reviendrait à annihiler tous les efforts réalisés par la ministre du logement et par l’ensemble du Gouvernement pour réunir les financements nécessaires pour la construction de logements sociaux. Je ne comprendrais pas que nous votions cette hausse de la TVA, totalement contradictoire avec les engagements que nous avons pris devant les Français.

(Les sous-amendements nos 107, 355 et 365, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir le sous-amendement n° 366.

M. Nicolas Sansu. Nous avons déjà débattu d’une partie de ce sous-amendement puisqu’il concerne notamment les droits d’entrée dans les salles de spectacle cinématographique. Nous souhaitons, en l’occurrence, insister sur les transports publics. Là non plus, on ne peut vouloir à la fois favoriser le transport collectif et porter le taux de TVA le concernant de 7 à 10 %, sachant qu’une partie de cette augmentation sera prise en charge par les voyageurs et l’autre par les collectivités locales, parfois en grande difficulté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je me suis déjà exprimé à ce sujet : défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Même avis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Je m’exprimerai sur le prix des billets d’entrée au cinéma. Plusieurs d’entre nous l’ont dit hier, je pense notamment au président de la commission des affaires culturelles, la sortie au cinéma est la pratique culturelle aujourd’hui la plus populaire. Nous regrettons beaucoup que M. Bloche ait retiré ses amendements et que l’Assemblée ait rejeté celui de M. Le Fur. On peut en effet légitimement se demander si le cinéma est toujours une pratique culturelle aux yeux du ministère de la culture et du Gouvernement.

Je reprendrai un argument de l’exposé sommaire de l’un des amendements retirés par M. Bloche ; l’expérience espagnole est éclairante : l’augmentation à 21 % du taux de TVA sur les billets d’entrée a privé le territoire national de soixante salles de cinéma. Selon toute probabilité, l’augmentation très sensible du ticket de cinéma risque, en France, de fragiliser un peu plus les petites salles rurales.

Cette augmentation pose également le problème de la convergence des politiques publiques. Sauf erreur de ma part, la numérisation des salles a fait l’objet d’un soutien financier de la part de l’État et des régions. Il y a donc une volonté d’encourager le cinéma, y compris comme outil d’aménagement culturel du territoire. Nous regrettons d’autant plus, avec les professionnels du cinéma, la décision du Gouvernement. C’est pourquoi nous soutenons le présent sous-amendement.

(Le sous-amendement n° 366 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux sous-amendements identiques, nos 108 et 367.

La parole est à Mme Eva Sas, pour soutenir le sous-amendement n° 108.

Mme Eva Sas. Je vais être très simple et très directe. Le rapporteur général a dit qu’il ne se répéterait pas, mais moi, je vais me répéter.

Le Président de la République et le Premier ministre ont voulu la conférence environnementale, au cours de laquelle ils ont pris l’engagement et se sont fixé comme objectif de rénover 600 000 logements anciens par an. C’est un objectif très ambitieux que nous partageons complètement ; nous sommes très fiers de participer à une majorité qui s’est donné un tel objectif.

Une fois de plus, malheureusement, l’augmentation de la TVA de 7 à 10 % sur les travaux de rénovation va à l’encontre de cet objectif. Une fois de plus, donc, je ne comprendrais pas que l’on augmente la TVA et que l’on aille ainsi à l’encontre des objectifs ambitieux que nous nous sommes donnés collectivement.

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir le sous-amendement n° 367.

M. Nicolas Sansu. Je ne vais pas en rajouter, après ce qu’a dit Mme Sas. Je noterai seulement qu’en un trimestre, le secteur du bâtiment et de la construction a perdu de nombreuses entreprises. Nous sommes tous confrontés, sur nos territoires, à ces petits artisans qui sont aujourd’hui obligés de déposer le bilan.

Je voudrais rappeler une chose, qu’a dite notre collègue Dumont, et qui mérite d’être répétée : le taux réduit de TVA sur les constructions et les rénovations avait été instauré sous le gouvernement Jospin, par le ministre Jean-Claude Gayssot. Je pense que c’était une bonne mesure à l’époque et qu’elle reste d’actualité.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Je voudrais dire un mot à nos collègues, pour ne pas être toujours laconique et éviter de répéter toujours les mêmes arguments.

Si je pense, et si je persiste à penser, qu’il est nécessaire que nous prenions un peu de temps pour jouer sur les taux de TVA, c’est aussi pour la raison que j’ai avancée hier et que je me permets d’exposer à nouveau à l’occasion de la discussion de cet amendement.

Le soutien que le CICE apportera aux entreprises va créer un contexte nouveau. J’ai cité l’exemple de la TVA restauration et exposé ce qu’elle allait coûter aux clients et rapporter aux chefs d’entreprise. Nous aurons le même débat sur le retour du CICE dans le secteur du bâtiment ; peut-être aborderons-nous d’ailleurs, dans un deuxième temps, la question des entreprises indépendantes ou sans salariés.

C’est à mes yeux une raison supplémentaire de faire un travail précis, secteur par secteur, ligne par ligne, bien de consommation par bien de consommation, service par service : nous verrons ainsi de quelle manière le soutien par le crédit d’impôt aura pu modifier les conditions au sein de chaque secteur. Il est de nombreux secteurs où l’impact du CICE, loin d’être négligeable, pourra compenser tout ou partie d’un mouvement sur la TVA.

Voilà un exercice intellectuel auquel nous devrons nous livrer. Dans un avenir très proche, je me saisirai personnellement de ce sujet, en ma qualité de rapporteur de notre commission des finances, et je vous présenterai, dans les deux ou trois premiers mois de l’année 2013, un état des lieux. Évaluer les conséquences du CICE, mais aussi les effets d’une augmentation d’un demi point ou d’un point de TVA sur tel ou tel secteur, c’est le travail auquel je vais me livrer dans les premiers mois de l’année. Mais vous comprendrez que, dans les derniers jours de décembre, je n’aie pas les moyens de le faire.

Avis défavorable, donc, sur ces sous-amendements.

M. Thierry Mandon. Très bien !

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Il est incontestable que nous avons besoin de temps, et aussi de méthode – que nous avons devinée, même si nous ne faisions pas partie du cercle qui l’a décidée.

Cela pose tout de même un problème : que je sois gestionnaire d’un réseau de transport, d’un centre de traitement de déchets ou d’un programme de logements, là, je ne bouge plus…

M. Christian Eckert, rapporteur général. Il n’y aura pas de changement en 2013 !

M. Éric Alauzet. Je ne bouge plus, car je ne sais pas à quelle sauce je vais être mangé en 2014.

M. Marc Le Fur. Et si je suis directeur d’un parc de loisirs ou d’une salle de cinéma ?

M. Éric Alauzet. Vous savez que nombre de ces projets s’étalent sur plusieurs années et on peut malheureusement parier que les organismes logeurs stériliseront toute décision dans les mois qui viennent. Prendre du temps, certes, mais à condition d’aller vite, parce que plus personne ne va bouger dans les mois qui viennent !

(Les sous-amendements identiques nos 108 et 367 ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir le sous-amendement n° 350.

M. Marc Le Fur. J’ai bien compris que le rapporteur général ne veut pas bouger. Il n’empêche que le débat existe : à partir du moment où il y a un amendement gouvernemental, il n’est pas illégitime de vouloir le sous-amender.

L’amendement n° 350, que je vous soumets, tend à résoudre, enfin, le problème de la vente alimentaire à emporter, sujet qui s’aggrave avec les dispositions que vous prenez. Jusqu’à maintenant, la TVA s’élevait à 5,5 % sur l’alimentation ordinaire et 7 % sur l’alimentation à emporter, soit un écart de 1,5 %. Demain, les taux s’élèveront respectivement à 5 et 10 %, soit 5 % d’écart.

Il faut absolument que nous résolvions ce problème, et mon idée est très simple. Prenons l’exemple d’un sandwich. Si on l’achète chez le boulanger et qu’il est impossible de le consommer sur place, il s’agit de vente à emporter et il est logique qu’on lui applique un taux de TVA de 5 %. En revanche, si on l’achète dans un lieu offrant une possibilité de consommation sur place, au McDo par exemple, alors on applique le taux de TVA sur la restauration à 10 %. Voilà un dispositif simple, objectif, qui peut être contrôlé et qui résulte d’une différence observable.

Il me semble indispensable que nous progressions sur ce sujet. Je rappelle que les taux de 5,5 % et 7 % ont été fixés par une directive illisible qui fait plusieurs dizaines de pages et qui ne résout aucun problème.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Ce n’est pas nous qui l’avons écrite !

M. Marc Le Fur. Je ne dis pas que c’est vous qui l’avez écrite, mais nous sommes là pour progresser, monsieur le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Nous, oui !

M. Marc Le Fur. Cette progression est d’autant plus indispensable, vous en conviendrez, que dans l’amendement gouvernemental, vous accentuez la différence entre les produits à emporter et les produits à consommer sur place. À un moment donné, il faut mettre des barrières strictes.

J’ai bien noté, monsieur le rapporteur général, que vous ne préconiserez pas l’adoption de mon sous-amendement, et que le Gouvernement ne le fera pas davantage, mais je voulais absolument verser cette question au débat, parce qu’elle est majeure. Il faut que nous la résolvions vite, si nous ne voulons pas voir se lever des groupes de pression de toutes sortes. Il faut que les choses soient claires et précises.

(Le sous-amendement n° 350, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard, pour soutenir le sous-amendement n° 336.

Mme Isabelle Attard. Le Gouvernement propose d’augmenter le taux de TVA intermédiaire de 7 à 10 % dans un grand nombre de secteurs. Si cette augmentation est parfois justifiée, il est bien des secteurs où elle est particulièrement préjudiciable.

La France est la première destination touristique au monde, et c’est notre culture qui attire les touristes. Je ne donnerai qu’un seul exemple : des dizaines de milliers d’Américains sont venus sur la butte Montmartre dans le seul but de voir l’épicerie du film Amélie Poulain. La culture, en France, souffre pourtant d’un problème d’image : son coût est considéré comme un poids pour les finances publiques, alors qu’elle est un investissement et qu’elle crée de nombreux emplois.

Lorsque le Gouvernement propose d’augmenter la TVA sur la cession de droits patrimoniaux des œuvres de l’esprit et sur tous les droits portant sur les œuvres cinématographiques, c’est l’ensemble des acteurs de la culture qu’il va frapper. Les éditeurs publieront moins de livres, les commandes de spectacles vivants diminueront, le prix des abonnements et des billets augmentera, ce qui va nuire à l’accès de tous aux spectacles vivants, et donc à la création.

Ce sont aussi des réalisateurs qui ne trouveront pas de financement pour leur tournage, et cette situation sera aggravée par l’augmentation des droits d’entrée dans les salles de cinéma. Cette hausse de la TVA est donc préjudiciable à un grand nombre d’emplois et à la viabilité des structures culturelles les plus fragiles, qu’on oublie trop souvent derrière des industries bien plus voyantes.

De très nombreuses activités culturelles ont vu leur taux passer de 5,5 à 7 % en 2012. Comment peut-on, un an plus tard, même si la mesure ne doit entrer en vigueur qu’au 1er janvier 2014, faire subir une nouvelle augmentation, qui représenterait un accroissement de 81 % ? Comment le Gouvernement peut-il afficher sa volonté d’offrir un accès à la culture pour tous et, dans le même temps, augmenter les droits d’entrée des parcs botaniques, des expositions, des musées, des salles de spectacle et de cinéma ? Nous nous posons les mêmes questions au sujet de l’avenir des télévisions locales. Mesdames et messieurs les députés, nous vous appelons à ne pas faire de l’exception culturelle française un vain mot et à maintenir le taux de TVA à 7 % pour tous ces secteurs.

S’agissant de la méthode, je ferai deux remarques. Pourquoi, d’abord, ne pas maintenir le statu quo et aborder la question de la TVA à l’occasion du débat sur l’exception culturelle française ?

M. Marc Le Fur. Très bien !

Mme Marie-Christine Dalloz. Là, on se retrouve.

M. Marc Le Fur. On se retrouve au cinéma. (Sourires)

Mme Isabelle Attard. Je ne comprends pas, ensuite, comment on peut expliquer aux Français que l’on va voter ce texte aujourd’hui, et discuter l’année prochaine de tous les taux de TVA qui auront été votés. Personnellement, je ne vois pas du tout comment je vais pouvoir l’expliquer.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur. Même avis que précédemment : défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Défavorable.

M. Marc Le Fur. D’habitude, dans la majorité, on argumente un peu !

Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Lefebvre.

M. Dominique Lefebvre. Je ferai d’abord une observation sur l’intervention de notre collègue. Pierre-Alain Muet est l’auteur d’un amendement tendant à ramener le taux de TVA à 5 %, au lieu de 5,5 %, pour le livre et le spectacle vivant.

M. Marc Le Fur. Personne n’y verra rien !

M. Dominique Lefebvre. Pour le reste, je veux une nouvelle fois, à la suite de ce qui a été dit depuis tout à l’heure, vous inciter à garder la méthode que nous avons choisie, dans un esprit de responsabilité.

Je rappelle que notre assemblée a voté hier le crédit d’impôt compétitivité emploi : cette mesure représente un allègement de 20 milliards de l’impôt sur les sociétés. C’est l’honneur de ce Gouvernement et de cette majorité d’annoncer d’emblée comment cette mesure sera financée. Je rappelle que 10 milliards d’euros proviendront d’économies réalisées en 2014 et 10 milliards de mesures fiscales, à travers la fiscalité écologique et un appel à la TVA.

Étant donné les délais, il me semble qu’il était beaucoup plus simple de partir de la répartition actuelle des produits entre les trois taux de TVA et d’indiquer qu’une somme serait à trouver dans ce cadre-là, à travers une restructuration des taux, que tout le monde considère comme logique et intelligente. Il est notamment logique qu’il y ait un taux intermédiaire à 10 %.

Mais il faut du temps pour cela, et c’est bien ce qu’a proposé le rapporteur général. Je crois que les ministres Pierre Moscovici et Jérôme Cahuzac se sont eux aussi exprimés sur ce point. Nous ferons ce travail au début de l’année prochaine.

C’est le pire des messages que nous pourrions adresser aujourd’hui aux acteurs, de leur dire qu’on n’adopte pas la même méthode pour l’ensemble de ces amendements, qu’il s’agisse du logement social, des transports publics, de la gestion des déchets ou de la culture.

Mme la présidente. La parole est à Mme Isabelle Attard.

Mme Isabelle Attard. Je voudrais revenir sur l’adoption d’un taux de TVA réduit pour les besoins primaires. Tout le monde connaît la pyramide de Maslow : à côté de la nourriture et du logement, j’inclus la culture parmi les besoins primaires. Je suis navrée, mais chaque être humain, chaque Français a le droit de bénéficier d’un taux de TVA réduit pour accéder à des spectacles, au cinéma ou à la lecture. Tout cela doit être englobé dans la même réflexion.

Je propose seulement un statu quo : restons-en à un taux de 7 % et engageons un vrai débat sur l’exception culturelle, sur ce que l’on en fait et sur ce que l’on veut proposer aux Français en matière de culture.

(Le sous-amendement n° 336 n'est pas adopté.)

Mme la présidente. Sur l'amendement n° 5 rectifié, je suis saisie par le groupe Union des démocrates et indépendants d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Philippe Vigier, pour soutenir le sous-amendement n° 356.

M. Philippe Vigier. Je pense que tout le monde a bien compris le sens de ce sous-amendement. Nous proposons que le relèvement du taux de TVA, que vous avez fixé au 1er janvier 2014, ne s’applique qu’à partir de 2017, en particulier s’agissant du taux survalorisé de 7 à 10 %.

Dans le secteur du logement – qui va être fortement touché, puisqu’on attend la fameuse construction des 150 000 logements –, en mettant en place le crédit d’impôt compétitivité emploi et en augmentant la TVA, vous conviendrez que la compétitivité ne sera pas améliorée. En outre, si la TVA augmente, l’emploi, dans ce secteur fragile, sera altéré.

En simplement deux années, nous allons augmenter la TVA de 5,5 % à 10 %, et si nous portons une part de responsabilité dans cette situation, la vôtre sera plus grande encore.

Ce serait un coup très dur pour le secteur du bâtiment et du logement. Différer cette augmentation de TVA à 2017 permettrait d’éviter un effondrement complet du secteur du bâtiment et des travaux publics, qui est déjà en grande souffrance, et qui souffrira encore plus, nous allons inéluctablement le constater l’année prochaine.

(Le sous-amendement n° 356, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir le sous-amendement n° 112.

M. Éric Alauzet. Ce sous-amendement porte sur l’eau et l’assainissement, c’est-à-dire l’hygiène de nos concitoyens. L’hygiène a contribué à l’amélioration de notre santé et de l’espérance de vie plus encore que les médicaments, qui sont pourtant concernés par la TVA à 5 %. Il est donc logique que l’eau et l’assainissement bénéficient également de ce niveau de TVA.

Si nous votions le texte en l’état, cela signifierait trois points de TVA de plus sur la facture de l’usager, qui amputeront d’autant le pouvoir d’achat, en plus de tout le reste.

(Le sous-amendement n° 112, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Eva Sas, pour soutenir le sous-amendement n° 113.

Mme Eva Sas. J’ai la sensation de me répéter mais j’y insiste : nous avons pris des engagements devant les Français concernant les transports du quotidien. La priorité donnée aux transports collectifs a été réaffirmée par la majorité.

Il est donc extrêmement important pour nous de rappeler que nous devons favoriser les transports pour des questions de santé publique, d’émission de dioxyde de carbone et de qualité de vie de nos concitoyens. Je souhaite donc que le Gouvernement soit attentif à la question du taux de TVA sur les transports collectifs.

Je rappelle que le groupement des autorités responsables de transport, le GART, a plaidé pour le maintien du taux de TVA à 7 %. Il s’agit donc d’une préoccupation largement partagée dans les collectivités locales, parmi les écologistes, et j’espère qu’elle l’est également au sein du Gouvernement.

(Le sous-amendement n° 113, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir le sous-amendement n° 115.

M. Éric Alauzet. Ce sous-amendement porte sur les déchets ménagers, qui sont principalement issus de l’alimentation, taxée à 5 %. Nous n’évitons pas ces déchets autant que nous le souhaitons, et ils devraient donc être traités comme l’alimentation.

À la différence de ce que j’évoquais pour les secteurs de l’eau et de l’assainissement, qui ont connu une stabilité fiscale au cours des vingt dernières années, l’ensemble des taxes appliquées aux déchets a beaucoup augmenté. La situation devient insupportable pour les habitants. La moindre augmentation d’un euro par habitant devient un véritable cataclysme.

Au prélèvement de 8 % sur la gestion de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères par les services fiscaux et à la hausse de la TVA s’ajoute la suppression de la modulation de la TGAP décidée il y a quelques jours. Je n’y étais pas opposé, mais elle crée une augmentation sensible pour les usagers, et tout cela va faire beaucoup à gérer pour les élus locaux, je vous l’assure.

Mme la présidente. Quel est l'avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. Avis défavorable.

Mme la présidente. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Avis défavorable.

Mme la présidente. La parole est à M. Marc Le Fur.

M. Marc Le Fur. La discussion de ces sous-amendements va me permettre d’évoquer un incident. On vient de me refuser de déposer un sous-amendement, alors que l’on autorise tout au Gouvernement, qui vient de déposer quatorze amendements d’un coup.

M. Charles de Courson. Dix-huit !

M. Marc Le Fur. Dix-huit, vous avez raison. Et tout va si vite que nous les votons sans pratiquement les lire.

Permettez-moi donc d’évoquer le sous-amendement que je voulais déposer, bien que je sache qu’il aurait été repoussé. Nous sommes en train d’accentuer une difficulté que je souhaite aborder : le taux de TVA est différent pour l’alimentation humaine et l’alimentation animale.

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est de votre fait !

M. Marc Le Fur. L’alimentation humaine, taxée à 5,5 %, passerait à 5 %, tandis que l’alimentation animale, taxée aujourd’hui à 7 %, passerait à 10 %. L’écart s’accentue donc. Or, si nous envisageons le cas d’un producteur de lait qui vend à sa laiterie, il ne sait pas ce que va devenir son lait, qui peut être transformé en beurre destiné à l’alimentation humaine ou en poudre de lait qui sera utilisée pour l’élevage de veaux.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Mais c’est vous qui avez créé cette situation !

M. Marc Le Fur. Voilà un exemple concret de votre impréparation, de votre amateurisme ainsi que de l’incertitude que vous créez partout.

M. Christian Eckert, rapporteur général. C’est honteux de dire cela !

M. Marc Le Fur. Monsieur le rapporteur général, c’est notre façon de travailler qui est lamentable, là est le problème. Nous ne pouvons pas évoquer certains sujets majeurs. Des pans entiers de l’économie sont conditionnés par des systèmes fiscaux, mais nous ne pouvons pas l’évoquer. Nous nous donnons le temps d’émettre des pétitions de principe, mais pas d’aborder les sujets concrets. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)

M. Christian Eckert, rapporteur général. Intellectuellement, c’est honteux de dire cela, et le pire, c’est que vous le savez !

Mme la présidente. La parole est à M. Nicolas Sansu.

M. Nicolas Sansu. Pour en revenir au sous-amendement déposé par notre collègue Éric Alauzet, le rapporteur général nous a rappelé que, suite à l’adoption du crédit d’impôt, il fallait rapporter la hausse de la TVA à la baisse des charges salariales. S’agissant de l’assainissement, cette remarque n’est pas valable, et les collectivités seront soumises à la double peine.

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Mandon.

M. Thierry Mandon. Madame la présidente, je demande une suspension de séance.

Suspension et reprise de la séance

Mme la présidente. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures cinq, est reprise à dix-huit heures quinze.)

Mme la présidente. La séance est reprise.

Je mets aux voix le sous-amendement n° 115.

(Le sous-amendement n° 115 n’est pas adopté.)

Mme la présidente. Nous en revenons à l’amendement n° 5 rectifié, sur lequel un scrutin public a été demandé.

La parole est à M. Nicolas Sansu, pour une explication de vote.

M. Nicolas Sansu. Madame la présidente, il est normal d’expliquer son vote sur un amendement aussi important.

Comme la logique le veut, l’amendement n° 5 vient après l’amendement n° 4. Ce dernier est le péché originel : c’est celui qui crée le crédit d’impôt compétitivité emploi dans tous les secteurs, sans aucune condition, et sans cibler exactement le secteur de l’industrie, qui a le plus besoin d’aide.

Je rappellerai les propos de M. le Président de la République parus dans le quotidien Libération, que je viens de relire.

M. Thomas Thévenoud. Excellente lecture !

M. Nicolas Sansu. Le Président de la République expliquait que l’urgence, pour aider les entreprises, notamment industrielles, était de baisser à 20 % l’impôt sur les sociétés…

M. Jean-Marc Germain. Vous avez d’excellentes lectures !

M. Nicolas Sansu. En effet !

…pour les entreprises qui investissent dans l’outil productif (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. Nicolas Sansu. Je comprends, mes chers collègues, que vous ne vouliez pas que je rappelle ces propos !

Je parlais des entreprises qui investissent dans l’outil productif, la formation et les salaires. Le Président de la République proposait également de remonter à 40 % l’impôt sur les sociétés pour les entreprises qui distribuent leurs profits en dividendes. Je pense que c’est le débat que nous devons avoir.

Hier, vous avez voté le crédit d’impôt de manière aveugle. Aujourd’hui, pour compenser ces 20 milliards d’euros de diminution aveugle et excessive de l’impôt sur les sociétés, vous nous proposez, monsieur le ministre, de voter une augmentation de la TVA, qui est tout sauf un impôt juste. Je comprends que nos collègues du groupe SRC soient un peu gênés aux entournures de voter l’amendement n° 5 rectifié. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Pour ma part,…

M. Rémi Pauvros. Vous êtes dans l’opposition ?

Plusieurs députés des groupes UMP et Rassemblement-UMP. Avec nous !

M. Nicolas Sansu. Chers collègues de la majorité, nous étions ensemble au mois de juillet pour voter contre la TVA sociale.

M. Rémi Pauvros. Exactement !

M. Nicolas Sansu. Pour ma part, je n’ai pas changé d’avis. C’est donc en pleine cohérence que le groupe GDR que j’ai l’honneur de représenter votera contre l’amendement n° 5 rectifié. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, UMP et Rassemblement-UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Patrick Hetzel et M. Gérald Darmanin. Excellent !

M. Gérald Darmanin. La gauche se divise !

M. Pierre Léautey. Mais regardez-vous !

Mme la présidente. La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Mes chers collègues, le groupe UDI a demandé un scrutin public sur cet amendement n° 5 rectifié. Pourquoi ? Premièrement, cet amendement est totalement inutile, comme M. le ministre l’a reconnu lui-même, puisqu’il n’a aucune portée et que nous allons le modifier à deux ou trois reprises avant qu’il ne soit mis en œuvre au 1er janvier 2014. Avouez que ce débat est tout de même surréaliste !

Deuxième raison : chers collègues du groupe SRC, je crois en la démocratie,…

M. Thomas Thévenoud. Appliquez-la !

M. Charles de Courson. …et je pense que mentir au peuple a toujours des conséquences désastreuses, non seulement pour vous sur le plan électoral, mais aussi pour l’ensemble de la classe politique. Vous vous êtes engagés devant vos électeurs à ne pas augmenter la TVA ; or vous l’augmentez aujourd’hui, contrairement aux engagements que vous avez pris devant le peuple français ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI, UMP et Rassemblement-UMP.)

Nous, les centristes, nous n’avons pas trompé nos électeurs.

M. Thomas Thévenoud et M. Matthias Fekl. Vous le faites depuis dix ans !

M. Charles de Courson. Cela fait dix ans que nous disons qu’il faut baisser les charges sociales et augmenter le taux de TVA. C’est courageux ! (« Dix ans ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Vous hurlez, mais vous savez que je dis vrai ! (Exclamations sur les mêmes bancs.) Vous avez trahi vos électeurs !

M. Marc Le Fur et M. Patrick Hetzel. Bravo !

M. Charles de Courson. Je vous rappelle les propos du Premier ministre, M. Ayrault, il y a trois mois : « Jamais nous n’augmenterons le taux de TVA, car cet impôt est injuste. » Oui ou non ?

M. Yves Albarello. Oui !

M. Charles de Courson. Y en a-t-il un seul parmi vous…

M. Yves Albarello. Il l’a bien dit !

M. Charles de Courson. Il l’a dit, et vous vous êtes engagés devant vos électeurs. Or vous les trahissez ! C’est très mauvais pour la démocratie. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Troisièmement, vous faites une faute économique en voulant augmenter le taux intermédiaire au lieu du taux normal, car l’efficacité économique porte sur le taux normal. On vous l’a expliqué, avec Gilles Carrez et beaucoup d’autres, mais vous persistez dans vos erreurs.

M. Thierry Benoit. Il a raison !

M. Charles de Courson. Par ailleurs, vous n’assumez même pas l’amendement du Gouvernement : vous essayez par tous les moyens de le sous-amender, mais vous n’y arrivez pas !

Quatrièmement, du point de vue de la procédure, cet amendement est un déni de parlementarisme.

M. Marc Le Fur. Zéro pointé !

M. Charles de Courson. Vous faites des choses incroyables ! Il n’y a plus de Parlement dans ce pays ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI, UMP et Rassemblement-UMP – Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. M. Ayrault et le groupe GDR ont tort sur un point : la TVA n’est pas un impôt injuste.

Plusieurs députés du groupe SRC. Si !

M. Hervé Mariton. Mais votre conversion fraîche et forcée vous amène, monsieur le ministre, chers collègues du groupe SRC, à une mauvaise réponse : les taux que vous avez fixés ne sont pas les bons. Ce ne sont pas les bons taux s’il s’agit de poursuivre l’objectif de compétitivité que le crédit d’impôt ne suffit pas à satisfaire. Ce ne sont pas non plus les bons taux pour rendre le débat plus clair et lisible pour nos concitoyens.

Toutes les heures que nous venons de passer et toutes les dizaines d’heures que nous allons passer pour savoir de quelle catégorie doit relever telle ou telle prestation, tel ou tel produit, n’auraient pas lieu d’être si vous n’aviez pas eu la main aussi lourde sur les taux intermédiaires et si, pour des raisons complètement incompréhensibles, vous n’aviez pas fait cet arbitrage économiquement absurde et socialement injuste d’augmenter fortement le taux intermédiaire et non le taux maximum. En effet, comme nous l’avions rappelé à l’époque lors du débat sur la TVA sociale, la TVA est un impôt juste parce que la différenciation des taux permet qu’une augmentation des taux supérieurs ne pénalise pas les catégories populaires. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Razzy Hammadi. C’est faux !

M. Hervé Mariton. Votre conversion sonne manifestement faux. Les Français auront à en payer les conséquences. Nous voterons contre cet amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP)

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. On ne peut évidemment pas dissocier notre position sur cet amendement de celle que nous avons adoptée hier sur l’amendement n° 4. On ne peut pas dissocier la recette de la dépense, ni la dépense de la recette !

S’agissant de la dépense, le problème est que nous dépensons sans doute un peu trop, dans la mesure où nous ne ciblons pas suffisamment le crédit d’impôt. En termes d’efficience de l’utilisation de l’argent public, je crains que nous ne dépensions plus que cela ne nous rapportera en emplois. Si nous avions mieux ciblé le crédit d’impôt, nous ne dépenserions pas 20 milliards d’euros, mais un peu moins : la pression aurait alors été moins forte aujourd’hui sur la TVA.

En outre, nous n’avons malheureusement pas pu trouver le moindre critère de développement durable à l’amendement dont nous avons discuté hier.

M. Marc Le Fur. C’est vrai !

M. Éric Alauzet. Ce n’était pourtant pas très difficile ! Nous avions travaillé ensemble de façon constructive au sujet de la BPI. Je n’ai pas compris que nous n’ayons pas travaillé de la même manière sur le crédit d’impôt.

S’agissant de la recette, dont nous discutons aujourd’hui, votre mesure pénalise des services publics écologiques. Elle pénalise socialement celles et ceux qui consomment de l’eau, qui produisent des déchets, qui utilisent des transports, qui se logent. Si nous poursuivons dans cette voie – mais j’ai bien compris que nous allions revoir tout cela –, nous risquons de plomber tout le secteur de la construction et de la rénovation de logements. Aussi bien pour la recette que pour la dépense, le développement durable est pris en otage.

Nous nous sommes abstenus hier. Pour des raisons de cohérence, et parce que nous ne sommes pas pour la politique du pire – je pense que nous nous sortirons de ce faux pas –, nous nous abstiendrons lors du vote sur cet amendement.

M. Philippe Vigier. Oh ! Faites-vous encore partie de la majorité ?

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Woerth.

M. Éric Woerth. Nous voterons évidemment contre cet amendement, pour les raisons évoquées par Hervé Mariton. Nous avons pris un an de retard pour la compétitivité – je dirais même un an et demi. (« Dix ans ! » sur les bancs du groupe SRC.) Depuis le mois de juillet, nous aurions dû à la fois baisser le coût du travail et augmenter la TVA, puisqu’il s’agit du seul impôt pouvant compenser la baisse des charges sociales. Nous avons pris un an et demi de retard, dans un contexte de crise absolument majeure. C’est votre responsabilité ! (« Dix ans ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Dix ans, dites-vous ? Mais alors, cela fait encore plus ! Ce n’est pas très brillant !

En même temps, vous acceptez la TVA sociale. Heureusement, c’est une bonne chose ! Vous avez fait un effort de lucidité tout à fait extraordinaire : vous avez admis qu’il n’y avait pas d’autre impôt que l’on puisse augmenter pour compenser la baisse des charges pesant sur le travail ou la création d’un crédit d’impôt – ce qui, au fond, revient au même. Vous devriez donc d’abord nous dire que nous n’avions pas tort, à l’époque, d’augmenter la TVA.

M. Razzy Hammadi. Si, vous aviez tort !

M. Éric Woerth. Le seul problème, c’est que vous, vous le faites mal. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Vous augmentez puissamment le taux réduit, en le faisant passer de 7 % à 10 % pour des biens de consommation courante. En revanche, vous augmentez très peu – seulement de 0,4 point – le taux normal de TVA, alors qu’il fallait l’augmenter de manière beaucoup plus importante, comme c’est d’ailleurs le cas dans la plupart des démocraties ayant un niveau de protection sociale très élevé, financé par un taux normal de TVA plus important que le nôtre.

Pour toutes ces raisons, nous voterons évidemment contre cet amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.)

M. Razzy Hammadi. Et vous nous donnez des leçons ?

Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Alain Muet.

M. Hervé Mariton. Il votera contre, lui aussi ?

M. Pierre-Alain Muet. Monsieur Woerth, vous avez pris dix ans de retard en matière de compétitivité. En 2002, quand l’ancienne majorité est arrivée au pouvoir, la balance commerciale de la France était excédentaire. Pendant sept ans, la France a connu un excédent commercial de 10, 20 et parfois même 30 milliards d’euros. À partir de 2003, le déficit s’est creusé tous les ans de 10 milliards d’euros,…

M. Rémi Pauvros. Et vous nous donnez des leçons ?

M. Pierre-Alain Muet. …pour atteindre 75 milliards l’année dernière. Qu’avez-vous fait ? Rien ! Vous n’avez rien fait en matière industrielle, vous n’avez pris aucune mesure. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) La seule chose que vous avez faite, c’est inventer, six mois avant les élections, une TVA dite « sociale » qui s’appliquerait au gouvernement suivant.

Oui, monsieur de Courson, nous nous sommes engagés à supprimer la TVA sociale. Nous l’avons supprimée, et nous avons eu raison. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP, Rassemblement-UMP et UDI.)

M. Patrick Hetzel. C’est faux !

M. Yves Albarello. Vous vous reniez ! Le bateau coule !

M. Pierre-Alain Muet. Nous avons eu raison pour deux motifs. D’abord, parce que la façon dont aviez instauré cette TVA sociale était injuste. (Mêmes mouvements.) Ensuite, parce que procéder à un allègement de charges pour les entreprises et reporter ces charges sur les ménages en 2013 et même en 2012 – car je rappelle que la TVA sociale devait entrer en vigueur en octobre –, aurait enfoncé notre économie dans la récession.

M. Hervé Mariton. Vous ne l’avez pas expliqué comme cela pendant la campagne électorale !

M. Pierre-Alain Muet. Nous avons choisi une autre solution. Oui, nous avons besoin d’agir en faveur de la compétitivité. Nous avons choisi un crédit d’impôt compétitivité qui donnera du souffle aux entreprises en 2013, mais dont le financement n’interviendra qu’en 2014.

M. Hervé Mariton. Pourquoi ne l’avez-vous pas dit aux Français ?

M. Frédéric Reiss. Double langage !

M. Pierre-Alain Muet. Je le dis à M. Sansu : ce crédit d’impôt compétitivité a des contreparties qui consistent, pour la première fois dans notre pays, en une négociation des partenaires sociaux. C’est un grand changement !

M. Charles de Courson. Vous avez menti aux Français !

M. Pierre-Alain Muet. Le rapport Gallois indique que la qualité de la négociation sociale est un facteur de compétitivité. C’est vrai, et c’est exactement ce qui va se passer !

M. Olivier Dassault. Comme pour les 35 heures ?

M. Pierre-Alain Muet. Nous avons défini des critères que nous soumettons à la négociation sociale. Les partenaires sociaux pourront étudier entreprise par entreprise comment est géré le crédit d’impôt.

Effectivement, une partie du financement proviendra, en 2014, d’une modulation des taux de TVA.

M. Hervé Mariton. L’aviez-vous annoncé aux Français ?

M. Pierre-Alain Muet. Instaurer un premier taux à 5 %, un taux intermédiaire à 10 % et un taux normal à 20 % : cela est cohérent.

M. Hervé Mariton. Cette mesure figurait-elle dans votre programme ?

M. Pierre-Alain Muet. C’est cohérent, et nous l’avions dit. La méthode du Gouvernement est cohérente et nous l’appliquerons, puisque M. le rapporteur général a annoncé qu’il engagerait dans les prochains mois une réflexion sur le contenu des différents taux.

M. Hervé Mariton. Cela mérite quand même un peu de réflexion !

M. Pierre-Alain Muet. Oui, cela mérite un peu de réflexion. (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et Rassemblement-UMP.) On sait très bien que nous sommes favorables, en tout cas à gauche de cet hémicycle, à ce que le logement social soit plutôt taxé à 5 % ; il en est de même pour les billets de cinéma, parce que la culture est importante. Mais il faut prendre le temps de la réflexion quand on met en place une réforme importante.

M. Hervé Mariton. Mais ce n’était pas dans votre programme !

M. Pierre-Alain Muet. C’est ce que fait le Gouvernement, et c’est pourquoi nous allons voter cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Braillard.

M. Thierry Braillard. Madame la présidente, j’expliquerai le vote du groupe RRDP.

M. Hervé Mariton. Qui est contre ?...

M. Thierry Braillard. Nos collègues du groupe UDI, qui se trouvent derrière moi, ont parfois eux aussi des trous de mémoire.

M. Charles de Courson et M. Philippe Vigier. Ah bon ?

M. Thierry Braillard. Je me souviens qu’en 2007, lors d’un débat entre MM. Fabius et Borloo qui reste dans les mémoires, M. Borloo avait dit : « Oui, il va falloir augmenter la TVA : cela s’appellera la TVA sociale, et nous le ferons car ce pays a besoin de compétitivité. » Quelques jours plus tard, après un échec électoral cinglant, cette proposition a été rangée dans un tiroir ou dans un placard, et elle n’est ressortie que cinq ans après. Et maintenant, ces mêmes personnes viennent nous donner des leçons en matière de choc de compétitivité, de plan de compétitivité et de TVA ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et SRC.)

Hier, le groupe RRDP a su montrer sa spécificité dans le débat, notamment sur la forme : le président Schwartzenberg s’est longtemps exprimé à cet égard. Notre groupe reste cohérent. Je me tourne vers nos collègues écologistes : on ne peut pas dire que ce pays a besoin de compétitivité, accompagner un plan aussi ambitieux que celui qui a été présenté par le Gouvernement, et en même temps trouver toujours quelque chose à redire quand il faut y aller. Maintenant, il faut y aller : le groupe RRDP votera cet amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP et SRC.)

Mme la présidente. Je vais maintenant mettre aux voix l’amendement n° 5 rectifié.

(Il est procédé au scrutin.)

Mme la présidente. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 175

Nombre de suffrages exprimés 167

Majorité absolue 84

(L’amendement n° 5 rectifié est adopté.)

M. Charles de Courson. Et l’amendement n° 93 ?

Mme la présidente. L’amendement n° 93 tombe du fait de l’adoption de l’amendement n° 5 rectifié puisqu’ils étaient en discussion commune.

(Mme Laurence Dumont remplace Mme Sandrine Mazetier au fauteuil de la présidence.)

Présidence de Mme Laurence Dumont,
vice-présidente

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission des finances, qui demande une suspension de séance.

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Madame la présidente, nous avons reçu, à l’heure actuelle, 35 amendements du Gouvernement…

M. Gérald Darmanin. C’est incroyable !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. …et nous en attendons encore d’autres.

J’ai regardé rapidement ces amendements, et je veux dire qu’il ne faut pas être trop impressionné par leur nombre, même si c’est une première – je le dis à certains de nos collègues qui s’étonnaient de la colère de M. de Courson, une colère tout à fait légitime. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Indépendamment de leur nombre, certains de ces amendements sont d’une importance exceptionnelle. Ils prévoient, par exemple, une réforme de la déduction pour investissement et de la déduction pour aléas, un sujet que l’on connaît bien dans cet hémicycle, mais qui aurait mérité de figurer dans le texte initial du Gouvernement…

M. Marc Le Fur. Tout à fait ! C’est très important !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. …et aurait dû, en tout état de cause, nous être communiqué il y a au moins quinze jours.

On trouve également, parmi les amendements, la proposition consistant à créer une taxe nouvelle, en l’occurrence une surtaxe sur les plus-values immobilières, susceptible de porter sur plusieurs centaines de millions d’euros…

M. Gérald Darmanin. C’est de l’improvisation !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. …et nécessitant un examen approfondi.

J’ai également trouvé une proposition consistant à prendre 170 millions d’euros à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie pour les affecter aux départements, la moitié de cette somme étant attribuée selon des critères objectifs tandis que l’autre moitié serait versée sous forme de subventions exceptionnelles.

M. Gérald Darmanin. À qui ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. À qui, il est effectivement permis de se poser la question.

Je veux encore citer un montage tout à fait unique, portant cette fois sur des milliards d’euros, relatif à l’Union des entreprises et des salariés pour le logement. Si j’ai bien compris, l’UESL emprunterait sur des fonds d’épargne une somme de l’ordre d’un milliard d’euros,…

M. Gérald Darmanin. Incroyable !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. …bénéficierait de la garantie de l’État et, à partir de ces fonds d’emprunt, verserait des subventions en lieu et place de l’État pour financer notamment l’ANRU.

M. Charles de Courson. C’est de la cavalerie !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est une débudgétisation très originale, puisque l’on fait emprunter un organisme extérieur avec la garantie de l’État, pour que celui-ci se substitue à l’État dans le subventionnement.

M. Marc Le Fur. C’est une politique d’expédients !

M. Gérald Darmanin. Ils sont vraiment prêts à tout !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Enfin, il est également prévu de supprimer temporairement, par voie d’amendement, la taxe de 3 % sur les dividendes des sociétés immobilières d’investissement cotées.

M. Charles de Courson. Et l’exit tax ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Comme vous le voyez, nous sommes confrontés à une situation exceptionnelle, puisque non seulement il y a 35 amendements, mais que certains d’entre eux sont extrêmement lourds, leurs conséquences se chiffrant en milliards d’euros.

Dans la mesure où nous découvrons ces amendements, il nous paraît nécessaire de réunir la commission des finances afin de les examiner – je m’en excuse auprès de nos collègues qui ne font pas partie de la commission, mais ils sont les bienvenus s’ils souhaitent nous rejoindre. J’espère que le rapporteur général sera en mesure de répondre aux questions qui ne manqueront pas de se poser, et que M. le ministre sera également disposé à ce que la commission l’entende sur certains points.

M. Hervé Mariton. Eh oui !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Sur des sujets aussi importants, il me paraît indispensable que nous fassions notre travail dans les meilleures conditions.

Enfin, je ne peux m’associer aux accusations de notre collègue Charles de Courson – sans doute formulées sous l’effet de la colère –, car j’estime qu’il faut prendre garde à ne pas dévaloriser notre propre travail. Si le Gouvernement a de bonnes raisons de soumettre ces amendements, nous sommes dans notre rôle quand nous nous efforçons de faire notre travail correctement, en l’occurrence de prendre le temps nécessaire pour examiner ces amendements.

M. Gérald Darmanin. Bien sûr !

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Madame la présidente, je vous demande donc une suspension de séance afin de réunir la commission des finances.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Comme je l’ai dit tout à l’heure, à l’ouverture de nos débats, je suis d’accord avec la méthode proposée par M. le président de la commission. Je souhaite seulement que la réunion de la commission n’ait pas lieu immédiatement : j’estime qu’il me faut environ une demi-heure pour préparer cette réunion et être en mesure de répondre le mieux possible aux questions qui me seront posées. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme la présidente. Allons, mes chers collègues !

M. Christian Eckert, rapporteur général. Un certain nombre d’amendements, déposés hier soir, ont déjà été étudiés par nos services. En revanche, d’autres nécessitent un complément d’information. Si vous souhaitez que je sois en mesure de répondre à toutes vos questions, j’ai besoin d’une bonne demi-heure de préparation.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. J’ai bien entendu les propos de M. le président de la commission des finances, qui sait faire vibrer, avec un art consommé, la corde du parlementarisme…

M. Hervé Mariton. Il a raison !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. …en donnant l’impression que son seul objectif est de protéger le travail des parlementaires, surtout celui des parlementaires effectuant leur premier mandat, et qui pourraient être impressionnés par son indignation, que je devine sincère.

Je veux tout de même faire quelques rappels à l’intention de ceux qui semblent être sujets à des pertes de mémoire. Le Gouvernement a effectivement déposé 50 amendements sur le projet de loi de finances rectificative de cette année,…

M. Hervé Mariton. Et de taille !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. …ce que certains disent n’avoir jamais vu. Et pourtant, le projet de loi de finances rectificative pour 2009 comportait déjà 50 amendements du Gouvernement, et il y en avait 43 en 2008.

M. Hervé Mariton. C’est la nature des amendements qui nous choque !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Pour ce qui est du projet de loi de finances initiale, le Gouvernement a déposé 98 amendements en 2013, alors que le précédent gouvernement en avait déposé 155 en 2012, et 112 en 2011.

M. Charles de Courson. Mais pas en séance !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il est vrai que les amendements du Gouvernement devaient répondre davantage aux attentes de la majorité de l’époque, ce qui fait qu’elle ne se plaignait pas de leur nombre.

Mme Marie-Christine Dalloz. Ils n’étaient pas déposés au cours du débat !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Si je peux comprendre ces réactions, il me semble nécessaire de ramener à de plus justes proportions l’indignation des uns et des autres.

Certes, nous arrivons au terme d’une année chargée, avec deux campagnes électorales assez rudes, une alternance, des textes difficiles, de nombreuses séances vespérales et nocturnes. Je peux donc comprendre, en ce mois de décembre où tout le monde commence à être un peu fatigué, que certains expriment de l’agacement, même quand il s’agit de parlementaires réputés pour leur sang-froid légendaire. Je pense surtout à Charles de Courson, dont la dernière indignation notable remontait à la législature 1997-2002, alors qu’il était dans l’opposition – je n’ai, en tout cas, pas le souvenir de l’avoir vu s’indigner avec autant de véhémence durant la législature 2007-2012. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Yves Censi. Et votre dernière indignation, elle remonte à quand, monsieur le ministre ?

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Probablement au temps où j’étais dans l’opposition – comme vous aujourd’hui, monsieur Censi. (Sourires.) Et puisque vous souriez, c’est sans doute que vous me comprenez.

M. Yves Censi. Il ne faut pas avoir la mémoire courte !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Pour ce qui est du volume d’amendements, j’espère vous avoir convaincus qu’il n’y avait rien de choquant.

Pour ce qui est de la forme, les amendements ne sont pas déposés au banc du Gouvernement. Je me rappelle avoir vu, alors que j’étais député de l’opposition, le gouvernement de l’époque déposer des amendements au banc, mais ce n’est pas le cas aujourd’hui. Je me souviens également que, durant la précédente législature, le gouvernement avait l’habitude de déposer des amendements au banc durant l’examen des lois de finances – il l’a fait pratiquement chaque année –, des amendements qui n’étaient pas simplement rédactionnels.

Je me rappelle même avoir assisté à une scène très intéressante, alors que je siégeais sur ces bancs en tant que président de la commission des finances : pendant que M. de Courson s’exprimait, une discussion s’est engagée entre la ministre Christine Lagarde et le rapporteur général au sujet du crédit d’impôt recherche, jusqu’à la conclusion d’un accord – peut-être avec les bons offices du président de la commission des finances. Alors que personne ne vous écoutait – et pour cause – je ne me souviens pas de vous avoir vu vous indigner, monsieur de Courson ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Sous toutes les législatures, toutes les majorités, le Gouvernement a toujours pris quelques libertés avec le Parlement, et je ne prétends certes pas qu’il ait eu raison d’agir ainsi, d’autant que mes souvenirs sont en grande partie ceux du député que j’ai été – mais ma mémoire est assez bonne pour que je me souvienne du travail de parlementaire que j’ai accompli dans cet hémicycle.

M. Charles de Courson. Je vais tout de même vous la rafraîchir, la mémoire !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. Il est possible que le Gouvernement ait tort, mais je sollicite l’indulgence du Parlement. Il y a eu une alternance et nous nous retrouvons avec beaucoup de choses à corriger, beaucoup d’améliorations indispensables à apporter. Au regard de l’ampleur de notre tâche consistant à effectuer le redressement – vous conviendrez, monsieur de Courson, que ce n’est pas une tâche simple –, il n’est pas si choquant que le Gouvernement cherche à s’adapter pour mieux faire. Le rejet de la première partie de la loi de finances par le Sénat a également compliqué la situation et, du même coup, alourdi la tâche qui nous incombe. Loin de moi l’idée de reprocher aux sénateurs d’avoir agi comme ils l’ont fait, mais force est de constater que cela crée une situation politique et institutionnelle qu’il nous revient d’assumer…

M. Hervé Mariton. Le Sénat avait ses raisons !

M. Jérôme Cahuzac, ministre délégué. …car le pays a besoin d’un budget – et, actuellement, d’une loi de finances rectificative.

Je comprends très bien que le président de la commission des finances demande la réunion de celle-ci afin que les commissaires puissent examiner les amendements. Je comprends également que le rapporteur général, qui va devoir répondre aux interrogations des parlementaires, sollicite un peu de temps pour se préparer – même s’il connaît déjà les amendements dont il est question, et mesure parfaitement leur impact et leurs conséquences.

Il va de soi, monsieur le président de la commission, que si vous souhaitez que le ministre du budget vienne expliquer certains points, je me tiens évidemment à la disposition des parlementaires : même si je peux avoir d’autres choses à faire, le Parlement est prioritaire, et je viendrai donc bien volontiers.

Je suggère donc que chacun accepte la situation telle qu’elle est, peut-être pas de gaieté de cœur, mais aussi sereinement que possible. La commission va se réunir et va bien travailler – plus qu’une tradition, c’est une obligation – et je viendrai, pour ma part, m’expliquer sur tel ou tel amendement si nécessaire. Ayant le souvenir des travaux de la commission, je sais qu’il est rare que des parlementaires expérimentés aient vraiment besoin du Gouvernement pour comprendre toutes les implications d’un amendement – à moins qu’il ne s’agisse de politiser une situation qui n’est que le résultat d’un calendrier un peu serré, auquel cas la majorité et le Gouvernement ne montreraient pas forcément la même bénévolence que celle dont ils sont disposés à faire preuve pour travailler sereinement et sincèrement.

Le Parlement étant, je ne l’oublie pas, maître de l’organisation de ses travaux, voilà ce que le Gouvernement souhaitait dire aux parlementaires. Étant précisé, une nouvelle fois, que je comprends l’agacement de certains, je sollicite l’indulgence de tous dans la situation particulière où nous nous trouvons. Je suis convaincu que ce texte finira par être examiné en totalité de façon satisfaisante et, je l’espère ardemment, adopté. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme la présidente. Monsieur le président de la commission des finances, pouvez-vous préciser si vous souhaitez une suspension immédiate, ou dans une demi-heure ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. C’est plutôt au rapporteur général qu’il faut poser cette question, madame la présidente. Il y a deux possibilités : soit nous continuons l’examen des amendements à l’exception de ceux du Gouvernement, qui seront réservés – ce serait en l’absence du rapporteur général qui, ayant besoin d’un peu de temps pour étudier les amendements du Gouvernement, devrait se faire remplacer ; soit vous suspendez la séance maintenant, et je réunis la commission d’ici une demi-heure, le temps que le rapporteur général étudie les amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Nous sommes prêts à travailler vite, et je préfère ne pas être remplacé en séance, certains amendements nécessitant que je sois présent pour fournir des explications.

Mme la présidente. Si je comprends bien, vous souhaiteriez que la séance soit suspendue maintenant, avant que M. Carrez ne réunisse la commission des finances. Savez-vous combien de temps durera la réunion, monsieur le président ?

M. Gilles Carrez, président de la commission des finances. Environ une heure, madame la présidente. Je suggère donc que la séance soit levée et qu’elle reprenne vers vingt-deux heures.

Mme la présidente. Nous allons donc suspendre nos travaux et réunir la commission des finances d’ici une demi-heure, monsieur le président de la commission.

La parole est à M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. Puis-je vous rappeler, monsieur le ministre, que vous fûtes président de la commission des finances ? Vous avez toujours reçu mon soutien lorsque vous ne manquiez jamais de protester – tout à fait légitimement – contre de telles pratiques. Dont acte.

Par ailleurs, je fais partie – mais peut-être ne vous en souvenez-vous pas, car vous n’étiez pas encore député à l’époque – des six ou sept… J’ai même voté la motion de censure sous le gouvernement Villepin ; j’ai voté deux fois contre la loi de finances et je me suis abstenu une fois. Connaissez-vous beaucoup de députés de votre majorité qui auraient ce courage ?

Contrairement à ce que vous avez dit, il ne s’agit pas de comparer le nombre d’amendements, mais de constater le nombre d’amendements importants qui sont arrivés en plein débat. Nous en sommes à l’article 12, après des heures de discussion. Je vous mets au défi de prouver que ces 39 amendements, parmi lesquels cinq ou six sont très importants, n’ont pas été déposés alors que nous siégions depuis des heures ! Cela montre l’amateurisme et l’absence de sérieux de cette discussion budgétaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Hetzel.

M. Patrick Hetzel. Évidemment, nous ne sommes pas insensibles aux arguments développés par M. le ministre. Néanmoins, je suis très frappé que l’étude d’impact dont nous disposons soit aussi faible. Par ailleurs, je constate que vous ne mettez pas en œuvre le rapport Gallois et que vous vous situez dans une logique bien différente.

Comme vient de le rappeler M. de Courson, nous nous trouvons dans une situation très inhabituelle. Le rapporteur général lui-même – il l’a dit à l’instant – est obligé de prendre connaissance des amendements faute d’avoir pu le faire précédemment. Cela montre bien que nous sommes dans la précipitation et dans l’impréparation. Tout cela est assez désolant.

De toute évidence, le Parlement n’est pas respecté. Je le dis solennellement ce soir, nous avons besoin de travailler dans de meilleures conditions, d’autant que nous parlons de 20 milliards d’euros, qui pèseront sur l’ensemble de nos concitoyens. Nous ne pouvons pas prendre cela à la légère ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Rassemblement-UMP)

Mme la présidente. C’est bien pour cela que la commission va se réunir.

La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Monsieur le ministre, je me souviens que, président de la commission des finances, vous vous indigniez lorsque le Gouvernement déposait au dernier moment des amendements.

Puisque vous voulez des éléments factuels, en voici un : le 17 novembre 2010, nous avons refusé de voter la seconde délibération que François Baroin, alors ministre du budget, nous avait imposée, car nous estimions inacceptables les conditions dans lesquelles cela s’était passé. Ce que nous avons affirmé était donc fondé.

J’aurais aimé rappeler à notre collègue du groupe RRDP que nous avons déposé, quatre ans durant, de façon méthodique, des amendements visant à instaurer une TVA sociale. Il est complètement faux de dire que nous nous sommes réveillés d’un coup avec la TVA compétitivité.

Enfin, chers collègues de la majorité qui n’avez jamais eu de mots assez durs dans l’opposition pour expliquer que le Parlement était bâillonné et l’initiative parlementaire ignorée, vous nous reprochez de nous indigner, alors que c’est ce que vous n’avez cessé de faire pendant cinq années.

Vous aviez juré qu’il n’y aurait jamais de TVA sociale. Et voilà 0,4 point d’augmentation ! Vous avez menti à la représentation nationale et, pire, à vos électeurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

Mme la présidente. Je vais donc lever la séance pour permettre à la commission des finances de se réunir.

4

Ordre du jour de la prochaine séance

Mme la présidente. Prochaine séance, ce soir, à vingt-deux heures :

Suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2012.

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-huit heures cinquante.)